N° 832

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 4 juillet 2023

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le verdissement des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales,

Par MM. Charles GUENÉ et Claude RAYNAL,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

L'ESSENTIEL

MM. Charles Guené et Claude Raynal, rapporteurs spéciaux des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ont présenté le mardi 4 juillet 2023 les conclusions de leur contrôle budgétaire relatif au verdissement des dotations d'investissement aux collectivités territoriales.

I. FACE À L'ÉTAT DU PARC IMMOBILIER DES COLLECTIVITÉS, AU CONTEXTE D'INFLATION ÉNERGÉTIQUE ET AUX ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX, LE VERDISSEMENT DES DOTATIONS DEVIENT UNE NÉCESSITÉ

A. UN PARC IMMOBILIER ÉNERGIVORE ET UN ENJEU DE MAITRISE DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT DES COLLECTIVITÉS QUI NÉCESSITENT UN ACCROISSEMENT DES INVESTISSEMENTS ENVIRONNEMENTAUX

Majoritairement construit avant 1975, l'immobilier appartenant aux collectivités est relativement ancien, mal isolé et, de fait, énergivore. Il représente d'ailleurs un tiers des volumes de CO2 émis par les bâtiments au niveau national, 84 % des émissions des seules collectivités et 76 % de leur consommation d'énergie.

Or, dans un contexte de hausse des prix de l'énergie, la maitrise de la consommation énergétique est devenue un enjeu majeur pour les collectivités pour lesquelles la hausse des dépenses énergétiques est estimée, entre 2022 et 2023, à une fourchette comprise entre 30 % et 300 % selon les associations d'élus.

De surcroit, les collectivités territoriales sont assujetties aux obligations d'actions d'économies d'énergie dans les bâtiments tertiaires qui visent une réduction de la consommation d'énergie finale pour l'ensemble des bâtiments d'au moins 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050, par rapport à 2010. Par ailleurs, conformément aux dispositions de l'article L 222-1 B du code de l'environnement, les actions menées par les collectivités ne peuvent conduire ni à une augmentation du recours aux énergies non renouvelables, ni à une augmentation des émissions de gaz à effet de serre.

Dans ce contexte, une accélération de leurs investissements en faveur de la transition écologique est indispensable.

Selon l'analyse effectuée par l'Institut I4CE, si l'on s'en tient aux seuls investissements nécessaires pour atteindre les objectifs de la stratégie nationale bas carbone, le besoin d'intervention des collectivités territoriales peut être évalué à 12 milliards d'euros par an alors que leurs investissements annuels s'élèvent actuellement à 5,5 milliards d'euros, ce qui représente un investissement additionnel de 6,5 milliards d'euros.

Écart entre les investissements actuels et les besoins d'investissement des collectivités pour atteindre les objectifs de la SNBC d'ici 2030

(en milliards d'euros)

Source : institut I4CE

Il en résulte que les montants d'investissement, en tenant compte de l'ensemble des actions des collectivités ayant un impact sur l'environnement au-delà des seuls investissements « climat », pourraient s'établir bien au-delà des 12 milliards d'euros annuels.

Les investissements à venir, même si de nombreuses actions ont déjà été entreprises, devront donc porter sur le bâti scolaire, les bâtiments administratifs, les locaux à usage de service public (gymnases, bibliothèques, piscines...), l'éclairage public et les systèmes de réseaux (eaux, chauffages, traitements des déchets...), les transports publics (développement des voies de mobilités douces, électrification des transports en commun...) ou encore sur la renaturalisation des zones urbaines.

Toutefois, l'incertitude qui pèse actuellement sur les finances locales et l'absence de prévisibilité sur les ressources et les dépenses des collectivités, couplées à un renchérissement du recours à l'emprunt dans un contexte de hausse des taux d'intérêt, fait peser un risque de renoncement à certains investissements en faveur de la transition écologique.

B. LE DÉVELOPPEMENT NOTABLE DES DOTATIONS « VERTES » VISANT À ACCOMPAGNER LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DANS LEUR TRANSITION ÉCOLOGIQUE

Pour faire face au « mur d'investissement » qui attend les collectivités pour mettre en place leur transition écologique, le Gouvernement a renforcé les dotations d'investissement qui leur sont allouées :

- en encourageant l'emploi des dotations classiques d'investissements pour des projets environnementaux ;

- en créant de nouvelles dotations spécifiquement dédiées aux investissements environnementaux.

Ainsi, concernant les dotations classiques d'investissement, en 2021, la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) a permis de financer 3 524 projets environnementaux pour un montant total de 156 millions d'euros. La dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), pour sa part, a permis de financer 918 projets environnementaux pour un montant total de 89 millions d'euros.

Part des projets environnementaux dans les dotations d'investissement « classiques » entre 2019 et 2021

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des données d'exécution des dotations d'investissement fournies par la DGCL

Cependant, en l'état actuel de présentation et de classification des données et des priorités des dotations, ce chiffrage est peu fiable et il est impossible de connaitre la part de la DSIL (y compris DSIL exceptionnelle) et de la DETR concourant réellement au financement de projets « environnementaux ».

Or, au regard des enjeux de transition écologique, il parait important de pouvoir fiabiliser la connaissance des investissements à portée environnementale.

Par ailleurs, en sus des dotations classiques dont certaines priorités sont orientées sur la rénovation énergétique et/ou la transition écologique, d'autres dotations ont été créées, à compter de 2020, avec des objectifs uniquement axés sur les enjeux environnementaux : la dotation de rénovation thermique (DRT) d'un milliard d'euros, la dotation régionale d'investissement (DRI) de 600 millions d'euros, orientée sur les projets en faveur de la rénovation thermique des bâtiments publics et des mobilités du quotidien, et enfin, le fonds vert de deux milliards d'euros.

Cependant, il convient de souligner que la DRT et la DRI n'ont pas vocation à être pérennisées. Quant au fonds vert, si des annonces ont récemment été faites sur sa prolongation, la durée et les montants au-delà de 2023 n'ont pas encore été arbitrés.

Enfin, la dotation de biodiversité, créée en 2019, et plusieurs fois étendue depuis, vise à soutenir la production d'aménités rurales par les collectivités territoriales. Contrairement aux trois autres dotations spécifiquement consacrées aux enjeux environnementaux, il s'agit d'une dotation pérenne.

II. TROP COMPLEXE ET TROP CENTRÉ SUR LES SEULES DOTATIONS D'INVESTISSEMENT, LE FINANCEMENT DES PROJETS ENVIRONNEMENTAUX DOIT ÊTRE REPENSÉ

A. UN FOISONNEMENT DES DOTATIONS QUI REND LE SYSTÈME COMPLEXE ET LAISSE PEU DE PLACE À LA CONSULTATION DES ÉLUS

En sus des dotations d'investissement en provenance de l'État, les collectivités peuvent percevoir d'autres aides nationales en provenance de plusieurs opérateurs de l'État comme l'agence nationale de rénovation urbaine (Anru), l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), l'Ademe ou encore la Banque des territoires mais également des aides européennes.

Ce maquis contribue largement à la complexité du système de financement de la transition écologique auquel se heurtent les collectivités, notamment les plus petites.

Par ailleurs, force est de constater que l'accès même à ces dotations, malgré les démarches mises en oeuvre par le Gouvernement pour simplifier les demandes, demeure également trop complexe à plusieurs titres. Ainsi, des calendriers de demande de subventions non concordants, des fiches techniques à remplir parfois jugées « ésotériques » par les élus locaux, des critères d'éligibilité trop nombreux et peu transparents ainsi qu'une faible consultation des élus sur les modalités d'attribution, ont pu représenter des obstacles aux investissements en faveur de la transition écologique.

B. UN FINANCEMENT DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE DES COLLECTIVITÉS À REPENSER

Si les dotations budgétaires sont un outil indispensable à la transition écologique des collectivités, elles ne peuvent être un outil unique pour répondre à l'ensemble des besoins d'investissement et aux enjeux environnementaux.

Dès lors, c'est l'ensemble du financement de la transition écologique des collectivités qui doit être repensé avec pour priorité une visibilité pluriannuelle, puisque ces investissements lourds ne peuvent s'inscrire que dans une temporalité longue allant souvent au-delà de la durée d'un mandat local.

Or, à ce jour, les niveaux des dotations d'investissement sont fixés annuellement en loi de finances sans certitude pour les années postérieures à N+ 1. Comme évoqué par de nombreux élus lors des auditions menées par les rapporteurs spéciaux, cette absence de prévisibilité des financements apparait comme un obstacle au lancement de certains investissements.

Il semble donc nécessaire :

- d'une part, de prévoir une programmation pluriannuelle des investissements locaux et de leur financement, notamment via les contrats de relance et de transition écologique (CRTE) ;

- d'autre part de pouvoir envisager l'endettement des collectivités sous un nouveau prisme ;

- et enfin, de mener une réflexion d'ensemble sur les outils favorisant le financement de la transition écologique. À cet égard, une réforme du FCTVA ou de la DGF peut être envisagée de même que des modifications concernant les modalités d'amortissement ou la fiscalité locale.

Dès lors, si la hausse des dotations d'investissement est indispensable et doit se poursuivre pour accompagner les collectivités dans leur transition écologique, elle ne peut être envisagée comme un moyen unique. Dans ce domaine, l'accompagnement de l'État ne peut se limiter au seul aspect budgétaire.

III. DES FREINS QUI DOIVENT ÊTRE LEVÉS POUR RÉUSSIR PLEINEMENT LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE DES COLLECTIVITÉS

A. UN VERDISSEMENT ESSENTIELLEMENT ORIENTÉ VERS LA RÉNOVATION THERMIQUE QUI DOIT SE DIVERSIFIER POUR RÉPONDRE À L'ENSEMBLE DES ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX

1. Une priorité à la rénovation thermique

En premier lieu, la dotation RT (rénovation thermique), comme son nom l'indique, est exclusivement centrée sur la rénovation thermique des bâtiments soit un montant total alloué à cet axe écologique de 950 millions d'euros.

Par ailleurs, en 2021, sur les 600 millions d'euros d'AE ouverts au titre de la DRI, 420 millions d'euros ont également été orientés sur la rénovation thermique des bâtiments (soit 268 projets sur les 348 financés).

Enfin, concernant le fonds vert, la répartition prévisionnelle des 2 milliards d'euros affiche une affectation de 707 millions d'euros à la performance environnementale dont essentiellement de la rénovation énergétique bâtimentaire.

Pour la DETR, la DSIL et la DSIL exceptionnelle il est plus difficile de mesurer la part des dotations ayant financé des projets de rénovation énergétique. Cependant, sur les 402,5 millions d'euros alloués à des projets environnementaux en 2021, l'analyse des libellés des projets tend à démontrer que la rénovation énergétique des bâtiments est majoritaire dans les projets financés.

La structure actuelle du suivi de l'exécution des dotations montre donc actuellement un biais en faveur de la rénovation thermique qu'il conviendrait de corriger dans les années à venir.

Or, la transition écologique des collectivités territoriales ne peut se résumer à la seule rénovation thermique des bâtiments. En effet, les besoins d'investissements sont également nombreux dans d'autres domaines comme le traitement des déchets et eaux usées, la revégétalisation et reforestation, la protection de la faune et de la flore ou encore le développement des énergies renouvelables.

2. Vers d'autres priorités avec la dotation « biodiversité » et le fonds vert ?

La dotation de biodiversité et le fonds vert permettent de sortir quelque peu du prisme de l'investissement environnemental sous le seul angle de la rénovation thermique mais présentent des écueils.

En effet, la dotation de biodiversité vise à soutenir la production d'aménités rurales1(*) par les collectivités. Il parait cependant nécessaire de continuer la montée en puissance de cette dotation pour la porter à un montant à la hauteur des enjeux notamment en élargissant le périmètre des villes éligibles dans la mesure où, en 2023, seules 6300 communes peuvent en bénéficier.

Par ailleurs, si le fonds vert semble, en première intention, plus diversifié dans les projets qu'il vise à financer, les rapporteurs spéciaux appellent à la vigilance concernant l'exécution de ces crédits. En effet, selon le principe de fongibilité des crédits du fonds vert, des redéploiements entre mesures et entre axes pourront être effectués. Il en résulte que si cette fongibilité est une garantie pour une consommation intégrale et rapide des crédits elle fait courir le risque, déjà identifié pour les dotations classiques, d'un financement essentiellement orienté vers la rénovation thermique bâtimentaire ce que semble d'ailleurs déjà démontrer l'analyse des premiers dossiers déposés.

Ce premier constat confirme les observations des élus locaux selon lesquelles les collectivités, notamment les plus petites ayant peu de ressources en ingénierie, présentent essentiellement des dossiers « faciles » et rapides à élaborer ne nécessitant que peu d'études techniques approfondies.

Répartition des dossiers déposés par mesure

Source : direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN)

B. UNE CONNAISSANCE ENCORE PARCELLAIRE PAR LES COLLECTIVITÉS DE LEUR PATRIMOINE IMMOBILIER

L'évaluation des investissements à réaliser sur l'immobilier local et des coûts y afférents ne peut être réalisée de manière fiable que si les collectivités ont une connaissance précise de leur parc immobilier.

Or, l'inventaire physique qui permet le recensement complet des biens et leur suivi est parfois encore inexistant. Il est très souvent partiel (uniquement sur certaines catégories de biens), succinct sous la forme d'une simple liste et insuffisamment renseigné notamment concernant les surfaces, l'ancienneté ou encore la localisation exacte des biens.

Les états de l'actif des collectivités, quant à eux, sont également régulièrement défaillants et erronés en raison de la non comptabilisation de certaines écritures comptables.

Type d'informations contenues dans les inventaires physiques des collectivités

Source : Rapport sur le patrimoine immobilier des collectivités - 2016

Ainsi, en l'absence de connaissance précise du parc immobilier et de son état, la moitié seulement des communes et des EPCI est dotée d'un plan pluriannuel d'investissement (PPI). Ce ratio dépasse les 80 % pour les départements et les régions et très peu de collectivités sont dotées de schéma directeur du patrimoine foncier et immobilier.

De surcroit, quand ces documents existent, ils sont souvent axés sur le bâti et les terrains sans inclure la voirie et les réseaux.

C. UNE MESURE DE L'IMPACT DES INVESTISSEMENTS ENVIRONNEMENTAUX À AMÉLIORER POUR S'ASSURER DE L'EFFICACITÉ DE LA DÉPENSE PUBLIQUE

Pour les dotations classiques, aucun contrôle ex post n'est réalisé pour mesurer l'impact environnemental des investissements réalisés.

Pour les projets financés par la dotation RT pour lesquels des pièces justifiant ex ante l'impact attendu sur l'environnement sont demandées, les contrôles ex post se limitent cependant à un suivi de l'avancement des projets.

Enfin, concernant le fonds vert, comme pour la dotation RT, des indicateurs existent sur les objectifs des projets déposés mais ne consistent pas en une mesure ex post des résultats. Toutefois, le projet annuel de performance précise, qu'« en parallèle de la mise en oeuvre du fonds, un travail est engagé par le ministère pour développer un indicateur de mesure ex post de l'impact des projets financés sur l'énergie finale consommée. Celui-ci pourra être mis en oeuvre par échantillonnage sur une sélection aléatoire de projets ».

Face à un manque de moyens, la mise en oeuvre de contrôles ex post est complexe à mettre en oeuvre et ne présente pas de caractère prioritaire.

Cependant, si le problème des moyens est réel, il ne doit pas faire obstacle à la mise en place d'un minimum de contrôles.

En effet, les rapporteurs spéciaux estiment qu'il n'est pas souhaitable d'engager plusieurs milliards d'euros de fonds publics, notamment si le fonds vert est prolongé, sans pouvoir en mesurer l'efficacité.

LES RECOMMANDATIONS
DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Recommandation n° 1 : se doter d'outils de suivi plus précis permettant une meilleure analyse et connaissance des montants des dotations classiques d'investissement alloués à des projets totalement ou partiellement dédiés à la transition écologique (DGCL).

Recommandation n° 2 : établir une liste unique des pièces justificatives à l'appui des demandes de dotations d'investissement afin de faciliter la constitution des dossiers par les collectivités et leur transfert vers d'autres dotations (DGCL).

Recommandation n° 3 : développer un volet financier pluriannuel aux CRTE (État, préfectures, collectivités).

Recommandation n° 4 : isoler dans les ratios d'endettement la part de la dette permettant de financer des investissements en faveur de la transition écologique (DGFIP).

Recommandation n° 5 : mettre en place une consultation des élus locaux afin de développer un document unique et formalisé permettant de classer les dépenses d'investissement des collectivités comme neutres, favorables, mixtes ou défavorables à l'environnement (DGCL, DGFIP).

Recommandation n° 6 : mettre en place une consultation générale des élus locaux et des administrations sur le financement de la transition écologique des collectivités englobant l'ensemble des aspects budgétaires, comptables et fiscaux (SGPE).

Recommandation n° 7 : poursuivre la montée en puissance de la dotation biodiversité notamment en élargissant le périmètre des communes éligibles (DGCL, direction du budget).

Recommandation n° 8 : modifier la circulaire du 14 décembre 2022 afin que chacun des trois axes d'intervention représente, en exécution, au moins 20 % des crédits du fonds vert et que chaque mesure fasse l'objet d'au moins cinq projets (DGALN).

Recommandation n° 9 : pour les dotations classiques d'investissement, rendre obligatoire, à l'appui de la demande de subvention, les pièces justificatives relatives à l'impact environnemental du projet quand ce dernier est fléché sur une priorité « environnement / transition écologique » (DGCL).

Recommandation n° 10 : mettre en place des contrôles a posteriori, sous forme d'échantillons, afin de mesurer l'impact réel des investissements réalisés à partir des dotations d'investissement finançant des projets de transition écologique (DGCL, DGALN).

PREMIÈRE PARTIE
FACE À L'ÉTAT DU PARC IMMOBILIER DES COLLECTIVITÉS, AU CONTEXTE D'INFLATION ÉNERGÉTIQUE ET AUX ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX, LE VERDISSEMENT DES DOTATIONS DEVIENT UNE NÉCESSITÉ

I. UN PARC IMMOBILIER ÉNERGIVORE ET UN ENJEU DE MAITRISE DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT DES COLLECTIVITÉS QUI NÉCESSITENT UN ACCROISSEMENT DES INVESTISSEMENTS ENVIRONNEMENTAUX

A. UN PARC IMMOBILIER ÉNERGIVORE ET DES OBLIGATIONS DE RÉDUCTION DE CONSOMMATION ÉNERGÉTIQUE...

1. Le parc immobilier des collectivités pèse lourdement sur leurs dépenses
a) Entre 2012 et 2017, des consommations énergétiques en hausse essentiellement du fait d'un patrimoine immobilier ancien et mal isolé...

D'après les documents publiés par l'ADEME et la Banque des territoires, les collectivités territoriales détiennent un patrimoine bâti constitué de plus de 225 000 bâtiments pour une surface totale d'environ 280 millions de mètres carrés, ce qui représente 27 % du parc national tertiaire.

Ce parc immobilier est caractérisé par une grande diversité dans sa structure et les fonctions des bâtiments : bâtiments administratifs, établissements scolaires, équipements sportifs, socio-culturels... Les bâtiments scolaires représentent à eux seuls 50 % du total du parc.

Majoritairement construit avant 1975, l'immobilier appartenant aux collectivités est donc relativement ancien, mal isolé et, de fait, énergivore puisqu'il représente un tiers des volumes de CO2 émis par les bâtiments au niveau national et 84 % des émissions des seules collectivités contre 11 % pour les carburants et 5 % pour l'éclairage public.

Dans ce contexte, 76 % de la consommation d'énergie des collectivités territoriales sont dus aux bâtiments, le delta résultant de l'éclairage public (11 %), de la gestion des déchets et de l'eau (8 %) et des carburants (6 %).

Pour autant, l'administration centrale, et les collectivités elles-mêmes, ne disposent pas de documents consolidés ou de bases de données permettant d'avoir une vision complète de l'état du patrimoine immobilier des collectivités, son niveau de performance énergétique et les niveaux de consommation des bâtiments publics locaux.

Des études ponctuelles (rapports de mission, enquêtes...) permettent de collecter des informations et données comme le rapport de François Demarcq sur la rénovation énergétique des bâtiments scolaires (2020)2(*) ou l'enquête énergie et patrimoine communal menée tous les cinq ans par l'ADEME.

Il en résulte que les données disponibles sont soit parcellaires soit anciennes. Les dernières données complètes ressortent de l'enquête quinquennale réalisée par l'ADEME pour la période 2012/2017 et publiée en 2019.

Au cours de cette période, les consommations énergétiques des collectivités ont progressé de 4 %.

Cette évolution du niveau de consommation s'explique essentiellement par la consommation énergétique des bâtiments qui a enregistré une hausse de 13 % passant de 36 térawattheures (TWh) en 2012 à 37,65 TWh en 2017 alors que celles liées à l' éclairage public et aux transports ont reculé respectivement de 30 % et 16 %.

Toutefois, les facteurs de cette tendance à la hausse sont multiples sans qu'il soit possible de chiffrer leur part respective : augmentation des surfaces chauffées, hausse des besoins liés notamment à la bureautique, développement de certains services publics...

Par ailleurs, il convient de souligner que cette hausse globale du niveau de consommation des collectivités résulte d'une baisse de la consommation des communes et d'une hausse plus importante de celles des EPCI sous l'effet combiné d'une amélioration de l'efficacité énergétique des communes, grâce aux actions mises en place concernant l'isolation et l'éclairage public et de la prise de compétence de certains groupements à fiscalité propre (GFP) ou syndicats, qui se substituent aux communes.

Il convient cependant de souligner que les départements et régions ne faisaient pas partie du périmètre de l'enquête ce qui exclut, notamment, le bâti des collèges et lycées.

b) ...mais des dépenses en légère diminution en raison, sur la période 2012-2017, d'une baisse des prix de l'énergie

Si les consommations énergétiques des collectivités ont augmenté durant la période 2012-2017, les dépenses énergétiques sur cette même période ont enregistré une baisse de 200 millions d'euros, passant de 3,8 milliards d'euros à 3,6 milliards d'euros dans un contexte où les prix globaux de l'énergie étaient en baisse, résultat d'un solde entre la diminution des prix des carburants et du fioul domestique (- 12 % et - 18 %, respectivement) et de la hausse relativement modérée du prix de l'électricité.

Évolution de la consommation et des dépenses énergétiques des collectivités
entre 2012 et 2017

Source : rapport « Les dépenses énergétiques des collectivités » - état des lieux en 2017 - ADEME

c) Une consommation énergétique des collectivités territoriales difficile à chiffrer à compter de 2018 en l'absence de données

À compter de 2018, les investissements en faveur des économies d'énergies se sont multipliés au sein des collectivités. Ils ont essentiellement porté sur l'amélioration de l'éclairage public, l'isolation des fenêtres et la mise en place d'éclairages intérieurs plus performants.

Il n'en demeure pas moins que malgré les travaux réalisés, les bâtiments des collectivités demeurent particulièrement énergivores en l'absence d'investissements substantiels d'isolation des murs et plafonds et de remplacement d'anciens bâtiments par des bâtiments à haute densité énergétique.

De sorte que, même si les actions entreprises ces dernières années ont permis de réduire en partie la consommation des collectivités, l'évolution démographique nécessitant plus de bâtiments pour répondre aux besoins de services publics (notamment pour la scolarisation des élèves) ainsi que le développement de certains services publics et notamment des piscines municipales et intercommunales, a eu des conséquences sur le niveau de consommation, à la baisse comme à la hausse, des collectivités territoriales sans qu'il soit possible, à ce stade, de disposer de chiffres consolidés sur leur niveau de consommation énergétique depuis 2018.

2. Des obligations de réduction de consommation énergétique couplées à un diagnostic énergétique obligatoire pour les collectivités
a) Des objectifs chiffrés de baisse de consommation d'énergie

Les collectivités territoriales sont assujetties aux obligations d'actions d'économie d'énergie dans les bâtiments tertiaires (dispositif éco-énergie tertiaire) dans les conditions prévues par les articles L. 174-1 et R. 174-22 à R. 174-32 du code de la construction et de l'habitation (CCH), au même titre que tous les propriétaires et preneurs à bail des bâtiments à usage tertiaire.

Ainsi, l'article L.174-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit que des actions de réduction de la consommation d'énergie finale doivent être mises en oeuvre dans les bâtiments, parties de bâtiments ou ensembles de bâtiments existants à usage tertiaire, afin de parvenir à une réduction de la consommation d'énergie finale pour l'ensemble des bâtiments soumis à l'obligation d'au moins 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050, par rapport à 2010.

Ces actions s'inscrivent en cohérence avec les objectifs fixés par la stratégie nationale de développement à faible intensité de carbone mentionnée à l'article L. 222-1 B du code de l'environnement qui précise dans son III que « l'État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics respectifs prennent en compte la stratégie bas-carbone dans leurs documents de planification et de programmation qui ont des incidences significatives sur les émissions de gaz à effet de serre ». De surcroit, les actions menées par les collectivités ne peuvent conduire ni à une augmentation du recours aux énergies non renouvelables, ni à une augmentation des émissions de gaz à effet de serre.

Enfin, dans le cadre de la révision de la directive européenne sur l'efficacité énergétique (DEE), les collectivités locales pourraient se voir imposer des exigences complémentaires, concernant l'exemplarité de la rénovation de leurs bâtiments publics. En effet, la France devrait, a priori, être soumise à un objectif annuel de rénovation de 3 % des surfaces de bâtiments publics au niveau NZEB (Near Zero Energy Building) ce qui signifie un objectif de bâtiments à consommation énergétique nette nulle, soit une quantité totale d'énergie utilisée par le bâtiment, calculée sur une base annuelle, à peu près égale à la quantité d'énergie renouvelable créée sur le site.

Le contenu de la révision de cette directive reste toutefois en discussion à ce stade au niveau du Parlement européen.

b) Une obligation partielle de diagnostic de performance énergétique

Un diagnostic de performance énergétique (DPE) doit également être obligatoirement réalisé par les collectivités territoriales dans certains établissements recevant du public (ERP). Il renseigne sur la performance énergétique d'un bâtiment par une estimation de sa consommation énergétique et son taux d'émission de gaz à effet de serre.

Le champ d'application du DPE

Cette obligation concerne les ERP de la première à la quatrième catégorie de plus de 250 m², en application des articles L. 126-30 et R. 126-18 du CCH.

Selon une échelle notée de A à G, le DPE mentionne le classement du bâtiment pour les consommations en énergie primaire et les émissions de gaz à effet de serre. Il doit être affiché de manière visible pour le public, à proximité de l'entrée principale ou du point d'accueil, pendant toute sa durée de validité de 10 ans.

Cependant, les bâtiments n'accueillant pas de public et les bâtiments suivants ne sont pas concernés par cette obligation :

- constructions provisoires prévues pour une durée d'utilisation de moins de 2 ans ;

- bâtiments indépendants d'une surface de plancher : unité de calcul des surfaces des constructions servant à la délivrance des autorisations d'urbanisme inférieure à 50 m² ;

- monuments historiques ;

- bâtiments servant de lieux de culte ;

- bâtiments non chauffés ou pour lesquels les seuls équipements fixes de chauffage sont des cheminées à foyer ouvert, et ne disposant pas de dispositif de refroidissement des locaux.

Source : commission des finances du Sénat

Les exceptions à l'obligation de réaliser un DPE sont donc notables et concernent potentiellement un nombre important de bâtiments. À titre d'exemple, depuis la création en 1837 de la commission des monuments historiques, plus de 45 991 immeubles ont été classés ou inscrits au titre des monuments historiques (en 2022).

Enfin, en application de l'article 180 de la loi Climat Résilience, à partir du 1er janvier 2024, le rapport annuel de développement durable, dont la production est obligatoire pour les régions, les départements, et les villes de plus de 50 000 habitants, devra également préciser le programme d'actions mis en place par la collectivité pour assurer la réduction de la consommation d'énergie des bâtiments ou des parties de bâtiment à usage tertiaire dont la collectivité territoriale est propriétaire, dans un objectif de respect des obligations prévues à l'article L. 174-1 du code de la construction et de l'habitation.

B. ...DANS UN CONTEXTE D'INFLATION DES PRIX DE L'ÉNERGIE QUI PÈSE SUR L'ÉQUILIBRE FINANCIER DES COLLECTIVITÉS...

1. Un niveau global historique d'inflation

L'inflation a atteint un niveau historique en 2022. En augmentation notable depuis janvier 2021 (principalement en raison des pénuries générées par les confinements de 2020 dans un contexte de crise sanitaire), elle s'est accentuée à partir de février 2022 à la suite du début de la guerre en Ukraine et se situe désormais à 5,9 % en glissement annuel en avril 2023 après un pic à 6,3 % en février 2023 et 5,7 % en mars 2023.

Évolution de l'inflation entre janvier 2019 et avril 2023

Source : Insee, le tableau indique l'IPC définitif de février, publié le 15 mars 2023, mais les prévisions des mois suivants ont été réalisées à partir de son estimation provisoire

Les produits sont différemment touchés par cette inflation. En premier lieu, les prix de l'énergie ont augmenté de 14,1 % entre février 2022 et février 2023.

L'inflation s'est ensuite diffusée à d'autres produits dont l'approvisionnement est sous tension (céréales, métaux...) générant une hausse du prix des produits alimentaires de 14,8 % sur cette même période.

À fin février 2023, l'inflation de 6,3 % se décomposait comme suit :

- les prix de l'énergie ont augmenté de 14,1 % ;

- les prix de l'alimentation de 14,8 % ;

- les prix des services de 3 % ;

- les prix des produits manufacturés de 4,7 %.

2. Une hausse spécifique des prix de l'énergie qui pèse lourdement sur les charges des collectivités

Au sein de la catégorie « énergie », des variations importantes sont mesurées entre les différents produits. Ainsi, les prix des combustibles liquides ou « fiouls domestiques livrés au domicile pour remplissage d'une cuve » ont augmenté de 70 % en un an, le gaz a augmenté de 30 %, le bois de 25 %.

Concernant spécifiquement l'électricité, d'une moyenne inférieure à 100 euros le mégawattheure (MWh) entre janvier 2020 et septembre 2021, les prix sont passés, en moyenne, à 230 euros le MWh entre octobre 2021 et avril 2023 atteignant un pic à plus de 740 euros le MWh en aout 2022.

Évolution du prix de l'énergie sur le marché de gros

(en euros par MWh)

Source : EPEX SPOT France

Or, les collectivités territoriales ne sont pas épargnées par cette inflation énergétique qui a des répercussions tant sur leurs charges de fonctionnement que sur leurs dépenses d'investissement, certains travaux voyant leurs coûts définitifs augmenter en raison de la hausse des prix de matériaux et des transports.

À l'intérieur d'une même catégorie de collectivités, l'impact de l'inflation énergétique peut varier dans des proportions importantes dans la mesure où il est multi factoriel. En effet, la hausse des charges et notamment des charges énergétiques pèse de manière différenciée en fonction des critères suivants :

- du niveau des services publics et modalités de gestion de ces services ;

- de la taille de la collectivité qui détermine la possibilité d'avoir accès au tarif réglementé de vente (pour les collectivités disposant de moins de dix salariés et de recettes de fonctionnement inférieures à 2 millions d'euros) ;

- de la date de renouvellement des contrats. Les collectivités dont les contrats de fourniture arrivent à échéance dans un contexte de forte volatilité du marché, sont les plus touchées. L'association Amorce indique, dans ce contexte, que la part consacrée à l'énergie dans le budget total des collectivités pourrait atteindre 10 à 15 % ;

- et, bien entendu, de l'état du parc immobilier des collectivités.

À cet égard, l'Association des petites villes de France (APVF) considère que dans certaines de ses communes membres les dépenses énergétiques ont bondi de 50 %. Pour l'Association des maires de France (AMF) et la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), ces hausses oscilleraient entre 30 % et 300 %. Dans une étude réalisée auprès des intercommunalités en janvier 2023, Intercommunalités de France a mis en lumière un doublement ou plus du montant de la facture énergétique pour les trois quarts des intercommunalités. Une intercommunalité sur deux rapporte un impact supérieur à 5 % sur ses charges de fonctionnement.

De surcroit, comme l'indique le rapport d'information fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat sur « la hausse du coût des énergies et son impact pour les collectivités territoriales »3(*), cette augmentation des prix de l'énergie devrait se poursuivre dans un contexte d'installation dans le temps de la guerre russo-ukrainienne et de renouvellement du parc nucléaire français.

3. Des boucliers tarifaires qui ne couvriront que partiellement les hausses de prix de l'énergie subies par les collectivités

Pour aider les collectivités face à ces hausses de prix, l'État a mis en place plusieurs outils.

En effet, en 2022, un bouclier tarifaire se composant de trois mesures a été instauré pour permettre de limiter la hausse des Tarifs réglementés de vente (TRV) à 4 % TTC :

- une baisse de l'accise sur l'électricité (ancienne taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité ou TICFE) à la limite des minima fixés par la directive sur la taxation de l'énergie, soit 0,5 euro MWh pour les professionnels et 1 euro le MWh pour les particuliers, contre 22,5 euros le MWh en 2021 ;

- une hausse exceptionnelle du plafond de l'accès régulé à l'énergie nucléaire historique (ARENH). Le plafond réglementaire de l'ARENH vendu par EDF aux fournisseurs alternatifs est de 100 térawatt-heures (TWh) au prix de 42 euros le MWh. Pour l'année 2022, le Gouvernement a décidé d'ajouter 20 TWh à ce plafond au prix de 46,5 euros le MWh. Cela limite la part d'électricité que les fournisseurs alternatifs doivent acheter sur les marchés de gros à un prix alors beaucoup plus élevé ;

- le plafonnement par voie réglementaire à 4 % de la hausse du niveau des TRV calculé par la CRE.

Pour 2023, la hausse des TRV a été limitée à 15 %. La réduction de la TICFE a, par ailleurs, été prolongée jusqu'au 31 janvier 2024. En revanche, la hausse du plafond réglementaire de l'ARENH n'a pas renouvelée.

De surcroit, à partir du 1er janvier 2023, la loi de finances initiale (LFI) pour 20234(*) a prévu la mise en place de « l'amortisseur électricité ». Il est destiné aux très petites entreprises, aux petites et moyennes entreprises (TPE/PME) et aux collectivités territoriales qui ne sont pas éligibles aux Tarifs réglementés de vente (TRV).

Pour la moitié des volumes consommés, le prix de l'électricité hors coût d'acheminement et hors taxes est ramené à 180 euros le MWh s'il est supérieur, dans la limite d'une réduction de 320 euros le MWh et d'un plafond de prise en charge annuelle de 2 millions d'euros.

Un dispositif complémentaire dit de « sur-amortisseur » ou « garantie 280 » a également été instauré par voie réglementaire pour les TPE et petites communes non éligibles aux TRV qui ont renouvelé leur contrat de fourniture d'électricité en 2022. Il leur garantit un prix de l'électricité de 280 euros par mégawattheure (ou 230 euros hors TURPE) sur l'année 2023.

Enfin, pour les collectivités les plus en difficulté, le législateur a mis en place deux filets de sécurité successifs pour 2022 et 2023.

Un premier filet de sécurité a été adopté dans la loi de finances rectificative (LFR) de juillet 20225(*) dont l'article 14 prévoit d'instituer un nouveau prélèvement sur recettes visant à compenser partiellement au bloc communal les hausses générées par la revalorisation du point d'indice ainsi que la hausse des prix de l'énergie et de l'alimentation. Cette compensation est égale à une fraction de 70 % des hausses de dépenses d'approvisionnement en énergie, électricité et chauffage urbain et d'achats de produits alimentaires.

Un deuxième filet de sécurité a été adopté lors de la LFI 2023 (article 113). Il prévoit qu'au titre de l'année 2023 est institué, par prélèvement sur les recettes consistant, pour chaque collectivité territoriale ou groupement bénéficiaire, une dotation égale à 50 % de la différence entre l'augmentation des dépenses d'approvisionnement en énergie, électricité et chauffage urbain entre 2023 et 2022 et 50 % de celle des recettes réelles de fonctionnement entre 2023 et 2022.

Le versement de ces aides est cependant conditionné par le respect de plusieurs critères (baisse de l'épargne brute, potentiel financier inférieur à un certain seuil). Ces dispositifs sont donc très ciblés et visent à ne soutenir que les collectivités les plus en difficulté et seulement partiellement. À cet égard les rapporteurs spéciaux ne peuvent que déplorer que la position du Sénat, issue des travaux de la commission des finances, tendant à élargir le filet de sécurité 2023 au plus grand nombre de collectivités en supprimant les conditions d'accès au dispositif extrêmement restrictives fondées sur l'épargne brute, n'ait pas été retenue dans le texte définitif.

C. ...RENDENT NÉCESSAIRES DES INVESTISSEMENTS SUR LE PATRIMOINE IMMOBILIER DES COLLECTIVITÉS QUI SONT CEPENDANT SUSCEPTIBLES D'ÊTRE COMPROMIS EN RAISON DE LA CONJONCTURE DES FINANCES LOCALES

1. De nombreux investissements à réaliser par les collectivités...
a) Un cout estimé à 12 milliards d'euros par an

Face à l'inflation énergétique, à un parc immobilier énergivore et à des obligations encadrées de baisse de consommation dans un objectif de décarbonation, les collectivités territoriales doivent accélérer leurs investissements en faveur de la transition écologique.

Aussi, au regard du niveau de consommation énergétique des collectivités territoriales, leur rôle est essentiel dans la transition écologique engagée au niveau national.

Selon l'analyse effectuée par l'Institut I4CE6(*), si l'on s'en tient aux seuls investissements nécessaires pour atteindre les objectifs de la stratégie nationale bas carbone (SNBC), le besoin d'intervention des collectivités territoriales peut être évalué à 12 milliards d'euros par an, ce qui représente environ un cinquième de leur budget d'investissement global.

Dans cet ensemble, les trois principaux postes de dépenses identifiés par l'Institut sont la mise en place d'aménagements cyclables (3,3 milliards d'euros), les transports en commun et la mobilité ferroviaire (3 milliards d'euros) ainsi que la rénovation énergétique des bâtiments publics (2,7 milliards d'euros).

Au plan méthodologique, il convient cependant de noter que ces estimations ont été réalisées sous hypothèse de modèle de financement des investissements. En d'autres termes, la part des collectivités territoriales dans le financement de tel ou tel équipement resterait inchangée par rapport à la situation actuelle. Cela explique la relativement faible part des transports en commun dans ces priorités, alors même qu'il s'agit d'un enjeu déterminant de la transition écologique, dans la mesure où bien que ceux-ci soient gérés par des intercommunalités en leur qualité d'autorités organisatrices de la mobilité, les subventions des collectivités territoriales représentent une part minoritaire de leur financement assuré, par ailleurs, par des ressources fiscales (versement mobilité) et tarifaires.

Besoins d'investissement des collectivités locales pour le climat par secteur
(par an pour la période 2021-2030)

(en milliards d'euros)

Source : institut I4CE

L'institut estime qu'environ 5,5 milliards d'euros d'investissements « climat » sont réalisés aujourd'hui par les collectivités. Ainsi, les collectivités devraient, chaque année, dès aujourd'hui et jusqu'en 2030, réaliser environ 6,5 milliards d'euros d'investissements « climat » additionnels. Le besoin d'accélération des investissements est particulièrement fort dans les aménagements cyclables (2,3 milliards d'euros par an) et dans la rénovation énergétique des bâtiments publics (1,4 milliard d'euros par an), mais aussi dans le ferroviaire et dans l'efficacité énergétique de l'éclairage public (800 millions d'euros par an chacun).

Écart entre les investissements actuels et les besoins d'investissement des collectivités pour atteindre les objectifs de la SNBC d'ici 2030

(en milliards d'euros)

Source : institut I4CE

Dans une acception plus large de la transition écologique, au-delà de la seule lutte contre le réchauffement climatique, c'est-à-dire en incluant l'ensemble de la taxonomie verte européenne7(*), les collectivités territoriales restent au coeur du processus de « verdissement » de l'économie en raison des compétences qu'elles exercent.

Ainsi, les montants d'investissement, en tenant compte de l'ensemble des actions des collectivités ayant un impact sur l'environnement, pourraient s'établir bien au-delà des 12 milliards d'euros susmentionnés.

Taxonomie européenne des dépenses favorables à l'environnement
et comparaison avec les domaines de compétences des collectivités

Axe de la taxonomie européenne
(art. 9 du règlement UE 2020/852)

Domaines d'intervention des collectivités territoriales (exemples)

Atténuation du changement climatique

Électrification des transports publics et mobilité du quotidien

Adaptation au changement climatique

Rénovation thermique des bâtiments scolaires

Protection des ressources en eau

Gestion des réseaux de distribution d'eau et d'énergie

Économie circulaire

Traitement des déchets ménagers et industriels

Réduction et prévention de la pollution

Mise en oeuvre de plans de protection de l'atmosphère

Protection de la biodiversité

Gestion des parcs naturels régionaux

Source : commission des finances du Sénat

b) Un « mur » d'investissement face aux collectivités

Les investissements à venir, même si de nombreuses actions ont déjà été entreprises, devront donc porter :

- sur le bâti scolaire ;

- sur les bâtiments administratifs ;

- sur les locaux à usage de service public (gymnases, bibliothèques, piscines...) ;

- sur l'éclairage public et les systèmes de réseaux (eaux, chauffages, traitements des déchets...) ;

- sur les transports publics (développement des voies de mobilités douces, électrification des transports en commun...) ;

- sur la renaturalisation des zones urbaines.

Ces investissements présentent des besoins différents qui peuvent être classifiés ainsi :

- des rénovations légères à faible investissement financier mais permettant une meilleure maitrise des consommations d'énergie (comme la mise en place de régulateur de température, des détecteurs de présence pour l'éclairage des bureaux...) ;

- des rénovations intermédiaires avec un investissement significatif centré sur l'énergie avec un objectif de 30 à 40 % d'économie. Pour ces rénovations intermédiaires, le cout estimé par le Gouvernement est de 150 à 300 euros par mètre carré avec un retour sur investissement de 5 à 10 ans ;

- des rénovations globales avec des investissements patrimoniaux et des travaux de rénovation lourds avec un objectif de 60 % d'économie d'énergie. À titre d'exemple, sur la base d'un panel de 18 projets de rénovation globale au label BBC8(*) Rénovation, Effinergie9(*) estime à 540 euros par mètre carré SRT (surface thermique au sens de la règlementation thermique 2012), le montant relatif à la part rénovation énergétique, soit 41 % du coût total de la rénovation.

2. ...mais des incertitudes fortes pour 2023 sur les finances locales qui pourraient contraindre l'investissement des collectivités
a) Une situation relativement saine à fin 2022 mais contrastée selon les collectivités

À l'instar de l'exercice 2021, les marges de manoeuvre financières des collectivités territoriales ont continué à augmenter en 2022. Pour l'ensemble des niveaux de collectivités, épargne brute et épargne nette sont supérieures à leur niveau de 2021 :

- l'épargne brute en 2022 (38,7 milliards d'euros) est en progression par rapport à 2021 de 5,9 %. Elle est supérieure de 4,5 milliards d'euros à son niveau de 2019, dépassant ainsi largement son niveau d'avant-crise ;

- l'épargne nette (soit l'épargne brute après déduction des remboursements de dette) est également en augmentation, de +8,8 % par rapport à 2021 et supérieure de 4 milliards d'euros à son niveau de 2019.

Enfin, la trésorerie des collectivités (solde positif du compte du Trésor) est toujours en progression, à 57,2 milliards d'euros contre 56,6 milliards d'euros en 2021, pour les trois niveaux de collectivités.

Évolution des principaux ratios financiers des collectivités
entre 2021 et 2022

 

2021

2022

Évolution 2021/2022

Recettes réelles de fonctionnement

214,3

224,5

4,76 %

Dépenses réelles de fonctionnement

177,7

185,7

4,50 %

Capacité d'autofinancement brute

36,6

38,7

5,74 %

Épargne nette

22,5

24,5

8,89 %

Dépenses réelles d'investissement

71,7

75,7

5,58 %

Trésorerie

56,6

57,2

1,06 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des données DGFIP

Cette situation globalement positive ne doit cependant pas masquer des disparités territoriales importantes. Ainsi, environ 6 000 communes ont une épargne nette négative. De même, certains départements sont dans une situation financière très tendue. À titre d'exemple, le département des Ardennes présente des DMTO faibles (95 euros par habitant soit quatre fois moins que les départements les mieux pourvus après mise en oeuvre du dispositif de solidarité). Parallèlement, les aides à la personne représentent, dans ce département, 424 euros par habitant contre 345 euros pour la moyenne de la strate.

b) Des incertitudes importantes pour l'année 2023

Si l'évolution des finances des collectivités territoriales est globalement positive en 2022, l'exercice 2023 reste incertain en raison d'un environnement économique et géopolitique à risque.

En premier lieu, même si l'inflation devrait ralentir au second semestre et si les cours du gaz et de l'électricité sont baissiers, les dépenses de fonctionnement devraient continuer à croître significativement en 2023 (effet année pleine et renouvellement de contrats).

Par ailleurs, après neuf années de hausses ininterrompues, une année 2021 exceptionnelle et une légère hausse en 2022, l'année 2023 pourrait marquer une baisse des recettes de DMTO en raison de la hausse des taux d'intérêt, de la baisse des prix de l'immobilier en ce début d'année 2023 et de la baisse du nombre d'emprunts immobiliers observée au 4ème trimestre 2022 qui pèsent sur le marché immobilier.

De surcroit, les collectivités seront confrontées, en 2023, à une hausse de leurs dépenses de personnel en raison de la revalorisation du point d'indice de 3,5 % intervenue par décret du 7 juillet 2022 et de 1,5 % à compter du 1er juillet 2023 et de leurs dépenses d'intervention (pour les départements) en raison de la revalorisation anticipée du RSA de 4 % prévue à l'article 9 de la loi n°2022-1158 du 16 aout 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat suivie par la revalorisation annuelle de 1,6 % au 1er avril 2023.

Enfin, la charge de la dette devrait augmenter en raison de la hausse prévisible des taux variables généralement indexés sur les indices du Livret A ou de l'Euribor 3 mois. Or, le taux d'intérêt du Livret A, est passé de 1 à 3 % entre février 2022 et février 2023 et celui de l'Euribor de 0,712 % et 2,783 % entre septembre 2022 et mars 2023.

Les nouveaux emprunts devraient également coûter plus cher aux communes en particuliers et aux collectivités en général, les taux d'usure leur étant applicables étant fixés ainsi pour mars 2023 :

- 4,91 % à partir du 1er mars 2023 pour les prêts à taux fixe d'une durée initiale supérieure à 2 ans et inférieure à 10 ans (contre 4,57 % le mois précédent) ;

- 4,85 % pour les prêts à taux fixe d'une durée initiale supérieure à 10 ans et inférieure à 20 ans (contre 4,51 % le mois précédent) ;

- 4,95 % pour les prêts à taux fixe d'une durée initiale supérieure à 20 ans (contre 4,60 % le mois précédent) ;

- 5,20 % pour les prêts d'une durée initiale supérieure à deux ans, à taux variable (contre 4,75 % le mois précédent).

c) Les possibles conséquences de la conjoncture sur le niveau d'investissement des collectivités

La hausse des prix de l'énergie couplée à celle des taux d'intérêt qui renchérit donc le recours à l'emprunt risque d'engendrer un renoncement des collectivités à certains projets d'investissement liés à la transition énergétique.

En effet, l'agence de notation américaine S&P (Standard & Poor's) prévoit un désendettement des collectivités après un pic en 2021 en raison des conditions de refinancement moins attractives et des incertitudes budgétaires et économiques. D'après les estimations de l'agence, l'encours de dette des collectivités a baissé de 3,6 % en 2022 et « anticipe la poursuite de cette tendance » en 2023 et 2024.

Dans ce contexte, « les collectivités locales vont faire face à une pression budgétaire » qui risque de générer une maîtrise des dépenses d'investissement. Alors qu'il y a eu une forte hausse de l'ordre de 5 % des investissements en 2022, S&P s'attend à un très léger recul des investissements d'environ 0,80 % en 2023 et encore davantage en 2024 avec une baisse de 3 %, à contre-courant des incitations à investir de la part des pouvoirs publics notamment dans le cadre de la rénovation énergétique.

Le développement des dotations de l'État en faveur de la transition écologique prend, dès lors, une importance primordiale afin de contribuer au financement des investissements des collectivités.

II. LE DÉVELOPPEMENT NOTABLE DES DOTATIONS « VERTES » VISANT À ACCOMPAGNER LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DANS LEUR TRANSITION ÉCOLOGIQUE MAIS DONT LE CHIFFRAGE RESTE PEU FIABLE

Pour faire face au « mur d'investissement » qui attend les collectivités pour mettre en place leur transition énergétique et écologique, le Gouvernement a renforcé les dotations d'investissement qui leur sont allouées :

- en encourageant l'emploi des dotations classiques d'investissements pour des projets environnementaux ;

- en créant de nouvelles dotations spécifiquement dédiées aux investissements environnementaux.

A. UNE UTILISATION DE PLUS EN PLUS VERTE DES DOTATIONS CLASSIQUES : DETR, DSIL ET DSIL EXCEPTIONNELLE

La dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) sont les deux dotations d'investissement les plus importantes en volume. En 2023, elles représentent respectivement 1 milliard et 570 millions d'euros. La DSIL avait par ailleurs été complétée, par la troisième loi de finances rectificative du 30 juillet 2020, par une fraction exceptionnelle de 950 millions d'euros.

Les modalités d'attribution et d'utilisation de ces trois dotations sont précisées dans une instruction annuelle publiée généralement en janvier ou février relative à la composition et règles d'emploi des dotations et fonds de soutien à l'investissement en faveur des territoires. Une part de ces dotations est consacrée à des projets environnementaux.

1. La DETR

L'éligibilité à la DETR repose sur des critères de population et de richesse fiscale. Ainsi, les crédits de la DETR sont répartis entre les départements :

· Pour 50 % du montant total de la dotation :

- à raison de 50 % en fonction de la population regroupée des communes caractérisées comme peu denses ou très peu denses ;

- à raison de 50 % en fonction du rapport, pour chaque établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre éligible, entre le potentiel fiscal moyen par habitant des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de sa catégorie et son potentiel fiscal moyen par habitant ;

· Pour 50 % du montant total de la dotation :

- à raison de 50 % répartis entre les départements, en proportion du rapport entre la densité moyenne de population de l'ensemble des départements et la densité de population du département, le rapport pris en compte étant plafonné à 10 ;

- à raison de 50 % en fonction du rapport, pour chaque commune répondant aux critères d'éligibilité entre le potentiel financier moyen par habitant de l'ensemble des communes appartenant au même groupe démographique et son potentiel financier moyen par habitant.

Si la décision d'octroi relève du préfet de département, l'une des particularités de la DETR est l'institution d'une commission auprès de ce dernier, composée d'élus et de représentants d'élus, incluant depuis 2017 les parlementaires du département. Cette commission est :

- chargée de fixer chaque année les catégories d'opérations prioritaires et, dans des limites fixées par décret en conseil d'État, les taux minimaux et maximaux de subventions applicables à chacune d'entre elles ;

- informée de la liste des opérations retenues par le préfet de département ;

- saisie pour avis sur les projets dont la subvention proposée au titre de la DETR porte sur un montant supérieur à 100 000 euros (avant 2018, ce seuil était fixé à 150 000 euros).

L'article L 2334-36 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que cette dotation est attribuée sous forme de subventions en vue de la réalisation d'investissements, ainsi que de projets dans le domaine économique, social, environnemental, sportif et touristique ou favorisant le développement ou le maintien des services publics en milieu rural.

Le représentant de l'État dans le département tient, par ailleurs, compte du caractère écologique des projets pour la fixation des taux de subvention.

2. La DSIL

Sont éligibles à la DSIL les communes, les EPCI à fiscalité propre et les pôles d'équilibre territorial et rural (PETR) du département.

La DSIL est programmée et attribuée au niveau régional par le représentant de l'État dans la région en lien avec les échelons départementaux et infra-départementaux. L'enveloppe est répartie entre les régions de métropole et d'outre-mer, ainsi que le département de Mayotte, pour 65 % au prorata de leur population au 1er janvier et pour 35 % en fonction de la population située dans une unité urbaine de moins de 50 000 habitants.

L'article L 2334-42 du CGCT précise que la dotation est destinée aux projets entrant dans une des six priorités suivantes :

la rénovation thermique, la transition énergétique, le développement des énergies renouvelables ;

- la mise aux normes et la sécurisation des équipements publics ;

- le développement d'infrastructures en faveur de la mobilité ou en faveur de la construction de logements ;

- le développement du numérique et de la téléphonie mobile ;

- la création, la transformation et la rénovation des bâtiments scolaires ;

- la réalisation d'hébergements et d'équipements publics rendus nécessaires par l'accroissement du nombre d'habitants.

3. La DSIL exceptionnelle

La répartition des enveloppes régionales est effectuée selon les mêmes critères que ceux de l'enveloppe de la DSIL « classique » par le préfet de région. Le cadre d'emploi prévu à l'article L. 2334-42 du CGCT reste applicable. Seules les orientations prioritaires sont quelque peu différentes.

En effet, ces dernières sont définies dans la circulaire du 30 juillet 2020 relative à la part exceptionnelle de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et à l'accompagnement de la relance dans les territoires qui précise que doivent être soutenues les opérations relevant de trois thématiques prioritaires :

- les projets relatifs à la transition écologique à savoir la rénovation énergétique des bâtiments publics et le développement de nouvelles solutions de transport, la lutte contre l'artificialisation des sols ou la réhabilitation de friches industrielles ;

- les projets ayant trait à la résilience sanitaire ;

- les projets visant à soutenir la préservation du patrimoine public historique et culturel, classé et non classé.

Enfin, concernant la DETR, la DSIL et la DSIL exceptionnelle, l'instruction annuelle relative à la composition et aux règles d'emploi des dotations et fonds de soutien à l'investissement précise également les priorités thématiques d'affectation de ces dotations parmi lesquelles : la transition écologique des territoires c'est-à-dire les projets qui renforcent l'attractivité des territoires tout en augmentant leur résilience au changement climatique ou contribuent aux engagements de la France en termes de neutralité carbone en 2050.

L'emploi de ces trois dotations est donc orienté, par la loi et par instruction, au moins en partie, sur des projets et priorités relevant du domaine environnemental (DETR) ou de la transition énergétique et de la rénovation thermique (DSIL) ou de la transition écologique (DSIL exceptionnelle).

Priorités définies dans les instructions annuelles relatives à la composition et aux règles d'emploi des dotations de soutien à l'investissement (2019 à 2023)

Source : commission des finances du Sénat à partir des instructions annuelles

B. UNE PART CROISSANTE DES DOTATIONS « CLASSIQUES » FINANCANT DES PROJETS ENVIRONNEMENTAUX MAIS DIFFICILE À ESTIMER PRÉCISÉMENT ET QUI NE DOIT PAS SE FAIRE AU DÉTRIMENT DES AUTRES INVESTISSEMENTS DES COLLECTIVITÉS

1. La part croissante des dotations « classiques » orientées sur des priorités environnementales

D'après les données figurant dans les tableaux annuels d'exécution des dotations d'investissement, entre 2019 et 2021, la part de la DETR et de la DSIL ayant permis de financer des projets environnementaux a augmenté passant :

- de 11,6 % à 15,4 % pour la DETR ;

- de 16 % à 16,75 % pour la DSIL avec un pic à 19,1 % en 2020.

Concernant la DSIL exceptionnelle, la part des projets environnementaux s'établit à 45 % en moyenne sur les années 2020 et 2021.

Part des projets environnementaux dans les dotations d'investissement « classiques » entre 2019 et 2021

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des données d'exécution des dotations d'investissement fournies par la DGCL

En 2021, la DETR a ainsi permis de financer 3 524 projets environnementaux (sur un total de 24 172 projets) pour un montant moyen par subvention de 44 269 euros et un montant total de 156 millions d'euros, soit 23 millions d'euros et 796 projets de plus qu'en 2020.

La DSIL, pour sa part, a permis de financer 918 projets environnementaux (sur un total de 3 795 projets) pour un montant moyen de 97 092 euros et un montant total de 89 millions d'euros, soit 15 millions de moins qu'en 2020 mais 151 projets de plus.

En sus de la part des dotations classiques, l'ensemble des crédits consommés au titre de la dotation rénovation thermique (DRT) et une part importante de la DRI (430 millions sur les 600 millions d'euros d'AE), toutes deux instituées dans le cadre du plan de relance (voir infra), ont concouru, en 2021, au financement de projets environnementaux.

Il en résulte, qu'en 2021, sur l'ensemble des dotations d'investissement (DETR, DSIL, DSIL exceptionnelle, DRI et dotation RT), 46,57 % étaient consacrés à des investissements environnementaux.

Part des projets environnementaux dans l'ensemble des dotations d'investissement entre 2019 et 2021

Source : commission des finances du Sénat à partir des données d'exécution des dotations d'investissement fournies par la DGCL

2. Des problèmes méthodologiques importants de comptabilisation qui rendent difficile un chiffrage précis

Les chiffres susmentionnés pour la DETR, la DSIL et la DSIL exceptionnelle résultent de l'analyse des tableaux annuels d'exécution des dotations d'investissement en ne retenant que les projets classés dans les catégories de priorité « transition énergétique », « rénovation thermique », « développement des énergies renouvelables », « environnement, transition énergétique et écologie ».

Cependant, le rapport annuel 2021 relatif à la DSIL et à la DETR (fiche sur les priorités environnementales) présente des chiffres différents. En effet, il y est indiqué que :

- au titre de la DETR, 226,5 millions d'euros ont financé 4 723 projets environnementaux pour un montant moyen de subvention par projet de 47 962 euros soit plus de 20 % des projets subventionnés ;

- au titre de la DSIL, 183,7 millions d'euros ont financé 1 475 projets environnementaux pour un montant moyen de subvention par projet de 124 545 euros soit plus de 35 % des projets subventionnés.

Cet écart s'explique par le fait qu'au-delà des projets directement reliés aux catégories « environnementales », certaines opérations peuvent cependant avoir un lien direct avec les priorités environnementales tout en relevant d'autres catégories de recensement. Il en est ainsi par exemple des projets rattachés à la priorité « construction, habitat, urbanisme et transport » de la DETR ou ceux rattachés à la priorité « développement d'infrastructures en faveur de la mobilité », « développement d'infrastructures en faveur de la construction de logements » ou « création, transformation et rénovation des bâtiments scolaires » de la DSIL. 

En effet, les projets financés au titre de ces catégories ne sont pas strictement considérés comme répondant aux priorités environnementales prédéfinies dans la nomenclature mais ils peuvent être réalisés avec des exigences de rénovation thermique et de réduction de consommation énergétique.

Il en résulte, qu'en l'état actuel de présentation et de classification des données et des priorités, il est impossible de connaitre la part de la DSIL (y compris DSIL exceptionnelle) et de la DETR concourant réellement au financement de projets « environnementaux ».

Au regard des enjeux de transition écologique, il parait donc important de pouvoir fiabiliser la connaissance des investissements à portée environnementale. Pour ce faire, il est indispensable que la DGCL se dote d'une nouvelle nomenclature de suivi avec la création de sous-catégorie en sus des priorités permettant de déterminer si les investissements financés présentent une composante environnementale et à hauteur de combien sur le total de la subvention accordée. Si les données issues de cette nouvelle nomenclature ne sauraient être exemptes de biais ou marges d'erreur, elles permettraient, cependant, d'avoir une connaissance plus fine de la part dédiée à des projets de transition écologique des dotations allouées.

Afin d'avoir également une connaissance du type de projets environnementaux financés (rénovation thermique, protection de la biodiversité...), la nouvelle nomenclature pourrait se calquer, au moins partiellement, sur la taxonomie européenne (cf. supra).

Recommandation n° 1 : se doter d'outils de suivi plus précis permettant une meilleure analyse et connaissance des montants des dotations classiques d'investissement alloués à des projets totalement ou partiellement dédiés à la transition écologique (DGCL).

3. Le risque d'une baisse des moyens alloués aux autres investissements des collectivités ?

Certains investissements des collectivités ne pourront pas être considérés comme participant à la transition écologique mais sont pourtant indispensables. Il s'agit notamment de l'ensemble des travaux effectués sur la voirie, de ceux réalisés dans les cimetières ou encore de l'entretien du patrimoine culturel et architectural, notamment pour les bâtiments classés.

De même, les communes touristiques et les communes de montagne (à tout le moins les stations de ski) pourront plus difficilement concilier investissements en faveur de la transition écologique et intérêts économiques de leur territoire.

De sorte qu'il est nécessaire de préserver une partie des dotations d'investissement non fléchées spécifiquement sur les priorités environnementales, sous peine d'assister à une dégradation de certains biens immobiliers et/ou de certains secteurs d'activité des collectivités.

Si aujourd'hui la part des dotations permettant de financer des projets environnementaux représente, au global, environ 46 % de la DTER, DSIL, DSIL exceptionnelle, DRI et dotation de rénovation thermique, dont près de 16 % pour la DETR et la DSIL, la DGCL a indiqué vouloir augmenter cette part pour la porter à 25 % de la DSIL en 2023 et fixer une trajectoire à partir de 2025 en fonction des résultats des exercices 2023 et 2024.

Cette volonté s'inscrit dans la continuité de l'article 198 de la loi de finances pour 2023 qui prévoit que pour la DETR et la DSIL, le représentant de l'État dans le département ou dans la région tient compte du caractère écologique des projets pour la fixation des taux de subvention.

À cet égard, pour la DSIL, on constate déjà que le taux de subvention d'un projet environnemental est légèrement supérieur à celui des autres projets (25,8 % contre 23,4 %).

Dans ce contexte, le risque est réel que la montée en puissance des dotations à visée environnementale se fasse au détriment des autres investissements des collectivités territoriales. Il parait donc nécessaire d'associer pleinement les collectivités à la planification écologique nationale coordonnée par le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE). Si aujourd'hui les collectivités assistent aux réunions du SGPE, il faut que l'État sorte de sa logique de discussion avec les collectivités au coup par coup pour instaurer une réelle concertation formalisée dans un cadre pluriannuel.

C. LA MISE EN PLACE DE DOTATIONS « VERTES » SPÉCIFIQUEMENT DÉDIÉES AU FINANCEMENT DE PROJETS ENVIRONNEMENTAUX

En sus des dotations classiques dont certaines priorités sont orientées sur la rénovation énergétique et/ou la transition écologique, d'autres dotations ont été créées, à compter de 2020, avec des objectifs uniquement axés sur les enjeux environnementaux. À l'exception de la dotation biodiversité, ces dotations ne sont pas pérennes.

1. La dotation de rénovation thermique (DSIL et DSID RT)

Cette dotation portée par le programme 362 au sein de la mission « Plan de relance » (action 1) a été créée en loi de finances initiale pour 2021. Son enveloppe est déléguée aux préfets de région selon les modalités habituelles de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et de la dotation de soutien à l'investissement des départements (DSID). D'un montant total de 1 milliard d'euros, elle comprend trois composantes :

- la première, d'un montant de 650 millions d'euros est fléchée sur la rénovation thermique des bâtiments publics des communes et établissements publics de coopération intercommunale, de métropole, des DOM et des COM ;

- la deuxième, d'un montant de 300 millions d'euros, est fléchée sur la rénovation thermique des bâtiments des conseils départementaux ;

- la troisième enveloppe de 50 millions d'euros est fléchée sur la rénovation thermique des équipements sportifs structurants (piscines, salles spécialisées et gymnases) des communes et établissements publics de coopération intercommunale, des métropoles, des DOM et des COM. Elle est mise en oeuvre par l'Agence nationale du sport.

Selon l'instruction du 18 novembre 2020, elle a pour vocation de financer des travaux de rénovation énergétique des bâtiments publics. La rénovation énergétique des bâtiments publics correspond à l'ensemble des travaux réalisés sur des bâtiments départementaux, communaux ou intercommunaux visant à diminuer leur consommation énergétique. Elle ne recouvre pas, en revanche, la construction de bâtiments neufs, même si ceux-ci répondent à des normes énergétiques exigeantes.

Les actions financées peuvent porter à la fois sur des actions dites « à gain rapide » présentant un fort retour sur investissement (pilotage et régulation des systèmes de chauffage, modernisation des systèmes d'éclairage, ...), des travaux d'isolation du bâti ou de remplacement d'équipement ainsi que sur des opérations immobilières de réhabilitations lourdes combinant plusieurs de ces travaux et pouvant inclure d'autres volets tels que la mise aux normes de sécurité et d'accessibilité, le désamiantage, le ravalement ou l'étanchéité du bâti.

En 2021, 5 360 projets ont été soutenus au titre de la DSIL RT. Ils représentent un coût total de 1 687 236 643 euros et un coût moyen des projets financés de 315 371 euros. Le montant de subvention moyen allouée est de 120 030 euros, soit un taux de subvention moyen de 38 %. Ce taux de subvention moyen varie selon les territoires : il est notamment plus élevé en outre-mer (96 % à Saint-Pierre-et-Miquelon, 80 % en Polynésie Française, 76 % en Guyane).

La même année, 568 projets ont été soutenus au titre de la DSID RT. Ils représentent un coût total de 633 621 580 euros et un coût moyen de 1 115 531 euros. Le montant moyen de subvention allouée est de 529 694 euros, soit un taux de subvention moyen de 47 %. Pour cette part départementale également, le taux de subvention moyen varie selon les territoires : il atteint 86 % à La Réunion, 70 % en Normandie, 75 % en Corse, mais n'est que de 32 % en Île-de-France et de 36 % en Bourgogne Franche-Comté.

2. La dotation régionale d'investissement

Portée par le programme 362 de la mission « Plan de relance » (action 9), cette dotation d'un montant de 600 millions d'euros en AE a été créée par la loi de finances initiale pour 2021 afin de permettre aux régions d'engager un plan massif de rénovation énergétique de leurs bâtiments et de développement des mobilités et des transports.

Conformément à la  circulaire du 23 octobre 2020 sur la territorialisation du plan de relance, les subventions sont attribuées aux régions pour des opérations liées au plan de relance de l'État, prioritairement en faveur de la rénovation thermique des bâtiments publics et des mobilités du quotidien.

Les projets éligibles sont portés par les conseils régionaux, sans qu'il soit nécessaire que le conseil régional dispose lui-même de la maîtrise d'ouvrage. Les crédits sont délégués aux préfets de région et leur affectation par projet est discutée entre les préfets de régions et les présidents des conseils régionaux.

En 2021, 348 projets ont été financés pour un montant de subvention de 630 millions d'euros en AE.

3. Le fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires dit « fonds vert »

Portée par le nouveau programme 380 de la mission « Écologie », cette dotation créée par la loi de finances initiale pour 2023 représente 2 milliards d'euros en AE et doit permettre d'accélérer la transition écologique dans les territoires selon trois axes dont le détail doit être précisé à l'occasion de la concertation avec les collectivités territoriales : la performance environnementale, l'adaptation des territoires au changement climatique, l'amélioration du cadre de vie.

Les crédits du fonds vert sont déconcentrés au niveau des préfets de département à qui il appartient, dès janvier 2023, de sélectionner les projets présentés par les collectivités territoriales et leurs partenaires publics ou privés. L'essentiel des mesures sont donc mises en oeuvre à l'échelle du département à l'exception des mesures relatives aux friches, aux bio déchets et à la biodiversité qui seront mises en oeuvre au niveau régional.

Les crédits sont répartis entre les territoires en fonction de critères démographiques et des besoins spécifiques à chaque territoire. Ils sont délégués par la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN) aux préfets de régions qui répartissent ensuite les enveloppes entre les départements après concertation des préfets de départements qui ventilent ensuite ces crédits entre les différentes mesures et en assurent l'exécution.

Les subventions du fonds sont cumulables avec les autres dotations de l'État dans la limite de 80 % d'aides de l'État.

Une instruction reprenant ces éléments a été élaborée le 14 décembre 2022 et publiée le 18 janvier 2023.

Fin avril 2023, 155 projets ont été sélectionnés pour un montant total de subventions de 58 millions d'euros, soit un montant moyen de 374 000 euros par projets.

4. La dotation de biodiversité

Créée par l'article 256 de la loi de finance pour 201910(*), la dotation « biodiversité » était initialement destinée aux communes de moins de 10 000 habitants dont le territoire terrestre est couvert à plus de 75 % par un site Natura 2000. Les lois de finances suivantes ont étendu le dispositif de sorte qu'en 2023, il existe 4 fractions de cette dotation :

la première fraction est répartie entre les communes de moins de 10 000 habitants dont le potentiel financier par habitant est inférieur au double du potentiel fiscal moyen par habitant des communes de la même strate démographique et dont le territoire terrestre est couvert à plus de 50 % par un site Natura 2000 ;

la deuxième fraction est répartie entre les communes de moins de 10 000 habitants dont le potentiel financier par habitant est inférieur au double du potentiel fiscal moyen par habitant des communes de la même strate démographique, dont le territoire terrestre est en tout ou partie compris dans un coeur de parc national ;

la troisième fraction est répartie entre les communes de moins de 10 000 habitants dont le potentiel financier par habitant est inférieur au double du potentiel fiscal moyen par habitant des communes de la même strate démographique et dont le territoire est en tout ou partie situé au sein d'un parc naturel marin ;

la quatrième fraction est répartie entre les communes de moins de 10 000 habitants, caractérisées comme peu denses ou très peu denses au sens de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), dont le potentiel financier par habitant est inférieur au double du potentiel financier moyen par habitant des communes de la même strate démographique et dont le territoire est en tout ou partie situé au sein d'un parc naturel régional.

Portée par le programme 119 de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », cette dotation est dotée de 41,6 millions d'euros en 2023.

Fractions de la dotation de biodiversité en 2023

Source : commission des finances du Sénat à partir du code général des collectivités locales

Les réformes successives de cette dotation ont pour finalité de soutenir la production d'aménités rurales par les collectivités territoriales.

Cette dotation concernait, en 2022, 4 871 communes pour des montants allant de 1 000 à 237 000 euros.

L'emploi de ces quatre dotations, créées spécifiquement pour soutenir les investissements environnementaux des collectivités territoriales (ou pour compenser certaines charges découlant de la situation des communes bénéficiaires concernant la dotation de biodiversité) est donc axé sur plusieurs priorités et notamment, en premier lieu, la rénovation thermique.

Priorités environnementales définies pour les dotations « vertes »

Source : commission des finances du Sénat à partir des instructions et circulaires

DEUXIÈME PARTIE
TROP COMPLEXE ET TROP CENTRÉ SUR LES SEULES DOTATIONS D'INVESTISSEMENT, LE FINANCEMENT DES PROJETS ENVIRONNEMENTAUX DOIT ÊTRE REPENSÉ

I. UN FOISONNEMENT DES DOTATIONS QUI REND LE SYSTÈME COMPLEXE ET LAISSE PEU DE PLACE À LA CONSULTATION DES ÉLUS

A. L'EXISTENCE DE NOMBREUSES DOTATIONS QUI SE JUXTAPOSENT ET GÉNÈRENT UNE COMPLEXITÉ IMPORTANTE DU SYSTÈME DE FINANCEMENT DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE POUR LES COLLECTIVITÉS

1. Un maquis de dotations aux origines diverses

En sus des dotations d'investissement en provenance de l'État mentionnées supra, les collectivités peuvent percevoir d'autres aides nationales mais également des aides européennes.

a) Les aides nationales

Le présent rapport n'a pas vocation à lister de manière exhaustive l'intégralité des aides dont peuvent bénéficier les collectivités mais simplement de présenter les plus importantes et de démontrer leur grande diversité d'origine.

Ainsi, à titre d'exemple, l'agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) a la possibilité de financer, dans le cadre de ses opérations dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, la rénovation des bâtiments scolaires.

Par ailleurs, l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) peut apporter un financement dans le cadre du programme « petites villes de demain » qui s'adresse à des villes de moins de 20 000 habitants.

L'ADEME dispose de plusieurs leviers de financement comme les Fonds Chaleur, Fonds Économie Circulaire, Fonds Air Bois, Fonds Vert ou encore France 2030. Une des missions de l'Agence est de traduire ces fonds avec la mise en place de dispositifs d'aides financières pour atteindre les objectifs de la transition écologique sur le territoire français.

S'ajoutent également les aides locales : en effet, de nombreux départements et régions mettent en place des dispositifs incitatifs et des financements pour accélérer la transition énergétique du territoire en complément des aides d'État. De surcroit, les fonds de concours (versement de subvention entre un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre et ses communes membres ou entre un syndicat intercommunal ou mixte exerçant la compétence d'autorité organisatrice de la distribution publique d'électricité (syndicat d'énergie) et ses membres afin de financer la réalisation ou le fonctionnement d'un équipement) peuvent être mis en place après accord concordant des organes délibérants. Ce mécanisme de financement permet de financer la rénovation et l'entretien des équipements publics. S'agissant des EPCI à fiscalité propre, le montant total des fonds de concours ne peut excéder la part du financement assurée, hors subventions, par le bénéficiaire du fonds de concours (règle de la participation minimale). S'agissant des syndicats d'énergie, le montant total des fonds de concours ne peut excéder 75 % du coût hors taxes de l'opération concernée.

Enfin, la Banque des territoires (BDT) a développé, dès 2018, une offre large à destination des collectivités locales : ingénierie territoriale, offres de financement en prêts, avances remboursables et participation à des sociétés de projet. Cette offre peut être mise à profit par les collectivités dans les phases préparatoires aux projets, pour l'élaboration de stratégies patrimoniales sur les parcs de bâtiments publics notamment scolaires. Dans ce cadre :

- 500 millions d'euros d'investissement en fonds propres via l'offre « intracting » sont prévus : la BDT apporte 50 % du besoin de financement via des avances remboursables de 500 000 euros à 5 millions d'euros, remboursées par les économies réalisées ;

- 2 milliards d'euros proviennent des prêts sur fonds d'épargne : ces prêts financent les travaux de rénovation pour des projets visant une réduction de consommation énergétique d'au moins 30 % ;

- les Edu-prêts, distribués par la Banque des territoires pour les investissements éducatifs, peuvent également servir à la rénovation énergétique des bâtiments scolaires ;

- 1 milliard d'euros sur 5 ans sont mobilisé par la Banque des territoires sous forme de prêts pour compléter le fonds vert.

b) Les aides européennes

Les fonds européen d'investissement structurels (FESI), et en particulier le fonds européen de développement régional (FEDER), peuvent également être une source de financement pour la transition écologique des collectivités.

Les subventions de l'État, de l'Union européenne (FEDER, ELENA...) ainsi que des établissements publics de coopération intercommunale (fonds de concours...) peuvent être cumulées dans une limite de 80 % du montant prévisionnel de la dépense subventionnable.

Les principaux fonds européens bénéficiant à la France sont le Fonds européen de développement économique régional (FEDER), le Fonds social européen (FSE), le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) et le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP). Ces 4 fonds, pour la France, s'élèvent, pour la période 2021-2027, à 30,4 milliards d'euros soit 4 milliards d'euros par an.

Si la proportion des FESI bénéficiant aux collectivités n'est pas connue au global, une étude a été menée sur la période 2014-2020 pour le FEDER : sur la période, 31 % des projets financés par le FEDER ont été portés par des collectivités. Par extension, le financement des collectivités par les fonds européens pourrait s'établir à environ 10 milliards d'euros sur 7 ans soit 1,4 milliard d'euros par an.

Les FESI présentent des objectifs relatifs au climat et à l'environnement qui ont été établis lors des nouvelles programmations 2021-2027. Ainsi, à titre d'exemple, à l'échelle de la France, les projets en faveur d'une économie décarbonée doivent représenter 30 % des projets financés par le FEDER (en valeur).

2. Un accès aux dotations à simplifier

Face aux besoins d'investissement à financer par les collectivités territoriales pour leur transition écologique, le recours aux dotations est une source de financement majeure.

Pour autant l'accès à ces dotations, malgré les démarches mises en oeuvre par le Gouvernement pour simplifier les demandes (cf. « mes démarches simplifiées ») reste complexe à plusieurs titres.

a) Des calendriers non concordants

Les calendriers relatifs aux demandes de dotations diffèrent d'une subvention à l'autre même s'il est commun entre la DETR et la DSIL. 

Or, en raison du caractère fermé des enveloppes de chaque dotation, les préfets peuvent réorienter les demandes des collectivités vers une autre dotation dans les cas où la première dotation sollicitée serait déjà intégralement attribuée.

Mais l'absence d'alignement des calendriers infra annuels entre les dotations d'État elles-mêmes et celles des départements ou des régions ou encore celles en lien avec les initiatives contractuelles, de même que la lenteur d'instruction évoquée par de nombreuses associations d'élus lors des auditions et enfin une absence d'homogénéité dans les pièces demandées rendent parfois un nouveau dépôt difficile, voire impossible.

Les élus ont fait part de délais très contraints pour déposer des dossiers. De sorte que, certaines petites communes, peu dotées en ingénierie, n'ont pu déposer que des dossiers de rénovation de l'éclairage public, relativement simples à élaborer, souvent non sélectionnés par les préfectures.

Les calendriers DETR et DSIL sont, par ailleurs, variables d'un département à l'autre ce qui crée une rupture d'égalité dans le traitement des dossiers en fonction des territoires.

Enfin, le calendrier des appels à projets peut ne pas correspondre au cycle de vie des projets, ce qui peut entrainer du financement de projets par effet d'aubaine (l'État vient financer des projets qui auraient été conduits sans son soutien) ou au contraire décourager des projets qui sortent des calendriers prévus par les financeurs pour des problèmes de concordance des calendriers.

Les rapporteurs spéciaux, à cet égard, ne peuvent que rappeler leur recommandation formulée dans leur rapport de juillet 2022 sur les dotations d'investissement11(*) d'articuler les initiatives contractuelles impulsées par l'État, les régions et les départements, en les regroupant autant que possible dans des contrats-cadres globaux ou a minima en alignant leurs calendriers.

Le fait que les crédits du fonds vert ne passent pas par un processus d'appel à projets est donc une amélioration à cet égard et a donc été accueilli favorablement par les collectivités et les associations d'élus. Pour autant, la faible association des élus à la décision a en revanche été très fortement critiquée et jugée en retrait des promesses.

Enfin, s'agissant du financement d'investissements en lien avec la transition énergétique qui s'inscrivent nécessairement dans le temps long, la mise en place d'un calendrier pluriannuel pourrait s'avérer utile afin de donner de la visibilité aux collectivités. Un tel calendrier ne peut cependant être mis en oeuvre sans une programmation pluriannuelle des dotations d'investissement qui n'existe pas à ce jour.

b) Des fiches techniques « ésotériques »

Pour les seules DETR et DSIL, les documents à fournir sont les suivants :

- une note explicative précisant l'objet de l'opération, les objectifs poursuivis, sa durée, son coût prévisionnel global ainsi que le montant de la subvention sollicitée ;

- la délibération du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale adoptant l'opération et arrêtant les modalités de financement ;

- le plan de financement prévisionnel précisant l'origine ainsi que le montant des moyens financiers et incluant les décisions accordant les aides déjà obtenues ;

- le devis descriptif détaillé qui peut comprendre une marge pour imprévus ;

- l'échéancier de réalisation de l'opération et des dépenses ;

- une attestation de non-commencement de l'opération et d'engagement à ne pas en commencer l'exécution avant que le dossier ne soit déclaré ou réputé complet ;

- en cas d'acquisitions immobilières : le plan de situation, le plan cadastral et dans le cas où l'acquisition du terrain est déjà réalisée, le titre de propriété et la justification de son caractère onéreux ;

- pour les travaux : un document précisant la situation juridique des terrains et immeubles et établissant que le demandeur a ou aura la libre disposition de ceux-ci, le plan de situation, le plan de masse des travaux, le programme détaillé des travaux, le dossier d'avant-projet, s'il y a lieu.

De surcroit, l'instruction du 8 février 2023 précise que toute pièce non mentionnée et qui paraitrait utile pour l'instruction du dossier peut être demandée par les services instructeurs, ce qui sous-entend que ces pièces complémentaires peuvent différer d'un département à l'autre.

Pour le fonds vert, chaque candidature doit être impérativement constituée :

- du formulaire de présentation du projet, à remplir en ligne complété par des documents listés dans le formulaire ;

- d'une lettre d'engagement sur l'honneur signée par la personne habilitée à engager le porteur du projet. Si des partenaires sont associés au projet, le porteur de projet devra apporter la preuve qu'il représente valablement les autres partenaires dans cette démarche ;

- du relevé d'identité bancaire du porteur de projet ;

- pour tout porteur de projet un tableau indiquant les subventions et les aides publiques, de toute nature, directes et indirectes, attribuées par des personnes publiques perçues par la structure porteuse ;

- une description du protocole d'acquisition de connaissance envisagé ;

- le calendrier de réalisation de l'opération comprenant notamment sa date prévisionnelle d'achèvement ;

- la nature, le montant de la dépense subventionnable rattachée au projet, et ses modalités de calcul.

Les petites collectivités sont celles qui pâtissent le plus de cette multitude de pièces à fournir allant même jusqu'à qualifier certains fiches à compléter d' « ésotériques ».

Dans ce contexte, d'autres collectivités entendues durant l'instruction, appellent de leurs voeux la mise en place d'un guichet unique de dépôt des demandes avec une liste commune de pièces justificatives, en charge pour les préfectures, au regard des taux de consommation de chaque dotation, d'orienter directement les dossiers vers un système de financement plutôt qu'un autre.

Si cette évolution présente un avantage certain pour les collectivités, elle se heurte cependant à une difficulté technique résultant du fait que certaines demandes sont instruites par les préfectures de département, d'autres par celles de régions et d'autres, enfin, par les conseils départementaux ou régionaux eux-mêmes.

À tout le moins, faut-il envisager une liste des pièces justificatives unique pour toutes les dotations d'investissement complétée par des pièces spécifiques, également communes à toutes les dotations, pour les projets « verts » afin de tenir compte notamment de l'impact environnemental et des économies d'énergie attendues.

Recommandation n° 2 : établir une liste unique des pièces justificatives à l'appui des demandes de dotations d'investissement afin de faciliter la constitution des dossiers par les collectivités et leur transfert vers d'autres dotations (DGCL).

B. UN FINANCEMENT « VERT » QUI PRÉSENTE LES MÊMES BIAIS QUE LES DOTATIONS D'INVESTISSEMENT CLASSIQUES : NOMBREUX CRITÈRES PEU LISIBLES, FAIBLE CONSULTATION DES ÉLUS ET MANQUE DE SOUTIEN À L'INGÉNIERIE

1. Un emploi des dotations contraint par de nombreux critères et encadré par les priorités de l'État sans consultation des élus

Comme l'avaient souligné les rapporteurs spéciaux dans leur rapport sur les dotations d'investissement de juillet 2022, les nombreux critères plus ou moins formalisés, au niveau national comme au niveau local, se révèlent peu lisibles pour les collectivités et sont parfois, cumulés les uns avec les autres, trop restrictifs pour permettre de retenir des projets présentant un réel intérêt pour le territoire.

Si une uniformisation des critères locaux n'est pas souhaitable, ces derniers doivent cependant faire l'objet d'une information plus transparente à destination des élus.

Par ailleurs, les priorités d'investissement définies au niveau national sont parfois déconnectées des besoins des territoires. Dans ce contexte, de nombreux élus ont appelé à un renforcement des pouvoirs consultatifs des élus locaux et nationaux sur l'octroi des dotations.

La loi de finances pour 201812(*) a introduit une première évolution en ce sens, en abaissant de 150 000 à 100 000 euros le montant de subvention proposé par le préfet au-delà duquel une saisine pour avis de la commission est requise13(*).

Les rapporteurs spéciaux avaient, par ailleurs, formulé trois recommandations dans ce sens dans leur rapport de juillet 2022 sur les dotations d'investissement et avaient, pour y donner suite, déposé trois amendements lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2023. L'un d'eux, concernant l'obligation d'une communication annuelle du préfet de département à la commission DETR sur l'emploi de la DSID dans le département, a été intégré au texte finalement considéré comme adopté par l'Assemblée nationale14(*).

Si des améliorations sont donc constatées concernant la consultation des élus, des progrès sont encore possibles.

2. Un manque d'ingénierie qui peut pénaliser les plus petites collectivités dans l'accès aux dotations d'investissement

Les enveloppes portées par l'État et ses opérateurs sont souvent gérées sous la forme d'appels à projet auprès des collectivités qui viennent de cette façon boucler le plan de financement de leurs opérations. Le simple fait de monter les réponses à ces appels, sans avoir la certitude d'être retenu in fine, demande aux porteurs de projet des moyens de veille et d'ingénierie dédiés.

De plus, les appels à projets nécessitent de produire du reporting. Ces compétences et ces moyens humains peuvent manquer notamment dans les petites collectivités. Or, dans un contexte de subventionnement dans une logique d'appel à projets d'une part et de prise en compte de la maturité des projets d'autre part, un biais peut se créer en faveur des collectivités les plus importantes et/ou les plus riches disposant de moyens humains suffisants leur permettant l'élaboration des dossiers complets dans des délais courts.

II. UN FINANCEMENT DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE DES COLLECTIVITÉS À REPENSER ET DES NIVEAUX DE CONSOMMATION DES DOTATIONS « VERTES » À AMÉLIORIER POUR RÉPONDRE AUX ENJEUX

A. LES MODALITÉS DE FINANCEMENT POUR LES INVESTISSEMENTS À VENIR : UN MODÈLE À REPENSER PLUS LARGE QUE LES SEULES DOTATIONS

Comme vu supra, les contraintes budgétaires pesant sur les finances locales sont importantes dans un contexte inflationniste.

Or, les élus à la tête des communes et intercommunalités principalement, mais aussi des départements et régions ont la responsabilité de prévoir un doublement de leurs investissements pour le climat (en faveur des aménagements cyclables, transports en commun, rénovation énergétique des bâtiments publics...) dans les prochaines années.

Pour rappel, le chiffre annoncé pour les prochaines années pour atteindre l'objectif de moins 60 % de consommation d'énergie à horizon 2050 nécessiterait, a minima, environ 12 milliards d'investissement par an d'ici 2030.

Une telle montée en puissance doit se programmer et nécessite de penser les moyens de la financer, que ce soit par ressources propres, fiscalité, endettement, dotations de l'État etc.

Elle nécessite surtout une visibilité pluriannuelle puisque ces investissements lourds ne peuvent s'inscrire que dans une temporalité longue allant souvent au-delà de la durée d'un mandat local.

Or, à ce jour, les niveaux des dotations d'investissement sont fixés annuellement en loi de finances sans certitude pour les années postérieures à N+ 1. Comme évoqué par de nombreux élus lors des auditions menées par les rapporteurs spéciaux, cette absence de prévisibilité des financements apparait comme un obstacle au lancement de certains investissements.

Il semble donc nécessaire :

- d'une part, de prévoir une programmation pluriannuelle des investissements locaux et de leur financement, notamment via les contrats de relance et de transition écologique (CRTE) ;

- d'autre part de pouvoir envisager l'endettement des collectivités sous un nouveau prisme (voir infra).

1. Vers un volet financier des contrats de relance et de transition écologique (CRTE) 

Si les CRTE ont représenté un progrès en termes d'approche globale des projets nécessaires à un territoire en ce qu'ils ont permis de recenser tous les projets communaux et intercommunaux dans un contrat intégrateur permettant une mise en cohérence des différents dispositifs existants, force est de constater que cette démarche d'intégration n'a pas été exempte de failles et critiques formulées par les élus locaux.

À cet égard, la réalisation dans l'urgence de ces contrats s'est parfois conclue par une addition de projets sans priorisation ni stratégie. De surcroit, « la logique de « relance » a clairement pris le pas sur l'ambition de « transition écologique ». Les projets soutenus étaient souvent déjà ficelés, même s'ils n'étaient pas forcément aussi vertueux qu'espérés » comme l'indique le rapport d'information de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales de Mme Brulin et M. Guené sur l'ANCT15(*).

Enfin, la critique la plus prégnante porte sur l'absence de volet financier des CRTE. En effet, les CRTE comportent effectivement une annexe (maquette financière) mais qui ne concerne que la DETR et la DSIL et porte sur une seule année. Il parait indispensable qu'un volet financier complet soit annexé aux CRTE comprenant notamment l'ensemble des dotations potentiellement sollicitées auprès des préfectures mais également des opérateurs de l'État, de la Banque des territoires, des fonds européens... avec un cadre pluriannuel.

Ce volet financier apporterait une visibilité dans le temps et une garantie pour les collectivités.

Recommandation n° 3 : développer un volet financier pluriannuel aux contrats de relance et de transition écologique - CRTE (État, préfectures, collectivités).

2. Vers une appréciation différenciée de la dette des collectivités

Historiquement, l'État a toujours tenté de limiter la dette des collectivités territoriales en surveillant notamment leur capacité de désendettement avec un seuil d'alerte fixé à 12 ans. Dans le même sens, les chambres régionales des comptes s'attachent à vérifier la soutenabilité financière des investissements, leurs modalités de financement et la part du recours à l'emprunt.

Dans ce contexte, les ratios de désendettement actuels des collectivités sont aujourd'hui faibles : les capacités de désendettement du bloc communal sont inférieures à cinq ans, du bloc départemental inférieures à trois ans, et du bloc régional inférieures à six ans et demi.

Des marges d'emprunts sont donc possibles pour financer des investissements en faveur de la transition écologique à la condition que l'acceptabilité de la dette se développe.

Les élus se trouvent cependant pris dans un jeu d'injonctions contradictoires leur demandant d'investir massivement dans la transition écologique tout en réduisant leur endettement.

En effet, alors que la dette doit être considérée comme une modalité nécessaire de financement des investissements en faveur de la transition écologique en complément des dotations de l'État et des capacités d'autofinancement des collectivités, elle reste relativement mal acceptée par le ministère de l'économie et des finances, faute de pouvoir distinguer finement l'objet de l'endettement, mais également par certains élus locaux par crainte d'être taxés de mauvais gestionnaires ou de devoir augmenter les impôts locaux afin de couvrir la charge de la dette. Il est à cet égard significatif de constater que l'article 23 du projet de loi de programmation des finances publiques (PLPFP) pour les années 2023 à 2027, rejeté par le Sénat, contenait toujours un dispositif d'encadrement de la capacité de désendettement des collectivités territoriales, reconduisant à l'identique les dispositions prévues à cet égard dans le cadre des « contrats de Cahors » institués dans le cadre de la LPFP 2018-202216(*). Il conviendrait dès lors d'établir de nouveaux ratios de dette afin d'identifier plus clairement et d'isoler celle ayant permis le financement d'investissements en faveur de la transition écologique.

Recommandation n° 4 : isoler dans les ratios d'endettement la part de la dette permettant de financer des investissements en faveur de la transition écologique (DGFIP).

3. Vers le développement de budgets verts pour les collectivités

Le budget vert vise à qualifier l'ensemble des lignes de dépenses des collectivités territoriales afin de savoir, au regard de la taxonomie européenne, si elles concourent à un objectif de transition écologique. Il représente un outil intéressant pour valoriser l'action des collectivités territoriales en matière de préservation de l'environnement et identifier, le cas échéant, les leviers pour accroître l'efficacité de leur action dans ce domaine.

Pour autant, la mise en oeuvre généralisée d'un budget vert pour les collectivités n'est pas sans poser certaines difficultés.

Au préalable, elle nécessite la définition des dépenses concourant à la transition écologique. Cet exercice est délicat dans la mesure où certaines dépenses (construction d'une piste cyclable, construction d'un bâtiment scolaire sur terrain inoccupé, ...) peuvent poursuivre plusieurs objectifs.

Par ailleurs, la cotation de certaines dépenses est parfois malaisée. En atteste le budget vert de l'État au sein duquel 16,5 % des dépenses soit 94 milliards d'euros ne sont pas côtés et 416 milliards d'euros sont côtés « neutre » alors même que cette classification peut faire débat.

À titre d'exemple, au sein de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » la grande majorité des actions, porteuses de dotations, sont « non cotées » en raison de la liberté d'emploi de ces crédits par les collectivités. Dès lors, le budget vert 2023 de l'État ne retient que la dotation de soutien à l'investissement (DSIL) exceptionnelle (215 millions d'euros en CP) comme « favorable » ainsi que 25 % des crédits relatifs à la DSIL (144 millions d'euros en CP). Or, une partie de la DETR et de la DSIL est également orientée vers la rénovation thermique et la transition écologique (respectivement plus de 156 millions d'euros et 89 millions d'euros en exécution 2021). De même, les 41,6 millions d'euros de la dotation biodiversité pourraient facilement être considérés comme favorables.

Enfin, les budgets verts mis en oeuvre à ce jour par certaines collectivités reposent sur des documents extrabudgétaires de valorisation, sans lien avec la comptabilité par nature ou par fonction. Ils permettent de valoriser l'action des collectivités, mais ne sont pas transposables dans un modèle unique et ne permettent pas de remontées d'information nationale.

Dans ce contexte, il pourrait être envisagé, tout en conservant la nature extrabudgétaire et facultative de ces documents dans un premier temps, de lancer une consultation avec les collectivités afin de formaliser un document unique avec des catégories alignées sur la taxonomie européenne qui permettrait de classer les dépenses d'investissement pour tout ou partie (quand ces dernières poursuivent plusieurs objectifs). Ce document pourrait ensuite être utilisé de manière facultative par les collectivités puis de façon échelonnée de manière obligatoire et, dans un second temps être étendu aux dépenses de fonctionnement.

Recommandation n° 5 : mettre en place une consultation des élus locaux afin de développer un document unique et formalisé permettant de classer les dépenses d'investissement des collectivités comme neutres, favorables, mixtes ou défavorables à l'environnement (DGCL, DGFIP).

Cette première étape semble un préalable indispensable avant d'envisager la mise en oeuvre obligatoire d'un budget vert.

À cet égard, un amendement du Gouvernement déposé lors de l'examen du PLPFP 2023-2027 prévoyait la mise en place d'annexes au budget des collectivités les plus importantes listant les dépenses favorables, défavorables ou neutres sur l'environnement. Il n'avait pas été adopté après un avis défavorable de la commission des finances qui estimait la démarche prématurée en l'absence de consultation des collectivités.

4. Les autres pistes envisageables

D'autres pistes pour encourager le financement de la transition écologique des collectivités sont envisageables.

Elles nécessiteront cependant des études préalables ainsi qu'une consultation des élus locaux et des modifications budgétaires et comptables qui ne peuvent se faire sans consultation, pour certaines d'entre elles, de l'autorité des normes comptables (ANC) et du conseil de normalisation des comptes publics (CNOCP).

a) Concernant le FCTVA

Ainsi, un verdissement du FCVTA pourrait être envisagé. Cependant, au regard de la réforme d'automatisation du fonds, les dépenses éligibles sont celles enregistrées dans certains comptes qui peuvent regrouper des dépenses favorables ou défavorables à la transition écologique des collectivités. À titre d'exemple, parmi les comptes 215 (installations, matériel et outillages) les dépenses de voirie sont a priori « brunes » alors que les dépenses de réseaux d'eau et d'assainissement sont généralement « vertes », sous certaines conditions. De même les constructions du compte 213 seront vertes si réalisées selon des critères de qualité environnementales et brunes dans d'autres cas.

Aussi, un verdissement du FCTVA nécessiterait de créer de nouvelles catégories de comptes ou de revenir à des déclarations partiellement manuelles afin de distinguer les dépenses brunes, vertes ou neutres. Il convient cependant de relever qu'une telle réforme aurait pour conséquence une perte d'éligibilité au dispositif de certains projets « bruns » auparavant éligibles. Pour garantir son acceptabilité, une telle réforme doit se fixer un objectif d'enveloppe budgétaire a minima constante en faveur du financement de l'investissement des collectivités territoriales.

b) Concernant la dotation globale de fonctionnement

La dotation globale de fonctionnement pourrait également, dans ses critères d'attribution et modalités de calcul, retenir des critères environnementaux à définir. Cette piste ne parait cependant réalisable qu'à la condition d'une refonte totale de cette dotation devenue trop complexe, refonte appelée de leurs voeux par nombre d'élus locaux et de parlementaires.

c) Concernant l'autofinancement et les modalités d'amortissement

Une part du financement de la transition écologique des collectivités provient de leur autofinancement. Or, l'amortissement des immobilisations est une composante de cet autofinancement puisqu'il consiste en une forme de prélèvement sur la section de fonctionnement destiné à financer la section d'investissement et à assurer notamment le renouvellement des immobilisations.

Pourtant, les obligations d'amortissement pour les communes portent sur moins de 7 % de leur patrimoine immobilisé tandis que les départements et régions, en contrepartie d'une obligation d'amortissement plus étendue, peuvent neutraliser l'impact budgétaire de cet amortissement.

Dans ce contexte, pour les communes les plus importantes et les EPCI, le champ des biens amortissables pourrait être élargi en s'alignant sur celui des départements et des régions. L'ensemble des immobilisations nouvelles des communes seraient ainsi soumises à l'obligation d'amortissement à l'exception des terrains, par définition non amortissables, et des réseaux et installations de voirie dont l'amortissement resterait facultatif.

Cet élargissement du champ de l'amortissement obligatoire ne vaudrait que pour les nouvelles immobilisations sans rattrapage du stock d'immobilisations déjà comptabilisées et jamais amorties. En revanche, les dotations aux amortissements ne pourraient pas être neutralisées sur le plan budgétaire pour qu'elles jouent pleinement leur rôle d'autofinancement de l'investissement.

Concernant les départements et les régions, le champ de l'amortissement obligatoire, plus large que celui des communes et des EPCI pourrait être maintenu mais les possibilités de neutralisation budgétaire des amortissements pourraient être supprimées pour les nouveaux investissements.

d) Concernant la fiscalité locale

La transition écologique des collectivités passe également par la mise en place du principe de « zéro artificialisation nette » consacré par la loi « Climat et résilience » du 22 aout 2021 qui fixe cet objectif d'ici 2050. Aussi, la question de la fiscalité locale comme outil de la transition écologique des collectivités doit être posée.

Un récent rapport du conseil des prélèvements obligatoires (CPO) sur la fiscalité locale dans la perspective du ZAN17(*), demandé par la commission des finances du Sénat, souligne que la fiscalité locale actuelle n'apparaît pas artificialisante et ne comporte pas d'incitations particulières en faveur de l'artificialisation ni en faveur de la désartificialisation des sols.

Pour autant, le Conseil estime que le renforcement de dispositifs fiscaux ciblés concernant notamment les logements vacants, les résidences secondaires et les opérations de recyclage urbain pourraient être de nature à accélérer la mise en oeuvre du ZAN.

À l'inverse, plusieurs taxes locales prévoient des dispositifs dont l'effet peut se révéler artificialisant. Ainsi, la taxe d'aménagement prévoit des dispositifs d'abattement d'assiette et d'exonérations au bénéfice de nombreux aménagements artificialisants comme les locaux d'habitation financés par un prêt à taux zéro (PTZ), les locaux à usage industriel et commercial, et, pour une large part, les logements individuels, en prévoyant un abattement sur les 100 premiers mètres carrés d'une résidence principale.

De même, la taxe foncière sur les propriétés bâties prévoit des exonérations temporaires pour les constructions neuves (deux ans), et les logements sociaux sous conditions.

Dans ce contexte, une réflexion semble nécessaire sur les mesures qui pourraient être mises en oeuvre pour une fiscalité locale plus incitative d'un point de vue de l'environnement. Cette réflexion parait d'autant plus nécessaire que le ZAN pourrait avoir des conséquences sur les recettes fiscales des collectivités avec des variations sensibles entre celles-ci. Ce risque de distorsion concerne également les dotations de l'État, la DGF au premier chef, prenant en compte des critères tels que le nombre de kilomètres de voirie ou le nombre d'habitants.

Dans ce contexte, le CPO recommande d'ailleurs d'intégrer les effets du ZAN dans les mécanismes de solidarité à destination des collectivités.

Comme le démontrent les nombreuses pistes envisageables, les dotations seules ne peuvent suffire à financer la transition écologique des collectivités. Des moyens pour faciliter l'autofinancement ou le recours à l'emprunt doivent être déployés, de même qu'une réflexion sur la fiscalité locale doit être menée. Les rapporteurs spéciaux estiment donc nécessaire l'ouverture d'une phase active de consultation pour aborder tous les vecteurs possibles.

5. Des efforts à faire sur la prévisibilité des ressources des collectivités

La participation des collectivités à la transition écologique et à l'atteinte des objectifs de décarbonation ne pourra se mettre en place pleinement qu'à la condition de leur assurer une prévisibilité de leurs ressources tant de fonctionnement que d'investissement.

Or, l'incertitude qui pèse sur les finances locales est aujourd'hui importante (comme vu supra) tant sur leurs dépenses sous l'effet d'une crise énergétique qui s'inscrit dans la durée et du retour de l'inflation, que sur leurs ressources avec la disparition de plusieurs impôts locaux compensés par des fractions de TVA et de nouvelles dotations d'investissement (notamment le fonds vert) dont la prolongation et les montants à venir n'ont pas encore été arbitrés.

Cette prévisibilité des ressources est d'ailleurs une préconisation de la Cour des comptes dans son rapport sur les scénarios de financement des collectivités territoriales18(*).

Recommandation n° 6 : mettre en place une consultation générale des élus locaux et des administrations sur le financement de la transition écologique des collectivités englobant l'ensemble des aspects budgétaires, comptables et fiscaux (SGPE).

B. DES NIVEAUX DE DOTATIONS ET DE CONSOMMATION DE CELLES-CI QUI DOIVENT ÊTRE REVUS À LA HAUSSE POUR RÉPONDRE PLEINEMENT AUX ENJEUX ET À L'URGENCE CLIMATIQUE

1. Des dotations classiques consommées quasi intégralement...

Les dotations d'investissement classiques, DETR, DSIL et DSIL exceptionnelle, présentent des taux de consommation compris entre 93,3 % et 99,9 % des crédits en AE et entre 67 % et 158 % (en raison de report N-1) en CP. Le delta pour atteindre 100 % résulte essentiellement de la réserve de précaution, de sorte que la consommation des crédits disponibles avoisine les 100 % pour les AE.

Les niveaux d'engagement des AE et de consommation de CP mettent en exergue deux phénomènes :

la bonne gestion par les collectivités des crédits alloués pour des opérations matures ;

le besoin important de financement des investissements par les collectivités et subséquemment l'utilité de ces dotations.

Ce dernier constat corrobore le témoignage des associations d'élus auditionnées par les rapporteurs spéciaux, qui ont fait état du très fort dynamisme actuel des projets d'investissement dans les territoires, ce dont on ne peut que se féliciter.

À cet égard, nul doute que des enveloppes bien plus élevées de dotations de l'État seraient également consommées dans leur intégralité.

Taux de consommation des AE et CP des dotations classiques entre 2020 et 2022

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

2. ... mais des niveaux de consommation de CP relativement faibles et en deçà des objectifs affichés pour les dotations spécifiquement dédiées aux enjeux environnementaux

Si les niveaux d'engagement des AE sont proches de 100 % pour la DRI et la dotation de rénovation thermique, la consommation des CP n'atteint pas les objectifs cible mentionnés dans les circulaires relatives à ces deux dotations.

En effet, concernant la DRI, l'instruction du 11 décembre 2020 stipulait que « le niveau de maturité repose sur la garantie d'engager l'opération au 31 décembre 2021. C'est-à-dire que, sauf très rare exception pour lesquelles une explication devra être transmise à la DGCL, les marchés doivent être notifiés au plus tard à cette date pour contribuer à la relance immédiate de l'économie. Le calendrier de mise en oeuvre devra assurer une date de livraison prévisionnelle avant le 31 décembre 2022, à l'exception de quelques projets exceptionnels par l'ampleur ou la complexité des travaux à mener (rénovation globale par exemple) ».

Or, fin 2022, seuls 48 % des CP ont été consommés sur l'ensemble des AE ouverts avec des niveaux très variables d'une région à l'autre, allant de 16 % en Corse à 95 % en Occitanie.

Un avenant à la convention de délégation de gestion du plan de relance signé par la DGCL et la direction du budget (DB) a, dès lors, prévu un échéancier de consommation des CP jusqu'à 2024. Cependant, la consigne arrêtée par la DGCL et la DB et transmise en novembre 2022 aux préfets de région fixe une échéance de consommation de la totalité des crédits au 31 décembre 2023, reportant le délai initial fixé au premier trimestre 2023.

Taux de consommation des AE et CP de la DRI entre 2021 et 2022

Source : commission des finances du Sénat à partir des données DGCL

Concernant la dotation de rénovation thermique, l'instruction relative au soutien à la rénovation énergétique des bâtiments des collectivités du 18 novembre 2020 précisait que : « l'opération proposée sera appréciée à travers son niveau de maturité et son calendrier de mise en oeuvre. Le niveau de maturité repose sur la garantie d'engager l'opération au 31 décembre 2021, c'est-à-dire que les marchés doivent être notifiés au plus tard à cette date. Le calendrier de mise en oeuvre devra assurer une date de livraison prévisionnelle avant le 31 décembre 2022, à l'exception de quelques projets exceptionnels par l'ampleur ou la complexité des travaux à mener (rénovation globale par exemple) pour lesquels une partie des CP pourront être versés début 2023 ».

Or, fin 2022, seuls 55 % des CP ont été consommés sur l'ensemble des CP ouverts avec des niveaux de reports très importants, à hauteur de 324,3 millions d'euros entre 2021 et 2022 et de 238,9 millions d'euros entre 2022 et 2023. Sur les 950 millions d'euros d'AE, les CP consommés au 31 décembre 2022 représentent seulement 31,3 % en deux ans. Dans le détail, en cumulé sur 2021-2022, le taux de décaissement des CP est légèrement plus fort pour la DSIL-RT (32,5 % des AE couvertes par des CP au 31/12/n+1) que pour le taux moyen observé pour la DSIL (27,7 % des AE couvertes par des CP en moyenne au 31 décembre n+1). La consommation des CP de la DSID-RT est en revanche légèrement moins rapide que pour la DSID classique (28,7 % contre 32,9 % au 31 décembre n+1).

Dans ce contexte, l'échéance du 31 décembre 2022 a été prolongée jusqu'au 31 décembre 2023, afin de répondre aux difficultés conjoncturelles rencontrées par les collectivités.

Il parait cependant peu probable que l'intégralité des CP soit consommée d'ici la fin de l'année, l'exécution devant probablement se poursuivre en 2024, voire 2025.

Taux de consommation des AE et CP de la dotation RT
entre 2021 et 2022

Source : commission des finances du Sénat à partir des données DGCL

Cet étalement des consommations de CP peut s'expliquer par plusieurs facteurs et notamment la conjoncture économique qui a pu ralentir la conduite des chantiers en cours.

Cependant, l'organisation administrative des préfectures pour le suivi des dossiers est également en cause. En effet, la hausse continue depuis deux ans des dotations d'investissement et, subséquemment du nombre de dossiers déposés, à moyens constants dans les services instructeurs des préfectures, a également contribué à un ralentissement des lancements des projets.

Enfin, comme évoqué supra, le manque de capacités d'ingénierie de certaines collectivités, et notamment les plus petites, a pu desservir le dépôt de certains dossiers.

Il en résulte que les délais très contraints fixés initialement dans le plan de relance paraissaient peu réalistes et tenables.

Dès lors, si la hausse des dotations d'investissement est indispensable et doit se poursuivre pour accompagner les collectivités dans leur transition écologique, elle ne peut être envisagée comme un moyen unique. Dans ce domaine, l'accompagnement de l'État ne peut se limiter au seul aspect budgétaire.

TROISIÈME PARTIE
DES FREINS QUI DOIVENT ÊTRE LEVÉS POUR RÉUSSIR PLEINEMENT LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE DES COLLECTIVITÉS

I. UN VERDISSEMENT ESSENTIELLEMENT ORIENTÉ VERS LA RÉNOVATION THERMIQUE QUI DOIT SE DIVERSIFIER POUR RÉPONDRE À L'ENSEMBLE DES ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX

A. L'ESSENTIEL DES PROJETS FINANCÉS PORTE ACTUELLEMENT SUR LA RÉNOVATION THERMIQUE DES BÂTIMENTS

1. En raison des enjeux budgétaires, les investissements sont principalement axés sur les travaux permettant des économies d'énergie

Comme vu supra, 76 % de la consommation d'énergie des collectivités territoriales sont dus aux bâtiments, le delta résultant de l'éclairage public (11 %), de la gestion des déchets et de l'eau (8 %) et des carburants (6 %).

Dans ce contexte, les investissements environnementaux des collectivités portent essentiellement sur la rénovation thermique de leurs bâtiments.

En premier lieu, la dotation RT (rénovation thermique) est exclusivement centrée sur la rénovation thermique des bâtiments, soit un montant total alloué à cet axe écologique de 950 millions d'euros.

Par ailleurs, en 2021, sur les 600 millions d'euros d'AE ouverts au titre de la DRI, 420 millions d'euros ont également été orientés sur la rénovation thermique des bâtiments (soit 268 projets sur les 348 financés).

Enfin, concernant le fonds vert, la répartition prévisionnelle des 2 milliards d'euros affiche une affectation de 707 millions d'euros à la performance environnementale, dont essentiellement de la rénovation énergétique bâtimentaire.

A contrario, pour la DETR, la DSIL et la DSIL exceptionnelle il est plus difficile de mesurer la part des dotations ayant financé des projets de rénovation énergétique. Cependant, sur les 402,5 millions d'euros alloués à des projets environnementaux en 2021 (soit 21 % du total de ces trois dotations), l'analyse des libellés des projets tend à démontrer que la rénovation énergétique des bâtiments est majoritaire dans les projets financés.

La structure actuelle du suivi de l'exécution des dotations montre donc actuellement un biais en faveur de la rénovation thermique qu'il conviendrait de corriger dans les années à venir.

2. Les autres enjeux écologiques qui doivent être financés

La transition écologique des collectivités territoriales ne peut se résumer à la seule rénovation thermique des bâtiments. En effet, les besoins d'investissements sont également nombreux en termes de traitements des déchets et eaux usées, de revégétalisation et reforestation, de protection de la faune et de la flore ou encore de développement des énergies renouvelables.

Des efforts, aisés à mettre en oeuvre, doivent également être faits sur le parc automobile des collectivités.

Toutefois, à défaut d'une classification plus précise des projets financés et de connaissance de la part respective, au sein d'un même projet, des différentes composantes environnementales, il est impossible, à ce stade, d'avoir une vision exhaustive de l'utilisation qui est faite des dotations par axe environnemental.

Dans ce contexte, les rapporteurs spéciaux renvoient à leur recommandation n° 1 visant à se doter d'outils de suivi plus fins permettant une réelle analyse des projets « verts » financés et notamment des domaines environnementaux qu'ils impactent.

De surcroit, les taux de retour d'investissement, c'est-à-dire les économies qui peuvent en découler, sont moins importants dans ces domaines que ceux concernant la rénovation thermique ce qui peut également expliquer la priorité qui est faite aux travaux de rénovation thermique.

Dans ce contexte, il faut pouvoir s'extraire du prisme budgétaire de court-terme et des économies qui peuvent découler des investissements. En effet, à moyen et long terme, l'absence d'investissements pour la protection du climat, de la biodiversité... aura également un coût difficile à supporter bien que complexe à mesurer (exemple : la détérioration de biens publics en raison de l'accroissement de phénomènes météorologiques extrêmes).

B. VERS D'AUTRES PRIORITÉS AVEC LA DOTATION « BIODIVERSITÉ » ET LE FONDS VERT ?

La dotation de biodiversité et le fonds vert permettent de sortir du prisme de l'investissement environnemental sous le seul angle de la rénovation thermique.

1. La dotation de biodiversité : une démarche louable mais largement insuffisante

Cette dotation a vocation à compenser une partie des charges spécifiques supportées par les communes en matière de protection de la biodiversité, en raison du classement de leur territoire en tout ou partie dans un espace protégé, mais également à soutenir la production d'aménités rurales par les collectivités territoriales. L'utilisation de la dotation n'est pas fléchée sur des actions spécifiques et les communes qui la perçoivent bénéficient d'une latitude concernant son affectation, à condition que cela s'inscrive dans l'objectif global poursuivi par ce dispositif.

Bien que son montant ait considérablement augmenté depuis sa création, passant de 5 millions d'euros à 41,6 millions d'euros par an, force est de constater que cette dotation n'était perçue que par 4 871 communes en 2022. Ce chiffre devrait être porté à environ 6 300 communes après les modifications intervenues en loi de finances pour 2023, soit environ 18 % des communes.

Or, les critères d'éligibilité sous-tendent qu'il ne faudrait soutenir, par cette dotation budgétaire, que les communes situées dans des zones protégées (Natura 2000 ou parcs naturels) alors même que la question de la protection de la biodiversité et du développement des aménités rurales, face aux enjeux climatiques et environnementaux, se pose désormais avec une acuité particulière, y compris dans les zones urbanisées et denses.

Selon le rapport « Le financement de la stratégie nationale pour la
biodiversité (SNB) pour 2030
 » de la mission commune de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable publié en novembre 2022, les dépenses publiques en faveur de la biodiversité représentaient en 2021 entre 2,3 et 4,7 milliards d'euros soit entre 0,2 % et 0,3 % de la dépense publique et se décomposent de la manière suivante :

- 2,3 milliards d'euros au titre des politiques de biodiversité, entendues dans un sens restreint couvrant les dépenses relatives aux aires protégées, à la préservation des espaces et des espèces, à la restauration écologique, à la protection du milieu marin ou encore à l'approfondissement des connaissances, à la mobilisation des acteurs et à la police de l'environnement ;

- 2,4 milliards d'euros au titre des autres politiques en lien avec la biodiversité et oeuvrant à la réduction des pressions exercées sur cette dernière, au sein d'un périmètre élargi aux dépenses en matière de grand cycle de l'eau, de transition agro-écologique ou encore de lutte contre l'artificialisation des sols.

Composition des dépenses publiques en faveur de la biodiversité en 2021

(en millions d'euros et en %)

Source : rapport « Le financement de la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) pour 2030 » de la mission commune de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable

Les collectivités seraient donc à l'origine de plus de 28 % des dépenses en faveur de la biodiversité soit 1,3 milliard d'euros. La dotation biodiversité ne représente donc que 3,1 % des dépenses des collectivités dans ce domaine.

Dans ce contexte, il parait nécessaire de continuer la montée en puissance de la dotation biodiversité pour la porter à un montant à la hauteur des enjeux notamment en élargissant le périmètre des villes éligibles (exemples : communes forestières, de montagne... qui ne sont pas dans des parcs naturels ou des zones Natura 2000).

Recommandation n° 7 : poursuivre la montée en puissance de la dotation biodiversité notamment en élargissant le périmètre des communes éligibles (DGCL, Direction du budget).

2. Le fonds vert : en théorie, une plus grande diversité des projets environnementaux financés, mais dont l'exécution devra être surveillée

Le guide relatif au fonds vert élaboré à destination des décideurs locaux précise les trois axes prioritaires et les mesures en découlant :

· Axe 1 : renforcer la performance environnementale

- rénovation énergétique des bâtiments publics ;

- soutien au tri à la source et à la valorisation des bio déchets ;

- rénovation des parcs de luminaires d'éclairage public ;

· Axe 2 : Adapter les territoires au changement climatique

- prévention des inondations ;

- appui aux collectivités de montagne soumises à des risques émergents ;

- renforcer la protection des bâtiments des collectivités d'outre-mer contre les vents cycloniques ;

- prévention des risques d'incendies de forêt ;

- recul du trait de côte ;

- fonds de renaturation des villes ;

· Axe 3 : Améliorer le cadre de vie

- accompagner le déploiement des zones à faibles émissions mobilité ;

- développement du covoiturage ;

- recyclage des friches ;

- accompagnement de la stratégie nationale biodiversité 2030.

Répartition des crédits du fonds vert

en euros (avant application du taux de mise en réserve)

AE

CP

Action 1 : Performance environnementale

706 666 666

176 666 666

Action 2 : Adaptation au changement climatique

393 333 334

98 333 334

Action 3 : Amélioration de la qualité du cadre de vie

900 000 00

225 000 000

Total

2 000 000 000

500 000 000

Source : direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN)

Si on retrouve au sein de l'axe 1 la rénovation énergétique déjà largement financée par les dotations classiques ainsi que par la DRI et la dotation RT, le fonds vert semble, en première intention, plus diversifié dans les projets qu'il vise à financer.

En effet, l'axe 2 est orienté sur l'adaptation au changement climatique et l'axe 3 sur l'amélioration du cadre de vie par le développement de mobilités moins polluantes ou l'accompagnement de la stratégie nationale biodiversité 2030. Si ce dernier domaine viendra utilement compléter la dotation biodiversité et soutenir les collectivités dans leurs dépenses en faveur de la biodiversité, le montant qui lui sera alloué sera potentiellement de 225 millions d'euros (un quart des crédits de l'axe 3 avant réserve de précaution) alors que comme vu supra, les dépenses des collectivités en faveur de la biodiversité s'élevaient, en 2021, à plus de 1,3 milliard d'euros.

Si une plus grande diversité des projets environnementaux financés ressort des axes prioritaires du fonds verts, les rapporteurs spéciaux appellent à la vigilance concernant l'exécution de ces crédits. En effet, selon le principe de fongibilité des crédits du fonds vert, des redéploiements entre mesures et entre axes pourront être effectués (à l'exception des 25 millions d'euros prévus pour l'appui à l'ingénierie et des 150 millions d'euros prévus pour la stratégie nationale biodiversité 2030).

La circulaire du 14 décembre 2022 prévoit toutefois que chacun des trois axes d'intervention devra représenter en exécution au moins 10 % des crédits et chaque mesure devra faire l'objet d'au moins un projet.

Il en résulte que si cette fongibilité est une garantie pour une consommation intégrale et rapide des crédits elle fait courir le risque, déjà identifié pour les dotations classiques, d'un financement essentiellement orienté vers la rénovation thermique bâtimentaire.

À cet égard, depuis l'ouverture de la réception des demandes d'aides le 18 janvier, 5 948 dossiers ont été reçus à fin avril 2023. Les dossiers déposés concernent notamment l'axe 1 « renforcer la performance environnementale », et plus précisément les mesures « rénovation énergétique des bâtiments publics » (40 % des dossiers déposés) et « rénovation des parcs de luminaires d'éclairage public » (28 % des dossiers déposés). Il en résulte qu'en l'état, avant sélection des dossiers, très peu de demandes concernent les autres axes.

Répartition des dossiers déposés par mesure

Source : direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN)

Ce premier constat confirme les remontées des élus locaux selon lesquelles les collectivités, notamment les plus petites ayant peu de ressources en ingénierie, présentent essentiellement des dossiers « faciles » et rapides à élaborer ne nécessitant que peu d'études techniques approfondies.

Dans ce contexte, et afin d'éviter les biais susmentionnés, il conviendrait d'augmenter les planchers prévus dans l'instruction pour les porter à 20 % par axe et au moins 5 projets par mesure.

Recommandation n° 8 : modifier la circulaire du 14 décembre 2022 afin que chacun des trois axes d'intervention représente, en exécution, au moins 20 % des crédits du fonds vert et que chaque mesure fasse l'objet d'au moins cinq projets (DGALN).

II. UNE CONNAISSANCE ENCORE PARCELLAIRE PAR LES COLLECTIVITÉS DE LEUR PATRIMOINE IMMOBILIER, FREIN À UNE PROGRAMMATION DES INVESTISSEMENTS ENVIRONNEMENTAUX

A. UNE CONNAISSANCE DU PARC IMMOBILIER ENCORE TRÈS INCOMPLÈTE, CARACTÉRISÉE PAR DES INVENTAIRES PHYSIQUES INCOMPLETS ET DES ÉTATS DE L'ACTIF ERRONÉS

1. Des inventaires physiques très lacunaires quand ils ne sont tout simplement pas inexistants

Le patrimoine immobilier des collectivités locales et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) s'est constitué au fil du temps. Il s'est diversifié et complexifié, et les collectivités ne le connaissent que très imparfaitement. Cette connaissance, pour être complète, doit se baser sur un inventaire physique et comptable ainsi que sur un diagnostic technique et juridique de leurs biens.

À cet égard, les instructions codificatrices comptables précisent que « la responsabilité du suivi des immobilisations incombe, de manière conjointe, à l'ordonnateur et au comptable. L'ordonnateur est chargé plus spécifiquement du recensement des biens et de leur identification : il tient l'inventaire physique, registre justifiant la réalité physique des biens et l'inventaire comptable, volet financier des biens inventoriés. Le comptable est responsable de leur enregistrement et de leur suivi à l'actif du bilan : à ce titre, il tient l'état de l'actif ainsi que le fichier des immobilisations, documents comptables justifiant les soldes des comptes apparaissant à la balance générale des comptes et au bilan. L'inventaire comptable et l'état de l'actif ont des finalités différentes mais doivent, en toute logique, correspondre ».

La bonne tenue et la mise à jour régulière de l'inventaire physique et de l'état de l'actif est une condition préalable à la connaissance, par une collectivité, de son parc immobilier et, partant, des investissements nécessaires à son entretien et/ou son renouvellement.

Or, l'inventaire physique qui permet le recensement complet des biens et leur suivi est parfois encore inexistant. Il est très souvent partiel (uniquement sur certaines catégories de biens), succinct sous la forme d'une simple liste et insuffisamment renseigné notamment concernant les surfaces, l'ancienneté ou encore la localisation exacte des biens.

En effet, certaines collectivités n'ont pas établi d'inventaire exhaustif de leur patrimoine immobilier, les seuls documents existants pouvant être un tableau synthétique des locaux dont elles sont propriétaires ne prenant pas toujours en compte l'ensemble des biens.

Par ailleurs, les informations sur les biens recensés se limitent souvent au domaine comptable et financier, laissant de côté des informations extracomptables élémentaires comme la superficie des bâtiments. Dans de nombreux cas, les informations relatives aux biens (numéro d'inventaire unique, date et mode d'acquisition, surface des biens, état de vétusté, occupation, coût d'entretien annuel) sont soit incomplètes, soit éclatées sur différents supports, voire les deux, ce qui prive les gestionnaires locaux d'un outil d'information essentiel.

Enfin, le suivi des biens nécessite d'identifier précisément leurs régimes juridiques qui définissent les conditions d'occupation et les obligations attachées aux biens détenus et/ou occupés. Là aussi, les situations sont multiples (propriété totale ou partielle, location, bail commercial, occupation partagée, mise à disposition gratuite, affectation, ....). Les constats montrent des lacunes, en particulier à l'occasion de transferts liés à la décentralisation ou au développement de l'intercommunalité.

2. Des états de l'actif souvent erronés en l'absence de mise à jour régulière

Au-delà des lacunes recensées sur les inventaires physiques, les états de l'actif des collectivités sont également régulièrement défaillants et erronés en raison de la non comptabilisation de certaines écritures comptables. Les anomalies les plus courantes sont les suivantes :

- l'absence de comptabilisation ou la comptabilisation partielle des immobilisations achevées alors même que la bascule des comptes d'immobilisations en cours à des comptes d'immobilisation est le point de départ de l'amortissement, nécessaire préalable au maintien en état et au remplacement des éléments de patrimoine ;

- l'absence de sortie de l'état de l'actif de biens cédés ;

- des valorisations approximatives en raison de la difficulté à reconstituer les coûts historiques de patrimoine ancien.

Dès lors, la valeur de l'actif immobilisé des bilans successifs ne permet pas de donner une image fidèle de la situation patrimoniale de la collectivité et ne correspond pas avec l'inventaire physique. Ainsi, les rapprochements font régulièrement ressortir de nombreuses discordances en raison d'un défaut de transmission, par les services des collectivités au comptable public, des informations patrimoniales relatives aux entrées et sorties d'immobilisations.

Il en résulte qu'à défaut de cette connaissance il est difficile pour les élus locaux de disposer d'une vision d'ensemble des investissements à réaliser.

B. L'IMPACT DE CETTE MÉCONNAISSANCE SUR LES INVESTISSEMENTS À RÉALISER

L'évaluation des investissements à réaliser sur l'immobilier local et des coûts y afférents ne peut être réalisée de manière fiable que si les collectivités ont une connaissance précise de leur parc immobilier.

1. Une absence de vision d'ensemble concernant les besoins de rénovation

Or, rares sont les collectivités qui disposent d'une vision d'ensemble de l'état de leur parc immobilier et de ses éventuels besoins de réhabilitation : moins de 30 % des communes et des EPCI selon le rapport « revue des dépenses 2016 : le patrimoine des collectivités territoriales »19(*).

Type d'informations contenues dans les inventaires physiques des collectivités

Source : Rapport sur le patrimoine immobilier des collectivités - 2016

Une vision précise des coûts de gros entretien, de gros travaux ou de remise aux normes par bâtiment est indispensable afin d'établir une programmation pluriannuelle et un chiffrage des besoins pour financer les investissements.

Il en est de même pour les coûts de fonctionnement (coût des loyers, des travaux d'entretien, de maintenance, des frais de nettoyage, des assurances, des communications, des énergies), alors que leur consolidation et leur possible comparaison dans le temps constitueraient une base utile pour la programmation des investissements.

2. Des documents stratégiques encore trop peu développés

Ainsi, en l'absence de connaissance précise du parc immobilier et de son état, la moitié seulement des communes et des EPCI est dotée d'un plan pluriannuel d'investissement (PPI). Ce ratio dépasse les 80 % pour les départements et les régions et très peu de collectivités sont dotées de schéma directeur du patrimoine foncier et immobilier.

Proportion des collectivités dotées d'un PPI ou d'un schéma direction du patrimoine

Source : Rapport sur le patrimoine immobilier des collectivités - 2016

De surcroit, quand ces documents existent, ils sont souvent axés sur le bâti et les terrains sans inclure la voirie et les réseaux.

La systématisation des PPI serait pourtant nécessaire pour élaborer des plans de financement à moyen terme.

À cet égard, il convient de rappeler que la loi n°2015-9914 du 7 aout 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République rend obligatoire pour les exécutifs des communes de plus de 3 500 habitants, des départements, des régions, et des EPCI de plus de 10 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 3 500 habitants, la présentation d'un rapport d'orientation budgétaire (ROB) à l'assemblée dans les deux mois qui précèdent l'examen du budget. Ce document doit porter sur les orientations budgétaires de l'exercice, les engagements pluriannuels pris par la collectivité, ainsi que sur la structure et la gestion de la dette.

III. UNE MESURE DE L'IMPACT DES INVESTISSEMENTS ENVIRONNEMENTAUX À AMÉLIORER POUR S'ASSURER DE L'EFFICACITÉ DE LA DÉPENSE PUBLIQUE

A. UN SYSTÈME DÉCLARATIF EX-ANTE DE L'IMPACT ENVIRONNEMENTAL PAS TOUJOURS OBLIGATOIRE

1. Une absence de pièces attestant de l'impact environnemental des investissements pour les dotations classiques

Concernant les demandes de DETR, de DSIL et de DSIL exceptionnelle pour des projets répondant à la priorité « environnement / transition écologique », les pièces à produire à l'appui de la demande sont celles mentionnées à l'article 1er de l'arrêté du 23 décembre 2002 relatif aux pièces à produire à l'appui d'une demande de subvention présentée au titre de la dotation d'équipement des territoires ruraux. Il s'agit notamment d'une note explicative du projet, d'une délibération de l'exécutif local ainsi que d'un plan de financement prévisionnel. L'instruction du 8 février 2023 précise, en outre, que toute pièce non mentionnée et qui paraîtrait utile pour l'instruction du dossier peut être demandée par les services instructeurs.

Dans le cas spécifique des projets subventionnés au titre de la priorité « environnement / transition écologique », les préfets peuvent ainsi demander des pièces supplémentaires, s'ils l'estiment nécessaire, sans que cela ne soit obligatoire. Il peut s'agir par exemple d'études thermiques pour les travaux de rénovation thermique.

Pour ces trois dotations, l'impact environnemental n'est donc pas demandé et analysé de manière obligatoire lors des demandes de subventions.

Par ailleurs, concernant la DSIL exceptionnelle, l'instruction du 30 juillet 2020 précise spécifiquement que « l'ensemble des projets sollicitant un soutien public devront faire l'objet d'un examen attentif quant à leur empreinte carbone et à leur impact sur la biodiversité conformément aux engagements de la France (stratégie nationale bas carbone et stratégie nationale biodiversité) ». Dans ce contexte, il appartient aux préfets de veiller à ne pas financer des projets fortement émetteurs de gaz à effet de serre et de veiller à ce que les projets sélectionnés soient économes en foncier public dans le cadre de la lutte contre l'artificialisation des sols. Le contrôle de ces deux aspects a été lui aussi laissé à leur appréciation et n'est pas encadré par des seuils à respecter.

Il en résulte que les pratiques peuvent varier d'un département à l'autre sans que la DGCL n'ait connaissance des éventuels contrôles effectués et, a fortiori, de l'impact prévisionnel des investissements en termes d'empreinte carbone et d'artificialisation des sols dans les cas où celui-ci serait effectivement évalué ex ante.

Recommandation n° 9 : pour les dotations classiques d'investissement, rendre obligatoire, à l'appui de la demande de subvention, les pièces justificatives relatives à l'impact environnemental du projet quand ce dernier est fléché sur une priorité « environnement / transition écologique » (DGCL).

2. Un suivi théorique plus précis rendu nécessaire par l'Union européenne pour la dotation régionale d'investissement et la dotation « rénovation thermique » mais rendu difficile par l'absence d'informations

Concernant la DRI, l'instruction du 11 décembre 2020 relative à la dotation régionale d'investissement pose le critère d'une conformité des dossiers sélectionnés à l'ambition que poursuit le plan France Relance en matière de transition énergétique, dimension qui conditionne l'éligibilité aux financements européens. Pour autant, cette même instruction ne fixe aucun objectif d'économies d'énergie et les tableaux de synthèse d'emploi de la DRI ne mentionnent aucune donnée relative à la surface et à la consommation énergétique des bâtiments concernés par la rénovation. Il en résulte, dans ce contexte, qu'il est difficile voire impossible de mesurer ex ante et ex post l'efficacité des travaux réalisés.

Concernant la dotation de rénovation thermique (DSIL-DSID RT), l'instruction du 18 novembre 2020 prévoyait que plusieurs types de projets pouvaient être soutenus : travaux d'isolation, de remplacements de systèmes de chauffage, d'autonomie énergétique des bâtiments par des énergies renouvelables ou encore modernisation des systèmes d'éclairage. Une cible de 30 % d'économies d'énergie par rapport à la consommation avant travaux était fixée par l'instruction. Cette cible n'était cependant pas contraignante et d'autres indicateurs ont pu être retenus pour justifier de l'impact environnemental des projets.

Les pièces justificatives de l'impact du projet à l'appui des dossiers étaient obligatoires mais il incombait aux préfets de définir les pièces devant servir à justifier de la contribution du projet à l'objectif d'amélioration de l'efficacité énergétique des bâtiments publics. Ces pièces, variables d'un département à l'autre, pouvaient inclure des éléments sur :

- l'impact attendu du projet sur le budget de fonctionnement de la collectivité ;

- la surface de bâtiment ;

- la réduction des émissions de GES générées par le projet ;

- la présentation de l'objectif de réduction des consommations énergétiques (en volume et en pourcentage), des moyens de comptage, de suivi et de pilotage des consommations mis en oeuvre.

Par ailleurs, la Commission européenne conditionne le remboursement des crédits engagés pour la mise en oeuvre des mesures soutenues par la facilité pour la reprise et la résilience (FRR) à l'atteinte des cibles définies dans le plan nationale de relance et de résilience (PNRR). Ainsi, la rénovation énergétique des bâtiments publics appartenant à des collectivités territoriales, est suivie grâce à deux indicateurs correspondant à deux cibles :

- nombre de bâtiments publics appartenant à des collectivités locales ayant fait l'objet d'une notification de subvention de l'État ou du conseil régional pour des travaux de rénovation énergétique, avec un objectif d'au moins 30 % d'économies d'énergie en moyenne ;

- nombre d'écoles, de collèges ou de lycées ayant fait l'objet de travaux de rénovation énergétique, avec un objectif d'au moins 30 % d'économies d'énergie en moyenne.

La réalisation de ces cibles fait l'objet d'audits dont le premier est mené par l'inspection générale de l'administration (IGA) pour le compte de la commission interministérielle de coordination des contrôles20(*) (CICC) et de la Commission européenne. Dans ce cadre, les préfectures assurent un suivi et effectuent des contrôles sur la bonne réalisation des projets soutenus.

Pour autant, force est de constater que dans les tableaux de suivi de la DSIL et DSID RT de nombreuses informations, permettant un suivi des cibles, ne sont pas renseignées.

Nombre de dossiers pour lesquels les informations relatives aux gains d'énergie attendus grâce à l'investissement ne sont pas renseignées

Source : Commission des finances du Sénat à partir des tableaux de suivi de la DSIL et DSID RT

Des efforts doivent donc être faits dans ce sens. Ils nécessitent, au préalable, une meilleure connaissance du parc immobilier et des consommations énergétiques des bâtiments par les collectivités.

3. Des éléments à renseigner sur l'ambition écologique des projets pour le fonds vert

L'impact environnemental constitue un critère de priorisation des dossiers dans l'instruction des demandes pour le fonds vert. Des éléments sont ainsi à renseigner quant à la valeur environnementale du projet lors de la création du formulaire de demande en ligne :

- ambition écologique du projet ;

- lieu de réalisation ;

- effets du projet sur la résilience climatique du territoire ;

- contribution à l'atténuation du changement climatique.

Les précisions sont listées par les cahiers d'accompagnement.

B. L'ABSENCE D'ÉVALUATION EX-POST SUR L'IMPACT RÉEL DES INVESTISSEMENTS EN TERMES D'ÉCONOMIE D'ÉNERGIE

1. Un suivi de l'avancement des projets qui ne permet cependant pas une mesure des gains réalisés

Pour les dotations classiques, aucun contrôle ex post n'est réalisé pour mesurer l'impact environnemental des investissements réalisés.

Pour les projets financés par la dotation RT pour lesquels des pièces justifiant ex ante l'impact attendu sur l'environnement sont demandées, les contrôles ex post se limitent cependant à un suivi de l'avancement des projets.

En effet, il a été demandé aux préfets de rendre compte de l'avancée effective des projets financés et de renseigner, pour chaque projet, les indicateurs suivants :

- surface du projet (m2) ;

- gains d'économies d'énergie ;

- nombre d'usagers concernés ;

- nombre de systèmes utilisant du fioul remplacés.

Le versement de la subvention est effectué au fur et à mesure de l'avancement du projet et suppose donc la réalisation effective des travaux prévus. Toutefois, l'évaluation ex post de l'impact environnemental réel du projet n'est pas prévue et la réalisation effective des économies d'énergie n'est pas une condition de versement de la subvention.

Enfin, pour le fonds vert, des indicateurs de suivi de l'impact environnemental seront mis en place dès 2023 par la DGALN afin de mesurer les retombées des projets exécutés. L'exploitation des données recensées lors du dépôt du dossier et de son instruction dans « Démarches simplifiées » contribuera à la mesure d'impact des dépenses.

Par ailleurs, trois indicateurs figurant dans le projet annuel de performance (PAP) permettront un suivi de la mise en oeuvre des mesures dans les rapports annuels de performance (RAP). Ces indicateurs sont les suivants :

- effet de levier exprimé sur la totalité du fonds ;

- taux moyen d'économies d'énergies avec un objectif cible de 40 % d'économie au stade de la sélection du projet ;

- surface de friches recyclées avec un objectif cible de 1 000 hectares.

Cependant, il convient de souligner que, comme pour la dotation RT, ces indicateurs concernent les objectifs des projets déposés et ne consistent pas en une mesure ex post des résultats. Toutefois, le projet annuel de performance précise, pour l'indicateur d'économies d'énergies, qu' « en parallèle de la mise en oeuvre du fonds, un travail est engagé par le ministère pour développer un indicateur de mesure ex post de l'impact des projets financés sur l'énergie finale consommée. Celui-ci pourra être mis en oeuvre par échantillonnage sur une sélection aléatoire de projets ».

2. Une mesure de l'efficacité des investissements environnementaux à mettre en place

Les rapporteurs ne peuvent qu'encourager cette mesure ex post, même sous forme d'échantillons, seul gage de l'efficacité réelle des travaux réalisés et financés par le fonds vert mais également par d'autres dotations d'investissement.

L'institut I4CE alerte sur le manque de moyens criants, notamment humains et d'ingénierie au sein des collectivités mais également des administrations centrales pour faire face aux besoins d'investissement pour tenir les objectifs de décarbonation. Dans ce contexte, la mise en oeuvre d'un contrôle a posteriori de l'efficacité des investissements ne lui semble pas être une priorité.

Pour autant, les rapporteurs spéciaux estiment qu'il n'est pas souhaitable d'engager plusieurs milliards d'euros de fonds publics, notamment si le fonds vert est prolongé, sans pouvoir en mesurer l'efficacité.

Si le problème des moyens est réel, il ne doit pas faire obstacle à la mise en place d'un minimum de contrôles.

Recommandation n° 10 : mettre en place des contrôles a posteriori, sous forme d'échantillons, afin de mesurer l'impact réel des investissements réalisés à partir des dotations d'investissement finançant des projets de transition écologique (DGCL, DGALN).

La mise en oeuvre de cette recommandation nécessite cependant au préalable que les demandes de subvention soient accompagnées d'informations précises sur le projet (exemple : consommation énergétique avant rénovation, objectif d'économie après rénovation).

Cette mesure ex post permettra aussi, à terme, d'orienter les financements sur les investissements ayant les impacts les plus importants sur l'environnement.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 4 juillet 2023 sous la présidence de M. Daniel Breuiller, vice-président, la commission a entendu une communication de MM. Charles Guené et Claude Raynal, rapporteurs spéciaux, sur le verdissement des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales.

M. Daniel Breuiller, président. - Les rapporteurs spéciaux de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » vont nous présenter les conclusions de leur contrôle budgétaire sur le verdissement des concours financiers de l'État aux collectivités.

M. Charles Guené, rapporteur spécial. - Ce rapport, qui porte sur le verdissement des dotations de l'État aux collectivités, s'inscrit en réalité dans un cadre plus large qui est celui de la transition écologique des collectivités, de son financement mais également des obstacles qui doivent être levés pour la mener dans les meilleures conditions possibles.

Il nous est apparu indispensable de nous intéresser à ce nouveau choc qui va littéralement percuter les collectivités territoriales et constituer leur second défi, en s'ajoutant à celui du besoin prégnant de reconstruire un système de financement frappé d'obsolescence.

Le premier constat porte sur l'immobilier appartenant aux collectivités : majoritairement construit avant 1975, ce dernier est relativement ancien, mal isolé et, donc énergivore. Il représente d'ailleurs un tiers des volumes de CO2 émis par les bâtiments au niveau national, 84 % des émissions des seules collectivités et 76 % de leur consommation d'énergie.

Or, les collectivités territoriales doivent actuellement faire face à un niveau d'inflation sans précédent. Dans ce contexte, les dépenses énergétiques des collectivités ont fortement augmenté depuis plus d'un an. À cet égard, l'Association des petites villes de France considère que dans certaines de ses communes membres les dépenses énergétiques ont bondi de 50 %. Pour l'Association des maires de France, ces hausses oscilleraient entre 30 % et 300 %.

Ces deux constats, un parc énergivore et une inflation énergétique, rendent nécessaires des investissements de rénovation thermique des bâtiments appartenant aux collectivités qu'il s'agisse du bâti scolaire, des immeubles administratifs ou des équipements sportifs et culturels.

Ces investissements sont d'autant plus nécessaires que les collectivités sont assujetties aux obligations d'actions d'économies d'énergie dans les bâtiments tertiaires qui visent une réduction de la consommation d'énergie finale pour l'ensemble des bâtiments d'au moins 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050, par rapport à 2010. Par ailleurs, les actions qu'elles mènent ne peuvent conduire ni à une augmentation du recours aux énergies non renouvelables, ni à une augmentation des émissions de gaz à effet de serre.

Dès lors, selon une analyse effectuée par l'Institut I4CE, si l'on s'en tient aux seuls investissements nécessaires pour atteindre les objectifs de la stratégie nationale bas carbone, le besoin d'investissements des collectivités territoriales peut être évalué à 12 milliards d'euros par an jusqu'en 2030 alors que leurs investissements annuels s'élèvent actuellement à 5,5 milliards d'euros, ce qui représente un investissement additionnel de 6,5 milliards d'euros par an.

Il s'agit là d'une fourchette basse ne tenant compte que des investissements pour atteindre les objectifs de la stratégie nationale bas carbone. En considérant l'ensemble des investissements pour la protection de l'environnement ou pour faire face aux changements climatiques, les besoins pourraient s'avérer bien plus élevés encore même si aucun chiffrage n'existe à ce jour.

Aussi, pour faire face à ce « mur d'investissement » qui attend les collectivités pour mettre en place leur transition écologique, le Gouvernement incite de plus en plus les collectivités à investir sur des projets en faveur de l'environnement et ce de deux manières.

Premièrement, il a encouragé l'emploi des dotations classiques d'investissement pour des projets environnementaux. Ainsi, en 2021, la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) a permis de financer 3 524 projets environnementaux pour un montant total de 156 millions d'euros. La dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), pour sa part, a permis de financer 918 projets environnementaux pour un montant total de 89 millions d'euros.

Deuxièmement, il a créé de nouvelles dotations spécifiquement dédiées aux investissements environnementaux. C'est le cas de la dotation de rénovation thermique ou de la dotation régionale d'investissement dans le cadre du plan de relance ou encore, plus récemment, du fonds vert. Ces trois dotations représentent 3,6 milliards d'euros. Les deux premières n'ont cependant pas vocation à être poursuivies une fois les crédits ouverts en 2021 intégralement consommés. Quant au fonds vert, il existe encore de nombreuses incertitudes sur sa pérennité et sur les montants qui pourraient être arbitrés pour l'avenir.

Sur le papier, cette hausse des dotations d'investissement est donc une bonne chose et doit être poursuivie. Cependant, des écueils doivent être évités et des obstacles levés pour accompagner efficacement et réussir pleinement la transition écologique des collectivités.

M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - En effet, les modalités de financement de la transition écologique des collectivités sont trop complexes. Pour illustrer cette complexité, en sus des dotations de l'État, les collectivités peuvent percevoir d'autres aides en provenance d'opérateurs comme l'agence nationale de rénovation urbaine, l'Agence nationale de la cohésion des territoires, l'Ademe ou encore la Banque des territoires mais également des aides européennes ou des aides provenant d'autres niveaux de collectivités.

Ce maquis contribue largement à la complexité du système de financement de la transition écologique auquel se heurtent les collectivités, notamment les plus petites.

Par ailleurs, force est de constater que l'accès même à ces dotations est également trop complexe. Ainsi, des calendriers de demande de subventions non concordants, des fiches techniques à remplir parfois jugées « ésotériques » par les élus locaux, des critères d'éligibilité trop nombreux et peu transparents ainsi qu'une faible consultation des élus sur les modalités d'attribution, peuvent représenter des obstacles aux investissements en faveur de la transition écologique.

On retrouve finalement, pour le financement de la transition écologique, les mêmes critiques et les mêmes écueils que ceux qui avaient été constatés concernant les dotations classique comme la DETR ou la DSIL.

Sur la méthode, il parait donc nécessaire d'associer pleinement les collectivités à la planification écologique nationale et il faut que l'État sorte de sa logique de discussion au coup par coup pour instaurer une réelle concertation dans un cadre pluriannuel.

Sur le fond, un accompagnement efficace de la transition écologique des collectivités nécessite de penser globalement les moyens de la financer. Les dotations d'investissement ne peuvent ni ne doivent être un moyen unique. De nombreuses pistes sont envisageables concernant notamment un verdissement de la DGF ou du FCTVA mais également des changements de fiscalité ou encore de normes comptables permettant d'accroitre l'autofinancement. Enfin, il faut changer la manière dont on considère la dette des collectivités quand le recours à l'emprunt vise à financer des investissements en faveur de l'environnement.

Cet accompagnement de la transition écologique nécessite surtout une visibilité pluriannuelle puisque ces investissements lourds ne peuvent s'inscrire que dans une temporalité longue allant souvent au-delà de la durée d'un mandat local.

Au-delà du financement, il existe des freins structurels à la transition écologique des collectivités qu'il est indispensable de lever.

Premièrement, les investissements aujourd'hui réalisés sont essentiellement axés sur la rénovation thermique. Or, la transition écologique des collectivités ne peut se résumer à ce seul domaine : les besoins sont également nombreux pour le traitement des déchets et eaux usées, la revégétalisation et reforestation, la protection de la faune et de la flore ou encore les énergies renouvelables.

La dotation de biodiversité et le fonds vert permettent de sortir de ce prisme mais présentent aussi des écueils.

En effet, la dotation de biodiversité ne concerne que 6 300 communes alors même que la protection de la biodiversité n'est pas une problématique spécifique aux seules communes situées dans un parc naturel.

Par ailleurs, si le fonds vert semble, en première intention, plus diversifié dans les projets qu'il vise à financer, une vigilance particulière doit être portée sur l'exécution de ces crédits puisque, selon le principe de fongibilité, des redéploiements entre axes pourront être effectués. Si cette fongibilité est une garantie pour une consommation intégrale et rapide des crédits elle fait courir le risque, déjà identifié pour les autres dotations, d'un financement essentiellement orienté vers la rénovation thermique ce que semble d'ailleurs déjà démontrer l'analyse des premiers dossiers déposés.

Deuxièmement, pour bien programmer les investissements à réaliser, il faut que les collectivités aient une connaissance précise de leur parc immobilier et foncier. Or, l'inventaire physique qui permet le recensement complet des biens est parfois encore inexistant. Il est très souvent partiel, succinct et insuffisamment renseigné. Ainsi, en l'absence de connaissance précise du parc immobilier et de son état, la moitié seulement des communes et des EPCI est dotée d'un plan pluriannuel d'investissements (PPI).

Enfin, la transition écologique des collectivités ne pourra être pleinement efficace sans un contrôle ex post des investissements. Or, à ce jour, un tel contrôle pour mesurer l'impact environnemental des investissements n'existe pas, les indicateurs se limitant à un simple suivi de l'avancement des projets.

Face à un manque de moyens, la mise en oeuvre de contrôles ex post est complexe à mettre en oeuvre. Cependant, il ne parait pas souhaitable d'engager plusieurs milliards d'euros de fonds publics sans pouvoir en mesurer l'efficacité.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Votre rapport démontre bien que les dotations « vertes » du Gouvernement constituent un habillage environnemental sympathique mais très imprécis dans la mesure où il y a un manque de connaissance réelle concernant les priorités qui doivent être fixées en raison, notamment, de l'absence d'une véritable méthode d'analyse.

Comme je l'ai déjà indiqué à I4CE, la méthode utilisée pour chiffrer les investissements est aujourd'hui unique, alors que l'on devrait adapter les méthodes d'analyse au contexte, pour proposer des alternatives pour le financement des investissements en faveur de la transition écologique. Il faut regarder ce qui a le plus d'impact sur le climat et le croiser en particulier avec les caractéristiques territoriales. Ce n'est effectivement pas la même chose d'intervenir sur des territoires à dominante agricole et rurale que d'intervenir dans des villes, quelle que soit leur taille : les bâtiments n'ont pas les mêmes fonctions et le patrimoine n'a pas les mêmes caractéristiques.

Alors qu'actuellement les dotations de l'État arrivent essentiellement par le biais du département ou de la région, il faudrait pouvoir développer des pactes territoriaux entre l'État et les collectivités, qui engloberaient, à un niveau de maille plus proche des acteurs locaux, l'ensemble des priorités, des projets et des financeurs. C'est d'ailleurs ce qui ressort des travaux du groupe du travail pluraliste constitué par le Président Larcher autour de François-Noël Buffet sur la décentralisation. Je m'interroge donc sur la méthode. Les collectivités vont devoir faire face à plusieurs murs d'investissements, pour la mobilité, pour la transition écologique, sans qu'il soit possible de tout financer.

Enfin, il ne faut pas s'étonner que le fonds vert se concentre sur les projets de rénovations thermiques puisque c'est un de ses objectifs. Il est donc normal que les collectivités s'orientent sur cet objectif qui obtient, pour l'heure, le plus de financement. Pour autant, il ne faudrait pas que le fonds vert ne serve qu'à la rénovation thermique pour des améliorations provisoires des bâtiments, sans tenir compte de l'ensemble de ce qui constituera les critères de demain. Ce qui est certain, c'est que le verdissement va avoir un lourd impact : on est en train de « charger notre sac à dos » pour les années à venir et cela nécessitera des choix.

M. Antoine Lefèvre. - Je partage l'avis de nos deux rapporteurs sur la complexité du système de subventionnement mis en oeuvre pour favoriser la transition écologique. Les élus locaux que nous représentons et nous-mêmes au sein des commissions DETR sommes un peu perdus au milieu du maquis des dotations. J'avais prévu une question sur la part respective de la DETR et de la DSIL dans les dispositifs de verdissement, mais ces éléments figurent dans le document qui nous a été remis, donc je n'insiste pas. Claude Raynal a insisté sur la nécessité d'un financement pluriannuel de la transition écologique. Concrètement, quelles sont les solutions en la matière pour favoriser cette logique de pluri annualité pour financer l'investissement des collectivités ?

M. Michel Canévet. - Il me paraît normal que des objectifs de transition énergétique soient intégrés aux contrats de relance et de transition énergétique (CRTE), qui formalisent la relation entre l'État et les collectivités territoriales. Pouvez-vous nous en dire plus ? Des progrès ont-ils été accomplis en ce sens ?

Pour connaitre l'état de la situation immobilière des collectivités, un bilan me semble nécessaire. Des conseils en économie partagée ou des bureaux d'étude existent, mais ne pourrait-il pas être élaboré un mécanisme permettant d'inciter les collectivités à procéder à ce bilan, indispensable pour analyser leurs besoins et établir leurs priorités d'investissements à réaliser ?

On parle beaucoup de rénovation thermique des bâtiments. Mais le sujet est plus large : l'éclairage public, par exemple, est aussi une question problématique pour les collectivités, a fortiori dans une période de tension sur les réseaux d'énergie. Beaucoup de dossiers concernent-ils autre chose que la rénovation thermique des bâtiments ?

Je plaide depuis longtemps pour que les collectivités bénéficient du FCTVA en année N - à tout le moins en année N+1 - et pas en année N+2 comme c'est actuellement le cas. Avez-vous des propositions à faire en la matière ?

Enfin, il est intéressant d'avoir un Fonds vert. Mais tous ceux qui l'ont approché m'ont fait part de la grande complexité administrative lors du dépôt des dossiers, de sorte que les communes rurales sont bien souvent dissuadées de solliciter ce fonds.

M. Stéphane Sautarel. - Le connaissance des collectivités sur leur patrimoine immobilier est en effet encore parcellaire. Il existe des programmes à l'échelle intercommunale - je pense aux programmes de rénovation énergétique des bâtiments (PREB) - établis par concertation, qui me semblent donner une visibilité pluriannuelle des besoins d'un territoire.

Je souhaite insister sur les problèmes de lisibilité sur les fonds d'investissement de l'État - DETR, DSIL, Fonds vert, etc qui sont aujourd'hui utilisés avec une grande fongibilité par les préfets. Les délais d'instruction et de notification que l'on observe aujourd'hui risquent d'avoir pour conséquence une faible consommation des crédits en 2023. De plus, les élus locaux n'ont connaissance des dossiers de DETR qu'en phase amont, alors que rien n'est encore décidé ; après quoi, ces dossiers leur échappent. Une gestion différente de ses fonds, sans revenir sur l'objectif de verdissement, serait-elle possible ?

Enfin, des dispositifs comme les contrats de relance et de transition énergétique (CRTE) ou « petites villes de demain » (PVD) bénéficient d'ingénierie, mais n'ont aucun financement propre. Tout au plus ont-ils priorité sur des financements existants - mais donc au détriment d'autres acteurs publics et d'autres projets n'entrant pas dans le cadre des contrats ou des politiques partenariales. Mais dans bien des cas, l'inscription d'un projet dans un CRTE ne donne aucune assurance de financement.

M. Charles Guené, rapporteur spécial. - Pour répondre au rapporteur général, je soulignerai que notre rapport se veut avant tout être un rapport d'alerte et nos dix recommandations vont d'ailleurs dans ce sens. Il est certain que nous pourrions aller beaucoup plus loin dans l'analyse des critères, de la typologie et des zonages des financements octroyés aux collectivités territoriales.

Je partage l'idée d'une nouvelle gouvernance pour arriver au verdissement des concours financiers. Pour fonctionner, cette gouvernance devra certes être nationale, pour discuter des critères et des partages des financements, mais elle devra impérativement se décliner au niveau régional et, surtout, au niveau départemental. Il sera tout aussi primordial que ces discussions s'inscrivent dans un cadre pluriannuel.

La problématique de la rénovation thermique des bâtiments est très présente dans les dossiers présentés par les collectivités et ceci s'explique par le fait que ces dossiers de rénovation thermique sont les plus « faciles » à finaliser pour les petites communes, qui ne disposent pas toujours de l'ingénierie nécessaire pour élaborer des dossiers plus complexes relevant d'autres problématiques liées à la transition écologique.

En revanche, pour répondre à Michel Canévet qui nous interrogeait à ce sujet, j'ai l'exemple, dans mon département, d'un syndicat d'éclairage public très bien organisé qui a consenti d'importants efforts pour faire en sorte que l'ensemble de ses membres passent à un éclairage à LED. Cela démontre bien qu'avec un peu d'ingénierie, et même dans les petites communes, les économies d'énergie peuvent être rapidement très élevées.

M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - Antoine Lefèvre nous a parlé des moyens possibles pour développer les financements pluriannuels. Le plus simple et le plus rapide serait sans doute les CRTE, en les dotant d'un véritable volet financier, et c'est là tout l'enjeu.

Or, en réalité, les CRTE ont été conclus dans l'urgence préélectorale, dans une période où il fallait absolument montrer que le Gouvernement s'intéressait aux collectivités territoriales et à leurs projets. Les CRTE sont par conséquent de qualité variable. Certains sont de très bonne qualité car les projets étaient déjà bien avancés et les collectivités avaient travaillé en amont sur le contrat, le préfet ne faisant qu'agglomérer des projets déjà prévus, au besoin en procédant à quelques modifications à la marge. Dans d'autres territoires, cette urgence à agir a conduit à des CRTE rafistolés et non financés.

Les CRTE demeurent néanmoins le bon outil pour discuter des moyens financiers pluriannuels octroyés aux collectivités : rien n'interdit de les reprendre, de les retravailler et de mieux y intégrer les questions de transition écologique. C'est d'ailleurs primordial si l'État veut avancer sur ce sujet - d'autant que les collectivités sont prêtes - et c'est le meilleur moyen d'intégrer ces projets, de trouver des financements pluriannuels, tout en faisant attention à laisser une place suffisante aux autres types de projets. C'est la question du « tout ou rien » : comment arriver à avoir, à la fois, des enveloppes importantes pour soutenir la transition écologique des collectivités et, en même temps, laisser une part de l'enveloppe suffisante pour des projets différents ? Doter les CRTE d'un véritable volet financier est une première réponse, qui manque aujourd'hui à tous les échelons, intercommunal comme départemental et régional. Il y a un accord pour voter le CRTE mais, lorsqu'on adopte ensuite une approche plus concrète, opération par opération, le cadre financier apparaît bien lointain.

Il faudrait également que l'ensemble des financements soient concernés par cette logique pluriannuelle, en particulier le fonds vert ou ceux apportés par les agences et par les opérateurs dont nous avons parlé. Ce cadre pluriannuel devrait ainsi couvrir toute la période d'investissement, jusqu'à sa réalisation, et à tout le moins la durée du mandat, local ou présidentiel, si nous nous plaçons dans le cadre d'une discussion avec l'État.

Enfin, concernant le FCTVA nous ne proposons pas des versements en année N ou N+1 au lieu de versement en année N+2 comme c'est le cas actuellement. Notre approche vise plutôt à conditionner le versement du fonds à la nature des investissements. L'idée serait donc d'avoir des remboursements de TVA orientés sur des investissements verts plutôt que bruns à la condition, évidemment, que cette évolution ne soit pas, pour l'État, l'occasion de diminuer les versements totaux alloués aux communes.

M. Charles Guené, rapporteur spécial. - Pour répondre à la question de Stéphane Sautarel sur la consommation des crédits des dotations d'investissement, le risque de sous consommation est quasiment inexistant concernant les dotations classiques comme la dotation d'équipement des territoires ruraux (DTER) et la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL). En revanche, pour le fonds vert, le niveau de consommation reste une vraie question notamment car les services instructeurs sont très sollicités avec des moyens limités en termes d'expertise. L'autre aspect de ce sujet c'est qu'en raison du principe de fongibilité, le risque de ne financer que des investissements axés sur la rénovation thermique des bâtiments est réel.

Sur le FCTVA, il faudra surtout être vigilant à ne pas trop transformer cette « dotation » dans la mesure où, pour de nombreuses collectivités, notamment les plus petites, les versements de FCTVA sont un réel complément de financement, indispensable à la réalisation des projets.

M. Daniel Breuiller, président. - Nous allons donc passer au vote pour autoriser la publication de ce rapport et des recommandations.

La commission a adopté les recommandations des rapporteurs spéciaux et autorisé la publication de leur communication sous la forme d'un rapport d'information.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction générale des collectivités locales (DGCL)

- Mme Cécile RAQUIN, directrice générale ;

- M. Thomas FAUCONNIER, sous-directeur des finances locales et de l'action économique.

Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN)

- Mme Sylvie ESCANDE-VILBOIS, directrice de projet, responsable de la mission performance ;

- Mme Christine MOTARD, adjointe.

Secrétariat général à la planification écologique (SGPE)

- Mme Cecilia BERTHAUD, secrétaire générale adjointe - secrétariat général de la planification écologique ;

- Mme Léa BOUDET, directrice du programme Financement et budget des transitions écologique et énergétique.

Associations représentants le bloc commune

- M. Joël BALANDRAUD, maire d'Évron et secrétaire général adjoint de l'Association des maires de France (AMF) ;

- M. Antoine HOMÉ, maire de Wittenheim, Premier vice-président de l'Association des petites villes de France (APVF) ;

- M. Michel MAYA, maire de Tramayes de l'Association des maires ruraux de France (AMRF) ;

- M. Sébastien MIOSSEC, président délégué d'Intercommunalité de France ;

- Mme Claire DELPECH, responsable finances et fiscalité d'Intercommunalités de France ;

- M. Olivier LANDEL, délégué général de France urbaine ;

- M. Franck CLAEYS, délégué adjoint de France urbaine ;

- Mme Sarah BOU SADER, conseillère chargée des relations parlementaires pour France urbaine.

Assemblée des départements de France

- Mme Valérie NOUVEL, vice-présidente du département de la Manche ;

- Mme Marylène JOUVIEN, chargée des relations avec le Parlement.

Banque des territoires

- M. Gil VAUQUELIN, directeur de la transition énergétique et écologique - Banque des Territoires ;

- M. Michel-François DELANNOY, directeur du département Appui aux territoires - Banque des Territoires ;

- Mme Patricia BLANCHANDIN, conseillère chargée des relations institutionnelles - Caisse des Dépôts.

Institut de l'économie pour le climat - I4CE

- Mme Morgane NICOL, directrice du programme territoires ;

- M. François THOMAZEAU, chef de projet senior - Collectivités et Financement public.


* 1 Une aménité rurale est un agrément ou un avantage économique qui présentent un caractère marchand ou non directement marchand. Cet agrément est procuré par un paysage ou son environnement, au sens de caractéristiques géophysiques, biologiques, naturelles, ou résulte d'une action humaine, non nécessairement destinée à la produire, telle que les activités agricoles et forestières. Les aménités rurales sont en premier lieu l'eau, la biodiversité, l'alimentation, l'énergie, l'espace et les paysages.

* 2 Rapport de février 2020 du conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies.

* 3 « Les collectivités territoriales face à la hausse du coût des énergies » Rapport d'information n° 836 (2021-2022) de Mme Françoise GATEL, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales, déposé le 27 juillet 2022.

* 4 Loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

* 5 Loi n° 2022-1257 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022

* 6 L'institut de l'économie pour le climat I4CE - Institute for Climate Economics - est un institut de recherche à but non lucratif qui contribue par ses analyses au débat sur les politiques publiques d'atténuation et d'adaptation au changement climatique. Il a été fondé en 20152 par la Caisse des dépôts et l'Agence française de développement.

* 7 Classification des activités économiques au regard de six critères de durabilité définis par le règlement (UE) 2020/852 du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2020 sur l'établissement d'un cadre visant à favoriser les investissements durables et modifiant le règlement (UE) 2019/2088.

* 8 Bâtiments basse consommation.

* 9 Le collectif Effinergie est une association créée en 2006 et reconnue d'intérêt général, qui a pour objectif de promouvoir les constructions et rénovations sobres en énergie et bas carbone.

* 10 Loi n°2018-1317 du 28 décembre 2018.

* 11 Rapport d'information n° 806 (2021-2022) de MM. Charles GUENÉ et Claude RAYNAL , fait au nom de la commission des finances, déposé le 20 juillet 2022.

* 12 Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

* 13 Article 158 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

* 14 Article 199 de la loi de finances 2022-1726 du 30 décembre 2022 pour 2023.

* 15 Rapport d'information « L'ANCT : se mettre au diapason des élus locaux » déposé le 2 février 2023.

* 16 Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

* 17 « La fiscalité locale dans la perspective du ZAN » - Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) - octobre 2022.

* 18 « Le financement des collectivités territoriales : des scénarios d'évolution » - Cour des comptes - octobre 2022.

* 19 Rapport réalisé par l'inspection générale de l'administration, le contrôle général économique et financier et l'inspection générale des finances - mai 2016.

* 20 Autorité d'audit des fonds européens en France.