5. Refondre les règles en matière de plan de sauvegarde de l'emploi (PSE)

L' article 13 , transcrivant les dispositions de l'article 20 de l'Ani, réforme les règles en matière de plan de sauvegarde de l'emploi (PSE).

Il introduit la possibilité de conclure un accord d'entreprise « majoritaire » pour définir le contenu du plan.

Il simplifie les délais de consultation du comité d'entreprise, et renforce les prérogatives de l'administration du travail, qui doit désormais valider les accords PSE ou homologuer les documents unilatéraux de l'employeur.

Il tient compte des spécificités des redressements et liquidations judiciaires.

Enfin, il confère au juge administratif la compétence de contrôler ces nouvelles décisions administratives relatives à l'aspect collectif du licenciement économique (procédure et PSE), tout en conservant la compétence du juge prud'homal pour les litiges individuels des salariés licenciés pour motif économique.

Reprenant les dispositions des articles 21 et 23 de l'Ani, l' article 15 pondère les critères d'ordre des licenciements collectifs et aménage la durée du congé de reclassement.

a) Ouvrir la faculté de conclure un accord collectif sur le contenu du PSE

Le projet de loi permet la conclusion d'un accord collectif « PSE » .

Cet accord doit fixer le contenu du PSE . Son volet facultatif comprend notamment les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise, le nombre de licenciements prévus et les catégories professionnelles concernées, la pondération et le périmètre d'application des critères de licenciement, le calendrier des licenciements ou encore les modalités de mise en oeuvre des mesures d'adaptation et de reclassement des salariés.

L'accord ne peut être que majoritaire : il doit être signé avec une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés lors du premier tour de l'élection des titulaires au comité d'entreprise (ou de la délégation unique du personnel ou des délégués du personnel). Les règles de validité sont donc similaires à celles exigées pour les accords de maintien de l'emploi.

Les délégués syndicaux peuvent être aidés par des experts-comptables désignés par le comité d'entreprise.

L'employeur conserve néanmoins la possibilité de fixer de manière unilatérale le PSE après la dernière réunion du CE. En effet, le projet de loi initial n'oblige pas l'employeur à engager des négociations avec les délégués syndicaux en vue de la conclusion d'un accord PSE. Il n'existe d'ailleurs aucune obligation de signer un procès-verbal de désaccord avant de recourir au document unilatéral de l'employeur. Par défaut, les matières du volet « facultatif » de l'accord PSE doivent être fixées par l'employeur.

Le projet de loi initial conserve également la possibilité de conclure un accord de méthode, mais en réduit le contenu.

Au final, le projet de loi promeut une grande souplesse dans les règles d'élaboration du PSE et des mesures annexes, et autorise des combinaisons entre accords de méthode, accords PSE et documents unilatéraux de l'employeur.

b) Améliorer le contenu du PSE

L'employeur définit seul aujourd'hui les critères pour l'ordre des licenciements pour motif économique , après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. Ces critères prennent notamment en compte les charges de famille, l'ancienneté du salarié ou ses qualités professionnelles appréciées par catégorie.

La Cour de cassation a constamment jugé depuis 1997 que l'employeur peut privilégier un de ces critères , en particulier celui des qualités professionnelles, à condition de tenir compte de l'ensemble des autres critères prévus par le code du travail.

L' article 15 du projet de loi entérine cette solution jurisprudentielle.

En outre, afin de donner plus de souplesse et d'attractivité au congé de reclassement , sa durée passe de 9 mois à 1 an et sa date de fin n'est plus fixe mais glissante , grâce à la suspension du congé en cas de conclusion d'un CDD ou d'un contrat de travail intérimaire que propose ce même article 15.

c) Simplifier les délais de consultation du comité d'entreprise sur le PSE

Le projet de loi simplifie en premier lieu l'articulation entre la consultation du comité d'entreprise au titre de son droit à l'information sur la « bonne marche de l'entreprise » lors d'un « projet de restructuration et de compression des effectifs » (L. 2323-15 du code du travail) et la consultation spécifique sur un projet de licenciement collectif précis (L. 1233-30 du même code).

Désormais, les délais sont globalisés et débutent avec la première réunion du CE au titre de l'article L. 2323-15 et doivent prendre fin deux, trois ou quatre mois plus tard selon l'ampleur du licenciement projeté (moins de 100, entre 100 et 250, plus de 250 salariés).

Alors que le droit en vigueur prévoyait seulement deux réunions obligatoires du CE (ou trois en cas de recours à un expert) sur le fondement de l'article L. 1233-30, le projet de loi ouvre la voie à un plus grand nombre de réunions pour affiner le contenu du PSE et des mesures annexes.

A l'issue de la première réunion du CE, l'entreprise doit indiquer à l'administration si elle envisage d'ouvrir une négociation en vue de conclure un « accord PSE ».

En second lieu, il précise les délais fixés à l'expert-comptable mandaté par le CE.

L'expert doit demander à l'employeur, au plus tard dans les vingt et un jours à compter de sa désignation, toutes les informations qu'il juge nécessaires à la réalisation de sa mission. L'employeur de son côté dispose de quinze jours pour répondre à cette demande. Quant à l'expert, il doit présenter son rapport au plus tard quinze jours avant la dernière réunion du CE.

Les mêmes règles s'appliquent à l'expert désigné par le CHSCT dans le cadre d'un projet de restructuration et de compression des effectifs.

d) Renforcer les pouvoirs des Direccte

Les services compétents de la Direccte auront la tâche de valider les accords collectifs PSE dans les huit jours suivant leur réception, et d'homologuer les documents unilatéraux de l'employeur dans un délai de vingt et un jours.

Ces deux délais sont ramenés à huit jours en cas de redressement judiciaire et à quatre jours en cas de liquidation judiciaire.

L'administration contrôlera la régularité de l'accord , de la procédure d'information et de consultation du CE et la consistance du PSE . Elle ne se prononcera donc pas sur le bien-fondé du motif du licenciement, sur sa cause réelle et sérieuse.

Pour les documents unilatéraux de l'employeur, le contrôle de l'administration sera plus poussé, car elle devra tenir compte des moyens dont dispose l'entreprise et des efforts déployés.

Tout licenciement prononcé avant même d'avoir reçu la réponse de l'administration, ou en cas de décision négative de validation ou d'homologation, entraîne la nullité de la procédure de licenciement collectif économique.

Le silence de l'administration pendant les délais prévus pour les demandes de validation et d'homologation vaut acceptation .

Plus généralement, l'administration peut intervenir à tout moment en cours de procédure pour faire des observations à l'employeur sur la procédure et les mesures sociales prévues ; elle peut présenter des propositions pour améliorer le PSE et elle se voit attribuer un pouvoir d' injonction avant la transmission de la demande de validation ou d'homologation.

e) Donner la compétence au juge administratif pour connaître des recours contre les décisions des Direccte

Les décisions de validation ou d'homologation de l'administration sont des actes administratifs unilatéraux faisant grief (à l'employeur, aux salariés, aux institutions représentatives du personnel, aux délégués syndicaux), contrairement aux lettres d'observation actuelles et aux constats de carence 9 ( * ) .

Le projet de loi en tire les conséquences et il revient désormais au juge administratif de connaître des contentieux contre les décisions, explicites ou implicites, de validation/homologation des PSE. La compétence du tribunal de grande instance est donc supprimée en matière de PSE.

Le texte impose des délais de jugement strictement encadrés . Le recours doit être présenté dans un délai de deux mois devant le tribunal administratif, le juge devant rendre sa décision dans les trois mois. A l'issue de ce délai, s'il ne s'est pas prononcé ou en cas d'appel, le litige est porté devant la cour administrative d'appel qui statue également dans un délai de trois mois. Si la cour ne s'est pas prononcée dans ce délai ou en cas de pourvoi en cassation, l'affaire est portée devant le Conseil d'État.

Toute personne ayant un intérêt à agir pourra également saisir le juge administratif en référé (référé-suspension et référé-liberté notamment).

Enfin, tout salarié conserve la possibilité de saisir le juge prud'homal en cas de litige individuel lié à son licenciement pour motif économique, et notamment pour contester son caractère réel et sérieux.


* 9 Ces constats de carence sont d'ailleurs abrogés par le paragraphe XIX de l'article 13 du projet de loi.

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