(2) La flagrance fiscale

La mise en oeuvre de la flagrance fiscale permet à la DGFIP d'opérer des saisies conservatoires avant l'échéance déclarative pour anticiper les difficultés de recouvrement.

La loi de finances rectificative pour 2007 a créé une procédure de flagrance fiscale pour agir contre certaines pratiques des entreprises éphémères qui sont aggravées par leur capacité à organiser rapidement leur insolvabilité (article L. 16-0 BA du LPF), notamment en matière de fraude à la TVA .

Le champ de la flagrance fiscale a été étendu dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2009 afin de sécuriser les créances issues du contrôle fiscal des trafics illicites (article 1649 quater 0 B bis du code général des impôts).

Cette procédure est décrite comme « ayant été mise en oeuvre de manière progressive » par les services de la DGFIP, sans doute freinés par sa rigidité. Mi-2011, trente flagrances fiscales ont débouché sur des saisies à hauteur de 1,4 million d'euros.

En outre, les délais de reprise de l'administration ont été allongés à dix ans pour répondre à la difficulté de détecter et de réprimer certaines fraudes par la loi de finances rectificative pour 2008. Le délai de droit commun est de trois ans.

c) La création d'une « police fiscale »

La loi de finances rectificative pour 2009 du 30 décembre 2009 441 ( * ) a créé une nouvelle procédure judiciaire d'enquête fiscale qui permet à l'administration fiscale de déposer plainte, avant le début des opérations de contrôle fiscal , en vue de faire rechercher, avec des prérogatives de police judiciaire , les éléments de nature à caractériser et à sanctionner les fraudes les plus difficiles à appréhender.

Sur avis conforme de la Commission des infractions fiscales (CIF), la DGFIP peut désormais déposer plainte lorsqu'il existe des présomptions caractérisées qu'une infraction fiscale, pour laquelle existe un risque de dépérissement des preuves, a été réalisée via des États ou territoires non coopératifs ou au moyen de procédés de falsification.

La procédure est confidentielle, c'est-à-dire que le suspect n'en est pas informé , contrairement aux règles de droit commun, ce qui assure une meilleure efficacité aux investigations judiciaires (écoutes téléphoniques, perquisitions, gardes à vue...).

Sur réquisition du procureur de la République ou sur commission rogatoire d'un juge d'instruction saisi de la plainte déposée par l'administration fiscale dans les conditions précitées, l'enquête est confiée à la « police fiscale ».

Il s'agit d'un nouveau service : créée par décret du 4 novembre 2010, la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF) est rattachée au ministère de l'Intérieur (Division nationale d'investigations financières et fiscales de la Direction centrale de la Police judiciaire). Elle est composée de huit officiers de police judiciaire (OPJ) et de treize agents des impôts ayant acquis la qualité d'officiers fiscaux judiciaires (OFJ). Elle est dirigée par un commissaire de police assisté d'un administrateur des finances publiques adjoint.

Les premières propositions de poursuites correctionnelles ont été transmises par la DGFIP à la commission des infractions fiscales (CIF) en fin d'année 2010. En moins d'un an d'activité, la CIF a été saisie de cinquante-neuf affaires et a rendu cinquante-cinq avis favorables à l'engagement des poursuites correctionnelles.

Les plaintes déposées font état de présomptions caractérisées de fraude le plus souvent relatives à :

- l'utilisation, par des personnes physiques et par des personnes morales, de comptes non déclarés ouverts dans un paradis fiscal ;

- ou l'interposition, dans le cadre de montages de défiscalisation abusive, d'une ou plusieurs entités dans un paradis fiscal.

Les présomptions de fraude fiscale ayant permis l'engagement de la nouvelle procédure concernent des fraudes patrimoniales (minoration des déclarations d'ensemble des revenus ou d'impôt de solidarité sur la fortune) et professionnelles (distributions de recettes occultes). Quelques plaintes visant des personnes physiques en tant que représentantes de droit de personnes morales ont également été déposées (minoration de déclarations d'impôt sur les sociétés ou de TVA).

Sur la base des informations transmises par le juge, la DGFIP conduira les contrôles fiscaux des personnes physiques ou morales impliquées dans ces fraudes.

Pour lui permettre de disposer de plus de temps pour agir même dans les États ayant signé avec la France une convention d'échange d'informations, la loi de finances rectificative pour 2011 conserve à la police fiscale le droit d'investiguer dans un État sorti de la liste des ETNC pendant les trois ans suivant la signature de cette convention fiscale .

Le bilan positif des premiers mois de la police fiscale prouve l'utilité de la convergence ainsi opérée entre la police judicaire et l'administration fiscale. C'est le même esprit de décloisonnement entre administrations qui a prévalu pour l'exploitation des fichiers HSBC et du Liechtenstein, l'administration fiscale ayant bénéficié du concours de la justice, de la police et des douanes.


* 441 Loi n° 2009 - 1674 du 30 décembre 2009.

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