N° 866

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 11 juillet 2023

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le pass culture,

Par MM. Vincent ÉBLÉ et Didier RAMBAUD,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

L'ESSENTIEL

La commission des finances a examiné le mardi 11 juillet 2023 le rapport de MM. Vincent Éblé, Sénateur de Seine-et-Marne et Didier Rambaud, Sénateur de l'Isère, rapporteurs spéciaux des crédits de la mission Culture, sur les résultats de leur contrôle sur le pass Culture.

I. UNE MONTÉE EN CHARGE PROGRESSIVE, DES RÉSULTATS SATISFAISANTS

Expérimenté depuis juin 2019 puis généralisé et élargi en 2021, le pass Culture consiste en une application gratuite, qui révèle et relaie les offres culturelles et artistiques accessibles à proximité pour les jeunes âgés de 15 à 18 ans. Ces jeunes disposent d'une somme comprise entre 20 et 300 euros, variant en fonction de l'âge, afin de pouvoir répondre à ces offres. S'éloignant des dispositifs mis en place par les collectivités territoriales, le pass a repris les contours de l'application « 18app » mise en place en septembre 2016 en Italie par le Gouvernement Renzi permettant à tout jeune de 18 ans de disposer d'une somme de 500 euros - Bonus Cultura - dédiée à l'acquisition de biens culturels.

A. UN DISPOSITIF QUI RÉPOND AUX OBJECTIFS QUANTITATIFS QUI LUI ONT ÉTÉ ASSIGNÉS

Au 1er mai 2023, soit près de deux ans après sa généralisation et son élargissement, 3,04 millions de jeunes, âgés de 15 à 18 ans, disposent d'un compte sur l'application. Le nombre d'inscriptions répond pour partie aux cibles fixées à l'échelle nationale dans le contrat d'objectifs et de performance signé entre la SAS Pass Culture et l'État.

Objectif de taux de couverture par catégorie de jeunes1(*)

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

Hors livre, plus de 920 000 offres ont été proposées via l'application.

Nombre d'offres par secteur

Source : commission des finances d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

Le montant total des réservations depuis le lancement de l'application atteignait 313 millions d'euros au 31 décembre 2022. Les premiers jeunes de 18 ans inscrits lors de la généralisation du dispositif en mai 2021 ont dépensé en moyenne 244 euros sur les 300 euros accordés.

B. UN OUTIL ÉLARGI EN LOI DE FINANCES POUR 2022 : LA CRÉATION DU VOLET COLLECTIF

La loi de finances pour 2022 a permis de faire évoluer le dispositif en l'ouvrant aux élèves à partir de la classe de 4ème, qui sous la responsabilité des enseignants, bénéficient d'un crédit (25 euros par élève en quatrième et en troisième, 30 euros en seconde et 20 euros en première et en terminale) à dépenser dans un cadre collectif : sortie culturelle, accueil d'un professionnel... Le dispositif a été étendu aux élèves de sixième et de cinquième à compter de la rentrée scolaire 2023. Les premiers résultats sur l'année scolaire 2022-2023 sont encourageants. Au 20 mai 2023, 86 % des collèges et lycées avaient utilisé ce mécanisme (92 % des établissements du secteur public). 2 millions d'élèves ont ainsi d'ores et déjà bénéficié du dispositif (1,6 million dans le secteur public), soit la moitié du public ciblé. L'éloignement des offres culturelles sur certains territoires peut expliquer ce déploiement limité.

Montant du pass culture pour chaque jeune par classe d'âge
et degré de scolarisation

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat

Au 1er mai 2023, ce montant moyen s'établissait à 450 euros pour l'année scolaire 2022-2023. 154 101 offres collectives, présentées par 8 000 acteurs, étaient disponibles à cette date.

La loi de finances pour 2023 prévoit une dotation de 208,5 millions d'euros de crédits (AE = CP) pour le financement du volet individuel. Le pass Culture représente 25 % des crédits du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » de la mission « Culture ». La SAS Pass Culture, en charge de son déploiement, est également le deuxième opérateur du ministère de la Culture, derrière la Bibliothèque nationale de France. 51 millions d'euros (AE=CP) sont prévus pour le volet collectif du dispositif, principalement financé par le programme 230 « Vie de l'élève » de la mission « Enseignement scolaire ».

Les frais de fonctionnement de la SAS Pass Culture sont estimés à 29,2 millions d'euros en 2023. Ils représentent 11,2 % des dotations versées à la structure. Les dépenses de personnel ont atteint 7,77 millions d'euros en 2022, soit une progression de 58,8 % par rapport à 2021. L'élargissement du pass peut justifier pour partie une telle croissance. Le choix d'une société par actions simplifiée semble, avec le recul, le plus adapté. La SAS apparaît plus agile qu'un établissement public classique et a pu accompagner la mutation du pass au cours des deux dernières années. Cependant, malgré son poids budgétaire, la SAS ne figure pas dans la liste des opérateurs de l'État. Il apparait pourtant indispensable afin d'évaluer la conduite de cet important volet de la politique culturelle que de telles informations soient à la disposition du Parlement.

II. UN OUTIL À AMÉLIORER EN VUE D'ENCOURAGER UNE DIVERSIFICATION DES PRATIQUES CULTURELLES

A. FAIRE DU PASS UN VÉRITABLE OUTIL DE POLITIQUE CULTURELLE

1. Diversité et proximité : deux enjeux essentiels pour le volet individuel

La situation financière constitue un biais important pour appréhender la question de l'inégalité culturelle chez les plus jeunes. Elle ne saurait pour autant résumer le sujet. La notion de proximité est également essentielle : le pass Culture perd de sa pertinence quand il est déployé dans des « zones blanches », marquées par l'absence d'infrastructures culturelles ou des difficultés d'accès au numérique. Un travail sur l'accès aux infrastructures culturelles lointaines doit ainsi être opéré, notamment en milieu rural. La question sociale doit également être cernée. Le ressort tarifaire peut, en tout état de cause, casser une dernière barrière mais il suppose que les autres obstacles soient franchis.

La logique prescriptive du pass demeure, en outre, relativement faible. Ce faisant, il prend le risque de confirmer les habitudes culturelles et s'avérer être un effet d'aubaine pour ceux qui ont déjà une pratique culturelle. Il est, plus largement, regrettable qu'aucun objectif n'ait été assigné à cette politique publique en matière de médiation culturelle, de diversification culturelle ou d'affirmation des droits culturels. Ce faisant, le ministère de la culture prend le risque de résumer le volet individuel du pass à une simple plateforme d'achat de biens et de services.

Répartition des réservations par secteur en fonction des montants dépensés
entre janvier et avril 2023 - Part individuelle

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

Il est indispensable qu'il soit plus éditorialisé afin de participer à la mise en place d'un véritable parcours culturel qui permettre notamment de mieux orienter les réservations vers deux grands absents : le spectacle vivant et les musées. Au-delà de la question de la médiation culturelle, l'accent doit également être mis sur l'accès des jeunes non-scolarisés au pass. Pour l'heure, on observe une réelle surpondération des lycéens et des étudiants parmi les jeunes ayant ouvert un compte. Seuls 7,3 % des jeunes de 18 ans inscrits sur l'application ont ainsi déclaré ne pas être scolarisés. Ce ratio est plus faible que le nombre de jeunes non-scolarisés rapporté à l'ensemble de la population visée.

2. Le volet collectif : un dispositif encore perfectible

L'objectif de diversification des pratiques culturelles semble mieux atteint par le volet collectif.

Répartition des réservations par secteur en fonction des montants dépensés -
Part collective

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

Le recul donné par deux années scolaires souligne néanmoins les écueils auxquels sont confrontés les établissements dans la mise en oeuvre du volet collectif :

- absence de moyens de transports pour les établissements enclavés ;

- concurrence d'autres dispositifs publics (collectivités territoriales ou cités éducatives) ;

- difficultés pour les intervenants en éducation artistique et culturelle à être référencés sur la plateforme dédiée ADAGE et sur celle du pass Culture ;

- absence de désignation d'un professeur référent culture au sein des classes.

Les rapporteurs spéciaux relèvent par ailleurs que le volet collectif semble plus enclin à atteindre l'objectif de diversification des pratiques culturelles assigné au pass que le volet individuel et que l'articulation entre les deux parts semble insuffisante.

3. Un outil en devenir ?

Il conviendra également de contribuer à faire du pass une véritable plateforme en faveur de l'éveil artistique et culturel accessible aux jeunes qui ne seraient plus éligibles, si l'on entend que ce dispositif ne se résume pas à une offre limitée dans le temps. Il s'agit de contribuer à faire de cet outil un élément clé en vue de concourir aux objectifs ambitieux que le ministère de la culture s'assigne par ailleurs en matière d'éducation artistique et culturelle et de participation à la vie culturelle. Cette évolution permettrait de renforcer l'efficience de la dépense publique en la matière.

B. AU-DELÀ DU PASS CULTURE, QUELS MOYENS POUR L'ÉDUCATION ARTISTIQUE ET CULTURELLE ?

Le pass Culture ne semble pas avoir vampirisé les crédits dédiés à l'éducation artistique et culturelle de la mission « Culture », soulignant ainsi que le dispositif ne tend pas à s'y substituer mais plutôt à la renforcer (+ 22,5 % depuis 2019).

Les rapporteurs spéciaux notent cependant une sous-exécution des crédits dédiés à la participation de tous à la vie culturelle et notamment ceux fléchés vers la politique territoriale et à la cohésion sociale. Or, le déploiement pour l'ensemble des jeunes du pass Culture ou de l'EAC ne saurait ainsi être permis que par le développement d'infrastructures ou la tenue d'évènements dans la totalité des territoires, et notamment au sein des territoires prioritaires.

LES RECOMMANDATIONS
DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Recommandation n° 1 (ministère de la culture) : Aux fins de bonne information du Parlement au moment du vote des projets de lois de finances et des projets de lois de règlement, intégrer la SAS Pass Culture dans la liste des opérateurs du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » de la mission « Culture » et présenter au sein du projet annuel de performances et du rapport annuel de performances une analyse de ses activités et de ses résultats, les financements apportés par l'État, son compte financier et les emplois qu'elle rémunère.

Recommandation n° 2 (ministère de la culture, SAS Pass Culture) : Afin de concourir à l'objectif de diversification des pratiques culturelles assigné au pass Culture, mettre en place, au sein du volet individuel, des parcours de réservation, fléchant les crédits restants après une réservation vers une ou plusieurs offres en lien avec l'univers abordé par le premier achat et introduire des plafonds par catégorie d'offre.

Recommandation n° 3 (ministère de la culture, SAS Pass Culture) : Renforcer les actions de communication à destination des jeunes non-scolarisés afin qu'ils puissent se saisir de ce dispositif et contribuer ainsi à leur émancipation culturelle.

Recommandation n° 4 (ministère de la culture, ministère de l'éducation nationale, SAS Pass Culture) : Intégrer un volet transport dans les offres présentées sur la plateforme pass Culture afin de faciliter l'accès aux infrastructures culturelles aux jeunes éloignés de celles-ci ou handicapés.

Recommandation n° 5 (ministère de la culture, SAS Pass Culture) : Dans le cadre du volet individuel, développer, dans les zones les plus éloignées des infrastructures culturelles, des offres duo, permettant aux jeunes d'accéder à un lieu culturel avec un accompagnant.

Recommandation n° 6 (ministère de la culture, ministère de l'éducation nationale, SAS Pass Culture) : Ouvrir le volet collectif du pass aux jeunes en apprentissage ou en contrat de professionnalisation afin de permettre à ceux-ci de bénéficier d'un parcours d'éducation artistique et culturelle.

Recommandation n° 7 (ministère de la culture, ministère de l'éducation nationale) : Dans le cadre du volet collectif, réunir plus régulièrement les commissions régionales chargées du référencement des offreurs sur les plateformes Pass Culture et ADAGE, afin de permettre aux structures les plus dépendantes des activités liées à l'éducation artistique et culturelle d'être rapidement en situation de présenter des offres, et motiver, par ailleurs, d'éventuels refus.

Recommandation n° 8 (ministère de la culture, ministère de l'éducation nationale) : Afin d'éviter les distorsions de concurrence entre offreurs et de mieux prendre en compte les réalités locales, accompagner les plus petits d'entre eux aux fins de structuration de leurs offres sur les plateformes ADAGE et Pass Culture et territorialiser les offres sur la plateforme d'ADAGE pour que celle-ci ne soit pas qu'un simple annuaire national.

Recommandation n° 9 (ministère de l'éducation nationale) : Mieux former les personnels scolaires à l'utilisation du volet collectif du pass Culture afin de renforcer la cohérence du dispositif avec les projets d'établissements en matière d'éducation artistique et culturelle.

Recommandation n° 10 (ministère de la culture, ministère de l'éducation nationale) : Mieux articuler sur les plateformes Pass Culture et ADAGE les parcours de réservation individuels et collectifs, afin de renforcer la complémentarité des démarches et mettre en place, au sein des établissements scolaires, des élèves ambassadeurs du pass, en vue d'impliquer les élèves dans les projets collectifs et les responsabiliser s'agissant de l'utilisation de la part individuelle.

Recommandation n° 11 (ministère de la culture, SAS Pass Culture) : Afin de poursuivre l'objectif de renforcement de la diversification des pratiques culturelles chez les plus jeunes, faire de la plateforme un outil éditorialisé et d'échanges, ouvert aux jeunes adultes, avec la possibilité de recharger soi-même son pass une fois les 20 ans atteints pour accéder à des offres spécifiquement dédiées à ce public.

Recommandation n° 12 (ministère de la culture) : Mettre en adéquation la réalité des investissements du ministère de la culture dans les territoires avec l'autorisation budgétaire, afin d'éviter une sous-exécution récurrente des crédits, et permettre l'accès de l'ensemble des jeunes éligibles au pass Culture à des infrastructures ou à des évènements culturels.

AVANT-PROPOS

Réponse à une promesse de campagne lors de l'élection présidentielle de mai 2017, le pass Culture n'a réellement été lancé que quatre ans plus tard, au sortir de la crise sanitaire. La généralisation du dispositif aux jeunes de 15 à 18 ans avait été précédée d'une expérimentation peu concluante au sein de 14 départements entre 2019 et 2021.

La commission des finances avait, à ce titre, émis des réserves lors de l'examen des différents projets de lois de finances en raison d'une augmentation des crédits dédiés au pass Culture en lois de finances initiales alors même que l'exécution se traduisait in fine par une sous-consommation et des cibles partiellement atteintes. Sans remettre en cause l'utilité du dispositif, qui peut s'avérer être un véritable outil d'émancipation culturelle, elle s'interrogeait sur la stratégie mise en oeuvre pour rendre accessible un dispositif mal connu au sein des territoires où il était déployé. La fin de l'expérimentation apparaissait indispensable afin de pouvoir mener à bien une évaluation pertinente du pass, appelé à devenir un élément clé de la politique d'éducation artistique et culturelle.

Deux ans après l'extension du pass Culture à tout le territoire, son ouverture aux jeunes âgés de 15 à 17 ans et la création d'un volet collectif ouvert aux classes du collège à la terminale, la SAS Pass Culture, en charge de son dépliement, est devenue le deuxième opérateur du ministère de la culture, derrière la bibliothèque nationale de France, la loi de finances pour 2023 prévoyant une dotation de 259,5 millions aux fins de financement des deux volets du pass. Sans tomber dans l'écueil qui conduirait à considérer ce nouvel outil comme la seule réponse à la question des inégalités culturelles, l'objet du présent contrôle budgétaire est d'évaluer la pertinence de l'investissement de l'État sur le pass et de vérifier, notamment, s'il répond à l'objectif de diversité des pratiques artistiques et culturelles qui lui a été assigné.

I. UNE MONTÉE EN CHARGE PROGRESSIVE, DES RÉSULTATS SATISFAISANTS

Expérimenté depuis juin 2019 puis généralisé et élargi en 2021, le pass Culture consiste en une application gratuite, qui révèle et relaie les offres culturelles et artistiques accessibles à proximité pour les jeunes âgés de 15 à 18 ans. Ces jeunes disposent d'une somme comprise entre 20 et 300 euros, variant en fonction de l'âge, afin de pouvoir bénéficier de ces offres.

Les objectifs assignés au pass sont définis à l'article 1er du décret n° 2021-628 du 20 mai 2021 relatif au « pass Culture ». Appelé à faciliter « l'accès à la culture en autonomie », il vise à :

- encourager la diversité des pratiques artistiques et culturelles ;

- favoriser la connaissance et l'accès aux offres culturelles destinées aux jeunes adultes et situées à proximité de l'utilisateur de l'application ;

- proposer des offres attractives et exclusives et concourir à ce qu'elles soient présentées de manière personnalisée aux utilisateurs.

Une concertation a été menée avec les collectivités territoriales qui ont déjà développé au niveau local des outils semblables, associant incitation financière et médiation culturelle. Les rapporteurs spéciaux regrettent que ce dialogue n'ait pas débouché sur une meilleure prise en compte de certains paramètres - modalités d'accès aux infrastructures culturelles, fracture numérique, concurrence avec les mécanismes déjà existants, médiation culturelle, correctifs sociaux et géographiques - qui apparaissent comme autant d'écueils auxquels est aujourd'hui confronté le pass, tant s'agissant du volet individuel que du volet collectif.

S'éloignant des dispositifs locaux, le pass a plutôt repris les contours de l'application « 18app » mise en place en septembre 2016 en Italie par le Gouvernement Renzi permettant à tout jeune de 18 ans de disposer d'une somme de 500 euros - Bonus Cultura - dédiée à l'acquisition de biens culturels. Le dispositif constituait, aux yeux du gouvernement italien, une « arme de guerre » face au terrorisme et à l'obscurantisme, en partant du constat qu'en 2015, 20 % des Italiens n'avaient pratiqué aucune activité culturelle et que 60 % de la population n'avait pas ouvert un livre.

Il convient de rappeler à ce stade que l'expérience italienne a été marquée par un succès inégal, au regard de la faible pénétration du dispositif auprès des jeunes (60 % des jeunes concernés ont accédé à l'application) mais aussi de la multiplication de fraudes (système de reventes et d'échanges). Le mécanisme a été réformé en loi de finances pour 2023, en introduisant deux primes de 500 euros : la première est attribuée en fonction de la situation économique de la famille du jeune - les revenus de celle-ci ne doivent pas dépasser 35 000 euros par an - et la seconde est attribuée en cas de réussite au diplôme de l'enseignement secondaire avec une note de 100 %. Le montant des crédits dédiés à ce dispositif restent inchangés en dépit de sa réforme, pour atteindre 190 millions d'euros.

A. UN DISPOSITIF QUI RÉPOND AUX OBJECTIFS QUANTITATIFS QUI LUI ONT ÉTÉ ASSIGNÉS

Au 1er mai 2023, soit près de deux ans après sa généralisation et son élargissement, 3,04 millions de jeunes, âgés de 15 à 18 ans, disposent d'un compte sur l'application pass Culture.

Répartition des utilisateurs du pass Culture au 1er mai 2023 (volet individuel)

Source : commission des finances d'après les données transmises par la SAS Pass Cullture

Le nombre d'inscriptions répond pour partie aux cibles fixées à l'échelle nationale dans le contrat d'objectifs et de performance signé entre la SAS Pass Culture et l'État.

Objectif de taux de couverture par catégorie de jeunes2(*)

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

L'écart entre les catégories d'âge se justifie par l'extension récente aux jeunes de 15 à 17 ans mais aussi un degré de maturité différent en termes d'appropriation du dispositif.

92 % des jeunes de 18 ans disposant d'un compte, soit 1 677 166 jeunes, ont effectué au moins une réservation sur l'application, depuis son lancement.

73 % des jeunes de 15 à 17 ans inscrits, soit 1 316 103 jeunes ont effectué au moins une réservation.

Répartition des utilisateurs du pass Culture au 1er mai 2023 (volet individuel)

Source : commission des finances d'après les données transmises par la SAS Pass Cullture

Hors livres, plus de 920 000 offres ont été proposées via l'application.

Nombre d'offres par secteur

Source : commission des finances d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

Le montant total des réservations depuis le lancement de l'application atteignait 313 millions d'euros au 31 décembre 2022.

Montant annuel des réservations depuis 2019 (volet individuel)

(en euros)

Source : commission des finances, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

Les premiers jeunes de 18 ans inscrits lors de la généralisation du dispositif en mai 2021 ont dépensé en moyenne 244 euros sur les 300 euros accordés.

Montant moyen des réservations par inscrit depuis mai 2021

(en euros)

Cohorte

15 mois

18 mois

20 mois

21 mois

22 mois

23 mois

24 mois

Mai 2021

194

209

219

223

229

235

244

Juin 2021

181

197

205

210

216

221

 

Juillet 2021

181

196

204

209

213

   

Août 2021

191

206

213

216

     

Septembre 2021

195

207

213

       

Octobre 2021

201

212

         

Novembre 2021

204

214

         

Décembre 2021

201

           

Janvier 2022

199

           

Source : SAS Pass Culture

B. UNE DYNAMIQUE INITIALEMENT ENTRAVÉE PAR UNE EXPÉRIMENTATION LIMITÉE

1. Un dispositif expérimenté dans 14 départements jusqu'en mai 2021

Le pass Culture a été lancé dans un premier temps au sein de 14 départements3(*). Chaque jeune de 18 ans résidant dans ces territoires pouvait alors demander l'octroi d'une enveloppe de 500 euros à dépenser sur cette application, parmi un large choix de spectacles, visites, cours, livres, musique, services numériques proposés alors par 11 000 offreurs (offres payantes et gratuites). La durée de consommation initialement fixée à 12 mois a été portée, en 2020, à 24 mois.

Le crédit est, depuis l'origine, soumis à des sous plafonds : si les utilisateurs peuvent consacrer la totalité du crédit à des sorties culturelles ou des cours de pratique artistique, un seuil est prévu pour les services numériques. L'utilisation du pass aux fins d'acquisition de biens physiques (livres, CD, DVD, instruments de musique) prend la forme d'une réservation dudit bien en boutique.

S'agissant du dispositif en tant que tel, le projet a d'abord été porté par le ministère lui-même, par l'intermédiaire d'une startup d'État. Les startups d'État, supervisées par la direction interministérielle du numérique dans le cadre du programme beta.gouv.fr, réunissent des équipes constituées d'agents publics endossant un rôle d'« intrapreneur » et d'experts du numérique, avec pour ambition de créer des services numériques prioritaires à impact. Cette structure a permis d'accompagner le développement de l'application afin de répondre à un double objectif : qu'elle soit géolocalisée et qu'elle donne accès à la culture aux jeunes de 18 ans.

Une société par actions simplifiée (SAS), chargée du développement du pass Culture a ensuite pris le relais courant 2019, en vue notamment d'élargir son financement à des acteurs privés4(*). La SAS reste pour l'heure détenue à 70 % par l'État et à 30 % par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), via la Banque des territoires. Son président est nommé par le président de la République, sur proposition du ministre de la culture et du ministre de l'économie et des finances. Il est assisté d'un comité stratégique réunissant un représentant de l'État, neuf membres nommés sur proposition de l'État et un représentant des salariés de la SAS. Les rapporteurs spéciaux notent que le choix de ce type de société apparaît, avec le recul, le plus adapté. La SAS apparaît plus agile qu'un établissement public classique et a pu accompagner la mutation du pass au cours des deux dernières années.

2. Une accélération nécessaire de la généralisation

L'ambition initiale du Gouvernement consistait en une généralisation du dispositif à l'horizon 2022 sur l'ensemble du territoire. Un élargissement de la phase d'expérimentation était prévu le 20 avril 2020. Il a été différé en raison de la crise sanitaire. La totalité des départements des régions Île-de-France et Grand Est et le département de La Réunion devaient initialement mettre en place le dispositif à cette date.

Sans remettre en cause l'utilité du dispositif, qui pouvait s'avérer être un véritable outil d'émancipation culturelle, la commission des finances avait exprimé des doutes lors de l'examen des projets de loi de finances pour 2019 et 2020 sur la stratégie mise en oeuvre pour rendre accessible ce dispositif. Celui-ci apparaissait mal connu. Le lancement d'une campagne de publicité nationale et d'action de sensibilisation à destination de publics éloignés (jeunes salariés, apprentis etc.) semblait à ce titre impossible compte-tenu du caractère expérimental du pass.

Les rapporteurs spéciaux avaient souhaité lors de l'examen des crédits pour 2021 que soit favorisée une meilleure articulation avec le parcours d'éducation artistique et culturelle, notamment dans les dernières années du lycée, afin de permettre aux futurs utilisateurs de mieux connaître l'application.

Une accélération du déploiement national apparaissait indispensable, tant elle constituait la seule option possible en vue de mieux faire connaître le dispositif et une utilisation des crédits dédiés. La généralisation du pass Culture a finalement été annoncée par le président de la République le 21 mai 2021, assortie d'une diminution du montant accordé de 500 à 300 euros.

C. UN OUTIL ÉLARGI EN LOI DE FINANCES POUR 2022 : LA CRÉATION DU VOLET COLLECTIF

La loi de finances pour 2022 a permis de faire évoluer le dispositif en l'ouvrant :

- aux élèves à partir de la classe de 4ème, qui sous la responsabilité des enseignants, bénéficient d'un crédit (25 euros par élève en quatrième et en troisième, 30 euros, en seconde et 20 euros en première et en terminale) à dépenser dans un cadre collectif : sortie culturelle, accueil d'un professionnel... Ce volet collectif du pass est principalement financé sur le programme 230 « Vie de l'élève » de la mission « Enseignement scolaire » et, de façon plus anecdotique, par le programme 169 « Reconnaissance et répartition en faveur du monde combattant, mémoire et lien avec la nation » de la mission « Anciens Combattants » qui couvre les établissements d'enseignement relevant du ministère des armées et le programme 205 « Affaires maritimes » de la mission « Écologie, développement et mobilités durables », au titre des établissements d'enseignement relevant du secrétariat d'État chargé de la mer. Le volet collectif concerne les établissements de l'enseignement public et de l'enseignement privé sous contrat, situé sur le territoire national ;

aux jeunes de 15 ans non scolarisés, ou ceux inscrits en seconde qui bénéficient d'un crédit individuel de 20 euros. Les élèves de première et de terminale ou les jeunes non scolarisés de 16 ou 17 ans bénéficient d'un crédit individuel porté à 30 euros. Cette extension aux moins de 18 ans n'intègre pas les offres numériques (à l'exception de la presse numérique) et les jeux vidéo. Possibilité est laissée de cumuler le crédit de 15 ans jusqu'à 17 ans.

La loi de finances pour 2023 est venue compléter cet élargissement avec une ouverture du volet collectif aux élèves de sixième et de cinquième à compter de la rentrée scolaire 2023.

Montant du pass culture pour chaque jeune par classe d'âge
et degré de scolarisation

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat

1. Une dotation de 208,5 millions d'euros pour le financement du volet individuel

La loi de finances pour 2023 prévoit une dotation de 208,5 millions d'euros de crédits (AE = CP) pour le financement du dispositif, soit une majoration des crédits de 9,5 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2022. Le pass Culture représente 25 % des crédits du programme 361. Il est également le deuxième opérateur du ministère de la Culture, derrière la Bibliothèque nationale de France.

La dotation prévue pour le volet collectif du dispositif, principalement financé par le programme 230 « Vie de l'élève » de la mission « Enseignement scolaire » est quant à elle majorée de 6 millions d'euros, en vue de tenir compte de l'extension du pass en septembre 2023 aux jeunes scolarisés en sixième et en cinquième. 51 millions d'euros (AE = CP) sont ainsi prévus pour ce volet.

Évolution des crédits de paiement affectés au financement du pass culture
entre 2019 et 2023

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

2. Le volet collectif : un premier bilan satisfaisant

L'ouverture de crédits dédiés au volet collectif en loi de finances pour 2022 avait été précédée d'une expérimentation au dernier trimestre 2021, limitée à quelques établissements des académies de Rennes (7 collèges, 1 lycée polyvalent, 3 lycées d'enseignement général et technologique, 5 lycées professionnels, 1 lycée général) et de Versailles (2 collèges, 3 lycées polyvalents et 1 lycée d'enseignement général et technologique)5(*).

Une convention de gestion entre la SAS Pass Culture et le ministère de l'éducation nationale signée le 14 janvier 2022 a concrétisé sa généralisation au 1er janvier 2022. Celle-ci n'a pas eu d'effets immédiats, la poursuite de la crise sanitaire au premier trimestre comme les deux périodes de vacances scolaires freinant son déploiement. La direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO), interrogée par les rapporteurs spéciaux, a cependant mis en avant une appropriation progressive du dispositif par les acteurs concernés au premier semestre 2022.

Les premiers résultats sur l'année scolaire 2022-2023 sont plus encourageants. Au 20 mai 2023, 86 % des collèges et lycées avaient utilisé ce mécanisme (92 % des établissements du secteur public). 2 millions d'élèves ont ainsi d'ores et déjà bénéficié du dispositif (1,6 million dans le secteur public), soit la moitié du public ciblé. La question de l'éloignement des offres culturelles sur certains territoires peut justifier ce déploiement limité.

Part d'établissements ayant activé le volet collectif par académie

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

La DGESCO relève néanmoins une activation en progression constante, liée à la fois à une meilleure connaissance du dispositif et à une augmentation concomitante des offres disponibles. 80 % des offres sont élaborées conjointement par les enseignants et les offreurs, ce qui vient attester de la bonne intégration du dispositif dans un parcours d'éducation artistique et culturelle (EAC).

Représentant environ 800 euros par classe par année scolaire, le volet collectif du pass concourt majoritairement à deux sorties scolaires par an. Le montant moyen d'une offre réservée atteignait 474 euros au cours de l'année scolaire 2021-2022. Au 1er mai 2023, ce montant moyen s'établissait à 450 euros pour l'année scolaire 2022-2023.

154 101 offres collectives, présentées par 8 000 acteurs, étaient disponibles au 1er mai 2023.

Répartition des offres collectives par secteur

Source : commission des finances d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

33,8 millions d'euros ont été engagés aux fins de financement du volet collectif du pass au 20 mai 2023.

Dépenses engagées au titre du volet collectif du pass Culture par année scolaire

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la direction générale de l'enseignement scolaire

48 % des crédits engagés au cours de l'année scolaire sont fléchés vers les élèves de lycée général ou technologique.

Répartition des crédits engagés par catégorie d'élève en 2022/2023
(au 20 mai 2023)

Source : commission des finances d'après les données transmises par la direction générale de l'enseignement scolaire

D. UNE GESTION DES CRÉDITS ENFIN OPTIMALE

1. Une consommation des crédits qui répond enfin à la prévision budgétaire

Alors que la loi de finances initiale pour 2021 prévoyait une dotation de 59 millions d'euros en faveur du pass Culture, 93,55 millions d'euros (AE=CP) ont finalement été consommés. Cette sur-exécution rompt avec la sous-consommation des crédits constatée au cours des précédents exercices. Elle avait été permise par l'ouverture de crédits en collectif de fin de gestion (27 millions d'euros) et le dégel de la réserve de précaution (14 millions d'euros). L'exercice 2022 a confirmé cette tendance avec une consommation intégrale des crédits votés en loi de finances initiale.

Crédits prévus et consommés au titre du volet individuel
du pass Culture depuis 2019

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

En 2019, seuls 11,91 millions d'euros en CP avaient été consommés, principalement en vue de financer des dépenses de fonctionnement alors que la loi de finances initiale prévoyait une dotation de 28,77 millions d'euros (AE=CP) pour le financement de ce dispositif. L'exercice 2020 avait exacerbé cette tendance à la sous-exécution, la crise sanitaire ayant limité l'offre et conduit au report de l'extension du dispositif. Ainsi sur les 49 millions d'euros prévus en loi de finances initiale, 10 millions d'euros avaient été redéployés et seuls 24,71 millions d'euros ont été effectivement consommés, dont 12,4 millions d'euros dédiés aux frais de gestion.

2. Des coûts de gestion estimés à 29,2 millions d'euros en 2023

Les frais de fonctionnement de la SAS Pass Culture sont estimés à 29,2 millions d'euros en 2023. Ils représentent 11,2 % des dotations versées à la structure.

Répartition de la dotation versée à la SAS Pass Culture

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Les dépenses de personnel ont atteint 7,77 millions d'euros en 2022, soit une progression de 58,8 % par rapport à 2021. L'élargissement du pass peut justifier pour partie une telle croissance.

Évolution des dépenses de personnel de la SAS Pass Culture depuis 2019

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

La progression des recrutements se justifie également par une volonté d'internaliser progressivement les compétences, garantissant ainsi stabilité et continuité des équipes pour le développement de l'application, dans un marché professionnel tendu.

Répartition des postes au sein de la SAS Pass Culture depuis 2019

Source : commission des finances, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

Ce développement interne conduit mécaniquement à une diminution des dépenses d'investissement technologique, estimées à 7,5 millions d'euros en 2022. Celles-ci représentaient ainsi 28,7 % du budget 2022 de la SAS contre 62,3 % du budget 2020.

Répartition du budget annuel de la SAS Pass Culture depuis 2019

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

La montée en charge des dépenses de fonctionnement est également justifiée par la progression des dépenses de communication. La communication externe a ainsi représenté 7,7 % du budget 2022 de la SAS Pass Culture.

Dépenses de communication de la SAS Pass Culture

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

Une partie de la fonction avait initialement été externalisée. La direction de la communication a repris, à partir de septembre 2021, certaines activités - rédaction des éléments de langage, relations institutionnelles, relations presse, réseaux sociaux - et s'est enrichie d'une composante marketing plus étoffée.

Les rapporteurs spéciaux estiment que la montée en charge de ce poste budgétaire va dans le bon sens tant elle concourt à faire mieux connaître le dispositif tant du point de vue des jeunes que des offreurs. 93 % des jeunes disent ainsi connaître le pass, selon une enquête CSA menée auprès des 15-19 ans, un tiers des jeunes interrogés citant le dispositif comme un élément de la politique du ministère de la culture en faveur des jeunes.

Les rapporteurs spéciaux s'interrogent sur l'absence de données afférentes à la SAS au sein des documents budgétaires annexés au projet de loi de finances. Malgré son poids financier, la SAS ne figure pas dans la liste des opérateurs de l'État. Il apparait pourtant indispensable afin d'évaluer la conduite de cet important volet de la politique culturelle que de telles informations soient à la disposition du Parlement.

Recommandation n° 1 (ministère de la culture) : Aux fins de bonne information du Parlement au moment du vote des projets de lois de finances et des projets de lois de règlement, intégrer la SAS Pass Culture dans la liste des opérateurs du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » de la mission « Culture » et présenter au sein du projet annuel de performances et du rapport annuel de performances une analyse de ses activités et de ses résultats, les financements apportés par l'État, son compte financier et les emplois qu'elle rémunère.

3. Un financement complété par celui des offreurs

Au financement de l'État s'ajoute celui des offreurs, via les conditions de remboursement des offres physiques (barème spécifique ou dégressif selon les offres). Les offres numériques (plateformes notamment) sont décomptées de l'enveloppe de 300 euros, mais ne sont pas remboursées par la SAS Pass Culture aux offreurs. Ces réservations, sont, par ailleurs plafonnées à 100 euros.

L'arrêté du 20 mai 2021 portant application du décret n° 2021-628 du 20 mai 2021 relatif au « pass Culture » prévoit la mise en place d'un barème de remboursement des offreurs. Il succède à un premier barème jugé insuffisament incitatif.

Barème de remboursement des offreurs

Chiffre d'affaires annuel de l'offreur sur le pass Culture

Taux de remboursement en vigueur depuis le 1er septembre 2021

Taux de remboursement en vigueur avant le 1er septembre 2021

Jusqu'à 20 000 euros

100 %

100 %

Entre 20 000 et 40 000 euros

95 %

95 %

Entre 40 000 et 150 000 euros

92 %

90 %

Au-delà de 150 000 euros

90 %

75 %

Source : commission des finances du Sénat

Des barèmes dérogatoires ont été instaurés avec certains offreurs culturels, à l'image du cinéma ou du spectacle vivant. Les offreurs peuvent ainsi choisir entre le barème commun ou :

- pour le cinéma, un taux de remboursement fixe de 90 % pour les offres de cartes d'abonnement multiplaces, un taux de remboursement fixe de 95 % pour les séances à l'unité et taux de remboursement fixe de 82,5 % pour les cartes d'abonnement illimité ;

- pour le spectacle vivant, un taux de remboursement fixe de 95 % dès la première place vendue.

Le taux de non-remboursement appliqué au secteur du livre est, de son côté, plafonné à 5 %, afin de respecter le prix unique du livre.

Au 31 décembre 2022, la contribution des acteurs depuis le lancement du dispositif s'élève à 23,62 millions d'euros, soit 7,5 % des montants dépensés par les jeunes.

Montant de la contribution des offreurs depuis le lancement du pass

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

La baisse de la part de la contribution des offreurs est justifiée par :

- le caractère dégressif du barème de contribution. Celui-ci dépendant du chiffre d'affaires de l'offreur sur la pass, il était mécaniquement appelé à diminuer avec la généralisation du dispositif ;

- le moindre recours aux offres numériques non remboursées et un plus grand accès aux lieux culturels dans un contexte de sortie de crise sanitaire.

L'acquisition de films, de livres et de billets de cinéma constituent les premiers postes de contribution. Les films comme la musique enregistrée sont constitués, en large majorité, d'offres en ligne. Ces offres ne donnent donc pas lieu à un remboursement par la SAS Pass Culture

Contribution des offreurs depuis le lancement du pass Culture - répartition
par secteur

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

II. UN OUTIL À AMÉLIORER EN VUE D'ENCOURAGER UNE DIVERSIFICATION DES PRATIQUES CULTURELLES

La généralisation du dispositif semble avoir répondu aux attentes, au moins du point de vue quantitatif. Les rapporteurs spéciaux insistent néanmoins sur la nécessité d'un bilan qualitatif, visant à la fois l'adéquation du dispositif aux objectifs de diversité des pratiques et d'accès aux offres de proximité qui ont été assignés au volet individuel et à l'ambition affichée en termes d'éducation artistique et culturelle (EAC) s'agissant du volet collectif.

A. FAIRE DU PASS UN VÉRITABLE OUTIL DE POLITIQUE CULTURELLE

La création du pass répond à un postulat selon lequel l'argent constitue le principal frein à l'accès à la culture. S'il est évident que la situation financière constitue un biais important pour appréhender la question de l'inégalité culturelle chez les plus jeunes, elle ne saurait pour autant résumer le sujet. La notion de proximité est également essentielle : le dispositif perd de sa pertinence quand il est déployé dans des « zones blanches », marquées par l'absence d'infrastructures culturelles ou des difficultés d'accès au numérique (cf infra). La question sociale doit également être cernée. Le ressort tarifaire peut, en tout état de cause, casser une dernière barrière mais il suppose que les autres obstacles soient franchis. Le pass agit, en effet, en premier lieu comme un révélateur des inégalités sous toutes ses formes.

Il convient également de s'interroger sur la philosophie même du volet individuel du pass. Comme le met en avant le décret du 20 mai 2021, le dispositif accompagne une demande plus qu'il ne met en avant une offre. Sa logique prescriptive demeure relativement faible. Ce faisant, il prend le risque de confirmer les habitudes culturelles et s'avérer être un effet d'aubaine pour ceux qui ont déjà une pratique culturelle. L'algorithme qui structure l'application renforce cette impression, le point d'entrée dans l'application s'opère avant tout par le biais d'une recherche, plus que par une proposition.

Il est regrettable qu'aucun objectif n'ait été assigné à cette politique publique en matière de médiation culturelle, de diversification culturelle ou d'affirmation des droits culturels. Ce faisant, le ministère de la culture prend le risque de résumer le volet individuel du pass à une simple plateforme d'achat de biens et de services. Les rapporteurs spéciaux insistent pour qu'il soit plus éditorialisé afin de participer à la mise en place d'un véritable parcours culturel. Il apparait, en effet, indispensable qu'il contribue à faire évoluer des pratiques culturelles.

1. Le volet individuel du pass ne satisfait encore qu'imparfaitement l'objectif de diversification culturelle qui lui était assigné

46,5 % des achats des jeunes de 18 ans via le pass en 2022 ont été orientés vers le livre. Le taux est encore plus élevé pour les moins de 18 ans (63,5 %).

Le cinéma, l'achat d'instruments de musique, les spectacles musicaux et la musique enregistrée constituent, à des degrés moindres, les autres priorités d'utilisation du pass. Les rapporteurs spéciaux relèvent deux grands absents : le spectacle vivant et les musées. S'agissant de ces derniers, seuls 650 musées figurent parmi les offreurs, le réseau muséal français comportant environ 1 200 structures. En ce qui concerne le spectacle vivant, le contexte sanitaire a longtemps constitué un frein.

Répartition des réservations par secteur en fonction des montants dépensés en 2022 - Part individuelle

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

La priorité accordée au livre tend néanmoins à décliner avec le temps comme en témoigne la répartition des réservations depuis le début de l'année 2023.

Répartition des réservations par secteur en fonction des montants dépensés
entre janvier et avril 2023 - Part individuelle

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

Cette réorientation progressive des réservations dénote une meilleure appréhension du dispositif par les jeunes, avec une disparition des achats massifs et une approche moins impulsive. La baisse de la part du manga (70 % des acquisitions de livres en 2021 contre 38,5 % aujourd'hui) en témoigne comme l'évolution des pratiques en matières cinématographiques : 3 films Art et Essais font ainsi partie des 20 premiers films vus au moyen du pass. Afin d'accompagner cette tendance à la diversification, la SAS Pass Culture mise sur :

- la création de playlists spécialisées ;

- la mise en place d'évènements exclusifs pour les jeunes utilisateurs, en partenariat avec les structures culturelles ;

- la création d'une communauté autour du pass, avec la nomination de jeunes ambassadeurs.

Des efforts doivent également être menés par les offreurs, notamment dans les secteurs du spectacle vivant et du patrimoine, afin d'élaborer une stratégie d'ouverture au jeune public, plus accessible que la communication habituellement mise en oeuvre.

Les rapporteurs spéciaux ont conscience que si le pass Culture apparaît comme un indicateur des pratiques culturelles des jeunes, il ne saurait cependant résumer celles-ci. La population concernée peut, en effet, passer par d'autres biais pour accéder à la culture (collectivités territoriales, famille etc). Ils constatent néanmoins que l'objectif de diversification a été assigné dès l'origine au pass et souhaitent donc que des dispositions soient prises à cet effet.

Un outil calculant la diversification des pratiques sur l'application est actuellement en cours de développement par la SAS en lien avec un laboratoire de recherche de l'École normale supérieure. Il permettra de documenter un peu plus les difficultés rencontrées. En attendant, la mise en place d'un sous-plafond, à l'image de celui mis en oeuvre pour les achats numériques, pourrait ainsi constituer une option en vue d'assurer un plus grand éventail de réservations.

L'élaboration d'une politique de l'offre apparait également indispensable. Elle pourrait prendre la forme d'offres combinées, permettant, en cas d'achat d'un livre par exemple, de flécher une partie des crédits restants vers l'acquisition d'un billet de spectacle, d'un ticket de cinéma ou d'un support audiovisuel illustrant un environnement proche du thème du livre ou proposant une variation autour des thèmes abordés.

Recommandation n° 2 (ministère de la culture, SAS Pass Culture) : Afin de concourir à l'objectif de diversification des pratiques culturelles assigné au pass Culture, mettre en place, au sein du volet individuel, des parcours de réservation, fléchant les crédits restants après une réservation vers une ou plusieurs offres en lien avec l'univers abordé par le premier achat et introduire des plafonds par catégorie d'offre.

Au-delà de la question de la médiation culturelle, un accent doit également être mis sur l'accès des jeunes non-scolarisés au pass. Pour l'heure, on observe une réelle surpondération des lycéens et des étudiants parmi les jeunes ayant ouvert un compte. Seuls 7,3 % de 18 ans inscrits sur l'application ont ainsi déclaré ne pas être scolarisés. Ce ratio est plus faible que le nombre de jeunes non-scolarisés rapporté à l'ensemble de la population visée.

Utilisation du pass Culture par les jeunes non-scolarisés

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Des partenariats développés avec les acteurs de l'éducation populaire, de la solidarité et du lien social sont, d'après le ministère de la culture et la SAS Pass Culture, mis en oeuvre afin de répondre à ce défi. Cet appui apparaît indispensable. Il convient en effet de relever que pour les plus jeunes, une fois inscrits sur l'application, l'utilisation du pass est relativement plus importante, preuve de sa pertinence.

Activité des jeunes scolarisés et non-scolarisés actifs
sur l'application Pass Culture

Source : commission des finances du Sénat d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

Recommandation n° 3 (ministère de la culture, SAS Pass Culture) : Renforcer les actions de communication à destination des jeunes non-scolarisés afin qu'ils puissent se saisir de ce dispositif et contribuer ainsi à leur émancipation culturelle.

2. La question géographique

Une analyse plus détaillée du déploiement du dispositif met en avant des différences notables entre régions et rappelle la persistance d'inégalités territoriales en matière d'accès aux infrastructures culturelles. Le cas est particulièrement patent au sein de certains territoires ultramarins ou à dominante rurale.

Taux de couverture par région et par catégorie d'âge

(en pourcentage)

Source : commission des finances d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

Les auditions menées par les rapporteurs spéciaux ont souligné l'impact de l'éloignement géographique sur le déploiement du pass Culture. La SAS a tenté d'y répondre en nommant des représentants au sein de chacune des régions. La fonction développement territorial a d'ailleurs été la première à se structurer en interne, dès 2021. Cette direction est d'ailleurs en croissance, avec un effort porté sur les territoires ultra-marins.

Une solution à cet obstacle pourrait consister en l'intégration dans les offres d'un forfait transport vers les infrastructures culturelles. Cette option séduisante présente, selon le ministère de la culture, un risque de non-compatibilité avec la réglementation européenne en matière d'aides d'État. Plus largement, la question des transports relève de la compétence des collectivités territoriales. Enfin, l'intégration d'un forfait transport ne présente pas toutes les garanties d'équité : là où les jeunes qui ne rencontrent pas de problématique de transport pourront utiliser tout leur crédit en dépenses culturelles, d'autres devront consacrer une part plus ou moins importante de ce même crédit au transport, ce qui limitera mécaniquement le nombre et la diversité des pratiques auxquelles ils pourront accéder.

Les rapporteurs spéciaux relèvent cependant qu'une expérimentation devrait être menée en région Grand Est, en vue de faciliter le financement de transports associés à un usage de la part collective du pass. Ils souhaitent que ce projet soit décliné au niveau du volet individuel. Ils notent que même si un risque d'iniquité peut se faire jour, il reste moins problématique que celui d'une non-utilisation des crédits dédiés. L'intégration d'une dimension transport doit également permettre une meilleure utilisation du dispositif par les jeunes handicapés.

Recommandation n° 4 (ministère de la culture, ministère de l'éducation nationale, SAS Pass Culture) : Intégrer un volet transport dans les offres présentées sur la plateforme pass Culture afin de faciliter l'accès aux infrastructures culturelles aux jeunes éloignés de celles-ci ou handicapés.

La question de l'éloignement est particulièrement prégnante en milieu rural. Les rapporteurs spéciaux notent avec intérêt que les jeunes ruraux - comme ceux des quartiers des politiques de la ville - sont aussi nombreux à utiliser le pass Culture que leur poids dans la population générale. L'idée d'un moindre recours peut donc être écartée. Les différences d'environnement culturel conduisent néanmoins à une utilisation moins intensive. Afin de répondre à ce défi, des solutions pour les jeunes ruraux sont actuellement en cours d'expertise, parmi lesquels :

- la mise en avant plus poussée des offres sur les territoires concernés ;

- le renforcement des partenariats avec des acteurs culturels présents dans les territoires ruraux et dans les villes de taille plus petite : maisons de la presse, cinémas itinérants etc.

Un travail sur le développement d'offres « duo » est également en cours en vue de permettre aux jeunes de se déplacer avec un accompagnant au sein de lieux culturels. Les rapporteurs spéciaux appuient cette initiative et invitent à la concrétiser rapidement.

Recommandation n° 5 (ministère de la culture, SAS Pass Culture) : Dans le cadre du volet individuel, développer, dans les zones les plus éloignées des infrastructures culturelles, des offres duo, permettant aux jeunes d'accéder à un lieu culturel avec un accompagnant.

3. Le volet collectif : un dispositif encore perfectible

La part collective illustre de façon générale une toute autre approche de l'utilisation du pass Culture., que celle constatée dans l'utilisation de la part individuelle.

Répartition des réservations par secteur en fonction des montants dépensés -
Part collective

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat d'après les données transmises par la SAS Pass Culture

91 % des collèges et lycées publics de l'Académie de Versailles ont activé la part collective du pass6(*). Si le dispositif semble apprécié notamment en termes de gestion (absence de gestion financière directe et donc d'édition de factures et d'attestation de services faits), plusieurs éléments semblent encore grever son développement :

- l'absence de moyens de transports pour les établissements enclavés (cf supra) ;

- la concurrence d'autres dispositifs publics (collectivités territoriales ou cités éducatives7(*)) ;

- l'absence de référencement de leurs intervenants habituels en matière d'éducation artistique et culturelle (EAC) sur l'application Pass Culture ;

- l'absence de nomination d'un professeur référent culture.

Ce constat démontre la perfectibilité du dispositif mis en oeuvre, qu'il s'agisse de la plateforme de référencement, de la formation des enseignants à ce nouveau dispositif voire de celle des offreurs.

Par ailleurs, les rapporteurs spéciaux notent que les apprentis et les jeunes en contrat de professionnalisation ne bénéficient pas encore du dispositif. La priorité doit être portée sur ce public avant toute extension aux élèves en école élémentaire, comme actuellement envisagée.

Recommandation n° 6 (ministère de la culture, ministère de l'éducation nationale, SAS Pass Culture) : Ouvrir le volet collectif du pass aux jeunes en apprentissage ou en contrat de professionnalisation afin de permettre à ceux-ci de bénéficier d'un parcours d'éducation artistique et culturelle.

a) Faciliter le référencement des acteurs culturels

L'application ADAGE (Application dédiée à la généralisation de l'éducation artistique et culturelle), constitue aujourd'hui la porte d'entrée pour les enseignants pour la mise en oeuvre du volet collectif du pass. Administrée par la mission éducation artistique et culturelle (MEAC) de la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) du ministère de l'éducation nationale, elle est utilisée pour :

- élaborer des projets d'éducation artistique et culturelle (EAC), les recenser et rendre lisible le volet culturel du projet d'établissement ;

- attester du parcours individuel de chaque élève ;

- consulter l'annuaire géolocalisé des partenaires et intervenants référencés et les offres collectives du pass Culture, en vue de les réserver et de les associer à des projets d'EAC

Les acteurs culturels doivent utiliser exclusivement la plateforme pass Culture pro pour être référencés. Une fois le référencement obtenu, leur offre est automatiquement basculée sur l'application ADAGE.

Le référencement est automatique s'agissant :

- des établissements publics sous tutelle du ministère de la culture, d'un établissement de l`enseignement supérieur ou laboratoire de recherche sous tutelle du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation ou d'un établissement public national proposant des actions d'EAC ;

- des structures labellisées par le ministère de la culture, conventionnées avec lui ou ayant bénéficié d'un soutien de la direction régional des affaires culturelles au cours des trois dernières années ;

- des structures conventionnées avec le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse pour proposer des actions d'EAC, ou disposant d'un agrément ou du haut patronage de ce ministère ;

- des structures culturelles gérées par une collectivité territoriale ;

- d'une organisation internationale ;

- des cinémas disposant d'une autorisation d'exercice accordée par le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) ;

- d'un établissement dont l'objet principal est la vente au détail de livres neufs ;

- d'une structure relevant du champ de l'éducation populaire, disposant d'un agrément d'éducation populaire et bénéficiant d'un conventionnement avec le ministre de la culture.

Si l'acteur culturel ne correspond pas à ces critères, son dossier est alors présenté devant une commission régionale, présidée par le recteur de la région académique et composée d'un délégué académique à l'éducation artistique (DAAC) et du directeur régional des affaires culturelles (DRAC)8(*). Les dossiers examinés concernent les structures établies sur le territoire de l'académie. Un avis prenant en compte l'expertise artistique, scientifique et culturelle de l'offreur, sa capacité de médiation vers les enseignants et leurs élèves et son habileté à élaborer des projets EAC (rencontre, pratique et connaissances) en co-construction avec les enseignants est, en principe, rendu dans les deux mois. Il convient de préciser à ce stade que le référencement porte sur les qualités de l'offreur et non sur l'offre.

Le ministère de la culture reconnaît que les commissions régionales ont dû faire face à un afflux de dossiers, lié à l'« appel d'air » qu'a pu constituer le lancement rapide du volet collectif. Des retards dans le référencement ont pu logiquement être constatés. Ces délais de réponse atteignant 8 mois ne sont pas sans incidence financière pour certaines structures pour lesquelles les projets d'EAC représentent entre un tiers et la moitié de leurs revenus (le cas est particulièrement patent pour les artistes auteurs).

Les rapporteurs spéciaux ont été alertés sur les difficultés administratives rencontrées par certains offreurs à pouvoir être référencés. Les travailleurs indépendants, à l'image des artistes-auteurs9(*), sont, notamment, concernés. Un vademecum a été publié par les deux ministères concernés et devrait être actualisé pour la rentrée 2023.

Les rapporteurs spéciaux souhaitent que celui-ci prenne spécifiquement en compte la situation particulière des indépendants. Une motivation devrait également être jointe aux refus de référencement. Il convient de retrouver la fluidité antérieure au lancement du pass. Les enseignants prenaient alors contact avec les partenaires artistiques et culturels repérés pour leurs projets. Les financements se faisaient sur fonds propres de l'établissement agrémentés de subventions des instances de tutelle (conseil régional ou conseil départemental). Il serait regrettable que la manne supplémentaire représentée par le pass vienne gripper un système jusqu'alors efficace.

Recommandation n° 7 (ministère de la culture, ministère de l'éducation nationale) : Dans le cadre du volet collectif, réunir plus régulièrement les commissions régionales chargées du référencement des offreurs sur les plateformes Pass Culture et ADAGE, afin de permettre aux structures les plus dépendantes des activités liées à l'éducation artistique et culturelle d'être rapidement en situation de présenter des offres, et motiver, par ailleurs, d'éventuels refus.

b) Éviter les distorsions de concurrence

La territorialisation du référencement des acteurs culturels au sein d'ADAGE fait également figure de priorité. Tous les intervenants et toutes les structures culturelles référencées par les commissions régionales sont en effet visibles sur l'ensemble du territoire national sans prise en compte des réalités locales.

Le référencement devrait donc intégrer un périmètre d'intervention sauf à créer des distorsions de concurrence entre offreurs, au profit de ceux disposant de plus de moyens.

Ce référencement amélioré doit aller de pair avec une aide aux offreurs aux fins de structuration. Certains acteurs culturels indiquent ainsi ne pas toujours disposer des ressources humaines nécessaires pour répondre aux demandes des équipes pédagogiques ou même inscrire les propositions sur la plateforme pass culture. Sur les 2 100 acteurs culturels référencés sur ADAGE en Île-de-France, 700 n'ont toujours pas de compte pass culture, le long temps de mise en ligne pouvant être dissuasif pour des équipes administratives parfois très réduites ou à mi-temps.

Recommandation n° 8 (ministère de la culture, ministère de l'éducation nationale) : Afin d'éviter les distorsions de concurrence entre offreurs et de mieux prendre en compte les réalités locales, accompagner les plus petits d'entre eux aux fins de structuration de leurs offres sur les plateformes ADAGE et Pass Culture et territorialiser les offres sur la plateforme d'ADAGE pour que celle-ci ne soit pas qu'un simple annuaire national.

c) Une meilleure formation du personnel scolaire

L'Académie de Versailles a mis en place un guide d'accompagnement à l'intention des chefs d'établissements. Cette initiative doit être saluée et étendue au niveau national. Il s'agirait de faciliter ainsi :

- le développement d'une véritable stratégie d'utilisation de la dépense par cycle d'enseignement et par typologie de projet. Les actions ne seraient pas juxtaposées mais mises en cohérence avec un projet d'établissement ;

- la discussion sur les choix des offres et d'éviter une déresponsabilisation liée à l'usage de la plateforme ADAGE. Celle-ci est une base de référencement, elle ne peut constituer une caution pédagogique ;

- une meilleure connaissance des tarifs proposés par les structures culturelles.

Recommandation n° 9 (ministère de l'éducation nationale) : Mieux former les personnels scolaires à l'utilisation du volet collectif du pass Culture afin de renforcer la cohérence du dispositif avec les projets d'établissements en matière d'éducation artistique et culturelle.

d) Mieux articuler volet collectif et volet individuel

Les rapporteurs spéciaux se sont interrogés sur un éventuel rééquilibrage entre volet individuel et volet collectif tant le second semble plus enclin à atteindre l'objectif de diversification des pratiques culturelles assigné au pass. Avant d'en arriver à une telle solution, il convient de développer tous les outils incitatifs possibles.

S'agissant des applications ADAGE et Pass Culture, il pourrait être envisagé que les propositions retenues dans le cadre de la part collective apparaissent en priorité sur le compte individuel Pass Culture afin que celui-ci puisse poursuivre, s'il le souhaite, le parcours de découverte initié en classe. Dans le même temps, ADAGE pourrait indiquer le nombre et le type d'actions proposées sur la part individuelle par le partenaire culturel référencé.

La mise en place d'« élèves ambassadeurs culture » au sein des établissements scolaires doit également permettre d'impliquer les élèves dans les choix de l'établissement mais aussi de les responsabiliser quant à l'usage de la part individuelle du pass. Ces ambassadeurs existent déjà au sein des établissements de l'Académie de Versailles (1 960). Une généralisation apparaît indispensable.

Recommandation n° 10 (ministère de la culture, ministère de l'éducation nationale) : Mieux articuler sur les plateformes Pass Culture et ADAGE les parcours de réservation individuels et collectifs, afin de renforcer la complémentarité des démarches et mettre en place, au sein des établissements scolaires, des élèves ambassadeurs du pass, en vue d'impliquer les élèves dans les projets collectifs et les responsabiliser s'agissant de l'utilisation de la part individuelle.

4. Un outil en devenir ?

Il conviendra également de contribuer à faire du pass une véritable plateforme en faveur de l'éveil artistique et culturel accessible aux jeunes qui ne seraient plus éligibles, si l'on entend que ce dispositif ne se résume pas à une offre limitée dans le temps.

La plateforme Pass Culture est d'ores et déjà accessible au grand public, sans crédit mis à disposition. La SAS Pass Culture comme la délégation générale à la transmission, aux territoires, et à la démocratie culturelle ont indiqué aux rapporteurs spéciaux les axes de développement en ce sens :

- une éditorialisation renforcée de l'application pour la transformer en une véritable plateforme de découverte culturelle, ouverte à tous ;

- contribuer à sa mutation en un véritable réseau social sur lequel les jeunes peuvent échanger, partager leurs goûts et recommandations ;

- référencer sur le site les offres gratuites en direction des jeunes adultes ;

- permettre aux jeunes de recharger eux-mêmes leur pass une fois les 20 ans atteints afin d'accéder à des offres spécifiquement dédiées à ce public.

Les rapporteurs spéciaux encouragent une telle évolution, tant elle permettrait de concourir aux objectifs ambitieux que le ministère de la culture s'assigne par ailleurs en matière d'éducation artistique et culturelle et de participation à la vie culturelle. Elle contribuerait de la sorte à renforcer l'efficience de la dépense publique en la matière.

Les collectivités territoriales s'appuient de leur côté sur leur tissu associatif pour mener à bien cette mission. La SAS Pass Culture pourrait également opérer de la sorte en se rapprochant des associations oeuvrant en ce sens au niveau local.

Recommandation n° 11 (ministère de la culture, SAS Pass Culture) : Afin de poursuivre l'objectif de renforcement de la diversification des pratiques culturelles chez les plus jeunes, faire de la plateforme un outil éditorialisé et d'échanges, ouvert aux jeunes adultes, avec la possibilité de recharger soi-même son pass une fois les 20 ans atteints pour accéder à des offres spécifiquement dédiées à ce public.

B. AU-DELÀ DU PASS CULTURE, QUELS MOYENS POUR L'ÉDUCATION ARTISTIQUE ET CULTURELLE ?

Le programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » agrège quatre types de dépense :

- le financement des établissements d'enseignement supérieur et d'insertion professionnelle (action 01) ;

- le soutien à la démocratisation et à l'éducation artistique et culturelle, qui inclut notamment le financement du volet individuel du pass culture et agrège, par conséquent l'essentiel des crédits du programme (action 02) ;

- l'appui à la langue française et aux langues de France (action 03) ;

- l'aide à la recherche culturelle et à la culture scientifique, principalement dédiée au financement d'Universcience (action 04).

769,4 millions d'euros en CP ont été consommés en 2022 au titre de ce programme10(*).

Exécution du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation
de la culture »

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

L'action 02 « Démocratisation et éducation artistique et culturelle », qui regroupe les crédits dédiés au pass Culture et à l'éducation artistique et culturelle, représente 50,2 % des crédits du programme. Les crédits dédiés à cette action sont fléchés dans trois directions :

- le financement du volet individuel du pass Culture (199,6 millions d'euros en CP consommés en 2022) ;

- l'appui à l'éducation artistique et culturelle (129,2 millions d'euros en CP consommés en 2022) ;

- la participation de tous à la vie culturelle (48,58 millions d'euros en CP consommés en 2022).

Répartition des crédits de paiement au titre de l'action 02 « Démocratisation
et éducation artistique et culturelle » consommés en 2022

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Comme indiqué plus haut, les crédits dédiés au pass Culture ont été intégralement consommés en 2022 (199,6 millions d'euros AE=CP). Les rapporteurs spéciaux relèvent parallèlement une sur-exécution des crédits dédiés à l'éducation artistique et culturelle (129,2 millions d'euros en CP contre 96,5 millions d'euros prévus initialement). Ils notent plus précisément une surconsommation des crédits dédiés à l'EAC en temps scolaire (26,4 millions d'euros en CP, soit un taux d'exécution de 110 %) et surtout hors temps scolaire : 30,3 millions d'euros en CP là où la loi de finances tablait sur 14,1 millions d'euros.

Le dispositif ne semble ainsi pas avoir vampirisé les crédits dédiés à l'éducation artistique et culturelle au titre de la mission « Culture », soulignant ainsi que le pass ne tend pas à se substituer à ce dispositif mais plutôt à le renforcer. Les crédits de paiement consommés à ce titre ont ainsi progressé de 22,5 % depuis 2019.

Évolution des crédits de paiement dédiés à l'éducation artistique et culturelle depuis 2019

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Ils notent cependant une sous-exécution des crédits dédiés à la participation de tous à la vie culturelle : 48,58 millions d'euros en CP consommés en 2022, contre 66,81 millions d'euros prévus en loi de finances initiale. Ils s'alarment notamment de la sous consommation des crédits fléchés vers la politique territoriale et la cohésion sociale : 33,9 millions d'euros en CP, contre 47,5 millions d'euros initialement prévus. L'ambition affichée de cette sous-action est d'améliorer l'accès des habitants à la vie culturelle, de réduire les inégalités et de renforcer la cohésion territoriale, en insistant sur certains territoires considérés comme prioritaires : zones rurales, quartiers de la politique de la ville et territoires ultramarins. Cette politique s'appuie notamment sur des partenariats interministériels, associant le ministère de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Cette faible consommation interroge quant à la fiabilité de la prévision budgétaire. Un écart moins net avait déjà été constaté en exécution 2021 (-4,1 millions d'euros en CP). Cette sous-consommation est à mettre en perspective avec la faiblesse des résultats obtenus s'agissant de l'indicateur 2.3 de la mission « Culture, censé mesurer l'effort en faveur des territoires prioritaires. Celui-ci doit permettre de déterminer la part des crédits dirigés vers ces territoires par rapport à la totalité des crédits de l'action 02. Le projet annuel de performances pour 2022 ciblait un taux de 27 %. Il est loin d'être atteint, le taux effectivement constaté s'établissant à 21,91 % soit 5 points de moins. Le ministère de la culture pointe une difficulté de récolement pour justifier cet écart. Les rapporteurs notent cependant que ce taux est inférieur à celui constaté en 2020 - 22,32 % - exercice pourtant bouleversé par la crise sanitaire.

Évolution de l'indicateur 2.3 « Mesure de l'effort en faveur
des territoires prioritaires - % des crédits » depuis 2020

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

La sous-exécution des crédits comme la faiblesse du résultat de l'indicateur viennent rappeler la nécessité de maintenir un niveau d'investissement dans les territoires, indispensable en vue de renforcer la cohérence de l'ensemble de l'action culturelle de l'État. Le déploiement pour l'ensemble des jeunes du pass Culture ou de l'EAC ne saurait ainsi être permis que par le développement d'infrastructures ou la tenue d'évènements dans la totalité des territoires, et notamment au sein des territoires prioritaires.

Recommandation n° 12 (ministère de la culture) : Mettre en adéquation la réalité des investissements du ministère de la culture dans les territoires avec l'autorisation budgétaire, afin d'éviter une sous-exécution récurrente des crédits et permettre l'accès de l'ensemble des jeunes éligibles au pass Culture à des infrastructures et évènements culturels.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 11 juillet 2023 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a entendu une communication de MM. Vincent Éblé et Didier Rambaud, rapporteurs spéciaux, sur le pass Culture.

M. Claude Raynal, président. - Nous examinons à présent le rapport de MM. Vincent Éblé et Didier Rambaud, rapporteurs spéciaux de la mission « Culture », faisant suite au contrôle budgétaire qu'ils ont réalisé sur le pass Culture.

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. - Le pass Culture, expérimenté depuis juin 2019 puis généralisé et élargi en 2021, consiste en une application gratuite, qui relaie les offres culturelles et artistiques accessibles à proximité pour les jeunes âgés de 15 à 18 ans. Ces derniers disposent pour y répondre d'une somme comprise entre 20 et 300 euros, variant en fonction de l'âge. S'éloignant des dispositifs mis en place par les collectivités territoriales, le pass a repris les contours de l'application « 18app », lancée en 2016 en Italie par le gouvernement de Matteo Renzi, qui permettait à tout jeune de 18 ans de disposer d'une somme de 500 euros, baptisée « Bonus Cultura », consacrée à l'acquisition de biens culturels.

Au 1er mai 2023, soit près de deux ans après sa généralisation et son élargissement, 3,04 millions de jeunes, âgés de 15 à 18 ans, disposent d'un compte sur l'application. Le nombre d'inscriptions répond pour partie aux cibles fixées à l'échelle nationale dans le contrat d'objectifs et de performance signé entre la société par actions simplifiée (SAS) Pass Culture et l'État.

Le montant total des réservations depuis le lancement de l'application atteignait 313 millions d'euros au 31 décembre 2022. Les premiers jeunes de 18 ans inscrits lors de la généralisation du dispositif en mai 2021 ont dépensé en moyenne 244 euros sur les 300 euros accordés.

46,5 % des achats des jeunes de 18 ans effectués via le pass en 2022 ont été orientés vers le livre. Le taux est encore plus élevé pour les moins de 18 ans, puisqu'il s'élève à 63,5 %. Le cinéma, l'achat d'instruments de musique, les spectacles musicaux et la musique enregistrée constituent, à des degrés moindres, les autres priorités d'utilisation du pass. Nous avons relevé une meilleure appréhension du dispositif par les jeunes, marquée par une disparition des achats massifs et une approche moins impulsive. La baisse de la part du manga - 70 % des acquisitions de livres en 2021 contre 38,5 % aujourd'hui - en témoigne, tout comme l'évolution des pratiques en matières cinématographiques : trois films d'art et d'essai font ainsi partie des 20 premiers films vus au moyen du pass.

La loi de finances pour 2022 a permis de faire évoluer le dispositif en l'ouvrant aux élèves à partir de la classe de quatrième. Ces derniers bénéficient, sous la responsabilité des enseignants, d'un crédit : 25 euros par élève en quatrième et en troisième, 30 euros en seconde et 20 euros en première et en terminale à dépenser dans un cadre collectif : sortie culturelle ou accueil d'un professionnel. Le dispositif sera étendu aux élèves de sixième et de cinquième à compter de la rentrée scolaire 2023.

Les premiers résultats sur l'année scolaire 2022-2023 sont encourageants. Au 20 mai 2023, 86 % des collèges et lycées et 92 % des établissements du secteur public avaient utilisé ce mécanisme. Au total, 2 millions d'élèves ont d'ores et déjà bénéficié du dispositif, dont 1,6 million dans le secteur public, soit la moitié du public ciblé. L'éloignement des offres culturelles dans certains territoires peut expliquer ce déploiement limité.

Au 1er mai 2023, la dépense moyenne pour l'année scolaire 2022-2023 s'établissait à 450 euros et 154 101 offres collectives, présentées par 8 000 acteurs, étaient disponibles.

La loi de finances pour 2023 prévoit une dotation de 208,5 millions d'euros pour le financement du volet individuel. Le pass Culture représente 25 % des crédits du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » de la mission « Culture ». La SAS Pass Culture, chargée de son déploiement, est également le deuxième opérateur du ministère de la culture, derrière la Bibliothèque nationale de France. Par ailleurs, 51 millions d'euros sont prévus pour le volet collectif du dispositif, principalement financé par le programme 230, « Vie de l'élève », de la mission « Enseignement scolaire ».

Les frais de fonctionnement de la SAS Pass Culture sont estimés à 29,2 millions d'euros en 2023. Ils représentent 11,2 % des dotations versées à la structure. Les dépenses de personnel ont atteint 7,77 millions d'euros en 2022, soit une progression de 58,8 % par rapport à 2021. L'élargissement du pass peut justifier pour partie une telle croissance.

Le choix d'une société par actions simplifiée semble, avec le recul, le plus adapté. La SAS paraît plus agile qu'un établissement public classique et a pu accompagner la mutation du pass au cours des deux dernières années. Cependant, malgré son poids budgétaire, la SAS ne figure pas dans la liste des opérateurs de l'État. Il paraît pourtant indispensable, afin d'évaluer la conduite de cet important volet de la politique culturelle, que de telles informations soient à la disposition du Parlement. C'est d'ailleurs l'une de nos préconisations.

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. - La situation financière constitue un angle important pour appréhender la question de l'inégalité culturelle chez les plus jeunes. Elle ne saurait pour autant résumer le sujet de l'accès à la culture. La notion de proximité est également essentielle. En effet, le pass Culture perd de sa pertinence quand il est déployé dans des « zones blanches », marquées par l'absence d'infrastructures culturelles ou par des difficultés d'accès au numérique, vecteur aujourd'hui essentiel dans l'accès à la culture. Un travail sur l'accès aux infrastructures culturelles lointaines doit ainsi être accompli, notamment en milieu rural. La question sociale doit également être cernée, sans être réduite à la seule question de la solvabilité des jeunes. Le ressort tarifaire peut, en tout état de cause, casser une dernière barrière, mais il suppose que les autres obstacles soient franchis.

La logique prescriptive du pass Culture demeure, en outre, relativement faible. Celui-ci risque donc de confirmer les habitudes culturelles et s'avérer être un simple effet d'aubaine pour ceux qui ont déjà une pratique culturelle. Il est, plus largement, regrettable qu'aucun objectif n'ait été assigné à cette politique publique en matière de médiation culturelle, de diversification culturelle ou d'affirmation des droits culturels. Ainsi, le ministère de la culture prend le risque de résumer le volet individuel du pass Culture à une simple plateforme d'achat de biens et de services.

Il est indispensable que le pass soit plus « éditorialisé » afin de participer à la mise en place d'un véritable parcours culturel, qui permette notamment de mieux orienter les réservations vers deux grands absents : le spectacle vivant et les musées. Au-delà de la question de la médiation culturelle, l'accent doit également être mis sur l'accès des jeunes non scolarisés au pass Culture. Pour l'heure, on observe une réelle surpondération des lycéens et des étudiants parmi les jeunes ayant ouvert un compte. Seuls 7,3 % des jeunes de 18 ans inscrits sur l'application ont ainsi déclaré ne pas être scolarisés. Ce ratio est plus faible que le nombre de jeunes non scolarisés rapporté à l'ensemble de la population cible.

En ce qui concerne le volet collectif, le recul donné par deux années scolaires souligne néanmoins les écueils auxquels sont confrontés les établissements dans sa mise en oeuvre, notamment : l'absence de moyens de transport pour les établissements et territoires enclavés, la concurrence d'autres dispositifs publics mis en oeuvre dans le cadre des politiques des collectivités territoriales ou des cités éducatives, les difficultés des intervenants en éducation artistique et culturelle (EAC) à être référencés sur la plateforme créée à cet effet, Adage (Application dédiée à la généralisation de l'éducation artistique et culturelle), et sur celle du pass Culture, et enfin l'absence de désignation dans un trop grand nombre d'établissements d'un professeur référent pour la culture au sein des classes.

Nous relevons par ailleurs que le volet collectif semble plus enclin à atteindre l'objectif de diversification des pratiques culturelles assigné au pass Culture que le volet individuel et que l'articulation entre les deux parts semble, de notre point de vue, insuffisante.

Il conviendra également de contribuer à faire du pass Culture une véritable plateforme en faveur de l'éveil artistique et culturel, accessible aux jeunes qui ne seraient plus éligibles, pour des motifs d'âge notamment, si l'on entend que ce dispositif ne se résume pas à une offre limitée dans le temps. Il s'agit de contribuer à faire de cet outil un élément clé en vue de concourir aux objectifs ambitieux que le ministère de la culture s'assigne par ailleurs en matière d'éducation artistique et culturelle, et de participation à la vie culturelle. Cette évolution permettrait de renforcer l'efficience de la dépense publique en la matière.

Le pass Culture ne semble pas avoir vampirisé les crédits consacrés à l'éducation artistique et culturelle de la mission « Culture », soulignant ainsi que le dispositif ne tend pas à s'y substituer, mais plutôt à la renforcer, puisqu'une augmentation de 22,5 % a été enregistrée depuis 2019.

Nous notons cependant une sous-exécution des crédits affectés à la participation de tous à la vie culturelle, notamment ceux qui sont fléchés vers la politique territoriale et la cohésion sociale. Or le déploiement pour l'ensemble des jeunes du pass Culture ou de l'EAC ne sera rendu possible que par le développement d'infrastructures ou par la tenue d'évènements dans la totalité des territoires, notamment au sein des territoires prioritaires.

Les douze recommandations que nous vous proposons tentent de répondre à ces constats en ciblant particulièrement la nature de l'offre, par la mise en place de parcours de réservation et de sous-plafonds, la création d'une offre « duo » ou l'intégration d'un volet transport. Notre rapport propose également des pistes d'amélioration du volet collectif : accompagnement des petits offreurs, articulation avec le volet individuel et formation du personnel scolaire, qui nous paraît insuffisante aujourd'hui.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je remercie les deux rapporteurs spéciaux pour leur mission, qui a le mérite de nous apporter de nouveaux éclaircissements, car les discussions sur le pass Culture à l'occasion de l'examen des projets de loi de finances (PLF) charrient parfois quelques raccourcis. En fin de compte, ce dispositif trouve son public, malgré quelques fragilités.

Pour améliorer le fonctionnement du dispositif, il me paraît important de comprendre quels sont les facteurs limitants pour certains publics. Les habitants de zones rurales, par exemple, sont forcément plus éloignés des offres culturelles. Pourquoi ne pas développer une offre culturelle intéressante près de chez eux, plutôt que d'attendre d'eux qu'ils se déplacent ? Un déplacement suppose d'ailleurs un surcoût, d'où votre proposition d'inclure le prix du transport dans la prise en charge du pass Culture. Cette solution participe à la recherche d'équité, d'une offre d'accès diversifié, de telle sorte que ne soient pas consolidées certaines inégalités observables dans le parcours éducatif, et peut-être aussi dans la réussite aux examens.

Avez-vous identifié des leviers pour préciser notre connaissance des facteurs limitants ?

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. - Le dispositif, qui se fixe comme objectif de solvabiliser les jeunes, soulève une question centrale : cette solvabilisation est-elle suffisante pour aider certains jeunes à surmonter leurs difficultés d'accès à des offres culturelles ? Bien entendu, elle est essentielle, parfois déterminante, mais elle n'est pas le seul levier à actionner. En somme, le pass Culture est un outil qui ne contient pas, en lui-même, toutes les solutions pour surmonter les difficultés d'accès à la culture. Les inégalités entre territoires, les inégalités sociales, qui ne se résument pas aux inégalités de revenu, constituent bien entendu des questions essentielles.

Le regard des consommateurs sur l'offre culturelle qui est faite est également déterminant. Des blocages existent encore, qui sont de l'ordre de la représentation mentale. Certains jeunes estiment ainsi qu'ils ne sont pas la cible du spectacle vivant ou des musées, ou que tous les livres ne leur sont pas accessibles. Il faut donc agir sur ces blocages, afin que la politique publique soit efficace. Si le dispositif ne visait qu'à rendre possible l'acquisition d'ouvrages à faible contenu culturel ou n'exigeant pas d'effort intellectuel particulier, son intérêt public serait très marginal. Il ne constituerait qu'une aide en direction des éditeurs et des libraires, qui lui sont bien entendu très favorables, puisque l'utilisation du pass Culture exige un achat dans un point de vente physique. C'est une bonne chose, bien sûr, mais l'État a-t-il vocation à apporter des financements relativement élevés uniquement pour soutenir le monde de l'édition ? D'ailleurs, l'édition nationale n'est pas la seule à profiter du pass Culture, puisque de nombreux éditeurs de mangas sont étrangers.

Nous avons pointé ces exigences dans nos recommandations. Il nous paraît important de préciser que l'observation du fonctionnement du pass Culture, au cours des années d'expérimentation comme de généralisation, montre que des améliorations sont possibles. En effet, les constats ne sont pas immuables sur la période. Par exemple, sur la question très identifiée et longuement débattue de la grande consommation de mangas, l'évolution fut sensible et plutôt satisfaisante. La situation peut donc s'améliorer, à condition que les acteurs aient conscience des blocages et des enjeux, et qu'ils agissent pour améliorer les processus les plus vertueux, ceux qui changent la donne et qui modifient les comportements de ces jeunes acteurs, sans se contenter de les accompagner dans une logique d'effet d'aubaine.

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. - Les jeunes situés dans des territoires enclavés sont confrontés à un double problème : celui des transports et celui de l'isolement. Même s'il disposait d'une offre de transport, le jeune dans son hameau sera peu enclin à se rendre seul à une manifestation culturelle. D'où notre recommandation de développer les offres « duo », afin d'offrir à ce jeune la possibilité d'être accompagné.

M. Christian Bilhac. - Vous avez évoqué un effet d'aubaine. Avons-nous une idée de ce que celui-ci représente ? Est-il très majoritaire ?

J'ai longtemps exercé dans le secteur de l'animation, qui a également constitué un axe fort de mes mandats d'élu local. C'est pourquoi je sais qu'entre 15 et 18 ans il est trop tard pour découvrir une activité culturelle. Plus on plante tard, moins on récolte. C'est en sensibilisant les jeunes publics que l'on permet à ces derniers de poser un regard différent sur les musées, la musique classique ou l'opéra. S'ils découvrent ces derniers avant 10 ans, peut-être y retourneront-ils plus tard. Leur demander d'y prendre goût à 17 ans se solderait sans doute par un échec. N'aurait-il pas fallu octroyer un pass Culture à des publics beaucoup plus jeunes, avant la préadolescence ? Il est très difficile d'emmener au musée un jeune de 18 ans qui n'y a jamais été.

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. - La question de l'effet aubaine est importante et nécessite des études approfondies, comparant les pratiques actuelles, découlant du pass Culture, aux pratiques antérieures. À ce sujet, la SAS Pass Culture a engagé un travail de diagnostic, avec l'aide d'un laboratoire de recherche de l'École normale supérieure. Nous attendrons les résultats de cette étude pour vous en dire plus, mais nous ne sommes pas les seuls à nous poser cette question, puisque les opérateurs du pass Culture se la posent également. Les différents acteurs du dispositif ont cette préoccupation et réfléchissent aux moyens de provoquer des pratiques nouvelles. Si le pass Culture ne permet que d'apporter des fonds supplémentaires à des pratiques déjà existantes et, ainsi, de les conforter, son objectif d'intérêt public ne sera pas atteint.

Monsieur Bilhac, vous estimez que c'est avant l'adolescence que les pratiques culturelles se forment. Pour être honnête, nous avons faiblement étudié cette question. Le pass Culture est avant tout un dispositif de solvabilisation ; l'appliquer à des enfants d'âge primaire ou maternel ne serait donc pas facile, puisqu'ils n'ont pas d'autonomie de décision. L'utilisation du pass Culture devrait alors transiter par la famille, ce qui n'est cependant pas impossible. La question est importante, car on peut spontanément penser, comme vous, que les habitudes sont essentielles et que les appétits pour certains types de pratiques culturelles se développent à un jeune âge. De ce point de vue, si l'objectif est de compenser une faiblesse des initiatives intrafamiliales, une tendance de certaines cellules familiales de ne pas s'intéresser à la culture, ce n'est pas en versant un peu d'argent à ces parents que l'on va déclencher le dispositif. Sans doute, les vrais éléments déclencheurs ne sont pas dans un dispositif similaire au pass Culture, qui accompagne individuellement les jeunes consommateurs, ils sont peut-être plutôt dans le cadre scolaire, grâce à l'action éducative et culturelle. Avec la médiation des professeurs de l'éducation nationale, on peut en effet emmener toute une classe assister à un spectacle, rencontrer des artistes... On a tous connu des expériences d'approche de la culture qui nous ont marqués et ont sans doute fait évoluer nos propres pratiques. C'est ce qu'il faut viser, mais je ne suis pas certain que le pass Culture soit le meilleur outil pour des publics très jeunes.

M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. - La question de l'âge a déjà donné lieu à des changements. Si le pass culture était initialement réservé aux jeunes de 18 ans, il devrait concerner, à partir de la prochaine rentrée scolaire, les élèves de sixième. La SAS Pass Culture nous a, par ailleurs, confirmé qu'elle ferait un effort particulier en direction des apprentis et des non-scolarisés.

M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. - Comme l'outil est non seulement une enveloppe financière mais également une application permettant de consulter les offres en matière culturelle, nous avons considéré que cet accès devrait être garanti aux jeunes adultes, même sans contribution financière de la part de l'État. Il s'agit ainsi de faire perdurer le dispositif au-delà du seuil de 18 ans. Il n'est pas inimaginable que, en apportant la totalité du financement par eux-mêmes, de jeunes adultes puissent continuer d'accéder à la plateforme, afin de consulter les offres, d'échanger leurs impressions sur ces offres via des forums. Je le répète, tout ne se résout pas à l'enveloppe financière accordée aux jeunes : l'enjeu important est celui des comportements de ce public dans le domaine culturel et la manière de les faire perdurer après la sortie du dispositif.

La commission a adopté les recommandations des rapporteurs spéciaux et autorisé la publication de leur communication sous la forme d'un rapport d'information.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Ministère de la culture - Délégation générale à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle

- M. Noël CORBIN, délégué général ;

- M. Bertrand MUNIN, adjoint au délégué général, sous-directeur de la participation à la vie culturelle ;

- M. Julien HISTA, chef du bureau des affaires générales.

Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse- Direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO)

- M. Christophe GEHIN, chef du service du budget et des politiques territoriales ;

- M. Manuel BROSSÉ, chef de mission Éducation artistique et culturelle.

SAS Pass Culture

- M. Sébastien CAVALIER, président de la SAS Pass Culture ;

- M. Maxence DANIEL, responsable de la prospective et des relations avec les pouvoirs publics.

Académie de Versailles

- Mme Charline AVENEL, rectrice ;

- Mme Marianne CALVAYRAC, déléguée académique à l'éducation artistique et à l'action culturelle.

France urbaine

- M. Olivier BIANCHI, maire de Clermont-Ferrand et président de Clermont Auvergne Métropole ;

- M. Jean-François MASSELOT, directeur de cabinet ;

- Mme Sarah BOU SADER, conseillère relations parlementaires.

Association des maires ruraux de France (AMRF)

- M. Victor PROVÔT, maire de Thiron-Gardais.

Régions de France

- M. François DECOSTER, maire de Saint-Omer, vice-président de la région Hauts-de-France chargé de la culture.

Fédération nationale des collectivités locales pour la culture (FNCC)

- M. Grégoire PÉNAVAIRE, trésorier, membre du bureau, adjoint au maire chargé de la culture d'Enghien-les-Bains.

Syndicat professionnel des Producteurs, Festivals, Ensembles et Diffuseurs Indépendants de Musique (Profedim)

- M. Nicolas BUCHER, président ;

- Mme Aurélie FOUCHER, déléguée générale.

Syndicat national des scènes publiques (SNSP)

- M. Frédéric MAURIN, président ;

- Mme Laurence RAOUL, directrice déléguée.

La charte des auteurs et illustrateurs jeunesse

- Mme Béatrice ÉGÉMAR, co-présidente.

Ligue des auteurs professionnels

- M. Frédéric MAUPOMÉ, secrétaire général ;

- Mme Mélanie LAUNAY, auteure.

Comité pluridisciplinaire des artistes-auteurs et des artistes-autrices (CAAP)

- Mme Alice MILLOT, auteure ;

- Mme Céline DANION, ancienne conseillère technique auprès de la ministre de la culture (septembre 2017 - octobre 2018), ancienne chef du projet pass culture (octobre 2018 - octobre 2019), consultante en accompagnement de projets culturels ;

- M. Jean-Michel LUCAS, ancien directeur régional des affaires culturelles, ancien conseiller technique auprès du ministre de la culture (1990-1991), maître de conférences à l'université Rennes 2 ;

- Mme Florence ELOY, maîtresse de conférences à l'Université Paris 8 ;

- M. Tomas LEGON, chercheur rattaché au Centre de recherche sur les liens sociaux (CERLIS - Université Sorbonne nouvelle) ;

- Mme Frédérique GIRAUD, sociologue, maîtresse de conférence à l'université de Paris - IUT Rives de Seine ;

- M. Rémy DESLYPER, maître de conférences à l'Université Lumière Lyon 2.


* 1 Aucun objectif n'a été assigné en 2026 à la catégorie 15-17 ans.

* 2 Aucun objectif n'a été assigné en 2026 à la catégorie 15-17 ans.

* 3 Ardennes, Bas Rhin, Côtes d'Armor, Doubs, Finistère, Guyane, Hérault, Ille-et-Vilaine, Morbihan, Nièvre, Saône-et-Loire, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Vaucluse.

* 4 Décret n°2019-755 du 22 juillet 2019.

* 5 Décret n° 2021-1453 du 6 novembre 2021 relatif à l'extension du « pass Culture » aux jeunes en âge d'être scolarisés au collège et au lycée.

* 6 S'agissant des établissements privés, seuls 55 % d'entre eux au sein de l'académie de Versailles ont activé le volet collectif. Le financement privé des initiatives et la moindre historicité des politiques d'EAC justifient ce faible ratio.

* 7 Lancé en septembre 2019, le programme des cités éducatives a pour objectif de dynamiser les quartiers prioritaires de la ville (QPV) en les mobilisant autour de l'enjeu éducatif. Au nombre de 200 à fin 2022, elles mobilisent services préfectoraux, académiques et collectivités territoriales. Le programme bénéficie d'un financement de 230 millions d'euros. 700 000 jeunes sont concernés.

* 8 Arrêté du 20 septembre 2022 portant modification de l'arrêté du 6 novembre 2021 portant application du décret n° 2021-1453 du 6 novembre 2021 relatif à l'extension du « pass Culture » aux jeunes en âge d'être scolarisés au collège et au lycée.

* 9 Certains d'entre eux passent par le biais du Centre national du livre (CNL). 500 ont ainsi été sélectionnés par cet opérateur dans le cadre des « masterclass d'auteurs ». Le CNL rémunère l'auteur aux tarifs de la charte des auteurs et illustrateurs jeunesse soit 270,13 euros brut la demi-journée.

* 10 Au sein de la mission « Enseignement scolaire », les crédits dégagés pour le volet collectif du pass Culture - 51 millions d'euros en 2023 - viennent largement abonder ceux dédiés à l'éducation artistique et culturelle (EAC). Au total, celle-ci bénéficie, en loi de finances pour 2023, de 66,2 millions d'euros sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire » (hors dépenses de rémunération).

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