M. le président. Par amendement n° 18 rectifié, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 20 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire est complété par un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« En outre, le schéma détermine les moyens nécessaires et, en particulier, l'équipement requis, pour assurer l'accès des établissements d'enseignement, notamment des collèges, lycées et universités aux services offerts sur le réseau numérique à intégration de service, aux services en ligne et aux services de télécommunications avancées. Dans ce cadre, il évalue les conditions pouvant assurer l'accès auxdits services à un tarif préférentiel pour ceux de ces établissements situés dans une zone de revitalisation rurale ou dans une zone de redynamisation urbaine, ainsi que pour ceux situés dans les départements dont plus de 50 p. 100 du territoire est classé en zone de revitalisation rurale. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. L'amendement n° 18 rectifié est important. Il est issu des débats qui se sont déroulés au sein de la commission des affaires économiques et du Plan, à l'occasion de l'examen du présent projet de loi mais aussi dans le cadre du rapport d'information.
Ces débats se poursuivent d'ailleurs aujourd'hui au sein des groupes de travail mis en place à la suite de la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire et dans le cadre de la préparation des schémas, notamment des schémas directeurs des télécommunications. Mon collègue M. Daniel Hoeffel, qui en fut l'un des acteurs majeurs, l'a d'ailleurs rappelé.
L'amendement n° 18 rectifié bis vise à enrichir le contenu du schéma prévu par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. Il traduit la volonté de la commission de mettre les nouvelles techniques de communication au service du développement des zones les moins favorisées de notre pays, en reprenant le parallélisme que nous avions instauré, tout au long du débat sur l'aménagement du territoire, entre les zones de revitalisation rurale et les zones de redynamisation urbaine.
Cet amendement traduit également notre souci de l'avenir, en offrant aux futures générations les moyens d'une meilleure formation aux outils de communication de demain.
En branchant, en quelque sorte, les lieux d'éducation situés dans ces zones défavorisées sur les nouveaux réseaux - demain, coexisteront au côté d'Internet d'autres réseaux - la commission souhaite que ceux qui ont du talent puissent, à l'instar de Bill Gates, faire éclore et développes celui-ci.
Ce dispositif permet aussi d'instaurer, ce qui est le fond d'un certain nombre de dispositions de la loi du 4 février 1995, des discriminations positives.
Cet amendement, qui reprend donc les notions de zones de revitalisation rurale et de zone de redynamisation urbaine, est, je le répète, important. En effet, le zonage nous pose concrètement, parfois, un certain nombre de problèmes ou apporte des réponses quelque peu perverses. Voilà pourquoi nous avons également inclus les établissements situés dans « les départements, dont plus de 50 p. 100 du territoire est classé en zone de revitalisation rurale », et ce après une réflexion conduite, notamment, par M. Jean-François-Poncet sur ce sujet.
Tel est l'objet du dispositif que nous proposons, qui n'a d'équivalent dans aucun pays de l'Union européenne. En revanche, la loi de février 1996, dite loi Clinton, aux Etats-Unis, prévoit, un raccordement préférentiel, notamment pour le secteur de l'éducation. En choisissant de donner la priorité au secteur de l'éducation, tout particulièrement dans les zones les moins favorisées, nous oeuvrons pour l'aménagement du territoire mais aussi pour l'avenir.
M. Gérard Braun. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon ministre délégué. Le Gouvernement est bien évidemment très favorable à cet amendement. Il partage pleinement l'objectif poursuivi par M. le rapporteur à travers ce texte. J'avais d'ailleurs déjà demandé à France Télécom de faire un effort particulier en faveur des établissements scolaires, notamment pour y assurer l'accès aux services offerts sur le réseau numérique à intégration de service à un tarif privilégié. Nous avons donc déjà pris la décision de relier tous les lycées à ce réseau pour le coût d'un abonnement téléphonique classique.
Poursuivre cet effort et inscrire ce dispositif au sein du schéma sectoriel des télécommunications me paraît être une excellente idée. La diffusion des nouvelles technologies dans les collèges, les lycées et les universités constitue non seulement un atout pour mieux former notre jeunesse, mais aussi le gage d'une diffusion ultérieure dans l'ensemble de notre société.
Nous avons aujourd'hui, il faut bien le reconnaître, du retard dans le développement de ces nouvelles technologies. Une partie de ce retard est due au fait qu'il ne s'agissait pas d'une priorité au sein de l'école.
Les mesures proposées nous permettront de remédier en partie à cette faiblesse et à ces retards.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 18 rectifié.
M. Daniel Hoeffel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Je tiens à remercier notre collègue Gérard Larcher d'avoir présenté cet amendement. Les télécommunications au service de la formation dans les zones les plus défavorisées représentent pour celles-ci une chance incontestable. Ainsi, le Sénat reste fidèle à l'esprit dans lequel il s'était engagé en 1994, dans le débat sur l'aménagement du territoire.
Mme Danièle Pourtaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Comment ne pas approuver cet amendement ? Nous ne pouvons qu'adhérer à l'idée tendant à permettre aux établissements scolaires d'accéder dans des conditions préférentielles à la société de l'information.
Mais permettez-moi de dire que dans ce domaine, qui est très sérieux, nous ne devons pas nous contenter de nous payer de mots. Si les établissements scolaires n'ont pas les moyens d'acheter les micro-ordinateurs nécessaires pour se brancher sur la société de l'information, cet amendement restera lettre morte.
Aussi, monsieur le ministre, vous poserai-je deux questions.
D'une part, des crédits supplémentaires seront-ils dégagés pour permettre aux établissements scolaires, qu'il s'agisse des écoles primaires ou des collèges, de se doter de l'équipement nécessaire dans des conditions raisonnables ? En effet, un micro-ordinateur pour plusieurs centaines d'élèves ne permet pas d'accéder dans de bonnes conditions à la société de l'information.
D'autre part, pourriez-vous nous donner des précisions sur ce fameux schéma sectoriel qui nous semble avoir pris beaucoup de retard ?
M. François Fillon, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. Je reçois avec beaucoup d'humilité les leçons de Mme Pourtaud. Je me permettrai simplement de lui faire remarquer que le RNIS existe depuis 1987 et qu'il n'a jamais été offert aux établissements scolaires. Il ne l'est que depuis quelques mois.
Par ailleurs, le Gouvernement a pris la décision - je l'ai annoncée voilà plusieurs semaines - de doubler dans les deux années à venir le nombre des micro-ordinateurs dans les lycées.
Ce ne sera certainement pas suffisant. Il faudra sans doute trouver d'autres formules pour réussir à faire entrer massivement ces technologies dans les établissements scolaires, mais nous avons entrepris un effort important.
Enfin, j'ai demandé aux constructeurs de matériel informatique de s'efforcer de doter les établissements scolaires de matériels à des coûts très bas, comme cela se fait en Grande-Bretagne, en Allemagne et aux Etats-Unis. Je ne vois pas pourquoi ce qui se fait dans ces pays ne serait pas possible en France. Peut-être avons-nous, dans le passé, voulu privilégier des formules nationales qui ont abouti aux échecs que l'on sait.
Mme Danièle Pourtaud. Et le schéma sectoriel ?
M. François Fillon, ministre délégué. Il est en cours d'examen. Aucun retard n'a été pris en ce domaine. Par ailleurs, le débat qui nous réunit aujourd'hui devait être préalable à celui sur le schéma sectoriel.
M. René Trégouët. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Trégouët.
M. René Trégouët. Je tiens, à mon tour, à féliciter M. le rapporteur ainsi que la commission des affaires économiques d'avoir proposé cet amendement.
En effet, un large débat s'était déjà engagé dans cette assemblée en 1994, lors de la discussion du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.
Cet accès au savoir était l'un des axes essentiels sur lesquels nous nous étions arrêtés.
Je voudrais toutefois poser une question à M. le rapporteur et à M. le ministre. Je comprends tout à fait la nécessité d'un zonage dans l'objectif d'une revitalisation rurale ou d'une redynamisation urbaine. Mais j'attire votre attention sur la dernière phrase de cet amendement, qui vise les établissements situés dans les départements « dont plus de 50 p. 100 du territoire est classé en zone de revitalisation rurale ». Or il existe en France des régions où ce taux n'est pas atteint et les cantons sont classés non pas en zone de revitalisation rurale, mais en zone H5B ou en zone de montagne difficilement accessible. Ces zones ne pourraient-elles pas bénéficier aussi de cette disposition ? En effet, des zones très déshéritées ne sont pas nécessairement incluses dans ces classements mais figurent dans des classements européens.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je tiens à apporter à M. Trégouët les éléments finaux de la réflexion de la commission. Trente-sept départements seront visés par les dispositions figurant dans les trois dernières lignes de notre amendement. Nous avons introduit cette disposition car étaient exclus, dans les zones de revitalisation rurale, un certain nombre de bourgs centres et de villes centres qui n'étaient pas inclus dans les cantons visés.
Nous avions procédé à une simulation, nous n'en avions obtenu les résultats qu'après la réunion de la commission. Nous avions toutefois largement informé celle-ci.
Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour vous informer sur l'évolution des travaux du Conseil supérieur d'aménagement et de développement du territoire.
Ayant eu, grâce à votre confiance, la responsabilité de siéger dans cet organisme, je puis vous assurer que les commissions thématiques sont en train de travailler sur le schéma national. M. Jean François-Poncet préside d'ailleurs la commission n° 3, qui s'occupe des infrastructures parmi lesquelles figurent les infrastructures de télécommunications. Quant à moi, j'ai l'honneur de présider la commission « villes-services collectifs » qui est chargée, en liaison avec la commission n° 3, de ces problèmes de télécommunications.
Nous devons remettre les rapports des commissions au début du mois de juillet.
Après avoir été soumis au conseil national, ces rapports feront l'objet d'une consultation dans les régions puis ils nous reviendront. Le rendez-vous, si ma mémoire est bonne, est fixé pour la fin de l'hiver 1997. Nous tenons donc les temps et nous travaillons en liaison avec le Parlement, puisant d'ailleurs dans les réflexions des groupes de travail. Mme Bardou, qui préside ainsi le groupe sur l'espace rural, s'intéresse à son aménagement et à sa revitalisation. Vous le voyez, une suite est donnée à ces travaux.
Nous souhaitons, une fois le schéma adopté, disposer ainsi jusqu'à l'horizon 2015 d'un certain nombre de politiques clairement définies pour l'aménagement et le développement du territoire.
M. Louis Minetti. Je demande la parole pour explication devote.
M. le président. La parole est à M. Minetti.
M. Louis Minetti. Monsieur le président, nous voterons cet amendement, bien qu'il soit en contradiction avec la logique strictement financière qui anime le projet de loi. L'aménagement du territoire procède d'une autre logique, que nous approuvons. Qui vivra verra... En tout cas, nous voterons cet amendement pour faire en sorte que la logique d'aménagement du territoire soit plus forte que la logique financière.
M. le président. C'est, je crois, le voeu le plus cher de l'assemblée tout entière !
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.

Article 6