C. UN RENFORCEMENT EFFECTIF DES DROITS DU PARLEMENT

Votre commission a cherché à conforter les prérogatives reconnues au Parlement.

1. L'assurance d'un ordre du jour réellement réservé au Parlement

Les dispositions nouvelles proposées par l'article 22 (article 48 de la Constitution) pour l'ordre du jour apparaissent au premier abord très favorables au Parlement puisqu'elles lui réservent deux semaines sur quatre (dont une pour le contrôle). Cependant, le principe ainsi affirmé est d'une portée très relative puisque l'ordre du jour réservé pourrait faire l'objet de nombreux empiètements de la part du Gouvernement -qui y inscrirait par priorité les projets de loi de finances, de financement de la sécurité sociale, les projets relatifs aux états d'urgence... ainsi que les textes transmis par l'autre assemblée depuis six semaines au plus- au risque de se voir réduit comme peau de chagrin.

Votre commission a marqué sa préférence pour un système apparemment moins favorable -puisque une semaine sur trois seulement serait réservée au Parlement- mais en fait plus protecteur dans la mesure où cette semaine serait « sanctuarisée » : chaque assemblée y inscrirait les textes ou les débats de son choix, y compris d'ailleurs à l'initiative du Gouvernement, à la condition cependant -et ce point fait la différence avec le système adopté par l'Assemblée nationale- qu'elles l'acceptent.

Votre commission propose également que la Constitution pose le principe d'un programme établi par le Gouvernement afin de mieux éclairer l'horizon du travail parlementaire.

Le dispositif proposé concilierait la souplesse (le nombre de semaines respectives du Gouvernement et du Parlement serait globalisé sur l'année puis réparti en fonction du programme déterminé par le Gouvernement après consultation de chaque assemblée), les exigences de l'action gouvernementale (priorité sur l'organisation du calendrier -deux semaines sur trois pour la mise en oeuvre des projets de loi- faculté d'obtenir au surplus, mais avec l'accord des assemblées, l'inscription de textes sur leur ordre du jour réservé) et enfin les droits du Parlement avec l'assurance de maîtriser entièrement son ordre du jour dans le cadre de ses semaines réservées.

2. La valorisation du travail en commission et du débat en séance publique

Les dispositions des articles 16 (article 42 de la Constitution) -discussion en séance publique sur le texte de la commission- et 18 -exercice du droit d'amendement en commission ou en séance publique- permettraient à des titres différents de valoriser à la fois la discussion en séance publique et le travail de fond en commission.

D'une part, l'examen en séance publique sur la base du texte de la commission permettrait de dégager la séance publique de la discussion d'un grand nombre d'amendements formels ou techniques habituellement présentés par les commissions et de recentrer les débats sur les véritables enjeux de chaque texte.

D'autre part, la faculté de présenter des amendements en commission permettrait de réserver le débat en séance publique aux textes qui ne peuvent pas faire l'objet d'une procédure simplifiée.

Ainsi, ces deux dispositions répondent parfaitement au souci du groupe de réflexion sur l'institution sénatoriale d' « alléger, de moderniser et de dynamiser le débat en séance publique afin de le rendre plus vivant, plus interactif, plus attractif » en écho au voeu formé à plusieurs reprises par le Président du Sénat de « rendre le débat parlementaire plus lisible ou plus visible ».

Allongement des délais entre dépôt ou transmission et examen en séance publique

L'examen sur la base du texte de la commission en séance publique implique que le Parlement dispose de délais suffisants entre le dépôt ou la transmission d'un texte et son examen par l'assemblée. Le Gouvernement en a pris la mesure puisqu'il a proposé de fixer des délais, allongés par l'Assemblée nationale mais cependant inférieurs aux propositions formulées par le « Comité Balladur ».

Ces délais sont essentiels : la commission doit disposer du temps nécessaire pour élaborer ses conclusions ; surtout, ces conclusions devraient être portées à la connaissance des parlementaires non membres de la commission ainsi que du Gouvernement suffisamment à l'avance pour leur permettre d'élaborer les amendements dans des conditions satisfaisantes. Ainsi, alors que la commission adopte aujourd'hui, généralement, son rapport dans la semaine précédant l'examen en séance publique du texte dont elle est saisie, elle devrait désormais se réunir au moins deux semaines avant le débat en formation plénière. Aussi, votre commission vous propose-t-elle de porter les délais entre le dépôt d'un texte et son examen de six semaines à deux mois et ceux séparant la transmission et l'examen devant la seconde assemblée saisie de trois semaines à cinq semaines.

Respect des délais pour les textes faisant l'objet d'une procédure accélérée - exceptions en cas d'urgence

Votre commission estime par ailleurs injustifiée la possibilité de déroger aux délais lorsqu'un texte fait l'objet d'une « procédure accélérée » -nouvelle dénomination de la « déclaration d'urgence ». En effet, la procédure accélérée limite l'examen d'un texte à une lecture devant chaque assemblée avant l'éventuelle commission mixte paritaire, ce qui rend encore plus nécessaire le respect des nouveaux délais constitutionnels.

Ces délais ne doivent cependant pas faire obstacle à l'inscription rapide à l'ordre du jour de textes qui répondent à des situations urgentes -notion qui, contrairement à l'acceptation de ce terme dans le texte actuel de la Constitution recouvrerait ainsi sa vraie portée. Dans ce cas, votre commission propose que le Gouvernement, après consultation de la Conférence des présidents, puissent prévoir des délais inférieurs à ceux fixés par la Constitution.

Ces dérogations devraient présenter un caractère exceptionnel.

Suppression du principe de la publicité pour les auditions des commissions

Votre commission a également entendu préserver la spécificité du travail en commission en supprimant l'article 10 bis (article 33 de la Constitution) introduit par le projet de loi constitutionnelle afin que la publicité des auditions de la commission, toujours possible, ne devienne pas le principe. Une publicité systématique pourrait en effet entraver la liberté des échanges qui constitue l'un des principaux atouts des commissions.

Renvoi des textes aux commissions permanentes

Elle a par ailleurs modifié de manière symbolique la présentation de l'article 43 de la Constitution (article 17 du projet de loi constitutionnelle) en prenant pour principe, en accord avec la pratique de la V e République, qu'un projet de loi ou une proposition de loi est renvoyé à une commission permanente et non à une commission spéciale.

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