II. LES LOIS « GRENELLE DE L'ENVIRONNEMENT » : LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ACTRICES DE LA MAÎTRISE DE L'ÉNERGIE

Les deux lois « Grenelle » (loi n° 2009-967 du 3 août 2009 et loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010) ont fait des collectivités territoriales des acteurs majeurs du développement durable en étendant leur champ de compétences dans le domaine de la politique énergétique, en leur permettant de développer des actions en faveur de la maîtrise de l'énergie et d'intervenir dans le domaine de la production utilisant des sources d'énergies renouvelables.

Surtout, les collectivités territoriales se sont vues reconnaître des prérogatives en matière de définition et de conduite d'une stratégie énergétique sur leur territoire.

A. LES APPORTS DE LA LOI DE PROGRAMMATION DU 3 AOÛT 2009 RELATIVE À LA MISE EN oeUVRE DU GRENELLE DE L'ENVIRONNEMENT

La loi dite « Grenelle 1 » pose le principe général selon lequel les collectivités territoriales agissent en matière d'atténuation et d'adaptation aux changements climatiques 34 ( * ) . C'est en ce sens que l'article 51 dispose que « les collectivités territoriales et leurs groupements sont des acteurs essentiels de l'environnement et du développement durable et ont des rôles complémentaires, tant stratégiques qu'opérationnels ».

Cette consécration du rôle des collectivités territoriales n'est pas neutre. En effet, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) estime que les collectivités territoriales interviennent directement sur plus de 12 % des émissions nationales de gaz à effet de serre et qu'elles ont une action indirecte sur plus de 50 % de celles-ci, en particulier à travers les politiques d'aménagement du territoire, d'urbanisme, d'habitat, ou encore de transport et d'énergie.

Dans cette perspective, l'État doit inciter les collectivités territoriales , dans le respect de leur libre administration, à agir dans ce domaine.

L'article 5 d'abord dispose que « l'État incitera les collectivités territoriales, dans le respect de leur libre administration, à engager un programme de rénovation de leurs bâtiments en matière d'économie d'énergie dans les mêmes conditions et au même rythme » que pour ceux de l'État 35 ( * ) .

L'article 7, ensuite, en vertu duquel l'État incitera les régions, les départements et les communes et groupements de communes de plus de 50 000 habitants à établir « en cohérence avec les documents d'urbanisme et après concertation avec les autres autorités compétentes en matière d'énergie, de transport et de déchets, des « plans climat-énergie territoriaux » avant 2012 ». Ils visent à réduire de 75 % les émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050 et à adapter les territoires aux changements des conditions climatiques.

L'article 51 propose d'ailleurs d'utiliser les agendas 21 locaux comme outils de contractualisation avec les collectivités territoriales.

Mais cette incitation prend également la forme d'aides techniques et de documents supports de l'ADEME.

Afin de parvenir à ces objectifs, plusieurs vecteurs sont utilisés, dont le droit de l'urbanisme. C'est par ce biais que les collectivités territoriales sont mobilisées en matière d'énergie. Ainsi, le II de l'article 7 de la loi prévoit que « le droit de l'urbanisme devra prendre en compte les objectifs suivants , dans un délai d'un an suivant la publication de la présente loi, [...] lutter contre [...] la déperdition d'énergie [...] ainsi que de prescrire, dans certaines zones, des seuils minimaux de densité ou des performances énergétiques supérieures à la réglementation » .

Ainsi, s'il existait déjà, dans le Code de l'urbanisme, des mesures en matière de consommation d'énergie 36 ( * ) , l'article 8 de la loi Grenelle 1 insère de nouvelles orientations parmi les principes généraux d'utilisation des sols, notamment « la réduction des consommations d'énergie ». Comme l'indique la nouvelle rédaction de l'article L. 110 du Code de l'urbanisme ainsi modifié, « l'action [des collectivités territoriales] en matière d'urbanisme contribue à la lutte contre le changement climatique et à l'adaptation à ce changement. »

Enfin, le II de l'article 8 instaure une nouvelle obligation 37 ( * ) pour les collectivités, puisque le Code de l'urbanisme impose désormais la réalisation d'une étude de faisabilité relative aux énergies renouvelables à l'échelle des Zones d'aménagement concerté (ZAC). Cette obligation doit permettre aux collectivités de constater la compétitivité énergétique et économique des systèmes d'énergies renouvelables à l'échelle d'une ZAC, notamment celle des réseaux de chaleur (biomasse, géothermie, récupération de chaleur sur les eaux usées...).


* 34 Article L. 110 du Code de l'urbanisme, issu de la loi n°2009-967 du 3 août 2009 : » Afin [...] de réduire les émissions de gaz à effet de serre, de réduire les consommations d'énergie, d'économiser les ressources fossiles [...], les collectivités publiques harmonisent, dans le respect réciproque de leur autonomie, leurs prévisions et leurs décisions d'utilisation de l'espace. Leur action en matière d'urbanisme contribue à la lutte contre le changement climatique et à l'adaptation à ce changement ».

* 35 « Tous les bâtiments de l'État et de ses établissements publics seront soumis à un audit d'ici à 2010. L'objectif est, à partir du diagnostic ainsi établi, d'engager leur rénovation d'ici à 2012 avec traitement de leurs surfaces les moins économes en énergie. Cette rénovation aura pour objectif de réduire d'au moins 40 % les consommations d'énergie et d'au moins 50 % les émissions de gaz à effet de serre de ces bâtiments dans un délai de huit ans ».

* 36 Avec l'article L. 123-1 du Code de l'urbanisme, en vertu duquel les PLU peuvent recommander l'utilisation des énergies renouvelables pour l'approvisionnement énergétique des constructions neuves.

* 37 Article 8 (II) :» Toute action ou opération d'aménagement telle que définie à l'article L. 300-1 et faisant l'objet d'une étude d'impact doit faire l'objet d'une étude de faisabilité sur le potentiel de développement en énergies renouvelables de la zone, en particulier sur l'opportunité de la création ou du raccordement à un réseau de chaleur ou de froid ayant recours aux énergies renouvelables et de récupération ».

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