LISTE DES PROPOSITIONS

I - L'UNION EUROPÉENNE, MÉDIATEUR POUR UNE GOUVERNANCE GARANTISSANT UN INTERNET OUVERT ET RESPECTUEUX DES DROITS FONDAMENTAUX ET DES VALEURS DÉMOCRATIQUES

A. Refonder la gouvernance d'internet autour d'un traité assurant le respect des droits fondamentaux et des valeurs démocratiques en ligne

- inviter les États membres de l'Union Européenne à s'entendre pour proposer la consécration des principes du NETmundial de São Paulo, à la fois par un traité international ouvert à tous les États et par une forme de ratification en ligne par les internautes (n° 1)

B. Construire un réseau mondialise, légitime et responsable d'enceintes de gouvernance

1. Globaliser la gouvernance d'Internet sur le fondement des principes du NETmundial

- asseoir la gouvernance d'Internet sur un réseau de relations transparentes en formalisant les rôles et interactions entre l'ICANN, les registres Internet, le W3C, l'IETF, l'IAB, l'IUT, les gestionnaires de serveurs racine, les opérateurs de noms de domaine de premier niveau... (n° 2)

- transformer le Forum pour la Gouvernance de l'Internet en Conseil mondial de l'Internet, doté d'un financement propre et chargé de contrôler la conformité des décisions des enceintes de gouvernance aux principes dégagés au NETmundial de São Paulo (n° 3)

- accueillir en Europe la célébration des dix ans du Sommet mondial pour la société de l'information en 2015 pour promouvoir cette nouvelle architecture mondialisée de la gouvernance d'Internet (n° 4)

2. Refonder l'ICANN pour restaurer la confiance dans le système des noms de domaine

- refonder l'ICANN pour en faire une WICANN (World ICANN), de droit international ou, de préférence, de droit suisse sur le modèle du Comité international de la Croix Rouge, et organiser une supervision internationale du fichier racine des noms de domaine en substitution de la supervision américaine (n° 5)

- rendre la WICANN responsable devant le Conseil mondial de l'Internet ou, à défaut, devant une assemblée générale interne et donner au Conseil ou à cette assemblée le pouvoir d'approuver les nominations au conseil d'administration de la WICANN et les comptes de cet organisme (n° 6)

- mettre en place un mécanisme de recours indépendant et accessible, permettant la révision d'une décision de la WICANN, voire sa réparation (n° 7)

- établir une séparation fonctionnelle entre la WICANN et les fonctions opérationnelles IANA pour distinguer ceux qui élaborent les politiques d'attribution des noms de domaine de ceux qui attribuent individuellement les noms de domaine (n° 8)

- définir des critères d'indépendance pour l'essentiel des membres du board de la WICANN (n° 9)

- exiger avant tout que le groupe directeur prévu par l'ICANN pour organiser la transition soit composé de membres désignés par les parties prenantes de l'ICANN selon des modalités transparentes et démocratiques et inclue également des représentants des autres parties prenantes non représentées aujourd'hui à l'ICANN (n° 10)

II. L'UNION EUROPEENNE DOIT REPRENDRE EN MAIN SON DESTIN NUMERIQUE POUR PESER DANS LA GOUVERNANCE DU NET

A. Une régulation offensive de l'écosystème numérique européen pour une meilleure répartition de la valeur

1. Concrétiser l'ambition de neutralité du net...

- saisir la Commission européenne pour qu'elle soumette sans délai une proposition législative visant à réguler les fournisseurs de contenus et d'application, afin que la neutralité s'applique non seulement aux réseaux mais aussi aux services (n° 11)

2. ... l'assortir d'une régulation forte en matière de concurrence et de fiscalité

- solliciter la Commission européenne pour améliorer les procédures de la politique de concurrence et les rendre plus réactives face aux abus de position dominante en ligne (n° 12)

- demander à la Commission de mettre en place un principe de séparation pour éviter l'intégration verticale des acteurs de l'Internet contrôlant de plus en plus de strates de la chaîne de valeur (n° 13)

- encourager les autres États membres victimes de l'optimisation fiscale des multinationales du numérique à exercer avec notre pays une pression continue sur les États membres complices de cette situation (n° 14)

- soutenir l'aboutissement des réformes fiscales en cours en matière de TVA et d'impôt sur les sociétés, pour mieux faire contribuer les fournisseurs de services en ligne aux charges publiques des États européens (n° 15)

3. ...et la compléter par de nouvelles modalités pour faire vivre la culture européenne sur l'Internet

- inciter les fédérations professionnelles du secteur culturel à se rapprocher entre États membres pour faire valoir leurs droits en étant unies face aux « over the top » (n° 16)

- aligner les taux de TVA des biens et services culturels numériques et physiques (n° 17)

- intégrer une nouvelle dimension à la politique européenne de la culture, valorisant la créativité des internautes et le partage non marchand de contenus (n° 18)

B. Un régime exigeant et réaliste de protection des données à l'ère du cloud et du big data

1. Soutenir la validité de l'approche européenne fondée sur l'affirmation d'un droit fondamental à la protection des données personnelles

- promouvoir le privacy by design et le privacy by default par des labels européens et internationaux (n° 19)

2. Conforter en le modernisant le cadre juridique européen de protection des données

- adopter le plus rapidement possible la proposition de règlement européen sur la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel (n° 20)

- renforcer les garanties procédurales entourant le traitement des données particulièrement sensibles par l'obligation de fournir des études d'impact sur la vie privée (n° 21)

- instaurer un régime de responsabilité des responsables de traitement de données à deux versants :

• en amont de la collecte, créer une obligation d'étude d'impact sur la vie privée afin de réduire les risques pour les usagers,

• en aval, créer une obligation de signalement des irrégularités dans le traitement des données (n° 22)

3. Promouvoir cette approche à l'international

- renégocier le Safe Harbor en se gardant la possibilité de le suspendre si les exigences des autorités européennes n'étaient pas entendues et tenir cette négociation distincte de celle du traité transatlantique (n° 23)

- adopter la disposition introduite par le Parlement européen dans la proposition de règlement encadrant le transfert ou la divulgation de données personnelles à la demande des autorités administratives ou juridictionnelles de pays tiers (n° 24)

- poursuivre les négociations en vue de l'adhésion de l'Union européenne à la Convention 108 afin d'asseoir la légitimité de l'Union à demander aux États-Unis d'y adhérer également (n° 25)

C. Construire une stratégie industrielle européenne pour maîtriser nos données et porter nos valeurs

1. Catalyser l'industrie européenne du numérique autour d'une ambition affichée

- réorienter le dispositif national de soutien à l'export sur le soutien à la R&D et à l'innovation pour les PME et ETI du secteur numérique (n° 26)

- faire émerger, à l'initiative de la France et de l'Allemagne, une véritable politique européenne de l'industrie numérique définissant les champs d'investissement à moyen et long terme, et mobilisant les instruments permettant de les atteindre (n° 27)

- inciter la Commission européenne à concilier les règles de concurrence européennes dans le secteur numérique avec une ambition de puissance industrielle favorisant l'émergence de « champions européens » (n° 28)

- mieux accompagner les TPE, PME et ETI françaises et européennes du secteur numérique en favorisant, à l'échelle nationale comme européenne, la coopération entre elles et en confortant leur accès à des solutions de financement adaptées (renforcement du capital-risque, facilitation de leur introduction en bourse...) (n° 29)

- utiliser davantage les instruments facilitant la mise en place de clusters européens dans les secteurs de l'Internet et du numérique (n° 30)

- obtenir la reconnaissance explicite par les États-Unis du système des indications géographiques avant la mise en place des noms de domaine se référant à de telles indications (n° 31)

- veiller à assortir toute libéralisation transatlantique de la circulation de ces données, d'exceptions justifiées par des objectifs de protection de la vie privée des personnes et de sécurité publique (n° 32)

- inciter la Commission européenne à assurer une convergence règlementaire garantissant des règles de jeu équitables (level playing field) pour les entreprises européennes du numérique, notamment eu égard à l'encadrement des aides d'État (n° 33)

- promouvoir une plus grande réciprocité dans l'accès aux marchés publics, pour ouvrir aux entreprises européennes des marchés dans les pays tiers (n° 34)

2. Exploiter les données européennes au service du « bien commun »

- promouvoir le big data comme un véritable enjeu industriel, source d'amélioration du bien commun, en définissant précisément des mécanismes raisonnables pour l'agrégation de données susceptibles de faire l'objet d'une valorisation économique (n° 35)

- poursuivre le développement de l' open data dans l'ensemble des collectivités publiques en standardisant les données délivrées et en tendant vers la gratuité de leur mise à disposition, tout en respectant les principes d'anonymat et de non-discrimination (n° 36)

3. Lancer deux projets industriels concrets : cloud européen sécurisé mais ouvert pour les données les plus sensibles, et système d'exploitation pour mobile

- favoriser le développement d'un système d'exploitation sur mobile européen constituant une alternative crédible aux principaux systèmes d'exploitation actuellement existants (n° 37)

- définir une classe de services labellisés « Secure cloud », faisant l'objet de cahiers des charges stricts et protecteurs, et promouvoir un acteur européen compétent pour émettre des certificats de sécurité correspondants (n° 38)

- mieux intégrer les solutions cloud dans la commande publique et mettre en place un espace de services cloud sécurisés à destination des administrations publiques (n° 39)

4. Exploiter les atouts européens en matière de sécurité sur l'Internet

- développer les compétences européennes en matière de chiffrement, notamment en facilitant l'utilisation de certificats (n° 40)

- promouvoir la diffusion du « .fr » et du « .eu » (n° 41)

5. Préparer la place de l'Europe dans l'Internet de demain

- veiller à la préservation du principe européen de non brevetabilité des logiciels (n° 42)

- encourager le développement des logiciels libres par leur intégration dans les marchés publics et par l'imposition de standards ouverts, à condition de développer les compétences pour l'utilisation de ces logiciels et standards (n° 43)

- conforter, au service d'objectifs industriels, la présence de l'Union européenne dans les grandes instances internationales de standardisation de l'Internet et développer les travaux menés par les organisations spécifiquement européennes en ce domaine (n° 44)

- veiller à la mise en place en Europe d'un système de normalisation des objets connectés afin de favoriser leur reconnaissance mutuelle, leur interconnexion et leur sécurité à l'encontre d'attaques extérieures (n° 45)

- renforcer la présence européenne dans les structures de standardisation des technologies industrielle recourant à l'Internet (réseaux intelligents, identité numérique...) et en faire un véritable enjeu économique (n° 46)

- préparer l'Internet du futur par une coordination plus poussée des initiatives et un soutien aux solutions mettant en avant la préservation de la confidentialité sur le réseau (n° 47)

D. Promouvoir une appropriation citoyenne de l'internet

1. Sensibiliser les citoyens aux libertés numériques et former à la programmation

- développer un enseignement ambitieux du numérique en garantissant sa place au coeur du socle commun des connaissances et des compétences et en formant progressivement l'ensemble des professeurs en fonction (n° 48)

2. Renforcer l'encadrement légal des activités de renseignement et en améliorer le contrôle politique

- inscrire dans la loi que l'avis de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS) est recueilli préalablement à la délivrance de toute autorisation d'interception de sécurité ou d'accès administratif aux données de connexion (n° 49)

- prévoir automatiquement la consultation de la CNCIS préalablement à la mise en oeuvre de tout moyen technique de collecte d'informations dont les services seraient dotés (n° 50)

- étendre explicitement le contrôle de la CNCIS à la proportionnalité des moyens mis en oeuvre par les services de renseignement afin d'empêcher une dérive des activités de renseignement vers une surveillance de masse (n° 51)

- créer, à partir de la CNCIS, une nouvelle autorité administrative indépendante - la Commission de contrôle des activités du renseignement -, chargée de délivrer les autorisations de mise en oeuvre des moyens de collecte d'informations après examen de leur légalité et de leur proportionnalité (n° 52)

- renforcer les pouvoirs d'investigation de la Délégation parlementaire au renseignement (DPR) en la dotant d'un pouvoir de contrôle sur pièces et sur place et en prévoyant l'assistance des services de la Commission de contrôle des activités de renseignement (n° 53)

- soumettre au contrôle de la Commission nationale de l'informatique et des libertés les fichiers du renseignement (n° 54)

- établir un cadre européen de contrôle des échanges d'informations entre services de renseignement (n° 55)

3. Structurer la gouvernance des questions numériques aux niveaux national et européen

- créer au sein du Conseil de l'Union européenne une formation dédiée au numérique pour dépasser les cloisonnements administratifs au service d'une ambition politique partagée (n° 56)

- recommander la création au sein du Parlement européen de commissions spéciales pour examiner les textes relatifs à Internet (n° 57)

- créer un comité interministériel du numérique auprès du Premier ministre pour conduire une stratégie d'ensemble cohérente (n° 58)

- créer au Sénat une commission du numérique dont les membres seraient également membres d'une commission permanente législative (n° 59)

- impulser la création d'un Conseil consultatif européen du numérique, véritable task force pour éclairer l'exécutif européen et fédérer l'écosystème européen dans un esprit d'équipe (n° 60)

4. Promouvoir le modèle européen de l'Internet par une véritable diplomatie numérique associée à une politique industrielle

- élaborer une véritable doctrine de diplomatie du numérique dotée de réels moyens, en s'appuyant sur un réseau d'expertise et sur une consultation de la société civile et des acteurs économiques (n° 61)

- appuyer la diplomatie numérique sur les instruments préexistants tels la politique européenne de voisinage ou la francophonie, afin de promouvoir à travers le monde le respect des valeurs européennes en ligne (n° 62)

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