(2) Des échecs pénalisants pour l'avenir

Au-delà de ces retards, un constat d'échec doit être porté dans trois domaines au moins : la lutte contre l'illettrisme, le niveau d'échec scolaire et l'adaptation des enseignements.

(a) Un niveau élevé d'illettrisme

L'illettrisme est un phénomène de grande ampleur dans les DOM : il concerne massivement La Réunion (21 % de la population contre 4 % en métropole, soit 120 000 personnes) et la Guyane, même s'il est difficile à mesurer ; il reste également fort aux Antilles (15 %). 159 ( * )

L'illettrisme est, en général, diagnostiqué tardivement, par les tests effectués dans le cadre de la journée d'appel et de préparation de la défense (JAPD). Des tests sont également effectués par le ministère de l'éducation nationale auprès des enfants pendant leur scolarité (classes de CE2 et sixième).

Ses facteurs sont encore mal cernés : on évoque un phénomène complexe, lié à l'érosion des « fondamentaux d'insertion sociale et économique » tout au long de la vie. Il affecte directement les enfants à travers leur milieu familial et c'est donc une question qui requiert la mobilisation de l'ensemble des acteurs publics.

Bien que considérée comme une priorité nationale depuis la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre l'exclusion (et réaffirmée dans la loi du 31 mars 2006 sur l'égalité des chances et dotée d'une Agence spéciale, l'ANLCI), la lutte contre l'illettrisme s'est révélée jusqu'ici inefficace, en dépit des plans successifs, tant au plan national que local (à travers les plans régionaux et les chartes de partenariats).

Ainsi, le niveau d'illettrisme n'a pas sensiblement diminué. Comme le souligne notamment le Conseil économique et social régional de La Réunion, depuis le premier plan adopté en 1980 où l'île comptait 50 000 illettrés, leur nombre a plus que doublé. Dans ce seul département, le rectorat estime que ce fléau touche toujours 23 % des jeunes (contre 11 % dans l'hexagone) et que, parmi eux, 9 % sont même en graves difficultés (contre 4 % en métropole).

La lutte contre l'illettrisme est d'ailleurs l'un des sujets de préoccupation inscrit aux États Généraux de l'outre-mer et y est traitée dans l'atelier « Égalité des chances, formation et accès à l'emploi ». Ce thème apparaît comme un véritable leitmotiv dans les différents rapports publics.

Le constat partagé est celui d'un manque d'engagement de la part des opérateurs (l'école, les organismes familiaux, les associations spécialisées, les acteurs territoriaux de proximité et l'État) et de l'absence d'un vrai chef de file.

Au niveau du ministère de l'éducation nationale, également mobilisé sur ce sujet, deux axes prioritaires d'action se dessinent :

- la prévention de l'illettrisme en direction des publics scolarisés, avec l'objectif de favoriser la réussite de tous les élèves en mobilisant l'ensemble de la communauté éducative, enseignants et parents d'élèves ;

- la lutte contre l'illettrisme en direction des publics adultes, avec l'objectif de réduire le nombre d'illettrés notamment parmi les populations les plus précaires, allocataires des minima sociaux ou salariés du travail temporaire, par exemple.

La mission considère, en effet, absolument nécessaire de mieux adapter et coordonner les actions de lutte contre l'illettrisme, en fonction des caractéristiques précises des populations concernées (âge, situation sociale et culturelle), notamment :

- à titre préventif, pour les enfants scolarisés, en affectant des moyens supplémentaires dans les « classes surchargées » (renforcement des équipes pédagogiques) et par la mise en place d'un accompagnement périscolaire spécifique, associant toutes les parties prenantes ;

- en créant un dispositif spécifique pour les jeunes sortis du système scolaire, autour d'adultes-relais et de réseaux pluridisciplinaires (associations, services sociaux, judiciaires, caisses d'allocations familiales...) ;

- en prévoyant un volet spécifique pour les personnes illettrées âgées de plus de 25 ans dans les mécanismes d'insertion du dispositif du RMI.

Proposition n° 70 : Faire de la lutte contre l'illettrisme une priorité de l'action des pouvoirs publics dans chaque DOM et amplifier les dispositifs de soutien scolaire.

* 159 Selon l'INSEE.

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