C. MAÎTRISER LES DÉPENSES DE SANTÉ

L'assurance maladie, qui avait réduit son déficit de manière significative en quatre ans, ramené de 11,6 milliards d'euros en 2004 à 4,4 milliards d'euros en 2008, verra cet effort anéanti en 2009 sous l'effet de la crise.

Selon la Cnam 11 ( * ) , le taux de croissance spontanée des dépenses de santé devrait atteindre, pour la période 2009-2012, en moyenne 3,7 % par an, ce qui confirme la tendance lourde à une progression de ces dépenses supérieure à celle de la richesse nationale .

Il est donc nécessaire de poursuivre une action particulièrement volontariste pour maîtriser les dépenses de santé. Devant la commission des comptes de la sécurité sociale, le ministre du budget et des comptes publics a d'ailleurs estimé possible de limiter à 3 % la croissance annuelle de l'Ondam (3,4 % en 2008).

Hormis la nécessaire réflexion sur le régime des affections de longue durée (ALD) , qui constituent la principale source de progression des dépenses d'assurance maladie, deux directions peuvent être explorées et recevoir des réponses concrètes dans le cadre du PLFSS pour 2010.

1. Les économies proposées par la Cnam

En application de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie, l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam) transmet chaque année au ministre chargé de la sécurité sociale et au Parlement un rapport sur l'évolution des charges et produits de l'assurance maladie pour l'année suivante.

Selon la Cnam 12 ( * ) , des économies paraissent possibles dans plusieurs domaines :

- les services de soins de suite et de réadaptation représentent environ 100 000 lits et places, dont un peu plus de 40 % en secteur public, un peu moins de 40 % en secteur privé à but non lucratif et 20 % en secteur privé à but lucratif. L'offre est très inégalement répartie sur le territoire et donne lieu à une tarification qui peut varier, pour des cas de gravité comparable, de plus de 50 % ;

- les dépenses de médicament sont en France parmi les plus importantes des pays de l'OCDE et se caractérisent par le nombre de doses consommées et la forte pénétration des nouveaux médicaments. Des possibilités d'économies existent encore dans ce secteur, notamment en ce qui concerne la hiérarchisation des traitements ;

- en matière de dialyse rénale , les comparaisons internationales montrent que la France se caractérise par le niveau élevé des tarifs et le faible développement de la dialyse à domicile. Des économies de l'ordre de 100 millions d'euros par an paraissent possibles dans ce secteur grâce à une meilleure organisation de l'offre ;

- dans le domaine des transports de malades , la dépense, qui a fortement progressé au cours de la dernière décennie, est très hétérogène et les coûts varient, par patient utilisateur, entre 320 et 852 euros, sans que cette diversité s'explique par des caractéristiques géographiques ou de peuplement ;

- en matière d' indemnités journalières , les comparaisons géographiques doivent être faites avec une grande prudence, les risques d'arrêts de travail pouvant varier largement, en fonction du sexe ou de la structure de la population active en termes d'âge, de secteur d'activité, de qualification. Il existe cependant des variétés de pratiques locales qui mériteraient d'être harmonisées, même s'il est très difficile en ce domaine d'élaborer des référentiels et plus encore de les rendre obligatoires.

Enfin, le directeur général de la Cnam a mentionné également les importants gisements de productivité existant dans les établissements de santé, sur lesquels il convient de s'arrêter davantage.

2. La réforme de l'hôpital

Les établissements de santé devront nécessairement participer aux efforts de maîtrise des dépenses, d'importantes possibilités d'économies existant dans ce secteur.

La Cour des comptes a indiqué qu'elle mettra en évidence, dans son prochain rapport sur la sécurité sociale, « l'existence de multiples gisements d'économies dans tous les établissements par des progrès d'organisation et de fonctionnement » 13 ( * ) .

De son côté, la Mecss avait, en 2008 14 ( * ) , montré les insuffisances du pilotage de la politique hospitalière et formulé des propositions tendant à une adaptation de l'offre de soins, à une restructuration des services et du secteur hospitalier sur l'ensemble du territoire, à une meilleure maîtrise du processus de tarification à l'activité, et notamment de la convergence des tarifs.

a) La loi HPST et la création des ARS

Le projet de loi « Hôpital, patients, santé et territoires » HPST devrait être prochainement promulgué, après son examen par le Conseil constitutionnel. Ce texte réforme la gouvernance de l'hôpital, crée de nouvelles formes de coopération hospitalière, met enfin en place les ARS, qui disposeront de prérogatives particulièrement étendues pour réorganiser le secteur hospitalier et auxquelles est explicitement assignée la mission de participer à la maîtrise des dépenses de santé.

Ainsi, son article 26, qui définit le rôle et l'organisation des ARS, prévoit notamment que celles-ci :

- contribuent au respect de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie ;

- autorisent la création et les activités des établissements et services de santé ;

- veillent à ce que la répartition territoriale de l'offre de soins permette de satisfaire les besoins de santé de la population ;

- définissent et mettent en oeuvre, avec les organismes d'assurance maladie et avec la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, les actions régionales prolongeant et complétant les programmes nationaux de gestion du risque et des actions complémentaires. Ces actions portent sur le contrôle et l'amélioration des modalités de recours aux soins et des pratiques des professionnels de santé, en médecine ambulatoire et dans les établissements et services de santé et médico-sociaux.

Les ARS devraient se mettre en place au cours des prochains mois, la désignation d'agents préfigurateurs étant envisagée dès la promulgation de la loi. Elles disposeront d'importants outils pour favoriser la réorganisation du tissu hospitalier.

Selon la Cnam, « les ARS seront un nouvel outil pour développer la productivité des établissements de santé publics et privés et la Cnam entend être, dans le cadre de la négociation de la convention d'objectifs et de gestion avec l'Etat comme de celui du nouveau contrat pluriannuel prévu par la loi HPST, une force de proposition pour parvenir à une meilleure gestion du risque de santé, y compris dans le domaine des soins hospitaliers » 15 ( * ) .

La commission des affaires sociales, et notamment sa Mecss, ne manqueront pas de faire le point, le moment venu, sur les conditions dans lesquelles les ARS s'acquittent des missions très étendues qui leur sont confiées.

b) Tarification à l'activité et convergence tarifaire

La convergence des tarifs entre établissements de santé est l'un des moyens qui peuvent permettre de réaliser des économies sans remettre en cause la qualité des soins dispensés. La loi de financement pour la sécurité sociale pour 2005 a ainsi prévu que le processus de convergence entre les tarifs des établissements publics et ceux des établissements privés devrait être achevé en 2012.

La réalisation de cet objectif imposait de disposer d'informations complètes et fiables sur l'importance des écarts de coûts entre établissements et sur les raisons susceptibles de les expliquer. En 2008, la Mecss, dans son rapport sur l'hôpital, a constaté que le retard pris dans la réalisation de ces études, avait bloqué le processus de convergence.

Un récent avis du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (Hcaam) a pourtant montré que ce processus demeure pertinent : « Le constat de disparités - non justifiées par la nature des charges - entre établissements permet de conclure qu'une meilleure organisation dégagerait des marges substantielles de productivité. L'approche prudente des convergences tarifaires pousse à leur mobilisation » 16 ( * ) .

Dans cet avis, le Haut Conseil recommande de poursuivre très activement les études sur les différences dans la nature des charges que supportent les établissements, afin d'arriver à un resserrement de l'estimation de l'écart de coûts et d'établir ainsi la ligne de convergence à assurer.

Quelques jours après la publication de cet avis, Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé et des sports, a annoncé un report de 2012 à 2018 de l'achèvement du processus de convergence, mettant en avant la nécessité de réaliser des études complémentaires sur les écarts de coûts entre établissements. Une telle annonce mérite à tout le moins des explications plus détaillées et justifierait la présentation d'un calendrier ferme et définitif pour la réalisation des études qui restent à conduire .

Le report effectif de la date d'aboutissement du processus de convergence nécessitant une modification de l'article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, dans sa rédaction résultant de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 devrait permettre d'avoir un débat approfondi sur cette question.

* 11 Audition de Frédéric Van Roekeghem, directeur général de la Cnam, par la commission des affaires sociales le 1 er juillet 2009, cf. p. 73.

* 12 Idem.

* 13 Audition de Philippe Séguin par la commission des affaires sociales le 30 juin 2009, cf. p. 61.

* 14 Pour une gestion responsable de l'hôpital - Rapport d'information Mecss - Sénat n° 403 (2007-2008) d'Alain Vasselle et Bernard Cazeau.

* 15 Audition de Frédéric Van Roekeghem par la commission des affaires sociales le 1 er juillet 2009, cf. p. 73.

* 16 Avis du Hcaam sur la situation des établissements de santé, 23 avril 2009.

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