I. LES PAYS DU SUD ONT UN ACCÈS DIFFICILE AUX MARCHÉS DU NORD EN DÉPIT DE DROITS DE DOUANE FAIBLES OU NULS

Les conclusions relatives à l'accès au marché soulignent systématiquement l'accès préférentiel accordé aux pays en développement. Pour autant ces pays, pour une grande partie d'entre eux, peinent à développer leurs exportations vers les pays riches. Ceci peut provenir d'obstacles non tarifaires aux échanges, comme les formalités administratives, la difficulté à s'insérer dans les réseaux de commercialisation, etc.

Afin de mesurer les difficultés d'accès aux marchés des pays développés rencontrées par les exportateurs de produits manufacturés des pays en développement, le CEPII a utilisé une méthode d'évaluation s'appuyant sur les développements récents de la littérature sur les modèles de commerce gravitaires. Un modèle doté de fondements microéconomiques sert à estimer l'impact des frontières nationales sur l'accès aux marchés du Nord par les producteurs du Sud. Les barrières aux échanges sont révélées par les distorsions observées dans les flux commerciaux, par rapport à une situation de référence. Ce calcul est fait en tenant compte des déterminants traditionnels des échanges comme les coûts de transport, la demande, la capacité d'offre et les prix. Il s'agit donc d'un accès révélé au marché : cette méthodologie correspond à une mesure indirecte des obstacles aux échanges, et non à une mesure directe comme dans le cas des droits de douane. Ceci est rendu possible par l'utilisation de la base de données de commerce et de production TradeProd évoquée précédemment.

Le résultat central est que toute choses égales par ailleurs, dans les années quatre-vingt dix, un pays riche consomme en moyenne 281 fois plus de biens manufacturés nationaux que de biens produits dans un pays en développement, et seulement 61 fois plus lorsque les importations proviennent d'un pays développé. Le droit de douane équivalent à l'ensemble des obstacles non tarifaires est moitié plus élevé dans le cas d'échanges Sud-Nord que dans le cas d'échanges Nord-Nord.

Les droits de douane ont en général une influence dans la détermination des échanges mais ne constituent pas une composante essentielle dans l'explication des problèmes rencontrés par le Sud dans l'accès des marchés du Nord dans le secteur manufacturé.

La méthode utilisée permet de mesurer ces barrières révélées au niveau sectoriel, et d'observer leur évolution dans le temps à ce niveau. Les marchés du Nord les plus difficiles d'accès pour les pays en développement sont le tabac, l'édition, les boissons, et les produits pétroliers raffinés. A l'opposé, la mécanique, l'habillement, les textiles, les produits chimiques sont des secteurs dans lesquels les barrières non-tarifaires aux échanges sont les moins élevées (une fois contrôlé les droits de douane, donc). Ces difficultés rencontrées par les pays en développement décroissent tout de même avec le temps. Le matériel de transport et le matériel électrique comptent parmi les libéralisations révélées les plus fortes sur les deux dernières décennies. Le cas du Japon est enfin intéressant : ce pays présente une forte préférence (une protection non tarifaire négative, c'est à dire l'équivalent d'une subvention à l'importation) pour de nombreux produits en provenance des pays en développement, probablement en raison de la division régionale du travail organisée par les firmes japonaises.

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