2. Les médecins libéraux : malgré un mauvais premier semestre, le respect de l'objectif de 2,1 % n'est pas hors de portée

a) Un objectif prévisionnel 1996 rigoureux

Malgré un début d'année marqué par de forts dérapages, la commission des comptes estime que l'objectif de progression des dépenses, à savoir 2,1 %, sera respecté.

En 1996, l'objectif prévisionnel de dépenses applicable aux médecins n'a pas été déterminé selon les procédures conventionnelles habituelles. Jusqu'à la promulgation de l'ordonnance relative à la maîtrise des dépenses de médecins de ville, celles-ci résultaient de l'application de l'article L. 162-6-1 du code de la sécurité sociale qui disposait que, chaque année, une annexe à la convention déterminerait les objectifs prévisionnels concernant l'activité des généralistes et des spécialistes. Et, à défaut d'accord entre les partenaires conventionnels, l'article L. 162-6-2 dudit code prévoyait la reconduction des objectifs de l'année précédente.

Or, l'article premier de l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996 relative aux mesures urgentes tendant au rétablissement de l'équilibre financier de la sécurité sociale a prévu la possibilité de déroger, pour l'année, aux dispositions de l'article L. 162-6-2.

En effet, en cas de désaccord entre les partenaires conventionnels, le Gouvernement ne souhaitait pas qu'intervienne une reconduction des objectifs qui n'aurait pas été compatible avec le redressement des comptes de l'assurance maladie.

Il a donc inscrit dans l'ordonnance qu'à défaut d'accord entre partenaires conventionnels, un arrêté ministériel pourrait fixer l'objectif prévisionnel pour 1996. L'ordonnance a aussi prévu le maintien en vigueur des références médicales et du mécanisme de sanction y afférent en cas d'absence d'accord conventionnel.

Un tel accord n'ayant pu être trouvé au 15 janvier 1996, date limite d'approbation de l'annexe annuelle retenue par l'ordonnance, un arrêté du 8 mars 1996 a fixé à 2,1 % l'objectif prévisionnel pour l'année. Un seul taux a été retenu pour les spécialistes et les généralistes. Ce taux de 2,1 %, on l'a vu, a également été retenu pour les hôpitaux sous dotation globale.

b) De mauvais résultats au cours des sept premiers mois de 1996, notamment pour certains régimes et certaines catégories d'honoraires

Pour les sept premiers mois de l'année, le taux d'évolution des dépenses entrant dans le champ de l'objectif prévisionnel a été beaucoup plus élevé que l'objectif (4,6 % contre 2,1 %). Selon la Commission des comptes de la sécurité sociale, il faut cependant tenir compte d'effets de calendrier qui ont « gonflé » le taux des sept premiers mois.

Si l'on analyse la progression des dépenses médicales (honoraires et prescriptions) par régime sur les six premiers mois, il faut notamment souligner les mauvais résultats enregistrés par :

- la SNCF + 8,5 %

- la caisse militaire + 7,8 %

- le régime des mines + 7,9 %.

Poste par poste, tous régimes confondus, les progressions les plus significatives au premier semestre en ce qui concerne les honoraires ont été :

- les consultations + 5 %

- les actes en KC +5 %

et surtout :

- les actes en SPM +14,5 %

- les honoraires de surveillance + 13,6 %

- les frais de déplacement des médecins + 13,6 %

Quel que soit l'effort entrepris jusqu'à la fin de l'année, il faut craindre que le respect de l'objectif ne soit pas assuré pour certains de ces régimes ou postes de dépenses. Cette situation devrait appeler une attention particulière de la part des partenaires conventionnels.

c) Les prévisions de la Commission des comptes sont néanmoins optimistes

Pour l'ensemble de l'année 1996 et le seul régime général, les prestations correspondant aux consultations augmenteraient, selon la Commission des comptes,

- de 5,4 % pour les omnipraticiens

- de 3,5 % pour les spécialistes.

Les prestations correspondant aux frais de déplacement des médecins augmenteraient de 7,1 % et les honoraires de surveillance de 6,6 %.

La Commission des comptes estime néanmoins qu'en 1996, les dépenses relatives à l'activité des médecins évolueraient conformément à l'objectif d'évolution des dépenses, soit 2,1 % pour la dépense remboursable et 2,3 % pour la dépense remboursée.

Il faut toutefois noter le caractère quelque peu volontariste (tautologique ?) de cette « prévision » : à la page 62 de son rapport, la Commission des comptes « prévoit » en effet que la dépense remboursable évoluera de 2,1 % mais affirme que cette « prévision » repose sur « l'hypothèse » que les médecins respecteront leur objectif...

Plutôt que les prévisions, les chiffres des mois de juin, juillet et août sont à considérer attentivement. Au cours de ces trois mois, l'évolution des dépenses de remboursement d'honoraires médicaux a été négative pour le régime général, avec - 0,3 % en juin, - 0,3 % en juillet et - 0,5 % en août.

De bons résultats sont également constatés sur ces trois mois pour les dépenses correspondant aux prescriptions (biologie, auxiliaires médicaux), si l'on excepte les médicaments.

Si cette tendance se poursuit, l'objectif de 2,1 % pourrait être respecté en 1996 : il n'est donc plus hors de portée.

d) Les leçons de l'année 1996

Si l'objectif de 2,1 % est respecté cette année, ce respect aura reposé sur le seul « climat » de maîtrise des dépenses né de l'affichage d'une politique gouvernementale rigoureuse.

En effet, le blocage de la vie conventionnelle constaté en 1996 s'est traduit par l'absence de nouvelles références médicales opposables aux médecins et par celle d'un véritable contrôle de l'application des références médicales existantes.

Cela a quelque peu « démédicalisé » le dispositif de maîtrise applicable aux médecins en 1996.

Certes, l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996 avait prévu de maintenir l'opposabilité de ces références en l'absence d'accord entre partenaires conventionnels.

Mais la pratique a montré qu'en l'absence de vie conventionnelle, l'opposabilité des références, juridiquement fondée, est restée lettre morte en pratique.

L'expérience de l'année 1996 montre ainsi à quel point il est nécessaire et urgent de redonner un contenu à la vie conventionnelle et de rétablir le dialogue entre pouvoirs publics, caisses et médecins.

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