ANNEXE 1
TÉMOIGNAGES RECUEILLIS PAR LA MISSION

Dans le cadre de leurs travaux, les rapporteurs Christian Klinger et Michel Masset ont pris connaissance de nombreux cas d'entreprises, implantées au coeur des territoires français, dont les projets sont retardés, voire remis en cause, par la difficulté d'accès au foncier économique.

Certains de ces cas concrets sont présentés, de manière synthétique, dans la présente annexe. Ils sont symptomatiques des nombreux obstacles que rencontrent les dirigeants d'entreprises pour développer leur activité.

LA GUERRE DES PRIX

Une entreprise industrielle cherche un nouveau terrain sur la zone d'activité où elle est déjà implantée, afin d'étendre son activité. Apprenant la liquidation judiciaire d'une entreprise voisine, elle exprime le souhait d'acquérir le terrain ainsi libéré.

Toutefois, dans le cadre d'une liquidation judiciaire, la vente doit obligatoirement se faire à l'acheteur le plus offrant : une autre offre d'implantation commerciale, au prix supérieur, l'a emporté. L'entreprise n'a pas pu réaliser son projet pourtant cohérent.

LES DÉLAIS DE RACCORDEMENT

En 2020, une entreprise cherchant à s'implanter a identifié un site adéquat. Son activité nécessite un raccordement au réseau électrique et la fourniture d'une puissance significative.

Après avoir contacté le gestionnaire du réseau, on l'informe que le raccordement de l'emprise foncière à la puissance électrique nécessaire ne pourra pas être réalisé avant l'année 2027.

L'entreprise n'est pas certaine de pouvoir poursuivre son projet dans ces conditions.

LE MANQUE DE DIALOGUE

Les représentants des entreprises ont alerté la délégation sur l'absence d'évaluation précise des dispositions du nouveau PLU « bioclimatique » de la ville de Paris : « aucune étude d'ensemble ou analyse de marché n'a été réalisée pour mesurer les conséquences de ce nouveau document, et les entreprises ne peuvent pas se projeter ».

Au total, 450 sursis à statuer pour des projets auraient été opposés depuis que le projet a été arrêté en juin dernier, avec entre 200 et 400 000 emplois en jeu.

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Une entreprise avait acquis il y a plus de vingt ans deux terrains contigus à vocation économique, alors constructibles. Elle s'était implantée sur le premier terrain, réservant le second à une extension dès que la croissance de son activité et ses capacités d'investissement le permettraient.

En 2023, alors qu'elle contacte la collectivité pour lancer le projet d'extension, elle apprend que le plan local d'urbanisme a évolué et que, sans qu'elle n'en soit avertie ou qu'elle ait été consultée à ce sujet, le deuxième terrain a été classé inconstructible.

L'entreprise est dans l'incapacité d'étendre son activité comme cela était pourtant prévu depuis plusieurs années. Une révision du PLU durerait environ 4 ans et il n'est pas certain que la commune accède à sa demande de révision, en particulier dans le contexte du « ZAN ».

L'INCERTITUDE

Une entreprise implantée dans un territoire français était locataire, pour le terrain sur lequel elle exerçait son activité depuis de nombreuses années, d'un grand groupe français de transport ferroviaire. Ce groupe leur a annoncé soudainement souhaiter résilier le bail, afin de le transférer à l'une de ses filiales.

Or, aucun autre terrain n'était disponible sur le même territoire. Elle a envisagé de déménager, mais a finalement pu se maintenir à la faveur de l'abandon du projet par le groupe bailleur.

LES SERVICES DE L'ETAT DÉBORDÉS

Une entreprise a relaté que l'absence non remplacée d'un agent de la DREAL, chargé de l'instruction et du suivi d'un projet d'implantation, a mis à l'arrêt pendant plusieurs mois le dossier, entraînant d'important délais et surcoûts.

Dans un autre cas, le manque de réactivité de la DREAL a conduit à la péremption de l'étude « faune-flore » qui avait été réalisée par le porteur de projet. Ce dernier a été contraint de la faire une nouvelle fois réaliser à ses frais.

LE FONCIER ÉCONOMIQUE GRIGNOTÉ

Une zone industrielle, présentant des avantages intéressants en termes de desserte ferroviaire, et répondant à la réglementation applicable aux sites « Seveso », est implantée de longue date à bonne distance de l'agglomération.

Mais l'extension progressive de la ville, et notamment de récents quartiers de logements, a fortement réduit la distance entre ce site et les habitations. Face à l'opposition des nouveaux riverains et en raison des contraintes de leur activité, les entreprises de la zone vont devoir déménager et retrouver des zones d'implantation compatibles avec la réglementation applicable, plus en dehors de la ville. De telles zones n'existent pas aujourd'hui.

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Une entreprise artisanale du secteur du BTP est implantée de longue date sur un site éloigné du centre-ville. Avec l'extension des zones d'habitation, elle acquiert de nouveaux riverains.

Faisant l'objet de plaintes pour nuisances, bien qu'implantée antérieurement, l'entreprise est priée de déménager. Face à son refus, la collectivité classe son terrain d'installation comme inconstructible, afin d'empêcher tout développement de l'activité et de la contraindre à un départ de la zone.

LES RÈGLES CONTRE-PRODUCTIVES

Une entreprise prévoit de s'implanter sur une friche industrielle. Après avoir acquis le terrain, elle engage d'importants frais de dépollution, de désamiantage, et d'aménagement.

La qualification ultérieure de zone humide d'une partie de la friche, pourtant déjà artificialisée et ayant vocation économique, a mis fin au projet.

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Plusieurs entreprises ont cité l'exemple de certaines règles en matière de sécurité incendie, qui ont conduit à augmenter la surface de terrain nécessaire.

Par exemple, l'une a été contrainte de créer un grand bassin de rétention des eaux, alors même qu'elle avait équipé la totalité de son bâtiment en « sprinklers » (gicleurs automatiques).

Une autre entreprise a indiqué que les règles de sécurité l'ont contrainte à « écarter » les bâtiments les uns des autres, afin qu'il puisse en être fait le tour, alors qu'elle aurait pu compacter son installation et consommer ainsi moins de foncier.

LA CONTRAINTE DU « ZAN »

Une entreprise prépare la réunion de ses deux sites de production obsolètes sur un site unique à proximité, plus dense et permettant diverses améliorations de sa performance environnementale. Ce projet, remontant à 6 ans, est soutenu de longue date par la collectivité, qui devait modifier en ce sens le document d'urbanisme.

Mais l'adoption du « ZAN » a gelé la situation, la commune hésitant à mobiliser son « enveloppe foncière décennale » au profit de ce projet à portée intercommunale, dès lors que son impact n'est pas mutualisé. L'adoption d'un document intercommunal ne serait pas compatible avec les délais du projet. L'entreprise envisage de déménager ses activités dans une autre région, sans certitude d'y trouver les compétences nécessaires.

LE MANQUE D'ACCOMPAGNEMENT

Une entreprise portant un projet d'implantation sur un site a interrogé l'administration déconcentrée de son territoire sur le droit applicable au projet, notamment en matière d'espèces protégées.

L'administration a conseillé à l'entreprise de ne pas solliciter de dérogation à la législation espèces protégées, car ses services ne disposaient pas des moyens humains pour l'instruire dans les temps. Un recours a par la suite été déposé, conduisant à l'invalidation du projet pour défaut de sollicitation de dérogation.

LES DÉLAIS

L'impact du ZAN

La menace des recours

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