C. DES DONNÉES À ANALYSER AVEC PRÉCAUTION

1. Des données à corriger pour permettre des comparaisons pertinentes

Compte tenu du nombre relativement limité d'investissements agréés, chaque année, moins de 500 ces dernières années, l'agrément d'un projet de grande ampleur au titre de l'un ou l'autre dispositif peut conduire à modifier fortement d'une année sur l'autre leurs parts respectives dans le total des investissements agréés. Par exemple, en 2001, l'augmentation de 79 % du montant des investissements agréés et l'accroissement de la part des investissements défiscalisés au titre de l'impôt sur les sociétés s'explique essentiellement par la défiscalisation de deux « gros » investissements en Nouvelle Calédonie, une usine de nickel et l'achat d'avions.

Afin de permettre des comparaisons pertinentes sur l'évolution des agréments d'une année sur l'autre, le rapport au Parlement établi chaque année par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie présente, outre les données exhaustives, des données « corrigées ». Ces corrections portent sur :

- les agréments se rapportant à la procédure de contrôle de l'imputation sur le revenu imposable des déficits provenant de l'exploitation d'activités relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. Cette procédure a été supprimée à compter du 15 septembre 1997 ;

- les accords préalables et agréments délivrés dans le secteur du logement à des particuliers et non des entreprises dans le cadre de l'article 199 undecies du code général des impôts (aujourd'hui 199 undecies A). Les agréments accordés à des entreprises investissant dans le secteur du logement continuent d'être pris en compte ;

- les « projets exceptionnels » dont « la prise en compte pourrait altérer la pertinence des comparaisons à réaliser ».

Comparaison entre les données brutes et les données corrigées figurant dans les rapports annuels au Parlement

(les montants sont en millions d'euros)

1997

1998

1999

2000

2001

Dossiers agréés (brut)

834

331

478

434

479

Dossiers agréés (corrigé)

396

328

478

434

479

Ecart

-52,5%

-0,9%

0,0%

0,0%

0,0%

Montants agréés (brut)

1 396

464

628

685

1 232

Montants agréés (corrigé)

659

416

567

517

630

Ecart

-52,8%

-10,3%

-9,7%

-24,5%

-48,9%

Avant 1998, des écarts importants étaient systématiquement constatés tant pour le nombre d'agréments accordés que pour le montant des investissements agréés. Depuis 1999, les écarts sont plus réduits et ne portent plus que sur le montant des investissements agréés :

- les écarts constatés avant 1998 s'expliquent vraisemblablement par la correction des effets de la « double défiscalisation ». Pour un même projet, deux agréments étaient accordés, l'un pour l'obtention du bénéfice de l'avantage fiscal proprement dit et l'autre pour l'autorisation d'imputer sur le revenu global de la possibilité d'imputer les déficits résultant de l'exercice à titre « non professionnel » d'activités relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. Les agréments obtenus dans ce deuxième cas étaient déduits du total des agréments accordés, et le montant de l'avantage fiscal résultant de l'imputation des déficits était déduit du montant des investissements agréés ;

- depuis 1999, les projets dont le montant est déduit du montant total des investissements restent pris en compte dans les données corrigées pour le décompte du nombre d'agrément accordés. Cette incohérence mériterait d'être corrigée.

Les secteurs d'activité qui donnent lieu aux écarts les plus fréquents sont le logement, pour lequel un écart a été constaté chaque année depuis 1997 (mais ces écarts sont inévitables compte tenu du parti pris d'exclure systématiquement les agréments accordés à des particuliers), l'industrie (trois écarts entre 1997 et 2001), la pêche (deux écarts), les transports, l'agriculture et la bâtiment (un écart).

Des écarts ont été constatés dans toutes les collectivités d'outre-mer en 1996 et 1997, en Nouvelle Calédonie, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte en 1998, en Guyane, Martinique et à la Réunion en 1999, à la Martinique et à la Réunion en 2000 et, en 2001, à la Martinique (6 millions d'euros), à la Réunion (5 millions d'euros), en Nouvelle Calédonie (580 millions d'euros) et à Saint-Pierre-et-Miquelon (14 millions d'euros).

2. La fragilité des données relatives aux créations d'emplois

L'article 217 undecies du code général des impôts dispose qu'un investissement ne peut être agréé que si « l'un de ses buts principaux est le maintien ou la création d'emplois » et que « la demande doit être accompagnée de données chiffrées en matière d'emploi » , sans préciser si ces données doivent distinguer les créations ou le maintien d'emplois ou encore le caractère direct ou indirect des emplois.

Depuis 1996, le rapport au Parlement établi par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie retrace les engagements en matière de création d'emplois souscrits par les bénéficiaires des agréments :

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Nombre d'emplois directs dont la création est prévue

1.848

2.848

1.382

1.431

1.051

2.516

Coût budgétaire lié aux projets agréés (en millions d'euros)

366

613

210

277

279

530

Coût budgétaire/emplois créés (en millions d'euros)

0,20

0,22

0,15

0,19

0,27

0,21

Le rapport entre les engagements des bénéficiaires de l'agrément en matière de création d'emploi et le « coût budgétaire » des projets agréés fait apparaître un coût par emploi créé de la défiscalisation qui oscille entre 150.000 euros et 270.000 euros selon les années.

Ce résultat peut être, par exemple, mis en relation avec le coût pour l'Etat d'autres emplois aidés tels, par exemple, que les emplois-jeunes dont le coût annuel pour l'Etat s'élève en 2002 à 15.924 euros, lorsque l'employeur est une association ou une collectivité locale.

Il doit surtout être analysé avec précaution, à la lumière des travaux de l'inspection générale des finances 44 ( * ) qui relève :

- qu'il est délicat d'identifier le rôle de la défiscalisation dans les créations d'emplois, les entreprises bénéficiant simultanément de plusieurs dispositifs d'aide ;

- que si la défiscalisation « ne crée qu'un nombre limité d'emplois directs [elle a] également des effets indirects, difficilement mesurables, sur l'emploi » ;

- qu'il est délicat de s'assurer du respect par les entreprises de leurs engagements en matière de création d'emploi compte tenu des libertés prises avec les obligations déclaratives en matière fiscale et sociale.

Une note de l'inspection générale des finances portée à la connaissance de votre rapporteur indique par ailleurs que la comptabilisation des engagements souscrits dans les dossiers agréés, qui figurent dans le rapport au Parlement, peut comporter des erreurs, certains maintiens d'emplois étant considérés comme des créations, et certaines créations étant comptées deux fois.

* 44 Rapport d'enquête n° 2001-M-020-01 sur les créations d'emplois obtenues grâce au dispositif d'aide à l'investissement dans les départements et territoires d'outre-mer, septembre 2001.

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