Séance du 28 octobre 1998







M. le président. « Art. 4 bis . _ Dans le premier alinéa de l'article LO 296 du code électoral, les mots : "trente-cinq" sont remplacés par les mots : "dix-huit". »
Par amendement n° 17, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché, rapporteur. Je constate que le Gouvernement ne s'est pas opposé à la disposition proposée à l'Assemblée nationale.
Avant de me prononcer sur le fond, j'aimerais savoir ce que M. le ministre pense de l'âge à partir duquel on est habilité à exercer des fonctions ministérielles ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. Si le Gouvernement a laissé l'Assemblée nationale se prononcer sur ce point, je crois cependant qu'il nous faut revenir à un texte relatif aux incompatibilité et non aux conditions d'éligibilité.
Dans ces conditions, le Gouvernement est favorable à la suppression du texte initial, et donc à l'amendement n° 17.
M. Jacques Larché, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché, rapporteur. J'observe que M. le ministre ne m'a pas répondu sur l'exercice des fonctions ministérielles ! Au demeurant, n'a-t-on pas oublié le Président de la République s'agissant de l'âge d'éligibilité ?
M. Guy Allouche. Cela viendra ! Le prochain siècle est devant nous !
M. Jacques Larché, rapporteur. C'est une lacune qu'il faudra peut-être combler !
M. Dominique Braye. Pourquoi pas à seize ans !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 17.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je me réjouis que la commission nous ait proposé cet amendement, parce que le texte adopté par l'Assemblée nationale aurait posé des problèmes difficiles d'application pour l'administration de nos assemblées : n'aurait-il pas fallu modifier les imprimés à envoyer aux nouveaux élus, de façon, notamment, à leur demander s'ils habitent encore chez leurs parents ? (Sourires.)
M. Michel Duffour. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour. Nous trouvons nous aussi la rédaction de cet article introduit par l'Assemblée nationale un peu curieuse, mais nous tenons à cette occasion à dire que nous avons entendu, en commission - peut-être moins dans cet hémicycle, il est vrai - des propos qui sont quand même pour le moins désobligeants par rapport à la jeunesse...
M. Jean Chérioux. Démagogie !
M. Dominique Braye. On récupère !
M. Michel Duffour. ... surtout à un moment où - nous nous en félicitons tous - la jeune génération cherche à prendre plus de responsabilités, cherche à dire son mot sur toutes les grandes affaires de ce pays. De grâce ! pesons nos arguments pour ne pas lui donner l'impression que nous ne sommes pas à l'écoute de ce qu'elle dit.
M. Jean Chérioux. Persiste et signe !
M. Jacques Larché, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché, rapporteur. J'indique à M. Duffour - mais il le sait parfaitement, pour participer très fidèlement aux travaux de notre commission - que nous n'avons jamais prononcé le moindre mot désagréable à l'égard de la jeunesse : nous avons seulement visé l'inconséquence de nos collègues de l'Assemblée nationale, ce qui est totalement différent. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Patrice Gélard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard. Qu'il me soit permis une remarque à l'intention de l'Assemblée nationale : n'aurait-il pas fallu prévoir qu'auraient seuls le droit de se présenter à l'âge de dix-huit ans ceux qui ont accompli la journée obligatoire de préparation à la défense ? En effet, c'est une condition nécessaire pour passer le permis de conduire ou le permis de chasser. On ne pourrait pas conduire ou chasser mais on pourrait être député ?
J'espère que vous me pardonnerez cette petite note d'humour, monsieur le président.
M. Guy Allouche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche. Je le dis d'emblée, nous nous abstiendrons sur l'amendement n° 17.
Voilà quelques années, beaucoup ont critiqué l'abaissement à dix-huit ans de l'âge de la majorité civile. Or, aujourd'hui, on s'aperçoit qu'il y a une demande de citoyenneté assez forte de la part des lycéens.
Dix-huit ans, c'est peut-être un peu jeune, à nos yeux, pour être candidat à une fonction parlementaire, mais n'insultons pas l'avenir ! A l'allure où évolue la jeunesse, je pense que, dans quelque temps, à dix-huit ans, certains seront assez mûrs pour assurer certaines responsabilités !
M. Dominique Braye. Pourquoi pas à seize ans ?
M. Alain Vasselle. Certains sont mûrs à seize ans tandis que d'autres ne le sont pas à trente ans !
M. Dominique Braye. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Le débat qui vient de s'instaurer me désole un peu. Effectivement, il y a l'esprit et la lettre, mais nous avons vu cet après-midi que l'esprit était d'un côté, et la lettre de l'autre. Ainsi, dans votre réponse à M. Vasselle sur le problème de la délégation générale, monsieur le ministre, vous avez formellement raison : un maire n'a pas le droit de donner une délégation générale à son adjoint. Mais il n'empêche que les textes sont bafoués lorsque certains maires - ceux que j'ai cités tout à l'heure - ne gardent que la délégation relative au cimetière pour donner toutes les autres délégations à leur premier adjoint !
Dans le même ordre d'idée, monsieur Allouche, que la majorité soit fixée à dix-huit ans, soit ! Il n'empêche que nous constatons tous les jours que, si notre jeunesse a acquis certains droits supplémentaires de ce fait, les jeunes n'ont jamais été rendus aussi dépendants qu'en ce moment par l'évolution de la société.
M. Jean-Marie Poirier. Exactement !
M. Dominique Braye. Autrefois, ils n'étaient peut-être majeurs qu'à vingt et un ans, mais ils commençaient leur vie à cet âge ! Or, aujourd'hui, compte tenu de l'évolution que vous avez fait subir à la société, ils vivent encore chez leurs parents à vingt-sept ans. Ils ne peuvent pas fonder de famille, ils sont complètement dépendants.
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. Dominique Braye. Pour ma part, je préfère la véritable indépendance à l'indépendance sur le papier et sur l'acte d'état civil. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Louis Moinard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Moinard.
M. Louis Moinard. Je veux livrer à la Haute Assemblée une simple réflexion. Lors d'une élection municipale, un jeune âgé de dix-sept ans ne peut pas être élu. Trois ans plus tard se déroulent des élections sénatoriales ; il a vingt ans ; il peut être candidat, il peut être élu, mais il n'est pas électeur.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, accepté par le Gouvernement.
M. Michel Duffour. Le groupe communiste s'abstient.
M. Guy Allouche. Le groupe socialiste également.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 4 bis est supprimé.
Autrement dit, la jeunesse a toute sa place, mais pas tout de suite au Sénat.

Article 4 ter