III. « L'AFFAIRE DE LA CAGNOTTE » SERAIT AINSI INENVISAGEABLE AUX ÉTATS-UNIS

A. LES ÉTATS-UNIS ONT ÉGALEMENT CONNU DES SURPRISES BUDGÉTAIRES

A la fin des années 1990, les recettes fiscales se sont révélées plusieurs années de suite beaucoup plus importantes qu'initialement escompté.

Ces heureuses surprises résultent en premier lieu de ce que la croissance du PIB fut pendant plusieurs années consécutives plus rapide que les prévisions de la quasi-totalité des instituts de conjoncture privés, et surtout beaucoup plus rapide que les prévisions relativement prudentes de l'administration présidentielle et du bureau du budget du Congrès (CBO).

En outre, comme en France, la croissance fut exceptionnellement « riche  en recettes fiscales », c'est à dire que les recettes fiscales se sont spontanément accrues proportionnellement plus vite que le PIB.

Les experts américains consultés expliquent ce phénomène par la déformation de la structure des revenus au profit des ménages les plus aisés, en raison notamment du dynamisme des revenus du patrimoine.

Les recettes des impôts sur les plus values ont ainsi fortement progressé en lien avec la forte hausse des cours boursiers.

Ces évolutions ont été mal anticipées , car le système statistique fédéral demeure trop centré sur l'ancienne économie, notamment sur la mesure des revenus des ouvriers de l'industrie, et appréhende mal les plus values et les stock options .

Au total, les États-Unis ont donc connu des « surprises » budgétaires d'une ampleur sans équivalent : les finances publiques, qui connaissaient un déficit supérieur à 3 % du PIB en 1995, ont d'ailleurs retrouvé l'équilibre dès 1998, puis ont connu des excédents proches de 2 % du PIB en 1999 et en l'an 2000.

On peut d'ailleurs noter que les États-Unis disposent bien une « cagnotte fiscale », c'est à dire des excédents budgétaires, alors que le surcroît de recettes fiscales en France en 1999 et en l'an 2000 a seulement permis une modeste réduction du déficit budgétaire.

B. CEPENDANT, CES SURPRISES BUDGÉTAIRES ONT ÉTÉ PARTAGÉES PAR TOUS AU MÊME MOMENT

Cependant, ces surprises budgétaires ont été connues presque au même moment par le gouvernement, par le Congrès et par les observateurs indépendants.

En effet, le Trésor publie trois états détaillées de la situation des finances publiques : un état quotidien, un état mensuel et un état trimestriel.

L'état quotidien est difficile à interpréter. Cependant, la situation mensuelle du Trésor est très détaillée et donne une vision relativement claire de la situation des finances publiques américaines en cours d'année.

Par ailleurs, les règles de la comptabilité publique limitent aux États-Unis les opérations de fin de gestion, de sorte que l'on peut assez bien déduire le solde budgétaire final à partir des données mensuelles.

Au total, le gouvernement fédéral ne pouvait aucunement dissimuler la situation favorable des finances publiques, si tant est qu'il en avait eu l'envie : les surcroîts de recettes par rapport aux prévisions étaient publics quelques jours après que l'administration fiscale les eut constatés.

Concrètement, les surprises budgétaires ont été pour l'essentiel découvert par l'administration en avril, au moment où les contribuables individuels adressent simultanément la fois leur déclaration de revenus et le chèque correspondant à l'écart entre l'impôt dû et le montant prélevé à la source. Quelques jours après, ces surprises transparaissaient lors de la publication de la situation mensuelle du Trésor.

Le débat relatif au surcroît de recettes a donc pu s'engager d'emblée aux États-Unis sur les questions de fond, c'est à dire sur l'orientation optimale de la politique budgétaire dans une perspective de moyen-long terme.

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