II. LES DISPOSITIONS TECHNIQUES DE L'AVENANT

A. L'ENTENTE FRANCO-QUÉBÉCOISE DANS LE CADRE DE LA CONVENTION FRANCO-CANADIENNE

L'entente fiscale entre la France et la province du Québec en date du 1 er septembre 1987, qui constitue le seul accord fiscal conclu par la France avec un Etat fédéré, a, en son temps, été autorisée par le gouvernement fédéral canadien, dans le cadre d'une convention franco-canadienne portant sur le même domaine.

Ainsi, la convention fiscale tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée le 2 mai 1975, qui lie déjà la France et le Canada, stipule, dans son article 29, que « la France et les provinces du Canada pourront conclure des ententes portant sur toute législation fiscale relevant de la compétence provinciale, pour autant que ces ententes ne soient pas contraires aux dispositions de la présente Convention ».

Cette convention fiscale franco-canadienne a fait l'objet d'un avenant en date du 30 novembre 1995.

Si le Québec bénéficie d'une autonomie sur le plan fiscal, la « loi sur les impôts du Québec » est harmonisée avec le code des impôts canadiens et les principes fondamentaux sont identiques. Dans un souci d'harmonisation, l'entente fiscale franco-canadienne se doit donc d'être actualisée.

Tel est l'objet du présent avenant signé à Paris le 3 septembre 2002, qui reprend les modifications apportées à la convention franco-canadienne.

B. LES PRINCIPAUX POINTS DE L'AVENANT À L'ENTENTE FISCALE FRANCO-QUÉBÉCOISE

1. Titre de l'entente, champ d'application et définitions

L'article 1 er de l'avenant modifie le titre de l'entente qui, outre l'impôt sur le revenu vise désormais aussi l'impôt sur la fortune.

L'article 2 permet d'aligner le champ d'application de l'entente sur celui de la convention en complétant et en actualisant la liste des impôts figurant dans l'entente du 1 er septembre 1987.

Ainsi, la définition des impôts couverts par l'entente est étendue en ce qui concerne la France à la taxe sur les salaires, à l'impôt de solidarité sur la fortune et, pour l'application de certains articles, aux droits de mutation à titre gratuit.

Ce dernier ajout permet de prévoir un dispositif d'élimination de la double imposition des successions suite à la suppression par le Canada et ses provinces des droits de mutation à titre gratuit et de leur remplacement par une taxation sur les plus-values latentes au jour du décès.

L'avenant, par son article 6, assimile à des revenus immobiliers les revenus des parts ou actions conférant à leur détenteur la jouissance de biens immobiliers situés dans une partie contractante, conformément aux dispositions introduites par l'avenant du 30 novembre 1995 à la convention franco-canadienne

2. Bénéfices

Pour l'imposition des bénéfices des entreprises, l'article 7 de l'avenant introduit la possibilité d'imposer les bénéfices d'un établissement stable sur la base d'une répartition des bénéfices totaux de l'entreprise pour autant que cette répartition aboutisse à un résultat conforme aux dispositions de l'article relatif à l'imposition des bénéfices des entreprises. Cette disposition, conforme au modèle de l'OCDE, était rendue nécessaire par la législation canadienne qui prévoit pour l'impôt provincial une répartition forfaitaire des bénéfices entre les provinces du Canada où se situe l'établissement stable.

3. Dividendes

L'article 9, qui traite des dividendes, aligne le régime applicable aux dividendes versés à des sociétés mères sur le modèle de l'OCDE et de la convention franco-canadienne en plafonnant la retenue à la source à 5 % du montant brut du dividende au lieu de 10 % dans le texte actuel. Par ailleurs, il ramène le taux de l'impôt additionnel sur les bénéfices des établissements stables à 5 % au lieu de 10 % actuellement.

Par ailleurs, l'avenant prévoit que les OPCVM québécois bénéficient sous certaines conditions du taux réduit de retenue à la source de 15 % à raison des dividendes de source française qu'ils perçoivent pour la fraction de ces revenus qui correspondent aux droits des résidents du Québec dans ces OPCVM.

Il prévoit en outre une exonération de retenue à la source en France pour les dividendes versés par des sociétés distributrices résidentes de France à des fonds de pension du Québec sous certaines conditions.

L'avenant prévoit le transfert de l'avoir fiscal aux résidents du Québec par référence aux dispositions de la convention fiscale franco-canadienne en la matière. En effet, un résident du Québec est un résident du Canada et a donc droit à ce titre depuis le 1er janvier 1999 au transfert de l'avoir fiscal en application de la convention franco-canadienne modifiée.

Ce transfert ne sera bien entendu possible que dans la mesure où les résidents de France bénéficient de l'avoir fiscal. Les résidents du Canada et/ou du Québec cesseront donc de pouvoir en bénéficier à raison des dividendes reçus à compter du 1 er janvier 2004 s'agissant des personnes morales et à compter du 1 er janvier 2005 pour les personnes physiques (article 94 de la loi de finances pour 2004).

4. Intérêts

En matière d'intérêts, qui font l'objet de l'article 10, l'avenant rappelle le principe de taxation exclusive à la résidence. C'est en effet, au niveau fédéral, côté canadien, qu'une retenue à la source conventionnelle de 10 % maximum est prélevée. La Province du Québec ne saurait pour sa part imposer également à la source ces revenus.

5. Redevances

L'article 11 de l'avenant traite des redevances. Il étend l'exonération de retenue à la source sur les redevances au titre des droits d'auteur aux redevances pour l'usage ou la concession de l'usage de logiciels d'ordinateurs ainsi que des brevets et en ce qui concerne la communication d'informations dans le domaine industriel, commercial ou scientifique qui figure dans la convention franco-canadienne.

6. Rémunérations publiques

L'article 16 de l'avenant modifie le régime d'imposition des rémunérations publiques.

La disposition actuelle prévoit un principe d'imposition exclusive des rémunérations publiques dans l'Etat qui paie ces rémunérations.

Toutefois, des exceptions à ce principe sont prévues : si le bénéficiaire de la rémunération possède la nationalité de l'Etat où l'activité est exercée, ou s'il est devenu un résident de cet Etat à d'autres fins que de rendre les services (cas d'un français résident du Québec antérieurement à son recrutement), les rémunérations sont taxables dans l'Etat où l'activité est exercée.

L'avenant modifie ces exceptions en prévoyant désormais que seuls les agents possédant exclusivement la nationalité de l'Etat d'activité sont taxables dans cet Etat.

Il s'ensuit que dans le cas d'un « double national », français et canadien, ses rémunérations publiques de source française deviennent exclusivement taxables en France (alors qu'elles font l'objet d'une imposition partagée à l'heure actuelle du fait de la double nationalité de leur bénéficiaire).

De même les recrutés locaux rémunérés sur fonds publics qui étaient déjà des résidents du Québec avant leur recrutement, sont désormais imposables exclusivement en France dès lors qu'ils possèdent la nationalité française (alors qu'actuellement ils sont imposables au Québec du fait de leur présence sur le territoire québécois antérieurement à leur recrutement).

7. Elimination de la double imposition

L'avenant, par son article 19, modifie la méthode d'élimination de la double imposition du côté français.

D'une part, il généralise, conformément à la convention franco-canadienne et à la pratique française introduite dans les conventions les plus récentes, la méthode de l'imputation, à l'exception des revenus exonérés d'impôt sur les sociétés en application de la législation interne française. Il est précisé que les dividendes, intérêts et redevances ne font pas partie des revenus pour lesquels la France impute l'impôt québécois sur le montant de l'impôt français dès lors que le Québec n'a pas le droit d'imposer ces revenus en tant que partie de la source et en application de sa législation interne.

D'autre part, l'avenant prévoit, lorsque le défunt était résident de France, l'imputation sur les droits de mutation à titre gratuit français déterminés conformément au droit interne, d'un crédit d'impôt égal à l'impôt sur le revenu québécois correspondant aux gains qui sont taxables dans cet Etat en application de l'article relatif aux plus-values de l'entente.

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