M. le président. « Art. 11 bis . - La loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est ainsi modifiée :
« 1° A la fin de l'article 21, le mot : "celles" est remplacé par les mots : "les bandes de fréquences ou les fréquences de radiodiffusion sonore ou de télévision" ;
« 2° Dans le premier alinéa de l'article 22, les mots : "dont l'attribution ou l'assignation lui ont été confiées" sont remplacés par les mots : "attribuées ou assignées à des usages de radiodiffusion sonore ou de télévision" ;
« 3° Dans les deuxième, troisième, quatrième et cinquième alinéas de l'article 26, après le mot : "fréquences", sont insérés les mots : "de radiodiffusion sonore ou de télévision" ;
« 4° L'article 26 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 1997, l'Autorité de régulation des télécommunications attribue les fréquences de transmission sonore ou de télévision dans les conditions prévues à l'article L. 36-7 du code des postes et télécommunications. Lorsqu'elle attribue, réaménage ou retire certaines de ces fréquences, elle prend en compte les exigences liées aux missions de service public des sociétés nationales de programme. »
La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. La réglementation du secteur des télécommunications a, jusqu'ici, permis de limiter la concurrence entre téléphonistes et câblo-opérateurs.
Pour autant, comme le remarquait la commission des affaires culturelles dans un rapport sur les autoroutes de l'information et la mise en place d'une industrie globale de l'information aux Etats-Unis, « le thème des autoroutes de l'information sert de toile de fond à la déréglementation du secteur de l'information et à l'établissement progressif d'une compétition entre les compagnies du câble et les compagnies régionales du téléphone. » Et ce rapport d'indiquer quelques pages plus loin : « Le processus de démantèlement des réglementations qui font obstacle au surgissement de l'industrie unifiée de l'information est largement entamé. »
L'adoption de l'article 11 bis , issu d'une initiative de l'Assemblée nationale, est au coeur de ce paradoxe, avec à la fois déréglementation, comme le prévoit le projet de loi que nous examinons, et tentative d'unification, pour mieux déréglementer, serais-je tentée de dire.
L'émergence d'une nouvelle industrie globale de l'information numérisée est possible ; elle a été rendue possible dans notre pays notamment grâce aux savoir-faire de l'ensemble de nos services publics, postes, télécommunications, TDF. Ce ne sont pas, on le voit, des freins au développement technologique, chacun ayant ses spécificités propres, il y a place dans notre pays pour un grand service public, fondé sur des coopérations et des échanges, et permettant, ce faisant, de prendre une bonne place dans l'essor actuel des technologies informationnelles.
Cependant, l'article 11 bis procède d'une autre logique. Cet article ne vise qu'à une unification de surface des compétences de la nouvelle autorité de régulation, afin de mieux distribuer ce qui, jusque-là, restait dans le monopole public.
Nous ne pouvons accepter cela ! Nous proposerons donc la suppression de cet article.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 202 est présenté par M. Gérard Larcher, au nom de la commission.
L'amendement n° 129 est déposé par MM. Billard, Leyzour, Minetti et Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent à supprimer l'article 11 bis .
Par amendement n° 51, M. Gérard Larcher, au nom de la commission, propose, dans le 2° de l'article 11 bis, de remplacer les mots : « Dans le premier alinéa » par les mots : « Dans le deuxième alinéa ».
Par amendement n° 205, le Gouvernement propose :
I. - Après le 2° de l'article 11 bis , d'insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« ... - Le quatrième alinéa de l'article 26 est ainsi rédigé :
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel et l'autorité de régulation des télécommunications attribuent, respectivement pour les fréquences de radiodiffusion et les fréquences de transmission, en priorité à la société mentionnée à l'article 51, l'usage des fréquences supplémentaires qui apparaîtront nécessaires à l'accomplissement par les sociétés nationales de programmes de leurs missions de service public. »
II. - En conséquence, dans le 3° de cet article, de supprimer le mot : "quatrième".
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 202.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 202 est retiré.
La parole est à M. Billard, pour défendre l'amendement n° 129.
M. Claude Billard. L'article 11 bis résulte d'un amendement déposé par M. Cousin à l'Assemblée nationale et vise à transférer à la nouvelle autorité de régulation une partie des compétences du CSA, en matière d'attribution de fréquences hertziennes.
Au dire mêmes de son auteur, l'adjonction de cet article additionnel est justifiée par les convergences de plus en plus grandes entre les différents supports de communication, convergences rendues encore plus immédiates par l'arrivée des technologies numériques qui mixtent télécommunication et informatique.
Ces nouvelles donnes technologiques, loin de justifier un émiettement du service public, voire sa disparition, auraient dû, à l'inverse, permettre l'émergence d'un grand service public seul à même de permettre au plus grand nombre de nos concitoyens d'accéder à l'information, toute l'information, et aux nouvelles possibilités d'échanges sociaux, culturels, économiques, que représentent ces secteurs.
Vous choisissez, monsieur le ministre, la voie inverse. En effet, la nouvelle autorité de régulation mise en place viendra, à terme, se substituer au rôle essentiel du CSA en matière de liaison de transmission.
Il s'agit là d'une remise en cause de la notion même d'entité audiovisuelle.
La « rationalisation » que vous semblez vouloir faire vôtre introduit-elle un nouveau coût pour les usagers, comme c'est le cas pour ce qui relève actuellement des PTT, notamment de la direction générale des postes et télécommunications ?
Actuellement, l'usage des fréquences de reportage et des transmissions de contribution est gratuit pour ce qui relève du CSA. En sera-t-il de même demain, alors que l'objet du texte que nous examinons n'a d'autres visées que de réaliser d'énormes profits sur un marché des télécommunications en pleine expansion ?
Sans renoncer à remettre en cause les capacités réelles du CSA à redonner à notre service public de télévision un nouveau souffle, nous vous demandons, mes chers collègues, de bien vouloir adopter notre amendement visant à ne pas dessaisir le CSA des compétences qui sont les siennes en matière d'attribution de fréquences.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 51.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Cet amendement tend à rectifier une erreur matérielle.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 205.
M. François Fillon, ministre délégué. Le projet de loi substitue l'autorité de régulation des télécommunications au Conseil supérieur de l'audiovisuel dans l'attribution des fréquences de transmission.
La loi de 1986 prévoit aujourd'hui une attribution prioritaire à la société mentionnée en son article 51 des fréquences supplémentaires nécessaires à l'accomplissement par les sociétés nationales de programmes de leurs missions de service public.
Il convient donc de prévoir pour l'autorité de régulation des télécommunications le même respect de ce principe.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 129 et 205 ?
M. Gérard Larcher, rapporteur. L'adoption de l'amendement n° 200 rectifié présenté par le Gouvernement m'a conduit à retirer l'amendement de la commission, qui était comparable à l'amendement n° 129. Pour cette raison, la commission y est défavorable.
Par ailleurs, elle n'a pas examiné l'amendement n° 205. C'est donc simplement l'avis du rapporteur que je donne maintenant.
Je le rappelle, l'article 51 de la loi du 30 septembre 1986 a prévu la création de la société Télévision de France. Le dernier alinéa de l'article 26 de la même loi prévoit l'attribution à TDF de fréquences supplémentaires éventuellement nécessaires à l'accomplissement, par les sociétés nationales de programmes, de leur mission de service public ; cette attribution doit être prioritaire.
L'amendement qui nous est soumis prévoit entre le CSA et l'autorité de régulation des télécommunications, un partage des pouvoirs d'attribution prioritaire. Il s'agit des fréquences de radiodiffusion pour le CSA et des fréquences de transmission pour l'Autorité de régulation des télécommunications. C'est une innovation qui répond à la logique de l'article 11 bis . Nous y sommes donc favorables.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 129 et 51 ?
M. François Fillon, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 129. L'Assemblée nationale a introduit dans ce projet de loi une disposition qui concerne un tranfert technique limité et qui est, d'ailleurs, conforme à ce qui existe dans la plupart des pays. Cette disposition ne remet en rien en cause la compétence du CSA, ni pour autoriser les services de radio et de télévision ni pour leur attribuer les fréquences de radiodiffusion nécessaires. Cette disposition améliore, au contraire, la gestion de ce moyen technique parmi d'autres qu'est le transport de programmes.
J'ajoute que l'amendement relatif à Internet que vous venez d'adopter montre à l'évidence que le Gouvernement n'a pas l'intention d'empiéter sur les compétences du Conseil supérieur de l'audiovisuel ou de les amoindrir, puisque c'est naturellement auprès de lui qu'il a choisi de placer le Comité supérieur de la télématique. Je reprendrai, à cet égard, les termes de M. Cluzel : nous avons trouvé là un « bon accord » qui va dans le sens de la clarification des compétences.
Quant à l'amendement n° 51, j'y suis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 129, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
Mme Danièle Pourtaud. Le groupe socialiste vote pour.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 51, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 205, accepté par la commission.
Mme Danièle Pourtaud. Le groupe socialiste vote contre.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'article 11 bis .
Mme Danièle Pourtaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Pourquoi transférer une compétence supplémentaire à l'autorité de régulation des télécommunications, dont nous avons, par ailleurs, démontré l'inutilité ? Le CSA remplit parfaitement la mission que l'on veut tranférer à cette autorité.
Cette mesure nous étonne d'autant plus - d'ailleurs si j'ai bien compris, ce sentiment est partagé par M. Douste-Blazy, ministre de la culture - qu'il est question d'augmenter, au contraire, les pouvoirs du CSA. Nous ne comprenons donc pas pourquoi on veut enlever à ce dernier la compétence sur les fréquences destinées aux transmissions.
M. François Fillon, ministre délégué. Je demande la parole.
M le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre délégué. Il n'y a qu'un seul gouvernement, et M. Douste-Blazy est évidemment totalement solidaire des décisions gouvernementales, madame le sénateur.
Quant à l'augmentation des pouvoirs du CSA, le fait de reconnaître la compétence de cette instance dans le contrôle des contenus des réseaux télématiques me paraît autrement plus important que la question de la gestion de fréquences de transport.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 11 bis, modifié.
(L'article 11 bis est adopté.)

Article 12