CONCLUSION GENERALE

La grippe A(H1N1) n'avait pas été prévue. Son déroulement a surpris les autorités sanitaires qui s'attendaient à une situation beaucoup plus grave. Elles redoutaient un virus aussi dangereux que celui de la grippe aviaire H5N1. La désaffection de la population pour la vaccination les a déconcerté.

Le pic pandémique est maintenant passé et certains peuvent avoir l'impression que la crise à laquelle notre société a échappé était finalement bénigne.

Les virologues sont cependant plus prudents. Ils réaffirment l'utilité de la vaccination. Ils savent qu'une pandémie peut se développer en plusieurs vagues. Ils craignent surtout qu'un virus mutant nouveau apparaisse, qui soit à la fois dangereux et très infectieux.

Les dispositions du plan pandémie avaient été conçues dans cet esprit. Elles demeurent valables pour faire face à cette hypothèse extrême. Elles apparaissent néanmoins trop rigides en situation intermédiaire.

C'est à cette situation intermédiaire, ou plutôt à ces situations intermédiaires qui risquent plus probablement d'arriver qu'il faut réfléchir.

Quelles mesures faudrait-il envisager face à un danger d'importance moyenne ? Quelle souplesse faudrait-il dans les marchés ? Qui faudrait-il faire participer à une réflexion qui permettrait de rendre davantage acceptable des mesures exceptionnelles ? Comment pourrait-on associer plus étroitement le monde médical, mais aussi les élus à la mise en place d'un plan collectif qui pourrait être rendu nécessaire par les circonstances ?

Associer les citoyens à la conception des politiques correspondantes est aujourd'hui indispensable. Les réflexions portant sur la santé publique sont souvent mal comprises : entre déni du risque, crise de confiance, parole imperturbable des experts, on s'aperçoit que le choix n'est pas seulement scientifique, mais politique.

Les méthodes statistiques utilisées pour évaluer la gravité d'une maladie pandémique sont souvent incompréhensibles. L'opinion publique n'a du reste pas réagi selon les prévisions des experts.

Il faut davantage tenir compte du contexte : la transparence est devenue une obligation ; les solutions nationales sont comparées avec celles retenues à l'étranger. Rien ne sert de minimiser les doutes : les doutes créent des craintes ; les craintes sont la source des rumeurs. Il vaut mieux se demander si ces doutes peuvent être justifiés, et si les choix effectués sont raisonnablement crédibles.

Un débat doit s'organiser entre citoyens et pouvoirs publics : les media peuvent le nourrir. Les hommes politiques peuvent en être les médiateurs.

Ce thème, comme celui de la réflexion sur une réponse progressive et modulable à une pandémie d'intensité moyenne servira de trame au rapport final qui conclura dans quelques mois les travaux de l'OPECST sur la mutation des virus et la gestion des pandémies.

PREMIERES RECOMMANDATIONS

1. Rester vigilant. Le virus circule et tue toujours. Les pandémies grippales peuvent comporter plusieurs vagues. Après un premier bilan à la fin de l'hiver dans l'hémisphère Nord, il faudra surveiller attentivement la situation dans l'hémisphère Sud.

2. Élaborer un plan de lutte contre une pandémie modérée, complémentaire du plan actuel, trop rigide et conçu pour une situation extrême. Envisager des phases intermédiaires entre les phases 5 et 6 permettant des mesures davantage proportionnées et graduées.

3. Mettre en place un dialogue avec les professions de santé pour les associer à la définition des mesures du nouveau plan pandémie.

4. Au sein de la coordination interministérielle, préciser les rôles respectifs des ministères de la Santé et de l'Intérieur, de manière à garantir que les préoccupations de nature médicale sont suffisamment prises en compte. Mettre en place une « Task Force » chargée de gérer la communication et d'anticiper les réponses à apporter aux rumeurs.

5. A l'issue de la pandémie, évaluer l'adaptation de la prise de décision et de la communication institutionnelle à la réalité de la situation, afin de tirer les leçons des réticences de l'opinion publique, mais aussi parfois du corps médical.

6. Favoriser la convergence des réseaux Sentinelles et GROG, et les recherches permettant une meilleure appréciation de la propagation et des effets des virus pandémiques.

7. Encourager les réseaux qui se mettent en place au niveau des universités et des centres de recherche, tant en France qu'en Europe et dans le monde pour coordonner leurs programmes.

8. Réfléchir aux implications des principes de précaution et de prévention en matière de santé publique, dans le contexte de la mondialisation et en tenant compte des solutions retenues à l'étranger.

9. Mettre en place un système permettant de repérer les populations sensibles et de les contacter. Engager des discussions à cette fin avec la CNIL.

10. Réfléchir au rôle et aux fonctions de l'EPRUS et au suivi de ses activités.

11. Évaluer au plan européen et au plan mondial l'efficacité des mesures prises et la manière dont les autorités sanitaires nationales ont coopéré entre elles et avec les institutions internationales.

12. Envisager que les collectivités d'Outre Mer puissent disposer de vaccins fabriqués dans l'hémisphère Sud, et notamment en Australie, étant donné l'évolution du virus dans les deux hémisphères.

13. Poser dès à présent publiquement la question du prochain vaccin, celui qui anticiperait l'arrivée du virus de l'automne prochain, sans renouveler en cercle fermé les erreurs passées.

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