TROISIÈME PARTIE : LE CONTRÔLE DE LA LOI RÉFORMANT ACTION LOGEMENT

S'agissant des habilitations à légiférer, le Sénat opère en principe, au titre de son contrôle annuel de l'application des lois, un contrôle limité au seul constat que les ordonnances ont été prises dans le délai imparti et que les projets de ratification des ordonnances ont été déposés sur le Bureau de l'une des deux assemblées.

La ratification des ordonnances prises en application de la loi n° 2016-719 du 1 er juin 2016 habilitant le Gouvernement à adopter des mesures relevant du domaine de la loi pour simplifier et rationaliser l'organisation de la collecte de la participation des employeurs à l'effort de construction et la distribution des emplois de cette participation étant inscrite à l'article 31 du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN), votre rapporteure, qui avait rapporté le projet de loi d'habilitation, a souhaité procéder à une première évaluation de la mise en oeuvre de la réforme d'Action Logement.

S'il n'est pas d'usage de contrôler que les mesures réglementaires rendues nécessaires par les dispositions des ordonnances ont été prises, un tel contrôle a néanmoins été opéré par votre rapporteure afin de mieux apprécier la mise en oeuvre de la réforme d'Action Logement ( Cf. annexe).

Comme votre rapporteure l'avait souligné dans son rapport n° 596 (2015-2016), la réforme d'Action Logement proposée s'inscrit dans le prolongement des efforts de rationalisation précédemment entrepris.

Elle notait alors que cette nouvelle organisation devait :

- permettre d'offrir un meilleur service aux entreprises, et donc aux salariés, quelle que soit la taille de l'entreprise ;

- favoriser une plus grande transparence dans les critères de distribution et la répartition effective de la collecte ;

- sur le plan financier, mettre fin à une concurrence inutile et coûteuse entre les collecteurs et baisser les coûts de fonctionnement grâce à la centralisation de la collecte ;

- donner à Action Logement une meilleure visibilité, les partenaires dans les territoires devant désormais avoir un seul interlocuteur régional clairement identifié avec lequel ils peuvent discuter et négocier des conventions régionales.

Lors de l'examen du projet de loi d'habilitation, deux points avaient plus particulièrement retenu l'attention du Sénat : les conséquences de la réforme d'Action Logement sur les organismes HLM et sur la redistribution de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) entre les territoires.

À l'issue de ses auditions, votre rapporteure a constaté une mise en place rapide des entités d'Action Logement, à l'exception du comité des partenaires. Elle a en outre constaté que la baisse des coûts de gestion ne sera pas immédiate et a appelé à être attentif à l'impact de la réforme sur la répartition de la PEEC sur les bailleurs sociaux et entre les territoires.

A. UNE MISE EN PLACE RAPIDE DES NOUVELLES ENTITÉS D'ACTION LOGEMENT, À L'EXCEPTION DU COMITÉ DES PARTENAIRES

1. Une organisation simplifiée mise en oeuvre dès le 1er janvier 2017
a) Des ordonnances prises rapidement

En application de la loi n° 2016-719 du 1 er juin 2016, le Gouvernement a adopté deux ordonnances afin de simplifier et rationaliser l'organisation de la collecte de la participation des employeurs à l'effort de construction et la distribution des emplois de cette participation (PEEC).

L'ordonnance n° 2016-1408 du 20 octobre 2016 relative à la réorganisation de la collecte de la participation des employeurs à l'effort de construction, prise en application de l'article 1 er de la loi du 1 er juin précitée, a été prise rapidement dans un délai de 4,5 mois 38 ( * ) , alors que huit mois étaient prévus, les partenaires sociaux d'Action Logement ayant fait part de leur souhait que la réforme entre en vigueur dès le 1 er janvier 2017 .

Le projet de loi de ratification de cette ordonnance a été déposé sur le Bureau du Sénat le 4 janvier 2017.

L'ordonnance n° 2017-52 du 19 janvier 2017 modifiant les objets de l'Association pour l'accès aux garanties locatives (APAGL) et de l'Association Foncière Logement (AFL), prise en application de l'article 2 de la loi du 1 er juin 2016 précitée, a été prise dans le délai de 7,5 mois .

Le projet de loi de ratification de cette ordonnance a été déposé sur le Bureau du Sénat le 5 avril 2017. Outre la ratification de l'ordonnance, il prévoit d'intégrer l'APAGL et l'AFL dans le « groupe Action Logement » et comporte plusieurs mesures de coordination.

b) Une nouvelle organisation d'Action Logement simplifiée pour plus de visibilité

L'ordonnance du 20 octobre 2016 sur la réforme d'Action Logement simplifie l'organisation d'Action Logement en remplaçant l'Union des entreprises et des salariés pour le logement (UESL) et les vingt et un collecteurs interprofessionnels du logement (CIL) par trois entités :

- Action Logement Groupe, association relevant de la loi du 1 er juillet 1901, dont les membres sont des représentants des employeurs et des salariés, structure faîtière chargée de conclure la convention quinquennale et de déterminer les orientations stratégiques du groupe et les conditions d'emplois de la PEEC ;

- Action Logement Services (ALS), société par actions simplifiée dont l'association précitée est l'associé unique, chargé d'assurer la collecte de la PEEC, de distribuer les emplois de la PEEC, de mener des concertations pour évaluer les besoins territoriaux. ALS est réputé agréé en qualité de société de financement ;

- Action Logement Immobilier (ALI), société par actions simplifiée unipersonnelle dont l'association précitée est l'associé unique, chargé de gérer les participations.

Source : Action Logement

Les articles L. 313-18 à L. 313-20-5 du code de la construction et de l'habitation, introduits par l'ordonnance précitée, précisent la composition et le fonctionnement de chacune de ces structures.

Il convient de noter que l'APAGL et l'AFL n'ont pas été intégrés dans le groupe Action Logement mais que l'article 31 du projet de loi ELAN prévoit d'y remédier afin, selon l'étude d'impact, « d'améliorer la cohérence du groupe Action Logement, de renforcer la gouvernance et de rendre plus efficace l'utilisation des fonds issus de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) dans le domaine de la sécurisation locative dans le parc privé et pour la mixité sociale ».

Les articles L. 313-17 à L. 313-17-4 du même code précisent les principes applicables aux entités du groupe, notamment le respect des principes de non-discrimination entre les bailleurs sociaux et de prévention des conflits d'intérêts.

Ainsi, les représentants des membres des conseils d'administration des différentes entités ne peuvent exercer simultanément un autre mandat ou fonction dans les autres entités du groupe Action Logement. Le conseil d'administration d'Action Logement Groupe a approuvé le 3 avril 2017 une charte de déontologie qui précise notamment que « les personnes relevant de la charte s'astreignent à éviter toute situation de conflit d'intérêts et s'engagent à mettre en oeuvre les dispositifs permettant de les prévenir ».

S'agissant de son organisation territoriale , Action Logement a mis en place douze comités régionaux (CRAL), répartis en fonction des nouvelles régions, et cinq comités territoriaux en outre-mer. Il convient de noter que leur existence n'est cependant pas reconnue au niveau législatif par l'ordonnance.

Enfin, les missions de l'Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS) sont adaptées afin de tenir compte de cette nouvelle organisation. Il est précisé que l'agence devra contrôler le respect de l'obligation de non-discrimination.

2. Le comité des partenaires : une structure toujours pas installée

Un comité des partenaires du logement social doit, en application de l'article L. 313-17-2 du code de la construction et de l'habitation, émettre des avis sur les orientations applicables aux emplois de la PEEC en matière de construction, de réhabilitation et d'acquisition des logements sociaux et au suivi de la distribution de ces emplois.

Le comité comprend des représentants du groupe Action Logement, de l'Union sociale pour l'habitat, des collectivités territoriales, de la fédération des entreprises publiques locales et des fédérations des organismes agréés en application de l'article L. 365-2 du code précité.

Or, force est de constater que ce comité censé jouer un rôle de vigie quant aux orientations et à la distribution de la PEEC entre les organismes et entre les territoires n'a toujours pas été mis en place plus d'un an après la mise en oeuvre de la réforme, faute d'adoption des décrets relatifs à sa composition et à son fonctionnement .

Selon la Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP), les modalités de désignation des membres du comité des partenaires doivent faire l'objet d'un décret simple et les autres mesures réglementaires d'un décret en Conseil d'État. Ces deux décrets ne pouvant être disjoints s'agissant des modalités de désignation et de fonctionnement du même comité, il a été décidé d'insérer l'ensemble de ces dispositions dans le projet de décret en Conseil d'État. Ces dispositions auraient toutefois été concertées avec l'ensemble des parties prenantes et finalisées fin 2017.

Selon Action Logement, un projet de décret prévoirait que le comité comprend trois collèges de cinq membres (un collège pour Action Logement, un collège pour les collectivités territoriales et un collège pour les bailleurs sociaux) désignés pour trois ans. Le nombre de membres par collège a semble-t-il donné lieu à discussion et ce nombre pourrait être porté in fine à huit membres. La présidence et la vice-présidence seraient assurées à tour de rôle chaque année par un collège, la présidence et la vice-présidence n'appartiendraient pas au même collège.


* 38 Pour mémoire, le délai moyen pris par le Gouvernement pour déposer une ordonnance dans ce délai d'habilitation est de 6,6 mois ( cf. infra l'étude du recours aux ordonnances établie par la commission des affaires économiques).

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