4. Les insuffisances qui demeurent

On doit tout d'abord noter que les dispositions tendant à favoriser l'investissement dans les entreprises innovantes sont moins généreuses que celles consenties dans le passé pour le soutien de l'activité d'autres secteurs (construction de logements locatifs, contributions au développement économique de l'outremer, souscriptions en faveur du cinéma ou de l'audiovisuel, régime des quirats de navire).

Ainsi :

n L'avantage fiscal consenti aux souscripteurs de parts de FCPI est soumis à des conditions beaucoup plus restrictives que celles dont étaient assorties les déductions accordées, par exemple, au titre des investissements outre-mer ou des souscriptions de parts de SOFICA (30( * )) ;

n Le seul dispositif des quirats de navire (souscription de parts de copropriété de navires de commerce), supprimé par la loi de finances pour 1998, coûtait à l'Etat environ 2 milliards de francs, soit environ le double du montant total des investissements annuels des fonds de capital risque français.
Or, l'investissement dans les entreprises innovantes représente pour le fisc (et la sécurité sociale) la promesse de rentrées ultérieures importantes au titre des emplois créés (impôts sur le revenu), de la croissance du chiffre d'affaires réalisé (impôt sur les sociétés) et de l'imposition des valeurs mobilières.

Les incitations proposées devraient donc être beaucoup plus fortes et franches qu'elles ne le sont (comme nous le verrons avec les recommandations du chapitre VIII).

Il serait souhaitable, notamment, de prévoir des mesures spécifiques en faveur :
n des "business angels", ces entrepreneurs en activité qui mobilisent une partie de leur patrimoine pour venir en aide à une jeune entreprise (aménagement de l'ISF) ;

n du capital d'amorçage (augmentation des plafonds de réduction d'impôts de l'article 199 terdecies du CGI au titre des souscriptions en numéraire des actions de sociétés nouvelles et non cotées).
Concernant les FCPI, certaines exigences fiscales ne correspondent pas aux réalités des pratiques du capital risque (détention majoritaire du capital par des personnes physiques ; nécessité d'investir, pendant l'exercice même de leur levée, 60 % des fonds rassemblés, ce qui est beaucoup trop bref...). Il conviendrait de faire confiance aux gestionnaires de ces fonds pour l'appréciation du caractère innovant des activités concernées. Il semble, en effet, que ceux-ci ont naturellement tout intérêt à sélectionner des projets de ce type, tandis que les délais nécessaires à leur validation par l'ANVAR risquent de handicaper les FCPI, par rapport aux autres FCPR, dans la constitution de leurs premiers tours de table.

Par ailleurs, il semblerait normal que l'intégralité de ces fonds (et non 60 %) soit investie dans des sociétés non cotées, les sociétés cotées ayant l'avantage, de leur côté, de pouvoir accéder au nouveau marché.

Concernant le Crédit Impôt Recherche (CIR) déjà évoqué, il semble que son esprit initial, fondé sur la confiance faite au contribuable (allégement de droit acquis sur simple déclaration), se trouve perverti par les pratiques de l'administration tendant à déclencher presque systématiquement des contrôles fiscaux auprès des bénéficiaires de cette mesure ou de ses postulants.

Deux priorités importantes semblent, d'autre part, actuellement quelque peu négligées :
n L'appel, tout d'abord, à des personnes qualifiées venant de l'étranger, et particulièrement des Etats-Unis (collaborateurs de jeunes entreprises, experts auprès des établissements spécialisés dans l'introduction sur le nouveau marché ou la gestion de fonds de capital risque), de façon à augmenter la rentabilité des capitaux investis et, partant, les ressources collectées.

n L'orientation de l'épargne longue, ensuite, vers le financement de l'innovation et de la création d'entreprises de croissance : cela suppose d'abord de lever les obstacles réglementaires à l'affectation aux fonds de capital risque des ressources de l'assurance-vie et de les faire bénéficier également, d'autre part, d'une partie du produit des " Fonds de pension à la française ".
Ainsi, les mesures tendant à faire participer davantage la France à l'élaboration des NTIC à travers le soutien à de jeunes entreprises innovantes, s'avèrent très insuffisantes. D'une manière générale, elles manquent d'envergure et de cohérence. Leur caractère restrictif, source de complexité, témoigne d'un manque de confiance dans les forces du marché.

Le repérage des gisements de croissance où il faut investir ainsi que la prise de risque correspondante paraissent être désormais du ressort de l'initiative privée plus que de celui de l'intervention des pouvoirs publics, dans un contexte de diversification et d'accélération des évolutions techniques. Les plus-values fiscales ultérieures résultant de l'essor des activités nouvelles encouragées ont toute chance de dépasser rapidement et très largement le manque à gagner provisoire lié aux exonérations initialement consenties par l'administration.

Lésiner serait donc une erreur. Il faut agir vite, et fort, par des incitations franches et massives.

Dans le domaine de l'aide à l' utilisation des NTIC, des déficiences sont aussi à déplorer.