II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : AFFIRMER LA POSITION DU SÉNAT SUR LA RÉFORME DES ÉTUDES D'IMPACT

Dans le cadre des réflexions préparatoires à l'élaboration de la révision constitutionnelle souhaitée par le Président de la République, notre assemblée a mis en place en son sein un groupe de travail, dont les travaux étaient dirigés par le président Gérard Larcher et dont notre collègue François Pillet était le rapporteur. Votre rapporteur était aussi membre de ce groupe de travail. Parmi les 40 propositions présentées à l'issue des réunions de ce groupe de travail 12 ( * ) , plusieurs concernent les études d'impact.

Alors que le Gouvernement est en train d'élaborer le projet de révision constitutionnelle, votre commission estime que l'examen de cette proposition de loi organique est l'occasion d' affirmer la conception commune du Sénat sur la réforme du dispositif des études d'impact des projets de loi . Le contenu, la qualité et la procédure des études d'impact doivent être améliorés. Une telle réforme suppose des modifications de nature constitutionnelle et organique.

Votre commission a adopté à cette fin sept amendements .

En outre, le renforcement des exigences relatives aux études d'impact est indissociable d'un développement des travaux et des capacités d'expertise et d'évaluation des assemblées , afin notamment d'améliorer l'évaluation de l'application des lois, au regard de leurs objectifs initiaux et de leurs études d'impact. Il s'agirait ainsi de rendre plus effective la mission des assemblées énoncée par l'article 24 de la Constitution depuis la révision constitutionnelle de 2008, selon lequel « le Parlement vote la loi », mais également « contrôle l'action du Gouvernement » et « évalue les politiques publiques ». Tel est d'ailleurs l'objectif de la proposition de loi visant à instituer le Conseil parlementaire d'évaluation des politiques publiques et du bien-être, également présentée par notre collègue Franck Montaugé et examinée parallèlement à la proposition de loi organique.

A. UNE PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE EN DEÇÀ DES EXIGENCES DE RÉFORME DES ÉTUDES D'IMPACT

La proposition de loi organique présentée par notre collègue Franck Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain comporte deux articles.

Premièrement, elle ajoute au contenu des études d'impact une nouvelle « évaluation qualitative » de l'impact des projets de loi au regard des « nouveaux indicateurs de richesse créés par la loi n° 2015-411 du 13 avril 2015 visant à la prise en compte des nouveaux indicateurs de richesse dans la définition des politiques publiques », ladite loi se bornant à exiger la remise chaque année d'un « rapport présentant l'évolution (...) de nouveaux indicateurs de richesse, tels que des indicateurs d'inégalités, de qualité de vie et de développement durable, ainsi qu'une évaluation qualitative ou quantitative de l'impact des principales réformes engagées l'année précédente et l'année en cours et de celles envisagées pour l'année suivante, notamment dans le cadre des lois de finances, au regard de ces indicateurs et de l'évolution du produit intérieur brut ».

Si votre rapporteur partage le point de vue de notre collègue Franck Montaugé quant à l'insuffisance des seuls critères économiques et purement quantitatifs pour apprécier l'impact d'un projet de loi et à l'utilité de recourir à d'autres indicateurs, il s'interroge cependant sur la nature législative de ces dispositions, indépendamment même de leur pertinence et de leur portée dans l'établissement des études d'impact des projets de loi. Il considère qu'elles relèvent davantage de textes d'application. Ceux-ci pourraient prendre en compte la préoccupation inscrite dans cet article, dans le cadre des diverses évaluations que doivent déjà comporter les études d'impact, par exemple en matière de « conséquences (...) sociales et environnementales » des dispositions des projets de loi.

Aussi votre commission a-t-elle supprimé cet article pour ce motif, en adoptant un amendement COM-6 présenté par son rapporteur.

Deuxièmement, la présente proposition de loi organique prévoit que les évaluations incluses dans les études d'impact doivent être « réalisées par des organismes publics indépendants et pluralistes comprenant notamment le Conseil économique, social et environnemental, l'Observatoire français des conjonctures économiques, l'Institut national de la statistique et des études économiques ». Elle ajoute que l'Assemblée nationale et le Sénat, selon des modalités définies par leurs règlements respectifs, « pour réaliser ces évaluations, [pourraient] désigner des universitaires et des personnes qualifiées en fonction de leur compétence par rapport aux domaines du projet de loi ».

S'il paraît utile au Parlement de disposer d'une expertise indépendante sur l'impact des projets de loi, l'esprit de la révision constitutionnelle veut qu'il relève de la responsabilité du Gouvernement d'établir les études d'impact sur ses projets de loi, ainsi que votre rapporteur l'a développé supra .

Dès lors, à l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement COM-9 prévoyant, en complément des évaluations réalisées par le Gouvernement sur ses projets de loi et non en substitution de celles-ci, des évaluations indépendantes, réalisées par des organismes désignés à cet effet, pour renforcer l'objectivité de l'information du Parlement sur l'impact des dispositions envisagées . Ces organismes pourraient être publics, mais aussi privés. Les évaluations ainsi réalisées seraient obligatoirement incluses dans les documents rendant compte de l'étude d'impact. Un décret en Conseil d'État déterminerait la liste et les modalités de désignation des organismes concernés ainsi que les modalités de réalisation des évaluations.


* 12 Le rapport du groupe de travail est consultable à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/presidence_senat/40_propositions_du_groupe_de_travail_du_Senat_sur_la_revision_constitutionnelle.pdf

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