2. A moyen terme

a) Améliorer les conditions matérielles de détention
(1) Prolonger les activités jusqu'à 20 heures

Il apparaît nécessaire de prolonger les activités proposées aux détenus jusqu'à 20 heures. Cette nouvelle organisation de la journée des détenus devrait être utilisée afin de permettre à ceux qui travaillent de suivre parallèlement des enseignements ou de profiter des activités mises à leur disposition (bibliothèque, salle de musculation, sports collectifs, etc.).

(2) Mettre fin au système de location des téléviseurs

La commission souhaite que les détenus puissent bénéficier gratuitement de la télévision et que les téléviseurs soient achetés par l'administration pénitentiaire.

(3) Réformer le système des cantines

Elle estime également nécessaire d'harmoniser et de réduire les tarifs des cantines. Les dépenses qui incombent à l'administration pénitentiaire ne doivent pas être répercutées indirectement sur les détenus. L'opacité du système actuel conduit les détenus à se croire floués par l'administration.

Il est indispensable de définir exactement ce que la marge d'exploitation est censée financer. La commission d'enquête prône une interprétation stricte, selon laquelle seule la réalisation des bons doit être mise à la charge des détenus. Les autres frais (stockage des produits, chariots de distribution, frais de transport, etc.) relèvent d'une politique d'amélioration des conditions de détention des détenus et doivent être pris en charge par l'administration pénitentiaire.

(4) Améliorer l'accueil des familles

Enfin, un effort particulier doit être entrepris pour maintenir les liens familiaux.

D'abord, l'accueil des familles doit être amélioré. Les familles sont aujourd'hui culpabilisées lorsqu'elles rendent visite à leurs proches. Certes, le " trafic " au parloir existe, mais dignité et fermeté doivent être conciliées pour éviter de stigmatiser les familles et, d'une manière plus générale, l'ensemble des visiteurs.

Il convient d'introduire des améliorations élémentaires dans les établissements, en aménageant une salle d'attente avec des chaises en nombre suffisant et un coin enfants, des toilettes propres à la disposition des visiteurs, des parloirs suffisamment grands et clairs pour accueillir toute une famille. Par ailleurs, pour éviter le surencombrement des parloirs, il serait nécessaire d'élargir les plages horaires réservées aux visites .

L'accueil des familles venant de loin doit également pris en compte. La commission d'enquête a pu constater que les associations palliaient souvent les carences de l'administration pénitentiaire dans ce domaine. Ainsi, les maisons d'accueil des familles sont souvent créées et gérées par des associations. Leur action doit être encouragée et non entravée. Ainsi, la commission d'enquête souhaite qu'aboutisse enfin le projet de création d'un centre d'accueil des familles en face de la prison des Baumettes, un local parfaitement utilisable existant d'ores et déjà.

Enfin, il est indispensable de permettre aux familles de rejoindre les prisons par les transports en commun. A cet égard, la commission d'enquête rappelle que sur les six établissements prévus dans le programme 4 000, un seul site est desservi par les transports en commun. Le ministère de la justice devra donc s'assurer que les infrastructures nécessaires existent ou seront construites pour faciliter l'accès desdits établissements aux familles sans voiture.

(5) Instituer un minimum carcéral pour les indigents

La question du maintien en prison des minima sociaux est aujourd'hui posée. Les associations caritatives sont divisées à ce sujet.

Plusieurs raisons peuvent conduire à écarter l'hypothèse d'un maintien du RMI pour les détenus :

- le RMI est une allocation différentielle, et s'apprécie, compte tenu de l'ensemble des ressources " déclarées " d'un foyer fiscal. Or, la population carcérale bénéficie souvent de revenus non déclarés ;

- le maintien des minima sociaux à des personnes logées et nourries aurait pour conséquence d'accorder davantage de " droits " à une personne incarcérée qu'à une personne libre.

Le RMI carcéral ne pourrait être que " différentiel ", c'est-à-dire calculé en tenant compte de " l'avantage " que constitue la gratuité du logement et de la nourriture.

L'idée d'un minimum carcéral, réservé aux stricts indigents, " repérés " dès leur entrée en détention, semble en définitive plus opportune. Ce minimum carcéral, évalué entre 300 et 400 francs par mois, leur permettrait de cantiner et contribuerait à éviter -dans la mesure du possible- la délinquance intracarcérale (rackets, prostitutions, trafics).

En revanche, tous les efforts doivent être faits pour que le détenu isolé puisse percevoir le RMI dès sa sortie de prison.

b) Faciliter l'accès au droit par des permanences d'avocats

La commission d'enquête a constaté que la plupart des détenus ne connaissaient pas leurs droits et restaient désemparés à l'égard de certaines mesures prises par l'administration pénitentiaire et jugées comme arbitraires. La généralisation de permanences d'avocats leur offrirait un interlocuteur compétent. Ces permanences pourraient leur permettre notamment d'accéder, plus facilement, à l'aide juridictionnelle.

c) Faire respecter la discipline quotidienne

En ce qui concerne les devoirs des détenus, la commission d'enquête a constaté que la discipline était plus ou moins bien respectée selon les établissements. Ainsi, pour éviter les tensions, certains établissements renoncent à obliger les détenus à se lever le matin, à changer leurs draps, à nettoyer leur cellule, et à sanctionner le jet de détritus à l'extérieur.

Or, cette attitude laxiste est dommageable à deux points de vue. D'une part, elle ne favorise pas l'insertion du détenu qui continue ainsi d'ignorer les règles élémentaires de la vie en commun. D'autre part, elle crée un rapport de forces favorable aux détenus qui risque de peser à moyen terme sur le calme et la sécurité de l'établissement. En effet, toute reprise en main se heurte à la résistance des détenus qui accepteront difficilement la remise en cause de leur " pouvoir ", tandis que la poursuite du laxisme risque d'affaiblir le dispositif de sécurité de la prison.

La commission d'enquête prône donc une gestion à la fois stricte et humaine des prisons, qui permette de concilier le respect de la discipline et de la dignité des détenus.

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