GÉNÉRAL JEAN-PHILIPPE ROUX,
DIRECTEUR ADJOINT DE LA DÉLÉGATION AUX AFFAIRES STRATÉGIQUES AU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

- M. le Général Roux : "A leur réunion du 1 er décembre 1994, les Ministres des affaires étrangères de l'Alliance ont décidé d'engager un processus d'examen au sein de l'Alliance, pour déterminer la manière dont elle s'élargira.

Ceci faisait suite à un certain nombre de décisions capitales visant à sortir de la situation générée par la guerre froide : Création du Conseil de coopération Nord Atlantique en 1991, du Partenariat pour la Paix, en 1994.

Lors du sommet de Madrid des 8 et 9 juillet 1997 était prise solennellement la décision de lancer les démarches concrètes visant à intégrer une première vague de trois pays : La Hongrie, la Pologne et la République tchèque. Malgré les efforts soutenus de la France pour accroître la liste, notamment à la Roumanie, l'Alliance se fondant avant tout sur une analyse militaire, s'est limitée à ces trois pays. Elle a cependant affirmé qu'elle resterait ouverte à de nouveaux membres, conformément à l'article 10 du traité de Washington.

Après avoir rappelé les grandes lignes des raisons fondamentales, qui, d'un point de vue Défense, font de ces trois premiers grands pays de l'ex-Pacte de Varsovie, d'excellents candidats à une entrée dans l'Alliance, je décrirai les perspectives générales ouvertes par leur adhésion, avant d'en tirer quelques conclusions quant aux perspectives qui sont ainsi créées pour nous-mêmes.

Rappelons d'abord les engagements que doivent prendre les nouveaux membres qui entrent dans l'Alliance :

. Unir de manière réaliste leurs efforts pour la défense collective et la préservation de la paix et de la sécurité et s'engager à régler par des moyens pacifiques tous différends internationaux dans lesquels ils pourraient être impliqués.

Compte tenu des tensions inhérentes aux décisions internationales imposées par l'histoire à ces pays en matière de délimitation des frontières, l'appartenance à l'Alliance, et surtout la préparation de cette appartenance, entraînent une garantie réelle de stabilité pour l'Europe.

. Contribuer au développement de relations internationales pacifiques et amicales en renforçant leurs libres institutions et en développant les conditions propres à assurer la stabilité et le bien être.

Ceci constitue une démarche fondamentale, dans le droit fil de ce que les populations de ces pays ont obtenu, en se dégageant de la tutelle soviétique. La marche vers le progrès, ainsi déclenchée, qui implique une renonciation à un effort en matière d'armement et de préparation des forces hors de proportion avec la réalité internationale, donne là aussi une garantie supplémentaire de stabilité à la nouvelle architecture européenne. Le Pacte de stabilité en Europe, initié par la France, et dont le suivi a été confié à l'OSCE, qui comporte déjà de nombreux traités et accords bilatéraux, reçoit là une nouvelle impulsion.

. Enfin, l'engagement de maintenir l'efficacité de l'Alliance, en partageant les rôles les risques et les responsabilités et les coûts.

Ceci entraîne l'assurance que ces pays joueront un rôle à part entière dans la nouvelle Alliance, sans impliquer une augmentation hors de propos de l'effort de défense des 16 membres actuels de l'OTAN.

Resituons l'événement dans son cadre général, afin d'en tirer les leçons.

Il est clair, que l'élargissement de l'Alliance se produit dans des conditions essentiellement différentes que celles qui prévalaient jusqu'ici. Les risques de conflit auxquels l'OTAN doit faire face sont notoirement diminués, et surtout ils ne sont plus, fort heureusement, à horizon raisonnable dans une problématique d'affrontement de super puissances. La Russie, par son engagement dans une concertation étroite avec l'OTAN, par sa participation effective à des opérations de maintien de la paix aux côtés des occidentaux, n'est plus l'ennemi d'hier, et le nouveau concept de l'Alliance, qui sera adopté au sommet de Washington de 1999 en prendra clairement acte.

Il demeure, et tous les Alliés en conviennent, des risques pour la sécurité de l'Europe, qui se présentent sous des formes complexes, politiquement difficilement prévisibles, mais que l'analyse stratégique, et aussi la mémoire de l'Histoire, réussissent quand même à cerner.

Il est donc indispensable, sans que cela constitue une alarme excessive pour la Russie, d'engerber dans une Alliance aussi structurée que l'OTAN, les grands pays de l'Est, qui vivraient sinon, de manière difficile, leurs premiers pas de liberté vis-à-vis de l'ancienne puissance dominatrice.

On peut le vérifier en observant la situation dans le glacis de la Russie.

La dynamique ainsi créée, ainsi que les efforts énergiques des nouveaux membres pour se mettre aux standards techniques, mais aussi démocratiques de leurs nouveaux alliés, aura, on peut en être certain, un effet d'influence, sur les autres pays, qui aspirent à être eux-mêmes admis, et aussi, pourquoi pas sur les anciens membres de l'Alliance, qui ont quelquefois, pour certains d'entre eux, trop perdu de vue l'esprit du traité de Washington.

L'élargissement de l'Alliance s'inscrit également dans l'élargissement de l'Union européenne, et introduit un élément de cohérence entre l'organisation principale de défense commune des européens et l'Union économique et monétaire du troisième millénaire.

Dès la décision politique initiale de l'Alliance, des dispositions précises ont été prises afin de déterminer les conditions dans lesquelles les pays se trouvaient en matière de défense, et les engagements qu'ils prendraient pour appuyer leurs candidatures.

Une première série de travaux s'est centrée sur les questions spécifiques de la relation future des trois pays avec la structure militaire de l'Alliance, et surtout sur leur participation à la planification de défense de l'organisation militaire intégrée.

Mais les discussions les plus difficiles ont eu trait aux questions budgétaires et à la détermination des quote-parts et modalités régissant la participation aux activités de l'OTAN financées en commun.

Les trois candidats se sont ainsi engagés à souscrire sans réserve au concept stratégique de l'OTAN, et tout particulièrement au volet nucléaire. Ils ont bien noté que dans sa déclaration du 10 décembre 1996, l'OTAN a déclaré « qu'il n'a aucune intention, aucun projet, et aucune raison de déployer des armes nucléaires sur le territoire de nouveaux membres, et n'a aucunement besoin de modifier un quelconque aspect de son dispositif ou de sa politique nucléaire et n'en prévoit nullement le besoin pour l'avenir. »

En ce qui concerne la planification opérationnelle, les trois pays se sont déclarés prêts à participer à toutes les gammes des missions de l'Alliance.

La République tchèque s'est ainsi engagée à entrer dans l'Alliance « dans toute la mesure de ses moyens ». Elle prévoit actuellement, en effet, d'y affecter 90% de ses forces armées, soit l'intégralité de ses forces opérationnelles.

La Hongrie a attribué également le gros de ses forces à la force de défense principale alliée multinationale, et s'est engagée à fournir des unités au dispositif d'appui tactique et de soutien aux forces de réaction.

La Pologne, quant à elle destine toutes ses forces opérationnelles au dispositif militaire de l'Alliance

L'effort le plus sensible, accepté par les trois candidats se situe incontestablement sur le plan de l'affectation des ressources financières, qu'ils se proposent de consacrer à la Défense.

La République tchèque dès le 18 septembre 1996, a adopté une résolution en vertu de laquelle la part des dépenses militaires dans le PIB augmenterait de 0.1% par an, pour atteindre environ 2% du PIB d'ici à l'an 2000. Suivant cette résolution le gouvernement a prévu pour le budget 1998, d'accroître ses dépenses de défense de 17% en valeur réelle, soit 26% en valeur nominale, par rapport à 1997.

La république de Hongrie, s'est engagée à faire enregistrer à ses dépenses de défense une hausse graduelle et constante dans les prochaines années. Il est planifié d'accroître chaque année le budget d'environ 10 % en valeur réelle, et ce sur la période 1999-2001. La part des dépenses dans le PIB augmenterait ainsi annuellement de 0,1% pour atteindre 1.81% d'ici 2001. Le budget 1998 affiche en objectif une part de 1,51 % du PIB soit une progression en valeur réelle de 10,2% par rapport à 1997.

La Pologne s'est déclarée prête, quant à elle, à mettre en chantier un plan à 15 ans de développement et de modernisation des forces armées. Au cours des cinq prochaines années la part du budget de la défense consacrée à l'acquisition et à la modernisation des équipements devrait augmenter de 3% de plus que le budget global de l'Etat. D'ici à 2012, le budget de la défense serait supérieur de 56% en valeur réelle à celui de 1998.

Les besoins militaires peuvent être traduits en capacités à l'intérieur de chaque grande fonction étudiée.

L'amélioration des systèmes de commandement des trois pays invités doit conduire à assurer une interopérabilité complète avec les systèmes alliés et surtout à étendre le système de commandement de l'OTAN à tout le territoire des nouveaux membres.

Mais c'est surtout l'extension du système de défense aérienne de l'Alliance, qui est significatif. Il est en effet nécessaire de construire sur des infrastructures souvent défaillantes, d'une part, un système de communication performant, compatible avec celui de l'Alliance (stations sol et interface avec le système allié de détection aéroporté AWACS), mais aussi de réaliser un réseau de radars de défense aérienne et des centres de détection et de contrôle, en mesure de conduire des opérations aériennes de grande ampleur.

En matière d'infrastructure le bilan général est bon, en ce qui concerne les voies ferroviaires et routières, mais un effort important est à faire sur les bases aériennes, qui doivent dans leur ensemble faire l'objet de modernisations.

L'engagement consenti, par l'Alliance, sur 10 ans, au profit des trois pays candidats, pour leur permettre de rejoindre la "terre promise" de l'OTAN, est considérable. Notons, par exemple, que pour le commandement et contrôle, la défense aérienne et l'entraînement; plus de 7 milliards de francs seront engagés par les 16 membres de l'Alliance, au profit de leurs nouveaux alliés.

Pour financer cet effort, il a été choisi de redéployer les ressources rendues disponibles par les économies résultant de la restructuration de l'OTAN. C'est à ce titre, que l'on est en droit de se demander si les plans prévus seront bien tenus, car on doute qu'une organisation aussi lourde que l'OTAN échappe à une augmentation de son coût de fonctionnement, même au prix de la réduction de près de deux tiers de ses états-majors.

La France a un intérêt stratégique évident à promouvoir l'avènement de ces trois candidats, même si sa vision n'est pas identique à celle de certains de ses alliés.

En effet, l'offre faite de mettre en oeuvre les dispositions de l'article 10 du traité de Washington est totalement compatible avec la vision française de l'identité européenne de défense. Accroître la zone de stabilité et de sécurité plus à l'Est, ne pas laisser livrés à eux-mêmes les anciens obligés de l'URSS, relève de la plus élémentaire prudence.

En revanche, limiter cette ouverture à trois pays revient à donner un signal doublement négatif.

Négatif d'abord vis à vis de la Russie qui tirera vite la conclusion que sont uniquement admis dans l'Alliance les pays qui représentent un potentiel militaire significatif pour l'OTAN, donnant ainsi une connotation résolument offensive à cet élargissement. Il ne s'agit pas, selon nous, de reporter à l'Est ce qui fut pendant 40 ans la ligne de démarcation des deux blocs antagonistes, issus de la deuxième guerre mondiale.

Négatif aussi vis-à-vis des autres pays, qui se sentiront victimes d'un jugement discriminatoire et dotés d'un statut moins honorable que leurs plus puissants voisins. Par définition dans une situation moins enviable, ils risquent de perdre leur élan vers la démocratie et même, pour certains, de retourner vers une nostalgie du passé. Personne ne peut souhaiter une telle situation.

C'est pourquoi, dès le sommet de Madrid, la France a plaidé jusqu'au dernier moment, pour une conception plus généreuse, plus stratégique de l'élargissement et aussi, admettons-le, moins militaire. Cet effort sera poursuivi dans la perspective du sommet de Washington.

Il était également tout aussi primordial de ne pas donner aux futurs nouveaux alliés le sentiment que la position de la France vis à vis de l'organisation militaire intégrée, sa vision plus généreuse de l'élargissement en faisait un allié moins enthousiaste pour accueillir les nouveaux arrivants. C'est donc sans aucune arrière pensée, que la France a déployé ses efforts pour apporter toute l'aide possible aux trois candidats à l'intégration, soit en bilatéral, soit en multinational, notamment dans le cadre du partenariat pour la paix.

Venons-en maintenant pays par pays, à une approche plus analytique du problème, à travers le prisme de notre propre vision stratégique.

La Pologne est, de par ses caractéristiques exceptionnelles, au premier rang des efforts français de coopération de défense. Sa population de 39 millions d'habitants, et ses effectifs militaires qui dépassent les 200 000 hommes la placent aisément à la première place parmi les pays ECOB.

La Pologne participe activement à la sécurité et à la coopération régionale, sans d'ailleurs cacher sa légitime ambition de faire la preuve de son rang de puissance à part entière. Depuis 1989, sa politique étrangère poursuit quatre objectifs majeurs :

- l'ancrage occidental

- la normalisation et le développement des relations avec l'Allemagne

- le développement des relations avec les nouveaux Etats issus de l'URSS

- la recherche d'une coopération régionale active.

Elle s'est fortement engagée dans la coopération régionale dite de « VISEGRAD », avec la république tchèque la Slovaquie et la Hongrie, mais surtout, au sein du triangle de WEIMAR (France Allemagne Pologne). Elle y déploie, notamment en matière de défense, une politique équilibrée et résolue, visant à obtenir le meilleur appui de ses deux grands alliés, pour faciliter son intégration dans l'OTAN.

Dans leur déclaration clôturant leur réunion des 2 et 3 novembre 1997, les trois ministres ont d'ailleurs solennellement déclaré qu'ils entendaient faire porter l'effort sur les domaines suivants :

. la mise en oeuvre complète du programme triennal pour la coopération militaire et politico-militaire, incluant une révision annuelle des objectifs en fonction des résultats déjà obtenus

. la poursuite des travaux d'harmonisation dans la perspective d'une politique de défense commune ;

. l'intensification des mesures de soutien à l'intégration de la Pologne à l'Alliance atlantique en particulier dans le domaine des infrastructures de l'OTAN, de la préparation du personnel, du processus de planification des forces armées, ainsi que des procédures opérationnelles.

A cette occasion, M. Alain Richard, ministre de la défense, a indiqué à ses deux collègues, M. Ruehe et M. Onyzskiewicsz qu'il lançait trois initiatives visant à promouvoir l'effort ainsi défini :

. la participation d'un groupe d'avions de combat français à des activités de formation et d'entraînement commun en Pologne dont la première étape serait matérialisée par la mise en place d'un demi-escadron de Mirage 2000, à l'été prochain

. la mise à disposition des autorités polonaises d'un concours français en experts spécialisés dans l'audit des bases aériennes

. la constitution à Varsovie d'une véritable mission militaire française suffisamment étoffée, pour faire face aux besoins et à la dynamique de la coopération en procédant par redéploiement de nos moyens en personnels dès 1998.

Lors de la dernière réunion du triangle de Weimar, le 19 avril 98 à St Rémy de Provence, ont été réitérées ces intentions et signé, le lendemain, entre les deux ministres français et polonais, un accord relatif aux procédures liées aux principes du trafic aérien réciproque des aéronefs d'Etat dans l'espace aérien contrôlé par les deux Pays.

Dans notre effort bilatéral de coopération, la Pologne est donc bien identifiée parmi les pays d'Europe centrale, comme le pays prioritaire, avec un rôle de pays relais dans sa zone géographique naturelle d'influence.

La coopération franco-polonaise repose sur un arrangement signé le 15 juin 1992. Il est apparu, depuis, compte tenu de l'intensité de notre coopération que cet arrangement de 1992 méritait d'être complété. Les deux ministres de la défense ont ainsi convenu de procéder au cours de l'année 1998 à la signature d'un accord intergouvernemental sur la coopération de défense, juridiquement plus contraignant et d'une portée politique supérieure.

Par ailleurs, un projet d'accord de sécurité de protection des informations classifiées est en cours.

Enfin, pour l'année 1998, il convient de noter qu'une centaine d'actions de coopération est programmée, dont la plus spectaculaire est évidemment le déploiement, déjà cité, de Mirage 2000 sur la base de Minsk MAZOWIECKI.

Sur le plan géostratégique, la Hongrie constitue un trait d'union entre l'Europe orientale du Nord au Sud. Elle dispose de frontières avec les Etats centre européens (Autriche, Slovaquie, Roumanie) avec des pays issus de la recomposition de l'Ex-Yougoslavie (Slovénie, Croatie, Serbie) et avec l'Ukraine issue de l'Ex-URSS. En revanche, elle ne possède aucune frontière avec des Etats appartenant à l'OTAN. Sa population de 10.2 millions d'habitants, et ses effectifs militaires d'environ 44 000 hommes situent la Hongrie en bonne place parmi les pays ECOB. Par ailleurs, la présence de minorités magyares dans les pays proches stimule la normalisation des rapports avec les Etats abritant ces minorités. (Roumanie, 1.7 millions, Slovaquie 600 000, ex Yougoslavie 400 000, Ukraine 200 000) ; Ne serait ce que dans ce domaine les efforts déployés, dans la perspective de l'adhésion à l'OTAN sont d'une valeur stratégique primordiale.

Le jeu de l'alternance et la stabilité institutionnelle démontrent la maturité politique de la Hongrie. Il est important de noter, que l'objectif d'intégration à l'OTAN est graduellement rattrapé par celui de l'adhésion à l'Union. La Hongrie a nettement opté, sans contredire ses déclarations initiales pour « avoir l'armée de ses besoins et non l'armée que pourrait désirer l'OTAN ». Elle affiche dans cette optique une nette préférence pour l'intégration de ses forces armées au commandement sud de l'Alliance (AFSOUTH) et indique, déjà, qu'il faudrait faire évoluer ce commandement trop marqué par sa dimension navale, afin de répondre aux défis de l'Europe du Sud Est et du Caucase. C'est dire que la politique de la France, vis à vis de ce commandement est comprise, même si pour l'instant, pour des raisons évidentes, la Hongrie reste dans une réserve prudente.

La coopération de défense de la Hongrie avec la France repose sur l'arrangement administratif du 21 juin 1991, et comporte pour 1998, 53 actions de coopération. La visite du Président de la République à Budapest, en février 97, l'accueil très positif réservé au Ministre de la défense les 22 23 février derniers, ainsi que la première livraison, le 22 janvier des missiles MISTRAL de MATRA, ainsi que la signature de l'accord de sécurité franco-hongrois le 23 février, constituent autant de signes qui incitent à développer, surtout qualitativement, notre coopération de défense avec la Hongrie.

Elle s'articule sur des échanges bilatéraux d'unités et un soutien visant à favoriser la mise aux normes occidentales des forces armée hongroises.

Enfin, et compte tenu des bons résultats initiaux, la France s'efforce de développer une coopération industrielle de premier plan, dans une dynamique européenne.

Les Etats-Unis et l'Allemagne sont les pays qui ont mis en oeuvre les plans de coopération les plus ambitieux avec la République tchèque. La France se situe à la troisième place, et si le dialogue franco-tchèque est très intense et emprunt d'une grande franchise, en revanche, force est de constater que l'absolue priorité à l'intégration dans l'OTAN, et partant, à la consolidation des liens avec les Etats-Unis, freine les réalisations concrètes franco-tchèques, en particulier dans le domaine de la coopération en matière d'armement.

Il est intéressant de noter, pour illustrer ce propos, que la république tchèque, en mars 97, a décidé d'appliquer l'embargo sur les relations avec la Libye, et s'est signalée, lors de la récente crise Nations Unies Irak, par l'offre immédiate d'un soutien logistique, en cas d'attaque contre l'Irak.

L'arrangement franco-tchèque, qui fonde notre coopération de défense, a été signé le 14 novembre 1997, par nos deux Ministres de la Défense. Sa véritable entrée en vigueur dépend cependant de l'adoption d'un accord intergouvernemental relatif au séjour temporaire des membres des forces armées sur le territoire de l'autre Etat.

La coopération bilatérale est organisée par un plan annuel fourni, et a permis, en 97 la réalisation de 85 actions. Cette coopération est à dominante terre avec un accent particulier sur les forces spéciales. Dans le domaine technique, nos activités sont diversifiées avec un effort sur la formation des cadres.

Nous entretenons également un dialogue politico-militaire à fréquence semestrielle, sous l'égide du côté français, de la Délégation aux affaires stratégiques.

En matière d'équipement, nous avons fourni la totalité de l'infrastructure de télécommunications des armées, mais n'avons pas, en revanche, encore débouché sur des réalisations d'envergure, comme la modernisation de la flotte d'hélicoptères, la fourniture de missiles sol-air ou de postes radios de la 4 ème génération.

Nous portons nos efforts, actuellement sur la définition d'un projet majeur pluriannuel sur un sujet transversal, notamment dans le domaine de la formation des personnels.

Ainsi la France participe de manière efficace et transparente à l'intégration dans l'Alliance des trois pays retenus lors du sommet de Madrid, en application des orientations arrêtées par le Chef de l'Etat, et de la politique menée par le Gouvernement.

Cette attitude est accueillie très favorablement par les futurs alliés qui auraient pu redouter que la non-intégration de la France dans les structures militaires, se répercute sur le calendrier de leur propre adhésion.

La vitalité de notre coopération bilatérale, l'indépendance de nos options stratégiques fondamentales, en même temps que notre adhésion sans faille à l'esprit et à la lettre du traité de Washington, assurent à la France, une place particulière dans l'architecture européenne de sécurité.

Les investissements matériels et moraux, consentis au profit des trois futurs membres, donneront leurs pleins résultats, car les intérêts stratégiques de ces derniers feront peser la balance dans la direction que nous souhaitons, tant dans le domaine du nécessaire rééquilibrage des responsabilités euro-atlantiques que dans la mise en oeuvre d'une politique dynamique et stabilisatrice d'élargissement de la nouvelle Alliance".

Le général Jean-Philippe Roux a ensuite répondu aux questions des commissaires .

En réponse à MM. André Dulait et Maurice Lombard, le général Jean-Philippe Roux a estimé qu'à l'égard des partenaires potentiels que constituaient les trois nouveaux membres de l'OTAN, la France était desservie par deux facteurs négatifs : la réticence de ces pays à sélectionner des matériels français, elle-même issue de la disposition à privilégier les propositions commerciales des Etats-Unis ; l'existence d'un parc américain surabondant en matériels encore de bonne qualité, permettant des propositions de prime abord attractives, notamment dans le domaine aéronautique. La France se devait donc d'obtenir avant tout, à l'OTAN, comme chez les nouveaux partenaires, le respect des procédures d'appel d'offres. La France était en mesure de proposer des produits compétitifs dans des créneaux précis -radars et systèmes de communication par exemple.

Le général Jean-Philippe Roux n'a pas exclu qu'après une phase favorable aux matériels américains, les nouveaux pays membres de l'OTAN se tournent vers des alliés européens plus susceptibles d'offrir un partenariat équilibré, et notamment français.

Le général Jean-Philippe Roux a également précisé à M. André Dulait que la non-participation de la France à la structure intégrée ne fragiliserait pas notre position au sein de l'Alliance.

Le général Jean-Philippe Roux a également souligné qu'il était essentiel, que, dans la démarche engagée, la Russie ne se sente pas isolée, même si son potentiel militaire nucléaire et conventionnel demeurait impressionnant. En outre, il convenait de garder en mémoire l'immense sentiment de frustration ressenti, en 1989, par les militaires russes, contraints dans des conditions matérielles difficiles de quitter les pays de l'ex-pacte de Varsovie, et qui pouvait se traduire ici et là par le développement d'un sentiment de revanche.

En réponse à M. Xavier de Villepin, président, sur le risque d'étendre la garantie de l'article 5 du traité de Washington, le général Jean-Philippe Roux a rappelé que cet article prévoyait uniquement "qu'une attaque contre un pays membre sera considérée comme une attaque contre toutes les parties" mais que chaque Etat restait maître des actions qu'il jugerait nécessaires, "y compris l'emploi de la force armée".

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