B. FAVORISER LA MÉDIATION ET LE RÈGLEMENT EN AMONT DES QUESTIONS LIÉES AUX ENFANTS

1. Favoriser la pratique des conventions homologuées

Les conventions homologuées sont prévues aux articles 230 et 232 du code civil qui les rend obligatoires dans les cas de divorce sur demande conjointe des époux : « Lorsque les époux demandent ensemble le divorce, ils n'ont pas à en faire connaître la cause ; ils doivent seulement soumettre à l'approbation du juge un projet de convention qui en règle les conséquences. La demande peut être présentée, soit par les avocats respectifs des parties, soit par un avocat choisi d'un commun accord » ; « Le juge prononce le divorce s'il a acquis la conviction que la volonté de chacun des époux est réelle et que chacun d'eux a donné librement son accord. Il homologue, par la même décision, la convention réglant les conséquences du divorce . Il peut refuser l'homologation et ne pas prononcer le divorce s'il constate que la convention préserve insuffisamment les intérêts des enfants ou de l'un des époux. »

Les conventions homologuées sont une contractualisation des rapports entre les divorcés, soumise à la validation du juge.

La proposition de loi introduit un article 372-3 qui ouvre la possibilité d'une homologation, par le juge aux affaires familiales, à la demande des parents, de la convention qu'ils ont formée sur les « modalités d'exercice de l'autorité parentale » et la  contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant.

Cette formulation est effectivement plus incitative que les « observations », actuellement prévues à l'article 287 du code civil, que les parents peuvent présenter sur les modalités de l'exercice de l'autorité parentale.

A la suite des propositions du rapport Théry, il serait souhaitable de prévoir plus de souplesse dans la révision des conventions, actuellement subordonnée à l'existence de « motifs graves » (article 292 du code civil).

2. Le développement de la médiation

La mise en oeuvre des dispositions de la proposition de loi reste suspendue à un minimum de dialogue entre les parents et à une volonté de trouver ensemble des solutions pour leurs enfants.

C'est assez naturellement que s'insèrent dans le texte des dispositions relatives à la médiation familiale.

La proposition de loi procède à l'inscription dans le code civil de la médiation familiale, entrée dans le code de procédure civile en 1995 et organisée par un décret du 22 juillet 1996.

Définie par le « rapport Sassier 5 ( * ) » comme la « formalisation des volontés des parties en conflit en dehors de l'espace judiciaire traditionnel », la médiation, qualifiée de « compétence » et non de profession, suppose l'intervention d'un tiers, neutre et indépendant, dépourvu de tout pouvoir de décision.

La médiation ne dessaisit pas le juge, elle se déroule en marge de la procédure.

Comme le souligne Monique Sassier, l'entrée en médiation résulte du libre choix des parties pour un mode alternatif de règlement de leur différend.

De ce point de vue, l'efficacité de la médiation est d'autant plus forte qu'elle se situe dans un cadre extra-judiciaire et qu'elle intervient alors que le conflit n'est pas exacerbé. A cet égard, la médiation prévue dans la proposition de loi intervient un peu tard, alors que le conflit est déjà noué et cristallisé.

Il conviendrait certainement de rechercher les moyens du développement de la médiation au plus près de la décision des couples de se séparer. Les différents acteurs du droit de la famille rencontrés par votre rapporteur sont unanimes sur ce point, en particulier sur le rôle d'information et d'orientation des caisses d'allocations familiales.

L'accord élaboré au cours de la médiation doit être validé par le juge pour s'imposer aux parties.

Selon les modalités prévues par la proposition de loi, à défaut d'accord sur les conséquences de la séparation pour les enfants, le juge peut proposer une mesure de médiation et même enjoindre aux parents de rencontrer un médiateur qui les informera sur le déroulement d'une démarche de médiation. Dans les cas de conflits très durs, cette injonction peut être le déclencheur d'un règlement ; elle peut aussi n'être vécue que comme une étape supplémentaire de la procédure. Elle ne porte que sur la rencontre d'un médiateur, la démarche de médiation restant subordonnée à la volonté des parents.

Quant à l'encadrement juridique de la médiation, le rapport Sassier conclut à l'absence de nécessité d'une loi spécifique, au profit de l'insertion de dispositions relatives à la médiation dans d'autres textes.

La médiation en matière civile est actuellement régie par le nouveau code de procédure civile qui précise, notamment dans son article 131-5, les conditions que doit remplir le médiateur pour recevoir l'agrément du juge.

Le recours à la médiation paraît effectivement très adapté à la matière familiale, où le combat judiciaire qui doit désigner un vainqueur et un vaincu est particulièrement inopportun. Dans la mesure où elle se généralise, ce dont la proposition de loi relative au divorce apporte un nouveau témoignage, l'organisation de l'exercice de la médiation familiale, aujourd'hui régie par un code de déontologie, apparaît nécessaire. C'est la mission qui revient au Conseil national consultatif de la médiation familiale, créé par un arrêté du 8 octobre 2001 et chargé de « proposer toutes mesures utiles pour favoriser l'organisation de la médiation familiale et promouvoir son développement », notamment sur les procédures d'agrément et l'évaluation des médiateurs mais aussi sur les questions de financement 6 ( * ) .

Votre rapporteur y reviendra plus loin mais elle considère que les problèmes posés par le développement de la médiation et plus largement les modalités de l'après divorce trouvent en grande partie leur source dans une question d'accès au droit en termes d'information et de moyens.

3. Le primat de l'intérêt de l'enfant

Placé d'emblée au coeur du texte, l'intérêt de l'enfant reste au coeur du jugement, cet objectif étant réaffirmé tout au long du texte comme fil directeur de la réforme.

La question du contenu juridique de cette notion « d'intérêt de l'enfant » est évidemment reposée à chaque jugement, le juge ayant à apprécier autant d'histoires personnelles que de couples qui se séparent.

La proposition de loi reprend dans les dispositions relatives à l'autorité parentale la mission de « sauvegarde des intérêts des enfants mineurs », dévolue aux juge aux affaires familiales ; elle subordonne l'homologation d'un accord parental à la préservation suffisante de l'intérêt de l'enfant.

C'est ainsi que la validation d'une convention parentale prévoyant la résidence alternée de l'enfant ne pourra être opérée que si le juge estime suffisante la préservation de l'intérêt de l'enfant.

Le texte adopté par l'Assemblée nationale tente de définir les contours de l'intérêt de l'enfant dans l'énumération des éléments que le juge prend en considération pour statuer : il ajoute une référence à « l'aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l'autre », à l'âge de l'enfant et à l'avis d'un pédopsychiatre.

L'aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et à respecter les droits de l'autre évoque un jugement de Salomon auquel le juge pourrait également ajouter la capacité à respecter un premier jugement : trop souvent les magistrats aux affaires familiales sont saisis pour entériner des situations de fait en totale contradiction avec un premier jugement sur la désignation de la résidence habituelle.

* 5 Arguments et propositions pour un statut de la médiation familiale en France, rapport remis à Mme la Ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées, Paris, juillet 2001.

* 6 Installé le 6 novembre, ce conseil est présidé par Mme Sassier.

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