XV. QUELLE DESSERTE DES GRANDS SITES PORTUAIRES ?

Avec ses trois façades maritimes, la France est remarquablement placée pour jouer un rôle de premier plan vis-à-vis des échanges de l'Europe avec le reste du monde.

Néanmoins le rapport du groupe de travail « Desserte des ports maritimes » du Conseil National des Transports 87 ( * ) (CNT) constate que « malgré ces conditions naturelles favorables, le système portuaire français n'a pas gagné les parts de marché que celles-ci devraient lui permettre d'attendre de sa compétitivité, bien qu'il ait fait, sur le long terme et globalement, jeu égal avec ses principaux concurrents. Sa situation s'est nettement détériorée sur certains trafics et sur certaines parties du territoire. Aussi, le repositionnement de nos ports au sein du Grand Marché Européen constitue-t-il un enjeu national en matière d'activité économique et d'emplois » . Il précise par la suite que « le système portuaire français est confronté à la concurrence des ports européens qui sont mieux placés sur les axes de pénétration terrestre, d'où l'ampleur des trafics français captés par les ports étrangers concurrents. Les flux de marchandises échangées par la France avec les pays tiers et acheminées par l'intermédiaire des autres pays de l'Union Européenne, entraînent un manque à gagner considérable pour les ports français et pour l'économie nationale ».

La qualité de la desserte terrestre joue à cet égard un rôle essentiel dans la mesure où les pré et post-acheminements terrestres comptent pour près du tiers, voire de la moitié du coût global dans les acheminements maritimes intercontinentaux. A cet égard, Anvers et Rotterdam sont considérablement avantagés par rapport aux ports français 88 ( * ) du fait de la qualité de leurs dessertes fluviales et ferroviaires. Le tableau ci-après est éloquent.

Nombre de rotations hebdomadaires de trains fret existant de ou vers les ports de la rangée nord-européenne

Année

Anvers

Hambourg

Le Havre

Rotterdam

1996

236

268

15

280

1997

275

274

18

307

1998

280

274

18

318

Source : Port autonome du Havre, d'après le rapport CNT précité.

Pour développer l'hinterland des principaux ports français, le mode ferroviaire, et éventuellement le cabotage maritime et le mode fluvial, sont à privilégier sans conteste d'autant que les trafics maritimes présentent le grand avantage de fournir des trafics déjà massifiés. Or, le rapport du CNT souligne « qu'il paraît choquant de constater que la part de marché du mode ferroviaire sur les acheminements terrestres des trafics des ports français est comparable à la part de marché du mode ferroviaire sur la globalité des trafics fret. Il y a donc un potentiel largement sous-exploité, essentiellement en raison du faible niveau de service ferroviaire » .

Il y a donc là un effort considérable à engager qui est d'ailleurs indiqué au niveau du deuxième enjeu stratégique majeur « l'organisation multimodale du transport de fret à l'échelle nationale et européenne ».

Quelles améliorations des dessertes ferroviaires en résultera-t-il en 2020 pour les dessertes des grands sites portuaires français ?

Le document SMSCT ne donne d'élément de réponse ni en terme de qualité de service (par exemple isochrones ferroviaires, 2000 et 2020, à partir des principaux ports français et étrangers proches), ni en terme de priorité du fret ferroviaire vis-à-vis des circulations voyageurs 89 ( * ) .

En revanche, ce document apporte deux séries d'informations :

1. Le chapitre 23 mentionne les renforcements de capacité des dessertes terrestres des ports :

§ Pour le Havre : ligne Paris -Rouen, grande ceinture d'Ile de France, ligne Le Havre - Rouen - Amiens - Reims - Dijon, ligne Rouen - Le Mans - Tours - Lyon.

§ Pour Dunkerque : ligne Dunkerque - Calais - Reims - Dijon et l'artère ferroviaire nord-est (Dunkerque - Thionville).

§ Pour Marseille - Fos : aucune indication.

§ Pour Nantes - Saint Nazaire : ligne Nantes - Lyon.

2. La carte n°22 (Affectation des 100 GTK sur le réseau actuel) indique les augmentations de circulations de trains de fret par rapport à 1997 (50 GTK) et identifie les zones de congestion. Cette carte, fort intéressante, montre des progressions tout à fait importantes des circulations journalières à partir des grands ports (Le Havre : + 56 ; Dunkerque et Nantes : + 30 ; Marseille - Fos : + 92). Pour le Havre et Dunkerque, les zones de congestion (Ile de France et région lilloise) semblent pouvoir être contournées grâce aux itinéraires alternatifs. Pour Nantes - Saint Nazaire, aucune difficulté majeure semble se présenter. Pour Marseille - Fos, les zones de congestion de Nîmes - Narbonne et de la région lyonnaise risquent de poser de grandes difficultés aux acheminements terrestres ferroviaires du grand port méditerranéen.

En conclusion, en l'absence d'une synthèse claire produite dans le rapport SMSCT et sans avoir d'information sur les qualités de service ferroviaires projetées en 2020, il semblerait que les dessertes ferroviaires des principaux ports maritimes français pourraient bénéficier d'améliorations significatives, sauf dans le cas du port de Marseille - Fos.

* 87 Rapport réalisé en 1999 et présidé par Monsieur Jean CHABRERIE

* 88 D'après l'annexe 3 du rapport SMSCT, les acheminements terrestres des ports français sont d'une trentaine de GTK par la route et seulement d'une douzaine de GTK par le fer (soit quand même près d'un quart du total du fret ferroviaire français) et moins d'un GTK pour le fluvial et le fluvio-maritime.

* 89 Cet arbitrage, délicat en général, le sera tout particulièrement pour les principales lignes ferroviaires qui desserviront les ports du Havre, de Dunkerque, de Marseille et de Nantes.

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