5. L'Espagne : l'État des autonomies

L'État espagnol est fondé sur le principe de l'autonomie territoriale . Le territoire est organisé en communes, provinces et communautés autonomes. Il y a dix-sept communautés autonomes en Espagne qui possèdent des compétences très variables et inégales (comme c'est le cas désormais en Grande-Bretagne).

Ces communautés autonomes se rangent cependant en deux catégories : celles qui disposent de la pleine autonomie et celles dont l'autonomie est progressive. Comme en Angleterre, les communautés autonomes respectent les divisions historiques du territoire.

6. L'Italie : en route pour une autonomie toujours plus grande des régions

L'Italie était déjà sur la voie de la régionalisation mais la dernière réforme institutionnelle de 1999 augmente de manière considérable les pouvoirs des régions . En effet, les vingt régions qui composent l'Italie (cinq sont déjà autonomes : Sardaigne, Sicile, Val d'Aoste, Frioul-Vénétie Julienne, Trentin-Haut-Adige) vont pouvoir décider de leur forme de gouvernement et bénéficier d'une large autonomie financière et fiscale. L'Etat italien ne conservera à terme que la politique extérieure, la défense, l'économie, la monnaie et la sécurité.

En avril 2000, les présidents de région ont été élus pour la première fois au suffrage universel ; ils disposent désormais de pouvoirs étendus qui font d'eux de véritables gouverneurs de " régions-Etats " . Ils ont pour mission d'écrire la constitution de leur région et de choisir le mode de scrutin pour les prochaines élections régionales.

Comme dans le cas anglais et dans le cas espagnol, la régionalisation de l'organisation italienne conduit à une situation institutionnelle relativement complexe.

7. La permanence du modèle allemand

L'Allemagne est régulièrement présentée comme modèle parfait de l'organisation territoriale non tant pour le découpage du territoire que pour son système fiscal local.

L'Allemagne est constituée de seize Etats fédéraux : les Länder, qui disposent de certains attributs de souveraineté (gouvernement, pouvoir législatif, appareil judiciaire). Chaque Land comprend une assemblée délibérante élue au suffrage universel à la proportionnelle et un organe exécutif élu pour la durée de la législature par l'assemblée et dirigée par un ministre-président. Les Länder disposent de compétences exclusives (police, culture, système scolaire, organisation des collectivités locales) et de compétences partagées avec la Fédération (droit civil, droit fiscal, justice, gestion de la fonction publique, transports...).

Les Länder ont deux niveaux de collectivités locales : les communes et les arrondissements. Les communes ont une compétence générale pour toutes les affaires locales tandis que les arrondissements se chargent des tâches communales qui dépassent les possibilités des communes. Ce sont les Länder qui exercent la tutelle étatique sur leurs collectivités cependant très autonomes. Le système est basé sur un principe de coopération et de consensus et il est caractérisé par l'accomplissement de tâches communes et le financement croisé des opérations.

Les recettes des Länder et des collectivités locales sont définies dans le cadre global de la répartition des finances publiques entre les différents niveaux.

Les collectivités locales allemandes ne jouissent donc que d'une autonomie fiscale limitée : elles collectent toutefois des impôts qui leur sont propres mais pour la plus grande partie, leurs recettes proviennent d'impôts communs partagés entre les trois niveaux.

Le partage des impôts s'opère selon des dispositifs de péréquation qui prennent deux formes :

- une péréquation dite " horizontale ", qui constitue un mécanisme de solidarité entre les entités de même niveau (communes ou Länder). La péréquation horizontale en faveur des communes s'opère à partir de ressources tirées de la redistribution par le Land aux communes de 15 % du produit de l'impôt sur le revenu acquitté par leurs contribuables, dont le revenu imposable dépasse un certain seuil. Chaque Land définit librement les modalités de la péréquation entre les communes de son territoire, à condition toutefois de respecter certains principes comme la nécessaire prise en compte des écarts de capacité financière et de besoins financiers entre les communes.

- une péréquation dite " verticale " , qui intervient d'une part du Bund vers les Länder, d'autre part des Länder vers leurs communes. Chaque Land est tenu d'accorder aux communes de son territoire un pourcentage du produit des impôts partagés qu'il reçoit du Bund, selon des modalités qu'il détermine lui-même.

Lors de l'unification allemande, ce système de péréquation n'a pas pu être appliqué immédiatement à l'ex-RDA, les écarts de richesse entre les deux zones étant trop importants. Un système transitoire a alors été mis en place pour quatre ans, les Länder de l'Ouest conservant leur mode de péréquation, les autres bénéficiant des ressources du Fond de l'Unité Allemande.

Enfin, des subventions d'investissement sont accordées par le Bund et les Länder pour le financement de projets précis considérés comme prioritaires par ces derniers.

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Quels enseignements peut-on tirer de cette analyse comparée en ce qui concerne l'organisation territoriale française ?

S'il existe des différences d'approche décentralisatrice d'un pays à l'autre, elles se justifient par la forme institutionnelle de chaque Etat et par son histoire. On peut ainsi distinguer quatre catégories de pays :

1° - Les Etats unitaires, où les pouvoirs octroyés aux échelons locaux le sont par la loi et non par la Constitution (Danemark, Finlande, Grèce, Irlande, Luxembourg, Suède).

2° - Les Etats unitaires décentralisés, où les droits des collectivités locales sont en grande partie garantis par la Constitution (Pays-Bas, Royaume-Uni).

3° - Les Etats régionalisés, où la décentralisation va jusqu'à l'autonomie législative (Italie, Espagne).

4° - Les Etats fédéraux, où l'échelon intermédiaire a forme d'Etat et jouit de sa propre Constitution (Allemagne, Belgique, Autriche).

De ces comparaisons et de cette classification, il ressort que la France jouit d'un modèle de décentralisation tempérée. Son organisation territoriale ne s'éloigne de la moyenne que sur un point : le nombre de communes apparaît très élevé (36 750) mais cet inconvénient peut être pallié par les progrès de l'intercommunalité.

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