B) MISE EN GARDE POUR METTRE FIN AU PARTICULARISME FRANÇAIS

Si la montée en puissance, très prochaine, surtout en France, d'Internet sur le terminal téléphonique (webphone) et d'Internet sur le téléviseur (WebTV, webbox, Netbox, etc...) est un cheminement astucieux pour faire migrer progressivement les utilisateurs du Minitel et les téléspectateurs vers le monde Internet, il faut toutefois bien veiller à ce que cette démarche ne soit pas une fin en soit mais bien un moyen pour aller plus loin.

En effet, comme je l'ai dit à plusieurs reprises dans cet ouvrage le développement particulièrement fort du fax auprès des particuliers et l'adoption massive du Minitel dans notre Pays, le fax et le Minitel étant deux machines qui n'ont aucune capacité propre de stocker de la mémoire, expliquent en grande partie le retard que nous pouvons encore constater, en France, dans l'usage de la micro-informatique .

Or si le " webphone " et les boîtiers " webbox " à poser sur les téléviseurs facilitent l'accès à des pages Web, ils ont le même défaut que leurs aïeux : ils n'ont pas de mémoire.

Ce handicap pourrait devenir majeur si les grands acteurs français que sont France Télécom et Alcatel voulaient orienter, de façon forte, les usages acquis par les français, grâce au Minitel, vers des machines sans mémoire.

Sans mémoire, on ne peut pas faire de bureautique mais on ne peut même pas archiver les messages reçus par Internet .

Or, toutes les études mondiales le montre, la bureautique et la messagerie sont les deux raisons essentielles qui incitent les particuliers à acquérir des micro-ordinateurs connectés.

Par ailleurs, sans mémoire, ce sont beaucoup d'autres applications quotidiennes, ne serait-ce que tenir un archivage du suivi de son compte en banque, et beaucoup de développements à venir dans le domaine du push-média qui ne seraient pas accessibles à ces " télé-internautes " français.

Aussi, si les opérateurs français affirment une stratégie claire en mettant en évidence que les " webphones " et autres " webtv " ne sont que des systèmes transitoires pour faire migrer plus aisément, grâce à la facilité d'utilisation, les usagers du Minitel vers Internet , je ne peux que partager leur approche.

Pour confirmer leur volonté d'entrer à pleins pieds dans le monde Internet, les dirigeants de France Télécom et d'Alcatel doivent sans retard présenter le " webphone " comme un Network Computer (NC) et préciser que leurs efforts vont se centrer sur des capacités large bande qui seront mises à la disposition de chaque abonné.

Par les avances que ces grandes compagnies de télécommunications ont dans le domaine technologique (ATM, ADSL, optique, etc.) leur démarche devient alors crédible et alors peu importe que les terminaux n'aient pas de mémoire puisque chacun pourra accéder, à très grande vitesse, à un serveur, où sera stockée la mémoire .

C'est ce manque de capacité qu'ont actuellement Sun, Oracle et même IBM de pouvoir disposer de réseaux " large bande " entre leurs NC et leurs serveurs qui malgré l'intérêt conceptuel évident, enlève, pour le moment de la crédibilité à leur démarche.

France Télécom et Alcatel ont, eux, la capacité de disposer de ces réseaux rapides.

Si la démarche initiée par le " webphone " est confortée par cette décision de construire ces réseaux du XXI e siècle, alors ils ont une réelle chance d'emporter le combat qui inévitablement alors les mettrait face aux " majors " de la micro-informatique .

Par contre si l'approche " webphone " est une nouvelle invention sortie de la tête de certains de nos technocrates pour maintenir le particularisme français aussi bien au niveau des paiement des services à la durée et non à l'acte que de la pratique d'Internet qui devient de plus en plus universelle, nos responsables mèneraient alors un combat d'arrière garde qui à terme pourrait coûter cher à notre Pays et serait un vrai gâchis tant les chances de la France sont grandes actuellement si nous savions transformer les 15 millions de français qui actuellement pratiquent le Minitel en usager d'un Internet universel...

Chacun prendrait alors conscience combien pèsent lourds sur la toile mondiale les savoir-faire emmagasinés depuis bientôt 20 ans par les français car acheter des machines est certes un point de comparaison aisé mais l'acquisition d'usages est un bien beaucoup plus précieux qu'il ne nous faut pas galvauder.