D. LA FRANCE DOIT RAPIDEMENT SE POSITIONNER COMME UN PARTENAIRE CLÉ DU GUYANA EN RENFORÇANT SES RELATIONS AVEC CE PAYS

La France peut encore se positionner comme un partenaire majeur du Guyana.

Cela suppose que cette relation ne se limite pas à des déclarations d'intention mais se traduise rapidement en actes, comme l'ont appelé de leurs voeux les autorités guyaniennes rencontrées par la mission, qu'il s'agisse d'Irfaan Ali, Président de la République du Guyana comme de Manzoor Nadir, Président de l'Assemblée nationale du Guyana.

1. Le Guyana offre d'importantes opportunités pour les entreprises françaises sous réserve qu'elles y investissent dès maintenant

La mission a pu constater qu'en dépit de l'augmentation significative de son PIB au cours des dernières années, les besoins en infrastructures et en services du Guyana demeurent très élevés.

Le pays offre donc d'importantes opportunités économiques pour les entreprises françaises. Le renforcement de la présence française au Guyana a d'ailleurs été appelé de ses voeux par le Président Irfaan Ali qui a indiqué que les entreprises françaises étaient les bienvenues et souhaiter que la France devienne un « partenaire clé » du développement du pays.

L'ambassade de France au Suriname et au Guyana a édité un document rappelant les opportunités économiques du pays pour les entreprises françaises51(*). 7 secteurs sont ainsi identifiés comme présentant un potentiel économique important :

- les infrastructures ;

- la production et approvisionnement énergétique ;

- l'immobilier ;

- l'agriculture et le secteur forestier. Le Président Irfaan Ali s'est notamment dit intéressé par des transferts de technologies françaises pour développer l'agriculture guyanienne ;

- le secteur minier ;

- la distribution ;

- les crédits carbone.

La mission a cependant pu constater qu'en dépit des efforts déployés par l'Ambassade de France au Suriname et au Guyana52(*), les entreprises françaises étaient encore peu représentées dans ce pays. Elle appelle par conséquent à multiplier les initiatives à destination de nos entreprises afin de leur faire prendre conscience des opportunités commerciales offertes par le Guyana.

Recommandation : multiplier les initiatives à destination des entreprises françaises afin leur faire prendre conscience des opportunités commerciales offertes par le Guyana.

2. Une procédure de délivrance de visas qui doit être facilitée

Lors des entretiens conduits à Georgetown, les autorités guyaniennes ont toutes indiqué à la mission regretter l'impossibilité pour les Guyaniens d'effectuer les démarches pour obtenir un visa pour la France depuis le territoire du Guyana.

En effet, aucun pays de l'Union européenne ne disposant, à l'heure actuelle, d'une ambassade à Georgetown, les Guyaniens doivent se rendre à l'ambassade des Pays-Bas au Suriname pour y déposer leur demande de visa Schengen.

Lors de son audition par votre commission, Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, a indiqué être consciente du problème : « s'agissant du Guyana, nous connaissons bien la situation, en particulier la difficulté qui représente le fait de devoir se déplacer au Suriname pour effectuer les démarches relatives aux visas ». Aucune piste n'a cependant été évoquée par la ministre pour répondre à cette problématique.

L'ambassadeur de France au Suriname et au Guyana, Nicolas Bouillane de Lacoste, a pour sa part précisé à la mission que la possibilité de délivrer localement des visas Schengen était à l'étude. La mission ne peut qu'encourager le ministère de l'Europe et des affaires étrangères à aboutir rapidement à une solution afin de faciliter les démarches d'obtention de visas pour les Guyaniens.

Recommandation : étudier les solutions possibles pour faciliter les démarches d'obtention de visas Schengen pour les Guyaniens.

3. Une coopération nécessaire en matière de lutte contre les trafics illégaux

Si la hausse du niveau de vie des Guyaniens se traduit par une baisse de la criminalité, le pays demeure confronté aux défis de la criminalité organisée : pêche et orpaillages illégaux et trafics de stupéfiants, en particulier la cocaïne à destination de l'Amérique du Nord et de l'Europe. À titre d'exemple, en 2020, 11,5 tonnes de cocaïne en provenance du Guyana auraient été saisies à Anvers.

Le Président Ali a ainsi appelé à un renforcement de la coopération franco-guyanienne en matière de lutte contre la criminalité, soulignant que celle-ci constitue un défi commun à l'ensemble des pays du Plateau des Guyanes.

4. Un renforcement de la présence diplomatique française à Georgetown qui devra se traduire par l'ouverture à court terme d'une ambassade de plein exercice

L'ouverture d'une ambassade au Suriname également compétente pour le Guyana a constitué une première étape importante. De même, la mission a pu constater que la présence d'un représentant de l'Ambassade à Georgetown, ayant le statut de volontaire international en administration, a permis un renforcement significatif des liens franco-guyaniens.

La mise en place d'une antenne diplomatique à l'automne 2023 constitue un signal important et salué par les autorités guyaniennes rencontrées. La mission estime indispensable que le diplomate résident qui sera nommé puisse capitaliser sur l'important travail, notamment de réseau, réalisé par l'actuel volontaire international, selon des modalités qu'il conviendra de déterminer.

La mission considère cependant nécessaire d'aller plus loin en ouvrant une ambassade de plein exercice à Georgetown, à l'instar de ce qu'ont pu faire d'autres pays tels que les États-Unis, la Chine ou la Russie.

Le Royaume-Uni a, pour sa part, nommé un haut-commissaire, instauré la gratuité des visas et ouvert une ligne aérienne Georgetown-Londres.

Lors de son audition par votre commission, Catherine Colonna53(*), ministre de l'Europe et des affaires étrangères, a cependant opposé une fin de non-recevoir à cette proposition, indiquant : « je ne peux pas vous donner l'assurance que nous allons ouvrir une ambassade au Guyana ni ailleurs. Même si nos moyens sont appelés à être renforcés, pour autant que le Parlement valide les propositions qui lui seront faites, il en faudrait bien plus pour que nous ouvrions des ambassades, après avoir dû fortement réduire le réseau consulaire dans les deux dernières décennies. Je vous remercie de ce plaidoyer, qui était un beau plaidoyer. Nous y penserons peut-être pour l'avenir si nos moyens nous le permettent ».

Si la mission est consciente des contraintes budgétaires pesant sur le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, elle estime cependant que l'ouverture d'une ambassade au Guyana devrait constituer une priorité du ministère au regard des enjeux rappelés supra.

En effet, si la France ne prend pas rapidement l'initiative, nos concurrents ont déjà fait, ou feront dans un futur proche, à n'en pas douter, preuve de davantage de clairvoyance.

Recommandation : créer une ambassade de plein exercice au Guyana.

Enfin, en matière parlementaire, la mission préconise la création d'un groupe d'amitié France-Guyana-Suriname afin de renforcer les liens entre nos trois pays du Plateau des Guyanes.

Recommandation : créer un groupe d'amitié France-Guyana-Suriname.


* 51 Bureau de représentation de l'ambassade de France, Les opportunités économiques au Guyana, janvier 2023.

* 52 Une mission prospection au Guyana a par exemple eu lieu du 19 au 21 juin 2023 pour les entreprises avec l'appui de l'Ambassade de France.

* 53 Audition du 17 mai 2023.