II. UN PRINCIPE RETENU PAR VOTRE COMMISSION SELON DES MODALITÉS SOUPLES

Votre rapporteur partage l'objectif de l'auteur de la proposition de loi : permettre une gestion déconcentrée des compétences de proximité des intercommunalités en y associant les élus de terrain qui connaissent le mieux les spécificités de leur territoire, les besoins de leurs habitants. Ces données constituent la voie pour conduire un projet communautaire harmonieux et partagé.

De nombreuses intercommunalités se sont d'ailleurs déjà organisées en ce sens en l'état des outils à leur disposition.

A. LA NÉCESSITÉ D'ORGANISER LE PÉRIMÈTRE INTERCOMMUNAL

Chacun s'accorde généralement sur le besoin, pour les grandes communautés, d'adapter à leurs dimensions leur fonctionnement interne et l'exercice de leurs compétences. C'est une exigence démocratique pour associer l'ensemble des élus au projet intercommunal ; c'est une obligation fonctionnelle pour assurer le succès de sa mise en oeuvre.

Certes, le législateur a élaboré au fil du temps divers instruments pour permettre aux collectivités de s'organiser. Dans une note du 30 novembre 2015, le directeur général des collectivités locales rappelle aux préfets, dans le cadre de la révision des schémas départementaux de coopération intercommunale et l'élargissement en résultant de la taille des EPCI, les outils disponibles pour éviter le retour aux communes des compétences abandonnées par les nouvelles intercommunalités (« compétences orphelines »).

Les dispositifs existants pour l'exercice des compétences intercommunales et communales

Le code général des collectivités territoriales recèle divers mécanismes progressivement assouplis pour permettre une large mutualisation au sein du bloc communal.

1. Mise à disposition de services ( art. L. 5211-4-1 )

- des communes au profit de l'EPCI à fiscalité propre en cas de transfert partiel de compétence ;

- de l'EPCI au bénéfice des communes pour l'exercice de leurs compétences dans le cadre d'une bonne organisation des services.

2. Services communs ( art. L. 5211-4-2 )

- entre un EPCI à fiscalité propre et une ou plusieurs de ses communes membres, un ou plusieurs établissements publics rattachés soit à l'EPCI, soit à une ou plusieurs communes ;

- pour l'exercice des fonctions support ou des compétences conservées par les communes.

Un service commun peut ainsi être créé pour gérer sur un périmètre correspondant à l'ancienne communauté fusionnée afin d'éviter la restitution aux communes concernées d'une compétence que la nouvelle intercommunalité ne souhaite pas exercer.

3. Coopération horizontale pour l'exercice d'une même compétence ( art. L. 5111-1-1 )

Convention entre EPCI ou entre leurs communes membres pour la mise en commun de l'instruction des décisions prises par les maires au nom de la commune ou de l'État.

4. Prestation de services ( art. L. 5111-1 )

Convention entre EPCI ou entre leurs communes membres pour la réalisation de prestations de services (sur des services non économiques d'intérêt général).

5. Ententes ( art. L. 5221-1 et L. 5221-2 )

Ententes entre communes, syndicats intercommunaux, EPCI à fiscalité propre ou syndicats mixtes pour traiter d'objets d'utilité communale ou intercommunale compris dans leurs attributions et intéressant tous les co-contractants.

Les participants à l'entente peuvent conventionner pour entreprendre ou conserver à frais communs des ouvrages ou des institutions d'utilité commune.

6. Mise à disposition croisée de services dans le cadre des syndicats mixtes ouverts restreints 4 ( * ) ( art. L. 5721-9 )

Au bénéfice de leurs membres (communes, EPCI, etc.) pour l'exercice de leurs compétences.

De même, les services d'un membre du syndicat peuvent être mis à disposition de celui-ci pour l'exercice de ses compétences.

7. Mise en commun de moyens ( art. L. 5211-4-3 )

Un EPCI à fiscalité propre peut se doter de biens qu'il partage avec ses communes membres, y compris pour l'exercice de compétences non transférées antérieurement.

8. Compétences facultatives ( art. L. 5211-17 et L. 5211-41-3 )

Transfert de compétence non prévu par la loi ou la décision institutive de l'intercommunalité.

Le transfert peut intervenir postérieurement à tout moment sur tout ou partie d'une compétence.

9. Syndicat de communes ( art. L. 5211-5 )

Créé entre communes membres d'un EPCI à fiscalité propre pour exercer ensemble une compétence non retenue par celui-ci.

10. Définition de l'intérêt communautaire ( art. L. 5214-16, L. 5215-20, L. 5216-5 et L. 5217-2 )

Pour déterminer au sein d'une compétence les actions et équipements maintenus au niveau communal et ceux transférés à l'intercommunalité.

Source : à partir d'éléments transmis par la direction générale des collectivités locales

Si l'intérêt communautaire permet d'ajuster les contours de la compétence transférée à l'intercommunalité, il doit reposer sur des critères objectifs écartant les caractères géographiques.

Même s'il permet aisément de distinguer les équipements intercommunaux de ceux relevant des communes, l'intérêt communautaire demeure insuffisant pour territorialiser totalement les compétences de l'EPCI.

En dehors des outils juridiques précédemment rappelés, les élus, en de nombreux points du territoire, se sont attachés à adopter une organisation déconcentrée de l'intercommunalité. Il s'agit ainsi d'associer à la bonne marche du groupement l'ensemble de ses composantes. Certaines, en effet, peuvent se sentir exclues d'un ensemble rassemblant plusieurs dizaines de communes sur des périmètres hétérogènes. Dans ce cas, la réussite du projet intercommunal commande d'adapter finement l'exercice des compétences.

Commissions géographiques, délégation de fonction aux vice-présidents du conseil communautaire, division du territoire intercommunal en pôles, déconcentration des services pour maintenir un service public de qualité à même de résoudre rapidement les difficultés du quotidien..., les initiatives se multiplient.

Une enquête de l'Assemblée des communautés de France (AdCF) et de Mairie-Conseil, conduite en septembre 2016, a recensé les pratiques envisagées dans les communautés XXL 5 ( * ) . Près de 90 % des réponses reçues envisageaient de créer des pôles de proximité par l'intermédiaire de services déconcentrés. C'est le cas de Loire Forez Agglomération (88 communes) et de la communauté de communes Sarrebourg - Moselle Sud (76 communes).

De telles structures existent déjà dans certaines communautés : cinq « pôles de services de proximité » ont été implantés sur le territoire de la nouvelle communauté de communes du Grand Autunois Morvan (54 communes) résultant de la fusion de trois communautés.

L'étude observe que « la fonction de directeur de pôle est généralement pensée comme une interface entre les élus communautaires et municipaux d'une part, et la direction de la communauté d'autre part ».

Parfois, la territorialisation concerne une compétence particulière. C'est la voie choisie par la communauté d'agglomération de Blois pour l'élaboration du plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi).

L'élaboration du PLUi dans la communauté d'agglomération de Blois

Le périmètre intercommunal a été divisé en cinq unités géographiques au sein desquelles se construit le document.

Pour chacune d'entre elles, des conseillers communautaires référents sont le relais entre le conseil communautaire et les élus communaux dont ils se font les interprètes. Ces référents conduisent les travaux du PLUi pour leur circonscription géographique et participent à l'ensemble des réunions d'élaboration du PLUi. Les élus communaux, à raison d'un par commune, participent à ces différents travaux et constituent l'interface entre leur conseil municipal et le conseiller communautaire référent.

Tout au long des différentes phases des chantiers, d'autres élus communaux seront associés à ces travaux en fonction de leur sensibilité et de leur compétence.

Cet exemple illustre l'impérative obligation d'associer les élus - de l'intercommunalité comme de ses communes membres - afin que vive la démocratie locale et soit confortée la cohérence du projet communautaire.


* 4 Les syndicats mixtes ouverts dits restreints sont composés de collectivités territoriales et/ou de leurs groupements.

* 5 Cf. « Les pôles de proximité dans les communautés XXL », www.adcf.org, n° 213, octobre 2016.

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