B. UN PATRIMOINE RICHE D'UNE DIVERSITÉ DE PRODUITS ET DE « TERROIRS » : LE REFLET DE L'IDENTITÉ DE NOS TERRITOIRES

La diversité des produits, dont le corollaire est une grande diversité de métiers - dans l'ensemble de la filière, des producteurs aux « métiers de bouche » -, apparaît comme une caractéristique forte de notre patrimoine culinaire et comme l'un des atouts majeurs de notre cuisine française.

Dans ses souvenirs, M. Auguste Escoffier appuyait le mythe d'un « pays de cocagne », soulignant, avec un esprit cocardier non feint, que « le sol français a le privilège de produire naturellement et en abondance les meilleurs légumes, les meilleurs fruits et les meilleurs vins qui soient au monde. La France possède aussi les plus fines volailles, les viandes les plus tendres, les gibiers les plus variés et les plus délicats. Sa situation maritime lui fournit les plus beaux poissons et crustacés. C'est donc tout naturellement que le Français devient à la fois gourmand et bon cuisinier. » 3 ( * )

Sans aller aussi loin dans la démonstration, nombre d'interlocuteurs ont relevé que, de par son positionnement géographique, la variété de ses climats et ses caractéristiques géologiques, notre pays présente des dispositions favorables à des productions d'une grande diversité.

Le nombre de variétés de fromages - il en existe plus de 1 000 - en est l'illustration la plus évidente. Cette diversité se décline également dans nos pains, nos productions maraîchères ou viticoles... Des restaurateurs étrangers viennent ainsi s'approvisionner à Rungis, qui est le plus grand marché de produits frais au monde.

Toutefois, ce patrimoine culinaire est avant tout le résultat d'une interaction entre l'homme et la nature , de la capacité de l'homme à s'adapter à son environnement, de la rencontre entre un sol fertile et des qualités humaines d'observation, une sensibilité, un savoir et des traditions ancestrales qui se transmettent de génération en génération.

Ainsi, si le concept de « terroir » désigne d'abord les qualités agricoles d'une étendue de terre donnée, il renvoie, par extension, à l'identité culturelle spécifique d'un territoire et de ses habitants , dont le patrimoine culinaire, mais aussi les savoir-faire, les pratiques et les traditions qui lui sont liées, sont alors l'expression .

Comme le relève M. Jean-François Revel dans son Festin en paroles , « le culte du terroir, l'attribution des qualités d'un vin aux seules propriétés intrinsèques du sol, combinées à celles de l'exposition, est un préjugé moderne (...) : le principal facteur de la qualité d'un vin, ce n'est pas le sol, c'est l'homme. » Mme Sandrine Garbay, oenologue et maître de chai au Château d'Yquem, a souligné, en effet, lors de son audition, qu'en matière de vin, le terroir se combine à des traditions et savoir-faire ancestraux.

Si la France n'est pas le seul pays où s'exprime ce concept de « cuisines de terroir » et de « spécialités régionales », elle s'est néanmoins attachée à défendre ces identités culinaires locales par le système d' « Appellation d'origine contrôlée », géré par l'Institut national de l'origine et de la qualité : ce label, qui s'intègre dans un système de protection défini au niveau européen, identifie un produit en fonction de l'authenticité de son origine géographique et de ses caractéristiques de fabrication.

De même, le label de « patrimoine rural » , qui est constitué à la fois des monuments, paysages, savoir-faire, traditions et produits de terroir, montre combien les pratiques et spécialités culinaires locales contribuent à la valeur attractive de nos territoires et sont constitutifs de leur identité patrimoniale.

Quels produits, quelles recettes, en effet, ne font directement allusion à un territoire ou un lieu spécifique, au point d'en devenir un véritable emblème ? La sauce Nantua, le poulet basquaise, le camembert ou la tomme de Savoie en sont des illustrations connues. Mais chaque région a ses « trésors » : M. Jean-Luc Germond en a cité quelques exemples pour sa région du Nord, comme la « barbe de capucin » ou le chicon.

* 3 « Souvenirs inédits », Auguste Escoffier, 1985.

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