II. LE DISPOSITIF LÉGISLATIF ET RÉGLEMENTAIRE

Le cadre législatif qui s'applique aujourd'hui la défiscalisation outre-mer est issu des dispositions de l'article 19 de la loi de finances pour 2001 (n° 2000-1352 du 30 décembre 2000). Il est régi par quatre articles du code général des impôts : l'article 199 undecies A, l'article 199 undecies B, l'article 217 undecies et l'article 217 duodecies .

Cet ensemble est parfois désigné sous le nom de « loi Paul », en référence au secrétaire d'Etat à l'outre-mer d'alors, M. Christian Paul.

La défiscalisation est autorisée dans trois cas :

- la participation au financement d'investissements exploités par des entreprises exerçant leur activité outre-mer ;

- la construction ou l'acquisition de logements neufs outre-mer ;

- la souscription au capital de certaines sociétés exerçant leur activité outre-mer.

Seul le premier cas constitue à proprement parler l'aide fiscale à l'investissement des entreprises outre-mer, à laquelle est principalement consacré le présent rapport.

A. L'AIDE FISCALE À L'INVESTISSEMENT DES ENTREPRISES OUTRE-MER

1. Une déduction du bénéfice imposable pour les contribuables de l'impôt sur les sociétés qui investissement dans certains secteurs d'activité

De tous les articles du code général des impôts qui traitent de l'aide fiscale à l'investissement outre-mer, l'article 217 undecies du code général des impôts est le plus long, car le plus complet, les autres renvoyant souvent aux dispositions de cet article.

Les dispositions de l'article 217 undecies sont relatives aux investissements dans les départements d'outre-mer. L'article 217 duodecies étend leur champ d'application aux territoires d'outre-mer, à la Nouvelle Calédonie, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Le I de l'article 217 undecies permet aux entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés qui investissent outre-mer de déduire de leur résultat imposable le montant de certains investissements qu'elles réalisent . L'investissement peut être réalisé :

- soit directement par l'entreprise qui va exploiter l'investissement ;

- soit de manière « externalisée », par une société en nom collectif (SNC), ou une société en commandite simple (SCS), dont le régime d'imposition est prévu à l'article 8 du code général des impôts, soit par un groupement d'intérêt économique (GIE), dont le régime d'imposition est prévu à l'article 239 quater du code général des impôts, soit par un groupement européen d'intérêt économique (GEIE), dont le régime d'imposition est prévu à l'article 239 quater C du code général des impôts.

Lorsque l'investissement est réalisé par l'intermédiaire d'une structure transparente, une SNC par exemple, la mise en relation de l'entreprise qui a besoin de réaliser l'investissement et des investisseurs regroupés dans la structure est généralement réalisée par un intermédiaire financier, un « monteur ».

La déduction est réservée aux investissements réalisés dans certains secteurs d'activité, dits « secteurs éligibles » : l'industrie ; la pêche ; l'hôtellerie ; le tourisme (à l'exclusion de la navigation de croisière) ; les énergies nouvelles ; les services informatiques ; l'agriculture ; le bâtiment et les travaux publics ; les transports ; l'artisanat ; les investissements nécessaires à l'exploitation d'une concession de service public local à caractère industriel et commercial ; la production et la diffusion audiovisuelle ; la maintenance dans l'ensemble des secteurs précité.

La déduction n'est pas cumulable avec l'abattement d'un tiers de l'assiette de l'impôt sur les sociétés prévue à l'article 217 bis du code général des impôts et avec la franchise d'impôt sur les sociétés prévue à l'article 28 quater du même code.

L'assiette de la déduction du bénéfice imposable est le montant des investissements réalisés dans l'un de ces secteurs, diminué le cas échéant de celui des subventions publiques reçues. Le montant de travaux de rénovation d'hôtel, d'une part, et le coût des logiciels nécessaires à l'utilisation des investissements réalisés dans les secteurs éligibles, d'autre part, peuvent également être déduits du bénéfice imposable.

Les entreprises qui bénéficient de la déduction doivent utiliser l'investissement dans sa vocation initiale pendant une durée d'au moins cinq ans (ou pendant toute sa durée normale d'utilisation si elle est inférieure). Si l'investissement est cédé, ou détourné de son objet, au cours de cette période, ou si l'entreprise cesse son activité, la totalité de l'avantage fiscal accordé est repris et les sommes déduites sont rapportées au résultat imposable de l'année au cours de laquelle l'investissement cesse d'être affecté à son objet initial. Cependant :

- l'avantage n'est pas repris si l'investissement est transmis dans le cadre des dispositions des articles 210 A et 210 B du code général des impôts (fusion ou apport partiel d'actif), dès lors que le bénéficiaire de la transmission s'engage à le maintenir dans sa vocation initiale pendant le reste de la période de cinq ans.

- en pratique, malgré l'absence de disposition législative, les possibilités de transmission d'un bien pendant la période de cinq ans sont plus larges et l'agrément n'est pas repris lorsqu'un exploitant cesse son activité dès lors que le bien trouve un repreneur qui s'engage à le maintenir dans sa vocation initiale pendant la durée restant à courir ;

- la reprise est totale lorsque l'investissement est été réalisé selon la procédure de « plein droit ». En revanche, lorsque l'octroi de l'avantage fiscal a fait l'objet d'un agrément 6 ( * ) , l'article 1756 du code général des impôts autorise le ministre du budget à ne pas le reprendre en totalité.

Lorsque l'investissement est réalisé par une SNC, une SCS, un GIE ou un GEIE :

- les associés ou membres de ces structures doivent conserver leurs parts pendant cinq ans. Dans le cas contraire, leur avantage fiscal est repris dans les mêmes conditions ;

- l'investissement doit être mis à la disposition de l'entreprise locale « pour le compte » de laquelle il a été réalisé dans le cadre d'un contrat de location conclu pour cinq ans au moins (ou pour toute la durée normale d'utilisation de l'équipement si elle est inférieure), revêtant un caractère commercial et prévoyant que les trois quarts de l'avantage fiscal obtenu sont rétrocédés à l'entreprise locataire sous forme d'une diminution de loyer et, le cas échéant, du prix de cession du bien au terme des cinq années.

Si ces clauses du contrat de location ne sont pas respectées pendant l'ensemble de la durée de cinq ans, l'avantage fiscal est repris. L'investisseur doit en outre acquitter des intérêts de retard qui courent à compter de la date à laquelle il a bénéficié de l'avantage fiscal.

2. Une réduction d'impôt pour les contribuables de l'impôt sur le revenu qui investissement dans certains secteurs d'activité

L'article 199 undecies B du code général des impôts accorde aux entreprises redevables de l'impôt sur le revenu qui investissement outre-mer un avantage fiscal de même esprit que celui de l'article 217 undecies .

Il bénéficie également aussi bien aux entreprises qui réalisent elles-mêmes l'investissement qu'aux structures transparentes.

Les secteurs d'activité concernés sont les mêmes que dans le dispositif relatif à l'impôt sur les sociétés.

L'obligation de conserver l'investissement pendant cinq ans s'applique, dans les mêmes conditions que pour le dispositif relatif à l'impôt sur les sociétés. Cependant, la fraction de l'avantage fiscal devant être rétrocédée à l'opérateur local n'est pas des trois quarts mais de 60 % .

Le dispositif applicable aux redevables de l'impôt sur le revenu se distingue de celui de l'impôt sur les sociétés en ce qu'il :

- ne prévoit pas une déduction du revenu imposable, mais une réduction du montant de l'impôt dû 7 ( * ) ;

- plafonne le montant de la réduction d'impôt à 50 % du montant de l'investissement (hors subventions). Ce taux est porté à 60 % en Guyane, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis et Futuna ainsi que pour l'ensemble des travaux de rénovation d'hôtel réalisés outre-mer ;

- module l'avantage fiscal accordé selon que son bénéficiaire participe directement ou non à l'exploitation du bien ouvrant droit à la réduction d'impôt . Pour les contribuables « professionnels », qui participent à l'exploitation au sens de l'article 156 du code général des impôts 8 ( * ) , la réduction d'impôt est en réalité un crédit d'impôt : si le montant de l'avantage excède celui de l'impôt dû au titre d'une année, la différence est reportée sur l'exercice suivant, et peut l'être pendant cinq ans. Si, au terme de la cinquième année, l'avantage fiscal n'est pas épuisé, le solde est remboursé à l'investisseur par le Trésor public.

Pour les investisseurs « non professionnels » , qui ont des parts dans une SNC ou un GIE mais qui ne participent pas de manière personnelle, continue et directe à l'exploitation du bien, la réduction d'impôt ne peut être utilisée que pendant deux ans (elle n'est reportable qu'une seule fois et n'est pas remboursable) et, en tout état de cause, l'avantage accordé ne peut conduire à minorer de plus de 50 % l'impôt dû au titre d'un exercice .

* 6 Sur la procédure d'agrément, se reporter au III ci-dessous.

* 7 Ainsi, le montant de l'avantage fiscal est indépendant du taux d'imposition appliqué au revenu imposable.

* 8 La participation directe est « personnelle, continue et directe ».

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