III. LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE ET LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

A. LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE

• Chapitre I er « créer de nouveaux droits pour les salariés »

L' article 1 er n'a pas été modifié substantiellement. L'Assemblée nationale a renforcé les droits des salariés, notamment en termes d'information. Elle a précisé que la conformité des contrats collectifs au contrat-socle ou minimal sera évaluée par catégorie de garanties. Elle a demandé aux négociations de branche de déterminer les cas de dispense d'affiliation pour les ayants droit des salariés, et pas seulement pour ces derniers. Elle a ajouté que les contrats collectifs d'entreprise devront respecter les critères des contrats responsables et solidaires.

L'Assemblée nationale a également renforcé les exigences de transparence, d'impartialité et d'égalité de traitement lorsque les partenaires sociaux décident de recommander ou de désigner un ou des organismes assureurs dans l'accord de branche :

- elle a approfondi les conditions de mise en concurrence ;

- elle a mis sur un pied d'égalité les mutuelles, les sociétés d'assurance et les institutions de prévoyance, en élargissant à ces deux premières catégories d'organismes la possibilité de maintenir les prestations en cas de défaut de paiement de la cotisation par l'entreprise, lorsque le contrat résulte d'une obligation prévue par un accord de branche. Les sociétés d'assurance pourront, en outre, mettre en oeuvre une action sociale au profit de leurs assurés à l'instar des mutuelles et des institutions de prévoyance.

Enfin, l'Assemblée nationale a pris en compte la situation spécifique des salariés relevant du régime local d'assurance maladie complémentaire d' Alsace-Moselle : les négociations de branche et le décret fixant la couverture minimale prévoiront les « adaptations » nécessaires.

Après l'article 1 er , l'Assemblée nationale a inséré trois articles additionnels demandant la présentation de rapports par le Gouvernement au Parlement. Ils portent respectivement sur :

- les aides accordées au financement des contrats de complémentaire santé et la fiscalité de ces contrats ( article 1 er bis ) ;

- l'articulation entre le régime local d'Alsace-Moselle et la généralisation de la complémentaire santé en entreprise ( article 1 er ter ) ;

- le maintien des couvertures santé et prévoyance en cas de liquidation judiciaire de l'entreprise ( article 1 er quater ).

L' article 2 a été considérablement enrichi par les travaux de l'Assemblée nationale. Les principes sur lesquels le compte personnel de formation sera bâti, présents dans l'Ani, ont été détaillés : comptabilisation en heures, financement de formations individuelles, accord exprès de son titulaire pour tout débit effectué, appui du service public de l'orientation à tout projet d'utilisation. Son financement a été précisé : il comprendra, outre les droits au titre du Dif, des abondements complémentaires, principalement de l'Etat ou des régions, pour favoriser l'accès à la qualification des personnes qui en sont dépourvues. La concertation entre les partenaires sociaux, l'Etat et les régions sur sa mise en oeuvre devra débuter avant le 1 er juillet 2013, tandis qu'avant le 1 er janvier 2014 le Parlement devra avoir été informé sur ses modalités de fonctionnement et les conditions de sa substitution au Dif.

Un amendement présenté par les députés membres du groupe de la gauche démocrate et républicaine a été adopté afin de prévoir que la stratégie nationale relative à la formation professionnelle tout au long de la vie comporte un volet consacré aux personnes en situation de handicap.

Le conseil en évolution professionnelle a, quant à lui, été recentré sur l'amélioration de la qualification des salariés qui en bénéficient et leur progression professionnelle, sans que le compte personnel de formation ait à être mobilisé pour y recourir.

Sur l' article 3 , qui crée la période de mobilité volontaire sécurisée, plusieurs précisions ont été apportées au projet de loi initial, sans remettre en cause le dispositif :

- le retour anticipé du salarié, selon les modalités fixées par l'avenant à son contrat de travail, devra intervenir dans un délai raisonnable ;

- le salarié pourra faire part à son employeur au cours de sa mobilité de sa volonté de ne pas réintégrer son entreprise d'origine ;

- le comité d'entreprise sera informé par l'employeur semestriellement des demandes de période de mobilité volontaire sécurisée qu'il a reçues et des suites qu'il leur a données.

Destiné à transposer l'article 10 de l'Ani, un article 3 bis a été inséré à l'initiative du rapporteur de l'Assemblée nationale. Il prévoit que :

- les commissions d'information et d'aide au logement , présentes dans les entreprises d'au moins trois cents salariés, prennent en compte la problématique de l'accès au logement lors de la première embauche ou dans le cadre d'une mobilité organisée par l'entreprise ;

- la priorité accordée à certains salariés sera élargie aux jeunes de moins de trente ans, aux salariés en mobilité professionnelle et à ceux qui connaissent une situation de précarité en ce qui concerne leur logement.

L' article 4 , relatif à l'amélioration de l'information et des procédures de consultation des institutions représentatives du personnel, a connu plusieurs modifications importantes qui renforcent les prérogatives reconnues aux IRP.

La consultation du comité d'entreprise sur les orientations stratégiques de l'entreprise lui permettra de proposer des orientations alternatives, auxquelles le conseil d'administration ou de surveillance devra faire une réponse argumentée. Le financement de l'expertise, dans ce cas précis, pourra être pris en charge par le comité d'entreprise à hauteur de 20 % de son budget de fonctionnement, comme convenu dans l'Ani, mais dans la limite du tiers de son budget annuel. La consultation du comité d'entreprise sur l'utilisation des sommes perçues au titre du CICE ne pourra pas y être intégrée.

Le contenu de la base de données économiques et sociales a fait l'objet d'un élargissement, en particulier en matière d'informations sociales et environnementales. Elle sera accessible aux délégués du personnel et actualisée régulièrement. Son contenu pourra être enrichi par accord de branche ou d'entreprise.

Les contours de l'instance de coordination des CHSCT ont été redessinés. Son caractère temporaire est réaffirmé et sa composition modifiée afin de trouver un équilibre garantissant la représentation de tous les CHSCT concernés mais assurant, d'un point de vue concret, le fonctionnement de l'instance. Une fois l'expertise unique réalisée, chaque CHSCT rendra son avis, celui de l'instance ne pouvant en aucun cas s'y substituer.

Les dispositions relatives à la participation des salariés aux conseils d'administration ou de surveillance des grandes entreprises, présentes à l' article 5 , n'ont pas été remises en cause. Elles ont au contraire fait l'objet d'adaptations afin que ces représentants des salariés soient véritablement des membres à part entière des organes dans lesquels ils siègeront.

Ainsi, leur nombre, tel que fixé dans la loi, constitue un plancher et non une prescription impérative. L'employeur devra leur donner le temps nécessaire à l'exercice de leurs fonctions et financer, à leur intention, une formation à la gestion des entreprises. Les personnes élues ou désignées pour représenter les salariés bénéficieront de la même protection contre le licenciement que les représentants du personnel dans les IRP ou les élus syndicaux. En cas d'élection, le candidat titulaire et son suppléant ou suivant de liste devront être de sexe différent.

L'entrée en fonction de ces représentants a été avancée par rapport au délai de vingt-six mois fixé par le projet de loi initial, puisqu'elle devra avoir lieu six mois après l'assemblée générale modifiant les statuts de la société, celle-ci devant obligatoirement intervenir en 2014. Enfin, le Gouvernement devra remettre un rapport au Parlement avant le 30 juin 2015 faisant un premier bilan de cette mesure et formulant des propositions en vue de son extension.

• Chapitre II « lutter contre la précarité dans l'emploi et dans l'accès à l'emploi »

L' article 6 , sur les droits rechargeables à l'assurance chômage et l'incitation à conclure un CSP, a été très peu modifié puisque sa mise en oeuvre est conditionnée à une négociation des partenaires sociaux au sein de l'Unédic. Il faut toutefois noter que ce sont, potentiellement, les droits issus de plusieurs périodes antérieures d'indemnisation qui seront préservés et non plus d'une seule période antérieure, comme dans le texte initial.

La portée de l' article 7 , qui concerne la modulation des cotisations dues par les employeurs au titre de l'assurance chômage en cas de recours à certains contrats de travail, a été encadrée dans un souci de ne pas dégrader la situation financière de l'Unédic. Les taux de cotisation devront être fixés de telle sorte que le produit des contributions ne soit pas diminué. Par ailleurs, le Gouvernement devra réaliser, avant le 1 er juillet 2015, un rapport sur l'application de cet article et ses effets sur la diminution de l'emploi précaire.

L' article 8 , réformant les règles applicables au travail à temps partiel, a été modifié afin de mieux protéger les salariés. Les accords de branche permettant de déroger au cadre fixé par la loi, comme par exemple sur la durée minimale d'activité ou la rémunération des heures complémentaires, devront ainsi avoir fait l'objet d'un arrêté ministériel d'extension.

Un article 8 bis a été ajouté par la commission des affaires sociales, demandant au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur l'évaluation des dispositifs relatifs au temps partiel, notamment pour en mesurer l'impact en termes d'égalité professionnelle, d'ici au 1 er janvier 2015.

• Chapitre III « favoriser l'anticipation négociée des mutations économiques pour développer les compétences, maintenir l'emploi et encadrer les licenciements économiques »

L' article 9 , sur la GPEC et son articulation avec d'autres exercices du dialogue social dans l'entreprise relatifs, notamment, à la formation professionnelle, a été amendé afin d'élargir son champ. L'accord conclu au titre de la GPEC définira les objectifs du plan de formation et les publics vers lesquels il sera orienté en priorité. Il examinera également les moyens de diminuer les recours aux contrats courts et de développer l'usage du CDI dans l'entreprise. Enfin, il pourra également porter sur la participation de celle-ci aux actions de GPEC mises en oeuvre à l'échelle des territoires où elle est implantée.

A l' article 10 , la négociation sur la mobilité géographique ou professionnelle interne à l'entreprise a considérablement évolué entre le projet de loi initial et le texte adopté par l'Assemblée nationale. Elle devient facultative et perd sa périodicité triennale. Elle exclut tout projet de réduction d'effectifs, et non simplement les licenciements. Dans les entreprises non soumises à l'obligation de négocier sur la GPEC, elle en constituera l'ébauche.

Le contenu de l'accord de mobilité interne est désormais plus développé, afin de garantir la protection de la vie personnelle et familiale du salarié et de renforcer les mesures d'accompagnement à la mobilité qui incombent à l'employeur, notamment en matière de compensation d'une éventuelle perte de pouvoir d'achat.

Une phase de concertation préalable à la mise en oeuvre de mesures de mobilité est instaurée, tandis que la procédure de recueil de l'accord du salarié est précisée. Le régime de licenciement du salarié refusant l'application de l'accord n'est pas modifié mais des mesures de reclassement, dans un cadre adapté, seront obligatoires.

Enfin, le Gouvernement devra remettre avant le 31 décembre 2015 un rapport dressant le bilan des accords de mobilité conclus.

A l' article 11 , le régime de l'indemnité d'activité partielle a été aligné sur celui des allocations de chômage partiel en matière de taxe sur les salaires, de cotisations de sécurité sociale et d'abattement fiscal. En outre, un rapport est demandé au Gouvernement présentant les propositions pour renforcer l'attractivité du régime de l'activité partielle.

A l' article 12 , de nombreuses garanties ont été apportées aux accords de maintien de l'emploi.

Les « efforts proportionnés » s'imposent aussi bien aux dirigeants salariés qu'aux mandataires sociaux et aux actionnaires.

Le champ d'application de la clause pénale est élargi à tous les engagements de l'employeur compris dans l'accord, et pas seulement à ceux en lien avec le maintien de l'emploi.

L'accord devra prévoir les modalités d'information des salariés quant à son application et à son suivi pendant toute sa durée, ainsi que les modalités de notification au salarié de la modification de son contrat de travail (à défaut, les dispositions de droit commun de l'article L. 1222-6 s'appliquent).

Le réexamen de la décision de suspension de l'accord par le président du TGI nécessite seulement la demande de l'une des parties signataires, et non plus leur demande conjointe.

Enfin, un rapport est demandé au Gouvernement sur l'évaluation des accords de maintien de l'emploi.

A l' article 13 , la réforme des licenciements collectifs a été précisée sur de nombreux points.

L'administration sera informée sans délai de l'ouverture d'une négociation en vue de l'accord PSE, et elle disposera d'un délai de quinze jours pour valider un accord au lieu de huit.

Le seul fait d'ouvrir, avant la première réunion du comité d'entreprise sur le projet de licenciement collectif, une négociation relative à un accord PSE ne peut pas constituer un délit d'entrave.

Le contrôle de la Dirrecte a été doublement élargi. D'une part, elle devra vérifier, lors d'une demande de validation ou d'homologation, la régularité de la procédure d'information et de consultation du CHSCT et de l'instance de coordination le cas échéant, s'ils ont été saisis. D'autre part, lors d'une procédure d'homologation, le rapport éventuel du comité d'entreprise sur l'utilisation de son droit d'alerte concernant l'utilisation du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE), qui a été instauré à l'article 4 du projet de loi, devra lui être communiqué.

Les délais fixés à l'expert-comptable désigné par le comité d'entreprise sont modifiés afin de lui permettre de poser une deuxième série de questions à l'employeur, tandis que les règles fixées pour l'expert désigné par le CHSCT ou la nouvelle instance de coordination ont été simplifiées, car le rapport doit seulement être rendu au plus tard quinze jours avant la fin de la consultation du comité d'entreprise.

A l' article 14 , le comité d'entreprise pourra formuler des propositions lorsqu'il rend un avis sur ces offres de reprise de site. En outre, dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi, un rapport est demandé au Gouvernement, pour présenter le bilan des actions entreprises dans le cadre de la revitalisation des bassins d'emplois, et proposer des pistes d'amélioration.

A l' article 15 , la mention spécifique du critère des qualités professionnelles a été supprimée.

• Chapitre IV «  Dispositions diverses »

A l' article 16 , l'indemnité versée lors de la phase de conciliation prud'homale ne se substituera pas aux indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles auxquelles peut prétendre le salarié. En outre, s'agissant des règles de prescription des actions portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail, l'exception prévue pour les victimes de discrimination a été élargie. Enfin, un amendement a repris une disposition de l'Ani, qui prévoit que les demandes de salaire se prescrivent par 36 mois si elles sont formées en cours d'exécution de contrat, mais que si la demande est formée dans le délai de 24 mois, la période de prescription de 36 mois commence à compter de la rupture du contrat.

A l' article 17 , un amendement a précisé que l'employeur dispose d'un délai d'un an à compter du franchissement du seuil de 50 salariés pour se conformer « complètement » aux obligations récurrentes d'information et de consultation du comité d'entreprise.

A l' article 18 , un amendement du Gouvernement adopté en séance publique est revenu à la rédaction initiale du projet de loi.

Aucun amendement n'a été adopté sur l' article 19 .

Un article additionnel ( article 20 ) a été adopté pour demander un rapport au Gouvernement sur les coûts de l'attribution de la CMU-c aux allocataires de l'AAH, sans conditions de ressources.

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