EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE 1er

Interdiction de percevoir
des commissions de mouvement

. Le présent article propose d'interdire la perception de commissions de mouvement, initialement à compter du 1 er janvier 2024. Ces commissions, perçues à l'occasion d'opérations d'achat ou de vente sur le portefeuille de l'investisseur, représentent une double charge pour les épargnants puisqu'elles interviennent en sus des frais de courtage liés à la transaction et portent un risque inhérent de conflit d'intérêts.

Depuis la publication du rapport d'information des rapporteurs et le dépôt de la proposition de loi duquel elle découle, le règlement général de l'Autorité des marchés financiers (AMF) prévoit lui-même d'interdire la perception de ces commissions à compter du 1 er janvier 2026, à l'exception de celles perçues par les véhicules dédiés à l'immobilier et au capital investissement, compte tenu de la faible rotation de ces portefeuilles.

Les rapporteurs ont proposé, par un amendement COM-10, d'aligner strictement la date d'entrée en vigueur et le champ des acteurs visés par le présent article à ceux définis dans le règlement général de l'AMF.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : LES COMMISSIONS DE MOUVEMENT CONSTITUENT UNE « EXCEPTION FRANÇAISE » PRÉJUDICIABLE AUX ÉPARGNANTS

A. LES COMMISSIONS DE MOUVEMENT, UNE DOUBLE CHARGE POUR LES ÉPARGNANTS ET UN RISQUE DE CONFLITS D'INTÉRÊT INHÉRENT À CETTE CATÉGORIE DE FRAIS

Prévues aux articles 319-14 et 321-119 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers (AMF) 4 ( * ) , les commissions de mouvement désignent les commissions perçues , en plus des frais d'intermédiation, à l'occasion d'opérations d'achat ou de vente portant sur le portefeuille de l'épargnant . Spécifiques au marché français de la gestion d'actifs, elles s'ajoutent aux frais ponctuels attachés à l'investissement (frais d'entrée, frais de sortie), aux frais courants (commissions de gestion), aux commissions de surperformance (facultative) ainsi qu'aux frais du support choisi par l'épargnant, dans le cas où la souscription d'un fonds s'opère par le biais d'un produit d'épargne. Il s'agit par exemple des frais de gestion et d'arbitrage dans le cadre d'une assurance vie et des frais de tenue de compte et des droits de garde pour un plan d'épargne en actions (PEA).

Dans leur rapport sur la protection des épargnants 5 ( * ) , les rapporteurs avaient ainsi qualifié les commissions de mouvement de « double charge » pour les épargnants , qui doivent à la fois s'acquitter des frais de courtage liés à la transaction et voir leurs actifs prélevés d'une commission supplémentaire pour la société de gestion ou le dépositaire du fonds.

Les commissions de mouvement représentent environ 500 millions d'euros chaque année , soit 3 % à 4 % des produits d'exploitation des 680 sociétés de gestion de portefeuille agréées en France.

Montant des commissions de mouvement et part
dans les produits d'exploitation des sociétés de gestion

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données figurant dans les « Chiffres clés 2020 de la gestion d'actifs », Autorité des marchés financiers (janvier 2022)

Les commissions de mouvement sont aussi critiquées pour le risque de conflit d'intérêts inhérent à leur fonctionnement : un taux de rotation du portefeuille élevé conduit à la perception d'un montant plus élevé de commissions . Elles sont donc susceptibles d'encourager les gestionnaires à « faire tourner » les actifs plus fréquemment que ce qui aurait pu être strictement nécessaire pour soutenir la performance du portefeuille de l'épargnant.

L'article L. 533-10 du code monétaire et financier impose aux sociétés de gestion de portefeuille de prendre toutes les mesures raisonnables pour prévenir les conflits d'intérêt . De même, les articles L. 214-9 et L. 214-24-3 du même code disposent que les dépositaires et les sociétés de gestion de portefeuille « agissent de manière honnête, loyale, professionnelle, indépendante et dans le seul intérêt » respectivement de l'organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) et des porteurs de parts ou actionnaires de l'OPCVM et du fonds d'investissements alternatifs (FIA) et des porteurs de parts ou actionnaires du FIA. L'AMF exige également que le montant réel des commissions de mouvement soit expressément identifié et communiqué au client annuellement.

Toutefois, ces obligations de portée générale ne sont pas apparues suffisantes pour les rapporteurs pour limiter le risque d'un conflit d'intérêts apparent . Dans leur rapport précité, ils relevaient d'ailleurs que le constat d'un taux de rotation des actifs très élevé et dénué de tout fondement économique et/ou financier avait donné lieu à plusieurs contentieux devant la commission des sanctions de l'AMF 6 ( * ) .

Le risque de conflit d'intérêts et la double-charge que représentaient les commissions de mouvement pour les épargnants les ont donc conduits à proposer d'interdire les commissions de mouvement ( recommandation n° 2 ).

B. L'INTERDICTION DE PERCEVOIR DES COMMISSIONS DE MOUVEMENT À COMPTER DU 1ER JANVIER 2026

Lors de leurs auditions, l'ancien président et l'actuelle présidente de l'AMF, Robert Ophèle et Marie-Anne Barbat-Layani, ont reconnu que la légitimité de ces commissions faisait débat, et ce d'autant plus qu'elles constituent une singularité française au niveau européen.

L'AMF avait ainsi mené des travaux de supervision sur les frais , dans le cadre des priorités énoncées par l'Autorité européenne des marchés financiers (ESMA). Les résultats de ces travaux l'avaient conduite à ouvrir la discussion avec les parties prenantes pour mieux encadrer, voire supprimer, les commissions de mouvement.

Le rapport d'information de la commission des finances sur la protection des épargnants et le dépôt de la présente proposition de loi ont sans nul doute permis à l'AMF de disposer d'un argument supplémentaire pour convaincre les sociétés de gestion de portefeuille de la nécessité d'agir rapidement pour mettre fin à ces frais exceptionnels.

L'arrêté du 16 mai 2022 7 ( * ) a homologué la modification des articles 319-14 et 321-119 du règlement général de l'AMF et la création d'un nouvel article 321-164-1 afin d'interdire aux gérants d'OPCVM et de FIA de bénéficier de commissions de mouvement. Deux exceptions sont prévues, permettant aux sociétés de gestion de portefeuille de continuer à bénéficier de commissions de mouvement à l'occasion d'opérations portant :

- sur des immeubles ainsi que des meubles meublants, biens d'équipement ou biens meubles affectés à ces immeubles et nécessaires au fonctionnement, à l'usage ou à l'exploitation de ces derniers, sur des droits réels portant sur de tels biens et sur des droits détenus en qualité de crédit-preneur afférents à des contrats de crédit-bail portant sur de tels biens ;

- sur des parts ou actions d'entités qui ne sont pas admises aux négociations sur les marchés financiers (non cotés).

L'interdiction de percevoir des commissions de mouvement s'appliquerait à compter du 1 er janvier 2026 .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : L'INTERDICTION DE PERCEVOIR DES COMMISSIONS DE MOUVEMENT À COMPTER DU 1 ER JANVIER 2024

Traduisant la recommandation n° 2 du rapport d'information relatif à la protection des épargnants, le présent article prévoit de supprimer les commissions de mouvement à compter du 1 er janvier 2024 .

Le I du présent article modifie ainsi les articles L. 214-9 et L. 214-24-3 du code monétaire et financier pour :

- interdire la perception de commission de mouvement par le dépositaire de l'organisme de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) ou par la société de gestion de portefeuille à l'occasion des opérations portant sur le portefeuille géré. Cette interdiction doit également s'appliquer aux sociétés ayant reçu délégation pour la gestion de l'OPCVM ( 1° du I du présent article) ;

- interdire la perception de commission de mouvement par le dépositaire du fonds d'investissements alternatifs (FIA) ou par la société de gestion de portefeuille à l'occasion des opérations portant sur le portefeuille géré. Cette interdiction doit également s'appliquer aux sociétés ayant reçu délégation pour la gestion du FIA ( 2° du I du présent article).

Le II du présent article prévoit une entrée en vigueur différée, au 1 er janvier 2024 .

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : SOUS RÉSERVE D'UN AJUSTEMENT DE PÉRIMÈTRE, UN DISPOSITIF BIENVENU EN CE QU'IL EST FAVORABLE À L'ALLÈGEMENT DES FRAIS ET QU'IL MET FIN À UNE « INCONGRUITÉ » FRANÇAISE

Comme développé dans le rapport d'information sur la protection des épargnants, la France se situe dans la moyenne haute des pays de l'Union européenne en matière de niveau de frais, malgré la structuration du marché français et son poids au sein du marché européen. En effet, même si, selon certains acteurs entendus en audition, le marché français de la gestion d'actifs est un « marché très concurrentiel » , les conséquences de cette concurrence sur le niveau des frais applicables demeurent peu visibles, avec des effets significatifs sur les rendements servis aux épargnants à moyen et long terme .

Dans les simulations réalisées dans leur rapport d'information, et avec toutes les réserves méthodologiques énoncées dans ce cadre, les rapporteurs notaient qu'environ 10 % de la performance nette d'un produit d'investissement était captée par les frais au bout de 10 ans, et jusqu'à plus de 50 % au bout de 40 ans.

L'interdiction de la perception des commissions de mouvement s'inscrit dans ce cadre : si ce ne sont pas les frais les plus volumineux, ils constituent une « exception française », critiquée depuis plusieurs années par les autorités de supervision nationale et européenne.

Plus que leur coût total, c'est le principe même de ces commissions qui fait l'objet de critiques , en créant une double charge pour les épargnants, ainsi qu'un risque inhérent de conflit d'intérêts . L'interdiction des commissions de mouvement bénéficiera autant aux détenteurs « directs » de parts d'OPCVM ou de FIA qu'aux épargnants détenant un contrat d'assurance vie avec des unités de compte.

En outre, dans le cadre de ses « visites mystère » 8 ( * ) , l'une des bonnes pratiques identifiées par l'AMF consiste, pour les sociétés de gestion de portefeuille, à mettre en oeuvre une politique tarifaire qui permette au prestataire de tirer l'essentiel de ses revenus des frais de gestion, sans incitation particulière à faire tourner le portefeuille pour percevoir des commissions de mouvement. De fait, pour les sociétés appliquant cette règle, l'effet de l'interdiction des commissions de mouvement sera limité .

Il subsiste toutefois, entre le présent article et les modifications apportées au règlement général de l'AMF, une divergence de périmètre . Dans le règlement, ne sont en effet pas concernés par l'interdiction de percevoir des commissions de mouvement les véhicules dédiés à l'immobilier et au capital-investissement, compte tenu de la faible rotation de leurs portefeuilles et de la nécessité, pour les biens immobiliers, de pouvoir couvrir les droits de mutation à titre onéreux (DMTO).

Dans la mesure où le dispositif serait conservé au niveau législatif, les rapporteurs ont donc proposé, par l'amendement COM-10 , d'aligner les produits et les acteurs visés dans le présent article sur les dispositions du règlement général de l'AMF.

Quant à la date, le présent article prévoit également de la reporter au 1 er janvier 2026 , soit la date prévue dans le règlement général de l'AMF. Ce délai de près de trois ans laissé aux sociétés de gestion de portefeuille se justifierait principalement par la volonté de leur laisser le temps de s'adapter à ces nouvelles règles et de s'assurer qu'elles se traduisent par un gain net pour les investisseurs, et non par une augmentation à due concurrence des frais administratifs.

Enfin, si les rapporteurs se félicitent de la mise en oeuvre de la recommandation n° 2 de leur rapport, avec l'interdiction de percevoir des commissions de mouvement, ils rappellent que d'autres frais ne manquent pas d'interroger . Ainsi en est-il des commissions de surperformance et des rétrocessions, dont l'encadrement pourrait encore être renforcé au niveau européen 9 ( * ) .

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 2

Définition de l'arbitrage en assurance vie

. Le présent article vise à introduire une définition de l'arbitrage et du mandat d'arbitrage dans le code des assurances. Cette disposition doit permettre de procéder à un rapprochement règlementaire entre les produits assurantiels et les autres produits financiers, mais aussi de limiter l'hétérogénéité des pratiques professionnelles. Selon le pôle commun de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et de l'Autorité des marchés financiers (AMF), ces pratiques hétérogènes sont en effet « susceptibles d'entrainer des risques pour les clients ».

Par un amendement COM-11, les rapporteurs ont proposé, outre des corrections techniques, des ajustements visant à s'assurer de la conformité des dispositions du présent article au droit européen. La date d'entrée en vigueur est également décalée de 12 mois à compter de la publication de la présente proposition de loi, afin de laisser le temps aux acteurs de mettre en conformité leurs pratiques aux nouvelles exigences qui leur sont ainsi imposées.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : L'EXISTENCE DE DIVERGENCES RÈGLEMENTAIRES ENTRE LES ASSUREURS ET LES AUTRES INTERMÉDIAIRES FINANCIERS

Dans le cadre de leur rapport d'information sur la protection des épargnants 10 ( * ) , les rapporteurs soulignaient qu'en matière d'information des épargnants sur les frais, une forme de convergence règlementaire a été opérée entre les produits assurantiels et les autres produits financiers. Tel n'est pourtant pas nécessairement le cas dans d'autres domaines.

La persistance de divergences normatives a ainsi été qualifiée de « point de fuite de la protection des épargnants » 11 ( * ) , en ce qu'elle entretient une concurrence règlementaire entre les produits, sans lien avec la performance nette servie aux épargnants. Les rapporteurs avaient principalement retenu deux sujets de divergences règlementaires dans leurs travaux :

- les règles en matière d'encadrement des rémunérations, qui relèvent principalement du droit de l'Union européenne ;

- les règles encadrant les mandats d'arbitrage , qui peuvent être précisées dans le droit national, sous réserve de respecter la règlementation européenne. Elles divergent aujourd'hui entre les assureurs et les sociétés de gestion de portefeuille.

En assurance vie, le mandat d'arbitrage permet au souscripteur ou à l'adhérent du contrat de déléguer à un tiers la possibilité de modifier la répartition des différents supports au sein de son contrat, mais aussi de sélectionner les unités de compte . Le mandat d'arbitrage peut être confié à un assureur ou à une société de gestion de portefeuille. Toutefois, d'un point de vue juridique, l'arbitrage des unités de compte et un mandat de gestion de portefeuille ne sont pas similaires.

En effet, les unités de compte souscrites dans le cadre d'un contrat d'assurance vie ne sont pas des instruments financiers et, par conséquent, le mandat d'arbitrage ne confère aucun droit au souscripteur du contrat sur les actifs sous-jacents aux unités de compte. Dans le cadre d'un mandat de gestion de portefeuille, l'investisseur est au contraire propriétaire des titres dont il a délégué la gestion.

Par conséquent, l'exercice du mandat d'arbitrage dans le cadre de contrats d'assurance vie en unités de compte n'est encadré que par les dispositions générales du mandat prévues par le Code civil . A contrario , pour les sociétés de gestion de portefeuille, l'Autorité des marchés financiers (AMF) leur demande de s'engager à respecter les mêmes règles de bonne conduite 12 ( * ) que celles qui s'appliquent au service de gestion de portefeuille pour le compte de tiers 13 ( * ) .

Le mandat de gestion, contrat écrit sur un support durable , doit mentionner 14 ( * ) :

- l'objectif de gestion , qui doit tenir compte de l'horizon de placement, des objectifs financiers et du profil de l'investisseur ;

- les catégories d'instruments financiers que peut comporter le portefeuille ;

- les modalités d'information du client sur la gestion du portefeuille. Le mandat doit préciser l'ensemble des coûts et des frais à la charge du mandant et le mandataire doit adresser un relevé trimestriel des activités de gestion exercées pour son compte, sauf exceptions ;

- la durée, les modalités de reconduction et de résiliation du contrat.

Outre un rapprochement réglementaire entre les produits assurantiels et les autres produits financiers, définir l'arbitrage et le mandat d'arbitrage en assurance vie permettrait également de limiter l'hétérogénéité des pratiques professionnelles, qui peut être préjudiciable aux épargnants .

C'est pour ces deux raisons que les rapporteurs avaient défendu dans leur rapport, avec la recommandation n° 5 , la nécessité d'inscrire dans la loi une définition spécifique de l'arbitrage en assurance vie .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : DÉFINIR LES MANDATS D'ARBITRAGE DE CONTRATS D'ASSURANCE VIE

Traduisant la recommandation n° 5 du rapport d'information relatif à la protection des épargnants, le présent article introduit une définition de l'arbitrage et du mandat d'arbitrage dans le code des assurances .

Le I du présent article insère à cet effet une section 1 bis au sein du chapitre II du titre III du livre I er du code des assurances, composée de quatre nouveaux articles .

L' article L. 132-27-3 propose une définition spécifique de l'arbitrage en assurance vie : il s'agit d'une opération consistant à modifier la répartition du capital garanti exprimé en unités de compte ou en euros . Il définit également le mandat d'arbitrage , c'est-à-dire le contrat par lequel le souscripteur ou l'adhérent à un contrat d'assurance sur la vie ou de capitalisation, agissant en qualité de mandat, confie à un tiers la faculté d'exercer des arbitrages tels que précédemment définis (II de l'article L. 132-27-3).

Le III de l'article L. 132-27-3 désigne les personnes pouvant exercer l'activité de mandataire , à savoir les distributeurs d'assurance ou les prestataires de services d'investissement. Le IV du même article impose plus précisément à ces mandataires d' exécuter les opérations d'arbitrage conformément aux termes du mandat , y compris l'orientation de gestion.

Cette dernière est définie dans le cadre de la convention conclue en application de l' article L. 132-27-4 . Le mandat d'arbitrage devrait en effet faire l'objet d'une convention écrite, établie sur un support papier ou tout autre support durable , signée par le mandat et par le mandataire. La convention doit également fixer les droits et les obligations des parties tandis qu'un contrôle de la cohérence de l'orientation de gestion choisie par le mandant au regard de ses exigences et de ses besoins pourra être réalisé par le distributeur du contrat. Aux termes de cet article, le mandataire doit également informer le mandant des arbitrages réalisés , sur un support durable et au moins une fois par an, ainsi qu'en cas de résiliation du mandat par l'une ou l'autre des parties.

L' article L. 132-27-5 prévoit que les mandataires auxquels sont confiés un ou plusieurs mandats d'arbitrage appliquent les règles d'information et de conduite définies au titre II du livre V du code des assurances , qui encadre les principes généraux relatifs à l'intermédiation d'assurance (obligation d'immatriculation, conditions d'honorabilité et de capacité professionnelle, etc.).

Enfin, le nouvel article L. 132-27-6 imposerait aux mandataires de souscrire un contrat d'assurance les couvrant contre les conséquences pécuniaires de leur responsabilité civile professionnelle au titre de cette activité, sauf s'ils sont déjà assurés par ailleurs pour celle-ci.

Concernant la date d'entrée en vigueur de ces dispositions, le II du présent article dispose qu' elles s'appliqueraient aux mandats d'arbitrage conclus à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente loi . Pour les mandats confiés aux mandataires avant l'entrée en vigueur de la loi, les mandataires doivent poursuivre leur exécution au mieux des intérêts des mandants.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : DÉFINIR L'ARBITRAGE EN ASSURANCE VIE POUR MIEUX ENCADRER DES PRATIQUES HÉTÉROGÈNES

À l'issue des nouvelles auditions et analyses auxquelles ils ont procédé, les rapporteurs estiment toujours qu'il est nécessaire de prévoir une définition spécifique de l'arbitrage en assurance vie dans le code des assurances. Une telle disposition doit permettre de réduire les divergences règlementaires entre les produits assurantiels et les produits financiers et de limiter l'hétérogénéité des pratiques entre les intermédiaires .

Déjà, en 2015, le pôle commun de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (APCR) et de l'AMF avait alerté sur la nécessité d'harmoniser les conditions d'accès et d'exercice de l'arbitrage, pour « responsabiliser les professionnels » et pour éviter les pratiques hétérogènes , « susceptibles d'entraîner des risques pour les clients » 15 ( * ) .

Les travaux engagés par les deux autorités de supervision les avaient amenées à conclure à la nécessité de définir les notions d'arbitrage et de mandat d'arbitrage en assurance vie, de rendre obligatoire l'établissement d'une convention entre le souscripteur et son mandataire ainsi que d'imposer aux mandataires de répondre à des obligations en matière d'information et de protection des intérêts du mandant et de satisfaire à des conditions d'accès et d'exercice 16 ( * ) .

Ces objectifs sont atteints par le présent article, tel que modifié par l'amendement COM-11 proposé par les rapporteurs. Au-delà de procéder à des ajustements techniques, la réécriture de l'article prévue par cet amendement répond à des exigences de mise en conformité des dispositions au droit européen en excluant les prestataires de services d'investissement du dispositif 17 ( * ) .

L'amendement clarifie également les règles de bonne conduite des mandataires et précise que ces derniers ne peuvent pas accepter de commissions de mouvement, que ce soit à l'occasion de l'investissement, du désinvestissement ou de l'exécution d'arbitrage entre les supports proposés.

Enfin, la date d'entrée en vigueur de ces dispositions est décalée de 12 mois à compter de la publication de la présente proposition de loi. Ce délai doit laisser le temps aux acteurs de mettre en conformité leurs pratiques aux nouvelles exigences imposées par le présent article.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 3

Référencement des produits indiciels

. Le présent article vise à imposer aux distributeurs d'assurance vie et aux gestionnaires de plans d'épargne retraite de présenter, lors de la souscription d'un contrat ou d'un plan, les fonds indiciels cotés disponibles ainsi que le produit d'épargne retraite « public » que l'article 9 de la présente proposition de loi préconise de développer.

Alors qu'ils présentent des performances nettes à moyen et long terme parfois plus élevées que les fonds en gestion active, du fait d'un niveau de frais bien moindre, les fonds indiciels cotés ne sont que trop rarement présentés aux épargnants. Si la gestion passive est moins développée en Europe, le niveau d'exposition à ces produits est particulièrement faible en France.

Pour accroître l'information des épargnants, la transparence sur les produits et la concurrence entre les fonds, il est donc proposé que les fonds indiciels cotés disponibles à la souscription en assurance vie et dans les plans d'épargne retraite soient listés. Ce serait donc une simple obligation de présentation de ces produits aux futurs souscripteurs, et non de souscription.

Par un amendement COM-12, les rapporteurs ont proposé, outre des corrections techniques, de décaler l'entrée en vigueur de cet article au 1 er janvier 2025, afin de laisser le temps aux distributeurs et aux gestionnaires de s'adapter à ces nouvelles exigences et au marché français et européen de développer ses propres fonds indiciels cotés. Un renvoi à un arrêté du ministre chargé de l'économie est également prévu pour déterminer les types de fonds qui devront être listés.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : LA GESTION PASSIVE, ENCORE PEU DÉVELOPPÉE EN FRANCE ET PEU PROPOSÉE AUX ÉPARGNANTS, PRÉSENTE POURTANT UNE PERFORMANCE NETTE GLOBALE FAVORABLE AUX ÉPARGNANTS

A. UNE OBLIGATION DE CONSEIL POUR LES DISTRIBUTEURS DE PRODUITS D'ASSURANCE VIE ET DE PLANS D'ÉPARGNE RETRAITE

Si le marché français se caractérise par un taux d'épargne des ménages parmi les plus élevés d'Europe, il se distingue également par la prédominance du modèle historique de la bancassurance , c'est-à-dire de l'intégration de l'assurance dans l'organisation et dans le modèle d'affaires de la banque. Ce modèle, qui repose sur une relation privilégiée entre l'épargnant et le banquier, a favorisé l'émergence de l'assurance vie, principal véhicule de distribution des fonds français.

Les épargnants français sont, dans ce système, très attachés au conseil, d'autant plus que la règlementation nationale, puis européenne, s'est progressivement étoffée pour mieux encadrer les produits financiers, harmoniser les règles en vigueur et accroître la transparence sur les frais et la performance des produits d'épargne. Dans ce contexte règlementaire de plus en plus dense, il peut être difficile pour les épargnants de trouver la bonne information ou le bon produit .

Le devoir de conseil devient dès lors primordial . Caractérisé au niveau européen pour le secteur assurantiel, dans le cadre de la directive sur la distribution d'assurance (directive DDA 18 ( * ) ), il l'est aussi en droit français.

La directive DDA distingue ainsi trois modalités de conseils . Le premier niveau est obligatoire et repose sur le principe que tout contrat conseillé doit être cohérent avec les besoins et les exigences du client . Les deux autres niveaux sont facultatifs et relèvent, pour le deuxième, d'un service de recommandation personnalisée consistant à expliquer à l'épargnant pourquoi, parmi plusieurs options, un contrat correspond le mieux à ses attentes. Quant au troisième niveau, il autorise l'intermédiaire à se prévaloir de fournir son service de recommandation sur la base d'une analyse impartiale d'un nombre suffisant de contrats sur le marché.

Ces obligations ont été reprises dans le code des assurances. L'article L. 522-3 dispose que l'intermédiaire ou l'entreprise d'assurance fournit au souscripteur ou à l'adhérent éventuel, avant la conclusion de tout contrat, des informations sur les contrats et les stratégies d'investissement proposées , en en soulignant les risques inhérents, l'indication que lui sera ou non remise une évaluation périodique de l'adéquation des produits d'investissement à ses exigences et besoins, ainsi que des informations sur tous les coûts et les frais.

Des exigences similaires s'appliquent aux gestionnaires des plans d'épargne retraite (PER). Ils doivent, aux termes de l'article L. 224-29 du code monétaire et financier (CMF) proposer le plan le plus approprié au regard de la situation du titulaire, de son éducation financière, de son horizon de placement, de son espérance de rendement et de ses besoins de préparation pour sa retraite.

Il y a donc une double obligation de conseil du produit le plus approprié aux besoins de l'épargnant et du produit lui offrant le meilleur rendement par rapport à son profil. Elle se situe au coeur du système français de l'épargne, qui repose sur une relation privilégiée entre l'épargnant et son intermédiaire .

B. LES FONDS INDICIELS COTÉS, DES PRODUITS PERFORMANTS À MOINDRES FRAIS

D'après les données que les rapporteurs avaient recueillies lors des travaux préparatoires à leur rapport d'information relatif à la protection des épargnants 19 ( * ) , peu de conseillers proposent des produits relevant de la gestion passive , c'est-à-dire des fonds ayant vocation à répliquer un indice , parmi lesquels la sous-catégorie la plus connue est celle des fonds indiciels cotés (ETF - exchange traded funds ).

Ces fonds présentent pourtant des avantages pour les épargnants, et notamment la possibilité d'investir dans des portefeuilles diversifiés tout en supportant des frais en moyenne bien moins élevés que les produits relevant de la gestion active. En France, les frais annuels moyens des 92 ETF d'actions recensés en 2019 se sont élevés à 0,36 %, contre 0,95 % pour les fonds d'actions classés en indiciels et 1,68 % pour les fonds d'actions « actifs » 20 ( * ) .

Les frais plus élevés attachés à la gestion active se justifient en théorie par la capacité de ces fonds à « battre le marché » et à offrir un rendement supérieur aux investisseurs en opérant des choix tactiques sur les valeurs investies. A contrario , un fonds indiciel suivra le marché, à la hausse comme à la baisse.

Ces dernières années, la performance nette affichée par les fonds indiciels cotés s'est avérée en moyenne supérieure à la performance nette de portefeuilles en gestion active 21 ( * ) . L'ESMA avait dès lors conclu que la performance brute des fonds en gestion active sur la période 2010-2019, comparée à celle des fonds en gestion passive et des ETF, n'avait pas été suffisamment élevée pour compenser les frais plus importants facturés aux épargnants par les fonds actifs 22 ( * ) . Si, pour 2020, les constats diffèrent légèrement à court-terme, ils demeurent valides sur un horizon d'investissement de moyen terme 23 ( * ) .

Le graphique ci-après reprend les simulations réalisées par les rapporteurs dans le cadre de leur rapport d'information, avec toutes les réserves méthodologiques que cela comporte 24 ( * ) . Les calculs se basent sur le scénario suivant : un versement initial de 5000 euros et des versements mensuels de 100 euros.

Performance nette moyenne, frais courants déduits, des fonds actions
selon leur mode de gestion (moyenne Union européenne)

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des données publiées dans le rapport annuel 2019 sur le coût et la performance des produits d'investissement de détails dans l'Union européenne de l'ESMA

La gestion active et la fourniture d'une prestation de conseil personnalisée ont traditionnellement été conçues comme allant de pair : dès lors, il n'est pas surprenant que la gestion passive demeure peu développée en France et même en Europe continentale, avec des épargnants encore très attachés au conseil. En France, le développement de la gestion passive se heurte également à la prévalence de l'assurance vie , les ETF y occupant, selon l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), une part négligeable , alors même que l'assurance vie est l'un des produits les plus prisés par les épargnants. De même, lors des « visites mystère » 25 ( * ) organisées par l'AMF, aucun conseiller en investissement ou chargé de clientèle en établissement financier n'a proposé de fonds indiciels en gestion passive, cotés ou non.

Pour autant, sans que les chiffres ne puissent être comparés au marché américain, l'Autorité européenne des marchés financiers (ESMA) note tout de même une progression des ETF depuis le deuxième semestre 2019 en Europe, avec un record de collecte en 2021 (plus de 150 milliards d'euros). De plus, dans sa cartographie 2022 des marchés et des risques 26 ( * ) , l'Autorité des marchés financiers (AMF) note un « engouement des particuliers » pour les ETF . Il est dès lors primordial que les intermédiaires, distributeurs et conseillers tiennent compte de cette tendance et guident au mieux les épargnants dans leurs choix.

En effet, à l'instar de l'ensemble des autres produits financiers, les fonds indiciels cotés ne sont dénués ni de risques, ni de critiques. Se posent encore des interrogations, dans la littérature, sur leur gouvernance, sur leurs effets sur la stabilité financière et sur leur liquidité en période de crise. Il revient alors aux distributeurs, aux intermédiaires et aux chargés de clientèle d'exercer leur mission de conseil en proposant les produits les plus adaptés au profil de l'épargnant, à son horizon d'investissement et à ses besoins . Les fonds indiciels cotés représentent un produit parmi d'autres et peuvent faire partie d'un portefeuille équilibré et adapté à chaque situation.

C'est dans ce sens que les rapporteurs ont proposé d' imposer un référencement des fonds indiciels cotés . La recommandation n° 6 de leur rapport n'a donc pas pour objectif de rendre obligatoire la souscription de tels produits, qui peuvent ne pas être adaptés à certains profils, mais de les mettre en avant, pour plus de transparence.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UNE OBLIGATION DE PRÉSENTATION DES FONDS INDICIELS COTÉS DISPONIBLES À LA SOUSCRIPTION DANS LES CONTRATS D'ASSURANCE VIE ET LES PLANS D'ÉPARGNE RETRAITE

Traduisant la recommandation n° 6 du rapport d'information relatif à la protection des épargnants, le présent article prévoit d' imposer aux distributeurs d'assurance vie et aux gestionnaires de plans d'épargne retraite de présenter les fonds indiciels cotés disponibles à la souscription , ainsi que le produit d'épargne retraite « public » prévu à l'article 9 de la présente proposition de loi 27 ( * ) .

Le I du présent article modifie l'article L. 522-3 du code des assurances afin de compléter la liste des informations que doivent présenter les intermédiaires ou l'entreprise d'assurance au souscripteur ou à l'adhérent éventuel , avant la conclusion du contrat d'assurance vie. Figurerait désormais dans ces informations la liste des fonds indiciels cotés dont les parts peuvent constituer les unités de compte du contrat ( 1° du I ). Il est également précisé, par coordination, que la présentation des coûts et des frais du produit doit inclure les frais des fonds indiciels cotés présentés au souscripteur ou à l'adhérent éventuel ( 2° du I ).

Le II du présent article modifie l'article L. 224-29 du code monétaire et financier pour imposer une obligation similaire de présentation des fonds indiciels cotés aux gestionnaires de plans d'épargne retraite (PER) ou aux prestataires habilités à les distribuer . La liste présentée au titulaire éventuel du PER doit inclure le fonds de fonds public prévu à l'article 9 de la présente proposition de loi, et qui constitue une option « publique » de PER, géré par la Caisse des dépôts et consignations.

Pour l'assurance vie comme pour le PER, il est prévu que ne soient listés que les fonds indiciels cotés dont les frais ne dépassent pas un montant maximal fixé par un arrêté du ministre chargé de l'économie .

Le présent article doit entrer en vigueur au 1 er janvier 2024 (III du présent article).

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE OBLIGATION DE PRÉSENTATION CONÇUE COMME UNE PREMIÈRE ÉTAPE POUR DÉVELOPPER LA GESTION PASSIVE, ACCROÎTRE LA TRANSPARENCE DES FRAIS ET FAVORISER LA CONCURRENCE, AU BÉNÉFICE DES ÉPARGNANTS

Les acteurs, superviseurs et administrations entendus en audition ont concédé que les particuliers français demeurent moins exposés aux fonds indiciels cotés que les épargnants d'autres pays européens et que les investisseurs institutionnels. Or, au regard des avantages que peuvent présenter ces fonds, avec une performance nette parfois plus élevée que les fonds en gestion active, il apparait nécessaire d'accroître leur diffusion auprès de l'ensemble des épargnants , dans le cadre des produits qu'ils privilégient, tels que l'assurance vie et les plans d'épargne retraite.

Les rapporteurs rappellent ici leur attachement au devoir de conseil et au rôle des intermédiaires et des gestionnaires en la matière. Les fonds indiciels cotés ne sont pas une « solution miracle » et ne sont pas forcément adaptés à tous les profils et à tous les besoins exprimés par les épargnants. Le conseil doit jouer le rôle qui est le sien pour amener l'épargnant à composer le panier de produits le plus adéquat, en présentant l'ensemble des produits disponibles, y compris ceux qui sont parmi les moins chargés en frais, et donc en commissions. À défaut, les acteurs traditionnels risqueraient d'ailleurs de se voir aussi dépasser par de nouveaux acteurs sur le marché de l'épargne , qui proposeront des produits plus rentables, avec des souscriptions simplifiées.

Présenter une liste des fonds indiciels cotés disponibles à la souscription doit donc participer à une plus grande transparence des produits pour les épargnants et accroître la concurrence sur le marché, pour conduire, in fine, à une baisse généralisée des frais . C'est d'ailleurs la tendance observée sur le marché américain, avec une baisse des frais en gestion passive, mais également en gestion active 28 ( * ) .

Le faible développement de la gestion passive en France conduit toutefois à ce que, pratiquement, il n'existe que peu de produits français ou européens parmi les fonds indiciels cotés . Les grands acteurs sont américains, avec toutefois des fonds qui peuvent répliquer l'évolution des indices boursiers nationaux (ex. français avec le CAC 40) ou européens. Parmi les acteurs européens, Amundi est en situation de quasi-monopole.

Dès lors, la commission a adopté un amendement COM-12 pour décaler l'entrée en vigueur du présent article au 1 er janvier 2025 , afin de laisser le temps aux distributeurs de s'adapter à ces nouvelles exigences et d'encourager au développement de davantage de fonds indiciels cotés par des acteurs français et européens.

Outre une correction légistique, l'amendement COM-12 a également conduit à renvoyer à un arrêté du ministre chargé de l'économie le soin de déterminer les types de fonds qui seraient ensuite listés et présentés aux épargnants . Il n'existe en effet pas de définition des fonds indiciels cotés dans le code monétaire et financier.

En revanche, les rapporteurs ont proposé de supprimer le renvoi à l'arrêté du ministre chargé de l'économie pour fixer un montant maximal de frais au-delà duquel les fonds indiciels ne pourraient pas être listés . En effet, il semble difficile de fixer de manière arbitraire un seuil maximal et les dispositions portées par l'article 4 de la présente proposition de loi permettront de disposer d'une présentation par ordre décroissant de performance nette des produits. Les épargnants pourront donc utiliser ces informations pour choisir au mieux leurs produits. C'est pour cette même raison qu'est supprimé l'alinéa imposant aux distributeurs d'assurance vie de présenter les frais des fonds indiciels cotés. Cette obligation existe déjà à partir du moment où le produit est proposé, et l'accessibilité de ces informations sera renforcée par l'article 4.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 4

Renforcement de la transparence sur les frais
attachés aux produits d'assurance vie et d'épargne retraite

. Dans l'objectif de renforcer la transparence de frais encore trop souvent opaques pour l'épargnant, le présent article propose d'imposer aux entreprises d'assurance la mise en ligne d'un tableau recensant les différents frais attachés aux produits d'assurance vie et d'épargne retraite. Il confie également au Comité consultatif du secteur financier (CCSF) une mission de suivi des pratiques tarifaires des assurances.

Les travaux des rapporteurs ont fait apparaître des possibilités d'approfondissement de cette transparence. En conséquence, la commission a adopté, à leur initiative, un amendement COM-13 de rédaction globale de l'article qui tend à :

- étendre les missions du CCSF au suivi de plusieurs produits financiers ;

- permettre que les informations communiquées au contractant sur l'évolution de la valeur et des frais des contrats d'assurance vie dont les garanties sont exprimées en unités de compte soient établies sur une base pluriannuelle plutôt qu'annuelle, ce qui paraît plus pertinent ;

- rendre plus lisible l'information publiée sur internet relative aux frais et à la performance de ces contrats ;

- et, enfin, harmoniser les obligations d'information entre le code des assurances et le code de la mutualité pour les appliquer aux contrats conclus avec une mutuelle ou une union.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : LA LOI « PACTE » A ENGAGÉ UN MOUVEMENT ENCORE INACHEVÉ DE RENFORCEMENT DE LA TRANSPARENCE DES FRAIS SUR LES CONTRATS D'ASSURANCE VIE ET LES PRODUITS D'ÉPARGNE RETRAITE

A. FACE À LA DIFFICULTÉ DE COMPRÉHENSION DU COÛT COMPLET DE L'ASSURANCE VIE, LA LOI « PACTE » A FORMULÉ DE PREMIÈRES EXIGENCES DE TRANSPARENCE SUR LES FRAIS APPLIQUÉS À CES CONTRATS ET SUR LEUR PERFORMANCE

1. Un coût complet de l'assurance vie difficilement lisible mais élevé

Comme le soulignait le rapport d'information sur la protection des épargnants précité 29 ( * ) , « la structure des coûts pour l'épargnant de la souscription d'un contrat d'assurance vie est particulièrement complexe », en raison du cumul de deux catégories de frais : ceux afférents à la gestion du contrat par l'assureur (frais d'entrée, de gestion du contrat, d'arbitrage...) et ceux qui sont propres au support d'investissement du contrat dès lors que des unités de compte sont souscrites. Pour la seconde catégorie en effet, l'épargnant qui souscrit une unité de compte n'est pas propriétaire des actifs sous-jacents car il s'agit d'un droit de créance sur l'assureur qui investit son épargne dans un organisme de placement collectif (OPC) et s'engage à valoriser l'unité de compte de la valeur de l'actif sous-jacent.

Le rapport, s'appuyant sur les travaux du comité consultatif du secteur financier (CCSF) 30 ( * ) , indiquait également que « le schéma de distribution de la rémunération des différents intermédiaires » demeurait « peu lisible pour l'épargnant non aguerri », du fait de la rétrocession d'une partie des frais de gestion de l'OPC à l'assureur ainsi qu'à l'intermédiaire, et de l'assureur au distributeur.

Schéma de distribution en contrat d'assurance vie

Source : rapport d'information sur la protection des épargnants, à partir du rapport du CCSF de 2021 sur les nouveaux plans d'épargne retraite

Le cumul de ces frais peut représenter un montant important : dans son rapport sur les nouveaux plans d'épargne retraite, le CCSF notait ainsi en 2021 que les frais de gestion cumulés de l'assureur et de la société de gestion, pour un contrat totalement investi en unités de compte sous-jacentes en actions s'élèvent en moyenne à un total annuel de 2,75 %, et sont compris entre 1,3 % et 4,8 %.

2. Les exigences de transparence introduites par la loi « PACTE » sur les contrats d'assurance vie s'inscrivent dans la lignée du droit européen

Les épargnants, qu'ils recherchent des solutions de placement en assurance vie ou qu'ils soient déjà engagés dans un tel contrat, sont confrontés à un manque de transparence , générant d'importantes difficultés de lisibilité quant aux possibilités de transformer le contrat mais aussi quant à son rendement. Alors même qu'il existe depuis la loi n° 2010-1249 de régulation bancaire et financière du 22 octobre 2010 31 ( * ) un Observatoire des tarifs bancaires porté par le CCSF, qui permet une plus grande transparence sur ces tarifs, le niveau des frais prélevés par les assureurs et les intermédiaires ou encore la performance brute et nette du contrat demeuraient jusqu'à récemment particulièrement opaques .

Des évolutions ont toutefois été initiées, d'abord au niveau européen, puis au niveau français. Un document d'informations clés , introduit par un règlement de 2014 32 ( * ) , doit ainsi être remis le plus tôt possible au futur investisseur. Il comporte notamment une partie relative aux frais (coûts directs et indirects, dont les coûts uniques et récurrents, ainsi que le coût total agrégé en termes monétaires et en pourcentage, pour montrer les effets cumulés du coût total sur l'investissement). L'article 29 de la directive dite « DDA » 33 ( * ) prévoit quant à elle la fourniture d'informations avant la souscription du contrat.

L'article 72 de la loi « Pacte » 34 ( * ) a par la suite introduit de nombreuses modifications visant à accroître les exigences de transparence sur les frais appliqués aux contrats d'assurance vie et leur performance.

Celles-ci visent, tout d'abord , en modifiant l'article L. 132-22 du code des assurances, à étendre le champ des informations que les entreprises d'assurance doivent communiquer chaque année au contractant . Elles incluent notamment :

- le rendement garanti moyen et le taux moyen et le taux moyen de la participation aux bénéfices de certains des contrats de même nature ;

- les conditions de possibilité de transformation du contrat - dont il n'était auparavant pas précisé qu'elles étaient communiquées annuellement ;

- et surtout, pour les contrats dont les garanties sont exprimées en unités de compte, les frais prélevés par l'entreprise d'assurance au titre de chaque unité de compte, ainsi que les éventuelles rétrocessions de commission perçues par l'entreprise d'assurance, ses gestionnaires délégués ou encore le dépositaire des actifs du contrat. Ces dispositions s'appliquent également aux différents actifs d'un PER 35 ( * ) .

Elles visent aussi à renforcer la transparence sur le rendement et les frais en amont de la conclusion du contrat, à travers :

- la communication , par le distributeur d'assurance, avant souscription ou adhésion à un contrat dont les garanties sont exprimées en unités de compte, d'une information détaillée précisant, pour chaque unité de compte, la performance brute de frais, la performance nette de frais et les frais prélevés 36 ( * ) , dont les éventuelles rétrocessions de commission . On parle alors d'information « précontractuelle ». L'article 6 de l'arrêté du 26 décembre 2019 37 ( * ) précise le contenu de ces indications, qui doivent être exprimés en pourcentage et présentées sous la forme d'un tableau : les frais prélevés s'entendent ainsi des frais de gestion prélevés sur l'actif en représentation de l'unité de compte ainsi que des frais récurrents prélevés sur le contrat ; doivent être mentionnées les performances brute et nette des frais de gestion ainsi que la performance finale de l'investissement nette des frais de gestion et des frais récurrents ; enfin, doit être précisée la quotité de frais ayant donné lieu à des rétrocessions de commission au profit des intermédiaires d'assurance, des gestionnaires délégués, du dépositaire ou de l'entreprise d'assurance 38 ( * ) . Ces dispositions s'appliquent également aux différents actifs d'un PER 39 ( * ) ;

- la publication, sur le site internet de l'entreprise d'assurance et disponible pendant une durée minimale de cinq ans, du rendement garanti moyen et du taux moyen de la participation aux bénéfices attribué pour chacun de ses contrats d'assurance vie ou de capitalisation 40 ( * ) . Cette publication porte sur les fonds en euros.

B. UNE COMPLEXITÉ EN PARTIE COMPENSÉE PAR LE RENFORCEMENT DE LA TRANSPARENCE SUR LES FRAIS APPLIQUÉS AUX CONTRATS D'ASSURANCE VIE ET AUX PLANS D'ÉPARGNE RETRAITE DANS LE CADRE DE L'ACCORD DE PLACE DU 2 FÉVRIER 2022 ET D'UN ARRÊTÉ DU 24 FÉVRIER 2022

Ces dispositions comportaient toutefois certaines insuffisances, ce pourquoi les rapporteurs avaient proposé la publication, à échéance régulière, d'un comparatif des frais moyens d'assurance vie afin d'informer les épargnants sur le « coût complet » de l'assurance vie 41 ( * ) . Des dispositions de niveaux normatifs variables ont depuis été adoptées, sans remplir encore complètement l'objectif visé.

D'une part, là où il était limité aux épargnants en relation avec un distributeur - puisqu'il n'était fourni qu'avant la souscription du contrat - l'accès à une information sur les frais a été étendu à l'ensemble des épargnants par un accord de Place conclu sous l'égide du ministère de l'économie le 2 février 2022. Dans ce cadre, les banquiers et assureurs se sont engagés à publier sur leur site internet un tableau récapitulatif standard des frais prélevés sur les contrats d'assurance vie et les plans d'épargne retraite . Comprenant une vingtaine de lignes, ce tableau décline les différentes catégories de frais les plus courants, à la fois propres aux contrats (frais sur versement, gestion annuelle, arbitrage, gestion mandatées), mais aussi ceux inhérents aux fonds sous-jacents dans lesquels sont investis les unités de compte. Il se distingue du tableau réglementaire précontractuel introduit en application de l'article L. 522-5 du code des assurances.

D'autre part, un arrêté du 24 février 2022 42 ( * ) modifiant l'article A. 522-1 du code des assurances est venu préciser que devaient être mentionnés, sur le tableau communiqué par le distributeur d'assurance à l'éventuel souscripteur ou adhérent, les frais totaux occasionnés par le contrat.

Dans les deux cas, les frais sont exprimés en pourcentage de l'encours mais pas en euros.

Exemple d'un tableau accessible en ligne, issu de l'accord de Place
du 2 février 2022

Source : site internet d'AXA

C. UNE TRANSPARENCE DES FRAIS QUI RESTE À CONSOLIDER

L'arrêté du 24 février 2022 renvoie seulement à l'information « précontractuelle », c'est-à-dire transmise au potentiel contractant avant adhésion ou souscription, alors que cette information pourrait être publiée sur le site internet de l'assureur et être accessible à tous. L'accord de Place du 2 février 2022 vise bien cet objectif, mais il faut rappeler, d'une part, qu'il est juridiquement non contraignant , et d'autre part, qu'il ne mentionne ni les frais totaux , qui sont donc moins immédiatement accessibles pour l'épargnant, ni leur effet sur le rendement de l'investissement, ni non plus ce rendement lui-même . Il est donc moins lisible que l'information « précontractuelle ».

L'approche « value for money » en assurance

La plupart des personnes entendues par vos rapporteurs ont rappelé qu'il ne fallait pas uniquement se concentrer sur la question des frais mais lui articuler celle du rendement des investissements : si l'inverse peut certes être vrai, des frais faibles peuvent aussi accompagner un rendement médiocre tandis que des frais élevés peuvent aller de pair avec un fort rendement.

Pour faire le choix le plus éclairé possible, les épargnants doivent donc avoir une vision globale, dans la lignée de l'approche dite « value for money », qui vise à privilégier le produit qui présente le meilleur rapport qualité-prix, plus que celui qui présente les frais les plus faibles. Il s'agit d'objectiver l'analyse tant sur le niveau global des frais que sur l'évaluation du rendement net pour le client. L'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles a ainsi publié le 31 octobre 2022 un cadre conceptuel destiné à être utilisé pour mesurer l'intérêt, notamment financier, des produits d'épargne pour le client. Elle invite en particulier à remettre en question la commercialisation des produits chers dont la performance est faible au regard de produits comparables.

Source : commission des finances

Il reste, de ce fait, plus délicat pour l'épargnant de comparer l'ensemble des offres disponibles sur le marché et de décider en pleine connaissance de cause dans quel produit il souhaite placer son argent.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA MISE EN LIGNE D'UN TABLEAU RECENSANT LES FRAIS ATTACHÉS AUX PRODUITS D'ASSURANCE VIE ET D'ÉPARGNE RETRAITE À DES FINS DE SUIVI DE LEUR ÉVOLUTION PAR LE COMITÉ CONSULTATIF DU SECTEUR FINANCIER

Le I du présent article vise à imposer aux entreprises d'assurance de publier annuellement sur leur site internet, et pour une période minimale de cinq ans, un tableau présentant les frais attachés aux contrats d'assurance vie et aux PER qu'elles commercialisent. Ce tableau doit distinguer, d'une part, les frais annuels récurrents prélevés sur le contrat, les frais annuels de gestion prélevés sur l'actif, et leur effet cumulé sur le rendement de l'investissement et, d'autre part, les frais non récurrents. Il complète ainsi l'article L. 132-22 du code des assurances qui prévoit qu'une telle publication ne vise actuellement que le rendement garanti moyen et le taux moyen de la participation aux bénéfices attribué pour chacun des contrats d'assurance vie ou de capitalisation.

Les informations ainsi produites par les différentes entreprises d'assurance permettraient de mieux suivre l'évolution des pratiques tarifaires des entreprises d'assurance.

Le II du présent article confie ce rôle de suivi au CCSF, et modifie pour cela l'article L. 614-1 du code monétaire et financier qui détermine les missions de cette institution, déjà chargée d'étudier les questions relatives aux relations entre les établissements financiers et leurs clientèles et de suivre l'évolution des pratiques des établissements de crédit et des établissements de paiement en matière de tarifs bancaires dans le cadre de l'Observatoire des tarifs bancaires.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : RENFORCER ENCORE DAVANTAGE LE DISPOSITIF DESTINÉ À ASSURER LA TRANSPARENCE DES FRAIS

A. UN « OBSERVATOIRE » AUX COMPÉTENCES ÉLARGIES

Au cours des travaux des rapporteurs, un consensus est apparu quant à l'intérêt de soumettre au regard de ce nouvel « observatoire » non seulement les pratiques tarifaires relatives aux contrats d'assurance vie, mais également celles des compte-titres, des PER individuels, des PEA et des PEA-PME. La commission a donc décidé d'élargir le champ de compétence de cet observatoire à ces produits.

Les rapporteurs, qui dans le rapport d'information avaient envisagé de confier cette mission à l'ACPR 43 ( * ) , avaient, au moment de la rédaction de la proposition de loi, tranché en faveur du CCSF. Le pôle commun AMF-ACPR pouvait également être retenu, en tant que structure mise en place pour surveiller les pratiques commerciales du secteur financier.

À l'issue de leurs travaux, les rapporteurs confirment leur choix de retenir le CCSF en ce qu'il constitue une institution collégiale liée à la Banque de France et qui recueille déjà depuis 2010 l'observatoire des tarifs bancaires 44 ( * ) . Il est apparu plus approprié de lui confier cette mission plutôt qu'au régulateur. Reste qu'évidemment les données de l'ACPR resteront cruciales pour permettre ce travail et que leur bonne utilisation par le CCSF sera essentielle pour aboutir à une réelle transparence et comparabilité des frais et de la performance des produits financiers visés.

B. UN RENFORCEMENT DE L'INFORMATION SUR LES FRAIS ACCESSIBLE AUX ÉPARGNANTS À TOUTES LES ÉTAPES ET Y COMPRIS POUR LES CONTRATS CONCLUS AUPRÈS DE MUTUELLES

Les rapporteurs se félicitent des avancées qu'ont constitué, pour l'épargnant, l'accord de Place et l'arrêté de février 2022, et se permettent de souligner que la saine pression exercée par le rapport d'information publié en octobre 2021 n'y aura sans doute pas été étrangère. Il est toutefois nécessaire d'aller plus loin : le présent article va ainsi dans le bon sens, mais la qualité et la lisibilité de l'information accessible aux épargnants gagnerait encore à être améliorée à toutes les étapes - au cours du contrat, avant sa souscription et pour l'ensemble des épargnants.

Actuellement, l'article L. 132-22 du code des assurances prévoit que l'évolution de la valeur des unités de compte est présentée à l'épargnant sur une base annuelle à compter de la souscription du contrat, ce qui prive l'épargnant qui vient à peine de souscrire un contrat d'une information concernant la performance des unités de compte avant cette souscription. Par ailleurs, la rédaction de cet article limite l'information relative aux frais au « dernier exercice connu » alors qu'une information concernant les frais sur plusieurs années serait plus parlante.

Les rapporteurs ont donc estimé préférable, dans l'information annuelle présentée au contractant, de renseigner tant l'évolution de la valeur des unités de compte que les frais selon une période de référence définie par arrêté et adaptée à chaque information - il pourrait s'agir d'une moyenne annuelle sur les trois ou cinq dernières années. S'agissant de produits dont la valeur et les frais peuvent être fluctuants d'une année à l'autre mais présentant une certaine stabilité sur le moyen terme, l'information fournie serait ainsi plus utile en ce qu'elle permettrait une meilleure comparabilité entre les performances et entre les frais des unités de compte.

Par ailleurs, les rapporteurs ont proposé une nouvelle rédaction visant à préciser la nature du tableau initialement prévu au I du présent article. Serait dès lors obligatoire la publication en ligne du tableau dont la communication est aujourd'hui limitée aux potentiels contractants dans le cadre de l'information préconctractuelle prévue à l'article L. 522-5 du code des assurances. Plus clair que le tableau issu de l'accord de Place du 2 février 2022, il rendrait accessible une information plus lisible à tous les épargnants, tant pour les contrats d'assurance vie dont les garanties sont exprimées en unités de compte que pour les PER individuels.

Le tableau publié en ligne pourrait ainsi prendre une forme comparable à celle, présentée ci-après, de l'annexe à l'article A. 522-1 du code des assurances, en y ajoutant éventuellement une colonne sur la performance pluriannuelle :

Source : annexe à l'article A. 522-1 du code des assurances, Legifrance

Enfin, il est apparu aux rapporteurs que de nombreuses informations actuellement prévues pour les entreprises régies par le code des assurances (tableau d'information réglementaire, publication des taux de rémunération des fonds euro, information au cours du contrat sur l'évolution des valeurs des unités de compte et des frais prélevés) ne l'étaient pas pour les mutuelles et unions régies par le code de la mutualité , sans qu'une différence de traitement ne s'explique entre les deux. Une harmonisation paraissait donc nécessaire.

Pour prendre en compte l'ensemble de ces aménagements destinés à renforcer la transparence, la commission a adopté, à l'initiative des rapporteurs, un amendement COM-13 proposant une nouvelle rédaction globale de l'article.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 5

Remédiation en cas d'acquisition
de titres inéligibles au plan d'épargne en actions

. Le présent article vise à instaurer la possibilité pour les épargnants de régulariser leur situation en cas d'achat d'actions inéligibles au plan d'épargne en actions (PEA). Ce produit d'épargne de moyen terme, assorti d'un avantage fiscal, est soumis à de strictes règles de fonctionnement, en particulier concernant les titres éligibles. Or, il peut arriver que des épargnants peu avertis achètent des titres inéligibles et voient leur plan être clôturé. Si le plan est clos avant la cinquième année de détention, les produits et les plus-values procurés par les placements effectués sont immédiatement soumis à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux.

Les rapporteurs ont donc proposé, dans le cadre de la recommandation n° 8 de leur rapport d'information sur la protection des épargnants, de prévoir un nouveau cas de régularisation, en plus de ceux déjà prévus dans la doctrine administrative. Par l'amendement COM-14, ils ont toutefois proposé que ce « droit à l'erreur » ne soit pas conditionné aux actions mises en place par le gestionnaire du plan, et ce pour éviter que cette condition ne donne lieu à une restriction par les gestionnaires du champ des actifs éligibles, pour éviter que leur responsabilité soit mise en cause.

Depuis le dépôt de la proposition de loi, l'Autorité des marchés financiers (AMF) a créé un groupe de travail sur le PEA, qui devrait rendre ses conclusions d'ici la fin du premier trimestre 2023. Certaines des pistes envisagées apparaissent tout à fait bienvenues : facilitation des transferts, meilleure information sur les titres éligibles ou inéligibles, renforcement des régularisations. Ces conclusions pourront venir alimenter les dispositions de l'article 5, par exemple pour développer et sécuriser un véritable « droit à l'erreur », tout en prévenant tout risque d'optimisation fiscale.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : DES RÈGLES STRICTES SUR L'ÉLIGIBILITÉ DES TITRES AU PLAN D'ÉPARGNE EN ACTIONS

A. LE PLAN D'ÉPARGNE EN ACTIONS, UN PRODUIT RÉSERVÉ AU SOUTIEN DE L'ÉCONOMIE FRANÇAISE ET EUROPÉENNE

Le plan d'épargne en actions (PEA) est un produit permettant aux épargnants de se constituer un portefeuille en actions investies directement ou via des fonds : 5,1 millions de PEA étaient ouverts à la fin de l'année 2021, pour un encours total de près de 112 milliards d'euros 45 ( * ) .

Produit d'épargne de long terme, plafonné à 150 000 euros pour une personne seule et à 300 000 euros pour un couple marié ou pacsé (article L. 221-30 du code monétaire et financier [CMF]), le PEA bénéficie de conditions fiscales avantageuses .

En effet, aux termes de l'article 157 du code général des impôts (CGI), les produits et les plus-values procurés par les placements effectués dans le cadre d'un PEA ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu si aucun retrait n'est intervenu sur le plan pendant cinq ans , les produits et les plus-values demeurant toutefois soumis aux prélèvements sociaux (17,2 %). Le même régime fiscal et social s'applique aux dividendes capitalisés sur le PEA, sous la condition des cinq ans de détention (article 150-0 A du CGI). À noter, l'exonération d'impôt sur le revenu au titre des produits et des plus-values procurés par des placements en titres non cotés n'est que partielle : elle est limitée à 10 % du montant de ces placements (5° bis de l'article 157 du CGI).

L'article 221-32 du CMF précise plus généralement qu'au-delà de la cinquième année, les retraits partiels de sommes ou de valeurs du PEA n'entrainent pas la clôture du contrat 46 ( * ) et donc la perte de l'avantage fiscal lié à la durée de détention du PEA.

La contrepartie de cet avantage fiscal réside dans l'imposition de règles de fonctionnement strictes, en particulier concernant l'éligibilité des titres au PEA . Seuls sont éligibles :

- les actions cotées ou, sous certaines conditions les actions non cotées, les certificats d'investissement, les certificats coopératives d'investissement, les certificats mutualistes, les parts de société à responsabilité limitée (SARL), les titres de capital de sociétés coopératives. Les sociétés émettrices de ces titres doivent disposer de leur siège dans l'Union européenne ou dans un État de l'Espace économique européen (EEE) (1° du I de l'article L. 221-31 du CMF) ;

- les parts de placements collectifs (actions de sociétés d'investissement à capital variable, fonds communs de placement, organismes de placement collectif en valeurs mobilières) investis à au moins 75 % en actions et titres de sociétés ayant leur siège dans l'Union européenne ou dans un État de l'EEE (2° du I de l'article L. 221-31 du CMF).

L'article 1765 du CGI prévoit que si l'une des conditions encadrant l'utilisation du PEA n'est pas respectée, le plan est clos à la date où le manquement a été commis et les cotisations d'impôt résultant de cette clôture sont immédiatement exigibles .

B. DES CAS DE RÉGULARISATION SONT PRÉVUS POUR ÉVITER LA CLÔTURE DU PEA ET LA PERTE DE L'AVANTAGE FISCAL

En dépit de strictes conditions d'éligibilité, il demeure toutefois possible pour l'épargnant de régulariser sa situation, sous certaines conditions . Ces cas de remédiation sont prévus par la doctrine administrative : le titulaire du PEA dispose généralement d'un délai de deux mois pour se mettre en conformité avec les règles régissant ce produit d'épargne et notamment avec celles relatives à l'éligibilité des titres .

Il s'agit par exemple de situations dans lesquelles les titres ont fait l'objet d'une opération publique d'échange, de fusion, de scission ou d'absorption d'un fonds commun de placement par une société d'investissement à capital variable et les titres qui ont été reçus de l'échange ne sont pas éligibles. Il peut également s'agir de titres devenus inéligibles à la suite d'un événement indépendant de la volonté du titulaire du plan : l'exemple le plus emblématique est le Brexit , mais la perte de l'éligibilité peut aussi résulter du transfert par la société émettrice de son siège social dans un État non membre de l'Union européenne ou de l'EEE.

Lorsque le PEA a moins de cinq ans, régulariser sa situation permet au titulaire du plan de ne pas voir son produit clôturé et les plus-values immédiatement soumises à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux .

Les rapporteurs se sont interrogés, dans le cadre de leur rapport d'information sur la protection des épargnants 47 ( * ) , sur l'opportunité d'élargir les titres éligibles au PEA en permettant aux épargnants d'acheter des titres de sociétés dont le siège social ne se situe pas nécessairement dans l'Union européenne ou dans un État membre de l'EEE. Ces réflexions s'inscrivaient dans la logique de l'élargissement progressif de l'éligibilité au PEA.

Jusqu'au début des années 2000 en effet, le PEA et son avantage fiscal étaient quasi-intégralement réservés au financement de l'économie française Après des élargissements successifs, et sous l'impulsion des autorités européennes, cette limitation géographique a été supprimée, en dépit des réticences que pouvaient y opposer l'administration fiscale ou le Gouvernement .

Aujourd'hui, la seule limite qui demeure concerne l'extra-européen. Elle peut toutefois être contournée, par exemple par le biais de contrats permettant d'échanger la performance d'un panier de valeurs contre un autre, en échange d'une commission 48 ( * ) . À l'inverse, plusieurs épargnants ont vu leur PEA être clôturé après avoir acheté par inadvertance des titres étrangers non éligibles. La médiatrice de l'Autorité des marchés financiers (AMF) a notamment dû traiter l'un de ces cas.

Toutefois, en dépit de ces constats, lors de l'élaboration du rapport d'information, les rapporteurs ont estimé que la limitation géographique du PEA demeure justifiée par le fait de réserver l'avantage fiscal qui lui est lié, et donc la dépense publique, au financement de l'économie française et européenne . À court-terme, il semble donc plus pertinent de conserver cette restriction, les épargnants pouvant se tourner vers d'autres produits pour diversifier leur portefeuille d'actions. De plus, supprimer cette limitation géographique pourrait s'avérer contreproductif pour la protection des épargnants : les épargnants les moins avertis pourraient prendre des risques non maîtrisés , en allant acheter des actions cotées sur les marchés des pays émergents, plus volatiles, avec un risque de change et réservés aux investisseurs aguerris.

Il semblait en revanche plus pertinent, pour traiter les cas d'achat d'actions inéligibles par inadvertance, de prévoir un nouveau cas de remédiation pour les épargnants , afin qu'ils puissent être protégés en cas de défaut d'information avéré. C'était le sens de la recommandation n° 8 des rapporteurs dans le cadre de leur rapport d'information précité.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : INSTAURER UN DISPOSITIF DE REMÉDIATION EN CAS D'ACQUISITION DE TITRES INÉLIGIBLES AU PLAN D'ÉPARGNE EN ACTIONS

Traduisant la recommandation n° 8 des rapporteurs dans leur rapport d'information sur la protection des épargnants, le présent article vise à instaurer la possibilité pour les épargnants de régulariser leur situation en cas d'achat d'actions inéligibles au PEA .

Le I du présent article complète ainsi l'article 1765 du CGI, relatif à la clôture automatique du PEA en cas de manquement aux règles encadrant ce produit et inscrites dans le code monétaire et financier. Le PEA ne pourrait pas être clôturé si le gestionnaire du plan n'a pas mis en place de procédures pour bloquer l'acquisition de titres inéligibles . L'épargnant disposerait alors d'un délai de deux mois pour soit céder les titres, soit les retirer du plan, sans perdre l'avantage fiscal lié au PEA.

Le II du présent article prévoit une entrée en vigueur de cette disposition au 1 er janvier 2024 .

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : CONSERVER UN DISPOSITIF QUI PERMET DE PRÉVOIR UN PREMIER « DROIT À L'ERREUR » TOUT EN ÉTANT ENCORE PERFECTIBLE

Le présent article est issu de la volonté de traduire dans la loi la recommandation n° 8 du rapport d'information sur la protection des épargnants. Cette dernière a été émise par les rapporteurs pour davantage protéger les épargnants peu avertis en cas d'achat d'actions inéligibles au PEA et de risque de clôture de leur plan, sans possibilité de bénéficier de l'avantage fiscal attaché à ce produit.

Depuis, l'Autorité des marchés financiers a créé au mois de septembre 2022 un groupe de travail sur le PEA 49 ( * ) , afin de « mener une réflexion sur les difficultés rencontrées par certains épargnants dans l'usage de leur plan ». En font partie les règles de fonctionnement du PEA, « complexes et souvent mal comprises, ce qui peut entraîner la clôture automatique du plan après certaines opérations ».

Selon les informations transmises aux rapporteurs dans le cadre des auditions, le groupe de travail devrait remettre ses conclusions d'ici la fin du premier trimestre 2023 . Seraient notamment envisagées des mesures pour faciliter les transferts de PEA d'un établissement à un autre, obliger les émetteurs des titres à indiquer annuellement s'ils sont éligibles ou non au PEA et renforcer les cas dans lesquels les épargnants peuvent régulariser leur situation.

Ces pistes sont prometteuses et devraient pouvoir recueillir l'assentiment de l'ensemble des parties prenantes. Elles pourront venir utilement compléter les dispositions du présent article, afin de développer et de sécuriser un véritable droit à l'erreur, tout en prévenant tout risque d'optimisation fiscale . L'objectif de ce dispositif est bien uniquement de protéger les épargnants qui auraient commis une erreur. Comme en matière fiscale, la bonne foi des personnes concernées doit primer, pour ne pas voir leurs comportements être requalifiés en abus.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 5 bis (nouveau)

Assouplissement de l'éligibilité des fonds communs de placement à risque au plan d'épargne en actions

. Le présent article, introduit par la commission en adoptant l'amendement COM-15 des rapporteurs, vise à assouplir le champ des titres éligibles au plan d'épargne en actions (PEA) afin d'inclure davantage de fonds communs de placement à risques (FPCR).

La condition liée à la constitution d'au moins 75 % de l'actif du fonds en actions et en titres de sociétés apparaît en effet trop restrictive au regard de la nature de ces fonds et un délai doit a minima leur être laissé pour s'y conformer. L'objectif est aussi, par ce biais, d'encourager au déploiement du capital-risque, encore méconnu, alors qu'il permet de soutenir l'amorce, le développement et l'expansion des jeunes entreprises.

La commission a adopté cet article.

I. LE DROIT EXISTANT : L'ÉLIGIBILITÉ DES FONDS DE CAPITAL-RISQUE AU PLAN D'ÉPARGNE EN ACTIONS EST STRICTEMENT ENCADRÉE

Comme les rapporteurs l'ont rappelé dans le cadre du commentaire de l'article 5 de la présente proposition de loi, le plan d'épargne en actions (PEA) est soumis à des règles de fonctionnement strictes, en particulier concernant l'éligibilité des titres . Sont éligibles :

- les actions cotées ou, sous certaines conditions les actions non cotées, les certificats d'investissement, les certificats coopératives d'investissement, les certificats mutualistes, les parts de société à responsabilité limitée (SARL), les titres de capital de sociétés coopératives. Les sociétés émettrices de ces titres doivent disposer de leur siège dans l'Union européenne ou dans un État de l'Espace économique européen (EEE) (1° du I de l'article L. 221-31 du CMF) ;

- les parts de placements collectifs (actions de sociétés d'investissement à capital variable, fonds communs de placement, organismes de placement collectif en valeurs mobilières) investis à au moins 75 % en actions et titres de sociétés ayant leur siège dans l'Union européenne ou dans un État de l'EEE (2° du I de l'article L. 221-31 du CMF).

Cet encadrement est la contrepartie de l'octroi d'un avantage fiscal , avec une exonération d'impôt sur le revenu au titre des produits et plus-values procurés par les placements effectués dans le cadre d'un PEA si aucun retrait ou rachat n'est intervenu sur le plan pendant cinq ans. À noter, pour les produits et plus-values procurés par des placements en titres non cotés, l'exonération est limitée à 10 % du montant des placements (5° bis de l'article 157 du code général des impôts).

Au regard de ces conditions, les fonds de capital-risque sont éligibles, sous réserve de respecter la double condition d'un actif constitué à 75 % d'actions et titres de sociétés ayant leur siège dans un État de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen. Or, il est rare que les fonds communs de placement à risques (FPCR) respectent immédiatement la condition relative à la nature des titres , restreignant de fait le périmètre des FPCR éligibles au PEA .

L'investissement des FPCR se constitue en effet à travers une gamme diversifiée d'instruments financiers . L'article L. 214-28 du CMF prévoit ainsi que l'actif d'un FPCR est constitué, pour 50 % au moins, de titres associatifs, de titres participatifs ou de titres de capital de sociétés qui ne sont pas admis aux négociations sur un marché. Pour les fonds communs de placement dans l'innovation, qui peuvent être des FCPR, l'actif doit être constitué, pour 70 % au moins, de titres de sociétés remplissant des critères en matière de dépenses de recherche (article L. 214-30 du CMF). Enfin, pour les fonds d'investissement de proximité (FIP), qui sont aussi des FCPR, l'actif doit être constitué pour 70 % au moins de titres de sociétés exerçant principalement dans des établissements situés dans les régions choisies par le fonds (article L. 214-31 du CMF).

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : ASSOUPLIR LÉGÈREMENT LE PÉRIMÈTRE DES TITRES ÉLIGIBLES AU PLAN D'ÉPARGNE EN ACTIONS POUR SOUTENIR LE CAPITAL-RISQUE

Le présent article, issu de l'amendement COM-15 proposé par les rapporteurs, vise à assouplir légèrement le champ des titres éligibles au plan d'épargne en actions (PEA) pour inclure davantage de fonds communs de placement à risques .

Il modifie ainsi le 2° du I de l'article L. 221-31 du code monétaire et financier pour prévoir que les FCPR disposeront d'une durée de cinq ans pour respecter la condition relative à la constitution d'au moins 75 % de leur actif en actions et titres de sociétés .

Alors que la commission a supprimé l'article 6 (cf. commentaire), relatif au dispositif « Madelin », qui vise à inciter à la souscription en numéraire au capital des sociétés, le présent article entend remplir une partie des objectifs poursuivis par cet article.

Les représentants de France Invest ont en effet indiqué lors de leur audition que la dépense fiscale « Madelin » n'était plus nécessairement le canal à privilégier pour garantir un plus grand accès des particuliers au capital-investissement ou au capital-risque et ainsi soutenir l'amorce, le développement et l'expansion des jeunes entreprises.

En revanche, pour pallier une certaine méconnaissance du capital-risque, la souscription pourrait être encouragée par le biais de produits plus « traditionnels » et connus comme le PEA . Ce véhicule susciterait sans doute une plus grande confiance de la part des épargnants, qui pourraient introduire, suivant leurs besoins et leur profil, une petite part de capital-risque dans leur plan.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article.

ARTICLE 6

Prolongation et renforcement du dispositif « Madelin »

. Le présent article vise à renforcer le taux ordinaire et le taux bonifié transitoire de la réduction d'impôt sur le revenu au titre des souscriptions au capital des petites et moyennes entreprises (dispositif « IR-PME » ou « Madelin »).

Dans le cadre du rapport d'information sur la protection des épargnants, ce renforcement était conçu comme la contrepartie au relèvement des seuils de taille pour les fonds fiscaux, à savoir les fonds permettant d'investir dans des sociétés non cotées afin de financer leur démarrage, leur développement ou leur transmission. La taille trop réduite d'un fonds peut en effet accroître les risques et les frais, au détriment de la performance nette servie aux épargnants.

Le débat sur le taux de la réduction d'impôt « IR-PME » a déjà eu lieu récemment dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2023. Il a notamment été prévu qu'un rapport d'évaluation de cette dépense fiscale soit remis au Parlement au mois de septembre 2023 : à l'initiative du Sénat, il devra inclure des propositions de dispositifs tendant à renforcer le capital-investissement et les fonds propres des entreprises.

Les rapporteurs ont donc proposé à la commission d'attendre les résultats de cette évaluation et de supprimer le présent article (amendement COM-16). Il n'en reste pas moins que la problématique de la taille des fonds fiscaux demeure un sujet important, tout comme l'accessibilité des particuliers au capital-investissement, sujets sur lesquels les rapporteurs ne manqueront pas de revenir à l'occasion des prochains textes, et notamment le projet de loi de finances initiale pour 2024. Sur ce dernier aspect, un nouvel article 5 bis introduit par la commission sur leur initiative, tend déjà à assouplir légèrement le champ des titres éligibles au plan d'épargne en actions (PEA).

La commission a supprimé cet article.

I. LE DROIT EXISTANT : LA PROROGATION DU TAUX BONIFIÉ DE LA RÉDUCTION D'IMPÔT « IR-PME » JUSQU'À LA FIN DE L'ANNÉE 2023

A. DESTINÉ À SOUTENIR LES SOUSCRIPTIONS EN CAPITAL DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES, LE DISPOSITIF « MADELIN » FAIT L'OBJET D'UN RENFORCEMENT TEMPORAIRE

1. Les investissements réalisés dans certaines PME peuvent ouvrir le droit à une réduction d'impôt sur le revenu

Le dispositif « Madelin », créé en 1994 50 ( * ) et codifié à l'article 199 terdecies -0 A du code général des impôts (CGI), ouvre droit à une réduction d'impôt sur le revenu des particuliers en cas de souscription au capital de certaines petites et moyennes entreprises (PME).

Pour être éligible au dispositif, le contribuable doit investir au sein d'une société remplissant les différentes conditions prévues au 1 bis de l'article 885-0 V bis du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2017, au premier rang desquelles figurent :

- une condition de taille : l'entreprise doit répondre à la définition européenne des PME 51 ( * ) , à savoir un effectif inférieur à 250 personnes et un chiffre d'affaires mensuel inférieur à 50 millions d'euros ou un total de bilan n'excédant pas 43 millions d'euros ;

- une condition d'âge : l'entreprise ne doit pas avoir encore effectué de vente commerciale ou exercer ses activités sur un marché depuis moins de sept ans après sa première vente commerciale ou encore avoir besoin d'un investissement initial qui, en vue d'intégrer un nouveau marché géographique ou de produits, est supérieur à 50 % de son chiffre d'affaires annuel moyen des cinq dernières années ;

- une condition d'activité : l'entreprise doit exercer une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l'exclusion des activités procurant des revenus garantis, des activités financières, des activités de gestion de patrimoine mobilier, des activités de construction d'immeubles et des activités immobilières ;

- un plafond de versements : le montant total des versements reçus par l'entreprise au titre de la réduction d'impôt « Madelin » et des autres aides pour le financement des risques ne peut excéder 15 millions d'euros.

Le taux de la réduction d'impôt de droit commun est de 18 % . Il s'applique aux versements effectués au titre de la souscription en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital des entreprises entrant dans le champ d'application du dispositif.

En cas d'investissement direct ou réalisé par l'intermédiaire d'une société holding, les versements sont retenus dans la limite annuelle de 50 000 euros pour une personne seule et de 100 000 euros pour des contribuables mariés soumis à imposition commune.

En cas d'investissement indirect via un fonds d'investissement de proximité (FIP) ou un fonds commun de placement dans l'innovation (FCPI), ces limites sont ramenées à respectivement 12 000 euros et 24 000 euros . L'actif de ces fonds fiscaux doit être constitué pour 70 % au moins d'investissements réalisés dans des PME innovantes 52 ( * ) de moins de dix ans (pour les FCPI) ou des PME régionales 53 ( * ) de moins de sept ans (pour les FIP).

D'après le tome II de l'annexe Évaluation des voies et moyens du projet de loi de finances pour 2023, le coût total du dispositif est évalué à 146 millions d'euros en 2023 .

2. Un taux bonifié transitoire, mais prorogé à plusieurs reprises

Si le taux de l'avantage fiscal est en principe de 18 %, un taux bonifié de 25 % fut initialement prévu pour les versements effectués en 2018 54 ( * ) au titre du dispositif « Madelin » afin de contrebalancer la disparition de la réduction d'impôt « ISF-PME ». Ce taux bonifié, initialement applicable aux seuls versements effectués en 2018, a été prolongé à trois reprises , faute d'avoir pu entrer en vigueur immédiatement 55 ( * ) .

En effet, sa mise en place était subordonnée à la réponse de la Commission européenne permettant de considérer le dispositif « Madelin » comme étant conforme au droit de l'Union européenne. Or, le dispositif n'avait jamais été notifié par le Gouvernement depuis sa création en 1994, en dépit de demandes répétées en ce sens de la commission des finances du Sénat. L'accord de la Commission européenne est nécessaire à chaque prorogation du taux bonifié transitoire, avec des délais plus ou moins longs de réponse, qui peuvent générer des comportements attentistes chez les épargnants.

Dans le cadre de la loi de finances pour 2023 56 ( * ) , une quatrième prorogation a été votée , avec une application du taux bonifié transitoire aux versements effectués jusqu'au 31 décembre 2023 . Son entrée en vigueur demeure toutefois conditionnée à la réponse de la Commission européenne.

3. Une évaluation à venir du dispositif

L'article 17 de la loi de finances pour 2023 a non seulement prorogé le taux bonifié de la réduction d'impôt, mais a également prévu une évaluation de cette dépense fiscale.

Le Gouvernement devra ainsi remettre au Parlement, avant le 30 septembre 2023, un rapport d'évaluation . À l'initiative du Sénat, ce rapport devra identifier et évaluer les pistes d'évolution pour renforcer le soutien aux fonds propres des PME . L'un des principaux avantages de l'IR-PME réside en effet dans ce lien entre l'épargnant et l'entreprise : en contrepartie d'un avantage fiscal, le particulier investit et place une partie de son épargne auprès d'une PME, pour financer son expansion et le développement de son activité.

B. LE DISPOSITIF « MADELIN » PEUT ÊTRE VU COMME UN OUTIL POUR DÉVELOPPER LE CAPITAL-INVESTISSEMENT ET COMME UNE CONTREPARTIE À L'AUGMENTATION DE LA TAILLE DES FONDS FISCAUX

Dans le rapport sur la protection des épargnants 57 ( * ) , le dispositif « Madelin » est perçu comme l'un des outils à même d' inciter les épargnants à davantage se tourner vers le capital-risque et vers le capital-investissement . S'il est entendu que ces produits ne sont pas accessibles à tous les épargnants ni adaptés à tous les profils et les besoins, ils peuvent offrir des rendements supérieurs à long terme, sous couvert d'une prise de risque plus élevée.

Or, pour ce faire, les investisseurs particuliers recourent le plus souvent à des fonds spécifiques - les fonds fiscaux - dont la taille limitée peut accroître les risques et les frais, au détriment de la performance nette. Les fonds fiscaux désignent les fonds permettant d' investir dans des sociétés non cotées en bourse afin de financer leur démarrage, leur développement ou leur transmission . Ce sont des fonds de capital-risque ou de capital-investissement, auxquels sont attachés des avantages fiscaux comme le « Madelin » , contrepartie des aléas plus importants liés à la prise de participations dans ces sociétés- avec un double risque de perte en capital et d'illiquidité -, le marché secondaire pour échanger les titres de ces entreprises pouvant être peu profond, voire inexistant.

Les différents types de fonds de capital investissement

- les fonds communs de placement à risques (FPCR) : investis pour au moins 50 % en titres d'entreprises non cotées en bourse ;

- les fonds communs de placement dans l'innovation (FPCI) : investis pour au moins 70 % en titres d'entreprises innovantes non cotées en bourse ;

- les fonds d'investissement de proximité (FIP), investis pour au moins 70 % dans des petites et moyennes entreprises régionales non cotées en bourse.

Les FPCI et les FIP sont deux catégories de FPCR.

Source : articles L. 214-28 à 214-31 du code monétaire et financier

Lorsque le fonds est trop « petit », l'investisseur ne bénéficie pas d'économies d'échelle : les frais ont tendance à être plus élevés pour couvrir les coûts fixes du produit. Outre ces charges, un fonds avec un encours faible peut faire courir davantage de risques aux investisseurs : la diversification des investissements sera plus limitée, avec une dilution du risque par conséquent plus faible, et la capacité de sélection des cibles par le fonds sera aussi amoindrie. Le rapport coût/performance peut dès lors s'en trouver dégradé.

Des clauses « anti-abus » ont donc été introduites pour protéger les épargnants et prévenir la multiplication des fonds de capital-investissement de faibles encours. L'Autorité des marchés financiers (AMF) doit ainsi refuser d'agréer la constitution d'un FIP ou d'un FPCI lorsque deux conditions ne sont pas satisfaites, sur une période de trois ans 58 ( * ) :

- chacun des FIP ou des FPCI constitués par la société de gestion de portefeuille doit présenter un montant total de souscriptions supérieur à cinq millions d'euros ;

- la totalité des fonds de capital investissement et des FPCI gérés par la société de gestion de portefeuille doit représenter un montant total des actifs sous gestion supérieur à cinquante millions d'euros.

En pratique, l'AMF n'a jamais eu à refuser cet agrément, qui constitue surtout une barrière à l'entrée pour les nouveaux entrants. La règlementation actuelle ne semble donc pas suffisante pour accroître la taille des fonds fiscaux .

Toutefois, le rehaussement du niveau des seuils relève du niveau règlementaire : la bonification du dispositif « Madelin » est dans cette situation conçue comme une contrepartie à ce relèvement. Elle aurait alors un double effet positif pour les épargnants : un accroissement, à terme, de la taille des fonds fiscaux et une incitation à recourir davantage au capital-investissement.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : RENFORCER LE DISPOSITIF « MADELIN » EN RELEVANT LES TAUX ORDINAIRE ET BONIFIÉ DE LA RÉDUCTION D'IMPÔT

Traduisant la recommandation n° 9 du rapport d'information relatif à la protection des épargnants, le présent article prévoit de renforcer le dispositif « Madelin » en relevant le taux ordinaire et le taux bonifié de la réduction d'impôt .

Le I du présent article modifie ainsi l'article 199 terdecies -0 A du code général des impôts (CGI) pour relever le taux ordinaire de la réduction d'impôt « IR-PME » de 18 % à 25 % et pour porter le taux bonifié transitoire de 25 % à 30 % jusqu'au 31 décembre 2026 .

Le II du présent article dispose que les modifications apportées à l'article 199 terdecies -0 A du CGI ne s'appliquent qu'à compter d'une date fixée par décret et qui ne peut être postérieure de plus de deux mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de considérer la disposition lui ayant été notifiée comme conforme au droit de l'Union européenne.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : SUPPRIMER LE DISPOSITIF DANS L'ATTENTE DE SON ÉVALUATION ET DE LA PROPOSITION D'ALTERNATIVES POUR RENFORCER LE CAPITAL-INVESTISSEMENT

À l'initiative de la commission des finances, le Sénat a constamment soutenu le dispositif « Madelin » en votant, dans le cadre de l'examen des projets de loi de finances, le rehaussement du taux bonifié transitoire de 25 % à 30 %. Il est en effet impératif qu'existent des produits d'épargne destinés à soutenir les entreprises, à renforcer les fonds propres des PME et à favoriser l'accessibilité du capital-investissement aux particuliers . Dans ce contexte, c'est le rôle des fonds fiscaux que de servir la meilleure performance possible aux ménages choisissant ces produits plus risqués.

Le débat sur la bonification temporaire ou pérenne du taux de la réduction d'impôt « IR-PME » a donc déjà eu lieu à l'automne dernier, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2023. Dans le texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en dernière lecture, le taux bonifié reste de 25 % et s'applique aux versements effectués jusqu'au 31 décembre 2023.

Surtout, un rapport d'évaluation de ce dispositif fiscal doit être remis au Parlement avant l'examen du projet de loi de finances 2024. Grâce à l'amendement voté par le Sénat et retenu par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en dernière lecture en application de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution, cette évaluation inclura des propositions de dispositifs pour renforcer le capital-investissement et les fonds propres des entreprises .

Il ne semble dès lors pas opportun de rouvrir le débat du « Madelin » dans le cadre de l'examen de la présente proposition de loi, moins de deux mois après la première lecture du projet de loi de finances. Il est plutôt proposé d'attendre les débats autour du projet de loi de finances initiale pour 2024.

Par ailleurs, lors de leur audition, les représentants de France Invest ont indiqué que la dépense fiscale « IR-PME » n'était plus nécessairement le canal à privilégier pour garantir un plus grand accès des particuliers au capital-investissement et au capital-risque . Suivant leur analyse, les rapporteurs ont plutôt proposé à la commission d'assouplir légèrement le champ des titres éligibles au plan d'épargne en actions pour inclure les fonds communs de placement à risque (introduction de l'article 5 bis au sein de la présente proposition de loi, cf. le commentaire dans le présent rapport).

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, les rapporteurs ont proposé à la commission de supprimer cet article (amendement COM-16), tout en rappelant que la problématique de la taille des fonds fiscaux n'est pas encore réglée pour autant , alors même qu'il s'agit d'un critère important pour garantir le meilleur rapport risque/performance aux épargnants qui accepteraient de souscrire à des produits plus risqués, au profit du financement de l'économie et des entreprises en développement. Une réflexion pourrait notamment être engagée sur les seuils.

Décision de la commission : la commission des finances a supprimé cet article.

ARTICLE 7

Transférabilité interne et externe des contrats d'assurance vie

. Le présent article prévoit de sécuriser les possibilités de transfert des contrats d'assurance vie au sein d'une même entreprise d'assurance (transférabilité interne), quel que soit le moment où il intervient. Il garantit les droits de l'assuré et fixe les obligations de l'assureur ou de l'intermédiaire. Il ouvre également une possibilité de transférabilité externe des contrats d'assurance vie entre entreprises d'assurance : en cas de rachat total d'un contrat d'une durée de plus de huit ans, et à condition que l'intégralité des sommes soient versées sur un autre contrat, ledit rachat n'entraîne pas les conséquences fiscales d'un dénouement, ce qui permet de conserver les avantages fiscaux associés à l'ancien contrat. Au-delà du libre choix de l'assuré, l'objectif est de susciter une plus grande concurrence entre les produits disponibles sur le marché.

Concernant la transférabilité interne, la commission a supprimé, par un amendement COM-18 des rapporteurs, la possibilité pour l'assureur de refuser l'opération, rendant ainsi opposable et réel le droit au transfert interne. Cet amendement encadre les conditions de ce transfert en prévoyant qu'il pourrait générer des frais, limités à 1 % des droits acquis, lesquels deviendraient nuls à l'issue d'un délai de huit ans.

Concernant la transférabilité externe, la commission a adopté un amendement COM-17 visant à préciser que l'assureur ou l'intermédiaire disposent du temps nécessaire, pendant les deux mois où ils doivent procéder au rachat, pour proposer à l'assuré des solutions internes de transfert total ou partiel de son contrat au sein de l'entreprise d'assurance. La portabilité de l'antériorité fiscale des contrats d'assurance vie en cas de transfert externe ne s'appliquerait qu'aux contrats rachetés à partir du 1 er janvier 2025.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : UN DÉVELOPPEMENT DES POSSIBILITÉS DE TRANSFERT INTERNE QUI N'ASSURE PAS ENCORE UNE CONCURRENCE SUFFISANTE

A. LA FISCALITÉ DE L'ASSURANCE VIE : UNE STABILISATION GLOBALEMENT UTILE DE L'ÉPARGNE MAIS DONT CERTAINS EFFETS PEUVENT AFFAIBLIR LA CONCURRENCE

L'ensemble des contrats d'assurance vie représentait à la fin du mois de novembre 2022 une masse financière de 1 856 milliards d'euros pour 18 millions d'assurés et 38 millions de bénéficiaires. À la même date, la collecte nette s'élevait, depuis le début de l'année, à 13,7 milliards d'euros, soit 6,2 milliards de moins que celle enregistrée en 2021 sur la même période 59 ( * ) . Un quart est investi en contrats en unités de compte, et trois quarts en fonds euro.

Fonds « en euros » et contrats « en unités de compte »

Le contrat dont on dit qu'il est investi dans des fonds « en euros » bénéficie d'un capital garanti par l'assureur et des intérêts acquis une fois versés ; un taux minimal garanti de revalorisation du capital est prévu en début de chaque exercice pour l'année à venir.

Lorsque le contrat est investi en unités de compte , qui sont des supports d'investissement (parts ou actions de valeur mobilière ou immobilière, ou produit structuré), le risque financier est alors supporté par l'épargnant.

Lorsqu'un contrat est investi seulement « en euros », on dit qu'il est « monosupport » ; lorsqu'il se constitue d'une combinaison des deux, il est dit « multisupport ».

Source : commission des finances

Lorsqu'un contrat est « racheté » par l'épargnant - on parle aussi de dénouement - et que l'épargne est récupérée, les produits attachés au contrat sont soumis à l'impôt sur le revenu.

Toutefois, afin de stabiliser l'épargne investie dans des contrats d'assurance vie , un régime de fiscalité allégée est prévue en cas de rachat huit ans au moins à compter de la souscription du contrat : les produits attachés à ces contrats en sont exonérés dans la limite d'un abattement de 4 600 euros pour une personne seule et de 9 200 euros pour un couple soumis à une imposition commune. Pour les produits liés à des primes versées avant le 27 septembre 2017, le taux applicable au titre de l'impôt sur le revenu est de 7,5 % au-delà, sur option exercée lors du rachat du contrat. Pour les produits liés à des primes versées après cette date, le taux est de 7,5 % pour le montant des primes n'excédant pas 150 0000 euros, et 12,8 % pour la fraction des produits excédant ce montant de primes versées 60 ( * ) .

Ce régime fiscal porte ses fruits, puisqu'actuellement, 70 % de l'encours de l'assurance vie a une durée supérieure à huit ans, la moyenne de durée de l'encours s'établissant à 12 ans 61 ( * ) .

En principe, la transformation d'un contrat d'assurance vie en un autre contrat entraîne les conséquences fiscales d'un dénouement , ce qui correspond donc à la perte des avantages fiscaux associés aux anciens contrats. Cela peut ainsi dissuader les épargnants de placer leur épargne sur des contrats plus avantageux et plus à même de financer l'économie réelle.

Par exemple, un épargnant qui rachète son contrat d'assurance vie auprès de l'assureur A au bout de 9 ans pour placer son épargne sur un autre contrat auprès de l'assureur B, avant de racheter ce nouveau contrat 5 ans plus tard, sera exonéré d'impôt sur le revenu dans la limite de l'abattement mentionné sur les produits qu'il aura perçus pendant ses 9 ans auprès de l'assureur A, mais les produits perçus au terme des 5 ans chez l'assureur B ne bénéficieront pas de cet avantage fiscal. Même si les conditions du contrat fourni par l'assureur B sont meilleures que le contrat de l'assureur A, il pourrait donc être plus favorable pour l'épargnant de rester 14 ans chez l'assureur A. De plus, alors même qu'il est possible que l'assureur B propose des contrats qui financent mieux l'économie réelle, ces dispositions fiscales n'incitent pas l'épargnant à transférer son épargne de A à B. Elles n'incitent pas non plus les assureurs à se faire concurrence, puisque même si l'un d'entre eux propose des contrats plus avantageux, l'épargnant peut ne pas avoir intérêt à transférer son épargne chez lui.

B. LE DÉVELOPPEMENT DE LA TRANSFÉRABILITÉ INTERNE VISE À MIEUX FINANCER L'ÉCONOMIE RÉELLE ET MIEUX RÉPONDRE AUX ATTENTES DES ÉPARGNANTS SANS TOUJOURS Y PARVENIR

Plusieurs dispositifs ont donc visé à favoriser la transférabilité des contrats d'assurance vie tout en conservant l'avantage fiscal associé :

- le dispositif « Fourgous » , créé par l'article 1 er de la loi du 26 juillet 2005 62 ( * ) , permet la transformation d'un contrat monosupport en un contrat multisupport, mieux à même de financer l'économie réelle via les unités de compte . Cette transférabilité est limitée aux contrats au sein d'un même assureur et elle doit donner lieu à la conversion d'une part significative (au moins 20 %) des engagements en unités de compte 63 ( * ) ;

- l'article 9 de la loi de finances rectificative de 2013 64 ( * ) permet la transformation sous certaines conditions, et sans perte d'antériorité fiscale, d'un contrat d'assurance vie en contrat eurocroissance ;

- la loi « Pacte » 65 ( * ) , modifiant l'article 125-0 A du code général des impôts (CGI), simplifie et généralise le dispositif « Fourgous », en permettant de transférer tout ou partie d'un contrat d'assurance vie vers un nouveau contrat, sans perte d'antériorité fiscale, dès lors que les engagements convertis sont en partie investis en unités de compte ou en eurocroissance, et que la transformation du contrat est effectuée auprès du même assureur . L'article L. 132-22 du code des assurances prévoit que l'assureur informe annuellement l'assuré de cette possibilité.

Les limites de ces différents dispositifs ont été mises en évidence par le rapport d'information précité des rapporteurs sur la protection des épargnants 66 ( * ) . Si le nombre de transferts augmente progressivement - 423 000 transferts en 2021 pour un montant de 15 milliards d'euros contre 236 000 transferts à hauteur de 6,8 milliards d'euros en 2020 67 ( * ) - ils seraient davantage dus à la politique volontariste de certains assureurs qu'à une réelle connaissance de cette possibilité par les épargnants.

Le rapport d'information rappelait également que « les demandes de transfert se heurtent à la dichotomie entre les assureurs d'une part, qui assurent la gestion du contrat, et les courtiers d'autre part, qui en assurent la distribution. Or, en pratique, les transferts de contrats avec un changement de distributeur se sont révélés complexes pour les assurés », constatant des « pratiques commerciales variables, chaque assureur définissant sa politique d'acceptation des demandes de transfert » 68 ( * ) .

Si France Assureurs a pris, le 17 juin 2021, l'engagement d'automatiser les demandes de transfert présentées par le distributeur qui a commercialisé le produit d'origine, une telle demande par l'assuré peut aussi se traduire par un refus de l'assureur.

Les rapporteurs ont d'ailleurs souligné dans leur rapport d'octobre 2021 que les dispositions de la loi « Pacte » ne s'étaient pas traduites par un véritable droit de l'assuré à ce transfert, la vraie contrainte pesant sur l'assureur étant d'informer annuellement l'assuré de l'existence de cette possibilité 69 ( * ) .

Ils avaient alors avancé deux recommandations tendant, pour l'une, à préciser les modalités de transfert interne des contrats d'assurance vie pour harmoniser les politiques de traitement des demandes et garantir la possibilité à l'épargnant qui remplit les conditions de ce transfert de pouvoir le faire 70 ( * ) et, pour l'autre, à permettre une transférabilité totale des contrats d'assurance vie, sous réserve d'introduire des mesures permettant de juguler les risques inhérents à ces opérations 71 ( * ) .

La seconde de ces recommandations s'inscrit dans la continuité de l'amendement, adopté par le Sénat, déposé par la sénatrice Christine Lavarde à l'occasion de l'examen de la loi « Pacte » 72 ( * ) . Ayant reçu un avis favorable de la commission spéciale et un avis défavorable du Gouvernement, il visait à généraliser la possibilité de transférer son contrat d'assurance vie vers un autre contrat souscrit auprès d'un assureur différent, dès lors que le contrat initial a été souscrit il y a plus de huit ans. Cette disposition ne fut pas retenue dans le texte final.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA SÉCURISATION DE LA TRANSFÉRABILITÉ INTERNE ET LA PORTABILITÉ DE L'ANTÉRIORITÉ FISCALE DANS LE CADRE DU TRANSFERT EXTERNE D'UN CONTRAT

Le présent article vise à garantir la transférabilité interne et externe des contrats d'assurance vie.

D'une part, alors même que la loi « Pacte » introduisait une disposition qui se limitait à prévoir les conséquences fiscales du transfert interne d'un contrat d'assurance vie en modifiant l'article 125-0 A du code général des impôts (CGI), le du I crée un nouvel article L. 132-21-2 dans le code des assurances qui encadre les conditions de ce transfert.

Il garantit d'abord les droits de l'assuré, qui peut demander à tout moment la transformation partielle ou totale de son contrat d'assurance vie, dès lors qu'elle s'effectue auprès de la même entreprise d'assurance.

Il fixe ensuite les obligations de l'assureur et de l'intermédiaire d'assurance, tenus l'un comme l'autre de réaliser la transformation sans frais, et dans un délai de deux mois à compter de la réception de la demande. Un refus de transformation est possible, mais il doit être justifié auprès de l'assuré dans le même délai.

Le du II simplifie l'article 125-0 A du CGI en renvoyant au nouvel article L. 132-21-2 du code des assurances.

D'autre part, le 2° du II vise ensuite à ouvrir un réel droit à la transférabilité externe. Ce faisant, il complète le I de l'article 125-0 A du CGI par un 3°, pour prévoir que le rachat total d'un bon ou d'un contrat, dès lors que ce dernier a une durée supérieure à huit ans et que l'intégralité des sommes reçues au titre de ce rachat est versée dans un bon ou contrat souscrit six mois avant la date dudit rachat n'entraîne pas les conséquences fiscales d'un dénouement. Il s'agit donc d'assurer la portabilité de l'antériorité fiscale d'un contrat d'assurance vie à un autre, y compris en cas de changement d'entreprise d'assurance.

Modifiant l'article L. 132-22 du code des assurances, le du I précise dès lors le contenu de l'information communiquée au contractant sur les possibilités de transformation, interne et externe, de son contrat , en renvoyant expressément à l'article L. 132-21-2 du code des assurances et au nouveau 3° du I de l'article 125-0 A du CGI.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : RENDRE AUTOMATIQUE LA TRANSFÉRABILITÉ INTERNE ET PRÉCISER L'OBJECTIF DU RENFORCEMENT DE LA TRANSFÉRABILITÉ EXTERNE

Les rapporteurs saluent autant le mouvement progressif en faveur de la transférabilité interne , dont les défenseurs sont aujourd'hui bien plus nombreux qu'au moment de l'examen de la loi « Pacte », que la bonne volonté des acteurs de l'assurance en ce sens. Le présent article vise à lever certains des obstacles qui pouvaient subsister en la matière pour garantir un plein droit à la transférabilité interne des contrats d'assurance vie.

Le risque, pourtant, est que, sans un renforcement des possibilités de transfert externe des contrats, le transfert interne ne demeure, au moins en partie, qu'un vain mot.

En effet, l'initiative est laissée à l'épargnant , souvent mal informé des possibilités alternatives chez son assureur , tandis que celui-ci peut se contenter, en dehors de l'obligation d'information sur la possibilité du transfert interne qui lui incombe, d'une certaine forme de passivité .

À l'inverse, la perspective d'un accès facilité de l'épargnant à un contrat plus avantageux et répondant mieux à ses besoins et ses attentes, en particulier si ce contrat est logé dans une autre entreprise d'assurance , conduirait probablement l'assureur « d'origine » à davantage anticiper ce départ et à adapter son offre aux caractéristiques de l'épargnant pour lui proposer de nouvelles possibilités , donnant finalement son plein sens au transfert interne.

C'est pourquoi les rapporteurs estiment nécessaire de prévoir la portabilité de l'antériorité fiscale du contrat d'assurance vie en cas de transfert externe . Il s'agit non seulement de faire jouer la concurrence pour améliorer le service rendu à l'épargnant - tant en termes de conseil que de performance du produit - mais aussi d'ouvrir l'éventail des possibilités qui s'offrent à lui, pour plus de liberté de choix.

Si cette mesure s'accompagne d'un garde-fou, puisqu'elle ne concernerait que les contrats dont la durée est supérieure à huit ans, les rapporteurs ont été attentifs au rappel des risques - de crédibilité et d'importance variable - qui, malgré cela, pouvaient persister. Ceux-ci ne doivent toutefois pas être surestimés, puisque l'objectif de la facilitation du transfert externe est surtout l'amélioration, en amont de cet éventuel transfert, du service rendu à l'épargnant.

A. GARANTIR LA TRANSFÉRABILITÉ INTERNE SANS POSSIBILITÉ DE REFUS DE L'ASSUREUR

La rédaction initiale prévoyait de maintenir la possibilité, pour l'assureur, de refuser le transfert demandé tout en exigeant qu'il soit justifié dans un délai de deux mois à compter de la demande de l'assuré ou du souscripteur. Si un tel refus peut en effet parfois s'expliquer par le changement de distributeur et par son défaut d'immatriculation à l'Orias, les auditions menées par les rapporteurs notamment avec les assureurs, ont fait apparaître qu'il ne s'agissait pas là d'une difficulté telle qu'elle justifie le maintien de cette possibilité de refus.

Les rapporteurs, attachés à ce que le droit au transfert interne soit pleinement assuré pour les épargnants qui en font la demande, ont ainsi déposé un amendement COM-18 , adopté par la commission, tendant à supprimer la possibilité pour l'assureur de refuser la transformation du contrat d'assurance vie. Cet amendement précise également que, quand la demande de transfert passe par un intermédiaire d'assurance, celui-ci est tenu de la transmettre à l'entreprise d'assurance concernée, laquelle ne peut s'y opposer.

Par ailleurs, afin toujours de rendre ce droit effectif et encourager les épargnants à s'en saisir, la rédaction initiale prévoyait que le transfert se fasse sans frais. Une telle disposition pourrait toutefois encourager une surutilisation abusive de cette possibilité par certains épargnants pouvant, le cas échéant, entraîner une désorganisation de l'activité de l'assureur, d'autant plus si ce dernier n'a plus la possibilité de s'y opposer.

Par parallélisme avec le cas du transfert d'un plan d'épargne retraite à l'autre, pour lequel un niveau de frais maximal de 1 % des droits acquis - devenant nuls à l'issue d'une période de cinq ans - est prévu par le code monétaire et financier 73 ( * ) , le même amendement vise à autoriser les frais de transfert en les limitant à 1 % des droits acquis, lesquels deviendraient nuls à l'issue de huit ans de détention .

B. SOUTENIR LE DÉVELOPPEMENT DE LA TRANSFÉRABILITÉ EXTERNE POUR PERMETTRE L'ACCÈS DES ÉPARGNANTS À DES PRODUITS COMPÉTITITFS ET NE PAS SURESTIMER LES RISQUES QUI LUI SONT ASSOCIÉS

1. Le nécessaire développement de la transférabilité externe

Le présent article, en favorisant le transfert externe des contrats d'assurance vie au-delà de huit ans grâce à la portabilité de leur antériorité fiscale, donnerait lieu à un renforcement de la concurrence entre les entreprises d'assurance permettant à terme d' améliorer les performances proposées par les assureurs , de façon à augmenter les rendements et diminuer les frais.

Par ailleurs, elle exercerait une saine pression sur les professionnels de l'assurance pour qu'ils améliorent la qualité de conseils prodigués au long du contrat. Ainsi en serait-il tout particulièrement au-delà de huit ans, avec la possibilité surtout pour la société d'assurance de proposer des produits en interne davantage adaptés à la nouvelle situation du client .

Au total, la portabilité de l'antériorité fiscale en cas de transfert externe de l'assurance vie apparaît comme une condition nécessaire pour une réelle effectivité du droit au transfert interne.

Enfin, comme le soulignait les rapporteurs en 2021, la transférabilité externe est aussi une question de principe : « dès lors que le libre choix des épargnants repose sur une véritable transparence sur les coûts de chaque support d'investissement et les performances attendues, il n'existe aucun intérêt pour eux de rester captifs de leur choix initial, d'autant que leurs préférences en termes de gestion de leur contrat peuvent évoluer au fil du temps » 74 ( * ) .

L'intérêt d'une telle disposition pour l'économie française paraît aussi faire peu de doute . En effet, le frein fiscal qui existe actuellement peut dissuader l'épargnant de transférer l'épargne de son assurance vie vers un support d'investissement qui finance mieux l'économie réelle, de façon éventuellement plus responsable et plus écologique. Alors même que l'utilisation de l'épargne est de plus en plus un choix de conviction, le frein fiscal actuel restreint en somme les possibilités de l'épargnant à un moment où son épargne serait particulièrement utile pour engager les grands chantiers dont notre économie a besoin.

2. Des risques potentiels à ne pas occulter mais à ne pas surestimer non plus

Lors des auditions menées par les rapporteurs, plusieurs critiques ont été portées au développement de la transférabilité externe des contrats d'assurance vie.

Tout d'abord, l'introduction de la portabilité de l'antériorité fiscale en cas de transfert externe pourrait aboutir à raccourcir la durée moyenne des contrats , ce qui conduirait les assureurs - y compris de façon anticipée - à investir l'épargne placée dans les assurances vie dans des produits financiers de maturité plus courte. Ils pourraient ainsi être amenés à délaisser l'investissement en actions ou en obligations de long terme - y compris des titres de dette souveraine - pour investir dans des obligations à duration moins longue, phénomène que pourrait renforcer l'actuelle remontée des taux.

Par ailleurs, pour se prémunir contre des rachats anticipés massifs, les assureurs pourraient être amenés à investir l'épargne qu'ils gèrent dans des actifs liquides et sans risque, tels que les fonds euros, au détriment des unités de compte.

Au total, cela pourrait nuire tant au financement de l'économie réelle qu'au rendement du produit pour l'épargnant .

La crainte que ce risque ne se matérialise, surtout mise en avant par les représentants des assureurs, est toutefois inégalement partagée . Il n'y a d'ailleurs aucune raison évidente à ce que les épargnants « fuient » systématiquement leurs anciens contrats si l'entreprise d'assurance avec laquelle ils sont engagés leur propose des offres mieux adaptées à leur situation, dans le cadre d'un transfert interne.

Ensuite, en cas de mise en oeuvre de la transférabilité externe - même entourée par les garde-fous prévus par l'article 7 - le rachat des contrats d'assurance vie serait plus fréquent qu'aujourd'hui . Si c'est bien là tout l'intérêt de cette mesure que d'ouvrir plus de possibilités à l'épargnant sans qu'il n'ait à perdre ses avantages fiscaux, elle pourrait aussi avoir des effets déstabilisants selon certaines personnes entendues par les rapporteurs.

En cas d'important retrait des fonds, dont trois quarts sont aujourd'hui investis en fonds euros, certains craindraient que, pour préserver la garantie sur les fonds euros, les assureurs finissent par augmenter les frais, voire suppriment la garantie. Toutefois, cet argument d'opposition à la transférabilité externe peut être repoussé en indiquant que dans une telle hypothèse, les fonds euros deviendraient si peu attractifs pour les épargnants en recherche de sécurité que ces derniers investiraient ailleurs. La perte anticipée pour les assureurs serait telle qu'ils n'auraient en fait d'autre choix que de préserver cette garantie.

Pour ceux qui pourraient s'inquiéter d'un retrait massif et rapide des fonds investis dans les contrats d'assurance vie, ce qui serait déstabilisant pour le système financier , on peut ici rappeler que l'ACPR peut prendre des mesures telles que la suspension, la restriction ou encore l'interdiction temporaire de la libre disposition de tout ou partie des actifs de l'assureur 75 ( * ) . De même, le Haut conseil de stabilité financière pourrait limiter temporairement les opérations sur les contrats d'assurance vie 76 ( * ) .

Enfin, l'attention des rapporteurs a été attirée sur le fait que, dans la mesure où il n'existe aucun frein contractuel au rachat des contrats , seul le frein fiscal, constitué par l'avantage octroyé au bout de huit ans et aussi efficace qu'un frein contractuel, permet de s'assurer du caractère non systémique du risque présenté par l'assurance vie. Dans les négociations européennes autour de la révision de la directive « Solvabilité 2 », l'ACPR a ainsi pu démontrer sur longue période la remarquable stabilité de l'assurance vie et l'effet du frein fiscal sur le passif de l'assurance vie, ce qui a permis de justifier le caractère superflu de fonds propres supplémentaires.

La transférabilité externe serait selon certains susceptible de fragiliser ce frein fiscal, conduisant à faire de l'assurance vie un risque systémique ou, du moins, à augmenter le score de systémicité des assureurs français.

Face à tous ces risques de portée variable, il faut d'abord rappeler que la portabilité de l'antériorité fiscale ne pourrait concerner que les transferts de contrat de plus de huit ans . Ce délai, calqué sur l'antériorité actuellement requise pour bénéficier des avantages fiscaux sur l'assurance vie, constitue un garde-fou permettant en partie de juguler le risque de retraits non anticipés .

Il convient surtout d' avoir une vision nuancée des effets attendus de cette mesure : en ce qu'elle améliorerait la qualité des conseils prodigués aux épargnants, ces derniers auraient en vérité moins de raisons de quitter leur assureur , ce qui atténuerait finalement les risques de retrait précipité des fonds et de désorganisation du secteur assurantiel avancés par certains. S'il est inévitable que la mesure entraîne le transfert de certains contrats, ce sera surtout parce que le service rendu au client aura été de qualité médiocre : il paraîtrait alors injuste de rendre l'épargnant captif d'un assureur peu diligent.

3. Un rappel de l'objectif principal du dispositif

Plus que jamais désireux de faire évoluer le marché de l'assurance vie vers une concurrence accrue et un élargissement des possibilités offertes aux épargnants, les rapporteurs estiment ainsi que ce dispositif doit être adopté, tout en rappelant son objectif principal : encourager, en amont, des pratiques de conseil plus adaptées de la part des assureurs, donnant éventuellement lieu à un transfert interne.

La commission a ainsi adopté leur amendement COM-17, visant à prévoir que, dans le délai laissé à l'assureur pour opérer le rachat total du contrat, celui-ci puisse proposer à son client, en lieu et place du rachat, le transfert interne de son contrat .

Il reporte aussi l'application de ces dispositions aux rachats intervenant non pas à compter du 1 er janvier 2024 mais du 1 er janvier 2025 , laissant ainsi le temps au marché de l'assurance de s'adapter à ce nouveau régime de transfert.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 7 bis (nouveau)

Devoir de conseil dans la durée des intermédiaires et des assureurs

. Le présent article, introduit par la commission en adoptant l'amendement COM-19 des rapporteurs, vise à instituer un devoir de conseil dans la durée de la part des intermédiaires et des assureurs, de sorte que les obligations d'information déjà prévues avant la souscription ou l'adhésion à un contrat d'assurance s'appliquent aussi à l'occasion de toute opération susceptible d'affecter le contrat de façon significative. Il prévoit également que le service de recommandation personnalisée tel que défini par le code des assurances puisse être fourni y compris après souscription ou adhésion au contrat.

La commission a adopté cet article.

I. LE DROIT EXISTANT : UN DEVOIR DE CONSEIL LIMITÉ AVANT LA SOUSCRIPTION OU L'ADHÉSION À UN CONTRAT

Introduit par l'article 10 de l'ordonnance du 16 mai 2018 relative à la distribution d'assurance 77 ( * ) , elle-même prise sur le fondement du V de l'article 46 de la loi « Sapin 2 » 78 ( * ) visant à transposer la directive relative à la distribution d'assurance, dite « DDA », du 20 janvier 2016 79 ( * ) , l'article L. 522-5 du code des assurances détermine la nature du conseil adressé par l'intermédiaire ou l'entreprise d'assurance à l'épargnant avant la souscription ou l'adhésion à un contrat de capitalisation ou à certains contrats d'assurance vie.

Aux termes du I de cet article, ces obligations comprennent la précision écrite des exigences et besoins exprimés par le souscripteur ou adhérent éventuel, les raisons justifiant le caractère approprié du contrat proposé ainsi que la fourniture d' informations objectives sur le produit d'assurance proposé sous une forme compréhensible, exacte et non trompeuse, afin de lui permettre de prendre une décision en connaissance de cause . Après s'être enquis de la situation financière, des objectifs d'investissement et des connaissances du souscripteur ou de l'adhérent éventuel, il est également prévu que l'intermédiaire ou l'assureur lui conseille un contrat cohérent avec ses exigences et ses besoins, en précisant les raisons qui motivent ce conseil. Introduite par l'article 72 de la loi « Pacte » 80 ( * ) , une information détaillée prenant la forme d'un tableau retraçant les frais et la performance nette du contrat doit aussi être communiquée pour les contrats dont les garanties sont exprimées en unités de compte.

Le II définit le service de recommandation personnalisée, fourni avant la souscription ou l'adhésion au contrat , et prévoit qu'il consiste à expliquer au souscripteur ou adhérent éventuel en quoi, parmi différents contrats ou différentes options d'investissement au sein d'un contrat, certains d'entre eux sont plus adéquats à ses exigences et besoins, et en particulier plus adaptés à sa tolérance aux risques et à sa capacité à subir des pertes.

En revanche, en dehors des obligations d'information annuelle prévues à l'article L. 132-22 du code des assurances, il n'y a pas de nouveau conseil spécifique prévu sur la durée du contrat . Si certains intermédiaires et assureurs diligents peuvent faire un point régulier avec le contractant sur sa situation et sur les nouvelles possibilités d'investissement qui s'offrent à lui, il ne s'agit pas là d'une contrainte légale.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : CRÉER UN DEVOIR DE CONSEIL DANS LA DURÉE, TOUT AU LONG DU CONTRAT

Le présent article , issu d'un amendement COM-19 déposé par les rapporteurs, tend à instituer, pour les intermédiaires et assureurs, un devoir de conseil dans la durée , destiné notamment à adapter les offres proposées à l'assuré en fonction de l'évolution de son profil et de ses besoins.

Il crée ainsi un nouveau III dans l'article L. 522-5 du code des assurances , qui prévoit que les obligations concernant l'intermédiaire ou l'entreprise d'assurance prévues au I ou, selon le cas, au II de ce même article, s'appliquent également à l'occasion de toute opération susceptible d'affecter le contrat de façon significative , opérations dont la liste serait définie par arrêté. Cela doit être l'occasion de conseiller une opération cohérente avec les exigences et besoins du souscripteur ou de l'adhérent, telles qu'elles se présentent au moment de cette opération.

Il prévoit par ailleurs que le service de recommandation personnalisée, dans sa définition prévue au II de ce même article L. 522-5, puisse être fourni à la suite de la souscription ou de l'adhésion au contrat, et pas seulement avant.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article.

ARTICLE 7 ter (nouveau)

Respect des engagements contractuels en cours d'exécution du contrat

. Le présent article, introduit par la commission en adoptant l'amendement COM-20 des rapporteurs, introduit pour les assureurs, les mutuelles, les institutions de prévoyance et les prestataires de services bancaires et d'investissement une obligation expresse de respect des engagements contractuels en cours d'exécution du contrat.

La commission a adopté cet article.

I. LE DROIT EXISTANT : UNE OBLIGATION DE RESPECT DU CONTRAT LIMITÉE AU MOMENT DE LA MATÉRIALISATION DU RISQUE

Les articles L. 113-5 du code des assurances, L. 221-17-1 du code de la mutualité et L. 932-13-5 du code de la sécurité sociale prévoient les obligations contractuelles qui s'appliquent aux assureurs, mutuelles, institutions de prévoyance et unions. Ainsi, soit lors de la réalisation du risque, soit à l'échéance du contrat, de l'adhésion au règlement ou du contrat collectif, ils doivent exécuter dans le délai convenu, selon le cas, la prestation déterminée par ce même contrat, ce règlement ou ce contrat collectif, et ne peuvent être tenus au-delà.

La seule obligation explicitement prévue par la loi concerne donc l'exécution de la prestation lors de la réalisation du risque ou bien à l'échéance du contrat - éventuellement collectif - ou de l'adhésion au règlement. En revanche, il n'est pas prévu expressément que les engagements contractuels doivent être respectés en cours d'exécution du contrat.

Or l'activité de surveillance de l'ACPR a mis en évidence des abus de la part de certains assureurs dans le cadre du versement des prestations en assurance vie . Dans son rapport annuel pour 2021, elle signalait en effet qu'ils ne respectent pas toujours leurs engagements contractuels, en particulier concernant les tables de mortalité et taux techniques garantis, les modalités de calcul et d'attribution de la participation aux bénéfices, ou encore le respect des cantons réglementaires et contractuels. Ce constat concerne en particulier les contrats anciens, dont les clauses peuvent être très diverses et complexes 81 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : INSTITUER UNE OBLIGATION DE RESPECT DES ENGAGEMENTS CONTRACTUELS EN COURS D'EXÉCUTION DU CONTRAT

Le présent article, issu d'un amendement COM-20 déposé par les rapporteurs, tend à instituer, pour les assureurs, mutuelles, institutions de prévoyance ou unions, mais aussi pour les prestataires de services bancaires, de paiement ou encore d'investissement, une obligation de respect des engagements contractuels en cours d'exécution du contrat.

Il modifie ainsi les articles L. 113-5 du code des assurances, L. 221-17-1 du code de la mutualité et L. 932-13-5 du code de la sécurité sociale de façon à ce que respectivement l'assureur, la mutuelle et l'institution de prévoyance doivent exécuter, selon le cas, ses contrats, ses règlements mutualistes, règlements et contrats collectifs, conformément aux engagements pris à l'égard :

- pour l'assureur, des assurés, souscripteurs, adhérents ou bénéficiaires ;

- pour la mutuelle ou union, des membres participants, de leurs ayants droits et des bénéficiaires ;

- pour l'institution de prévoyance ou union, des membres participants ou bénéficiaires.

Il crée également un nouvel article L. 500-1 dans le code monétaire et financier, prévoyant que les prestataires de services respectent à tout moment leurs engagements contractuels à l'égard de leur clientèle.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article.

ARTICLE 8

Prorogation jusqu'en 2026 du bénéfice de l'incitation fiscale visant à encourager le transfert des sommes investies dans un contrat d'assurance vie vers un plan d'épargne retraite

. Le présent article vise à proroger jusqu'en 2026 une incitation fiscale introduite par la loi « Pacte » afin d'encourager le transfert de l'épargne investie dans un contrat d'assurance vie vers un plan d'épargne retraite (PER). Celle-ci prévoyait que l'épargnant qui procède au rachat de son contrat d'assurance vie pour verser l'épargne récupérée sur un PER bénéficierait, jusqu'au 1 er janvier 2023, d'un doublement des abattements annuels en vigueur pour l'imposition des gains en cas de rachat.

La commission a adopté cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : UNE INCITATION FISCALE MISE EN PLACE PAR LA LOI « PACTE » POUR ENCOURAGER LE TRANSFERT DE L'ÉPARGNE DES CONTRATS D'ASSURANCE VIE VERS LES PLANS D'ÉPARGNE RETRAITE

La loi « Pacte » 82 ( * ) , qui a mis en place le plan d'épargne retraite (PER) 83 ( * ) , a également prévu en son article 72 des dispositions visant à inciter le placement de l'épargne des français sur ce produit.

Ainsi, l'article 125-0 A du code général des impôts (CGI) a été modifié de façon à introduire un septième alinéa dans le 1° de son I, pour que l'épargnant souhaitant procéder, plus de cinq ans avant l'âge de départ à la retraite, à un rachat de son contrat d'assurance vie pour verser l'épargne récupérée dans un PER bénéficie, jusqu'au 1 er janvier 2023, d'un doublement des abattements annuels en vigueur pour l'imposition des gains en cas de rachat , soit 9 200 euros pour un célibataire et 18 400 euros pour un couple.

En outre, lors du versement de ces sommes dans le PER, l'épargnant pouvait bénéficier des avantages fiscaux des versements volontaires des PER en optant pour la déductibilité de ces sommes de son revenu global, dans la limite de 10 % de ses revenus professionnels et de huit fois le plafond annuel de la sécurité sociale, étant entendu que le versement de ces sommes dans le PER devait être effectué avant le 31 décembre de l'année du rachat.

Selon les chiffres communiqués par les services ministériels, cette dépense fiscale a représenté en 2022 un coût de 13 millions d'euros.

Si le succès du PER - qui dépasse largement les attentes avec, en octobre 2022, 6 millions de PER pour un encours total de 70 milliards d'euros 84 ( * ) - est en grande partie indépendant de cette incitation, son maintien pourrait permettre d' encourager la migration d'anciens contrats d'assurance vie vers ces PER, qui constituent un outil adapté pour préparer sa retraite. C'était le sens de la recommandation n° 12 du rapport d'information d'octobre 2021 sur la protection des épargnants 85 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA PROROGATION DE L'INCITATION FISCALE JUSQU'EN 2026

Mettant en oeuvre cette recommandation, le présent article vise à proroger jusqu'au 1 er janvier 2026 le bénéfice de cette incitation fiscale à transférer les sommes investies dans un contrat d'assurance vie vers un plan d'épargne retraite, en modifiant le 1° du I de l'article 125-0 A du code général des impôts .

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : ENCOURAGER LE RECOURS AU PLAN D'ÉPARGNE RETRAITE

Le maintien de cette incitation fiscale pourrait encourager à épargner en recourant davantage au PER , outil plus adapté que l'assurance vie pour financer sa propre retraite.

Le devoir de conseil lors du transfert d'un contrat d'assurance vie vers un PER reste toutefois essentiel , puisque ce transfert entraîne la perte de certaines garanties et des modifications de tarifs, et notamment l'existence d'un minimum de versement dans certains PER. En outre, il convient de mentionner la prise de risque accrue qui accompagne certains PER. En appelant à la vigilance, les rapporteurs relaient le constat du Comité consultatif du secteur financier selon lequel ces transferts pouvaient être l'occasion pour l'assureur d'améliorer sa marche de solvabilité 86 ( * ) .

Certes, l'efficacité de ce dispositif s'avère encore modérée, avec seulement 13 millions d'euros concernés en 2022. Mais il a le mérite d'encourager, ne serait-ce que faiblement, la migration de l'épargne vers les PER et les épargnants à s'approprier ce nouvel instrument financier « grand public », tout en stabilisant sur longue période une épargne importante à même de financer l'économie réelle. En effet, à la différence des sommes investies dans un contrat d'assurance vie, qui peuvent être retirées à tout moment, celles qui sont placées sur un PER sont en revanche, sauf exception, immobilisées jusqu'à l'âge de la retraite, ce qui permet de financer des investissements de long terme.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article sans modification.

ARTICLE 9

Mise en place d'un fonds de fonds indiciels cotés géré par la Caisse des dépôts et consignations

. Le présent article vise à confier à la Caisse des dépôts et consignations (CDC) la gestion d'un fonds de fonds indiciels cotés, qui serait ensuite distribué dans les plans d'épargne retraite (PER).

Afin de laisser le temps aux acteurs de marché de structurer une offre dans laquelle la CDC pourrait puiser pour constituer ce fonds, la commission a adopté un amendement COM-21 des rapporteurs visant à reporter l'entrée en vigueur de cet article au 1 er janvier 2025.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : DES PRODUITS D'ÉPARGNE RETRAITE COÛTEUX, À LA DIFFÉRENCE DE CE QUI EXISTE AU ROYAUME-UNI

Dans leur rapport de 2021 sur la protection des épargnants 87 ( * ) , les rapporteurs faisaient le constat général de produits d'épargne trop chargés en frais.

Les plans d'épargne retraite (PER) assurantiels qui, tout en recueillant l'assentiment des épargnants du fait de l'accès aux fonds euros qu'ils permettent, ne font pas exception à la règle : les frais pratiqués en leur sein « constituent un véritable " millefeuille " tarifaire dont le coût peut être très élevé » 88 ( * ) .

Les PER compte-titres, qui pourraient constituer une alternative, ne rencontrent pas le même succès alors même qu'ils sont beaucoup moins chargés en frais. L'alignement de leur régime fiscal sur celui des PER assurantiels a été exclu par les rapporteurs du fait du coût trop élevé qu'il aurait fait peser sur les finances publiques. En outre, cet alignement n'aurait pas nécessairement eu un effet considérable, car les PER compte-titres ne donnent pas accès au fonds en euros. Au surplus, l'offre disponible est limitée puisqu'en novembre 2022, seuls le Crédit Agricole, Yomoni et Inter Invest distribuaient un PER compte-titres.

Dans un contexte d'allongement de l'espérance de vie, d'incertitudes quant à la viabilité de notre système de retraite, et afin de maintenir le niveau de vie à l'âge de la retraite, il paraît pourtant particulièrement dommageable de ne pas disposer de produits d'épargne retraite peu chargés en frais. Cela est d'autant plus regrettable que, comme les rapporteurs le soulignaient dans leur rapport d'information, les supports d'investissement fonctionnant en gestion passive , qui répliquent les indices boursiers 89 ( * ) , remplissent bien le double objectif d'un rendement appréciable sur le long terme - qui est l'horizon de l'épargne retraite - et d'un niveau de frais limité.

Les rapporteurs ont ainsi proposé de s'inspirer de l'exemple britannique du National Employment Savings Trust (NEST), fonds de pension public auquel les salariés britanniques ont obligation d'adhérer et présentant un faible niveau de frais, pour mettre en place un dispositif public facultatif de plan d'épargne retraite dont le fonctionnement ne reposera que sur la gestion passive 90 ( * ) .

Le « National Employment Savings Trust » (NEST)

Mis en place en 2008 dans le cadre d'une vaste réforme des retraites ( Pensions Act ) , le NEST est un fonds de pension public à laquelle l'adhésion est obligatoire pour les salariés éligibles, sauf s'ils le déclinent. Cela donne lieu à une augmentation continue du nombre de ses membres, passant ainsi de 9,9 millions à 11,1 millions entre le 31 mars 2021 et le 31 mars 2022, pour un actif sous gestion passant de 17,6 à 24,4 milliards de livres sterling sur la même période 91 ( * ) . Les versements sont composés d'une participation du salarié, de l'employeur et d'un crédit d'impôt d'État, et les frais sont plafonnés à 1,8% du montant de chaque nouvelle contribution, et à 0,3 % de l'encours total de l'épargne par souscripteur. La structure administrative du fonds est une entité publique indépendante du Gouvernement et responsable devant le Parlement.

Source : rapport d'information de MM. HUSSON et de MONTGOLFIER sur la protection des épargnants, rapport annuel du NEST

Si, du fait de son caractère obligatoire et indissociable d'une réforme ayant mis en place un système de retraite par capitalisation, un « NEST » français n'est aujourd'hui pas envisageable, l'enjeu est surtout, dans l'immédiat, de stimuler la concurrence sur le marché des plans d'épargne retraite.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : CONFIER À LA CAISSE DES DÉPÔTS LA GESTION D'UN FONDS DE FONDS INDICIELS COTÉS DISTRIBUÉ DANS LES PLANS D'ÉPARGNE RETRAITE.

Le présent article introduit ainsi un nouvel article L. 518-24-2 dans le code monétaire et financier , qui vise à confier à la Caisse des dépôts et consignations la gestion administrative et financière d'un fonds de fonds indiciels cotés (ETF, pour exchange traded funds ). Il prévoit également que les parts de ce fonds sont acquises par l'affectation de versements dans un plan d'épargne retraite. Ces parts constitueraient donc des produits distribués au niveau de ces PER.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : CONFIRMER L'INTÉRÊT DU PRODUIT TOUT EN REPORTANT SON ENTRÉE EN VIGUEUR POUR LAISSER LE TEMPS DE DÉVELOPPER UNE OFFRE CONSISTANTE

Le secteur bancaire et assurantiel français ne parvient que difficilement à engager une dynamique en faveur du déploiement d'une offre de gestion passive . Le marché français compte en effet aujourd'hui très peu d' émetteurs d'ETF.

Appuyée sur l'obligation de présentation par les distributeurs d'assurance vie et de plans d'épargne retraite prévue par l'article 3, la création de ce fonds pourrait être un outil intéressant pour stimuler le déploiement d'une réelle offre de supports d'investissement appuyés sur une gestion passive. Assurés que le fonds géré par la Caisse des dépôts serait présenté à l'épargnant, les acteurs financiers pourraient commencer à développer une offre d'ETF pour intégrer ce fonds. Au-delà, la simple présence de cette offre pourrait agir comme un révélateur pour les épargnants, qui constateraient alors les vertus de la gestion passive.

La Caisse des dépôts et consignations , auprès de laquelle il est déjà possible d'ouvrir un plan d'épargne en actions (PEA) 92 ( * ) ou un PEA-PME 93 ( * ) , paraît, dans cette logique, constituer un acteur adapté pour accueillir cette mission. Les rapporteurs notent également l'image positive que renvoie la Caisse des dépôts auprès de nombreux épargnants français, parfois plus prompts à accorder leur confiance à un acteur public de ce type qu'à un acteur financier privé, et donc à lui confier leur argent.

Si certaines personnes entendues en audition par les rapporteurs ont pu faire apparaître une préoccupation quant au fléchage, par l'acquisition d'ETF, de l'épargne française vers le financement d'économies étrangères - notamment américaine - ce risque serait d'autant plus aisément levé par le dispositif proposé par le présent article que la Caisse des dépôts a pour mission de participer au financement de l'économie française et européenne .

En revanche, il apparaît opportun de reporter l'entrée en vigueur de l'article , d'abord pour permettre à la Caisse des dépôts de mettre en place ce fonds, mais aussi, et surtout, pour laisser le temps aux acteurs de mettre en place une offre d'ETF dans laquelle elle pourrait venir puiser .

En cohérence avec la date d'entrée en vigueur prévue pour l'article 3, la commission a donc adopté un amendement COM-21 des rapporteurs visant à différer l'entrée en vigueur du présent article au 1 er janvier 2025.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 10

Contrôle par l'organisme pour le registre unique
des intermédiaires en assurance, banque et finance (Orias) de l'honorabilité des dirigeants et des salariés des intermédiaires
ayant l'obligation de s'immatriculer auprès de ce registre

. Le présent article vise à confier à l'organisme pour le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance (Orias) le contrôle de l'honorabilité des dirigeants et des salariés des intermédiaires immatriculés auprès de ce registre.

L'Orias doit déjà s'assurer, par une consultation du casier national judiciaire, de l'honorabilité des dirigeants des intermédiaires immatriculés. Concernant les salariés de ces intermédiaires, le contrôle de l'honorabilité incombait jusqu'au 1 er avril 2022 à leur employeur. Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 8 avril 2021 relative à la réforme du courtage, les personnes immatriculées auprès de l'Orias doivent obligatoirement adhérer à une association professionnelle agréée par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Il revient ensuite à ces associations de vérifier les conditions d'exercice de leurs adhérents.

Dans leur rapport sur la protection des épargnants, les rapporteurs ont estimé que ce modèle de « co-régulation » était perfectible et qu'un rôle plus important pourrait être confié à l'Orias. Or, il ressort de leurs travaux complémentaires menés pour l'examen de la proposition de loi que l'Orias serait actuellement dans l'incapacité d'exercer le contrôle de l'honorabilité des dirigeants et des salariés des intermédiaires immatriculés. Les rapporteurs ont donc proposé à la commission de supprimer l'article (amendement COM-22), tout en soulignant que le système mis en place par la loi relative à la réforme du courtage était loin d'être optimal.

Pour que ce modèle fonctionne, et pour écarter toute suspicion de complaisance et assurer aux épargnants les plus fortes garanties sur leurs interlocuteurs, il convient, en tout état de cause, de s'assurer que les associations professionnelles agréées remplissent correctement leurs missions. Il revient dès lors à l'ACPR de les contrôler fréquemment.

La commission a supprimé cet article.

I. LE DROIT EXISTANT : LA RÉFORME DU COURTAGE EN ASSURANCE ET DU COURTAGE EN OPÉRATIONS DE BANQUE ET EN SERVICES DE PAIEMENT EST ENTRÉE EN VIGUEUR LE 1 ER AVRIL 2022

A. PROTÉGER LES ÉPARGNANTS EN TANT QUE CONSOMMATEURS D'UNE PRESTATION DE SERVICE

Dans leur rapport d'information sur la protection des épargnants 94 ( * ) , les rapporteurs ont identifié deux grands axes de réflexion pour mieux protéger les épargnants : en leur servant une meilleure performance d'une part, et en encadrant davantage les acteurs du marché de l'épargne d'autre part.

Il s'agissait dans ce dernier cas d'identifier de possibles « points de fuite » dans le corpus normatif mis en place par la France, corpus dense qui peut s'appuyer sur un dispositif de supervision à la fois exigeant et suffisamment flexible pour s'adapter aux évolutions du marché et aux nouveaux produits. Les pouvoirs de contrôle, d'enquête, de blocage et de sanction de l'Autorité des marchés financiers (AMF) et de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), qui se coordonnent également au sein d'un pôle commun, ont été renforcés au fil des années.

Plusieurs pistes de progression avaient été mises en avant dans le rapport d'information, avec pour point commun l'objectif de poursuivre les efforts engagés pour mieux encadrer les intermédiaires . La recommandation n° 14 des rapporteurs visait ainsi à confier à l'organisme pour le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance (Orias) le contrôle de l'honorabilité des dirigeants et des salariés des intermédiaires immatriculés auprès de ce registre .

Les statuts des intermédiaires vers lesquels les épargnants peuvent se tourner sont en effet nombreux et régis par des règles différentes. L'encadrement de leurs conditions d'exercice a été initié par le législateur en 1989 95 ( * ) avec la mise en place d'un dispositif de recensement d'abord limité aux seuls courtiers en assurance.

Aujourd'hui, en application de l'article L. 512-1 du code des assurances, cette mission est assurée par l'Orias, structure bénéficiant du statut d'association loi 1901. Le champ de l'obligation d'immatriculation sur le registre, public, a été progressivement étendu . Il inclut désormais 96 ( * ) :

- les intermédiaires en assurance , c'est-à-dire les courtiers en assurance ou réassurance, les agents généraux d'assurance, les mandataires d'assurance, ainsi que les mandataires d'intermédiaires d'assurances ;

- les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement (IOBSP), qui comprennent les courtiers, mandataires exclusifs, et les mandataires d'intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement ;

- les intermédiaires financiers , catégorie recouvrant les conseillers en investissements financiers (CIF) et les agents liés de prestataires de services d'investissement (ALPSI) ;

- les agents liés de prestataires de services d'investissement (ALPSI) ;

- les conseillers en investissements participatifs 97 ( * ) (CIP) et les intermédiaires en financement participatif (IFP).

Au 31 décembre 2021, 71 295 intermédiaires étaient immatriculés à l'Orias 98 ( * ) . L'association a traité 63 571 demandes sur l'année, témoignant d'un fort taux de rotation avec 46 % d'inscriptions, 32 % de modifications d'inscription, 17 % de suppressions et 4 % de radiations.

B. UNE RÉCENTE RÉFORME DU COURTAGE A RENFORCÉ LE RÔLE ET LA PLACE DES ASSOCIATIONS PROFESSIONNELLES

Pour s'immatriculer auprès de l'Orias et exercer leurs activités professionnelles, les intermédiaires doivent respecter des conditions d'honorabilité , de capacité professionnelle, d'assurance de responsabilité civile professionnelle et de garantie financière.

Aux termes des articles R. 514-1 du code des assurances et R. 546-5 du code monétaire et financier, l'Orias doit demander la communication du bulletin n° 2 du casier judiciaire pour vérifier l'honorabilité des intermédiaires . Cette procédure est automatisée et fait l'objet d'un traitement de masse : près de 200 000 demandes ont été adressées par l'Orias au casier judiciaire national en 2021 99 ( * ) .

Ce contrôle de l'honorabilité par l'Orias ne concerne que les dirigeants des intermédiaires qui doivent s'immatriculer, et non pas les salariés . Pour ces derniers, le contrôle incombait jusqu'au mois d'avril 2022 à leur employeur , sur la base d'une attestation sur l'honneur ou d'une copie de l'extrait du casier judiciaire, une garantie moins fiable qu'une interrogation directe du casier judiciaire national.

La loi du 8 avril 2021 relative à la réforme du courtage en assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement 100 ( * ) (« réforme du courtage ») a conduit à rénover le cadre applicable au contrôle de ces courtiers . Entrée en vigueur le 1 er avril 2022, elle impose à tous les professionnels souhaitant s'immatriculer à l'Orias d' adhérer à une association professionnelle agréée . Pour ceux qui étaient déjà immatriculés, et s'ils ne modifiaient pas leur inscription dans cet intervalle, ils avaient jusqu'au renouvellement de leur inscription au mois de janvier 2023 pour respecter cette obligation.

Les associations professionnelles, agréées par l'ACPR , se sont vues confier d' importantes missions de vérification des conditions d'accès et d'exercice à la profession (honorabilité, capacité professionnelle, responsabilité civile professionnelle, garantie financière, formation continue) et d'accompagnement de leurs membres dans l'exercice de leur activité 101 ( * ) .

Lors de son examen, Albéric de Montgolfier, rapporteur, avait salué la première réponse apportée par la proposition de loi pour structurer ce secteur d'activité, tout en soulignant que sa portée serait sans doute modeste 102 ( * ) . Il avait également regretté que l'Orias ne joue pas un rôle plus important dans le contrôle de l'honorabilité des salariés des intermédiaires . L'Orias dispose en effet du droit d'accéder au casier national judiciaire, ce qui présente un niveau de garantie élevé, tandis que les associations professionnelles peuvent uniquement demander les documents justifiant de l'honorabilité des dirigeants et des salariés. Le Sénat avait alors adopté, à l'initiative de la commission des finances, un amendement confiant ce contrôle de l'honorabilité à l'Orias, mais cette rédaction n'a pas été retenue par la commission mixte paritaire.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : CONFIER À L'ORIAS LE CONTRÔLE DE L'HONORABILITÉ DES DIRIGEANTS ET DES SALARIÉS DES INTERMÉDIAIRES IMMATRICULÉS AUPRÈS DE CE REGISTRE

Traduisant la recommandation n° 14 du rapport d'information relatif à la protection des épargnants, le présent article prévoit de confier à l'Orias le contrôle de l'honorabilité des dirigeants et des salariés des intermédiaires immatriculés auprès de ce registre .

Le I du présent article modifie l'article L. 513-3 du code des assurances afin de prévoir que la vérification des conditions d'honorabilité des courtiers d'assurance, dirigeants comme salariés, ne relève pas des associations professionnelles agréées auxquelles ils ont adhéré, mais de l'Orias .

Le II du présent article modifie l'article L. 519-11 du code monétaire et financier pour faire de même pour les dirigeants et les salariés des intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement .

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : EN L'ABSENCE DE SOLUTION OPTIMALE, LE MAINTIEN DE LA RÉCENTE RÉFORME DU COURTAGE ET LA NÉCESSITÉ DE RENFORCER LE CONTRÔLE DES ASSOCIATIONS PROFESSIONNELLES

Lorsque les rapporteurs ont publié leur rapport d'information (octobre 2021) puis déposé leur proposition de loi (mars 2022), les dispositions de la loi du 8 avril 2021 relative à la réforme du courtage n'étaient pas encore entrées en vigueur.

Il ressort des auditions menées dans le cadre de l'examen de la présente proposition de loi que les associations professionnelles agréées ont consenti d'importants efforts pour assurer pleinement leurs nouvelles missions de vérification, dont relève le contrôle de l'honorabilité . Au-delà d'une vérification documentaire, les associations peuvent mener un contrôle approfondi des intermédiaires, pour s'assurer qu'ils respectent leurs exigences professionnelles et qu'ils satisfont aux conditions d'accès et d'exercice de leur activité, y compris leurs salariés. D'après les informations recueillies en audition, ce contrôle ne pourrait probablement pas être mené par l'Orias, association dont les moyens humains, informatiques et budgétaires sont limités .

Tenant compte à la fois de l'entrée en vigueur de la loi relative à la réforme du courtage et du manque de moyens de l'Orias, les rapporteurs ont proposé à la commission de supprimer cet article (amendement COM-22) . Ils soulignent toutefois que le système mis en place par la loi précitée reste insuffisamment optimal et suppose une vigilance accrue de la part des autorités de supervision .

Les dispositions de la loi du 8 avril 2021 s'inspirent du modèle qui a été mis en place pour les conseillers en investissements financiers (CIF), avec un système de « co-régulation » impliquant l'AMF et les associations professionnelles de CIF agréées. Si l'AMF avait dressé un bilan plutôt positif de ce modèle de régulation, avec un premier « filtre » de contrôle exercé par les associations professionnelles, ce modèle n'est pas exempt de critiques.

En effet, pour que ce système fonctionne, et pour écarter toute suspicion de conflit d'intérêts ou de complaisance des associations professionnelles envers leurs membres, il convient de s'assurer qu'elles remplissent correctement leurs missions . À ce titre, l'AMF et l'ACPR ont un rôle primordial à jouer, en tant qu'autorités de supervision agréant ces associations.

Ainsi, comme les rapporteurs ont pu le dire dès leur rapport sur la protection des épargnants, il est essentiel que l'AMF comme l'ACPR s'assurent régulièrement que les associations professionnelles agréées remplissent pleinement leurs obligations . C'est l'une des conditions du succès de la réforme du 8 avril 2021 et de la garantie d'une certaine confiance pour les épargnants recourant à ces courtiers. À défaut, il faudra de nouveau envisager d'élargir le rôle de l'Orias ou des autorités de supervision directement.

Décision de la commission : la commission des finances a supprimé cet article.

ARTICLE 11

Renforcement de l'information et de la protection
des épargnants investissant dans le logement locatif défiscalisé

. Le présent article vise, d'une part, à accroître les contrôles a priori des offres d'investissement défiscalisé dans le secteur du logement locatif et, d'autre part, à fournir aux épargnants une information beaucoup plus transparente et complète sur les risques encourus dans le cadre de ces investissements, que ce soit sur le plan de leur patrimoine (valorisation de l'immobilier) ou sur le plan fiscal (reprise de l'avantage fiscal par l'administration en cas de non-respect des conditions régissant leur octroi).

En effet, dans le cadre de leur rapport d'information sur la protection des épargnants, les rapporteurs ont eu confirmation que l'avantage fiscal attaché aux dispositifs tels que le « Pinel », le « Girardin » ou le « Censi-Bouvard » avait tendance à faire oublier aux épargnants les risques inhérents à de tels investissements. Il convient dès lors de davantage protéger les ménages contre les offres frauduleuses ou qui les induisent en erreur sur le rendement net espéré et sur son coût potentiel.

Après une longue interrogation sur le meilleur moyen de renforcer le contrôle de ces offres, il a initialement été proposé de créer un nouveau statut d'intermédiaires en immobilier et de leur imposer des obligations similaires à celles qui incombent désormais aux intermédiaires en biens divers (investissements dits « atypiques » comme le vin ou les oeuvres d'art), sous l'égide de l'Autorité des marchés financiers (AMF). Il ressort toutefois des travaux des rapporteurs qu'un meilleur moyen d'imposer rapidement de nouvelles exigences aux opérations immobilières précitées et d'accroître la transparence vis-à-vis des épargnants serait de modifier le code de la consommation et de renforcer les prérogatives des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

Ainsi, par l'amendement COM-23, les rapporteurs ont proposé de réécrire le présent article afin de renforcer les exigences en matière de publicité, d'obliger les vendeurs à remettre une notice d'information aux épargnants intéressés par un investissement, de rendre les amendes administratives plus dissuasives en cas de manquement à ces obligations et de clarifier les compétences des agents de la DGCCRF pour rechercher et constater ces manquements.

Il est également prévu que le Gouvernement remette au Parlement une évaluation des moyens nécessaires à la mise en oeuvre d'un contrôle systématique des publicités en faveur d'investissements défiscalisés dans le logement locatif. C'est à terme le seul moyen de protéger les épargnants les moins avertis contre des offres frauduleuses ou omettant volontairement les risques liés à l'investissement immobilier.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : LES DISPOSITIFS D'INCITATION FISCALE À L'INVESTISSEMENT LOCATIF DEMEURENT PEU ENCADRÉS

Dans leur rapport d'information sur la protection des épargnants 103 ( * ) , au-delà de la question de la performance nette des produits, les rapporteurs ont également insisté sur l'encadrement des acteurs du marché de l'épargne . Si le corpus normatif mis en place par la France dans ce domaine est à la fois très exigeant et très flexible, puisqu'il a pu être adapté aux évolutions du marché et aux nouveaux produits, des « points de fuite » demeurent.

Plusieurs pistes de progression avaient été suggérées, avec pour point commun l'objectif de poursuivre les efforts dans le contrôle des intermédiaires . La recommandation n° 16 visait ainsi à étudier l'opportunité d'étendre le champ d'intervention de l'Autorité des marchés financiers (AMF) au contrôle préalable des investissements défiscalisés dans le logement locatif, et notamment en matière de publicité.

A. PLUSIEURS DISPOSITIFS FISCAUX VISENT À INCITER LES ÉPARGNANTS À INVESTIR DANS LE LOGEMENT LOCATIF

1. Des dispositifs fiscaux incitatifs aux objectifs divers

Parmi les dispositifs d'incitation fiscale à l'investissement dans le logement locatif, l'un des plus connus et mobilisés est le dispositif « Pinel » , prévu à l'article 199 novovicies du code général des impôts (CGI).

Il prend la forme d'une réduction d'impôt sur le revenu pour les particuliers qui acquièrent et qui mettent en location un logement neuf dans une zone tendue ou couverte par un contrat de redynamisation de site de défense actif. Depuis le 1 er janvier 2021, ce bien doit se situer dans un bâtiment d'habitation collectif. Sous réserve de respecter des conditions de location 104 ( * ) , le propriétaire peut bénéficier d'une réduction d'impôt dont le taux s'applique au prix de revient net du logement neuf et varie selon la durée de l'engagement (10,5 % pour un engagement de six ans, 15 % pour un engagement de neuf ans et 17,5 % pour un engagement de 12 ans) 105 ( * ) .

Le coût prévisionnel de cette dépense fiscale est estimé à 1,5 milliard d'euros en 2023 , pour près de 300 000 ménages bénéficiaires 106 ( * ) . C'est le dispositif fiscal d'incitation à l'investissement dans le logement locatif le plus coûteux, mais il en existe d'autres, encore en vigueur ou en voie d'extinction.

Le dispositif « Girardin » , prévu aux articles 199 undecies A et 199 undecies C du CGI, permet aux contribuables de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu au titre de leurs investissements réalisés dans le logement locatif en Outre-mer . Pour le premier dispositif, le taux de la réduction d'impôt est de 18 %, majoré à 26 % lorsque le logement se situe dans un quartier prioritaire de la politique de la ville. Pour le deuxième, correspondant aux investissements dans le logement social, le taux de la réduction d'impôt est de 50 % du prix de revient des logements ou des travaux. Le coût de ces dépenses fiscales est estimé à respectivement 34 millions d'euros et 23 millions d'euros en 2023, pour 13 700 et 1 740 ménages bénéficiaires 107 ( * ) .

Prévu à l'article 199 tervicies du CGI, le « Malraux » désigne quant à lui le dispositif de réduction d'impôt sur le revenu au taux de 22 % au titre des dépenses assumées par les contribuables pour la restauration complète d'un immeuble bâti dès lors que celui-ci est situé dans un site patrimonial remarquable classé, dans un quartier ancien dégradé couvert par un plan national de rénovation ou dans un quartier présentant une concentration élevée d'habitat ancien dégradé et faisant l'objet d'une convention pluriannuelle prévue par la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine de 2003 108 ( * ) , dès lors que la restauration a été déclarée d'utilité publique. Le montant de la dépense fiscale afférente au dispositif Malraux est estimé à 38 millions d'euros en 2023 , pour environ 4 000 ménages bénéficiaires 109 ( * ) .

Enfin, le taux de la réduction d'impôt sur le revenu dite « Censi-Bouvard » , prolongée jusqu'au 31 décembre 2022 110 ( * ) , s'élève à 11 %. Aux termes de l'article 199 sexvicies du CGI, cette réduction d'impôt est accordée pour l'acquisition de logements dans le secteur de la location meublée non professionnelle. Son coût est estimé à 62 millions d'euros en 2023, pour environ 44 400 ménages bénéficiaires 111 ( * ) .

2. Un risque de « cécité fiscale » insuffisamment pris en compte

Les divers dispositifs fiscaux présentés précédemment sont avant tout des investissements et comportent à ce titre un risque non négligeable , que l'épargnant doit connaître et être prêt à assumer. Or, le plus souvent, dans la présentation de ces dispositifs, l'accent est mis sur le bénéfice fiscal , les intermédiaires obérant les risques liés à l'actif immobilier en lui-même.

Pourtant, dans un rapport consacré au « Pinel », l'inspection générale des finances (IGF) a relevé que, dans la moitié des cas, le rendement net global pour l'investisseur au bout de neuf ans hors effet de la hausse du prix de l'immobilier était négatif 112 ( * ) . Certains biens peuvent également être construits dans des zones où l'immobilier sera faiblement valorisé à la revente et les logements difficiles à louer dans l'intervalle. Le risque de perte de l'avantage fiscal, par exemple en cas d'absence de location du bien dans le cadre du dispositif « Pinel », est lui aussi trop peu rappelé aux épargnants.

Cette « cécité fiscale », pour reprendre une expression utilisée dans le rapport d'information précité, s'explique pour partie par le fait que l'encadrement des intermédiaires immobiliers et des offres d'investissement dans le logement locatif demeure assez faible .

B. L'ENCADREMENT DES ACTEURS INTERVENANT DANS LE LOGEMENT LOCATIF DÉFISCALISÉ ET LE CONTRÔLE DE LEURS SUPPORTS DE COMMUNICATION DEMEURENT LIMITÉS

1. Une information précontractuelle limitée à certains produits et des frais des intermédiaires désormais encadrés

Alors même que les montants en jeu sont importants, en particulier pour les épargnants, et que les dépenses fiscales attachées à ces investissements se traduisent par une perte de recettes publiques pour l'État, les règles régissant les investissements dans le logement locatif apparaissent relativement succinctes .

Les principales règles visent à encadrer la publicité relative aux opérations d'acquisition de logement et susceptibles de bénéficier des dispositifs « Pinel », « Censi-Bouvard » et « Malraux » , le « Girardin » n'étant pas concerné. Ainsi, aux termes de l'article L. 122-3 du code de la consommation, toute publicité sur ces opérations doit permettre de raisonnablement comprendre les risques afférents à l'investissement - sans plus de précision sur le contenu - et simplement comporter une mention indiquant que le non-respect des engagements de location entraîne la perte du bénéfice des incitations fiscales .

L'article L. 122-3 du code de la consommation prévoit par ailleurs que tout manquement à ces dispositions est passible d'une amende dont le montant ne peut excéder 100 000 euros . Cependant, au regard des dispositions de l'article L. 511-5 du code de la consommation, les agents de la DGCCRF ne sont pas explicitement habilités à rechercher et à constater les infractions et les manquements à la sous-section 6 de la section 3 du chapitre II du titre II du livre I er , dont relève pourtant l'article L. 122-3 du même code. Concrètement, ils ne peuvent pas sanctionner les manquements aux obligations précontractuelles .

Toutefois, en matière d' encadrement des frais , une première avancée a pu être obtenue grâce au Sénat, qui a adopté un amendement du rapporteur général Albéric de Montgolfier lors de l'examen de la loi de finances initiale pour 2018 113 ( * ) . Cet amendement a modifié l'article 199 novovicies du CGI afin de plafonner le montant des frais et commissions directs et indirects imputés au titre de l'acquisition d'un bien dans le cadre d'un dispositif « Pinel » . Après près de deux ans de négociation entre le Gouvernement et les intermédiaires, ce plafond a été fixé par voie règlementaire à 10 % du prix de revient.

2. Un modèle envisagé par les rapporteurs : le contrôle préalable exercé sur les intermédiaires en biens divers

Dans le rapport d'information sur la protection des épargnants, les rapporteurs se sont interrogés sur l'opportunité d'étendre le champ de compétences de l'Autorité des marchés financiers (AMF) au domaine de l'investissement locatif, pour trois raisons principalement.

Il existe tout d'abord une « zone d'ombre » en matière de contrôle des offres fiscales immobilières. La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), compétente pour le secteur immobilier, estime que les contrôles a priori ne constituent pas en l'état du droit son coeur de métier. Les agents de la DGCCRF interviennent le plus souvent « trop tard », après le dépôt d'une réclamation. Il n'existe donc pas aujourd'hui d'autorité ou d'administration en mesure de constater et de sanctionner les offres abusives ou frauduleuses .

Ensuite, l'AMF a déjà vu son expertise être étendue à des produits qui ne s'apparentent pas stricto sensu à des produits financiers . Elle intervient désormais sur les « biens divers » 114 ( * ) , qui correspondent à des investissements atypiques, par exemple le vin, les oeuvres d'art ou le photovoltaïque. Les intermédiaires en biens divers sont définis à l'article L. 551-1 du code monétaire et financier (CMF), qui précise également les règles applicables à leurs communications à caractère promotionnel : identification du support en tant que tel, contenu exact, clair et non trompeur, compréhension des risques afférents au placement. Le même article donne le droit à l'AMF de se faire communiquer tous documents, quel qu'en soit le support, permettant de s'assurer de la conformité des propositions d'investissement en biens divers.

Enfin, dans le cadre de sa supervision des biens divers, l'AMF a développé des outils de contrôle préventif et répressif qu'il pourrait être envisagé de répliquer à d'autres investissements, et notamment au logement locatif. Le volet préventif inclut la publication de listes blanche et noire d'intermédiaires, une veille publicitaire ou encore le développement d'outils appuyés sur l'intelligence artificielle pour détecter des sites potentiellement frauduleux . Le volet répressif comprend des réponses graduées, du rappel à la règlementation en cas de publicité non autorisée à l'interdiction de la publicité pour des produits très risqués, en passant par l'inscription sur liste noire.

Ces instruments pourraient être adaptés au contrôle des offres dans l'investissement locatif, permettant de fait aux autorités de réagir plus rapidement en cas de fraude ou de danger pour les épargnants.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : ENCADRER LES PRATIQUES DES INTERMÉDIAIRES EN IMMOBILIER ET SYSTÉMATISER UN CONTRÔLE A PRIORI DES DOCUMENTS PRÉCONTRACTUELS ET DES COMMUNICATIONS À CARACTÈRE PROMOTIONNEL

Traduisant la recommandation n° 16 du rapport d'information relatif à la protection des épargnants, le présent article prévoit de créer une nouvelle catégorie d'intermédiaires, les intermédiaires en immobilier, avec des obligations renforcées en matière de publicité et d'informations précontractuelles .

Les 1° et 2° du I du présent article complètent le titre V du livre V du code monétaire et financier (CMF) par un chapitre III intitulé « Intermédiaires en immobilier ». Au sein de ce chapitre, deux nouveaux articles L. 553-1 et L. 553-2 sont créés .

Le I de l'article L. 553-1 du CMF définit ce qu'est un intermédiaire en immobilier , à savoir :

- toute personne qui, directement ou indirectement, par voie de communication à caractère promotionnel ou de démarchage, propose à un client ou à un client potentiel d'acquérir un logement dans les conditions prévues aux articles 199 novovicies (« Pinel »), 199 undecies A et 199 undecies C (« Girardin ») du code général des impôts ;

- toute personne qui recueille des fonds à cette fin ;

- toute personne chargée de la promotion immobilière des logements acquis dans les conditions précitées.

Le II de l'article L. 553-1 du CMF précise les règles relatives aux communications à caractère promotionnel portant sur des opérations proposées par les intermédiaires en immobilier, sur le modèle de ce qui est prévu à l'article L. 551-1 pour les biens divers . Les communications devraient être clairement identifiables en tant que telles, présenter un contenu exact, clair et non trompeur et permettre de raisonnablement comprendre les risques afférents au placement, y compris le risque de reprise des avantages fiscaux par l'administration fiscale.

Le III de l'article L. 553-1 du CMF soumet enfin les intermédiaires en immobilier aux dispositions contenues dans le nouvel article L. 553-2 du CMF, lui-aussi inspiré de l'encadrement des biens divers. Les intermédiaires devront ainsi, préalablement à toute communication à caractère promotionnel ou à tout démarchage, établir un document destiné à donner au public toute information utile sur l'opération proposée et sur la personne qui en est à l'initiative . Il y a donc un renforcement des obligations précontractuelles . Par ailleurs, si le client ou le client potentiel n'a pas reçu ce document préalable ou si les clauses du contrat ne sont pas conformes au contenu de ce document d'information, le juge peut lui accorder des dommages-intérêts ou prononcer la résolution du contrat.

Le 3° du I du présent article modifie l'article L. 573-8 du CMF afin de préciser que toute méconnaissance des obligations prévues à l'article L. 553-2 du CMF est punie d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 18 000 euros .

Par ailleurs, le II du présent article prévoit que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, une évaluation des moyens financiers, juridiques et humains nécessaires à l'extension des missions de l'AMF au contrôle du respect par les intermédiaires de leurs obligations prévues au chapitre III du titre V du livre V du CMF, ainsi qu'au contrôle de toute communication à caractère promotionnel de ces intermédiaires et des projets de documents d'information et de contrat-type relatif aux opérations immobilières précitées.

Enfin, le III du présent article précise que ces dispositions entrent en vigueur le 1 er janvier 2024 .

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : AJUSTER LE DISPOSITIF TOUT EN CONSERVANT LE DOUBLE IMPÉRATIF D'UNE MEILLEURE INFORMATION ET D'UNE PLUS GRANDE PROTECTION DES ÉPARGNANTS S'ENGAGEANT DANS UN INVESTISSEMENT LOCATIF DÉFISCALISÉ

Que ce soit dans le rapport d'information sur la protection des épargnants ou dans le cadre de la proposition de loi, avec le présent article, deux objectifs sont visés : accroître le contrôle a priori des offres d'investissement défiscalisé dans le secteur du logement locatif et fournir aux épargnants une information beaucoup plus transparente et complète sur les risques encourus dans le cadre de ces investissements , que ce soit sur le plan de leur patrimoine (valorisation de l'immobilier) ou sur le plan fiscal (reprise de l'avantage fiscal par l'administration en cas de non-respect des conditions régissant le bénéfice des réductions d'impôt).

Guidés par ces deux exigences , les rapporteurs ont proposé à la commission de réécrire le présent article (amendement COM-23) . En l'absence de désignation immédiate d'une autorité chargée de contrôler les intermédiaires en immobilier, et dans l'attente du rapport remis par le Gouvernement au Parlement sur ce point, il était à craindre que davantage de temps soit encore perdu avant de renforcer le contrôle a priori des offres promotionnelles dans le logement locatif et d'accroître la bonne information des épargnants . Il ressort également des travaux complémentaires menés par les rapporteurs que la DGCCRF serait, dans un premier temps, plus à même de contrôler et de sanctionner le respect des obligations précontractuelles et des exigences de transparence vis-à-vis des investisseurs .

Par conséquent, l'amendement COM-23, en réécrivant le présent article, en renforce la portée et répond aux principaux enjeux soulevés par le dispositif :

- l'article L. 122-23 du code de la consommation est complété afin que les règles applicables aux publicités dans le cadre des dispositifs « Pinel », « Censi-Bouvard » et « Malraux » le soient également pour le « Girardin » ;

- parallèlement, les exigences en matière de publicité sont renforcées . En plus de permettre de raisonnablement comprendre les risques afférents à l'investissement, les supports de communication à caractère promotionnel devront informer sur le risque de perte de l'avantage fiscal en cas de non-obtention, de non-renouvellement, de retrait ou de transfert de l'autorisation administrative d'exploitation de l'établissement dans lequel se situe le logement concerné ou de tout acte administratif conditionnant une activité prévue dans cet établissement . Cette précision vise notamment à mieux informer les épargnants investissant dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées et dépendantes (Ehpad) ;

- les vendeurs devront obligatoirement remettre à l'épargnant une notice d'information , dont le contenu sera fixé par décret mais qui devra à tout le moins rappeler les risques encourus pour tout investissement dans le logement locatif, y compris celui de perdre l'avantage fiscal. Cette notice d'information peut être assimilée au document préalable obligatoire prévu pour les investissements dans des biens divers. Le délai de rétractation du potentiel acquéreur ne courra qu'à compter de la réception de cette notice ;

- l'amende administrative pouvant être infligée par la DGCCRF en cas de non-respect des précédentes obligations est renforcée pour la rendre plus dissuasive : elle pourra s'élever à 75 000 euros pour une personne physique et à 375 000 euros pour une personne morale ;

- enfin, et pour corriger l'incongruité précédemment relevée, les agents de la DGCCRF seront explicitement habilités à rechercher et à constater les manquements aux obligations d'information précontractuelle et aux règles encadrant le contenu des publicités .

La demande de rapport du Gouvernement au Parlement sur l'évaluation des moyens financiers, juridiques et humains nécessaires au contrôle systématique des projets de documents d'information et des communications à caractère promotionnel des personnes proposant d'investir dans le logement locatif en contrepartie d'une réduction d'impôt sur le revenu est maintenue . Conscients qu'aucune autorité ou administration n'est aujourd'hui en mesure de mettre en place un tel contrôle à moyens constants, les rapporteurs ont proposé de ne désigner aucune structure en particulier , laissant le soin au Gouvernement de présenter les pistes disponibles.

Ils demeurent toutefois convaincus que le modèle de régulation des biens divers pourrait être utilement répliqué aux investissements dans le logement locatif. C'est d'ailleurs bien sans préjudice des compétences de la DGCCRF que l'AMF dispose du droit de se faire communiquer les informations nécessaires au contrôle des offres d'investissements en biens divers. Ce contrôle systématique constitue une étape supplémentaire, et cruciale, dans le développement d'un véritable contrôle a priori des offres d'investissements défiscalisés . C'est à terme le seul moyen de protéger les épargnants les moins avertis contre des offres frauduleuses ou omettant volontairement les risques liés à l'investissement immobilier en lui-même, au-delà de l'avantage fiscal.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 12

Renforcement des obligations déclaratives des acteurs
du financement participatif au titre de la lutte contre
le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme

. Le présent article vise à renforcer les obligations déclaratives des acteurs du financement participatif au titre de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Alors que plusieurs statuts coexistent, il est en effet impératif que l'ensemble des acteurs du financement participatif soient soumis aux mêmes exigences concernant la lutte contre le blanchiment.

Pour éviter les redondances, les rapporteurs ont proposé, par l'amendement COM-24, de recentrer les dispositions du présent article sur les seuls acteurs qui ne sont aujourd'hui pas soumis aux mêmes obligations déclaratives que les autres, à savoir les prestataires intervenant dans des projets de financement participatif portant sur des parts sociales.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : UN ENCADREMENT DE PLUS EN PLUS STRICT DES ACTEURS DU FINANCEMENT PARTICIPATIF AU REGARD DE LA LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT DE CAPITAUX ET LE FINANCEMENT DU TERRORISME

A. LE FINANCEMENT PARTICIPATIF, UN « RISQUE GLOBAL ÉLEVÉ »

D'après les données transmises dans le cadre du rapport d'information sur la protection des épargnants 115 ( * ) , près de 630 millions d'euros ont été collectés par le biais du financement participatif en 2019 , auprès d'1,2 million de personnes. C'est 56 % de plus qu'en 2018 et quatre fois plus qu'en 2015. Les dons ont représenté 13 % du montant collecté en 2019, les investissements 6 % et les prêts et les obligations 81 %. En 2020, l'ACPR estimait que plus d'un milliard d'euros avait été collecté auprès d'1,8 million de financeurs 116 ( * ) .

Les acteurs du financement participatif prennent donc une importance croissante, et avec eux les enjeux en matière de diligence, de protection du système financier et de protection des épargnants, pour éviter que les participants de bonne foi ne se trouvent victimes d'abus ou ne participent à leur insu à des circuits financiers douteux voire illégaux.

Or, dans son analyse nationale des risques 117 ( * ) , publiée en 2019, le Conseil d'orientation de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (COLB) faisait état d'une menace modérée pour le secteur du financement participatif mais de vulnérabilités élevées , en dépit des évolutions intervenues pour que les plateformes de financement participatif s'enregistrent auprès des autorités de supervision et, pour les intermédiaires en financement participatif (IFP), auprès de l'organisme pour le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance (Orias).

Le COLB relevait ainsi une mobilisation insuffisante des plateformes au titre de leurs obligations de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme . Une évaluation de « risque global élevé » a donc été attribuée à ces acteurs. Ces inquiétudes ont été relayées par Tracfin , qui, dans son rapport d'analyse 2020, observait que « les collectes de fonds en ligne transitant par (...) des sites de cagnottes en ligne présent[ai]ent un risque important en matière de financement du terrorisme ».

B. UNE DIVERGENCE DE STATUTS ET D'OBLIGATIONS DÉCLARATIVES

Des efforts ont toutefois été engagés, au niveau national comme européen, pour mieux encadrer les acteurs du financement participatif. La France s'était montrée pionnière en instaurant une distinction entre les intermédiaires en financement participatif (prêt et don), relevant de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), et les conseillers en financement participatif (titres de créance, minibons 118 ( * ) ), relevant de l'Autorité des marchés financiers.

Ce cadre 119 ( * ) a été profondément rénové avec l'adoption du règlement européen du 7 octobre 2020 relatif aux prestataires européens de services de financement participatif pour les entrepreneurs 120 ( * ) et sa transposition par l'ordonnance du 22 décembre 2021 modernisant le cadre relatif au financement participatif 121 ( * ) , modifiée par l'ordonnance du 14 septembre 2022 122 ( * ) .

Il convient désormais de distinguer :

- les intermédiaires en financement participatif (IFP), qui interviennent en prêt pour des projets non-commerciaux et en prêt gratuit et en don pour des projets commerciaux et non commerciaux. Ils incluent également les « cagnottes en ligne ». Ces activités ne sont pas couvertes par le règlement européen et c'est donc le statut prévu dans le droit français qui perdure. Les IFP sont soumis au contrôle de l'ACPR qui est chargée, aux termes de l'article L. 612-1 du code monétaire et financier (CMF), de « veiller au respect, par les personnes soumises à son contrôle, des règles relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme ». Elle peut pour ce faire, et conformément aux dispositions de l'article L. 612-24 du CMF, leur demander tous renseignements et documents nécessaires à l'exercice de sa mission et leur imposer la transmission périodique d'une liste de documents et d'informations ;

- les prestataires de services de financement participatif (PSFP) qui interviennent en prêt et en titres de créance pour des activités commerciales. Le règlement européen a entendu harmoniser les règles applicables à leurs activités. Le point d'entrée unique pour l'agrément des PSFP sera, en France, l'Autorité des marchés financiers (AMF) 123 ( * ) . Aux termes de l'article 16 du règlement européen du 7 octobre 2020 , les PSFP devront transmettre à l'AMF la liste des projets financés par le biais de la plateforme de financement participatif et préciser, pour chaque projet, le porteur et le montant collecté, l'instrument émis ainsi que des informations agrégées sur les investisseurs et le montant investi, ventilées selon la résidence fiscale des investisseurs ;

- pour les acteurs intervenant sur de l'obligataire et des activités non commerciales, ils pourraient devoir demander le statut de prestataires de services d'investissement (PSI), relevant de l'AMF. Des exigences particulières s'imposent aux PSI en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

Pour ces trois catégories d'acteurs, l'article L. 561-2 du CMF dispose enfin clairement qu'ils sont assujettis aux obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : SOUMETTRE LES ACTEURS DU FINANCEMENT PARTICIPATIF À DE NOUVELLES OBLIGATIONS DÉCLARATIVES AU TITRE DE LA LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT DE CAPITAUX ET LE FINANCEMENT DU TERRORISME

Traduisant la recommandation n° 17 du rapport d'information relatif à la protection des épargnants, le présent article prévoit de soumettre l'ensemble des acteurs du financement participatif à l'obligation de transmettre annuellement à leur autorité de supervision des informations relatives aux projets pour lesquels ils ont servi d'intermédiaires .

Le 1° du I du présent article complète l'article L. 548-6 du code monétaire et financier (CMF), relatif aux obligations imposées aux intermédiaires de financement participatif (IFP). Les IFP devraient ainsi transmettre chaque année à l'ACPR les informations relatives aux projets pour lesquels ils ont mis en relation les porteurs de ces projets et les personnes les finançant, ainsi que les montants collectés. Un décret fixerait la liste des informations et des données concernées.

Le 2° du I du présent article complète par la même obligation l'article L. 547-1 du CMF, relatif aux prestataires de services de financement participatif (PSFP). Les données et les informations seraient transmises à l'AMF, chargée de les agréer.

Le II du présent article prévoit que ces nouvelles dispositions s'appliquent aux projets pour lesquels les IFP et les PSFP ont mis en relation les porteurs de ces projets et les personnes les finançant à compter du 1 er janvier 2023 .

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : L'HARMONISATION DES OBLIGATIONS DÉCLARATIVES DES ACTEURS DU FINANCEMENT PARTICIPATIF EST PRIMORDIALE POUR MIEUX LES ENCADRER

L'ensemble des personnes entendues en audition dans le cadre de l'examen de la présente proposition de loi a convenu qu'il fallait impérativement que les acteurs du financement participatif soient pleinement impliqués dans la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme .

Les exigences qui leur ont été imposées en la matière se sont progressivement renforcées, et l'entrée en vigueur du règlement européen du 7 octobre 2020 sur les prestataires de services de financement participatif devrait contribuer à cette tendance. Les PSFP seront en effet soumis à des obligations déclaratives auprès de leur autorité d'agrément.

Concernant les IFP, l'ACPR a confirmé en audition qu'elle usait déjà de son droit de communication de tous documents et de toutes informations auprès de ces acteurs, avec la transmission d'un questionnaire périodique .

En revanche, s'il est bien une catégorie d'acteurs du financement participatif qui n'apparaît pas couverte par ces obligations déclaratives, ce sont les prestataires intervenant dans des projets de financement participatif portant sur des parts sociales (article L. 547-4 du CMF).

Compte tenu de ces éléments, et pour éviter les redondances, les rapporteurs ont proposé, par l'amendement COM-24 , de davantage cibler le présent article . Les IFP et les PSFP étant déjà soumis à des obligations déclaratives renforcées et similaires, le dispositif est recentré sur les acteurs intervenant pour des projets de financement participatif portant sur des parts sociales. Ils seront désormais eux-aussi soumis aux obligations déclaratives prévues à l'article 16 du règlement européen précité.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 13 (nouveau)

Possibilité pour le collège des sanctions de l'AMF d'assortir ses injonctions d'une astreinte

. Le présent article, introduit par la commission en adoptant l'amendement COM-25 des rapporteurs, tend à permettre à l'Autorité des marchés financiers (AMF) d'assortir ses injonctions administratives d'une astreinte.

Il s'agit ainsi de remédier le plus rapidement possible aux manquements constatés par le collège de l'AMF et qui sont contraires aux intérêts des épargnants et des acteurs de marché.

La commission a adopté cet article.

I. LE DROIT EXISTANT : LA POSSIBILITÉ POUR LE COLLÈGE DE L'AMF DE PRONONCER DES INJONCTIONS FACE AUX MANQUEMENTS CONSTATÉS DANS LE CADRE DES CONTRÔLES QU'ELLE RÉALISE

Pour exécuter ses missions, les agents de l'Autorité des marchés financiers (AMF) dispose d'un certain nombre de pouvoirs, avec la possibilité de réaliser des contrôles et des enquêtes, en vertu des articles L. 621-9 à L.621-12-1 du code monétaire et financier (CMF).

En vertu du II de l'article L. 621-14 du CMF, le collège de l'AMF peut, après avoir mis la personne concernée en mesure de présenter ses explications, ordonner qu'il soit mis fin aux manquements constatés, en France comme à l'étranger.

Il peut s'agir de manquements :

- « aux obligations résultant des règlements européens, des dispositions législatives ou réglementaires ou des règles professionnelles visant à protéger les investisseurs contre les opérations d'initiés, les manipulations de marché et la divulgation illicite d'informations privilégiées mentionnées aux c et d du II de l'article L. 621-15 [du CMF], ou à tout autre manquement de nature à porter atteinte à la protection des investisseurs, au bon fonctionnement des marchés ou à tout autre manquement aux obligations relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme prévues aux chapitres I et II du titre VI du livre V du [même] code »;

- « aux obligations résultant des règlements européens, des dispositions législatives ou réglementaires visant à protéger les investisseurs et le marché contre les opérations d'initié, les manipulations de marché et la divulgation illicite d'informations privilégiées mentionnées aux c et d du II de l'article L. 621-15 [du CMF], commis sur le territoire français et concernant des instruments financiers, des unités mentionnées à l'article L. 229-7 du code de l'environnement ou des actifs mentionnés au II de l'article L. 421-1 du [même] code admis aux négociations sur un marché réglementé d'un autre État membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou pour lesquels une demande d'admission aux négociations sur un tel marché a été présentée ».

Cette injonction administrative n'est toutefois assortie d'aucune astreinte.

En revanche, le III de l'article L. 621-14 du CMF permet au Président de l'AMF de saisir la justice pour qu'il soit « ordonné à la personne qui est responsable de la pratique relevée de se conformer aux règlements européens, aux dispositions législatives ou réglementaires, de mettre fin à l'irrégularité ou d'en supprimer les effets. »

Le Président du tribunal judiciaire de Paris statue alors en référé et peut prendre, même d'office, toute mesure conservatoire et prononcer une astreinte , qui est versée au Trésor public, pour l'exécution de son ordonnance.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : ASSORTIR L'INJONCTION DE L'AMF D'UNE ASTREINTE, POUR METTRE PLUS EFFICACEMENT FIN AUX MANQUEMENTS CONSTATÉS

Sur proposition des rapporteurs, par l'amendement COM-25 , le présent article additionnel vise à renforcer les pouvoirs du collège de l'Autorité des marchés financiers (AMF), en lui donnant la possibilité d'assortir d'une astreinte ses injonctions à mettre fin à des manquements qu'elle constate.

Ces manquements sont de trois types : manquements aux règles visant à protéger les investisseurs contre les abus de marché, manquements de nature à porter atteinte à la protection des investisseurs et au bon fonctionnement du marché et manquements aux obligations relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.

Comme indiqué supra , l'AMF dispose, d'une part, d'un pouvoir d'injonction «directe » ou « administrative » lui permettant d'ordonner aux personnes concernées de mettre fin aux manquements constatés par le collège de l'AMF, et, d'autre part, d'un pouvoir d'injonction « indirecte » ou « judiciaire », par l'intermédiaire du président du tribunal judiciaire de Paris. Or, seule l'injonction « judiciaire » est actuellement assortie d'une astreinte.

Le présent article introduit par la commission des finances corrige cette différence en prévoyant, à l'article L. 621-14 du code monétaire et financier, que le collège puisse assortir ses injonctions administratives d'une astreinte dont il fixerait le montant et qui serait versée au budget de l'État .

Cette mesure paraît à la fois de bon sens et cohérente dans la mesure où l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) peut déjà, pour sa part, prononcer une astreinte sans décision judiciaire.

En assortissant l'injonction « administrative » d'une astreinte, il s'agit de parvenir à remédier le plus rapidement possible aux manquements constatés par le collège de l'AMF et qui sont contraires aux intérêts des épargnants et des acteurs de marché.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article.

ARTICLE 14 (nouveau)

Sécurisation du champ de compétences de la commission des sanctions de l'AMF pour le contrôle des offres au public de parts sociales

. Le présent article, introduit par la commission en adoptant l'amendement COM-26 des rapporteurs, vise à sécuriser le champ de compétences de l'Autorité des marchés financiers (AMF) pour superviser et sanctionner les offres au public de parts sociales. L'AMF ne peut aujourd'hui sanctionner que certaines de ces offres, principalement celles réalisées par des sociétés civiles de placement immobilier, par des banques mutualistes ou par des sociétés coopératives sous forme de société anonymes.

Pour les offres au public de parts sociales émises par d'autres acteurs, l'AMF ne dispose pas expressément de la compétence pour intervenir : elles relèvent donc seulement des juridictions civiles, qui n'interviennent bien souvent qu'après l'offre, pour éventuellement ordonner le remboursement des fonds.

Les modifications apportées par le présent article visent à s'assurer que l'AMF est compétente pour sanctionner les offres au public irrégulières de parts sociales de toutes les sociétés commerciales.

Une telle précision éviterait les contournements abusifs. En outre, l'information et la protection des épargnants s'en trouveraient accrues : l'AMF n'avait pas pu, il y a quelques années, sanctionner une offre au public de parts sociales promettant des rendements de 6 % à 7 %, tout en minimisant les risques et en présentant des informations lacunaires. L'émetteur concerné s'était ensuite retrouvé en difficulté financière, suscitant d'importantes craintes pour les épargnants qui avaient choisi d'investir dans ces parts sociales sans être bien au fait des risques encourus.

La commission a adopté cet article.

I. LE DROIT EXISTANT : L'IMPOSSIBILITÉ DE SANCTIONNER CERTAINES OFFRES AU PUBLIC DE PARTS SOCIALES FRAUDULEUSES OU TROMPEUSES

A. UN CHAMP DE CONTRÔLE INCOMPLET SUR LES OFFRES AU PUBLIC DE PARTS SOCIALES

Aux termes de l'article L. 411-1 du code monétaire et financier (CMF), il est interdit à toute personne ou entité n'y ayant pas été autorisée par la loi de procéder à une offre au public de titres financiers ou de parts sociales, à peine de nullité des contrats conclus ou des titres ou parts sociales émis. Le qualificatif « d'offre au public » s'applique dès lors que des moyens de communication ont été mobilisés pour toucher un large public.

Or, selon les dispositions de l'article L. 621-9 du CMF, relatives aux contrôles et aux enquêtes de l'Autorité des marchés financiers (AMF), cette dernière ne peut veiller à la régularité que des offres au public de parts sociales de sociétés coopératives, de sociétés constituées sous la forme de sociétés anonymes ainsi que des offres au public de certificats mutualistes.

Par cohérence, le II de l'article L. 621-15, qui liste les personnes à l'encontre desquelles la commission des sanctions de l'AMF peut, à l'issue d'une procédure contradictoire, prononcer une sanction , cible les personnes qui, sur le territoire français ou étranger, ont manqué aux obligations relatives à ces offres au public de parts sociales.

Ces manquements incluent notamment l'absence de réalisation d'un prospectus spécifique sur l'opération pour les banques mutualistes et, pour les sociétés coopératives constituées sous forme de société anonyme, d'un document d'information synthétique (offres de moins de huit millions d'euros) ou d'un prospectus ad hoc (offres de huit millions d'euros ou plus). Ces documents doivent contenir des informations minimales à destination des souscripteurs. Parmi celles-ci, doivent figurer la présentation de données sur l'émetteur, une brève description des parts et des droits qui leur sont attachés (par exemple, le vote) ainsi qu'une section présentant les facteurs de risque liés à l'émetteur , dont celui de l'ouverture d'une procédure collective 124 ( * ) .

B. DES OFFRES TROMPEUSES ENCORE ÉMISES AU DÉTRIMENT DES ÉPARGNANTS

Les parts sociales n'étant pas cotées en bourse, leur valeur ne fluctue pas. Le risque de perte pour l'épargnant ne réside donc pas dans la variation de la valeur des parts sociales mais dans le risque de faillite de l'émetteur . Dans ce cas, les parts sociales perdent la totalité de leur valeur et ne peuvent plus être échangées.

Un deuxième risque réside dans le manque de liquidité de ces parts , qui peuvent être difficiles à revendre, et un troisième dans la reprise de l'avantage fiscal pour les parts éligibles à des dispositifs fiscalement incitatifs, en cas de non-respect des conditions d'éligibilité.

C'est pour ces raisons que l'AMF contrôle ces offres au public pour s'assurer que des informations claires et fiables sont transmises aux épargnants souhaitant acquérir ces parts de capital . Or, ses compétences d'enquête et de sanction ne valent que pour les offres au public de parts sociales émises par des banques mutualistes, par des sociétés coopératives et par des sociétés constituées sous la forme d'une société anonyme. Pour les autres, en cas d'irrégularité voire de faillite de l'émetteur, les épargnants ne peuvent se tourner que vers les juridictions civiles . S'ils obtiennent réparation et sanction de l'émetteur, cela ne peut être que plusieurs mois, voire années, après l'émission. Elles s'avèrent donc peu dissuasives.

L'AMF a été confrontée en 2017 à une société qui a contourné la condition de constitution sous la forme d'une société anonyme pour proposer aux épargnants d'investir dans des parts sociales. Des rendements de 6 % à 7 % étaient promis, avec un « capital garanti ». L'AMF avait fait part de son mécontentement et avait appelé les associations professionnelles des conseillers en investissements financiers (CIF) à la plus grande vigilance sur ce point, estimant que le schéma mis en place constituait un contournement artificiel des règles. Toutefois, la commission des sanctions n'était pas compétente pour les sanctionner.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : SÉCURISER LE CHAMP DE COMPÉTENCES DE LA COMMISSION DES SANCTIONS DE L'AMF POUR LE CONTRÔLE DES OFFRES AU PUBLIC DE PARTS SOCIALES

Le présent article, issu de l'amendement COM-26 proposé par les rapporteurs, vise à étendre le champ de compétences de la commission des sanctions de l'AMF pour s'assurer qu'elle puisse contrôler et sanctionner l'ensemble des offres au public de parts sociales par des sociétés commerciales .

Il modifie ainsi le 2° du I de l'article L. 621-9 et le h) du II de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier (CMF) afin de prévoir que les offres au public de parts sociales de sociétés commerciales et de sociétés coopératives puissent être sanctionnées par la commission des sanctions de l'AMF, que ces offres aient été soumises par des sociétés constituées sous la forme de sociétés anonymes ou non.

Sécuriser le champ de compétences de l'AMF sur les offres au public de parts sociales permettra de garantir aux épargnants des offres au contenu clair, non trompeur et propre à sensibiliser les investisseurs aux risques encourus . Dans le cas précité, l'émetteur avait connu de graves difficultés financières quelques années après l'émission de ses parts sociales, suscitant de fortes craintes pour les sommes investies par les épargnants .

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article.

ARTICLE 15 (nouveau)

Facilitation du déroulement des visites domiciliaires
des enquêteurs de l'AMF

. Le présent article, introduit par la commission en adoptant l'amendement COM-27 des rapporteurs, vise à apporter des ajustements à la procédure de visite domiciliaire par laquelle, sous le contrôle du juge des libertés et de la détention, les enquêteurs de l'Autorité des marchés financiers (AMF) sont autorisés à effectuer des visites en tous lieux ainsi qu'à procéder à la saisie de documents et au recueil des explications des personnes sollicitées sur place.

Les modifications apportées ne remettent nullement en cause le cadre de ces visites, elles entendent simplement lever certaines lourdeurs opérationnelles, qu'il s'agisse de la désignation par le chef de service des officiers de police judiciaires chargés d'accompagner les enquêteurs, et non plus nominativement dans l'ordonnance du juge saisi, ou de la possibilité pour ce dernier de délivrer une commission rogatoire à son homologue dans le ressort duquel s'effectue la visite, pour en exercer le contrôle. Il est également ajouté que les officiers de police judiciaire pourront désormais apporter leur concours aux opérations de visite.

Le cadre des visites domiciliaires des enquêteurs de l'AMF serait pleinement aligné sur celui applicable aux visites domiciliaires des agents des services d'instruction de l'Autorité de la concurrence.

La commission a adopté cet article.

I. LE DROIT EXISTANT : LES VISITES DOMICILIAIRES DES ENQUÊTEURS DE L'AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS SONT STRICTEMENT ENCADRÉES

En vertu de l'article L. 621-1 du code monétaire et financier (CMF), l'Autorité des marchés financiers (AMF) a pour mission de veiller à la protection de l'épargne investie dans des titres financiers et dans des placements offerts au public. Elle doit également veiller à la bonne information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés financiers .

Pour remplir ses missions, l'AMF peut mener des contrôles et des enquêtes et ses agents peuvent, pour la recherche d'infractions, demander la communication de tous documents, quel qu'en soit le support, convoquer toute personne susceptible de leur fournir des informations et accéder aux locaux à usage professionnel (article L. 621-10 du CMF). Les enquêteurs et les contrôleurs peuvent également mettre en oeuvre des pouvoirs coercitifs, lors des opérations dites de « visites domiciliaires ».

Régies par l'article L. 621-12 du CMF, les visites domiciliaires sont utilisées dans le cadre de la recherche d'infractions et de faits susceptibles d'être qualifiés de délit contre les biens et d'être sanctionnés par la commission des sanctions de l'AMF.

Sur demande motivée du secrétaire général de l'AMF, il revient au juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel sont situés les locaux à visiter d'autoriser, par ordonnance, les enquêteurs à effectuer des visites en tous lieux et à procéder à la saisie de documents et au recueil des explications des personnes sollicitées sur place .

Le juge des libertés et détention doit d'abord vérifier le bien-fondé de la demande, qui doit comporter tous les éléments d'information en possession de l'AMF pour justifier une visite domiciliaire. Il désigne ensuite un officier de police judiciaire pour assister à ces opérations et le tenir informé de son déroulement.

Lorsque les locaux visités sont situés dans le ressort de plusieurs juridictions et qu'une action simultanée de visite doit être menée dans chacun d'eux, un seul juge des libertés et de la détention délivre une ordonnance. Ainsi, même si les opérations ont lieu en dehors du ressort de son tribunal judiciaire, le juge saisi doit pouvoir se déplacer sur les lieux en cas de difficulté, et ce quelle que soit leur localisation sur le territoire national.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : APPORTER DES AJUSTEMENTS OPÉRATIONNELS, SANS REMETTRE EN CAUSE LE STRICT ENCADREMENT DES VISITES DOMICILIAIRES

Le présent article, issu de l'amendement COM-27 proposé par les rapporteurs, vise à apporter des ajustements opérationnels au cadre régissant les visites domiciliaires, sans pour autant en bouleverser l'équilibre .

Le 1° du présent article prévoit ainsi que, dans son ordonnance, le juge des libertés et de la détention ne désigne plus nominativement un officier de police judiciaire pour assister les enquêteurs de l'AMF dans leurs opérations de visite domiciliaire, mais désigne simplement le chef de service territorialement compétent . Il reviendra ensuite à ce dernier de désigner le ou les officiers concernés, suivant leur disponibilité . La désignation nominative est aujourd'hui très contraignante, ne serait-ce que si, le jour de la visite, l'officier a été appelé pour une intervention urgente ou s'avère absent pour raison de santé, voire si la visite est décalée et qu'il n'est plus disponible. Dans ce cas, l'ordonnance n'est plus valide et une nouvelle requête doit être présentée au juge.

Ce même 1° précise également que les officiers de police judiciaire présents lors de la visite domiciliaire pourront désormais apporter leur concours aux enquêteurs , en procédant le cas échéant aux réquisitions nécessaires. Il peut s'agir par exemple de recourir à un serrurier si l'occupant des lieux est absent.

Le 2° du présent article permet au juge des libertés et de la détention saisi de pouvoir délivrer une commission rogatoire à un homologue dans le ressort duquel s'effectue la visite pour en exercer le contrôle . Très concrètement, même en cas de visite simultanée de plusieurs lieux ou de difficulté sur un lieu éloigné de plusieurs centaines de kilomètres, c'est le juge qui a délivré l'ordonnance qui doit actuellement se rendre sur place, ce qui est quasiment impossible en pratique. Il est donc à la place proposé qu'il puisse déléguer cette mission ou cet acte.

L'encadrement des visites domiciliaires par l'autorité judiciaire n'est donc pas modifié : il s'agit simplement d'apporter des assouplissements limités à cette procédure pour la rendre plus opérationnelle pour les enquêteurs. Ces mêmes rédactions sont déjà celles qui sont en vigueur pour les visites domiciliaires des agents des services d'instruction de l'Autorité de la concurrence (article L. 450-4 du code de la consommation).

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article.

ARTICLE 16 (nouveau)

Suppression du délit d'entrave aux enquêtes et contrôles de l'AMF au profit du manquement d'entrave

. Le présent article, introduit par la commission en adoptant l'amendement COM-28 des rapporteurs, vise à tirer les conséquences de la décision n° 2021-965 QPC du 28 janvier 2022, par laquelle le Conseil constitutionnel a déclaré non conforme à la Constitution le cumul d'un manquement d'entrave (sanction administrative) et d'un délit d'entrave aux enquêtes et contrôles de l'Autorité des marchés financiers (AMF).

Or, le manquement d'entrave est un outil majeur pour les enquêteurs et les contrôleurs de l'AMF. Aussi, pour ne pas priver l'AMF de cet instrument et pour préserver la portée de ses enquêtes et de ses contrôles, le présent article propose-t-il de maintenir le manquement d'entrave, en ajoutant à la liste des comportements pouvant être sanctionnés la communication de renseignements inexacts », tout en abrogeant le délit d'entrave.

La commission a adopté cet article.

I. LE DROIT EXISTANT : UN CUMUL DU DÉLIT D'ENTRAVE ET DU MANQUEMENT D'ENTRAVE JUGÉ NON CONFORME À LA CONSTITUTION

A. SANCTIONNER LES ENTRAVES POUR ASSURER LE BON DÉROULEMENT DES CONTRÔLES ET DES ENQUÊTES DE L'AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

Les poursuites et sanctions pour entrave visent à prévenir les comportements de nature à empêcher le bon déroulement des enquêtes et des contrôles de l'Autorité des marchés financiers (AMF), par exemple en refusant de donner accès à une information ou à un lieu. Sur le fondement de l'article L. 621-10 du code monétaire et financier (CMF), les enquêteurs et les contrôleurs de l'AMF peuvent se faire communiquer tout document et toute information, convoquer des personnes susceptibles de leur fournir des informations, accéder aux locaux à usage professionnel et recueillir des explications sur place.

Aux termes du f) de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier, la commission des sanctions peut dès lors, à l'issue d'une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l'encontre de toute personne qui, dans le cadre d'une enquête ou d'un contrôle, et sous réserve de la préservation d'un secret légalement protégé et opposable à l'AMF, refuse :

- de donner accès à un document, quel qu'en soit le support, et d'en fournir une copie ;

- de communiquer des informations ;

- de répondre à une communication ;

- de donner accès à des locaux professionnels.

Les faits relèvent ici du « manquement administratif » d'entrave, à l'occasion de contrôles et d'enquêtes effectués en application du I de l'article L. 621-9 du CMF, à savoir ceux portant sur les opérations effectuées sur des titres financiers, sur les offres au public de parts sociales et sur des opérations effectuées sur des contrats commerciaux relatifs à des matières premières et liés à un ou plusieurs instruments financiers ou à des quotas d'émission. Il s'agit par exemple de lutter contre les abus d'initiés, la diffusion d'informations fausses et trompeuses, les manipulations de cours ou encore le non-respect des obligations professionnelles des prestataires régulés.

Le montant de la sanction pécuniaire ne peut excéder 100 millions d'euros ou le décuple du montant de l'avantage retiré du manquement, si ce dernier peut être déterminé. Les sommes sont reversées au Trésor public.

L'article L. 642-2 du CMF prévoit de surcroît que toute personne faisant obstacle à une mission de contrôle ou d'enquête de l'AMF ou lui communiquant des renseignements inexacts s'expose à une peine d'emprisonnement de deux ans et à une amende de 300 000 euros . Cet article sanctionne le délit d'entrave , qui relève de la justice pénale.

B. LE CUMUL DU MANQUEMENT ET DU DÉLIT D'ENTRAVE N'EST PAS CONFORME À LA CONSTITUTION

Dans une décision QPC du 28 janvier 2022 125 ( * ) , le Conseil constitutionnel a jugé que le cumul du délit d'entrave et du manquement administratif d'entrave n'était pas conforme à la Constitution . Ils tendent en effet à « réprimer de mêmes faits qualifiés de manière identique, par des sanctions de même nature, aux fins de protéger les mêmes intérêts sociaux ». Le Conseil constitutionnel a donc jugé que leur cumul était contraire au principe selon lequel nul ne peut être jugé ou puni deux fois (principe de non bis in idem ).

En revanche, il convient de relever que, prise indépendamment, chacune des dispositions prévues aux articles L. 621-15 (manquement) et L. 642-2 (délit) du CMF a été jugée conforme au principe de légalité des délits et des peines et de proportionnalité des peines. Le Conseil constitutionnel a ainsi estimé que la sanction administrative du manquement d'entrave n'était pas disproportionnée au regard de la gravité des comportements réprimés : « en instituant une sanction pécuniaire destinée à assurer l'efficacité des enquêtes et des contrôles de l'Autorité des marchés financiers, le législateur a poursuivi l'objectif de préservation de l'ordre public économique ».

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : MAINTENIR LE MANQUEMENT ADMINISTRATIF D'ENTRAVE POUR ASSURER LA PLEINE EFFECTIVITÉ DES CONTRÔLES ET DES ENQUÊTES DE L'AMF

Le présent article, issu de l'amendement COM-28 proposé par les rapporteurs, vise à tirer les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 28 janvier 2022 .

Le 1° du présent article modifie ainsi le f) du II de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier (CMF) pour ajouter « la communication de renseignements que la personne sait inexacts » à la liste des comportements qualifiables de manquement d'entrave et pouvant être sanctionnés en tant que tels par le collège des sanctions de l'AMF. Serait ici repris l'un des comportements relevant du délit d'entrave prévu à l'article L. 642-2 du CMF et par ailleurs abrogé par le 2° du présent article .

L'ajout de la sanction administrative , dans le cadre de la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires 126 ( * ) , visait en effet à pallier les insuffisances relevées par le législateur dans l'application du délit d'entrave 127 ( * ) . La sanction pénale avait été jugée insuffisante, longue à mettre en oeuvre et, de fait, peu utilisée (deux condamnations en 2009). Instituer un manquement administratif, directement sanctionné par la commission des sanctions de l'AMF, devait permettre de renforcer le caractère dissuasif des sanctions encourues, afin de prévenir tout comportement d'entrave . Il est donc proposé de le conserver, en le renforçant, et d'abroger le délit d'entrave.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article.

ARTICLE 17 (nouveau)

Renforcement du devoir de signalement
des commissaires aux comptes à l'AMF

. Le présent article, introduit par la commission en adoptant l'amendement COM-29 des rapporteurs, vise à renforcer le devoir de signalement des commissaires aux comptes auprès de l'Autorité des marchés financiers (AMF). Ces signalements sont essentiels pour l'AMF, puisqu'ils lui permettent de mieux anticiper les difficultés financières de certains acteurs, avec des risques pour l'épargne investie dans les instruments concernés.

Ce renforcement passe par deux évolutions. D'une part, en plus de devoir signaler l'émission de réserves ou le refus de certification des comptes, les commissaires aux comptes devront signaler leur impossibilité de certifier les comptes, lorsqu'ils n'ont pas pu mettre en oeuvre toutes les procédures d'audit nécessaires. D'autre part, ces obligations de signalement sont étendues aux commissaires aux comptes des fonds de placement immobilier.

La commission a adopté cet article.

I. LE DROIT EXISTANT : UN DEVOIR DE SIGNALEMENT DES COMMISSAIRES AUX COMPTES AUPRÈS DE L'AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

L'AMF et la compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC) ont publié, pour la première fois en 2005, un guide des relations entre l'AMF et les commissaires aux comptes 128 ( * ) . Mis à jour pour la dernière fois au mois d'avril 2022, il vise à définir de bonnes pratiques de coopération et à préciser les modalités d'échange entre les commissaires et l'AMF.

Aux termes de l'article L. 621-22 du code monétaire et financier (CMF), l'AMF peut demander aux commissaires aux comptes de personnes dont les titres financiers sont admis aux négociations sur un marché règlementé tous renseignements sur les personnes qu'ils contrôlent. Les commissaires peuvent à l'inverse interroger l'AMF sur toute question rencontrée dans l'exercice de leur mission et susceptible d'avoir un effet sur l'information financière de la personne.

L'article L. 621-23 du CMF précise que les commissaires aux comptes des sociétés de gestion de portefeuille et des prestataires de services de communication de données sont déliés du secret professionnel à l'égard de l'Autorité des marchés financiers (AMF). Ils sont également tenus de lui signaler dans les meilleurs délais tout fait ou décision de nature :

- à constituer une violation des dispositions législatives ou règlementaires applicables à la société et susceptible d'avoir des effets significatifs sur la situation financière, le résultat ou le patrimoine ;

- à porter atteinte à la continuité de l'exploitation de la société ;

- à entrainer l'émission de réserves ou le refus de la certification des comptes .

Réserves, refus et impossibilité de certification

La certification des comptes annuels ou consolidés d'une société par un commissaire aux comptes est l'opération par laquelle ce dernier certifie que les comptes sont réguliers et sincères et qu'ils donnent une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice écoulé ainsi que de la situation financière et du patrimoine de l'entité concernée.

La certification peut être assortie de réserves , par exemple si le commissaire aux comptes a identifié lors de son audit des anomalies significatives et que celles-ci n'ont pas été corrigées, à condition que leur incidence soit limitée et que la formulation de la réserve soit suffisante pour permettre à l'utilisateur des comptes de fonder son jugement en connaissance de cause (« réserve pour désaccord »). Sous les mêmes conditions, le commissaire aux comptes peut également formuler une réserve s'il n'a pas pu mettre en oeuvre toutes les procédures d'audit nécessaires (« réserve pour limitation »).

Le commissaire aux comptes peut refuser de certifier lorsqu'il a détecté des anomalies significatives qui n'ont pas été corrigées. Dans ce cas, les anomalies ne peuvent pas être clairement circonscrites et la formulation d'une réserve ne serait pas suffisante pour permettre à l'utilisateur de fonder son jugement.

Enfin, le commissaire aux comptes formule une impossibilité de certifier lorsqu'il n'a pas pu mettre en oeuvre toutes les procédures d'audit nécessaires pour fonder son opinion sur les comptes. Les limitations à ses travaux ne peuvent pas être clairement circonscrites et la formulation d'une réserve ne serait pas suffisante.

Source : compagnie nationale des commissaires aux comptes, « NEP 700. Rapports du commissaire aux comptes sur les comptes annuels et consolidés », 11 octobre 2018

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : RENFORCER LE DEVOIR DE SIGNALEMENT DES COMMISSAIRES AUX COMPTES POUR MIEUX ANTICIPER LES DIFFICULTÉS DE CERTAINS FONDS, AU BÉNÉFICE DES INVESTISSEURS

Le présent article, issu de l'amendement COM-29 proposé par les rapporteurs, vise à renforcer le devoir de signalement des commissaires aux comptes auprès de l'AMF , qui ne porte en l'état du droit que sur l'émission de réserves et le refus de certification.

Le 1° du présent article impose ainsi aux commissaires aux comptes des organismes de placement collectif (OPC) et des sociétés de gestion de portefeuille (SGP) de signaler s'ils se trouvent dans l'impossibilité de certifier les comptes . Si le guide professionnel des échanges entre l'AMF et la CNCC aborde ce sujet, il ne peut en constituer la base normative.

Le 2° du présent article étend les obligations de signalement des commissaires aux comptes aux fonds de placement immobilier. En effet, seuls les commissaires des OPC prenant la forme d'une société de placement à prépondérance immobilière à capital variable sont aujourd'hui concernés par cette obligation, sans justification particulière de cette différence de traitement.

Le devoir de signalement des commissaires aux comptes est primordial pour l'AMF afin d'assurer sa mission de protection de l'épargne investie dans les instruments financiers . Les informations remontées lui permettent en effet d'exercer une vigilance particulière à l'égard de certains acteurs, y compris pour mieux anticiper les difficultés auxquelles ils pourraient faire face, avec des conséquences potentiellement dommageables pour les épargnants .

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article.


* 4 Règlement général de l'Autorité des marchés financiers.

* 5 Rapport d'information de MM. Jean-François HUSSON et Albéric de MONTGOLFIER sur la protection des épargnants, fait au nom de la commission des finances n° 20 (2021-2022) - 6 octobre 2021.

* 6 Ibid. L'un des exemples de contentieux présenté dans le rapport d'information relatif à la protection des épargnants est celui de la société GSD Gestion. Cette dernière n'avait pas été sanctionnée pour la méthode de calcul de ses commissions de mouvement mais pour des manquements dans la gestion des conflits d'intérêt. Le Conseil d'État a rejeté par une décision du 13 avril 2022 le recours formé par le directeur général de la société.

* 7 Arrêté du 16 mai 2022 portant homologation de modifications du règlement général de l'Autorité des marchés financiers.

* 8 L'Autorité des marchés financiers recourt à des prestataires externes pour ces visites, chaque client mystère dispose d'un profil précis et doit ensuite remplir une grille de restitution pour l'AMF.

* 9 Pour davantage de détails sur ces deux aspects, se référer au rapport d'information précité sur la protection des épargnants.

* 10 Rapport d'information de MM. Jean-François HUSSON et Albéric de MONTGOLFIER sur la protection des épargnants, fait au nom de la commission des finances n° 20 (2021-2022) - 6 octobre 2021.

* 11 Ibid.

* 12 Position - recommandation AMF doc-2012-2019 , guide d'élaboration du programme d'activité des sociétés de gestion de portefeuille et des placements collectifs autogérés (18 décembre 2012, modifié le 21 mars 2022).

* 13 Aux termes de l'article D. 321-1 du code monétaire et financier, « constitue le service de gestion de portefeuille pour le compte de tiers le fait de gérer, de façon discrétionnaire et individualisée, des portefeuilles incluant un ou plusieurs instruments financiers ou une ou plusieurs unités mentionnées à l'article L. 229-7 du code de l'environnement dans le cadre d'un mandat donné par un tiers ».

* 14 Autorité des marchés financiers, « Le mandat de gestion », 27 janvier 2016.

* 15 Pôle commun ACPR-AMF - Rapport d'activité 2015 , 2 juin 2016.

* 16 Ibid.

* 17 Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (EIOPA), Question/réponse n° 1596 .

* 18 Directive (UE) 2016/97 du Parlement européen et du Conseil du 20 janvier 2016 sur la distribution d'assurances.

* 19 Rapport d'information n° 20 de MM. Jean-François HUSSON et Albéric de MONTGOLFIER sur la protection des épargnants, fait au nom de la commission des finances (2021-2022) - 6 octobre 2021.

* 20 Autorité des marchés financiers, Lettre de l'observatoire de l'épargne , mars 2021.

* 21 Pour une discussion plus détaillée sur la performance nette des fonds en gestion passive et en gestion active, se reporter au rapport précité de MM. Husson et de Montgolfier sur la protection des épargnants (pp. 57-61).

* 22 ESMA, « Annual statistical report on performance and costs of retail investment products in the EU 2021 ».

* 23 ESMA, « Annual statistical report on performance and costs of retail investment products in the EU 2022 ».

* 24 Rapport d'information n° 20 précité de MM. Husson et de Montgolfier.

* 25 L'Autorité des marchés financiers recourt à des prestataires externes pour ces visites, chaque client mystère dispose d'un profil précis et doit ensuite remplir une grille de restitution pour l'AMF.

* 26 Autorité des marchés financiers, « Cartographie 2022 des marchés et des risques », 6 juillet 2022.

* 27 Sur cet aspect, le lecteur est invité à se reporter au commentaire de l'article 9 de la présente proposition de loi.

* 28 Pour davantage de détails, se reporter au rapport d'information précité de MM. Husson et de Montgolfier sur la protection des épargnants.

* 29 Rapport d'information n° 20 de MM. Jean-François HUSSON et Albéric de MONTGOLFIER sur la protection des épargnants, fait au nom de la commission des finances (2021-2022) - 6 octobre 2021.

* 30 Rapport sur les nouveaux plans d'épargne retraite . Rapport du Président du Comité consultatif du secteur financier, 2021.

* 31 Article L. 614-1 du code monétaire et financier.

* 32 Règlement (UE) n° 1286/2014 du Parlement européen et du Conseil du 26 novembre 2014 sur les documents d'informations clés relatifs aux produits d'investissement packagés de détail et fondés sur l'assurance .

* 33 Directive (UE) 2016/97 du Parlement européen et du Conseil du 20 janvier 2016 sur la distribution d'assurances (refonte) .

* 34 Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises .

* 35 Article R. 224-2 du code monétaire et financier.

* 36 Article L. 522-5 du code des assurances.

* 37 Arrêté du 26 décembre 2019 relatif aux engagements d'assurance donnant lieu à constitution d'une provision de diversification .

* 38 Article A.522-1 du code des assurances dans sa rédaction issue de l'arrêté du 26 décembre 2019 précité.

* 39 Article 2 de l'arrêté du 7 août 2019 portant application de la réforme de l'épargne retraite .

* 40 Article L. 132-22 du code des assurances.

* 41 Recommandation n° 7 du rapport cité.

* 42 Arrêté du 24 février 2022 portant renforcement de la transparence sur les frais du plan d'épargne retraite et de l'assurance vie .

* 43 Recommandation n° 7 du rapport cité sur la protection des épargnants.

* 44 Article L. 614-1 du code monétaire et financier.

* 45 Banque de France, Statistiques sur le plan d'épargne en actions et les PEA-PME , 27 juillet 2022.

* 46 À noter, si tout retrait de sommes ou de valeurs entraîne par défaut la clôture du PEA s'il intervient avant l'expiration de la cinquième année, des dérogations sont prévues, notamment lorsque les sommes ou les valeurs sont affectées au financement de la création ou de la reprise d'une entreprise ou à la souscription en numéraire au capital initial d'une société ou à l'achat d'une société existante. D'autres dérogations sont liées à la situation du titulaire (invalidité, licenciement, mise en retraite anticipée).

* 47 Rapport d'information de MM. Jean-François HUSSON et Albéric de MONTGOLFIER sur la protection des épargnants, fait au nom de la commission des finances n° 20 (2021-2022) - 6 octobre 2021.

* 48 Pour plus de détails, se reporter au rapport d'information précité.

* 49 Autorité des marchés financiers, « L'AMF crée un groupe de travail sur le PEA », 15 septembre 2022.

* 50 Article 26 de la loi n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle.

* 51 Annexe I du règlement (UE) n° 651/2004 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité .

* 52 Une entreprise est considérée comme innovante lorsque ses dépenses de recherche représentent au moins 10 % de ses charges d'exploitation ou qu'elle a obtenu la qualification « entreprise innovante » de Bpifrance.

* 53 La zone géographique choisie par le fonds est limitée à quatre régions limitrophes.

* 54 Article 74 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

* 55 Pour davantage de détails, le lecteur est invité à se reporter au commentaire de l'article 3 decies du projet de loi de finances pour 2023, dans le rapport général n° 115 (2022-2023) de M. Jean-François HUSSON, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances, déposé le 17 novembre 2022.

* 56 Article 17 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

* 57 Rapport d'information de MM. Jean-François HUSSON et Albéric de MONTGOLFIER sur la protection des épargnants, fait au nom de la commission des finances n° 20 (2021-2022) - 6 octobre 2021.

* 58 Décret n° 2016-1532 du 15 novembre 2016 pris en application de l'article 18-III-B de la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013.

* 59 Chiffres communiqués par France Assureurs.

* 60 Article 125-0 A du code général des impôts.

* 61 Données de France Assureurs.

* 62 Loi n°2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises .

* 63 Bulletin officiel des impôts, 5 l-4-05 n° 182 du 4 novembre 2005.

* 64 Loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013 .

* 65 Article 72 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises .

* 66 Rapport d'information n° 20 de MM. Jean-François HUSSON et Albéric de MONTGOLFIER sur la protection des épargnants, fait au nom de la commission des finances (2021-2022) - 6 octobre 2021.

* 67 Données de France Assureurs.

* 68 P. 94 du rapport précité.

* 69 Article L. 132-22 du code des assurances.

* 70 Recommandation n° 10 du rapport précité.

* 71 Recommandation n° 11 du rapport précité.

* 72 Amendement n° 384 rect. bis.

* 73 Article L. 224-6 du code monétaire et financier.

* 74 Rapport précité, p. 98.

* 75 Article L. 612-33 du code monétaire et financier

* 76 5° ter de l'article L. 631-2-1 du code monétaire et financier.

* 77 Ordonnance n° 2018-361 du 16 mai 2018 relative à la distribution d'assurance .

* 78 Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique .

* 79 Directive (UE) 2016/97 du Parlement européen et du Conseil du 20 janvier 2016 sur la distribution d'assurances (refonte) .

* 80 Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises.

* 81 Rapport annuel 2021 de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution .

* 82 Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises .

* 83 Articles L. 224-1 et suivants du code monétaire et financier.

* 84 « Le plan d'épargne retraite dépasse les attentes » , Les Echos, 13 octobre 2022.

* 85 Rapport d'information n° 20 de MM. Jean-François HUSSON et Albéric de MONTGOLFIER sur la protection des épargnants, fait au nom de la commission des finances (2021-2022) - 6 octobre 2021.

* 86 Pages 106 et 107 du rapport précité ; Rapport du Comité consultatif du secteur financier (CCSF) de 2021 sur les nouveaux plans d'épargne retraite, p. 16.

* 87 Rapport d'information n° 20 de MM. Jean-François HUSSON et Albéric de MONTGOLFIER sur la protection des épargnants, fait au nom de la commission des finances (2021-2022) - 6 octobre 2021.

* 88 Rapport précité, p. 108.

* 89 Des innovations existent en la matière : certains fonds indiciels cotés répliquent des indices sectoriels, voire des indices de marché obligataire.

* 90 Recommandation n° 13 du rapport précité.

* 91 Nest, the National Employment Savings Trust. Corporation annual report and accounts.

* 92 Article L. 221-30 du code monétaire et financier.

* 93 Article L. 221-32-1 du code monétaire et financier.

* 94 Rapport d'information de MM. Jean-François HUSSON et Albéric de MONTGOLFIER sur la protection des épargnants, fait au nom de la commission des finances n° 20 (2021-2022) - 6 octobre 2021.

* 95 Loi n° 89-1014 du 31 décembre 1989 portant adaptation du code des assurances à l'ouverture du marché européen.

* 96 Orias, rapport annuel pour l'année 2021 .

* 97 À noter que ce statut est amené à disparaître dans le cadre de l'adaptation du droit national au règlement (UE) 2020/1503 du Parlement européen et du Conseil du 7 octobre 2020 relatif aux prestataires européens de services de financement participatif pour les entrepreneurs.

* 98 Orias, rapport annuel pour l'année 2021 .

* 99 Orias, rapport annuel pour l'année 2021 .

* 100 Loi n° 2021-402 du 8 avril 2021 relative à la réforme du courtage de l'assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement.

* 101 Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, « Réforme du courtage : entrée en vigueur le 1 er avril 2022 ».

* 102 Pour davantage de détails, le lecteur est invité à se reporter au rapport n° 331 (2020-2021) de M. Albéric de MONTGOLFIER, fait au nom de la commission des finances, déposé le 3 février 2021.

* 103 Rapport d'information de MM. Jean-François HUSSON et Albéric de MONTGOLFIER sur la protection des épargnants, fait au nom de la commission des finances n° 20 (2021-2022) - 6 octobre 2021.

* 104 Il s'agit notamment de louer le bien en respectant des plafonds de loyer, de le louer sur une durée de six à neuf ans, prolongeable à douze ans, et de le louer à des ménages dont les ressources sont inférieures à un plafond.

* 105 Ces taux sont ceux qui s'appliquent à compter du 1 er janvier 2023. Ils étaient auparavant de 12 % pour un engagement de six ans, 18 % pour un engagement de neuf ans et 21 % pour un engagement de 12 ans. Ils seront de respectivement 9 %, 12 % et 14 % à compter du 1 er janvier 2024.

* 106 Évaluations des voies et moyens, tome II « Les dépenses fiscales », annexe au projet de loi de finances pour 2023.

* 107 Ibid.

* 108 Loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

* 109 Évaluations des voies et moyens, tome II « Les dépenses fiscales », annexe au projet de loi de finances pour 2023.

* 110 Article 74 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.

* 111 Évaluation des voies et moyens, tome II « Les dépenses fiscales », annexe au projet de loi de finances pour 2023.

* 112 Inspection générale des finances, « Évaluation du dispositif d'aide fiscale à l'investissement locatif Pinel », novembre 2019.

* 113 Article 68 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 modifiant l'article 199 novovicies du code général des impôts et décret n° 2019-1426 du 20 décembre 2019 pris pour l'application du X bis de l'article 199 novovicies du code général des impôts et relatif au plafonnement des frais et commissions des intermédiaires intervenant lors d'une acquisition de logement bénéficiant de la réduction d'impôt prévue à cet article.

* 114 Aux termes de l'article L. 551-1 du code monétaire et financier, un bien divers est un bien qui offre une promesse de rendement récurrent associé à un service de gestion.

* 115 Rapport d'information de MM. Jean-François HUSSON et Albéric de MONTGOLFIER sur la protection des épargnants, fait au nom de la commission des finances n° 20 (2021-2022) - 6 octobre 2021.

* 116 D'après les données transmises aux rapporteurs dans le cadre de la préparation du rapport d'information sur la protection des épargnants.

* 117 Rapport du Conseil d'orientation de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (COLB) - « Analyse nationale des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme en France », septembre 2019.

* 118 Les minibons sont des bons de caisse spécifiques au financement participatif. Il s'agit de titres nominatifs et non négociables émis par les sociétés et délivrés en contrepartie d'un prêt assorti d'un taux conventionnel fixe et plafonné. Par dérogation aux bons de caisse, les minibons peuvent être émis par l'intermédiaire d'un prestataire de services d'investissement ou d'un conseiller en financement participatif au moyen d'un site internet et pour le compte de sociétés par actions et de sociétés à responsabilité limitée dont le capital est intégralement libéré. Les minibons seront supprimés à compter du 10 novembre 2023, date d'entrée en vigueur du règlement européen du 7 octobre 2020 sur les prestataires de services de financement participatif.

* 119 Pour plus de détails, le lecteur est invité à se reporter au commentaire de l'article 41 du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des transports, de l'environnement, de l'économie et des finances - Avis n° 569 (2020-2021) de M. Hervé MAUREY, fait au nom de la commission des finances, déposé le 12 mai 2021.

* 120 Règlement (UE) 2020/1503 du Parlement européen et du Conseil du 7 octobre 2020 relatif aux prestataires européens de services de financement participatif pour les entrepreneurs, et modifiant le règlement (UE) 2017/1129 et la directive (UE) 2019/1937.

* 121 Ordonnance n° 2021-1735 du 22 décembre 2021 modernisant le cadre relatif au financement participatif.

* 122 Ordonnance n° 2022-1229 du 14 septembre 2022 modifiant l'ordonnance n° 2021-1735 du 22 décembre 2021 modernisant le cadre relatif au financement participatif et l'ordonnance n° 2022-230 du 15 février 2022 relatif aux titres III à VIII de la partie législative du livre VII du code monétaire et financier.

* 123 Après avis conforme de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) pour tous les prestataires ayant une activité de facilitation d'octroi de prêts.

* 124 Autorité des marchés financiers, « Prospectus établi pour l'offre au public de parts sociales des banques mutualistes ou coopératives », applicable depuis le 3 décembre 2019 ; « Informations à fournir dans le cadre d'une offre au public de parts sociales de société coopérative constituée sous forme de société anonyme », applicable depuis le 19 décembre 2019.

* 125 Décision n° 2021-965 QPC du 28 janvier 2022.

* 126 Loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires.

* 127 Commentaire de la décision n° 2021-965 QPC du 28 janvier 2022.

* 128 Autorité des marchés financiers et Compagnie nationale des commissaires aux comptes, « Guide des relations entre l'Autorité des marchés et les commissaires aux comptes », mise à jour avril 2022.

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