DEUXIÈME PARTIE
FACE À CETTE SITUATION DÉGRADÉE, LA MISE EN PLACE D'UN DISPOSITIF INNOVANT ET EFFICACE : LES COROM

I. LES COROM : UNE APPROCHE GLOBALE QUI PERMET D'ACCOMPAGNER LES COMMUNES LES PLUS EN DIFFICULTÉ

Pour aider les communes des DROM présentant des difficultés financières importantes, la loi de finances initiale pour 2021 a introduit par amendement les contrats de redressement outre-mer (COROM). Ce nouveau dispositif résulte des constats du rapport « Soutenir les communes des départements et régions d'outre-mer : pour un accompagnement en responsabilité » du député Jean-René Cazeneuve et du sénateur Georges Patient publié en décembre 2019 qui relevait que sur les 129 communes des DROM un tiers avait des délais de paiement supérieurs à 30 jours et plus de la moitié étaient inscrites dans le réseau d'alerte des finances publiques.

Les critères d'éligibilité, modalités de signature et de suivi des contrats sont définis dans une circulaire conjointe des ministères de l'économie, des finances et de la relance, des collectivités territoriales et de la ruralité et des outre-mer du 2 février 2021.

A. OBJECTIFS ET FONCTIONNEMENT DES COROM

1. Les objectifs : un accompagnement individualisé visant le redressement financier des communes contractantes

Les contrats de redressement outre-mer (COROM) visent à apporter un soutien spécifique de l'État aux communes ultramarines souhaitant assainir leur situation financière et réduire les délais de paiement de leurs fournisseurs locaux. Les communes qui signent un COROM s'engagent, en contrepartie d'un soutien financier de l'État, à redresser leur situation financière.

Ce dispositif d'accompagnement est donc basé sur :

- un effort de diagnostic et d'ingénierie préalable qui doit être mené au niveau local avec l'appui de l'agence française de développement (AFD) ;

- un accompagnement afin de mener certaines réformes structurelles indispensables concernant par exemple la fiscalité (meilleure identification des bases), la maitrise de certaines dépenses de fonctionnement, l'amélioration de la gestion de la chaîne de la dépense ou de la sincérité des comptes ;

- la restauration des marges de manoeuvre en section de fonctionnement, notamment sur la maitrise des frais de personnel, qui reste un enjeu majeur dans les collectivités ultramarines ;

- une aide de l'État au processus de redressement, apportée en fonction des efforts de la collectivité ;

- une perspective pluriannuelle afin de redresser la situation financière de la collectivité contractante.

2. Les modalités de sélection et de contractualisation : un dispositif ouvert aux seules communes à ce stade

Conformément aux conclusions du rapport Patient-Cazeneuve, sont susceptibles de bénéficier du dispositif les communes en grave difficulté financière.

Le niveau de difficulté financière est mesuré, dans la configuration actuelle du dispositif, à l'aune de deux critères :

- la mise en place de procédures de contrôle budgétaire et de règlement d'office du budget par les préfets et les chambres régionales des comptes ;

- un retour à l'équilibre ne pouvant être raisonnablement envisagé que sur plusieurs exercices.

a) Une sélection biaisée par l'équilibre géographique

Afin d'assurer un équilibre entre les territoires, le dispositif doit, selon la circulaire du 2 février 2021, être appliqué à au moins une commune par DROM et chacun ne peut pas compter plus de 3 communes au sein du dispositif pour 2021.

Dans ce contexte, et au regard des crédits ouverts en LFI 2021 à hauteur de 30 millions d'euros, la sélection des communes a nécessairement été limitée et répartie sur l'ensemble des DROM.

Sur la base des propositions motivées transmises par les préfets, la sélection définitive des communes bénéficiaires a été opérée par une décision du ministre des outre-mer après avis d'un groupe interministériel composé de la DGOM, la DGCL et la DGFIP.

9 communes ont à ce jour signé un contrat de redressement : Sada à Mayotte, Saint-Benoit à la Réunion, Cayenne et Iracoubo en Guyane, Pointe-à-Pitre, Sainte-Rose et Basse-Terre en Guadeloupe et Fort-de-France et Saint-Pierre à la Martinique.

b) Le diagnostic, préalable nécessaire à la contractualisation mais dont la fiabilité doit largement être nuancée en raison des lacunes des enregistrements comptables

La signature d'un contrat d'accompagnement est subordonnée à l'établissement d'un diagnostic partagé sur l'état des dépenses et des recettes sur l'exercice en cours et s'inscrit dans une prospective à trois ans.

La trajectoire présentée par le maire au moment de sa candidature doit indiquer des montants cibles précis, en cohérence avec les préconisations de la chambre régionale des comptes. Elle est fondée sur une base de départ fixée aux comptes de gestion 2019.

L'ensemble des budgets de la collectivité (budgets annexes, et le cas échéant, les liens avec les organismes périphériques) doit être pris en compte.

La trajectoire pluriannuelle de redressement présentée par l'ordonnateur est ensuite affinée avec le préfet en lien, si nécessaire, avec l'Agence française de développement (AFD), les services de l'État, voire de la chambre régionale des comptes, pour établir une évolution pluriannuelle réaliste de la section de fonctionnement, avec une explication des sous-jacents relatifs aux marges de progression retenues, notamment en matière de gestion des ressources humaines.

Les objectifs relatifs à l'amélioration de la qualité comptable doivent également être présentés.

Les diagnostics, s'ils sont le préalable nécessaire à l'établissement d'une trajectoire de redressement réaliste, souffrent cependant de nombreuses lacunes en raison des problèmes récurrents de fiabilité comptable constatés au sein des communes et plus particulièrement celles des DROM.

En effet, les inventaires physiques sont incomplets et les recollements avec l'état de l'actif pas toujours réalisés. Il en découle des amortissements peu fiables. Sont également régulièrement constatées des absences de provisions pour risques et charges. Enfin, les charges à payer sont régulièrement minorées en raison d'un phénomène de « factures dans le tiroir ».

3. Le suivi des contrats : un double niveau qui permet une analyse la plus objective possible

Le suivi des contrats est assuré au niveau national et au niveau local.

Le comité de suivi national, qui se réunit au moins deux fois par an, est composé des membres de la task force ministérielle et de deux représentants de l'Agence française de développement.

Ce comité est présidé par le ministre en charge des outre-mer ou son représentant. Il constate les trajectoires financières et l'exécution budgétaire de l'exercice au regard des objectifs du contrat et peut prendre toutes les mesures nécessaires au regard des observations formulées.

Il décide si les subventions exceptionnelles prévues par les contrats peuvent être versées ou si elles doivent éventuellement être suspendues, au vu du respect des engagements de chaque collectivité.

Le cas échéant, il peut proposer la dénonciation du contrat au ministre des outre-mer.

Le comité de suivi local se réunit au moins trois fois par an sous la présidence du représentant de l'État. Ce comité est composé, en plus des agents de la préfecture, d'un ou deux représentants de l'exécutif local, de l'expert assurant l'assistance technique, d'un représentant de la DRFiP et du directeur local de l'Agence française de développement et du représentant de toute entité dont la présence paraîtrait opportune (ex : chambre régionale des comptes).

Ce comité valide et suit la réalisation des trajectoires financières et des actions entreprises par la collectivité pour l'atteinte des objectifs du contrat, sur la base d'indicateurs de résultats intermédiaires prédéfinis. Le cas échéant, il formule des recommandations d'actions correctrices ou d'amélioration des procédures. Le comité de suivi local joue enfin un rôle d'alerte des autorités nationales en cas d'écarts notables entre les résultats attendus et les indicateurs intermédiaires produits à l'occasion de ce comité.

Cette procédure à double niveau crédibilise le caractère « contractuel » des COROM et permet d'objectiver et de légitimer les décisions prises. Par ailleurs, la task-force permet, dans de nombreux cas, de trouver des positions communes conciliant les approches des différents ministères.