b) Etendre la déliaison à d'autres impôts locaux ?

Selon M. LAURENT, la déliaison des taux pourrait également concerner d'autres impôts que la taxe professionnelle, comme la taxe foncière sur les propriétés non bâties et les droits de mutation.

c) Comment favoriser une plus grande responsabilité politique en matière de vote des taux ?
(1) Par une part élevée de la fiscalité propre ?

Selon plusieurs intervenants, la responsabilité politique en matière de vote des taux est d'autant plus forte que la part de la fiscalité propre dans les ressources est élevée.

Telle est la logique qui sous-tend la disposition de l'article 72-2 de la Constitution, selon lequel « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources ».

Ce point de vue est confirmé par MM. BLÖCHLIGER et BUR.

M. LAURENT considère que, si une plus grande responsabilité politique en matière de vote de taux est possible en ce qui concerne le niveau communal, et dans une moindre mesure le niveau intercommunal, tel n'est pas le cas des niveaux départemental et régional. En effet, selon lui le citoyen aurait du mal à percevoir le coût et la nature des actions menées à ces derniers niveaux, alors que l'action menée au niveau communal aurait un lien direct avec la vie quotidienne.

(2) Par un lien plus fort entre impôt voté et impôt effectivement prélevé sur les acteurs locaux ?

Comme le soulignent en particulier MM. HOORENS et GILBERT, le décalage important qui existe entre les impôts locaux votés par les collectivités et ceux effectivement prélevés sur les contribuables est important.

M. HOORENS rappelle quelques chiffres à cet égard.

Tout d'abord, une grande partie des recettes de la taxe professionnelle échappe aux collectivités territoriales qui en ont voté le taux. En l'an 2000, les entreprises ont payé environ 21 milliards d'euros de taxe professionnelle, dont seulement 17 milliards d'euros reviennent à la taxe professionnelle localisée, comme l'indique le schéma ci-après :

La répartition du produit de la taxe professionnelle payée par les entreprises

Etat (frais d'assiette et de recouvrement)

2 milliards d'euros

Taxe professionnelle payée par les entreprises

21 milliards d'euros

Chambres consulaires

1 milliard d'euros

Contributions à la péréquation

1 milliard d'euros

Prélèvements

7 milliards d'euros

Taxe professionnelle localisée

17 milliards d'euros

Compensations fiscales

6 milliards d'euros

Recettes perçues par les collectivités territoriales

16 milliards d'euros

Ensuite, compte tenu de l'importance des dégrèvements, le contribuable ressent non seulement l'impact des décisions fiscales prises par les élus locaux, mais aussi celui de celles de l'Etat, ce qui réduit considérablement l'effet de levier de la fiscalité locale.

(3) Par une spécialisation accrue de l'impôt ?

En ce qui concerne l'affectation d'un impôt par catégorie de collectivités, préconisée par le rapport de la « commission Mauroy 4 ( * ) », les intervenants ont affirmé la nécessité de prendre en considération un double phénomène.

(a) Une responsabilité politique accrue ?

D'un côté, la responsabilité politique serait accrue. Ainsi, MM. BUR, KLOPFER et GILBERT ont estimé que le principe d'une spécialisation de l'impôt permettrait d'accroître la responsabilité politique en matière de vote des taux.

Comme le rappelle M. LAURENT, cette spécialisation est actuellement engagée, puisque l'on a déjà supprimé la part régionale de la taxe d'habitation et que les groupements intercommunaux à fiscalité propre concernent les trois-quarts de la population française.

Dans sa contribution écrite, M. GILBERT envisage la spécialisation indiquée par le tableau ci-après :

Spécialisation des impôts locaux envisagée par M. GILBERT

Collectivité

Impôt

Communes

Taxe foncière rénovée

Intercommunalité

Taxe professionnelle sur la valeur ajoutée

Départements

Taxe d'habitation assise sur le revenu

Régions

Plusieurs scénarios (comme le partage d'un impôt d'Etat ou le partage avec les communautés d'une part de la taxe professionnelle sur la valeur ajoutée), la région n'ayant selon M. GILBERT pas besoin de pouvoir voter le taux compte tenu du caractère non récurrent de ses dépenses (qui la rend moins dépendante que les autres collectivités à la conjoncture).

Source : contribution écrite de M. GILBERT

(b) Une plus grande vulnérabilité aux retournements de conjoncture ?

En contrepartie, les collectivités territoriales seraient rendues plus vulnérables aux retournements de conjoncture, comme le souligne M. BUR.

Ainsi, M. LAURENT considère qu'il est « peu souhaitable de pousser à l'extrême » la spécialisation de l'impôt local, et que « deux impôts, l'un principal et l'autre secondaire, doivent coexister dans chaque collectivité ».

(4) Par la création d'un impôt local sur le revenu ?

Les intervenants qui se sont prononcés sur la question jugent peu probable la création d'un impôt local sur le revenu (cf. page 253 ).

M. GILBERT estime cependant, dans sa contribution écrite, que « pour les ménages, des différences de taux au titre d'un impôt local sur le revenu auraient infiniment plus de signification que les différences actuelles de taux de la taxe d'habitation », ce qui serait de nature à accroître la responsabilité politique en matière de vote des taux.

* 4 « Refonder l'action publique locale », rapport remis le 17 octobre 2000 au Premier ministre par M. Pierre Mauroy, président de la commission.

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