2. Sans valeur juridique réelle, l'exclusion du fonds des régimes publics a pour objet de les inciter à se réformer

a) Le débat entre ministères

L'ouverture du fonds aux régimes publics est l'un des sujets les plus âpres du dialogue entre le ministère de l'Economie, des Finances et le ministère de l'Emploi et de la Solidarité.

Une note de la Direction de la Prévision en date du 21 janvier 2000 résume l'état de ce débat :

« Le champ du fonds peut rester circonscrit au périmètre législatif actuel (régime général et alignés) ou s'étendre à tous les régimes de base. Le cabinet du ministre de l'Emploi et de la Solidarité sera sans doute favorable à la première option, en arguant du fait qu'il est prévu de verser l'excédent de la CNAV au fonds et que les partenaires sociaux s'inquiéteraient que cette ressource puisse profiter à tous les régimes. »

Et la note de poursuivre : « Mais le fait qu'on alimente le fonds par des ressources « universelles » (prélèvement sur les revenus du capital, ressources du FSV, caisses d'épargne, voire excédents potentiels des branches maladie ou famille) plaide plutôt pour la seconde solution ».

Pour le ministère de l'Economie et des Finances, la nature des ressources du fonds de réserve, étant universelle, entraîne l'ouverture du bénéfice de ce fonds à tous les régimes de base : l'équité et la constitutionnalité juridique du fonds sont à ce prix.

La question soulevée est sérieuse : est-il juridiquement possible et même simplement logique d'exclure d'un fonds financé largement par l'impôt une part importante des Français ? La réponse est négative.

b) Un principe consensuel mais dénué de véritable portée juridique : le fonds doit être réservé aux régimes s'étant réformés

Selon le groupe de travail interministériel présidé par M. Olivier Davanne, le 2 février 2000 « un principe général est que le bénéfice du fonds semble devoir être réservé aux régimes s'étant réformés ».

En outre, selon le compte rendu des débats de ce même groupe 62 ( * ) , « la Direction de la Sécurité sociale indique que si les régimes publics devaient devenir bénéficiaires du fonds avec un certain décalage temporel, il serait nécessaire que les sommes précédemment encaissées par le fonds restent cantonnées au bénéfice du régime général et des régimes alignés ».

Une telle proposition aboutit à introduire un « coût » au temps passé. En effet, plus ces régimes tardent à se réformer, moins la partie du fonds de réserve dont ils pourront être bénéficiaires sera importante.

Il ne semble pas que cette condition n'ait jamais fait l'objet d'un débat avec les partenaires sociaux représentant ces régimes.

Toutefois, au regard des arguments avancés par le ministère de l'Economie et des Finances, à savoir l'inéquité et surtout l'inconstitutionnalité à réserver un fonds abondé par des ressources universelles à quelques régimes, ces restrictions « pédagogiques » ou « incitatives » à la réforme des régimes publics ne sauraient présenter de portée crédible.

En revanche, une question essentielle est laissée de côté par le Premier ministre : si les régimes publics ne peuvent être écartés du fonds, quelles ressources viendront compléter celui-ci afin qu'il demeure en mesure de jouer le rôle de «lissage » que le Gouvernement prétend lui assigner ?

* 62 Groupe interministériel présidé par M. Olivier Davanne.

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