2. De multiples propositions et initiatives

Depuis 2005, près d'une douzaine d'initiatives ou de propositions ont été avancées en vue de mettre en pratique les approches multilatérales du cycle du combustible nucléaire.

En ce qui concerne les assurances d'approvisionnement , les principales sociétés mondiales effectuant de l'enrichissement ont proposé, au nom de l'Association nucléaire mondiale, un mécanisme à trois niveaux. La sécurité d'approvisionnement serait assurée, à la base, par le marché actuel, mais en cas d'interruption des livraisons à un Etat consommateur pour des raisons politiques, une garantie collective des fournisseurs pourrait jouer. Elle serait appuyée par des engagements des Etats et de l'AIEA. Enfin, en dernier ressort, il pourrait être fait appel aux stocks gouvernementaux d'uranium enrichi.

Six Etats fournisseurs de services d'enrichissement (Etats-Unis, Russie, France, Pays-Bas, Allemagne, Etats-Unis) ont proposé en juin 2006 d'accorder des assurances collectives à travers lesquelles les fournisseurs d'uranium enrichi accepteraient de se substituer les uns aux autres pour compenser certaines interruptions de l'approvisionnement des consommateurs dans les Etats qui ont choisi de s'approvisionner sur le marché international et de ne pas mener d'activités sensibles du cycle du combustible. En cas de défaillance de ces assurances, il pourrait être fait appel à des réserves, physiques ou virtuelles, d'uranium faiblement enrichi, constituées par les gouvernements participants.

Dans le cadre du partenariat global pour l'énergie nucléaire ( Global Nuclear Energy Partnership - GNEP ) regroupant plus d'une vingtaine d'Etats et lancé par les Etats-Unis en vue notamment de développer des réacteurs civils plus résistants à la prolifération, il a été proposé qu'un consortium de pays fournisseurs assurent un accès fiable au combustible nucléaire aux pays ayant accepté de renoncer aux activités d'enrichissement et de retraitement.

La constitution d'une réserve d'uranium enrichi , parfois qualifiée de « banque de combustible », est au centre de l'initiative lancée par l'organisation non gouvernementale américaine Nuclear Threat Initiative (NTI) . Gérée par l'AIEA, cette réserve pourrait être sollicitée en cas d'interruption d'autres arrangements d'approvisionnement, au profit des pays ne disposant pas de leur propre capacité d'enrichissement. La NTI avait annoncé une mise de fond initiale de 50 millions de dollars effectuée par l'homme d'affaires Warren Buffet. Les Etats-Unis se sont engagés sur une contribution équivalente et l'Union européenne, sous présidence française, a décidé en 2008 de participer à hauteur de 25 millions d'euros (soit près de 35 millions de dollars). D'autres contributions ont depuis lors été annoncées par les Emirats Arabes Unis (10 millions de dollars), la Norvège (5 millions de dollars) et le Koweit (10 millions de dollars).

La Russie a également constitué une réserve physique garantie de 120 tonnes d'uranium faiblement enrichi, soumise aux garanties de l'AIEA et accessible aux Etats membres confrontés à une rupture d'approvisionnement. Ce projet a été adopté par le Conseil des gouverneurs de l'AIEA au mois de novembre 2009. Le Directeur général de l'AIEA est habilité à mettre cette réserve à disposition d'un pays coupé de sa source d'approvisionnement pour des raisons autres que commerciales.

Enfin, la création d' installations internationales d'enrichissement fait l'objet de deux propositions.

La première émane de la Russie qui a créé, dans son usine d'enrichissement d'Angarsk, dans la région d'Irkoutsk, un Centre international d'enrichissement d'uranium ouvert à tous les pays qui n'envisagent pas de développer des techniques nucléaires et qui satisfont aux critères de non-prolifération. Le Kazakhstan, l'Arménie et l'Ukraine sont parties prenantes à ce centre. Dans l'esprit de la Russie, l'installation internationale d'Angarsk constituerait l'amorce d'un réseau beaucoup plus large de centres internationaux réalisés sur le même modèle.

L'Allemagne propose pour sa part la construction d'une usine d'enrichissement qui serait placée sous l'autorité exclusive de l'AIEA et bénéficierait du statut d'extraterritorialité. Cette structure fonctionnerait sur une base commerciale en tant que nouveau fournisseur de services d'enrichissement sur le marché, sous le contrôle de l'AIEA. Le projet allemand ( Multilateral Enrichment Sanctuary Partnership ) viserait ainsi à « sanctuariser » la production de combustible, soustraite au contrôle d'un ou de plusieurs Etats. Il représente l'option la plus ambitieuse d'internationalisation des activités du cycle du combustible nucléaire, mais sa mise en oeuvre paraît relativement difficile à court terme, compte tenu des questions juridiques, notamment en matière de responsabilité, que soulève le statut extraterritorial.

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