Séance du 4 décembre 1998






SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Loi de finances pour 1999. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 1 ).

Equipement, transports et logement

V. - TOURISME (p. 2 )

Mme Marie-Claude Beaudeau, rapporteur spécial de la commission des finances ; M. Charles Ginésy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Mme Odette Terrade, MM. Marcel Bony, Bernard Plasait, Bernard Joly, Joseph Ostermann, Bernard Piras.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme ; M. le rapporteur pour avis.
Vote des crédits réservé.

Suspension et reprise de la séance (p. 3 )

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN

I. - SERVICES COMMUNS
II. - URBANISME ET LOGEMENT (p. 4 )

MM. Jacques Pelletier, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jacques Bellanger, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour l'urbanisme ; Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour le logement ; Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour le logement social ; Mme Odette Terrade, MM. André Vezinhet, Joseph Ostermann,Bernard Piras.
MM. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ; Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Crédits du titre III (p. 5 )

MM. Pierre Lefebvre, le ministre.
Amendement n° II-27 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur spécial, le ministre, Pierre Lefebvre, André Vezinhet, Alain Lambert, président de la commission des finances. - Adoption par scrutin public.
Vote des crédits réservé.

Crédits du titre IV (p. 6 )

Mme Odette Terrade.
Amendement n° II-28 de la commission. - MM. le rapporteur spécial, le secrétaire d'Etat, le président de la commission, Mme Odette Terrade, M. André Vezinhet. - Adoption par scrutin public.
Vote des crédits réservé.

Crédits des titres V et VI. - Vote réservé (p. 7 )

III. - TRANSPORTS (p. 8 )

1. Transports terrestres
2. Routes
3. Sécurité routière
MM. Auguste Cazalet, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les transports terrestres ; Georges Berchet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour les transports terrestres ; Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les routes et la sécurité routière ; François Gerbaud, en remplacement de M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour les routes et les voies navigables.

Suspension et reprise de la séance (p. 9 )

MM. Léon Fatous, Daniel Hoeffel, Bernard Plasait,François Gerbaud, Pierre Lefebvre, Jean-Pierre Plancade, Alain Lambert, Joseph Ostermann.

Suspension et reprise de la séance (p. 10 )

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Crédits du titre III. - Vote réservé (p. 11 )

Crédits du titre IV (p. 12 )

Amendement n° II-29 de la commission. - MM. Auguste Cazalet, rapporteur spécial ; le ministre, Jean-Pierre Demerliat, Pierre Lefebvre. - Adoption par scrutin public.
Vote des crédits réservé.

Crédits du titre V (p. 13 )

MM. Jean-Pierre Demerliat, le ministre.
Vote des crédits réservé.

Crédits du titre VI. - Vote réservé (p. 14 )

3. Transmission d'un projet de loi (p. 15 ).

4. Ordre du jour (p. 16 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à onze heures trente.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

LOI DE FINANCES POUR 1999

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 1999 (n° 65, 1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale. [Rapport n° 66 (1998-1999).]



Equipement, transports et logement


V. - TOURISME

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant l'équipement, les transports et le logement. V. - Tourisme.
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Marie-Claude Beaudeau, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget du tourisme que je présente au nom de la commission des finances est un budget de reconquête, un budget de relance. Il appelle toutefois encore d'autres moyens, d'autres ambitions pour confirmer notre pays comme première puissance touristique mondiale.
Il s'agit d'un budget de reconquête. De 430 millions de francs en 1993, il est passé à 416 millions de francs en 1994, 408 millions de francs en 1995, 390 millions de francs en 1996, 355 millions de francs en 1997 et 347 millions de francs en 1998.
En quatre ans, le budget a perdu près de 100 millions de francs, et le quart de ses moyens.
L'hémorragie humaine et budgétaire se devaient d'être stoppées. C'est chose faite.
En fait, 100 millions de francs ne représente qu'un cent cinquante millième du budget de l'Etat. C'est peu en valeur absolue, mais beaucoup en potentialités. C'est un sept centième de la TVA encaissée dans le secteur d'activité du tourisme.
La lente et régulière dégradation des moyens pouvait conduire à remettre en cause la place de leader de la France dans le monde comme puissance touristique. Depuis sept ans, l'ensemble des investissements réalisés par Maison de la France en partenariat avec les collectivités territoriales et les professionnels n'avaient pas augmenté. Ils seront en croissance cette année de 29 millions de francs et s'élèveront à 340 millions de francs.
Le retard devait être stoppé, car nos concurrents directs sont dynamiques. Dans le même temps, l'Italie investissait en effet 700 millions de francs, soit le double, et l'Espagne 1 milliard de francs, soit le triple.
Avec un budget en augmentation de 7 %, c'est bien un budget de reconquête, qui permettra d'ouvrir des chantiers nouveaux, c'est-à-dire des moyens nouveaux pour la direction du tourisme et Maison de la France.
Vous avez apprécié, madame le secrétaire d'Etat, l'importance d'un secteur représentant 1 million d'emplois directs et 7 % du produit intérieur brut.
Cette reconquête passe par la promotion de l'offre touristique nationale et par le gain de nouvelles parts de marché. Elle passe aussi par la mise sur pied de nouveaux programmes d'action en matière d'aménagement du territoire et de développement local.
Cette reconquête, le Sénat l'attend, car elle doit concerner également l'ensemble des activités et des régions de notre pays. En effet, il est anormal que 80 % de la fréquentation touristique se concentre sur 20 % du territoire.
Chacune de nos régions, chacun de nos pays a des richesses apparentes ou cachées, oubliées parfois, méconnues souvent, mais réelles et pouvant être mises en valeur. Les moeurs touristiques ont évolué. La campagne, les parcours culturels, les croisières, les randonnées offrent des plaisirs nouveaux émergeant de l'évolution des moeurs touristiques.
La France est le pays du monde qui offre la plus grande diversité de sites et de modes de vie. Nos atouts sont incomparables, et les conditions de la relance sont réunies.
En effet, ce budget est aussi un budget de relance.
Cette relance économique se révèle possible, car les fonds investis dans le secteur du tourisme sont supérieurs à ceux qui sont engagés dans le secteur de l'automobile, et 10 % des actifs de notre pays travaillent directement ou indirectement pour le tourisme.
Le secteur touristique vit, pour l'essentiel, du travail de 200 000 PME réparties sur l'ensemble du territoire et en perpétuelle adaptation et en continuel développement.
Le fait que l'emploi direct dans le tourisme progresse plus vite que l'emploi en général - la hausse était de 1,5 % en 1997 - démontre que le développement des activités est objectivement possible. C'est une question de volonté, de choix.
Mais la relance concerne aussi la conquête, l'expression d'un droit de chaque individu : le droit au repos, aux vacances. Actuellement, 40 % de la population ne part pas en vacances, soit 20 millions de personnes, dont 10 millions pour des raisons financières et, depuis 1990, il faut le noter, les taux de départ en vacances n'évoluent pas.
Ce droit aux vacances, c'est, pour chaque individu, un enrichissement, des connaissances, des valeurs humaines, la recherche de la conviviabilité, du dépaysement, des plaisirs du voyage, de séjours nouveaux, de la pratique des sports, de l'aventure...
La relance liée à l'expression du droit aux vacances pour tous passe aussi par la réduction de la durée du travail. La cinquième semaine de vacances, par exemple, a été très bénéfique pour les sports d'hiver.
Cette réduction du temps de travail peut avoir un double effet : l'accroissement de l'emploi et l'augmentation du temps libre ne peuvent qu'être des réponses favorables.
Ce projet de budget de relance s'inscrit pleinement dans la réalité de la vie sociale et des besoins du plus grand nombre.
J'en veux pour preuve les mesures prévues concernant l'accès au chèque-vacances des salariés des petites et moyennes entreprises ne pouvant pas encore en bénéficier, le volet tourisme des contrats de plan Etat-région, la réforme d'activités de l'Agence française d'ingénierie touristique, l'AFIT, le droit aux vacances pour les personnes handicapées, l'aide aux associations de tourisme social, la bourse solidarité vacances, la réhabilitation du parc immobilier des organismes du tourisme social, l'accroissement de l'accueil de touristes étrangers, l'aide aux PME pour moderniser les établissements d'accueil. Avec une politique hardie, le cap des 100 millions de touristes dans notre pays peut être atteint assez rapidement.
Il s'agit d'un projet de budget qui se révèle réaliste et prometteur, car il part des éléments concrets de la conjoncture touristique française.
L'année 1998 sera une bonne année pour le tourisme français : les recettes touristiques devraient atteindre 140 milliards de francs à 150 milliards de francs. A ce jour, elles marquent déjà une progression de 5,4 % par rapport à 1997.
Le bilan de la Coupe du monde de football se révèle positif. Cet événement a été relayé par une progression de la fréquentation étrangère au sud de la Loire au mois de juillet, et dans la quasi-totalité des régions au mois d'août, avec, il faut le noter, un goût renouvelé pour la Corse.
L'attrait de notre pays se fait plus fort pour les touristes étrangers.
Avec 66,9 millions d'arrivées touristiques internationales en 1997, la France a vu s'accroître de façon significative le nombre de séjours touristiques réalisés par les clientèles étrangères en nette progression par rapport à 1996 - 7,1 % - ce qui lui permet d'augmenter sa part du marché mondial - 10,9 % contre 10,5 % en 1996 - et surtout européenne - 18,5 % contre 17,9 % en 1996. Elle confirme ainsi sa position de première destination touristique internationale devant les Etats-Unis, 48,4 millions d'arrivées, et l'Espagne, 43,4 millions d'arrivées.
Si, en termes de fréquentation, la France voit son taux d'arrivée de touristes étrangers s'accroître de 7,10 %, en revanche ses recettes diminuent de 0,10 %. Une réflexion s'impose car ces chiffres sont différents pour d'autres pays. Ainsi les USA enregistrent une progression du nombre des touristes étrangers de 8,10 %, et une augmentation des recettes de 16,60 %. On constate la même situation en matière de bilans des voyagistes : les groupes français affichent un déficit alors que tous leurs concurrents européens annoncent des bénéfices en hausse.
Ne faudrait-il pas, madame le secrétaire d'Etat, réaliser une étude plus complète afin de tenter d'expliquer et de corriger cette situation ?
Je voudrais également - sans faire de liens avec les constatations précédentes mais sans les ignorer - évoquer la question de la formation professionnelle : 12 000 emplois étant créés chaque année dans le tourisme, avec l'objectif de 30 000 emplois durables, ne faudrait-t-il pas mener une politique de formation plus hardie ?
A cet égard, dans un espace de plus en plus concurrentiel, la compétition se fera non seulement sur les prix, mais sur la qualité. De ce point de vue, il ne suffira pas de baisser les charges sur les bas salaires ou de diminuer le taux de TVA pour développer l'emploi hôtelier. Il conviendra aussi de développer la formation. La profession « consomme » trop peu de formation continue, admet la Fédération française de l'hôtellerie. Des régions comme l'Alsace montrent l'exemple de ce professionnalisme à défaut duquel on ne bâtit pas un outil compétitif.
La formation est aussi une occasion de développer la concertation entre tous les partenaires : les professionnels, les salariés et les administrations concernés.
Mes chers collègues, la commission des finances et son rapporteur appellent à voter ce budget. Le Sénat, s'il suivait notre avis, pourrait le voter à l'unanimité, apportant ainsi la preuve de la qualité de ses choix et de ses propositions. Il le ferait toutefois en confirmant son inquiétude sur l'article 26, dont on peut prévoir des conséquences négatives sur l'hôtellerie. Cet article doit être revu, tout comme certains abaissements de taux de TVA doivent être examinés.
Vacances et tourisme deviennent des phénomènes de masse et, nous l'espérons, bientôt en voie de banalisation.
Mais les vacances ne sont pas un épisode banal de la vie. On y pense toute l'année, puis on les revit sous forme de souvenirs. C'est toujours un moment de bonheur, de découverte, d'enrichissement.
Faisons en sorte, mes chers collègues, que bientôt 90 %, voire 95 % des Français puissent en prendre. Le budget de 1999 est une étape dans cette voie. C'est avec plaisir que je vous appelle à le voter. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Charles Ginésy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues. Avec 66,9 millions d'arrivées de touristes étrangers en 1997, la France est, sans conteste, le premier pays d'accueil, loin devant les Etats-Unis et l'Espagne. Le tourisme constitue toujours, avec un solde de 66,7 milliards de francs, le premier poste excédentaire des transactions courantes, qui enregistre d'ailleurs une hausse de plus de 22 % sur un an.
Le tourisme, c'est également un tissu de 170 000 à 200 000 entreprises, le plus souvent petites et moyennes, qui dégagent un chiffre d'affaires de plus de 300 milliards de francs et induit plus de 750 000 emplois permanents directs, et sans doute plus d'un million d'emplois indirects.
Mais ces résultats ne doivent pas faire oublier la très forte concurrence qui se livre au niveau international et la fragilité de nos performances soumises aux aléas de la conjoncture économique. Ainsi, la crise asiatique s'est fait sentir très tôt pour le Japon, dont les dépenses touristiques en France ont régressé de plus de 7,3 %.
Dans ce contexte, il convient de saluer la hausse de 7,2 % des crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 1999, qui s'élèvent à 372 millions de francs, rompant ainsi avec plusieurs années de diminution régulière. Sur les axes prioritaires de votre politique du tourisme, madame la secrétaire d'Etat, je ferai trois observations.
Premièrement, pour augmenter la fréquentation touristique française, vous voulez rendre effectif le droit aux vacances pour tous en renforçant les moyens attribués au secteur associatif qui passent de 7 millions de francs à 11 millions de francs, afin de permettre aux personnes et aux familles en situation d'exclusion de bénéficier du droit aux vacances.
Vous poursuivez également le programme de réhabilitation du parc immobilier du secteur associatif, qui a permis, l'an dernier, de programmer 35 opérations portant sur 10 000 lits induisant 175 millions de francs de travaux.
Enfin, en 1999, le projet de loi élargissant le champ d'application du chèque-vacances aux salariés des PME devrait être adopté. Je regrette que le premier projet de loi ayant trait à ce sujet, proposé par M. Bernard Pons, alors ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme, n'ait pas pu être adopté. Il aurait permis une application plus rapide de ce dispositif à l'impact social fort et attendu par les professionnels du secteur.
S'agissant de la promotion de la France à l'étranger, il est heureux que la dotation au GIE Maison de la France augmente de près d'un quart, concentrant ainsi une part importante de l'effort budgétaire consenti pour le tourisme en 1999.
La participation de l'Etat au GIE ne doit plus être diminuée au risque de porter atteinte à la crédibilité de nos actions de promotion à l'étranger. Les fermetures intervenues en 1998 à la suite des restrictions budgétaires imposées en sont l'illustration.
Ma deuxième observation porte sur vos actions en faveur d'une meilleure répartition de l'activité touristique sur l'ensemble du territoire.
Vous encouragez des initiatives en faveur du tourisme rural - nous en avons tant besoin - en participant, notamment, au financement du serveur national de réservation des produits du tourisme en espace rural.
Je veux souligner tout l'intérêt de ces démarches, mais je rappelle qu'il faut résoudre sur le plan local les problèmes posés par le paracommercialisme. Je regrette à ce sujet que l'obligation faite aux non-professionnels de déclarer en mairie tout hébergement commercialisé à des fins touristiques ne soit pas encore effective.
Ma troisième observation concernera vos actions entreprises pour soutenir et moderniser nos infrastrutures touristiques.
S'agissant de l'emploi, votre effort porte sur les emplois-jeunes à travers la signature de conventions avec les offices de tourisme, les syndicats d'initiative ou encore la fédération des pays d'accueil.
Cependant, au-delà de ce dispositif, je suis encore beaucoup plus favorable à une harmonisation des taux de TVA pratiqués dans les différents types de restauration. A l'heure de l'Europe, cela mettrait fin aux distorsions de concurrence tant au sein du secteur que vis-à-vis de certains pays voisins concurrents sur le plan touristique. Cela permettrait aussi de créer de vrais emplois dans le secteur privé.
S'agissant de l'aide à la restructuration de la dette hôtelière à travers le dispositif de la SOFARIS, les modifications apportées en 1997 vont dans le bon sens. Mais il faut augmenter - cela s'impose - les fonds dont dispose cette société pour en démultiplier les capacités d'action.
Enfin, s'agissant de la réhabilitation de l'immobilier touristique, j'approuve le dispositif adopté par l'Assemblée nationale qui résulte d'une étroite collaboration entre l'Etat, les professionnels et les collectivités territoriales intéressées.
Il consiste à enclencher une dynamique indispensable concertée et programmée de rénovation des hébergements de loisirs qui ont été construits par les particuliers entre 1960 et 1980 et qui, aujourd'hui, sont largement dégradés. Il permet de lier étroitement la requalification du bâti et la professionnalisation de la commercialisation pour dégager les ressources susceptibles d'assurer la rentabilité de l'investissement de rénovation.
Le mécanisme adopté autorise la récupération de la TVA sur les travaux de réhabilitation, mais, pour être réellement attractif, il faudra, je pense, mobiliser d'autres sources de financements.
Compte tenu de ces différentes observations, madame la secrétaire d'Etat, la commission des affaires économiques a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du tourisme. (Applaudissements.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 10 minutes ;
Groupe socialiste, 10 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 12 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 5 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. La discussion consacrée aux crédits du tourisme pour 1999 me donne l'occasion tout d'abord de vous féliciter, madame la secrétaire d'Etat, pour l'action que vous menez à la tête du secrétariat d'Etat au tourisme depuis dix-huit mois.
Avec 372 millions de francs de crédits de paiement, votre projet de budget enregistre une augmentation sensible de 7,18 %, venant ainsi marquer la reconnaissance d'un ministère particulièrement délaissé ces dernières années.
Faut-il rappeler que projet de budget représente à peine 0,03 % des dépenses globales de l'Etat ?
Cependant, la valeur quasi symbolique de ce projet de budget mérite d'être mise en parallèle avec les 67 millions de touristes étrangers qui visitent notre pays, avec les 720 milliards de francs de chiffre d'affaires générés par le tourisme pour un excédent de 66 milliards de francs et, enfin, avec les 3 millions d'emplois directs et indirects liés à ce secteur.
Pour autant, la description idyllique de l'industrie touristique ne saurait minimiser l'étendue des problèmes auxquels nous sommes confrontés.
Ils sont en effet de trois ordres : les inégalités d'accès aux activités de loisirs, le déséquilibre territorial des destinations touristiques et la précarité de l'emploi.
Là où vos prédécesseurs ont laissé la loi du marché régenter les activités touristiques, avec les effets négatifs qu'accompagne inéluctablement le développement économique, vous avez, madame la secrétaire d'Etat, développé une approche humaine, sociale et territoriale d'un secteur qui semblait se suffire à lui-même.
La première priorité de votre politique se caractérise par la promotion du tourisme social et la reconnaissance du droit aux vacances pour tous.
En effet, 40 % des Français partent peu en vacances, voire pas du tout. En outre, les séquences de loisirs sont de plus en plus discontinues et de moins en moins longues. Dans le même temps, les déplacements touristiques continuent de se développer sur la base d'un réseau traditionnel d'amis ou de parents.
C'est dire l'effort qu'il reste à produire pour socialiser davantage la pratique du tourisme international.
Votre projet de budget consacre ainsi 2 millions de francs à la mise en place d'une « bourse solidarité vacances » destinée aux jeunes en difficulté qui souhaitent partir à l'étranger. Pouvez-vous, madame la secrétaire d'Etat, nous en préciser le fonctionnement et les critères d'affectation ?
En outre, l'attention toute particulière portée aux trois millions de personnes handicapées, en favorisant leur accueil et leur accès aux infrastructures touristiques, mérite d'être saluée.
De même, le doublement des crédits en faveur du parc immobilier associatif, déjà voté dans la loi de finances pour 1998, sera poursuivi cette année, et il faut s'en réjouir.
Enfin, l'année 1999 devrait voir le Parlement discuter du projet de loi portant extension de l'accès aux chèques-vacances aux salariés des petites et moyennes entreprises pour lesquelles n'existent pas de comité d'entreprise.
En effet, si le droit aux vacances a pu apparaître comme le pendant du droit au travail, force est de constater que la précarité et la raréfaction des emplois dans notre pays depuis une quinzaine d'années ont placé au second plan un droit acquis du Front populaire avec l'apparition des congés payés.
Une autre priorité affichée par votre secrétariat d'Etat concerne une meilleure répartition touristique de notre territoire. En effet, 80 % de la fréquentation touristique est concentrée sur 20 % de notre territoire. A titre d'exemple, la région d'Ile-de-France accueille, à elle seule, 36 millions de visiteurs, ce qui en fait la première destination touristique au monde.
La promotion et la valorisation de nouveaux territoires nécessitent un engagement plus important des pouvoirs publics - Etat et collectivités locales - dans le domaine des infrastructures, notamment de notre réseau ferré, des services publics de proximité, de l'information et de l'accueil du public.
Les négociations à venir sur une nouvelle génération de contrats de plan Etat-région devront permettre d'intégrer les orientations nouvelles du Gouvernement dans ce domaine. Le soutien renouvelé aux délégations régionales ainsi qu'à l'Agence française de l'ingénierie touristique, l'AFIT, peut constituer un appui technique essentiel au développement d'initiatives locales.
J'en viens enfin à l'emploi. Il faut tout d'abord se féliciter que ce budget stabilise les effectifs du ministère au niveau de 1998 après une régression continue observée ces dernières années.
S'agissant des emplois du secteur touristique, la croissance n'a pas été suivie d'un progrès social au niveau tant de la formation professionnelle que de la pérennisation des emplois. En outre, la situation sociale, sanitaire de même que les conditions de vie et de travail des saisonniers restent préoccupantes.
Il est urgent qu'un véritable statut du saisonnier soit mis en place afin de sortir ces salariés de la clandestinité économique et de l'anonymat juridique.
Nous savons qu'une réflexion sera rapidement menée avec les partenaires sociaux en vue de définir un cadre législatif et réglementaire pour l'exercice de cette profession. Encore faut-il se donner les moyens de faire respecter le droit du travail dans un secteur caractérisé par la forte mobilité sociale, la flexibilité des horaires et la précarité des conditions de travail.
Face à ces actions de longue haleine, d'autres questions concernant le tourisme se posent avec acuité.
Est-il envisagé de remédier à la différence de traitement fiscal entre restauration rapide et restauration traditionnelle ?
En outre, en l'absence d'outils statistiques fiables, les effets de la crise financière internationale sur le trafic des voyageurs transitant par la France peuvent-ils être évalués ?
Enfin, madame la secrétaire d'Etat, comment comptez-vous valoriser l'effet Coupe du monde, qui doit profiter à l'ensemble du territoire français ?
Au-delà de ces questions, auxquelles, je le sais, vous ne manquerez pas de répondre, madame la secrétaire d'Etat, le groupe communiste républicain et citoyen votera avec enthousiasme votre budget. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Bony.
M. Marcel Bony. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, pour la première fois depuis cinq ans, le budget du tourisme est en progression de 7,8 %. C'est donc une véritable inversion de tendance que vous nous proposez, madame la secrétaire d'Etat. Je me permets de vous en féliciter.
Parmi les objectifs que vous avez annoncés - mon ami Bernard Piras en reprendra d'autres en complément - je retiendrai votre volonté de mieux répartir la fréquentation et de rééquilibrer le territoire sur le plan touristique.
Pour éviter que 80 % de la population ne fréquente que 20 % du pays, vous avez augmenté de plus de 6 % les crédits de fonctionnement affectés aux contrats de plan ; c'est une bonne chose. Mais peut-être faudrait-il contractualiser des crédits plus importants pour inciter les acteurs territoriaux, notamment les comités départementaux et régionaux du tourisme, à mieux se concerter et se coordonner.
Il faudrait également oeuvrer en faveur d'un meilleur étalement dans le temps : 80 % des Français partent aux mois de juillet et d'août, les touristes étrangers étant plus habitués à voyager le reste de l'année.
Si la France reste la première destination touristique mondiale, elle se situe seulement au troisième rang en chiffre d'affaires. L'effort important que vous fournissez en faveur de la Maison de la France devrait être porteur : l'essentiel de ses actions est en effet tourné vers la conquête des marchés extérieurs.
Vous voulez également favoriser l'emploi et renforcer le statut des salariés du secteur. Vous comptez, à long terme, atteindre les 30 000 emplois créés par an : c'est ambitieux, mais ce n'est pas impossible si l'activité touristique connaît réellement le développement mondial qu'on lui promet.
Le renforcement des moyens des délégations régionales au tourisme et l'augmentation importante des crédits de l'AFIT - de 14,29 % - doivent contribuer à la qualité des emplois. Depuis des années, les travailleurs saisonniers se plaignent de la précarité. Le problème de leur indemnisation n'est effectivement pas simple.
Pour ma part, j'attends avec beaucoup d'impatience les résultats de la mission que vous avez confiée à Anicet Le Pors sur cette situation.
Après ces remarques générales, j'aborderai de façon plus précise deux secteurs : le tourisme rural et le tourisme thermal.
Le tourisme rural, tout d'abord, se manifeste par une offre trop atomisée et nécessite une forte action interministérielle agriculture-environnement-tourisme, en partenariat avec la DATAR. L'amélioration de l'hébergement doit se faire en privilégiant la réutilisation d'un bâti de caractère. L'amélioration de la qualité se fera grâce au renforcement des réseaux professionnels et au soutien apporté aux structures de développement local capables de coordonner des acteurs isolés.
Le secteur du thermalisme, quant à lui, n'est pas en progression, bien au contraire. J'ai lu avec beaucoup d'intérêt le rapport Cohen. Il est grand temps de rendre ce secteur attractif, d'une part, en s'intéressant à son efficacité thérapeutique et, d'autre part, en modernisant l'image surannée des stations thermales, en tout cas de certaines d'entre elles.
Aujourd'hui, de nombreuses stations se reconvertissent dans la remise en forme pour attirer une clientèle plus large, mais aussi plus jeune. Mais un des grands groupes du thermalisme, présent dans neuf stations, avoue que cela ne touche actuellement que 5 % de sa clientèle. Il existe donc une perspective de développement.
Vingt stations auvergnates ont formé la « Route des villes d'eau du Massif central ». Leur but est de fixer le tourisme de passage et de faire naître une clientèle de proximité sur la base de thématiques sportives et culturelles. Il faut encourager de telles initiatives et les aider à franchir les obstacles existants. Là aussi, c'est en partenariat qu'il faut agir, cette fois avec votre collègue en charge de la santé. Que pensez-vous de la publication tardive des traitements et tarifs thermaux, qui se font attendre chaque année, pénalisant les stations ? Comment voulez-vous qu'une action touristique soit efficace, dans ces conditions ? Les curistes eux-mêmes, et bien plus encore leurs accompagnants, ont besoin de prévoir à l'avance leur budget.
Puisque j'ai commencé à présenter des observations, permettez-moi de continuer dans cette voie.
Je me suis fait à plusieurs reprises le porte-parole des hôteliers et des restaurateurs sur le taux de la TVA appliquée à ce secteur. A plus forte raison depuis qu'elle a été portée à 20,6 %, en 1995, ils sont sérieusement pénalisés par rapport à leurs concurrents de la restauration rapide et par rapport aux traiteurs, qui se voient appliquer la TVA à taux réduit. C'était d'ailleurs le sujet sur lequel vous étiez attendue lors de la récente assemblée générale de la Fédération nationale de l'industrie hôtelière, qui a eu lieu en Auvergne. Une négociation a été engagée par le gouvernement français pour que, à la liste de la directive européenne, soient ajoutés les produits et services ; il faut faire tout ce qui est en votre pouvoir, madame le secrétaire d'Etat, pour que la décision finale du Conseil des ministres des Quinze soit positive.
Toujours à propos de ce secteur, je me permets de rappeler les difficultés sérieuses auxquelles il se trouve confronté en raison de la fiscalité locale et de charges qui continuent à s'alourdir.
Ma dernière observation fera pendant à ma satisfaction du début.
Même si la tendance est enfin à la hausse, le tourisme ne représente que 0,02 % du budget de l'Etat, ce qui prouve qu'on l'a longtemps négligé dans la préparation de l'avenir du territoire. Pourtant, il pèse davantage que l'industrie agroalimentaire et l'automobile dans l'économie française.
Ce que je vous demande donc, en conclusion, madame la secrétaire d'Etat, c'est d'amplifier la politique du tourisme, c'est de donner tout son sens à la notion de tourisme durable, pour qu'il soit, lui aussi, une composante essentielle de l'aménagement du territoire ; c'est d'encourager les professionnels à faire mieux coincider l'offre avec la demande.
Vous vous êtes déjà engagée dans cette voie, vous avez déjà bien impulsé une politique prenant en compte l'évolution de la famille, désormais recomposée ou élargie aux amis et recentrée sur des activités personnalisées dans un bouquet d'offres.
Pour toutes ces raisons, nous voterons votre budget. Depuis 1993, vos prédécesseurs ne nous avaient pas habitués à nous soumettre des crédits montrant une tendance favorable. Pour votre part, animée par une grande confiance dans l'avenir du tourisme, vous avez su faire montre de force de conviction auprès de votre collègue du budget ; nous vous en remercions. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, 1998 est l'année de la France. Les premières indications confirment la tendance de l'an passé où notre pays, avec 67 millions de visiteurs, soit 10,9 % du marché mondial, s'affirmait comme première destination touristique internationale, loin devant les Etats-Unis et l'Espagne.
L'effet « Mondial » a joué à plein, et nous ne pouvons que nous en féliciter. Celui-ci se poursuit d'ailleurs puisque Paris connaît une arrière-saison touristique exceptionnelle liée aux nombreux événements en cours ou qui viennent de s'achever, comme le Mondial de l'automobile - le dernier du millénaire, au succès sans précédent - la Biennale des antiquaires, les défilés de mode, la remarquable exposition Champs d'aviation, sur les Champs-Elysées, la fête de la Seine ou encore les Journées du patrimoine, qui ont attiré beaucoup de provinciaux. Selon les premières estimations, les arrivées en septembre et octobre dans la capitale ont augmenté de plus de 5 % par rapport à la même période de 1997, dont les résultats étaient pourtant déjà excellents.
Cependant, il y a fort à parier que cet effet Coupe du monde va s'essouffler et que l'explosion de la fréquentation touristique ne se traduira pas forcément par une progression de même ampleur des recettes.
Sur ce point, je rejoins les observations du rapporteur de la commission des affaires économiques, notre excellent collègue Charles Ginésy, qui relevait que la France ne se classe qu'au troisième rang mondial pour ses recettes touristiques étant donné la durée plus courte des séjours dans notre pays.
Dans ces conditions, force est de constater la relative fragilité des performances françaises, qui sont, de plus, soumises aux aléas de la conjoncture, comme en témoigne la baisse de 7,3 % des dépenses des touristes japonais en France, à la suite de la crise asiatique.
Autant dire, madame le secrétaire d'Etat, que la France ne peut pas se payer le luxe de s'endormir sur ses lauriers, d'autant que la concurrence internationale guette, toujours plus vive, toujours plus conquérante.
J'ajoute que, en raison de la crise internationale, 1999 s'annonce plus incertaine.
Dans ce contexte, avec 372 millions de francs en crédits de paiements, le budget de votre département ministériel progresse de 7,2 %. Dont acte.
Faut-il pour autant y voir un effort substantiel ? Je ne le pense pas, car je crois qu'il s'agit tout au plus d'un léger rattrapage dont nous ne pourrons vraiment nous réjouir qu'une fois l'exercice exécuté, tant nous savons que le budget du tourisme est facilement considéré comme une variable d'ajustement du budget de l'Etat, en proie aux annulations de crédits.
Ayant assumé pendant plusieurs années la responsabilité du tourisme parisien et francilien, j'ai acquis la certitude que, si le secteur touristique fonctionne bien, c'est en grande partie parce que les pouvoirs publics y interviennent peu, et mes convictions libérales en sont, bien sûr, renforcées.
Mais j'ai surtout appris qu'il y avait des interventions stratégiques et, plus encore, des incitations parfaitement indispensables.
En d'autres termes, rien ne sert de saupoudrer. Tout doit être concentré sur de grands axes, préalablement définis, étant entendu que doit être privilégiée la création d'un environnement favorable au développement des industries touristiques.
Et c'est là que le bât blesse, madame le secrétaire d'Etat. Car si je ne perçois que très obscurément ce que vous essayez de faire, je vois, hélas, trop bien ce que vous laissez faire.
Oui, madame le secrétaire d'Etat, quelle est votre politique ? Quelle est votre ambition ?
Le tourisme social, me répondez-vous ! Très bien. C'est effectivement une orientation louable que traduit votre budget avec un effort sensible en direction du tourisme associatif. Que 40% de nos concitoyens ne partent pas en vacances, et en particulier pour des raisons financières, ne peut nous laisser indifférents.
Vous promouvez donc le droit aux vacances. Soit. Cela n'en fait jamais qu'un de plus dans cette catégorie infinie des droits sociaux, qui compte aussi le droit au travail et dont votre gouvernement, en ces temps de grève, serait bien inspiré de se souvenir ! Mais, c'est vrai, c'est un autre débat...
Droit aux vacances, d'accord. Mais pour qui ? Les fonctionnaires sans doute, et ils sont très nombreux. Mais il y a aussi, dans ce pays, des salariés du secteur privé, en particulier dans des PME de moins de cinquante personnes, qui ne comprennent pas pourquoi on les prive depuis trop longtemps du dispositif des chèques vacances. Je souhaiterais savoir, madame le secrétaire d'Etat, dans quel délai vous comptez étendre ce dispositif de nature à répondre aux attentes de tous, y compris des professionnels.
Parallèlement à cela, il y a le secteur touristique marchand qui doit renouveler son offre et, plus encore, prospecter de nouveaux marchés pour élargir sa clientèle. Nous sommes en effet dans un monde de concurrence acharnée où chaque pays a maintenant découvert l'intérêt économique du tourisme. La France a un don pour le tourisme mais elle ne doit pas céder à la facilité; elle doit, au contraire, cultiver ce don et l'enrichir. La plupart des infrastructures datant des années soixante et soixante dix, de sérieux besoins d'adaptation et de modernisation se font sentir.
Cela passe, bien sûr, par la restructuration de la dette hôtelière, au moyen du fonds SOFARIS, qui, comme l'a justement dit le rapporteur, doit être doté de moyens supplémentaires pour démultiplier ses capacités d'action envers l'hôtellerie indépendante et familiale.
Cela passe encore par la réhabilitation de l'immobilier touristique au moyen d'avantages fiscaux tel que celui qui est consenti, en matière de TVA, par l'article additionnel après l'article 22 du projet de loi de finances.
Enfin, cela passe, aussi et surtout, par la possibilité laissée aux professionnels d'investir, grâce aux bénéfices engrangés ou aux emprunts bancaires. Il est donc essentiel de préserver cette capacité d'investissement pour faire face aux besoins d'adaptation.
Or, que fait le Gourvernement ? Il élargit, par l'article 26 du projet de loi de finances, l'assiette de la taxe sur les locaux de bureaux applicable en Ile-de-France aux locaux commerciaux ou de stockage. Voilà une mesure anti-économique par excellence qui frapperait toute l'industrie hôtelière et touristique francilienne. A titre d'exemple, un hôtel de soixante chambres devrait acquitter la somme de 150 000 francs en 2004.
Les grands hôtels ne sont pas un luxe : ils sont un produit nécessaire à l'économie touristique au même titre que les parcs d'exposition ou les palais des congrès. Aggraver leur taxation reviendrait à pénaliser gravement notre industrie.
Si je me félicite de la suppression de cette disposition par la commission des finances du Sénat, sur l'initiative de son excellent rapporteur général, notre éminent collègue Philippe Marini, je vous demande néanmoins solennellement, madame le secrétaire d'Etat, de tout faire pour que, en nouvelle lecture, l'Assemblée nationale partage la sagesse de la Haute Assemblée.
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. Bernard Plasait. Il en va vraiment de l'avenir de toute l'industrie touristique francilienne.
De grâce, n'entravez pas le développement du secteur touristique. Aidez-le au contraire !
Tel est d'ailleurs le sens de la restauration des moyens dévolus à Maison de la France. Je me félicite, bien évidemment, de cette hausse des crédits destinés à la promotion de la France à l'étranger, qui succède, je le rappelle, à une diminution de 9 % l'an passé.
Outre l'aspect budgétaire, je m'interroge sur la politique et l'organisation même de Maison de la France. En effet, la presse spécialisée n'hésite plus à parler de naufrage.
Sans céder à des excès de langage, je souhaiterais néanmoins savoir, madame le secrétaire d'Etat, ce qu'il en est réellement. La décentralisation serait-elle trop poussée, comme on a pu l'entendre dire ? La stratégie marketing totalement absente ? La direction générale trop faible ?
Quoi qu'il en soit, une réorganisation s'impose. Je voudrais, madame le secrétaire d'Etat, que vous nous en précisiez les grandes lignes. Les professionnels l'attendent avec impatience, et l'approche des fêtes de l'an 2000 la rend particulièrement urgente.
Il en va, tout le monde le comprend bien, du rayonnement de la France, pays de l'art de vivre, comme de sa capacité à relever le défi de la compétition internationale.
J'achèverai mon propos en rappelant ce que disait déjà Alexis de Tocqueville en 1856 : « La France est la plus brillante et la plus généreuse des nations d'Europe, et la mieux faite pour devenir tout à tour un objet d'admiration, de haine, de pitié, de terreur, mais jamais d'indifférence. » (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, comme les orateurs précédents l'ont souligné, les crédits affectés au tourisme dans le projet de loi de finances pour 1999 s'élèvent à 372 millions de francs, soit une hausse sensible de près de 7 % par rapport à 1998.
On ne le rappellera jamais assez, le tourisme est un secteur qui représente près de 7 % du PIB et est source de nombreux emplois : 1 million d'emplois directs, dont 314 000 permanents et autant d'emplois induits.
En 1997, la France confirmait sa place de première destination touristique avec 10,9 % du marché mondial et 18,5 % du marché européen. Pourtant, en termes de recettes touristiques, la France ne se situe qu'en troisième position, loin derrière les Etats-Unis et l'Italie.
Ce résultat s'explique non par le coût moyen d'un séjour dans l'une de nos régions, mais par la distinction qu'il convient de faire entre touristes et visiteurs passagers.
Les premiers séjournent suffisamment longtemps dans notre pays pour contribuer à la mise en valeur de nos sites et à la découverte des lieux géographiques et culturels symbolisant la richesse et la diversité de nos terroirs. Pour eux, tourisme s'accorde avec loisir, c'est-à-dire épanouissement de l'individu. En cela, ils participent activement à la dimension sociale du tourisme.
Les seconds peuvent être définis comme des « touristes en trompe-l'oeil ». De par la brièveté de leur séjour, il n'est pas raisonnable de les intégrer aux flux touristiques participant à l'excédent du solde annuel. Leur séjour transitoire n'autorise en aucun cas une quelconque présomption de mise en valeur de notre patrimoine national.
M. Philippe de Gaulle. Tout à fait !
M. Bernard Joly. Madame le secrétaire d'Etat, une politique touristique efficace passe obligatoirement par une bonne promotion à l'étranger. C'est, entre autres, le rôle de la Maison de la France, dont je constate avec satisfaction qu'elle bénéficie d'une forte augmentation de ses crédits après la baisse de 1997.
La prospection des marchés étrangers doit être une des priorités du Gouvernement pour 1999. Pour cela, rappelons que, dès janvier, l'offre française sera globalisée grâce à l'ouverture du serveur national RESINFRANCE, véritable instrument - issu des nouvelles technologies - de promotion des produits français partout dans le monde.
Dans une société de plus en plus concurrentielle, il est impératif de conquérir une clientèle étrangère, et aussi de maintenir celle qui est déjà fidèle aux attraits de notre pays, par un certain nombre de mesures favorables.
En premier lieu, j'aborderai le problème des 35 heures dans les activités touristiques liées à l'hôtellerie et à la restauration. Pensez-vous, madame le secrétaire d'Etat, que le texte qui entrera en vigueur à l'aube du troisième millénaire encouragera les professionnels du tourisme face à la concurrence débridée de nos voisins européens ? Pour ma part, j'en doute fort, compte tenu, en particulier, de la quasi-impossibilité d'appliquer de telles mesures pour une multitude d'entreprises saisonnières.
En deuxième lieu, comme tous les orateurs précédents, je souhaiterais revenir sur un combat, hélas ! perdu, celui de la TVA à taux réduit dans le secteur de la restauration.
Avec plusieurs de mes collègues, j'ai proposé, en vain, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 1999, une réforme de la détermination de l'assiette et de la base d'imposition pour les activités de restauration. Sachez-le, madame le secrétaire d'Etat, aujourd'hui, ce sont les consommateurs modestes qui paient le prix fort, au détriment d'un secteur employant 800 000 actifs.
L'effort entrepris pour favoriser le développement du tourisme, tant sur le plan social que sur le plan économique, ne doit pas occulter certaines préoccupations.
Tout d'abord, une formation pointue aux métiers du tourisme reste la meilleure garantie d'un secteur d'activité aussi attentif aux prix qu'à la qualité de ses prestations. Pour ce faire, il suffirait de baisser les charges sur les bas salaires et de développer une formation continue. Celle-ci serait l'occasion de développer la concertation entre les employeurs, les salariés et les administrations concernées.
En outre, les départements, par le biais de leurs conseils généraux, auraient tout intérêt à être davantage sollicités dans l'élaboration du Plan en matière touristique. Acteurs incontournables dans la concertation entre l'Etat et les collectivités territoriales, ils n'en restent pas moins des interlocuteurs susceptibles de mieux comprendre les besoins touristiques et de mieux écouter les différents partenaires sociaux.
En dernier lieu, j'attirerai votre attention, madame le secrétaire d'Etat, sur la nécessaire progression des moyens dans le domaine de l'observation touristique. Cette dernière permet seule la projection dans l'avenir des politiques de tourisme et l'analyse de la conjoncture.
Ainsi, depuis quelques années, divers organismes s'attachent à mieux connaître l'ensemble des phénomènes sociaux, économiques et culturels liés au tourisme. C'est le cas, tout particulièrement, de l'Agence française de l'ingénierie touristique, véritable bureau d'études dont les capacités et la compétence ne sont plus à démontrer.
Enfin, je conclurai mon intervention en souhaitant, comme l'a fait Bernard Plasait, que le Gouvernement soit au rendez-vous de la grande célébration de l'an 2000 : j'espère sincèrement qu'elle sera pour nous tous l'occasion de faire mieux encore découvrir au monde entier non seulement l'exceptionnel patrimoine parisien mais surtout les richesses et la beauté de nos provinces. Il est temps de nous en occuper ! (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Grâce à une hausse spectaculaire de 7 %, votre budget, madame la secrétaire d'Etat, serait à même de recevoir un satisfecit de notre part. En ce qui me concerne, ce ne sera pas le cas.
Je me permettrai en effet de formuler quelques critiques sur ce budget, le temps qui m'est imparti étant insuffisant pour que je puisse évoquer l'ensemble des problèmes qui se posent dans ce secteur important.
Votre budget reflète, à mon sens, le manque de cohérence de la politique menée depuis quelque temps. Malgré cette forte hausse en valeur absolue, il demeure extrêmement faible au regard du poids économique du tourisme, qu'illustrent quelques chiffres.
La France conserve son titre de première destination touristique mondiale avec près de 67 millions de visiteurs en 1997. La consommation touristique représente 7 % du PIB.
Le chiffre d'affaires des entreprises du secteur est supérieur à 300 milliards de francs.
Ce secteur représente en outre 750 000 emplois permanents et près d'un million d'emplois indirects.
Un tel potentiel devrait donc être amplement exploité. Mais un budget de 372 millions de francs ne le permet pas, madame la secrétaire d'Etat.
De plus, si l'on considère les trois dernières années, le budget que vous nous soumettez aujourd'hui n'affiche plus une hausse de 7 % : il accuse une baisse nominale de 5 %.
Enfin, si on le compare à celui de 1998, un certain manque de cohérence dans la politique menée apparaît clairement.
En effet, le tourisme est présenté comme le troisième budget en termes de progression avec un rythme trois fois plus élevé que celui du budget général. Or, l'année dernière, il était non seulement le plus faible mais également celui qui subissait la plus forte baisse.
Et c'était sans compter les annulations de crédits survenues en janvier, pour un montant de 6,85 millions de francs, qui ont réduit ce budget à la portion congrue.
Le détail des crédits nous interpelle. Je prendrai quatre exemples flagrants.
Concernant l'AFIT, l'Agence française de l'ingénierie touristique, cela a déjà été souligné, les crédits augmentent de 7 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1998 et de 14,29 % par rapport aux crédits de 1998, du fait des annulations survenues en cours d'année. Malheureusement, cette hausse intervient après plusieurs années de restrictions budgétaires qui ont conduit cet organisme à puiser dans ses réserves à hauteur de 2 millions de francs pour maintenir son niveau d'activité. La hausse de cette année permet donc à peine de rattraper le retard accumulé.
Le même constat peut être formulé pour Maison de la France, qui voit sa dotation augmenter de 23,41 % par rapport à 1998. Cette augmentation permet l'ouverture de deux nouveaux bureaux en Chine et à Varsovie mais survient, à ma connaissance, après la fermeture de quatre autres représentations ; on ne fait que déshabiller Pierre pour habiller Paul !
Par conséquent, que ce soit pour l'AFIT ou pour Maison de la France, les deux fers de lance de notre politique de développement touristique, la situation est alarmante : faute de garanties et de stabilité budgétaire, ces deux organismes, qui ont besoin d'une visibilité à long terme, ne peuvent assumer correctement leurs missions. Leur personnel ayant trop souvent le sentiment d'être laissé pour compte, il est très démotivé, voire découragé.
Ce sentiment de découragement est également partagé par les agents des différentes délégations régionales du tourisme, dont les moyens tant humains que financiers sont largement insuffisants pour faire face à l'accroissement de leurs missions.
En effet, comme l'a souligné le rapporteur de l'Assemblée nationale, une fois déduite la part des loyers et des charges, un tel budget ne laisse disponibles, en moyenne, qu'un peu plus de 100 000 francs pour assurer l'activité annuelle de chaque délégation.
Comment voulez-vous qu'elles remplissent correctement leurs missions et restent les animateurs de l'action touristique régionale ?
Votre budget, madame la secrétaire d'Etat, me semble être le reflet de ce que le Commissariat général du Plan, dans son rapport intitulé Réinventer les vacances, appelle « notre obstination à considérer le tourisme comme une faribole et non comme une activité économique ».
Permettez-moi à présent de souligner les lacunes de la politique conduite en matière d'observation du secteur touristique.
L'observation, tout le monde en convient, constitue un enjeu primordial pour l'ensemble des acteurs du développement touristique, car elle leur donne des outils d'aide à la décision, en décrivant une situation et son évolution, en les incitant à une approche globale de l'activité et à une démarche de marketing.
L'observation constitue la condition sine qua non pour éviter de naviguer à vue.
Or, là encore, vous ne semblez pas mesurer l'importance des enjeux puisque les crédits affectés aux conventions régionales entre Observatoire national et observatoires régionaux du tourisme baissent de 28,4 %, alors qu'ils avaient déjà baissé de 30 % en 1997 au titre de la régulation budgétaire.
Les collectivités locales seront-elles amenées, une fois de plus, à compenser le désengagement de l'Etat ?
En outre, cette baisse est en contradiction avec le projet d'extension de ce réseau à l'ensemble du territoire.
L'observation aurait, enfin, besoin de davantage de moyens pour résoudre les dysfonctionnements qu'elle connaît à l'échelon tant national que local.
Il est primordial de développer nos outils d'analyse prospective, analyse nécessaire pour adapter notre politique du tourisme aux grandes évolutions qui menacent notre position de numéro un mondial.
En effet, si la France détient 10,5 % du marché touristique mondial en termes de visiteurs, elle n'encaisse que 7,5 % des recettes en devises.
Permettez-moi d'attirer votre attention sur deux évolutions alarmantes.
D'une part, nous vivons sur notre réputation de destination du tourisme rural par excellence. Or vous semblez ignorer que les pays du sud de l'Europe développent activement ce type d'activité dans un bâti souvent d'excellente qualité, dans des villages ayant moins subi l'exode rural et avec des fonds FEDER très importants.
Nous nous devons donc d'être vigilants sur ce point afin de préserver nos parts de marché.
Un effort de rénovation du parc immobilier touristique rural ainsi que des établissements de l'hôtellerie-restauration ne devrait-il pas être engagé rapidement et encouragé ?
D'autre part, il convient de prendre garde à un autre phénomène fort inquiétant : l'attrait croissant de nos concitoyens pour les voyages à l'étranger.
En effet, si 73,2 % des Français partent en vacances en France, la croissance du nombre de voyages à l'étranger à titre personnel a été de 14 % entre 1993 et 1995, alors que celle des séjours en France n'a pas atteint 5 %.
La France est devenue une destination chère. Cela est d'autant plus préoccupant que le passage à l'euro va permettre aux vacanciers de comparer plus facilement les prix affichés dans les différents pays de la zone.
Il est donc urgent de mener une politique volontariste de réduction des coûts de notre offre touristique et d'adaptation à la demande. Un moyen simple, et susceptible de recueillir l'unanimité, consisterait à réduire la TVA à 5,5 % dans la restauration ; j'ai déposé un amendement dans ce sens lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances. Mais, sur ce point, comme vos prédécesseurs, vous semblez impuissante ou insuffisamment motivée pour défendre nos intérêts face à Bruxelles.
Mme le rapporteur spécial a bien voulu évoquer l'Alsace, région frontalière adossée à la Forêt noire. Les professionnels alsaciens du tourisme peuvent mieux que ceux d'autres régions témoigner de l'effort considérable consenti par nos voisins en faveur des équipements touristiques.
Pour terminer, je souhaiterais attirer votre attention, madame la secrétaire d'Etat, sur l'emploi et la formation professionnelle.
Le tourisme est l'un des rares secteurs dans lesquels les perspectives en matière d'emploi sont plus qu'encourageantes. Il crée en effet 12 000 emplois par an et pourrait en créer 30 000.
Pour favoriser les embauches, il convient, à mon sens, d'agir sur trois leviers.
Premièrement, on peut revoir l'abaissement des charges pesant sur les salaires et améliorer la flexibilité.
Deuxièmement, on peut agir sur le travail clandestin, qui est important dans l'hôtellerie-restauration du fait du caractère saisonnier des activités.
J'ai déposé un amendement, lors de la discussion du projet de loi portant diverses mesures d'ordre économique et financier en mai dernier, qui visait à étendre le principe du titre « emploi saisonnier agricole » à d'autres secteurs tels que le BTP ou l'hôtellerie-restauration.
Un tel outil permettrait non seulement de simplifier l'établissement du bulletin de paie et de déclaration de sécurité sociale mais aussi de remplir les formalités requises par le code du travail.
Votre collègue Mme Aubry m'a donné raison et m'a dit qu'elle y travaillerait. Pourriez-vous nous informer sur l'état d'avancement de ce dossier important, voire essentiel pour la profession ?
Le dernier levier sur lequel il me paraît important de jouer pour favoriser la création d'emplois dans le secteur touristique a trait à la formation professionnelle. Car, s'il est important de « légaliser » les emplois occasionnels, il est impératif de pérenniser et de professionnaliser les emplois existants afin d'améliorer la qualité de l'accueil.
La formation constitue le principal moyen pour y parvenir. Or, là encore, les crédits pour 1999 sont en baisse de 2,7 %, ce qui est paradoxal à un moment où votre département ministériel, madame le secrétaire d'Etat, signe des contrats emplois-jeunes qui comprennent un volet formation et doivent être pérennisés à l'issue des cinq ans.
Par ailleurs, il est urgent de mettre l'accent sur la formation professionnelle pour soutenir les efforts produits par les collectivités locales. Celles-ci éprouvent, en effet, des difficultés pour recruter des animateurs touristiques qualifiés parmi les fonctionnaires territoriaux, faute de formation suffisamment solide sur ces questions.
Or le recours aux contractuels est contingenté et limité du fait de la faiblesse des moyens dont elles disposent. Ne conviendrait-il pas, madame la secrétaire d'Etat, de faire un effort sur ce point ?
Pour conclure, afin de vous encourager à dégager plus de moyens l'année prochaine pour assurer la pérennité de votre politique de développement touristique, encore beaucoup trop timide, je voterai, madame la secrétaire d'Etat, les crédits de votre ministère. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Piras.
M. Bernard Piras. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'interviens au nom de mon collègue Jean Besson, qui ne peut être présent...
M. le président. Mon cher collègue, excusez-moi de vous interrompre, mais on ne peut pas intervenir au nom de quelqu'un d'autre.
M. Bernard Piras. J'interviendrai donc en mon nom propre, monsieur le président.
Madame le secrétaire d'Etat, en 1998, vous avez mis un terme à cette période noire ayant affecté votre département ministériel de 1993 à 1997, marquée par une baisse de 25 % des crédits. Cette baisse traduisait un désintérêt incompréhensible et un manque d'imagination des pouvoirs public à l'égard d'un secteur créateur de valeur ajoutée et levier de l'aménagement du territoire.
L'année dernière, j'avais qualifié votre budget de « budget de transition dans lequel je vois poindre de nouvelles priorités et des infléchissements positifs ».
Je suis heureux de constater que les infléchissements détectés l'année dernière se traduisent aujourd'hui par des propositions volontaires, parfaitement ciblées. Le tourisme acquiert un souffle nouveau.
Après mon collègue Marcel Bony, je souhaite souligner trois aspects très positifs de ce projet de budget et formuler deux souhaits.
Je me réjouis, tout d'abord, de l'augmentation très importante des dotations à la Maison de la France - près de 25 % - celle-ci portant essentiellement sur les actions de promotion qui concernent la conquête des marchés extérieurs : plus 40 %. Les moyens d'action des services français du tourisme à l'étranger seront renforcés et nous pourrons affermir la présence de la France dans des zones géographiques porteuses en Europe et dans le monde.
La deuxième orientation très positive est l'affirmation d'un « droit aux vacances pour tous » pour nos concitoyens les plus défavorisés.
Les associations de tourisme social, chef de voûte du tourisme pour tous, bénéficient d'un effort budgétaire significatif dans le cadre de contrats d'objectifs.
Il s'agit là d'une excellente méthode pour finaliser le partenariat vers l'efficacité et l'offre d'un véritable produit touristique conservant sa vocation sociale, mais adapté aux attentes de la clientèle. Trop souvent, les pouvoirs publics se sont contentés d'un saupoudrage de subventions d'équilibre, peu motivantes pour le secteur associatif et, en définitive, peu efficaces.
Outre le renforcement de la cohésion nationale, ces mesures vont également renforcer la demande touristique intérieure.
La troisième orientation positive est votre démarche « qualité et professionnalisme », qui est le véritable fil conducteur de vos politiques d'intervention et qui est présente dans vos actions de partenariat avec le tourisme social, je viens de le dire.
Les dotations de l'Agence française de l'ingénierie touristique, qui joue un rôle majeur en matière de valorisation de l'offre, enregistrent une hausse de 14,30 %.
Je souhaite formuler maintenant deux souhaits :
En premier lieu, j'évoquerai les moyens d'action de votre secrétariat d'Etat. Vous avez stoppé l'érosion des effectifs de votre administration centrale après trois années de réductions. Vous augmentez les moyens des délégations régionales du tourisme de 500 000 francs et vous renforcez la qualification de leurs personnels.
Ces initiatives vont dans le bon sens et il vous est certainement difficile de faire plus cette année dans la mesure où vous privilégiez les politiques d'intervention. Cependant, il faudrait envisager, dans le budget pour 2000, un renforcement des moyens. C'est indispensable pour avoir une connaissance sans cesse actualisée des évolutions des comportements touristiques, des clientèles et des produits.
En second lieu, je tiens à exprimer le voeu que le tourisme ait toute sa place dans le prochain contrat de plan et la future loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire. Les volets « Tourisme » des contrats de plan Etat-régions doivent promouvoir des accueils touristiques diversifiés - petits hôtels, campings - pouvant s'appuyer sur la politique d'aménagement du territoire, notamment sur la définition des pays. La politique du tourisme doit prendre en compte tous les acteurs économiques et intégrer une véritable politique de la qualité incluant les préoccupations environnementales.
En conclusion, je l'ai largement souligné dans mon intervention, l'augmentation significative du budget du tourisme, le volontarisme de vos propositions, l'élan bien ciblé insufflé à vos politiques d'intervention sont le signe manifeste de votre volonté et de celle du Gouvernement de mettre en oeuvre une nouvelle politique touristique ambitieuse, plus proche des réalités du terrain, soucieuse de promouvoir une offre de qualité et d'accueillir une clientèle diversifiée. C'est pourquoi, madame le secrétaire d'Etat, le groupe socialiste votera ce projet de budget avec beaucoup de conviction.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, tout d'abord, permettez-moi de remercier Mme le rapporteur spécial de la commission des finances et M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan de la qualité de leurs rapports.
Je souhaite également remercier les orateurs du soutien qu'ils ont exprimé, en général, en faveur d'une meilleure prise en compte de l'économie touristique dans notre économie nationale.
Vous le savez, cette activité génère, chaque année, quelque 720 milliards de francs de chiffre d'affaires. Elle rapporte près de 165 milliards de devises étrangères et, avec un solde de plus de 66 milliards de francs - c'est-à-dire la moitié de la facture énergétique française, elle se positionne comme le premier poste excédentaire, loin devant l'automobile et l'agro-alimentaire.
Très longtemps pourtant - je n'ose pas dire « trop longtemps » - l'Etat a délaissé ce secteur, le raccrochant tour à tour, sans véritable stratégie, à l'industrie, au commerce extérieur, à l'équipement, à la jeunesse et aux sports, à la culture ou à l'environnement... La conséquence de ce désintérêt a été, vous le savez, qu'en cinq ans son budget a diminué d'un quart, certains considérant que l'économie touristique, à l'inverse de toutes les autres, pouvait se développer toute seule, sans soutien ni cohérence particulière.
Telle n'est pas ma conviction, monsieur Plasait. Sans une intervention publique forte, il n'y a pas de promotion de l'image de la France - de toute la France - dans le monde. Il n'y a pas de développement harmonieux du territoire. Il n'y a pas de vision à long terme.
Dès ma prise de fonctions, je me suis donc engagée à renforcer l'intervention de l'Etat dans le domaine du tourisme pour redonner les impulsions nécessaires à son développement, fédérer les actions et faire en sorte que ce secteur soit enfin perçu comme un secteur d'avenir, capable, notamment, d'apporter des réponses au grave problème du chômage qui nous préoccupe tous et que le Gouvernement a inscrit en tête de ses priorités.
En effet, si le tourisme concourt à l'épanouissement de la personne humaine en favorisant la découverte d'autres peuples et d'autres cultures, il est aussi un indiscutable facteur de croissance et constitue, surtout, un formidable réservoir d'emplois.
Le triplement annoncé des flux touristiques mondiaux, dans les vingt prochaines années, nous ouvre d'immenses possibilités, que vient encore confirmer un rapport remis tout récemment à la Commission de Bruxelles. Un groupe d'experts internationaux a ainsi chiffré entre deux et trois millions le nombre d'emplois supplémentaires qu'il nous faudra créer sur dix ans, en Europe, pour faire face à l'augmentation de touristes.
Vous vous doutez bien que je n'imagine pas une seule seconde que la France, première destination touristique mondiale, ne bénéficie pas pleinement de cette perspective de croissance.
Nous devons saisir ensemble la chance qui nous est donnée d'offrir à la jeunesse la perspective de nouveaux débouchés professionnels et à tous nos concitoyens celle de mieux vivre dans notre société. C'est ce à quoi je m'attache en m'engageant dans le développement d'un tourisme durable, respectueux de l'environnement, des traditions, des cultures et des hommes.
Pour rendre la France capable de répondre à ces défis, il s'agissait, en premier lieu, d'endiguer l'hémorragie dont était victime le budget du tourisme.
Comme vous l'avez souligné, monsieur Ginésy, c'est maintenant chose faite, puisque avec 372 millions de francs en crédits de paiement et 45 millions de francs en autorisations de programme le budget que j'ai le plaisir de vous présenter aujourd'hui est en augmentation de 7,18 %.
Bien sûr, il est clair que cela ne constitue qu'une première étape : l'objectif final est bien de retrouver les moyens dont disposait le ministère en 1992.
Alors que nous allons entrer, d'ici à quelques semaines, dans la dernière année du millénaire, une année charnière durant laquelle nous serons, notamment, amenés à définir de nouveaux objectifs pour l'aménagement du territoire, au travers des contrats de plan, je veux vous dire ici combien cette année sera essentielle pour préparer notre pays à répondre aux enjeux de ce nouvel âge du tourisme qui se dessine devant nous. En effet, il n'y a pas de temps à perdre pour améliorer la qualité et la diversité de notre offre touristique, afin de mieux répondre aux besoins et aux aspirations de nos concitoyens et de nos visiteurs étrangers, d'autant que la concurrence est vive, comme vous l'avez rappelé.
Il n'y a donc pas non plus de temps à perdre pour contribuer à faire progresser la fréquentation touristique dans notre pays. Nous avons déjà commencé à le faire cette année. Mais c'est en 1999 qu'un décollage peut s'opérer, car c'est tout de suite qu'il nous faut savoir rebondir sur les retombées extrêmement positives qu'a entraînées, en termes d'image, le succès de la Coupe du monde de football.
Sans attendre, il nous faut conforter, en effet, madame Terrade, partout l'image d'une France des régions plus accueillante et plus dynamique, qui a été celle de la France championne du Mondial. Il faut profiter du fait que cette image est encore dans les esprits pour donner envie aux populations et aux entreprises étrangères de découvrir la richesse de notre pays, en particulier à l'occasion des manifestations prévues autour de l'événement de l'an 2000.
C'est pourquoi une partie importante du budget du tourisme sera affectée aux moyens de promotion et de communication de notre pays à l'étranger, comme vous m'aviez d'ailleurs encouragée à le faire l'an passé.
Ainsi le budget de la Maison de la France passera-t-il de 123 millions à 153 millions de francs, ce qui représente une progression de 23,4 %. Cette dotation nous permettra, monsieur Plasait, de conforter la structure et les moyens d'actions des services français du tourisme à l'étranger. Elle nous permettra aussi de mobiliser plus largement les partenaires professionnels, publics, privés ou associatifs, avec lesquels nous assurons, tout au long de l'année, la présence de la France en Europe et dans le monde.
Le plan stratégique marketing, que vient d'élaborer la Maison de la France, et qui a été présenté aux professionnels et à la presse en octobre dernier, a été bien accueilli par nos partenaires. Ceux-ci sont d'ailleurs nombreux à rejoindre les objectifs stratégiques sur lesquels s'effectuera la conquête de notre marché.
Mais vous le savez, pour moi, favoriser la progression de la fréquentation touristique passe aussi, et d'abord, par le fait d'assurer à tous nos concitoyens le droit aux vacances. C'était, en 1998, l'un des axes importants de ma politique. Cela le demeurera en 1999 avec, notamment, l'élargissement de l'attribution des chèques-vacances aux salariés des petites et moyennes entreprises, qui ne pouvaient, jusqu'à présent, en bénéficier, faute de comité d'entreprise. Sept millions et demi de salariés et leurs familles sont concernés ; constituant la part de la population aux revenus les plus modestes, ils font probablement partie de ces 37 % de Français qui ne partent pas en vacances.
Le projet de loi que j'ai soumis, en ce sens, à l'examen du conseil des ministres, cet été, sera d'ailleurs programmé au calendrier parlementaire pour le premier trimestre 1999. Je compte sur vous pour nous aider à offrir aux Français, le plus vite possible, ce formidable outil d'aide au départ.
Je pense aussi à la campagne annuelle de sensibilisation en faveur de l'accueil des personnes handicapées sur les lieux de vacances, dont la première édition a eu lieu en septembre dernier. Elle a permis une vaste mobilisation des professionnels du tourisme et leur mise en relation avec les associations spécialisées. En 1999, elle sera évidemment reconduite et devrait être largement amplifiée, grâce également à des actions de formation en direction des professionnels.
Au-delà des mesures législatives et réglementaires, notre action en faveur du tourisme pour tous se traduira également par un effort budgétaire important en direction du secteur associatif, afin de permettre aux plus défavorisés de partir en vacances, mais aussi de moderniser les équipements à vocation sociale ou familiale.
Sur les 11 millions de francs affectés, en 1999, au soutien du secteur associatif, soit 4 millions de francs de plus que l'année dernière, 2 millions de francs serviront donc au fonctionnement d'une « bourse solidarité vacances ».
Cette structure aura pour rôle de rapprocher, dans une démarche de solidarité, les professionnels du tourisme, les associations caritatives et les comités de chômeurs, afin de mettre en commun les moyens et les compétences de chacun pour que les plus démunis aient aussi la possibilité de rompre avec le quotidien.
Deux autres millions de francs contribueront, par ailleurs, à financer des actions favorisant les séjours à l'étranger et les échanges bilatéraux pour les jeunes ayant des difficultés sociales.
Les signatures de conventions d'objectifs entre l'Etat et les associations de tourisme seront, quant à elles, poursuivies et financées à concurrence de 7 millions de francs, afin de conforter et de relayer l'action de mon secrétariat d'Etat en faveur de l'insertion sociale des jeunes et des familles en difficulté, mais aussi du développement local, de l'emploi et de la formation.
A ces mesures viendront, par ailleurs, s'ajouter les aides à la pierre du plan « patrimoine », que la circulaire du 25 mars 1998 oriente, notamment, vers une plus grande mixité sociale. En effet, si j'espère, par l'ensemble de ces dispositions, contribuer à développer la fréquentation touristique, je sais que cela ne se fera que si nous parvenons à diversifier et surtout à moderniser partout notre offre touristique.
J'avais, dès mon arrivée, doublé les crédits consacrés à la réhabilitation du parc immobilier du tourisme social et associatif. Pour 1999, cet effort sera maintenu, puisque je me propose d'y affecter 13,9 millions de francs.
Par ailleurs - et M. le rapporteur spécial l'a évoqué - face à l'inquiétude exprimée et alertée par les élus locaux et leurs associations sur la dégradation du parc immobilier de loisirs, j'ai proposé, en liaison avec mon collègue du budget, une mesure fiscale pour inciter les propriétaires à améliorer la qualité et la mise sur le marché de leurs hébergements, en leur permettant de récupérer la TVA sur les travaux qu'ils entreprennent.
Ce nouveau concept du village résidentiel de tourisme consiste à regrouper un minimum de cent lits touristiques, c'est-à-dire à peu près vingt appartements, pour en confier la gestion à un seul et même opérateur, chargé d'assurer la maîtrise des travaux de réhabilitation, l'animation et la commercialisation du lot.
Mais répondre aux attentes et aux besoins de nos concitoyens et des visiteurs étrangers, c'est aussi, et d'abord, tenir compte de ce qui fait la richesse et la spécificité du tourisme dans notre pays. Je veux parler des terrasses des cafés, des hôtels toutes catégories, des grandes brasseries, des tables françaises, cette myriade de petites et moyennes entreprises réparties sur tout le territoire. Il nous faut donc les soutenir, afin qu'elles puissent, elles aussi, se moderniser et être plus performantes économiquement.
J'ai bien conscience des difficultés auxquelles elles sont confrontées. Aujourd'hui, une majorité d'entre elles doit encore faire face à de lourds problèmes, notamment pour résorber leur endettement, alors même qu'elles devraient pouvoir investir pour s'adapter plus efficacement aux nouvelles exigences de la clientèle.
Un certain nombre de dispositions ont déjà été mises en place pour leur venir en aide, comme les prêts bonifiés accordés au secteur de la restauration pour financer ses travaux de mise aux normes.
Je pense bien évidemment aussi au processus de restructuration de la dette des entreprises hôtelières, au travers des crédits SOFARIS, pour lesquels le Gouvernement a déjà débloqué 30 millions de francs, dont les deux tiers seulement ont été utilisés.
C'est pourquoi, pour répondre à votre remarque, monsieur le rapporteur spécial, je crois que l'urgence réside plus dans une meilleure appropriation de cet outil par les professionnels que dans une augmentation des fonds.
Dans l'année qui vient, je peux vous assurer que je ferai mon possible pour que soit accéléré le rythme d'examen des dossiers, afin que de 300 aujourd'hui nous parvenions bientôt à 1 500 dossiers validés.
Afin d'aider les petites et moyennes entreprises, d'autres mesures viendront rapidement conforter ce premier dispositif, notamment en matière de redevance télévisuelle pour l'hôtellerie. Un projet de décret, élaboré avec le ministère de la culture et le secrétariat d'Etat au budget, a d'ailleurs déjà été remis au Premier ministre.
Mais je sais bien, monsieur Ostermann, que cela ne réglera pas tous les problèmes et que, actuellement, dans le secteur des hôtels, cafés et restaurants, nombreux sont ceux qui s'interrogent sur la manière dont pourra être mise en oeuvre la réduction du temps de travail, compte tenu des spécificités de la profession, où les horaires sont souvent aléatoires.
Ce secteur, comme celui du tourisme en général, ne peut cependant pas rester en dehors du mouvement de progrès social. Il en va de la qualité de notre offre touristique, inséparable de la qualité des ressources humaines. Bien entendu, comme je viens de le dire, cette évolution ne pourra se faire qu'en tenant compte des spécificités de la profession. A cet égard, je peux vous dire que des discussions se sont d'ores et déjà engagées en ce sens sous l'égide du ministère de l'emploi et de la solidarité. Il en va aussi de l'image même de l'industrie touristique, qui ne peut que souffrir des conditions de vie et de travail insatisfaisantes pour ses salariés. Mais j'y reviendrai.
Je dirai toutefois un mot du problème de la TVA, qui est, ne nous le cachons pas, d'une grande complexité et qu'il ne serait pas juste de présenter comme le seul frein à l'embauche dans ce secteur.
Même si je suis la première à déplorer que le précédent gouvernement ait augmenté la TVA de deux points,...
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Il faudrait envisager de la baisser !
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Laissez-moi terminer, monsieur le président de la commission des finances.
Même si je déplore l'augmentation de deux points de la TVA décidée par le précédent gouvernement, disais-je, je ne crois pas qu'une baisse intermédiaire constitue le seul levier pour favoriser la création d'emplois. Le problème réside aussi dans le poids des charges sociales. Ce chantier, vous le savez, sera ouvert l'an prochain. Le Premier ministre l'a annoncé, et soyez sûrs que je veillerai à ce que le secteur des hôtels, cafés et restaurants y trouve toute sa place.
S'agissant des baux commerciaux, monsieur Plasait, je rappelle que l'extension de la taxe aux locaux commerciaux a pour objet d'abonder le Fonds d'aménagement pour la région d'Ile-de-France, le FARIF. Celui-ci contribue à l'aménagement équilibré du territoire francilien, en finançant les travaux du plan de déplacements urbains, le développement des transports collectifs et les aménagements liés à la politique de la ville.
Cette taxe touche bien évidemment les entreprises du secteur du tourisme, au premier rang desquelles figurent les hôtels, les cafés et les restaurants. La définition du seuil de 340 mètres carrés a pour effet d'assujettir un peu plus de 1 900 hôtels sur les 2 265 que compte l'Ile-de-France, soit 88 % de son parc hôtelier, et environ 1 500 restaurants sur les 24 000 qu'elle abrite, soit environ 6 %.
Si ce texte doit être amélioré, il me semble qu'une réflexion sur l'adaptation des seuils aux spécificités de la profession pourrait être utilement menée. Pour l'hôtellerie, par exemple, le seuil pourrait être lié au nombre de chambres.
Favoriser un tourisme à visage humain, c'est aussi se donner les moyens de dépasser l'effet de concentration inhérent à cette activité, 80 % des visiteurs se répartissant sur seulement 20 % du territoire. Il faut donc impulser le développement local.
« Mettre en tourisme » de nouveaux espaces sera donc l'une des orientations que je défendrai, monsieur Piras, lorsque nous engagerons les négociations avec les régions, dans le cadre de l'élaboration des futurs contrats de plan.
Ces derniers, vous le savez, jouent un rôle essentiel dans la diversification et l'adaptation de l'offre touristique, dans le fonctionnement des structures en charge de sa gestion et de sa commercialisation, comme dans la mobilisation des fonds structurels européens, bien souvent indispensables au bouclage financier des projets. C'est pourquoi nous leur consacrerons 48,5 millions de francs, soit une augmentation de plus de 6 %.
Parce qu'il est de l'intérêt de tous que ces investissements soient garantis, les porteurs de projet trouveront à leurs côtés la capacité d'expertise de l'Agence française de l'ingénierie touristique, à qui 8 millions de francs seront alloués, soit une augmentation de 14,29 % par rapport au projet de loi de finances pour 1998. Vous savez, monsieur Bony, la part importante que cette agence a prise dans la démarche de modernisation des stations thermales, ce qui devrait apaiser vos inquiétudes.
Par ses compétences et son savoir-faire, cette structure ne peut qu'aider les porteurs de projet à mieux appréhender la viabilité de leur projet et leur permettre de bien cerner la manière de réduire au minimum le risque qu'il y aurait à se lancer dans une entreprise qui ne pourrait être pérennisée et qui ne pourrait assurer à celles et ceux qui y travailleront un emploi durable.
En effet, vous l'avez compris, en favorisant l'augmentation de la fréquentation touristique par une meilleure répartition de cette dernière sur le territoire, mon objectif est de développer harmonieusement un secteur créateur non seulement de richesses, mais aussi et surtout d'emplois.
Ainsi le secrétaire d'Etat au tourisme est-il partie prenante de quatorze accords-cadres nationaux afin d'aboutir à la création de 6 000 emplois-jeunes dans le tourisme. Nous venons d'ailleurs tout juste de franchir le cap des 2 000 emplois-jeunes. Très exactement, au 30 octobre 1998, 2 111 embauches effectives de jeunes étaient répertoriées dans ce secteur et 1 682 conventions signées.
En fait, si le rythme observé depuis plus d'un semestre est maintenu, on peut espérer 3 250 embauches par an, c'est-à-dire quasiment 10 000 en l'espace de trois ans.
Mais, vous le savez, lorsque je parle de l'emploi, je pense surtout à la réflexion et aux moyens que nous engageons pour lutter contre la précarité dans ce secteur. Si l'on veut être à la hauteur des enjeux que j'évoquais tout à l'heure, il faut absolument en finir avec une certaine forme d'amateurisme.
Oui, j'en suis convaincue, nous ne parviendrons à fidéliser durablement les touristes qu'en leur offrant des prestations de qualité. Comme vous, madame Beaudeau, je crois que la qualité de la prestation, du service et de l'accueil est indissociable de la qualité des ressources humaines, donc de la formation des hommes et des femmes qui oeuvrent dans le tourisme.
J'ajouterai qu'il nous faut d'autant plus travailler à la pérennisation et à la professionnalisation des emplois dans ce secteur que nous souhaitons recruter des milliers de jeunes. Parce qu'elle est une des réponses possibles, il nous faut favoriser la plurisaisonnalité des activités et des hébergements touristiques.
Cela dit, pour combattre la précarité, d'autres pistes que la plurisaisonnalité méritent également d'être explorées comme celles des contrats multi-employeurs ou de la formation professionnelle continue.
C'est pourquoi, comme M. Bony l'a rappelé, j'ai chargé M. Anicet Le Pors, ancien ministre et conseiller d'Etat, d'une mission indépendante d'élaboration de propositions concrètes, pour améliorer la situation professionnelle des salariés saisonniers du tourisme. Son rapport final me sera remis en fin d'année.
Par ailleurs, nous poursuivrons nos efforts pour une meilleure utilisation des fonds de la formation professionnelle continue. Etat, régions, chambres de commerce, l'ensemble des acteurs doivent se mobiliser. Ce sera là aussi, pour moi, l'un des principaux objectifs dans l'élaboration des contrats de plan.
Pour mettre l'ensemble de cette politique en oeuvre, je dispose d'une administration centrale et du réseau des délégations régionales au tourisme, qui, comme vous le savez, jouent un rôle essentiel, notamment auprès des collectivités territoriales.
Contrairement aux trois années précédentes, les effectifs de l'administration centrale seront maintenus.
Quant aux délégations régionales au tourisme, elles seront renforcées par une augmentation de leurs crédits de fonctionnement d'un demi-million de francs et par une mise à disposition de personnels qualifiés en provenance du ministère de l'équipement, des transports et du logement.
J'envisage, par ailleurs, de créer, au sein de la direction du tourisme, un bureau emploi-formation plus particulièrement attaché à suivre les questions liées au tourisme social et à la réduction du temps de travail, ainsi qu'une cellule prospective de réflexion et de recherche sur les potentialités du secteur.
Si nous nous accordons tous à constater que les comportements des touristes changent, il nous faut mieux les connaître et les analyser. Le suivi des flux, des attentes et des potentiels est fondamental pour anticiper sur les évolutions de la demande et mener une politique de développement durable et cohérente, en phase avec la réalité.
C'est pourquoi j'ai également souhaité que, dans ce projet de budget pour 1999, un effort particulier soit porté sur les moyens de l'observation économique.
Nous allons ainsi augmenter les moyens humains mis à la disposition de l'Observatoire national du tourisme et nous engager activement dans le développement d'un partenariat étroit avec les autres services de l'Etat en charge de l'observation économique, tels que l'INSEE ou la Banque de France.
En rendant plus performante cette observation et en élargissant le champ de ses investigations, je crois, madame Beaudeau, et c'est aussi le souci exprimé par M. Ostermann, que cela nous permettra de mieux comprendre la différence de résultats, en termes de recettes, avec, notamment, nos principaux concurrents européens. Je souscris d'ailleurs à votre proposition, madame le rapporteur spécial, de réaliser une étude sur ce thème.
Je sais qu'il nous reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour permettre au tourisme d'être considéré comme une activité économique à part entière, comme un outil d'aménagement du territoire que l'on n'oppose plus au développement industriel ou agricole.
Je sais aussi qu'il y a encore beaucoup de travail à faire pour adapter les textes régissant l'organisation territoriale et les professions touristiques. J'étudie d'ailleurs la possibilité de mettre en chantier une nouvelle loi d'organisation du tourisme français rassemblant l'ensemble des problématiques posées. Elle permettra, je crois, monsieur Ginésy, de répondre fondamentalement au lancinant problème, que vous avez évoqué, du paracommercialisme.
Je suis convaincue que nous sommes sur la bonne voie, celle qui passe par une prise en compte des réalités et s'attache au partenariat avec les différents ministères, les collectivités territoriales et locales, et l'ensemble de la grande famille du tourisme.
Aussi, je souhaiterais que l'augmentation de ce budget soit ressentie comme un signe fort de ma volonté d'aller plus loin dans la mise en oeuvre d'une politique touristique ambitieuse, plus soucieuse des attentes de la population et capable de mettre la France au premier rang non plus seulement des destinations touristiques, mais aussi des pays qui, en matière de qualité, innovent le plus aujourd'hui, une politique où l'Etat joue pleinement son rôle en assurant les cohérences et les fédérations indispensables, une politique qui réponde, enfin, au légitime droit aux vacances pour tous et aux espoirs d'une jeunesse en mal d'emploi. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. Charles Ginésy, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Charles Ginésy, rapporteur pour avis. Madame le secrétaire d'Etat, je souhaiterais simplement savoir ce qu'il va advenir du projet de loi visant à étendre le champ d'application du chèque-vacances - j'ai évoqué ce problème dans mon rapport - qui a été adopté par le conseil des ministres le 27 août dernier. En effet, le Gouvernement n'a pas inscrit ce texte à l'ordre du jour des assemblées. Nous craignons ainsi de perdre deux ans au détriment des salariés des PME, qui sont très nombreux.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Je l'ai souligné dans mon intervention, ce projet de loi sera inscrit à l'ordre du jour du Parlement au cours du premier semestre de 1999. Nous espérons qu'il pourra être adopté à la fin du mois de juin, ce qui nous permettra de le mettre en oeuvre dès le second semestre de 1999 pour que les salariés des petites et moyennes entreprises puissent disposer de chèques-vacances dès l'an 2000.
M. le président. Je rappelle au Sénat que les crédits concernant le tourisme inscrits à la ligne « Equipement, transports et logement » seront mis aux voix le dimanche 6 décembre, à la suite de l'examen des crédits affectés à la mer.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 94 188 268 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 2 699 901 146 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 7 178 358 000 francs.
« Crédits de paiement : 3 690 812 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 14 668 031 000 francs.
« Crédits de paiement : 6 523 104 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant le tourisme.
Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures cinq, est reprise à quinze heures quinze, sous la présidence de M. Jean-Claude Gaudin.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN,
vice-président

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 1999, adopté par l'Assemblée nationale.

I. - SERVICES COMMUNS

II. - URBANISME ET LOGEMENT

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant l'équipement, les transports et le logement : I. - Services communs et II. - Urbanisme et logement.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je vous présenterai successivement deux rapports, le premier consacré aux services communs, le second à l'urbanisme et au logement.
J'ajouterai qu'à ma place, l'année dernière, se trouvait notre ancien collègue Henri Collard, qui a effectué un excellent travail dans le domaine du logement et à qui je voudrais rendre hommage en commençant ce rapport.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. C'est très délicat de votre part !
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial. Les crédits consacrés aux services communs du ministère de l'équipement, des transports et du logement, c'est-à-dire, pour l'essentiel, les crédits de personnel et de fonctionnement de ce ministère, s'élèvent à 23,2 milliards de francs en 1999, soit une progression de 2,6 % par rapport à 1998.
Il faut savoir que cette présentation est nouvelle : l'an dernier, les crédits des services communs étaient présentés avec ceux de l'urbanisme. Cette présentation n'avait pas une grande cohérence et l'on ne peut que se réjouir que les crédits destinés à l'urbanisme soient rattachés aux crédits du logement pour 1999.
Cette évolution n'est pas seulement comptable, puisqu'elle fait suite à la fusion, par décret du 6 mars 1998, de la direction de l'aménagement foncier et de l'urbanisme et de la direction de l'habitat et de la construction, fusion préconisée par le rapport de M. Gilbert Santel.
Le présent budget est donc constitué de dépenses ordinaires à 99 %.
A structure constante, les moyens des services progressent de 2,7 %, pour s'établir à 22,9 milliards de francs en 1999.
Cette progression globale se décompose en une progression importante de 3,5 % des dépenses de personnel - rémunérations et charges sociales - et en une progression des dépenses de pension de 1,8 %, pour un total atteignant 20,6 milliards de francs.
Par ailleurs, on constate une diminution des dépenses de fonctionnement de 2 %, qui s'établissent à 2,3 milliards de francs.
Je ne présenterai que quelques observations sur ce rapport.
La première observation porte sur l'effort de compression des effectifs. En 1998, le ministère avait procédé à la suppression de 1 000 postes, dont 535 emplois d'agents d'exploitation des travaux publics de l'Etat et 220 postes d'ouvriers des parcs et ateliers. En 1999, l'effort de compression des effectifs sera réduit de moitié : 490 emplois seront supprimés, dont 170 postes d'agents d'exploitation des travaux publics de l'Etat et 173 postes d'adjoint administratif des services déconcentrés.
Il faut noter que la réduction des suppressions d'emplois pour 1999 est justifiée par le Gouvernement par la nécessité de préserver le secteur de l'entretien et de l'exploitation des routes, sur lequel a porté la majeure partie des réductions d'emplois les années précédentes, et ce en faveur des collectivités locales.
Toutefois, il faut savoir que les suppressions d'emplois ouvrent droit, pour les collectivités locales, à une compensation financière intégrée dans la dotation globale de décentralisation.
Ma deuxième observation porte sur l'effort d'adaptation des emplois.
L'effort d'adaptation des services déconcentrés se manifeste par un renforcement du potentiel technique du ministère, avec la création de 51 postes d'ingénieur des travaux publics de l'Etat et de 45 postes d'assistant technique.
Le renforcement des moyens de contrôle de l'application de la réglementation dans les transports terrestres, amorcé en 1998, est poursuivi en 1999, avec la création de 23 postes supplémentaires de contrôleur des transports terrestres et de 10 postes de contrôleur du travail et de la main-d'oeuvre. Compte tenu des besoins en ce domaine, il faut saluer l'effort réalisé depuis deux ans, mais souligner combien il est encore loin de répondre aux exigences de contrôle de la réglementation du travail.
La troisième observation porte sur la réduction programmée des crédits de fonctionnement.
Dans ce domaine, le budget du ministère de l'équipement enregistre une diminution de 2 %, conforme à l'application du contrat triennal conclu avec le ministère de l'économie et des finances.
L'application régulière de ce contrat ne peut qu'être saluée, car les mesures d'économies porteront essentiellement sur des dépenses immobilières. Il convient d'ailleurs que ce contrat soit renouvelé pour les années à venir.
En conclusion, la commission des finances vous propose d'adopter les crédits des services communs, sous réserve d'un amendement réduisant l'augmentation du titre III, amendement que je vous présenterai tout à l'heure.
J'en arrive à la partie de mon rapport consacrée à l'urbanisme et au logement.
Les crédits demandés pour le budget de l'urbanisme et du logement atteignent, pour 1999, hors effet des rebudgétisations, 41,4 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement, soit une hausse de 3,4 % par rapport au budget voté en 1998.
Les dépenses ordinaires, qui représentent 78 % des crédits du logement, continuent d'augmenter très sensiblement.
Les interventions constituent l'essentiel de ces dépenses, les moyens de fonctionnement du budget du logement étant assurés par la section « services communs » que je viens de présenter.
Les dépenses en capital représentent 6,4 milliards de francs, hors effet de la rebudgétisation des crédits pour le prêt à taux zéro.
J'en viens tout de suite aux éléments essentiels de ce budget.
J'observe tout d'abord que ce budget est un budget de continuité.
Dans le projet de loi de finances pour 1999, le budget du logement et de l'urbanisme progressera de 3,4 % à structure constante. Cependant, si l'on tient compte des comptes spéciaux du Trésor, notamment du fonds pour l'accession à la propriété et du fonds pour l'aménagement de l'Ile-de-France, la progression est plus modeste, soit 2,2 %.
Le projet de budget apporte deux nouveautés intéressantes : la prise en compte, d'un point de vue budgétaire, de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, et une amorce de réintégration dans le budget de l'Etat du financement du prêt à taux zéro.
Je commencerai donc par ces deux points, qui constituent de réels motifs de satisfaction, monsieur le secrétaire d'Etat. En effet, les dispositions de loi sur les exclusions sont financées pour 1999. La loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions a comporté un volet logement important modifiant les dispositifs existants, notamment ceux qui ont été mis en place par la loi du 31 mai 1990 et qui visent à appliquer le droit au logement.
Parmi les dispositions qui auront un impact budgétaire, je note que l'ouverture des aides des fonds de solidarité pour le logement, les FSL, aux sous-locataires, ainsi que l'interdiction de toute restriction d'accès aux fonds et la limitation des critères d'éligibilité aux seuls critères de niveau de ressources seront accompagnées d'une réévaluation importante des subventions budgétaires.
Pour 1999, les dotations accordés aux FSL s'établiront à 490 millions de francs, en progression de 44 %. En tenant compte de la participation obligatoire des départements, au moins égale à celle de l'Etat, et des participations volontaires, les moyens dont disposeront les FSL s'élèveront donc à peu près à 1,2 milliard de francs, ce qui semble constituer une dotation satisfaisante pour qu'ils puissent mener à bien leurs actions.
Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'espère qu'avec cette dotation importante nous ne verrons plus des personnes en grande difficulté mises à la porte de leur logement parce qu'elles sont dans l'incapacité absolue de payer leur loyer ! Dans un pays développé comme le nôtre, à l'aube du troisième millénaire, ces expulsions sont inadmissibles et intolérables.
Par ailleurs, sur la ligne consacrée aux fonds de solidarité logement, 60 millions de francs de crédits nouveaux sont prévus pour les associations qui louent à des personnes défavorisées.
D'autre part, les autres mesures concernant l'aide au logement temporaire, l'ALT seront financées à hauteur de 40 millions de francs.
Enfin, la lutte contre le saturnisme bénéficiera d'une dotation supplémentaire de 50 millions de francs en 1999.
Mais vous n'êtes pas sans avoir, monsieur le secrétaire d'Etat, que la réhabilitation du logement privé est également un des moyens de lutter contre l'exclusion.
Le parc de logements privés est passé d'une phase de construction à une phase de rénovation.
S'agissant des moyens budgétaires, je me félicite que le projet de budget pour 1999 confirme les augmentations de crédits qui avaient été décidées pour 1998, notamment pour la prime à l'amélioration de l'habitat, la PAH, destinée à la réhabilitation du parc privé et qui sera maintenue à 800 millions de francs, et pour la subvention à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, en stabilité à 2,2 milliards de francs. Cette agence joue un rôle essentiel, qu'il faut consolider. Je pense notamment aux opérations programmées d'amélioration de l'habitat, les OPAH, qui sont un excellent moyen de remettre en location des logements vacants, avec le concours des collectivités territoriales.
Il convient cependant d'aller plus loin. La solution pourrait venir du domaine fiscal : nous venons d'adopter une réduction de taux de TVA pour les logements conventionnés à l'aide personnalisée au logement et bénéficiant de l'aide de l'ANAH. Pourquoi se limiter à ces quelque 10 000 logements ?
Concernant le financement du prêt à taux zéro, je tiens à souligner monsieur le secrétaire d'Etat, que la commission des finances tout entière salue la convention que vous avez signée le 3 août dernier avec l'Union d'économie sociale du logement.
Notre commission des finances s'est régulièrement opposée aux prélèvements « autoritaires » qui démantèlent le 1 % logement.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Absolument !
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial. Le 1 % logement remplit correctement ses objectifs et aide au « bouclage » de nombreux projets immobiliers, notamment dans le logement social.
La convention du 17 novembre 1996, aux termes de laquelle les collecteurs du 1 % logement finançaient une partie du prêt à taux zéro - à hauteur de 7 milliards de francs en 1997 et 1998 - arrivait à expiration fin 1998 sans qu'aucune solution ne se dessine.
Tout le monde sait que le ministère des finances préconisait une solution radicale, consistant à fiscaliser la collecte du 1 % logement, c'est-à-dire que la contribution des entreprises au logement de leurs salariés devenait une taxe et que le paritarisme était abandonné.
Vous êtes parvenu, monsieur le secrétaire d'Etat, à faire valoir votre point de vue et à signer cette convention qui prévoit un prélèvement décroissant sur le 1 % logement, de 6,4 milliards de francs aujourd'hui jusqu'à extinction en 2003.
De plus, le projet de loi de finances pour 1999 prévoit l'inscription de la moitié des crédits pour le prêt à taux zéro sur le budget du logement.
Toutefois, cette convention n'aura d'effet que si l'Etat parvient à dégager 15 milliards de francs sur la période quinquennale considérée. Il s'agit d'un effort très important, et le Sénat saura être vigilant sur ce point.
Il ne faudrait pas, par exemple, restreindre la portée de ce prêt réglementé, comme cela a déjà été fait en 1997 et en 1998, le prêt à taux zéro étant désormais réservé aux primo-accédants.
Enfin, nous nous félicitons qu'un dispositif de sécurisation des accédants à la propriété soit mis en oeuvre. Ce dispositif était considéré, en effet, par le précédent ministre du logement comme le complément indispensable de sa réforme compte tenu de la fragilité financière des ménages susceptibles de postuler à ce prêt à taux zéro.
A cet égard, l'exemple des prêts d'accession à la propriété, les PAP, est éclairant : les difficultés rencontrées par les ménages titulaires d'un PAP à taux fixe et annuités progressives consenti jusqu'en 1991 ont nécessité de procéder à un réaménagement des conditions financières des prêts. Ce réaménagement s'est traduit par une réduction du taux annuel de progressivité des prêts, pour un coût total de 14 milliards de francs - ce qui n'est pas rien ! - financé intégralement par l'Etat sur une période de quinze ans.
Nous ne pouvons donc que nous féliciter de ce nouveau dispositif, monsieur le secrétaire d'Etat, qui évitera des situations de surendettement désastreuses. Cependant, il est sans doute encore trop modeste : la séparation suivant que les personnes appartiennent ou non à une entreprise cotisant au 1 % logement, le report de mensualité limité à 50 % sur douze mois, alors que les ménages peuvent être confrontés à des situations durables de chômage, tout cela fait que vous aurez certainement à coeur d'améliorer ce dispositif.
J'en viens maintenant aux deux éléments qui posent encore problème : l'augmentation mécanique des aides personnelles au logement et les insuffisances de la politique du logement social.
Concernant les aides personnelles au logement, le projet de budget pour 1999 prévoit une dotation de 34,6 milliards de francs, en hausse de 4,5 % par rapport à 1998, afin de tenir compte de l'application en année pleine de la mesure de revalorisation décidée le 1er juillet 1998. Par ailleurs, ces crédits devraient permettre une actualisation des aides au 1er juillet 1999, pour environ 500 millions de francs.
Je souhaite qu'au-delà de cette augmentation mécanique la réflexion se poursuive afin d'harmoniser les différentes aides personnelles.
En 1998, un groupe de travail avait été mis en place pour accélérer l'harmonisation des barèmes. Et M. le Premier ministre a annoncé lors de la conférence de la famille, le 12 juin 1998, un alignement des loyers plafonds de l'aide personnalisée au logement et de l'allocation de logement social alors qu'actuellement des écarts de 4 % à 50 % subsistent, selon la zone géographique et la taille de la famille.
Ces harmonisations sont bienvenues, mais elles doivent être rapides, compte tenu de l'enjeu.
Par ailleurs, je note que, contrairement aux années précédentes, aucune révision des services votés n'est entreprise.
Il est vrai que les efforts réalisés par les précédents gouvernements pour contenir l'évolution rapide des aides personnelles n'ont pas réussi, c'est le moins que l'on puisse dire. Cependant, il est impératif de mettre en place une réforme des aides personnelles, de manière qu'elles soient réellement consacrées aux personnes qui ont besoin d'une aide à la location : la conjoncture économique actuelle et les propositions consistant à créer un statut social de l'étudiant sont autant d'incitations à la réflexion sur l'identité des bénéficiaires des aides personnelles.
En second lieu, je note, monsieur le secrétaire d'Etat, que votre projet de budget du logement pour 1999 comporte un point faible persistant, à savoir l'aide au logement locatif social.
En 1998, un effort très substantiel a pourtant été réalisé en faveur du logement social, notamment en termes de réhabilitation.
L'application du taux réduit de la TVA sur les travaux effectués sur les logements sociaux a constitué un avantage fiscal pour ces organismes, en réduisant le coût des réhabilitations subventionnées ou de celles qui sont réalisées sur fonds propres.
Par ailleurs, en 1998, le Gouvernement avait choisi d'accroître les moyens consacrés aux prêts locatifs aidés, les PLA, et de diversifier l'offre de PLA très sociaux.
L'attrait de ces logements destinés à accueillir des ménages dont les revenus sont inférieurs à 60 % des ressources d'un ménage pouvant bénéficier d'un logement PLA était en effet considéré comme insuffisant.
Or il apparaît aujourd'hui que le programme annoncé de création de 80 000 PLA ne sera pas réalisé. Je note même que la situation s'aggrave. En effet, seulement 13 000 PLA ont obtenu l'agrément en septembre 1998, contre 20 000 à la même époque en 1997 et 25 000 en 1996.
Le problème de l'insuffisance des produits PLA réside moins dans une insuffisance des dotations que dans la faiblesse de leur utilisation par les bailleurs sociaux, qui souhaitent construire moins.
Deux éléments pourraient permettre une légère amélioration, mais sans résoudre le problème de fond.
D'une part, le niveau des taux d'intérêt réels des crédits au logement social, considéré comme trop élevé, a diminué, en raison de l'abaissement d'un demi-point du taux du livret A. Il y aura donc une réduction du coût de construction des logements sociaux.
Le relèvement des plafonds de ressources pour l'accès aux logements sociaux à compter du 1er juillet 1998 devrait permettre d'élargir la demande solvable, en facilitant le lancement de nouveaux projets.
Dans ces conditions, le maintien des dotations aux prêts locatifs aidés pour un programme de 80 000 logements, alors que les crédits sont loin d'être consommés, ne semble pas correspondre à la situation réelle de ce type de produit.
Il est urgent qu'une réflexion d'ensemble s'engage sur les aides au logement locatif social, afin de les adapter aux besoins.
On constate, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'un certain nombre de logements ne sont pas occupés un peu partout en France. Les demandeurs n'en veulent pas, car ces logements sont souvent vétustes et se situent dans des zones à problème. Les sociétés d'HLM doivent faire preuve d'imagination : de petits lotissements dispersés à travers nos villes, par exemple, correspondraient mieux à la demande des locataires potentiels.
Le nouveau produit appelé « PLA construction-démolition »- c'est un très bon produit, à mon avis - va aussi dans ce sens. C'est une innovation intéressante, et il faut inciter les sociétés de construction à s'en servir.
Enfin, j'évoquerai un dossier qui n'est pas d'ordre strictement budgétaire, mais qui a une réelle importance pour le secteur du logement : la création du nouveau secteur privé conventionné.
En effet, le dispositif dit « amortissement Périssol » devait s'achever au 31 décembre 1998. Dans la loi portant diverses mesures d'ordre économique et financier du mois de juin dernier, ce régime a été prolongé jusqu'au 31 août 1999.
Compte tenu des besoins très importants dans le domaine du logement locatif et des effets très importants du régime Périssol sur la construction de logements neufs - de l'ordre de 45 000 unités par an - la commission des finances du Sénat avait appelé, à l'occasion de la discussion du DDOEF, à la poursuite d'un régime d'incitation fiscale pour le secteur locatif libre.
Le projet de loi de finances pour 1999 crée, en effet, un nouveau dispositif applicable au 1er janvier 1999, mais dans lequel l'avantage fiscal sera lié au conventionnement du logement. Il s'agit d'un « statut du bailleur privé » ; l'avantage fiscal sera donc lié à une contrepartie sociale.
Le nouveau système de conventionnement présente des inconvénients, notamment le risque de décourager certains investisseurs d'entrer dans un mécanisme dont l'Etat détient tous les paramètres. De plus, les critères retenus en termes de loyer pourraient décourager certains types d'investissements dans les grandes villes et pour les logements de petite taille.
Cependant, nous ne pourrons qu'être globalement favorable à ce dispositif qui a le mérite d'être pérenne, sous réserve de lui apporter certaines améliorations.
De plus, l'extension à l'ancien doit être saluée : pour une acquisition dans l'ancien, le propriétaire bénéficiera d'une déduction forfaitaire sur les revenus fonciers de 25 % pendant six ans, soit un taux majoré par rapport au droit commun, qui est de 14 %, sous la contrainte de louer pendant six ans à un niveau de loyer soumis à plafonnement.
Il est toutefois possible de regretter qu'avec ce nouveau dispositif le Gouvernement abandonne toute forme de soutien à l'investissement locatif en secteur libre, soutien qui existait sous différentes formes depuis 1984. Cet abandon repose sur le pari que la bonne tenue du marché du logement se poursuivra en 1999, grâce à la demande intérieure et malgré l'absence de soutien fiscal.
En conclusion, mes chers collègues, j'indique que la commission des finances vous propose d'adopter le budget de l'urbanisme et du logement sous réserve d'un amendement tendant à réduire l'augmentation du titre IV et que je présenterai tout à l'heure. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Bellanger, rapporteur pour avis.
M. Jacques Bellanger, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour l'urbanisme. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la création de la direction générale de l'habitat, de l'urbanisme et de la construction, et les transferts de compétences survenus entre le ministère de l'équipement et d'autres départements ministériels ont occasionné plusieurs transformations de la présentation budgétaire des crédits affectés à l'urbanisme.
Il serait souhaitable, monsieur le secrétaire d'Etat, de clarifier ce projet de budget et de limiter, à l'avenir, les « fusions », les « éclatements » de lignes budgétaires et les modifications d'intitulé. Oserai-je avouer devant la Haute Assemblée que j'ai éprouvé quelque peine à percer les mystères de la comptabilité de votre département ministériel ? Vos services nous sont heureusement venus en aide. Je tenais à vous en donner acte et à vous en remercier, tout en observant qu'eux-mêmes étaient parfois en légère difficulté !
La commission des affaires économiques s'est montrée particulièrement sensible à la nécessité de clarifier le droit de l'urbanisme et d'examiner son état d'application.
A ce titre, elle souhaiterait connaître les délais dans lesquels plusieurs décrets d'application de la loi du 30 décembre 1996 relative à la mise en valeur de la zone des « cinquante pas géométriques » dans les départements d'outre-mer seront publiés. Il est, en effet, nécessaire que la procédure de délimitation de la zone, qui constitue le préalable à la cession des terrains à leurs habitants, soit réalisée rapidement.
Nous souhaitons également que l'élaboration des directives territoriales d'aménagement soit poursuivie, et que, comme l'a recommandé un récent rapport du Sénat sur les espaces périurbains, on renforce la gestion intercommunale de l'extension urbaine grâce aux schémas directeurs cantonaux ou d'agglomération. En outre, les modifications et les révisions des plans d'occupation des sols pourraient n'être autorisées, à l'avenir, que dans les communes dont le territoire est inclus dans le périmètre d'un schéma directeur. Je rappelle au Sénat qu'actuellement plus du quart des POS font l'objet d'une procédure de révision et que nombre d'entre eux donnent lieu à l'utilisation de la procédure d'application anticipée, de façon souvent très inopportune.
Le Gouvernement a annoncé la préparation d'un projet de loi de modernisation de l'urbanisme. Beaucoup de thèmes y seront sans doute abordés. Mais la commission des affaires économiques est plus particulièrement sensible à quelques-uns.
En premier lieu, comment favoriser l'élaboration de plans d'occupation des sols dans les communes rurales ? Certaines communes n'ont pas les moyens d'élaborer ces documents si bien qu'en pratique le maire ne peut pas y délivrer les permis de construire au nom de l'Etat : la décentralisation y a donc quinze ans de retard !
En deuxième lieu, il serait probablement souhaitable que certaines procédures soient utilisées avec plus de discernement par les directions départementales de l'équipement, les DDE. Que dire, par exemple, de l'édiction d'un plan d'exposition aux risques qui a pour effet d'interdire toute construction nouvelle sur le territoire d'une commune ?
Ne serait-il pas souhaitable de communiquer au pétitionnaire, outre les motifs qui fondent le refus d'un permis de construire en zone de montagne ou en zone rurale, des indications lui permettant de revoir son projet ? Il semble que certaines DDE fassent une application très extensive des dispositions du code de l'urbanisme sur la constructibilité limitée et prohibent pratiquement toute construction nouvelle.
Ne serait-il pas envisageable de renforcer la contribution des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement, les CAUE, à la préparation des demandes de permis de construire ? Encore faudrait-il qu'ils disposent de moyens financiers suffisants ! Mais je le sais, monsieur le secrétaire d'Etat, cela ne relève pas de votre budget. Le constat alarmant dressé par notre collègue Mme Josette Durrieu lors de l'examen des trois derniers projets de loi de finances sur l'état des finances des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement, reste, hélas ! toujours d'actualité.
J'attire également votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat, sur les difficultés rencontrées par les maires pour faire respecter les règles d'urbanisme. En cas de constructions que je qualifierai d'excessives, les procès-verbaux de constat établis par les directions départementales de l'équipement sont très fréquemment classés sans suite par le procureur de la République. Je sais la liberté d'appréciation des procureurs de la République et la surcharge de travail de leurs services. Il n'est toutefois pas possible d'accepter la généralisation de cette pratique.
La commission estime également qu'il est souhaitable de réfléchir à une meilleure prise en compte des spécificités locales en matière d'urbanisme. Elle a d'ailleurs décidé de créer un groupe de travail sur les modalités d'application de la règle de constructibilité limitée en zone rurale et en zone de montagne. Elle souhaite que les réponses à ces questions figurent dans le projet de loi portant modernisation de l'urbanisme.
C'est confiant dans cette perspective et dans votre volonté de réforme, monsieur le secrétaire d'Etat, que j'ai proposé à la commission d'émettre un avis favorable sur l'adoption des crédits de l'urbanisme, ce à quoi elle a unanimement consenti. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Plancade, rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour le logement. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits demandés pour l'urbanisme et le logement augmentent, à périmètre constant, de 2,2 % par rapport à 1998 et ils s'élèvent à 49,13 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement.
J'assortirai mon accord sur ce projet de budget, qui traduit la priorité donnée au logement par votre gouvernement, monsieur le secrétaire d'Etat, de quatre observations.
Premièrement, s'agissant de la consolidation de l'effort budgétaire en faveur de la pierre, il faut prendre acte de la reconduction des crédits affectés à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, à hauteur de 2,2 milliards de francs en autorisations de programme.
Mais, pour l'avenir, on ne peut que souhaiter une augmentation de cette dotation, compte tenu du développement du champ d'intervention de l'Agence et de son effet très positif en matière d'aménagement du territoire.
En ce qui concerne la construction neuve, 80 000 prêts locatifs aidés sont programmés pour 1999, dont 20 000 en PLA à loyer modéré et 10 000 PLA d'intégration.
Ce programme reconduit les objectifs fixés en 1998, mais il apparaît aujourd'hui que le programme annoncé ne sera pas tenu, puisque le nombre de PLA financés ne devrait représenter que 55 000 unités en fin d'année pour environ 45 000 mises en chantier.
La sous-utilisation des crédits affectés aux PLA est loin d'être conjoncturelle et les raisons en sont multiples : complexité des montages, coûts financiers élevés, maîtrise insuffisante des coûts de production, parfois absence de volonté politique de la part des organismes d'HLM et de leurs partenaires à vouloir construire des logements sociaux supplémentaires.
Il est urgent, mon éminent collègue M. Jacques Pelletier le disait à l'instant, que vous mettiez en place, au niveau national, une cellule de réflexion associant tous les partenaires concernés - collectivités locales, établissements de crédits, bailleurs sociaux et bailleurs privés - afin d'élaborer des propositions concrètes.
Deuxièmement, la recherche d'une plus grande justice sociale s'affirme à travers l'effort de revalorisation des aides à la personne mené depuis 1997. La dotation prévue pour 1999 doit permettre une actualisation au 1er juillet 1999 ; ces aides représentent 24,7 % de l'ensemble des financements publics affectés au logement.
Par ailleurs, l'effort de solidarité envers les personnes modestes consacre les engagements pris à travers la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. Pour 1999, la dotation budgétaire pour les fonds de solidarité pour le logement augmente de 61,7 % ; elle est répartie en 490 millions de francs pour les FSL eux-mêmes et 60 millions de francs pour les associations qui pratiquent la gestion locative « intermédiée ».
Troisièmement, il convient enfin de noter que plusieurs mesures fiscales encouragent le logement, dont la plus importante constitue un encouragement durable en faveur de l'investissement immobilier privé.
Ainsi, l'article 68 du projet de loi de finances définit un régime fiscal pérenne applicable dans le neuf comme dans l'ancien, assorti d'une contrepartie sociale, à savoir le respect par le bailleur de plafonds de loyers et de ressources des locataires.
Le statut du bailleur privé prévoit également une sécurisation des bailleurs contre les impayés de loyers.
Ce dispositif doit permettre de développer de façon pérenne une offre locative privée de logements proposés à des loyers intermédiaires entre le secteur libre et l'offre de logements HLM. Mais, pour en assurer effectivement le succès, il faudrait, pour le rendre plus attractif et plus efficace - tout en prenant les précautions qui s'imposent pour éviter les abus -, élargir le champ d'application de ce dispositif notamment aux ascendants et descendants du bailleur. De plus, il conviendrait d'aménager un régime transitoire entre le neuf et l'ancien, afin de sécuriser les locataires en place, et permettre aux bailleurs qui le souhaitent de rester dans ce régime de loyers conventionnés.
Enfin, à travers le projet de loi de finances, le Gouvernement prend un double engagement, que le Sénat a déjà approuvé le 12 novembre dernier, en rebudgétisant progressivement le financement du prêt à taux zéro et en confirmant le rôle social du 1 % logement.
Pour conclure, même si l'on peut estimer que, dans tel ou tel secteur, un effort plus important aurait pu être fait, il n'en demeure pas moins que ce projet de budget va dans le bon sens. Aucun des secteurs du logement n'est oublié. Il autorise le développement d'une offre diversifiée, aussi bien dans le secteur public que dans le parc privé, dans le locatif et dans l'accession, et il renforce la lutte contre l'exclusion. Il reconnaît, bien sûr, un rôle économique et social aux bailleurs privés. Il sécurise non seulement le locataire et le bailleur, mais aussi l'accédant et le prêteur, contre les aléas de la vie économique et sociale des salariés.
Ce sont toutes ces raisons, monsieur le secrétaire d'Etat, qui ont conduit la commission des affaires économiques et du Plan à émettre, à l'unanimité, un avis favorable à l'adoption des crédits du logement pour 1999. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Bimbenet, rapporteur pour avis.
M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour le logement social. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, comme chaque année, la commission des affaires sociales a examiné le projet de budget du secrétariat d'Etat au logement en s'intéressant plus particulièrement au logement social, qui constitue l'un des volets essentiels, mais aussi l'un des plus fragiles, de la politique du logement.
Le logement social ne peut toutefois être apprécié indépendamment des autres volets que constituent l'action en faveur du logement des personnes défavorisées, l'accession sociale à la propriété, les différentes formes de logement intermédiaire et les aides personnelles au logement.
Au regard de ces différents critères, la commission des affaires sociales a, comme l'année passée, formulé un avis contrasté sur les crédits du secrétariat d'Etat au logement, mais pour des raisons diamétralement opposées.
L'année dernière, en effet, la commission prenait acte de l'effort consenti en matière de logement social, qu'il s'agisse de construction ou de réhabilitation, et de l'actualisation des aides personnelles au logement, mais elle s'inquiétait aussi des menaces pesant sur l'accession sociale sur l'investissement locatif et de l'avenir des mesures en faveur des plus démunis.
Le projet de budget pour 1999 permet de lever en partie ces inquiétudes.
S'agissant du parc privé, ce projet de budget me paraît aller globalement dans la bonne direction, même si des ambiguïtés peuvent subsister ici ou là.
Ainsi, en matière d'accession sociale, la commission des affaires sociales se félicite de la pérennisation annoncée du prêt à taux zéro et de sa rebudgétisation progressive. Cela devrait permettre au 1 % logement de se redéployer vers ses interventions traditionnelles, notamment en faveur du logement social, et de mettre en place de nouvelles formes de soutien aux accédants en difficulté. La rebudgétisation ne devra pourtant pas s'accompagner d'une restriction des conditions d'attribution du prêt à taux zéro. Votre commission y sera très attentive.
De même, en matière d'investissement locatif, la commission des affaires sociales n'est pas opposée au nouveau « statut du bailleur privé ». Ce nouveau régime d'incitation fiscale présente en effet trois aspects positifs.
L'introduction d'un nouveau conventionnement devrait permettre de réorienter le dispositif vers le logement intermédiaire, qui rencontre aujourd'hui une atonie persistante. L'extension du champ d'application de l'incitation fiscale à l'ancien va également dans le bon sens. Et la mise en place d'une « sécurisation » des bailleurs contre les impayés de loyers est également positive.
En revanche, il subsiste une incertitude. L'amortissement Périssol était incontestablement un succès. Il n'est pas sûr que le nouveau régime, fiscalement moins avantageux, permette la poursuite de l'investissement locatif au même rythme.
L'effort en faveur de la réhabilitation du parc privé est, quant à lui, confirmé. Les primes à l'amélioration de l'habitat et les subventions de l'ANAH, dont je tiens ici à souligner l'importance notamment en milieu rural, sont reconduites, voir légèrement augmentées, et s'accompagnent de deux nouvelles mesures fiscales : le taux réduit de TVA s'appliquera aux travaux lorsque les bailleurs privés bénéficieront d'une subvention de l'ANAH, et le crédit d'impôt maximal lié aux travaux d'entretien à domicile sera plus que doublé.
S'agissant du logement des personnes défavorisées, l'effort budgétaire est important et permet très largement de donner une traduction financière au volet logement de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. J'observe d'ailleurs que cette loi reprend très largement les dispositions prévues par le projet de loi de renforcement de la cohésion sociale présenté par le précédent gouvernement. Je constate que les crédits d'intervention connaissent une augmentation significative de 50 %, notamment en faveur des fonds de solidarité pour le logement, qui jouent un rôle capital pour l'accès et le maintien dans le logement.
En revanche, la commission s'inquiète de la diminution de près de 20 % des subventions d'investissement en faveur des opérations les plus sociales, même si cette diminution s'explique par le fait que ces crédits servaient aussi à financer les réquisitions et n'étaient pas consommées.
Malgré les effets très positifs du plan d'urgence de 1995, le parc de logements d'urgence et surtout d'insertion reste trop restreint. La diminution des crédits ne fera alors qu'accentuer les besoins. C'est sans doute regrettable.
Le projet de budget pour 1999 est donc, malgré les quelques incertitudes que je viens de signaler, plutôt favorable pour le parc privé et le logement des personnes défavorisées. A l'inverse, les perspectives sont beaucoup plus menaçantes pour les aides à la personne et, surtout, pour le logement social.
S'agissant des aides à la personne, la commission des affaires sociales prend acte du mouvement de revalorisation de ces aides. Il devrait se poursuivre par une nouvelle actualisation au 1er juillet 1999. Les aides à la personne sont en effet un moyen de solvabilisation souvent indispensable pour les familles qui, sans elles, rencontreraient des difficultés parfois insurmontables d'accès au logement.
La commission des affaires sociales observe néanmoins que la forte augmentation des aides constatée ces dernières années n'a pas permis d'améliorer leur efficacité sociale. Le « taux d'effort » des ménages reste globalement stable depuis une dizaine d'années.
Dès lors, votre commission juge nécessaire une réforme en profondeur des aides à la personne. La revalorisation des aides ne sera en effet en mesure d'accroître leur efficacité sociale qu'à la condition qu'elles soient réformées dans le sens d'une plus grande cohérence, d'une plus grande transparence et d'une plus grande équité. Or, dans ce domaine, les mesures envisagées par le Gouvernement paraissent un peu timides.
La principale lacune de ce budget réside incontestablement dans l'absence de mesures susceptibles d'enrayer le fléchissement de la construction de logements sociaux. Celui-ci est en effet très préoccupant, puisqu'on assiste à une diminution rapide du nombre de logements sociaux mis en chantier et financés par PLA. Alors qu'ils étaient plus de 72 000 en 1994, ils ne seront plus, au rythme actuel, que de 40 000 à 45 000 à la fin de l'année.
Face à cette crise inquiétante de la construction de logements sociaux, l'absence de mesures de simplification pour adapter le produit à la demande me paraît grandement regrettable. Tout laisse à craindre, en effet, que l'objectif de 80 000 logements PLA à construire ne sera pas réalisé. De nombreux ménages, même parmi les plus modestes, se détournent du parc social, aggravant ainsi la vacance. La dégradation de la situation financière des organismes d'HLM ne les incite pas non plus à consommer des PLA. Il s'agit là d'un produit à la fois complexe à gérer et coûteux pour les organismes qui n'arrivent plus à assurer l'équilibre d'exploitation des logements PLA.
Dans ces conditions, la relance de la construction de logements sociaux ne pourra passer que par une réforme des aides à l'investissement locatif social. Cette réforme devrait prendre une triple direction. La baisse du coût de la ressource pour les organismes d'HLM est d'abord nécessaire. En outre, une simplification de ces aides multiples et opaques devrait être engagée dans le sens d'une harmonisation, voire d'une unification. Une plus grande décentralisation dans la définition des aides est également souhaitable. A cet égard, certaines expériences innovantes menées à l'échelon local ont donné des résultats prometteurs.
C'est pour toutes ces raisons, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, et en souhaitant vivement qu'une adéquation intervienne enfin entre l'offre et la demande, que la commission des affaires sociales a décidé de s'en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée pour l'adoption des crédits consacrés au logement social. (Applaudissements.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 13 minutes ;
Groupe socialiste, 28 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 15 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 14 minutes.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, compte tenu du temps de parole accordé à mon groupe et de l'examen commun de plusieurs domaines, mon collègue Pierre Lefebvre s'exprimera sur les services de l'équipement à l'occasion d'une intervention sur le titre III.
S'agissant plus particulièrement des crédits du logement et de l'urbanisme, l'arrivée de l'hiver et les baisses brutales de température qui le caractérisent éclairent d'une façon particulièrement dramatique l'étendue des problèmes liés au logement, ainsi que sur son rôle éminent d'intégration ou d'exclusion sociale.
Aussi devons-nous nous interroger sur le type de politique à mener pour offrir à nos concitoyens une réponse à la mesure des besoins exprimés et des conditions d'existence dignes d'un pays moderne et riche tel que le nôtre.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne peux commencer mon propos sans rendre hommage aux mesures que vous avez prises et qui vont dans le sens des propositions défendues par mon groupe depuis longtemps. Je pense particulièrement à la disparition des notions d'actifs et d'inactifs pour le calcul des plafonds de ressources d'accès aux HLM, à la revalorisation de ces plafonds - même si je la souhaitais plus significative - et, enfin, au relèvement du seuil de déclenchement du surloyer de solidarité, le SLS, même si j'aurais préféré sa disparition totale.
Les crédits destinés au logement augmentent - tenant compte des variations de structure observées cette année - de 2,2 %, ce qui correspond bien à un accroissement des dotations en valeur réelle qu'il convient de saluer. De plus, le Gouvernement reconduit les mesures positives amorcées lors du précédent budget.
Au-delà des chiffres, vous assignez à votre budget des objectifs auxquels mon groupe ne peut que souscrire.
Permettez-moi de citer, en tout premier lieu, l'augmentation de l'action publique en faveur des personnes les plus défavorisées. Les crédits sont la traduction des mesures introduites par la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions.
Il s'agit d'abord de l'augmentation notable, de 44 %, des crédits destinés au FSL. Cet accroissement jouera sans aucun doute un rôle majeur dans la prévention des expulsions.
L'engagement de l'Etat aux côtés des associations logeant des personnes défavorisées à titre temporaire est également une source de satisfaction.
En ce qui concerne la construction de logements sociaux, mon appréciation est plus nuancée. Si je me réjouis de l'intention de reconduire à 80 000 le nombre de PLA budgétés pour 1999, mes inquiétudes ne sont pas dissipées en ce qui concerne l'absence de reprise de l'investissement locatif social. En effet, les rapports de MM. Plancade et Bimbenet font tous les deux état de la sous-consommation, depuis plusieurs années, des crédits PLA prévus.
Alors que 80 000 PLA avaient déjà été budgétés en 1996 et 1997, leur taux de consommation s'inscrit respectivement à 68 % et 57 %. Il est d'ores et déjà probable qu'il n'y ait pas de redressement significatif de ce point de vue en 1998.
Or, parallèlement, la demande de logement reste très majoritairement plus élevée que l'offre. Cette pression est parfois énorme dans certaines communes et, paradoxalement, souvent dans celles qui font déjà beaucoup pour le logement social.
Certes, je conviens qu'un certain nombre de villes ne souhaitent plus accueillir du public dit « défavorisé », d'abord, en raison de l'accompagnement social important que cela suppose mais également de l'hostilité de la population des quartiers voisins. Cela doit donc nous engager à poursuivre plus avant notre réflexion sur le logement social. Doit-on le réserver exclusivement aux plus démunis ? Les salariés « dits moyens » n'y ont-ils plus leur place ? Quel type de mixité sociale souhaitons-nous mettre en place effectivement ? Comment travailler à « déstigmatiser » les quartiers HLM ?
Mais, nous le savons bien, si des villes font déjà beaucoup, d'autres n'ont jamais, ou très peu, contribué au logement social. La loi relative à la lutte contre les exclusions a amorcé un débat de réponse. Cela semble néanmoins insuffisant et trop peu contraignant à leur égard.
Cela dit, personne ne peut contester que le frein principal à la consommation des crédits PLA reste la difficulté à équilibrer financièrement ces opérations et, donc, à offrir des loyers de sortie compatibles avec les ressources de la population à laquelle elles s'adressent.
Cette situation montre l'urgence d'une réflexion et d'une réforme de l'aide à la pierre qui devrait augmenter significativement pour, d'une part, avoir une incidence réelle sur le prix des loyers et, d'autre part, se substituer à la logique actuelle continuant de privilégier l'aide à la personne.
S'agissant justement des aides à la personne, je me contenterai de juger positivement leur revalorisation, sans trop entrer dans les détails, car j'y reviendrai dans le débat. Elles représentent pour de nombreuses familles un ballon d'oxygène fort appréciable.
Toutefois, on constate, malgré cette revalorisation, que le taux d'effort consenti par les ménages ne diminue pas. Cette observation plaide pour une remise à plat du système, d'autant que la part que lui accorde le budget de l'Etat est considérable. On peut d'ailleurs s'interroger sur la capacité d'un gouvernement, quel qu'il soit, à suivre financièrement au fil des ans un poste budgétaire qui ne peut être qu'en augmentation compte tenu du nombre grandissant des allocataires dans le contexte actuel du logement.
Avec ce budget, vous visez un autre objectif : poursuivre l'effort de diversification et d'amélioration de la qualité du parc de logements.
Pour ce faire, les crédits destinés aux PALULOS sont reconduits au niveau de 1998. Il en est de même pour ceux qui sont affectés à la prime à l'amélioration de l'habitat et de l'ANAH.
La baisse de la TVA sur les travaux de réhabilitation et d'amélioration est également reconduite et étendue cette année aux bailleurs privés bénéficiant d'une subvention de l'ANAH.
Concernant l'intégration du financement du prêt à taux zéro dans le budget, j'ai eu l'occasion de dire récemment combien mon groupe se réjouissait de l'annonce de l'arrêt de la ponction sur les fonds collectés par la participation des employeurs à l'effort de logement, ponction décidée par le précédent gouvernement. Ce détournement participait en effet, avec quelques autres dispositifs, à la diminution de l'effort réel de l'Etat en matière de financement du logement.
Nous regrettons toutefois la progressivité si lente de ce retour à la situation normale qui occasionnera encore, l'année prochaine, un manque à gagner de 6,4 milliards de francs pour le 1 % logement, ce qui ne manquera pas d'avoir encore des conséquences importantes sur le logement social, sur l'activité dans le secteur du bâtiment et, plus particulièrement, sur le logement des salariés.
Par ailleurs, nous sommes favorables à une réévaluation de la « participation des employeurs à l'effort de construction » afin que les sommes collectées répondent mieux à leurs missions.
Il nous semble enfin important que le 1 % logement conserve son rôle prépondérant dans l'aide à la pierre.
L'article 68 du projet de loi de finances pour 1999 instaure un statut pour le bailleur privé. Cette mesure est, en fait, la sortie du scandaleux système de l'amortissement Périssol.
Votre choix en la matière a été, monsieur le secrétaire d'Etat, de maintenir le principe d'une option en faveur d'un amortissement accéléré. Toutefois, vous complétez le dispositif par un plafonnement des loyers et des ressources du locataire et assortissez donc cet avantage pour les bailleurs d'une contrepartie sociale, que j'ai à plusieurs reprises réclamée.
Si ce donnant-donnant a, pour le moins, le mérite d'exister, il ne répond pas entièrement au souci d'équité sociale qui doit être le nôtre. En effet, pour la construction neuve, après une durée de location de neuf ans, les bailleurs privés auront tout de même amorti la moitié de leur bien, ce qui est loin d'être le cas pour le logement social, et ce sans qu'aucun engagement ne leur soit demandé au terme de ces neuf ans.
Autre avantage consenti au logement privé et refusé au logement social : l'augmentation de 40 % des plafonds d'accès à ce parc. Cette différence risque d'accentuer la tendance qui s'amorce et qui consiste à réserver aux plus démunis le parc public et aux moins pauvres le parc privé conventionné.
Plus généralement, à propos de ce statut du bailleur privé, les associations de locataires que je rencontre régulièrement me font part de leurs regrets de n'être pas associées à cette réflexion.
Au-delà du strict budget, l'amélioration de la situation du logement implique une politique tournée vers la reprise économique, la relance de la consommation et la lutte contre le chômage. Ce sont en effet les conditions à réunir pour que le plus grand nombre de nos concitoyens soit en mesure d'honorer un loyer d'un logement décent, tout en modérant les crédits publics destinés à compenser l'insolvabilité des familles.
Sans attendre, l'Etat doit plus significativement orienter son intervention vers l'aide à la pierre. Je le répète, elle seule peut sensiblement réduire le prix des loyers.
Sur ce point, je ne partage pas l'avis de mon collègue Jean-Pierre Plancade, lorsqu'il affirme dans son rapport que la baisse du taux des prêts accordés aux bailleurs sociaux, ainsi que l'allongement de la durée des remboursements, offrent une marge de manoeuvre et une efficacité limitées. Je défends, pour ma part, non une baisse des taux de 0,5 %, mais une baisse d'au moins 2 %. Les taux d'emprunt pour les organismes HLM ne devraient en fait pas dépasser le niveau de l'inflation, et l'allongement de trois ans de la durée des PLA, qu'évoque notre collègue, ne semble pas suffisant non plus. Pourquoi ne pas envisager que cette durée puisse augmenter de huit ans ? Pourquoi, enfin, ne pas agir sur la durée d'exonération de la taxe foncière ?
Dans ces conditions, croyez-moi, mes chers collègues, les loyers de sortie se verraient considérablement diminués et la construction en serait dynamisée !
Autre mesure urgente qui me paraît faire défaut à votre politique du logement : l'instauration d'un fonctionnement et d'un contrôle démocratiques de la Caisse des dépôts et consignations. Il est en effet déplacé de voir cet organisme financier perdre 1 milliard de francs dans des opérations spéculatives alors qu'il accorde de plus en plus difficilement des prêts aux organismes construisant des logements sociaux, les contraignant à fournir toujours plus de garanties !
Il est par ailleurs nécessaire, monsieur le secrétaire d'Etat, de donner une suite à la conférence nationale du logement organisée cette année. Les débats fort intéressants qui ont eu lieu montraient l'exigence d'une large concertation. Il ne faut pas décevoir cette légitime attente.
De ce point de vue, nous attendons aussi avec impatience le projet de loi sur l'habitat que vous nous annoncez depuis un certain temps.
Vous le constatez, monsieur le secrétaire d'Etat, le groupe communiste républicain et citoyen formule des critiques et des propositions alternatives à l'égard du budget que vous proposez. Je les situe dans une conception riche et dynamique de la gauche. Elles animent naturellement le débat pluraliste qui doit avoir lieu au sein de la majorité qui a été élue pour gérer les affaires du pays.
Les sénateurs de mon groupe, tout en appelant de leurs voeux des réformes de fond visant à faire du logement un droit effectif, voteront ce projet de budget car il comporte des avancées non négligeables. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet. Monsieur le secrétaire d'Etat, depuis que vous avez pris en main le dossier du logement, je me surprends à ne vous adresser que des compliments. Il n'est pourtant pas dans mes habitudes de pratiquer la flagornerie, mais la loi de finances pour 1998, le volet « logement » de la loi de lutte contre les exclusions ou encore la récente loi modernisant l'emploi du fonds du 1 % logement sont autant de progrès que vous nous avez proposé d'accomplir en faveur de la cause du logement à laquelle nous sommes très attachés.
Avec des crédits s'élevant à 48,3 milliards de francs, soit une augmentation de 2,2 %, je vous adresse le même satisfecit s'agissant de votre projet de budget pour 1999. Celui-ci est en effet conforme aux ambitions et aux engagements énoncés, dès sa prise de fonctions par le Premier ministre, Lionel Jospin, dans sa déclaration de politique générale du 19 juin 1997, en totale rupture avec les pratiques de la précédente législature.
Il s'agit à la fois d'assurer pour tous le droit au logement et à un logement de qualité, de garantir la liberté du choix pour l'accession à la propriété ou pour la location, de contribuer à un développement équilibré de nos villes et enfin de dynamiser un secteur économique créateur d'emplois.
La loi de lutte contre les exclusions a largement pris en compte l'exigence du droit au logement pour tous.
Permettez-moi d'évoquer, pour mémoire et pêle-mêle, une part importante de son contenu : la réforme des expulsions, qui substitue une logique de prévention des difficultés et de traitement social à la logique de l'ordre public, en respectant à la fois les droits du bailleur et le droit d'avoir un toit ; les mesures visant à mobiliser le parc de logements dormants par l'instauration d'une taxe sur la vacance volontaire et par la réquisition avec attributaire ; la reconnaissance et le renforcement du rôle des associations aidant au logement et à l'accompagnement social des personnes défavorisées ; enfin, la mise en place de règles transparentes d'attribution des logements sociaux et l'obligation de définir des objectifs chiffrés de logement pour les plus démunis, dans l'optique de conférences intercommunales du logement.
Je souhaiterais cependant, monsieur le secrétaire d'Etat, et j'y insiste, que vous m'indiquiez quand paraîtront les décrets d'application, que nous attendons avec impatience.
Je me félicite que le projet de loi de finances pour 1999 traduise bien sur le plan budgétaire les priorités tracées par la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions.
Les aides à la personne augmentent de près de 6 %, pour atteindre 34,6 milliards de francs, et elles sont assorties d'actualisations régulières entamées en 1997, puis réévaluées au 1er juillet 1998. C'est là le respect des dispositions du code de la construction et de l'habitation que l'ancienne majorité avait ignorées durant quatre années. Cela conditionne le maintien de l'efficacité sociale de ces aides.
Malgré cela, je m'inquiète de voir le taux d'effort des ménages en constante augmentation. L'aide personnelle au logement est un instrument au service de la justice sociale. Elle concerne plus de 6 millions de ménages et représente les trois quarts du budget du logement. Aussi, conviendrait-il de s'interroger sur les moyens de renforcer son efficacité sociale.
Entendons-nous bien, monsieur le secrétaire d'Etat, je ne souhaite pas une nouvelle rationalisation ou unification de cette aide. Bien sûr, je sais qu'une telle pratique écarte certains ménages de son bénéfice. Je tiens simplement à pointer l'effet pervers constaté entre un coût de la construction locative sociale élevé et les aides personnelles qui perdent leur pouvoir solvabilisateur.
Je note cependant que les crédits de l'Etat en faveur des fonds de solidarité sur le logement sont fortement revalorisés. Avec 490 millions de francs, ils sont en hausse de 40 %.
L'aide aux associations est confortée : un crédit de 60 millions de francs est dégagé au titre de la gestion locative intermédiaire, et les moyens consacrés à l'aide au logement temporaire augmentent de 18 % en vue de permettre aux centres communaux d'action sociale de bénéficier de cette aide, initiative qui rapproche du terrain parfaitement connu par les CCAS. A ce propos, je peux vous dire, monsieur le secrétaire d'Etat, que, hier, au congrès des centres communaux d'action sociale du département de l'Hérault, auquel j'ai participé, j'ai enregistré une vive satisfaction au sujet de cette mesure ?
J'apprécie aussi les 50 millions de francs qui sont mobilisés pour mieux lutter contre le saturnisme, d'autant que cette action s'adresse en priorité aux enfants vivant dans de vieux logements.
Enfin, l'aide au secteur HLM n'est pas oubliée. Pour la construction de logements sociaux destinés aux personnes défavorisées, 20 000 PLA à loyer minoré et 10 000 PLA d'intégration sont budgétés.
Tous ces moyens sont autant de réponses apportées aux personnes confrontées à des difficultés multiples et qui ont ainsi l'espoir de pouvoir vivre dans un logement qu'elles auront choisi.
Le droit à l'habitat choisi est aussi, précisément, l'une des priorités de ce budget.
Pouvoir choisir son logement est en effet un souhait de nombre de nos concitoyens. Pour cela, nous devons leur offrir des logements plus diversifiés, dans le parc public comme dans le parc privé, en location ou en accession.
S'agissant de la demande locative, l'effort important de 1998 est maintenu, avec 50 000 PLA et 120 000 PALULOS. Les plafonds de ressources permettant l'accès au logement social ont été réévalués : désormais, 61 % de la population est éligible au logement social. Cette mesure était attendue dans un parc HLM qui connaît une paupérisation croissante.
Le retour des classes moyennes dans le logement social est un gage en faveur de la mixité sociale. Cette mesure va donc à l'encontre de la ghettoïsation des quartiers. Il en est de même de la limitation des efferts pervers du surloyer. Nous devons réaffirmer haut et fort que le logement HLM n'est pas un logement au rabais ni le logement des seules personnes défavorisées, faute de quoi la réinsertion de ces personnes serait vouée à l'échec.
Pour ce qui est du secteur locatif privé, je tiens à saluer la mise en oeuvre d'un parc conventionné. Le statut du bailleur privé devrait permettre l'émergence d'un parc locatif intermédiaire et ainsi mieux répondre à la demande locative dans les zones urbaines, plus particulièrement dans les grandes agglomérations. La constitution de ce parc est, je crois, très attendue par nos concitoyens qui habitent dans ces zones, le paradoxe étant que leurs revenus ne leur permettent de se loger ni dans le privé ni dans le parc HLM : dans un cas, ils sont jugés trop faibles et, dans l'autre, trop élevés !
Ce statut présente donc plusieurs avantages : il ne bouleverse pas l'ancien système d'aide à l'investissement locatif ; il s'agit d'un régime d'amortissement pérenne et stable contribuant à donner confiance aux professionnels de l'immobilier ; les aspects les plus choquants, voire inadmissibles disparaissent ; la dépense publique est rendue plus efficace et la justice sociale est renforcée, de même que la justice fiscale, car les avantages démesurés et coûteux de l'« amortissement Périssol » sont supprimés, l'avantage fiscal étant lié à une contrepartie sociale.
Le bénéfice de cette aide est accordé à des ménages dont les ressources ne dépassent pas le plafond HLM majoré de 40 %. Les bailleurs privés conventionnés bénéficieront, quant à eux, d'une sécurité liée à l'allocation logement versée directement et, dans le cadre de la convention conclue avec le « 1 % logement », ils pourront obtenir une garantie de paiement des loyers. Sachant que l'impayé de loyer est ce que redoutent le plus les bailleurs privés - et comment ne pas les comprendre ? - cette mesure devrait permettre de lever les réticences de nombre d'entre eux.
Le statut du bailleur privé comporte d'autres avantages : il permet sa participation aux grandes orientations de la politique du logement, même si cela n'est pas sa motivation première ; il contribuera en effet à la modération des références de loyer utilisées pour le renouvellement des baux.
Enfin, s'appliquant au neuf et à l'ancien, il dynamisera l'ensemble de la chaîne du logement. Dans ce dernier cas, l'aide prendra la forme d'une déduction forfaitaire, portée de 14 % à 25 % pour les revenus fonciers.
Pour ce qui est de l'accession à la propriété, le projet de loi de finances supprime d'inquiétantes dispositions qu'avait prises la précédente majorité. Il s'agit du financement du prêt à taux zéro. Je me félicite - j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire, monsieur le secrétaire d'Etat - de l'engagement du Gouvernement de rebudgétiser progressivement le financement du prêt à taux zéro, levant ainsi toutes les hypothèques sur l'avenir de ce prêt et redonnant au « 1 % logement » toute sa capacité d'action, notamment en faveur du logement social. Je n'hésite pas à dire que c'est de la belle ouvrage !
Parallèlement, le Gouvernement a mis en place, en partenariat avec le « 1 % logement », un dispositif de sécurisation des accédants à la propriété. Il est tout à fait bienvenu. Associé à la réforme du surendettement contenue dans la loi contre les exclusions, il prévient les situations les plus critiques.
Je souhaite maintenant évoquer les questions qui sont à la confluence de la politique du logement, de celle de la ville, de celle de l'urbanisme et de celle de l'aménagement du territoire.
Nos rapporteurs se sont fait l'écho d'inquiétudes liées à la sous-consommation des crédits destinés à la construction et à la réhabilitation du logement locatif social.
Permettez-moi ici un petit aparté concernant mon département. Il est l'exception qui confirme la règle car, selon la Caisse des dépôts et consignations, au troisième trimestre il a totalement consommé les crédits alloués.
Pour le reste du territoire, la sous-consommation des crédits PLA et PALULOS est préoccupante, car la demande en logement social, notamment dans les zones urbaines, est toujours aussi forte. Nous ne savons plus y répondre de manière efficace, à la fois sur le plan social et sur le plan économique. Les loyers de sortie des constructions neuves sont trop élevés, pendant que le patrimoine HLM vieillit. La population s'en détourne, même lorsqu'il a été réhabilité, et la vacance augmente.
Cela conduit à ne pas répondre à la demande, plus diversifiée, plus exigeante aussi. La situation financière de certains organismes d'HLM se dégrade, quand elle n'atteint pas un niveau franchement catastrophique. Les communes qui ont sur leur territoire un parc HLM important sont confrontées à de lourdes difficultés tandis que d'autres s'exonèrent de l'effort d'accueillir un parc social de logements.
Le temps semble venu de remettre à plat notre politique du logement social dans les villes. Il faut désormais raisonner en termes d'habitat, de services rendus à la population, des services publics, d'infrastructures ou encore de commerces. Il nous faut sortir des égoïsmes locaux pour rendre la ville plus belle, plus attractive. Le fait urbain s'est imposé de façon plus ou moins réfléchie - parfois de façon anarchique - plus ou moins réussie. Il faut, aujourd'hui, faire avec ce passé mais aussi préparer l'avenir.
Le Gouvernement a, à cet égard, mobilisé une enveloppe de 10 milliards de francs de prêts au taux de 3,8 % auprès de la Caisse des dépôts et consignations en vue de réaliser des opérations de démolition-reconstruction. C'est intéressant pour traiter l'urbain dégradé, mais ce n'est pas suffisant. Ces opérations restent lourdes et coûteuses. Elles ne peuvent que difficilement s'appliquer aux copropriétés dégradées.
Je vous ai souvent entretenu de cette question, monsieur le secrétaire d'Etat ; peut-être même vous ai-je un peu lassé ! Mais c'est un vrai fléau. Les copropriétés dégradées concentrent souvent tous les maux : insalubrité, développement de squats, trafics en tout genre, marchands de sommeil, et j'en passe. Je crois qu'il est urgent que l'on se dote d'outils juridiques permettant d'intervenir avant qu'il ne soit trop tard. A quand une réforme de la loi de 1965 qui régit les copropriétés ?
Nous devons nous doter de nouveaux instruments d'urbanisme, mieux maîtriser le foncier et veiller à la cohérence des actions menées sur un même territoire. Le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire contient des propositions très intéressantes en créant l'obligation de contrats d'agglomération intégrant un volet foncier et prévoyant la création d'un établissement public foncier.
Le Gouvernement a fait aussi des propositions intéressantes en matière d'organisation urbaine et de simplification de la coopération intercommunale. Les communautés d'agglomération seront dotées de blocs de compétences obligatoires et toutes intimement liées : le développement économique, l'aménagement de l'espace, le logement et l'équilibre social de l'habitat. Il les dote aussi d'outils fiscaux et financiers, donc de véritables instruments de développement urbain.
Ces nouvelles dispositions renforceront celles qui figurent la loi contre les exclusions, avec la création de conférences intercommunales du logement chargées de la politique d'attribution des logements sociaux dans certains bassins d'habitat.
Ce que vous avez fait pour la politique d'attribution des logements sociaux, il faut désormais le faire pour la construction de logements sociaux. Il faut dépasser la logique de la loi d'orientation pour la ville, qui prévoyait une simple sanction pécuniaire à l'encontre des communes des grandes agglomérations qui refusaient de participer à la politique d'intérêt général de construction de logements sociaux. Le droit au repli sur soi doit être banni. Cela conditionne l'équilibre social de notre société urbaine.
Enfin, j'évoquerai mon dernier motif de satisfaction : votre projet de budget contribue à l'emploi en ce qu'il contient des mesures favorables aux entreprises de main-d'oeuvre du bâtiment. A cet égard, je citerai l'application du taux réduit de TVA à 5,5 % sur les travaux subventionnés par l'ANAH, ou encore le doublement du crédit d'impôt pour travaux d'entretien effectués par les ménages.
Quand le bâtiment va, tout va, a-t-on coutume de dire. Le bâtiment va mieux. La croissance repart, l'emploi, qui est la priorité des priorités, aussi. Votre budget y est pour quelque chose, monsieur le secrétaire d'Etat. Le groupe socialiste ne peut donc que le soutenir. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républain et citoyen. - M. le rapporteur spécial applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le présent projet de budget du logement affiche une hausse de 2,2 %, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter, même s'il reste insuffisant pour résoudre l'ensemble des problèmes auxquels nous avons à faire face et qui sont, il est vrai, très profonds.
Je limiterai mon propos à l'évocation de trois préoccupations.
La première a trait au statut du bailleur privé que vous proposez de mettre en oeuvre, monsieur le secrétaire d'Etat. Ce statut est présenté comme la contrepartie des obligations sociales liées au nouveau dispositif d'amortissement.
A ce propos, permettez-moi de formuler deux remarques.
Votre objectif est de créer un secteur intermédiaire entre le privé et le social. Pourquoi pas ? Mais n'aurait-il pas fallu maintenir un mécanisme d'amortissement sans contrepartie sociale pour le secteur libre ? Je le crois, car l'amortissement Périssol, même s'il est parfois critiqué, a largement prouvé son efficacité. Il a en effet permis un redressement du secteur de la construction et une réorientation de l'épargne vers l'investissement locatif, qui a progressé ainsi de 24,8 % depuis 1995.
En outre, ce dispositif, à long terme, rapporte à l'Etat plus qu'il ne lui coûte grâce à la TVA dégagée et aux emplois créés.
On peut donc craindre un repli de la reprise des investissements, ce qui serait très fâcheux.
En outre, l'adoption d'un statut de bailleur privé correspond à une nécessité, car, faute de pouvoir obtenir de leur épargne investie dans le logement locatif une rémunération normale, les Français pourraient se détourner de ce type d'investissement, au risque de prolonger l'insuffisance du nombre de logements sur le marché.
Les mesures annoncées de sécurisation des bailleurs, par le biais d'une garantie de recettes locatives grâce au versement de l'allocation logement en tiers payant ou de la possibilité d'obtenir dans certains cas une garantie de loyers dans le cadre de la convention relative à la modernisation du « 1 % logement », vont dans le bon sens.
Mais elles sont malheureusement insuffisantes, car elles sont limitées aux futurs logements conventionnés et suscitent, à cet égard, des interrogations teintées d'un certain scepticisme.
En effet, compte tenu de la durée de l'engagement, le niveau réduit de loyer ne sera peut-être pas compensé par la majoration de la réduction forfaitaire. Quant à la garantie de loyer, la question de la pérennité de son financement peut être posée.
Mais l'instauration d'un véritable statut du bailleur privé impliquerait surtout un mécanisme de préservation du bien et de la capacité d'en disposer.
Or, sur ce point, force est de constater que la récente loi sur l'exclusion reprend d'une main ce que le projet de loi de finances pour 1999 donne de l'autre avec, notamment, l'instauration d'une taxe sur la vacance et les mesures relatives aux expulsions.
Cette loi correspond à une vision, à mon avis, passéiste du bailleur privé, considéré comme un nanti. Plusieurs études récentes s'accordent à contredire une telle vision : près de 71 % des bailleurs privés ont un revenu équivalant au revenu moyen mensuel des Français ; les ouvriers et les professions intermédiaires représentent à elles seules 44,3 % des futurs investisseurs dans le logement locatif.
La mise en location de leur logement joue donc, pour la plupart des propriétaires, un rôle essentiel dans le bouclage du budget familial. Cela mérite, par conséquent, une protection du droit de propriété.
Le fonction sociale des bailleurs privés ne me semble pas suffisamment reconnue. En effet, selon une étude de l'INSEE, le Logement des ménages pauvres en 1996, 26 % de cette population de 2,8 millions de personnes est logée dans le parc locatif privé, contre 24 % dans le secteur d'HLM, et pratiquement tous les ménages à bas revenus trouvent leur premier logement dans le parc locatif privé.
Par sa fluidité, le locatif privé est le seul à accompagner la mobilité résidentielle des Français dans un contexte de ralentissement du taux de rotation dans le parc social.
Au regard de ces chiffres, les mesures adoptées dans le cadre de la loi relative à la lutte contre les exclusions, heureusement tempérées par le Conseil constitutionnel, apparaissent souvent injustes. Elles risquent, par ailleurs, de se retourner contre leurs promoteurs. En effet, déjà peu confiants dans l'efficacité de la loi, qui change souvent, les propriétaires, avant d'accepter un locataire, prennent des précautions supplémentaires en demandant des cautions ou des dépôts de garantie plus élevés.
Cette pratique s'étend d'ailleurs au logement social, créant autant de barrages à l'entrée du logement pour les plus démunis. J'en rencontre de multiples exemples chaque jour dans ma commune : des jeunes, des femmes seules avec enfants ou des familles nombreuses que personne ne souhaite héberger et qui se tournent vers leur maire.
Cela conduit les communes à se substituer à l'Etat en développant leurs acquisitions foncières et en mettant à disposition de tels ménages des logements dont elles se portent acquéreurs. On peut, là encore, se demander si cela relève bien de la responsabilité des communes. Une fois de plus, face à la démission de l'Etat, trop souvent constante, ce sont les collectivités locales qui prennent le relais.
Il convient, me semble-t-il, de prendre davantage de mesures de sécurisation des bailleurs qui tiennent compte de leurs craintes.
Ainsi, selon une étude de l'INSEE, sur le long terme, trois raisons motivent les propriétaires qui envisagent de vendre leur bien : la médiocrité des loyers, le poids de la fiscalité, les difficultés à trouver un locataire solvable.
Le recours à l'assurance ou à la création d'un fonds de garantie fonctionnant sur le modèle de la réassurance permettrait une couverture du risque d'impayé.
L'abolition de la taxe sur la vacance, ainsi que l'indemnisation du propriétaire et la réduction des délais de la procédure d'expulsion me semblent également nécessaires.
Enfin, plutôt que d'instaurer une taxe, pour lutter contre la vacance, il conviendrait d'aider les propriétaires à remettre sur le marché le logement qu'ils ne peuvent entretenir ; c'est la deuxième préoccupation.
Une étude réalisée à la demande des entreprises artisanales montre, en effet, que 41 % des ménages n'ayant pas réalisé de travaux évoquent un problème de ressources financières.
La majoration du crédit d'impôt pour travaux d'entretien, adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale, me semble aller dans le bon sens, même si une réduction du taux de TVA à 5,5 % serait préférable.
Il convient toutefois d'aller plus loin en développant un magnifique outil à notre disposition et qui n'a plus besoin de prouver son efficacité : l'ANAH.
La stabilisation des crédits proposée cette année n'est pas suffisante, d'autant que cette agence a vu ses missions accrues en zone de revitalisation rurale, où les besoins sont énormes.
Je me permettrai de vous citer encore quelques chiffres qui se passent de tout commentaire : en 1995, 4,7 milliards de francs de subvention ont induit 19 milliards de francs de travaux et plus de 105 000 emplois. En 1996, l'écart entre la collecte de la taxe additionnelle au droit de bail et le budget de l'ANAH a été supérieur à 1 milliard de francs, soit l'équivalent de 285 000 emplois.
L'entière réaffectation de cette taxe additionnelle à l'ANAH semble constituer la solution évidente. Je vous invite instamment à y réfléchir, monsieur le secrétaire d'Etat.
Le dernier point sur lequel je souhaite brièvement attirer votre attention concerne les difficultés rencontrées par les organismes d'HLM. Selon l'Union nationale des HLM, en comparant les premiers mois de 1997 et de 1998, les consommations effectives des crédits se situent à des niveaux alarmants : moins 60 % pour les PLA ordinaires, moins 10 % pour les PLALM et moins 6 % pour les PALULOS.
Malgré cette flagrante sous-consommation des crédits, vous maintenez le nombre d'opérations au même niveau qu'en 1998. Avouez que cette décision est à même de susciter l'étonnement et l'incompréhension.
Vous semblez ne tenir aucun compte des difficultés rencontrées par les organismes de logement social tenaillés entre leurs impératifs sociaux et leurs contraintes économiques. En effet, les logements neufs sont très difficiles à financer et sont souvent déficitaires pendant douze à dix-huit ans du fait du recours important à l'emprunt et du différentiel négatif entre la hausse des loyers et la croissance des charges.
La dégradation de la situation financière des organismes est due à la conjugaison d'un faisceau de facteurs tels que la faible revalorisation des loyers, la baisse de la solvabilité des locataires, l'érosion de l'APL, l'augmentation des charges fiscales et financières, la progression de la vacance malgré la pression de la demande pesant sur leur équilibre financier futur, d'autant qu'ils ont également pour mission la réhabilitation du parc existant et le suivi social de leurs locataires.
Les chiffres des PLA sont donc révélateurs de l'impossibilité des bailleurs sociaux à accomplir leurs missions, ce qui est d'autant plus préoccupant que les besoins en construction sont énormes, comme j'ai déjà eu l'occasion de le souligner.
Je souhaite donc connaître les mesures que vous envisagez de prendre rapidement, monsieur le secrétaire d'Etat, afin d'épauler un secteur social bien mal en point. Nous devons imaginer des dispositifs nouveaux.
En conclusion, monsieur le secrétaire d'Etat, votre budget montre que le Gouvernement est prêt à faire des efforts, mais des efforts pas toujours adaptés pour résorber des déséquilibres qui se creusent.
Par conséquent, je suivrai la position de la commission des finances. (Applaudissement sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Piras.
M. Bernard Piras. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'arrivée prématurée de l'hiver nous a malheureusement rappelé que le manque de logements pouvait conduire à des situations douloureuses, voire dramatiques. Sans aller jusqu'à ces cas extrêmes, le logement constitue un élément primordial, même s'il n'est pas le seul, de cohésion et d'intégration sociales.
A cet égard, si l'on constate une amélioration globale en matière de logement depuis 1980, avec une diminution de la part des revenus consacrée au logement et une augmentation du nombre de propriétaires, une paupérisation persistante est constatée.
Face à cette situation, il est nécessaire que les pouvoirs publics aient une démarche volontaire et ambitieuse, laquelle recouvre deux aspects : permettre la construction de logements en nombre suffisant pour couvrir les besoins de l'ensemble de la population, et permettre à chacun, quels que soient ses revenus, de se loger de manière décente.
Je souhaite dès à présent souligner que le projet de budget qui nous est présenté, et qui s'élève à 49,219 milliards de francs de moyens de paiement - soit une augmentation de 2,3 % par rapport à 1998 - répond à cette attente. En effet, il prévoit de nombreuses mesures favorables, lesquelles contribuent de manière positive à la consolidation et au développement des divers aspects de la politique du logement : l'investissement privé, en vue de l'accession ou de la location, ou l'investissement public ; la réhabilitation, privée ou publique ; la location sociale ; l'aide personnelle.
En ce qui concerne l'investissement privé, il faut distinguer celui qui est réalisé en vue de l'accession à la propriété et celui qui est prévu pour le locatif. Pour le premier, la budgétisation progressive du prêt à taux zéro, donc sa pérennisation, est une excellente nouvelle. Avec l'octroi, à la fin du mois d'août, de 315 693 prêts, cette disposition a fait la preuve de son efficacité.
Même si elle ne relève pas uniquement de l'investissement public ou privé, puisqu'elle concerne aussi la réhabilitation, et en raison du lien étroit qui existe, et qui perdurera jusqu'en 2003, avec le prêt à taux zéro, il faut souligner l'intérêt de la convention conclue entre l'Etat et l'Union d'économie sociale du logement au sujet du 1 % logement.
Cet accord organise l'extinction progressive du prélèvement de l'Etat sur les ressources du 1 % logement et le maintien de la finalité habituelle de celui-ci en matière de construction et de travaux. En outre, la convention signée prévoit une sécurisation des accédants à la propriété, laquelle prend deux formes.
La première est ouverte à tous les accédants modestes qui ont souscrit un prêt à l'accession sociale et qui seraient touchés par le chômage. Un report d'une partie de leurs mensualités - 50 % - est ainsi assuré pendant une période de douze mois.
La seconde, qui s'applique aux personnes dont l'employeur est assujetti au 1 % et qui sont éligibles au prêt à taux zéro, se met en place lorsqu'une baisse importante des ressources, due au chômage ou à l'éclatement familial, est constatée. Il semble qu'un élargissement du premier dispositif soit nécessaire.
La modernisation du 1 % s'inscrit aussi par l'instauration d'aides à l'emménagement - cela est très important - compte tenu de la mobilité actuelle des salariés et par un nouveau système de prise en charge gratuite des cautions et garanties d'impayés des loyers, mesure qui est plutôt orientée vers les jeunes.
Mais l'investissement privé n'a pas uniquement pour finalité l'accession à la propriété, puisqu'il peut avoir également pour objectif la location. Là aussi, les pouvoirs publics doivent orienter l'épargne vers l'investissement locatif.
Dans ce secteur, le système d'amortissement Périssol, qui s'achèvera au 31 décembre 1998, date à laquelle le permis de construire devra avoir été obtenu, avait comme principal défaut d'être plus attentif aux investisseurs qu'aux locataires.
Le dispositif que vous nous proposez, monsieur le secrétaire d'Etat, véritable statut du bailleur privé, est beaucoup plus conforme à la finalité de cette forme d'aide publique. En outre, il s'applique au neuf et à l'ancien.
Pour le neuf, il ouvre droit à une déduction au titre de l'amortissement des dépenses de construction et d'agrandissement égale à 8 % du montant des dépenses pour les cinq premières années et 2,5 % de ce montant pour les quatre années suivantes, sous réserve de mise en location pour neuf ans et du respect de plafonds de loyers et de ressources du locataire.
Pour l'ancien, la déduction forfaitaire sur les revenus fonciers passe de 14 à 25 %, la location minimale exigée étant de six ans, des conditions de plafonds et de ressources devant aussi être respectées.
Je tiens à vous informer que le groupe socialiste souhaite apporter trois amendements au statut du bailleur privé tel qu'il nous est proposé.
Les deux premiers consistent à faire passer la durée d'amortissement de neuf à quinze ans en maintenant les obligations fixées en matière de ressources et de plafonnement, afin que ces logements restent bien dans le secteur intermédiaire, avec des loyers maîtrisés. Cela permettra ainsi de faire la jonction avec le dispositif de l'ANAH, sécurisant ainsi tant les bailleurs que les locataires.
Le troisième amendement a pour finalité d'étendre ces dispositions aux descendants et ascendants, mais pas pour faire plaisir aux « fils de famille aisée », car des conditions contraignantes doivent être prévues : respect des conditions de ressources et de loyer, non-appartenance au même foyer fiscal, absence de versement de pension alimentaire donnant droit à déduction. Cet amendement a pour objectif de modérer le montant des loyers des petites surfaces, souvent élevé, et de détendre le marché de l'immobilier pour étudiants.
L'autre facette de l'investissement concerne l'investissement locatif social, qui est un secteur dans lequel le Gouvernement actuel a accompli de nombreux efforts.
Le dispositif, qui prévoit une aide indirecte sous la forme d'un taux de TVA réduit, une subvention versée directement à l'emprunteur et une subvention versée à l'établissement prêteur, concerne les subventions et les prêts locatifs aidés qui sont attribués pour des logements destinés à être occupés par des locataires dont l'ensemble des ressources est inférieur à un montant fixé par décret.
Il faut rappeler que ces PLA peuvent être de différente nature - à caractère expérimental, à loyer minoré, d'intégration, ou de construction-démolition - ce qui engendre l'octroi de subventions supplémentaires, et s'appliquer soit à des constructions neuves, soit à des opérations d'acquisition-amélioration.
Vous avez souhaité, monsieur le secrétaire d'Etat, reconduire les budgets de 1998, avec quatre-vingt mille PLA, dont vingt mille PLA à loyers minorés et dix mille PLA d'intégration. Cette volonté est sans doute louable, mais elle se heurte à la non-utilisation constatée et dénoncée par beaucoup des crédits prévus pour 1997 ou 1998.
Le fait d'abaisser d'un demi-point le taux d'intérêt servi aux titulaires du livret A, permettant ainsi à la Caisse des dépôts et consignations de baisser d'autant ceux des prêts pour les opérations de construction et de réhabilitation, est une bonne chose, mais risque d'être insuffisant pour réduire cet échec.
Les différentes explications avancées sont sans doute vraies : la complexité du montage des dossiers, une demande plus difficile, une concurrence grandissante de l'accession à la propriété, un habitat social ayant mauvaise presse, une maîtrise insuffisante des coûts de construction, un coût excessif de l'acquisition foncière, enfin, une rentabilité incertaine de l'investissement due à des loyers jugés trop bas.
J'ai pu constater, dans mon département, que les élus locaux ne manquaient pas d'ambitions dans ce domaine, mais qu'ils se heurtaient bien souvent à des obstacles qui les décourageaient : zèle du service d'architecture ou projet jugé trop éloigné de l'agglomération.
J'en profite pour souligner que le développement du logement social doit absolument être encouragé en milieu rural. Une telle volonté aurait, me semble-t-il, plusieurs avantages : un brassage et un rééquilibrage de la population, une revitalisation du milieu rural, un aménagement du territoire plus cohérent.
J'ajoute à cela la nécessité d'assouplir la loi montagne, qui empêche parfois la délivrance de nombreux permis de construire et contrarie la volonté des élus locaux de lutter contre la désertification rurale. J'insiste donc tout particulièrement sur ce point, qui m'apparaît très important.
Quoi qu'il en soit, le constat est là : l'investissement locatif social est insuffisant et, en tout cas, il ne répond ni à l'attente ni aux prévisions des pouvoirs publics. La réflexion à ce sujet doit se poursuivre, celle-ci devant impérativement associer de manière beaucoup plus étroite les collectivités locales, notamment les communes.
Mais l'impulsion des pouvoirs publics n'est pas uniquement axée sur la construction ; elle est aussi orientée vers la réhabilitation des logements existants. Le budget prévu pour 1999 soutient cette démarche nécessaire, tant dans le parc privé que public d'occupation sociale. Ainsi, dans le parc privé, étaient encore recensés, en 1996, 934 000 logements dénués de tout confort.
A ce titre, il faut se féliciter de la consolidation des avancées de 1998 en matière de prime à l'amélioration de l'habitat, puisque les crédits augmentent de 2 %, s'élevant ainsi à 816 millions de francs, ce qui correspond à la réhabilitation de quatre-vingt mille logements.
Rappelons que cette prime est une subvention octroyée aux personnes physiques, sous conditions de ressources, qui effectuent des travaux d'amélioration dans des immeubles ou des logements dont elles sont propriétaires et qui constituent leur résidence principale. Un relèvement des plafonds serait sans doute souhaitable pour élargir le bénéfice de ce dispositif. Il est regrettable, par ailleurs, que la réglementation européenne ne permette pas l'extension de l'abaissement de la TVA à l'offre locative privée.
Il est également à noter, en matière de réhabilitation du parc privé, que les moyens mis à la disposition de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, sont reconduits à hauteur de 2,2 milliards de francs.
A cela s'ajoute la réduction de 5,5 % du taux de TVA sur les opérations de réhabilitation menées par l'ANAH. Ces aides concernent des locaux privés, dans des immeubles achevés depuis plus de quinze ans, loués à usage principal d'habitation.
Je tiens à nouveau à souligner la mesure, tant attendue dans les zones reculées et adoptée cet été, qui étend l'intervention de l'ANAH à la transformation en logements locatifs d'immeubles non affectés à un usage principal d'habitation dès lors qu'ils se situent dans des zones de revitalisation rurale. J'espère que la simple reconduction des crédits ne sera pas un obstacle financier à l'application de cette réforme.
Pour ce qui est de la prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale, dite PALULOS, le budget a prévu la réhabilitation de 120 000 logements sociaux. Cette aide se traduit par un taux réduit de TVA à 5,5 % et une subvention de 10 %.
Je viens d'évoquer les efforts publics consacrés en matière de construction, de transformation et de réhabilitation de logements afin de répondre aux besoins de l'ensemble de la population et, plus particulièrement, des ménages les plus modestes.
Ainsi, l'Etat doit veiller à l'existence de logements suffisants pour répondre à la demande, mais aussi à la mise sur le marché de logements, à des prix ou loyers plafonnés, pour les familles les plus modestes. Ce budget répond à la nécessité d'amélioration, de diversification et d'augmentation du parc des logements, notamment sociaux.
L'intervention des pouvoirs publics ne porte pas uniquement sur les logements ; elle concerne aussi les personnes et, plus particulièrement, celles qui n'ont pas de revenus suffisants pour financer seules leur budget logement. Ces aides représentent plus de 75 milliards de francs de prestations versées et concernent plus de 6,15 millions de ménages, dont trois millions ayant des ressources comprises entre le SMIC et le RMI.
Les aides à la personne recouvrent l'aide personnalisée au logement, l'ALP, l'allocation de logement familiale, l'ALF, et l'allocation de logement sociale, l'ALS. Après quatre années de gel, je souligne l'actualisation réalisée en 1997, poursuivie en 1998 et promise pour 1999. Celle-ci était nécessaire en vue de garantir la cohésion sociale assurée par ces aides. Cela se traduit par une augmentation de 4,4 % avec un budget de 34,629 milliards de francs pour les aides personnelles.
Mais la politique sociale du Gouvernement ne s'arrête pas là, puisque est prise en compte, d'un point de vue budgétaire, la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, ce qui est une nouveauté. Ce point représente l'aspect le plus novateur de ce budget.
Ainsi, la dotation de l'Etat versée au fonds de solidarité pour le logement connaît une très forte revalorisation, de l'ordre de 44 % par rapport à 1998, soit un doublement par rapport à 1997. Avec la participation obligatoire des départements, le FSL disposera de 1,2 milliard de francs.
Cela permettra, notamment, l'ouverture des aides du fonds de solidarité pour le logement aux sous-locataires, l'interdiction de toute restriction d'accès au fonds et les limitations des critères d'éligibilité aux seuls critères de niveau de ressources. Il faut aussi noter que, à la ligne consacrée aux fonds de solidarité pour le logement, 60 millions de francs sont prévus en faveur des associations qui louent des logements à des personnes défavorisées.
En ce qui concerne l'aide au logement temporaire, l'ALT, accordée aux associations hébergeant à titre temporaire des personnes défavorisées et financée par le fonds national d'aide au logement, le projet de loi de finances pour 1999 prévoit de porter les crédits de 110 millions de francs à 130 millions de francs, afin de financer l'extension aux centres communaux d'action sociale de la prestation d'aide au logement temporaire.
Telles sont, brièvement présentées, les raisons qui me font penser que le budget qui nous est présenté est bon. En effet, il n'oublie notamment aucun des aspects qu'une politique du logement cohérente et efficace doit comporter. En outre, une politique du logement réussie est également bénéfique pour l'économie, l'aménagement du territoire, la politique de la ville ou la cohésion sociale.
Je remarque que la commission des affaires économiques et la commission des affaires sociales du Sénat ont expressément ou tacitement approuvé ce budget, alors que la commission des finances propose une diminution de l'ordre de 500 millions de francs de crédits affectés au financement des aides personnelles. J'ose espérer que, comme le fera le groupe socialiste, la majorité sénatoriale, dans sa sagesse, s'opposera à toute réduction budgétaire.
Nous voterons donc ce budget, en incitant fortement le Gouvernement à poursuivre dans cette voie. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi, tout d'abord, de remercier vivement vos rapporteurs, MM. Pelletier, Plancade, Bimbenet et Bellanger, ainsi que leurs collaborateurs, dont je sais combien le concours est précieux. Ils vous ont présenté les grandes orientations et les principaux chiffres du projet de budget du logement et de l'urbanisme pour 1999. La qualité de leurs rapports et de leurs exposés, que j'ai écoutés avec beaucoup d'attention, facilite grandement ma tâche et me permettra d'abréger quelque peu mon propos, même si, par quelques digressions, je m'efforcerai d'apporter des réponses aux principales questions qui m'ont été posées par les intervenants.
Toute l'action du Gouvernement, au cours de ces derniers mois, a consisté à mettre en place, vous l'avez compris, les fondations d'une nouvelle politique du logement plus globale, plus juste et plus stable.
A ce titre, nous avons donné au logement social des moyens accrus ; tout le monde l'a relevé. Toutefois, des inquiétudes subsistent. Elles ont été exprimées ici même par vos rapporteurs, MM. Pelletier, Plancade et Bimbenet, ainsi que par Mme Terrade, MM. Piras et Vezhinet. Je veux leur dire à tous que le Gouvernement partage leurs inquiétudes.
Vous vous êtes fait l'écho des constructeurs de logements sociaux qui font état d'obstacles expliquant, à leurs yeux, les difficultés à consommer les crédits. Des obstacles, il en subsiste certainement et notre volonté est bien de continuer à nous y attaquer. Mais, d'ores et déjà, nous en avons levé plusieurs. Ainsi, les taux des prêts ont été abaissés d'un demi-point au mois de juin et les plafonds de ressources ont été relevés, en moyenne, de 10 % au mois de juillet.
Quant à l'incertitude ressentie par les collecteurs du 1 % lorsqu'il leur fallait assumer le coût du prêt à taux zéro, elle est désormais levée et l'horizon est clarifié depuis la signature de la convention quinquennale intervenue le 3 août dernier.
Les gestionnaires du 1 % logement savent donc désormais qu'ils ont retrouvé la possibilité de s'engager dans le financement d'opérations locatives HLM, à un niveau annuel d'engagement de 4,5 milliards de francs, mais cette disposition ne s'appliquera, bien évidemment qu'à compter du 1er janvier 1999.
Il n'est donc pas anormal, mesdames, messieurs les sénateurs, qu'il faille attendre un certain délai pour que les mesures que je viens d'énumérer prennent corps et se traduisent concrètement dans les faits. La plus ancienne, qui a trait au 1 % logement, a moins de six mois et ne sera effective et applicable que lorsque les engagements concernant le prêt à taux zéro ne seront plus assumés par le 1 %, c'est-à-dire à partir du 1er janvier prochain. C'est donc normalement sur les résultats de 1999 que nous devrions enregistrer les premiers effets positifs de ces efforts que vous nous avez invité à entreprendre, ce dont je vous remercie.
Toutefois, vous le savez, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, tout ne peut venir de l'Etat dans ce domaine. Nous avons besoin de la participation et de l'engagement des collectivités locales. Vous savez combien leur volonté et, à tout le moins, leur complicité sont essentielles à la réalisation de tout projet.
Parallèlement aux efforts en faveur du logement locatif social, nous avons voulu consolider l'accession à la propriété et mieux la sécuriser afin de prendre en compte la fragilité croissante des ménages force non seulement au chômage mais aussi aux aléas familiaux.
Notre politique, nous l'avons voulue aussi plus juste, au regard notamment des dispositions de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. L'exclusion du logement, la ségrégation urbaine ou la précarité sont autant de défis auxquels nous nous devons d'apporter des réponses.
Mme Terrade puis M. Piras ont évoqué l'actualité de l'hiver. Combien ils ont raison ! Mais c'est bien sûr tout au long de l'année qu'il faut agir afin que la saison la plus froide ne soit pas dramatique pour nos concitoyens les plus fragiles.
Ainsi, une circulaire concernant tout le volet « logement » de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions a été adressée, le 13 octobre 1998, à tous les préfets.
Sur les quinze décrets dépendant de mon secrétariat d'Etat - et je réponds là aux questions de M. Vezinhet - deux ont été publiés le 15 novembre, à savoir le décret sur la gestion locative, c'est-à-dire sur le financement de la médiation locative, et le décret relatif au surloyer. Huit autres sont en cours d'examen au Conseil d'Etat et devraient être publiés dans les six à huit semaines qui viennent. Les cinq derniers décrets sont prévus pour le premier semestre 1999, car ils nécessitent soit une concertation approfondie - c'est le cas du décret concernant les FSL, pour lequel une concertation doit être engagée avec l'Assemblée des présidents de conseils généraux - soit une expérimentation - c'est le cas du décret concernant la réforme des attributions d'HLM.
La circulaire relative à la prévention des expulsions qui est en préparation prend en compte la nécessité de résoudre rapidement les problèmes d'insolvabilité des locataires de bonne foi en difficulté.
Cette mesure, M. Ostermann en conviendra, n'est pas contraire aux intérêts des bailleurs. Je veux dire par là que nous n'opposons pas les deux parties mais que nous cherchons des dispositifs permettant de déboucher sur des solutions qui conjuguent les intérêts légitimes des uns et des autres.
Nous avons voulu que cette politique plus globale et plus sociale soit également plus stable, c'est-à-dire qu'elle s'inscrive dans la durée.
C'est, à nos yeux, une condition d'efficacité des interventions publiques, particulièrement des acteurs du logement. C'est évidemment tout le sens du statut du bailleur privé qui, sur ce point, est en rupture totale avec la logique conjoncturelle du précédent dispositif. C'est tout le sens également du travail de fond que nous menons avec le mouvement HLM pour consolider le logement social. Certains d'entre vous ont souhaité que des représentants de la Haute Assemblée et d'autres instances participent à ce travail de fond au sein d'un groupe de travail. Nous sommes, bien sûr, ouverts à cette proposition.
C'est, enfin, dans cette logique que s'inscrit la convention quinquennale conclue avec les partenaires du 1 %, qui ouvre de nouveaux champs d'intervention et renforce le paritarisme.
Il importe aussi d'agir dans la durée en matière de renouveau urbain. La politique de l'habitat doit contribuer plus qu'elle ne l'a fait jusqu'à présent à la qualité de la vie urbaine et aux équilibres indispensables à la cohésion sociale. J'ai, à cet égard, écouté avec beaucoup d'attention les propos de M. Bellanger.
Le projet de budget du logement et de l'urbanisme pour 1999 s'inscrit dans cette politique volontariste, qui a été menée tout au long de ces derniers mois et qui se décline autour de quatre axes prioritaires.
Le premier axe est, bien évidemment, la consolidation, en 1999, de l'effort budgétaire significatif de 1998. Cette consolidation porte à la fois sur les moyens budgétaires globaux et sur les programmes physiques.
Ainsi, les crédits du logement et de l'urbanisme pour 1999, après les amendements adoptés à l'Assemblée nationale, s'établissent à 49 370 millions de francs en moyens d'engagement, soit une augmentation de 3,7 % par rapport à 1998, et à 49 219 millions de francs en crédits de paiement, soit une progression de 2,3 % par rapport à 1998.
Comme vous le voyez, ces évolutions montrent clairement que les crédits du logement sont largement consolidés en 1999 après s'être accrus de plus de 10 % en 1998, en tenant compte des efforts fiscaux.
Ainsi, 80 000 PLA seront à nouveau effectivement financés, dont 20 000 PLA à loyer minoré et 10 000 PLA d'intégration. L'équivalent de 120 000 PALULOS est également retenu dans le budget pour 1999.
En ce qui concerne la réhabilitation du parc privé, nous avons, là aussi, une consolidation des avancées de 1998 : les crédits de la prime à l'amélioration de l'habitat augmenteront de 2 % pour atteindre 816 millions de francs, soit un potentiel de 80 000 logements réhabilités par leurs propriétaires occupants. Quant à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, son enveloppe sera reconduite à 2,2 milliards de francs.
Dans le domaine de l'urbanisme - j'admets avec M. Bellanger qu'il y a encore des progrès à faire dans la présentation budgétaire - les dotations augmenteront en 1999 de plus de 13 %, ce qui mérite d'être souligné. Comme les propos de M. Bellanger le démontrent à travers quelques aspects très concrets, les moyens en matière d'urbanisme conditionnent directement notre capacité collective à mieux aménager, à mieux construire et, par la même, à mieux répondre aux aspirations de nos concitoyens en matière de cadre de vie. C'est la première fois depuis des années, mesdames, messieurs les sénateurs, que le budget de l'urbanisme connaît une croissance, et qui plus est, elle est à deux chiffres. Ces moyens nouveaux permettront d'accroître les capacités d'expertise et d'études des services locaux dans le domaine de l'urbanisme et de la connaissance des territoires. Dans la même logique, les interventions au bénéfice des agences d'urbanisme sont accrues de 5 millions de francs et portées à 58 millions de francs, soit une croissance de près de 10 %. Les interventions concernant l'action foncière de l'Etat et les grandes opérations d'urbanisme dont, monsieur le président de la commission des finances, Euroméditerranée, sont portées de 44 millions à 80 millions de francs. Dans le même temps, le financement des architectes et paysagistes conseil sera consolidé.
Enfin, les aides spécifiques aux agglomérations nouvelles les plus endettées seront augmentées, alors même que la dotation d'équipement dérogatoire aux villes nouvelles prend fin, comme vous le savez, en 1998.
Le deuxième axe de la politique sociale du logement m'invite à faire le point sur les aides personnelles au logement.
Plus de 75 milliards de francs de prestations seront versés à plus de 6 150 000 ménages. Il s'agit de ménages socialement très ciblés, monsieur le rapporteur spécial. En effet, 3 000 000 d'entre eux disposent de ressources comprises entre le RMI et le SMIC et 3 000 000 ont un revenu compris entre un et deux SMIC. Pratiquement, plus personne n'est éligible à ces aides au-delà d'un revenu supérieur à deux SMIC. Ces prestations constituent, vous le comprenez bien, dans ce contexte - et c'est pourquoi il est difficile de les amputer - un moyen primordial de justice sociale en favorisant l'accès et le maintien dans le logement des personnes modestes et défavorisées.
Comme le Gouvernement s'y était engagé, la politique d'actualisation régulière de ces prestations, reprise au 1er juillet 1997 après quatre années de quasi-gel, a été poursuivie en 1998, avec une actualisation au 1er juillet 1998 des barèmes aussi bien de l'aide personnalisée au logement que des allocations de logement.
Au total, les mesures prises par le Gouvernement depuis dix-huit mois portent, pour les aides personnelles et les allocations de logement, sur une somme globale de 4,5 milliards de francs. Je me permets d'insister sur cette somme en vous invitant, mesdames, messieurs les sénateurs, à la rapprocher de l'effort demandé aux bénéficiaires des allocations familiales, qui étaient jusqu'à présent allouées sans condition de ressources, effort situé entre 3,5 milliards et 4 milliards de francs. Cela signifie que, pour les seules allocations familiales se rapportant au logement et visant les familles les plus modestes, ce nouvel effort, compte tenu de ces actualisations, débouchera sur une somme supérieure à l'effort qui a été demandé aux familles les plus aisées, et qui va l'être, par application du quotient familial révisé.
A celles et à ceux qui affirmaient que le Gouvernement menait une politique familiale restrictive, la réponse est là. C'est un autre ciblage ; c'est une politique de soutien familial plus sociale, mais il n'y a pas régression. Dans le seul domaine du logement - je ne parle pas de l'allocation de rentrée scolaire - cela représente une somme plus élevée que celle qui résulte de l'effort de solidarité demandé aux familles les plus aisées.
Cette actualisation, qui assure le maintien de l'efficacité sociale de ces aides pour les familles les plus modestes, sera poursuivie en 1999 dans le cadre des crédits qui vous sont proposés pour la ligne concernant ces aides au logement. Je pense que cela va dans le sens des préoccupations de Mme Terrade et de M. Vezinhet, même si la réglementation nécessite encore des adaptations, ainsi que l'ont souligné les rapporteurs MM. Pelletier, Plancade et Bimbenet, pour simplifier les aides et en améliorer l'efficacité sociale.
Ainsi, au sein du projet de budget pour 1999, la somme prévue pour les aides personnelles qui s'élève à 34 629 millions de francs, est en hausse de 4,4 % par rapport à la loi de finances initiale de 1998. Cette augmentation tient à la fois à l'actualisation et à l'augmentation du nombre des bénéficiaires. Aussi, mesdames, messieurs les sénateurs, j'appelle votre attention sur ce point car, bien évidemment, une réduction de cette ligne ne permettrait pas d'atteindre cet objectif. Or, en conscience, chacun de vous ne peut que le partager.
La politique sociale du Gouvernement trouve une autre traduction forte dans le projet de budget pour 1999 du logement. Il reprend en effet en totalité, comme cela a été indiqué, les engagements pris par le Gouvernement lors de l'examen et du vote de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. Les dotations de l'Etat au Fonds de solidarité pour le logement, le FSL, sont fortement relavorisées, comme l'a relevé M. le rapporteur spécial. En effet, elles augmentent de 44 % par rapport à 1998. Elles s'élèvent à 490 millions de francs, contre 340 millions de francs, en 1998, soit un quasi-doublement par rapport à la loi de finances initiale de 1997, c'est-à-dire en deux ans. Elles permettront notamment d'éviter les expulsions dans des dizaines de milliers de cas, expulsions qualifiées, pour toutes les personnes de bonne foi, d'inadmissibles et d'inacceptables, comme l'a indiqué M. le rapporteur spécial.
Par ailleurs, les associations qui assurent la gestion de logements au bénéfice de personnes défavorisées seront désormais aidées par l'Etat, indépendamment du soutien qu'elles trouvaient auprès du FSL. Un crédit de 60 millions de francs, vous l'avez remarqué, est prévu à cet effet. Les moyens consacrés à l'aide au logement temporaire, l'ALT, sont effectivement étendus aux structures d'accueil des centres communaux d'action sociale, qui n'y avaient pas accès jusqu'à présent.
Comme l'a noté M. Vezinhet, les centres communaux d'action sociale de l'Hérault ont apprécié cette mesure ; j'en suis heureux. Cela correspond à une augmentation de 18 %, avec une dotation de 130 millions de francs.
En outre, une dotation de 50 millions de francs est affectée à l'accompagnement des actions de lutte contre le saturnisme. Elle s'ajoutera aux subventions de l'ANAH, qui a, de son côté, porté son taux pour ce type de travaux à 70 %. Enfin, les crédits permettant la résorption de l'habitat insalubre progressent de plus de 3 %.
Le troisième axe que je souhaite aborder devant vous, c'est la création d'un statut du bailleur privé.
L'an dernier, j'avais eu l'occasion de vous annoncer que le Gouvernement souhaitait respecter l'engagement pris par le candidat Lionel Jospin lors de l'élection présidentielle de 1995. Il ne s'agit donc pas d'une idée qui aurait été récemment sortie d'un chapeau. Cet engagement concernait la mise en place d'un nouveau système pour remplacer les dispositifs en vigueur d'incitation à l'investissement locatif privé.
L'objectif est de dégager une offre locative destinée à ceux de nos concitoyens ne pouvant bénéficier d'un logement aidé, ou souhaitant avoir une liberté de choix - car dans l'ancien il y aura parfaite complémentarité entre l'offre sociale et l'offre privée conventionnée - ou ne pouvant pour autant s'adresser au secteur totalement libre.
Le secteur social est ouvert à plus de 60 % des ménages depuis que nous avons relevé les plafonds de ressources correspondants et est donc bien loin d'être cantonné aux ménages démunis. Il y a donc là une place en complément et non en concurrence pour ce secteur intermédiaire.
Je vais citer quelques chiffres qui vous montreront la cohérence de nos propositions.
Cette année, seront sans doute construits 280 000 logements, soit 10 000 de plus que l'an dernier. Les trois quarts de ces 280 000 logements dépendent de l'action publique : 110 000 prêts à taux zéro bonifiés, 55 000 logements locatifs HLM, 45 000 logements acquis avec l'aide fiscale que constitue l'amortissement accéléré. Par conséquent, 210 000 logements sont totalement tributaires de l'action publique. Cela signifie qu'aujourd'hui 25 % seulement de nos concitoyens peuvent résoudre leur problème de logement par eux-mêmes. Certes, les pouvoirs publics ne s'en désintéressent pas. Pour autant, ils n'ont pas de devoir particulier à mettre en place des systèmes d'aide pour des personnes qui, heureusement, peuvent trouver une solution par elles-mêmes.
Sur les trois quarts de nos concitoyens qui ne peuvent pas trouver une réponse par eux-mêmes, 61 % sont éligibles au parc social HLM. Mais on peut très bien considérer que, pour des considérations de localisation ou d'adaptation à leurs besoins, ces 61 %, pour la fraction d'entre eux relevant du locatif, veulent avoir le choix entre le locatif social public et le locatif privé conventionné. Voyons bien cette complémentarité. L'aide que nous mettons en place pour le locatif neuf privé conventionné peut tout à fait être ce logement intermédiaire répondant aux besoins de la demande locative de ceux de nos concitoyens qui se situent entre les 61 % éligibles pour le logement social et les 75 % qui ont de toute façon besoin d'une offre dépendante de l'action publique. Que ce soit dans l'ancien ou dans le neuf, vous constatez une parfaite complémentarité entre les deux offres, que l'on ne saurait évidemment opposer.
Donc, afin de développer dans le parc privé cette offre à loyer maîtrisé, répondant aux besoins que je viens d'exposer, l'article 68 du projet de loi de finances, que vous examinerez ultérieurement, prévoit l'instauration de ce statut pérenne et équilibré du bailleur privé.
Comme cela a été fort bien dit, le principe consiste à accompagner les aides fiscales d'une contrepartie sociale.
En outre, et c'est là une grande rupture avec le système antérieur, le nouveau dispositif s'applique aussi bien au secteur de l'ancien qu'aux logements neufs. Dans le cas de ces derniers, il prendra la forme d'un régime d'amortissement, avec, comme contrepartie, l'obligation, il est vrai, pour le bailleur de respecter des plafonds tant en matière de loyer qu'en matière de ressources des locataires. Le taux de l'amortissement sera de 8 % pendant cinq ans et de 2,5 % au cours des quatre années suivantes. Dans le cas du parc existant - donc, le parc privé ancien - la formule sera différente puisqu'il s'agira d'une déduction forfaitaire, portée de 14 % à 25 % pour les revenus fonciers, ce qui créera un avantage supplémentaire en termes d'impôt sur le revenu.
L'attractivité du dispositif sera accrue par la mise en place de mesures destinées à assurer une meilleure sécurisation pour les bailleurs. D'une part, l'allocation logement leur sera directement versée ; d'autre part, les dispositifs de l'accord conclu avec le 1 % permettront la mise en place de garanties de paiement du loyer et des charges au-delà de la partie couverte par l'aide à la personne versée directement, et ce pendant une durée de trois ans.
Il s'agit donc bien là d'un changement total de logique. D'un système temporaire, en quelque sorte équivalent aux primes accordées pour relancer le marché de l'automobile, nous passons à une formule durable, équilibrée, qui se mesurera non pas seulement par des avantages fiscaux, mais également par la reconnaissance d'une fonction économique et sociale des bailleurs privés, répondant ainsi, me semble-t-il, au souhait que vous avez exprimé, monsieur Ostermann. A ce propos, je me permets de vous inviter à considérer la lutte contre la vacance au regard de cette approche radicalement nouvelle à l'égard du métier de bailleur.
Le quatrième axe est la modernisation du 1 % logement et la pérennisation du prêt à taux zéro par rebudgétisation de l'accession sociale à la propriété.
Je n'insisterai pas sur ce point, que j'ai eu l'occasion de développer devant vous le 12 novembre dernier, lors de la présentation du projet de loi relatif à la participation des employeurs à l'effort de construction que vous avez bien voulu adopter à l'unanimité. Je rappellerai donc brièvement que la convention conclue pour cinq ans le 3 août dernier, convention que la commission des finances a saluée à l'unanimité, ce à quoi je suis sensible, prend en compte l'évolution du marché du logement et des conditions de vie des salariés, tant sur le plan familial que professionnel, conditions de vie qui sont marquées par une mobilité croissante et par une certaine instabilité.
En réponse à cela, les emplois du 1 % logement sont désormais étendus à la sécurisation des accédants à la propriété, au financement des travaux d'entrée dans les lieux, à l'occasion des changements de logement pour mobilité professionnelle, et, enfin, dans le secteur locatif - social ou privé - à de nouveaux systèmes de prise en charge gratuite des cautions et garanties d'impayés de loyer.
Parallèlement à ces nouveaux emplois, les interventions traditionnelles du 1 % logement, en particulier l'apport financier complémentaire aux constructions et travaux de logements HLM et l'aide à l'accession des salariés à la propriété, sont bien entendu réaffirmées et consolidées.
J'ajoute que, pour mieux impliquer les partenaires sociaux, en particulier les salariés, les comités interprofessionnels du logement, les CIL, seront transformés en unions d'économie sociale.
Enfin, la convention conclue clarifie les relations financières entre l'Etat et le 1 % logement en organisant la réduction progressive, sur cinq ans, de la contribution financière du 1 % au budget du logement, qui devra être nulle en 2003.
Consécutivement à la baisse des prélèvements sur les ressources du 1 % logement, le financement de l'accession sociale sera donc rebudgétisé.
Les moyens prévus au projet de budget pour 1999 permettront de poursuivre la distribution de ces prêts au même niveau et aux mêmes conditions qu'en 1998, soit environ 110 000 prêts.
Vous le savez, les taxes locales grevant les ventes de locaux d'habitation - les droits de mutation - sont réduites de plus de 20 % par la suppression de la part régionale de la taxe sur ces ventes depuis le 1er septembre 1998. Il en résulte, en année pleine, un allégement fiscal de 3,7 milliards de francs pour les ménages, ce qui, selon les professionnels, facilitera les transactions et améliorera la fluidité du marché immobilier.
Le taux réduit de TVA à 5,5 % s'appliquera aux dépenses d'amélioration de l'habitat lorsque les bailleurs privés bénéficieront d'une subvention de l'ANAH et d'un conventionnement éligible à l'APL. Plus de 10 000 logements devraient être concernés, complétant ainsi les mesures prises l'an dernier pour les travaux d'amélioration du parc locatif HLM avec lequel un parallèle pouvait se faire.
J'ai bien entendu le souhait de voir étendre cette mesure au parc locatif privé. Il y a un problème d'eurocompatibilité à cet égard. Toutefois, comme M. le Premier ministre l'a annoncé au congrès de l'Union professionnelle artisanale, la France demande à Bruxelles d'adopter sur ce point sa position, à savoir d'aller effectivement dans cette direction.
Par ailleurs, un amendement voté en première lecture à l'Assemblée nationale et que les commissions du Sénat ont également adopté a plus que doublé le crédit d'impôt pour les travaux d'entretien et de revêtement à domicile, en portant le taux de 15 % à 20 % et en doublant les plafonds de dépenses, en les portant par exemple de 10 000 francs à 20 000 francs pour un couple. Cette mesure permettra bien évidemment de soutenir efficacement l'activité du bâtiment et de lutter contre le travail au noir.
Enfin, vous le savez, plusieurs mesures fiscales ont été adoptées dans le cadre de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. Il s'agit notamment de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties pendant quinze ans, ce qui devrait faciliter les opérations d'acquisition-amélioration de logements locatifs sociaux dont on sait l'intérêt tant pour revitaliser nos centres-villes et nos centres-bourgs que pour produire des logements adaptés aux besoins d'intégration des ménages les plus en difficulté.
On peut par ailleurs espérer que la clarification du régime fiscal de la sortie du bail à réhabilitation permette une relance de cette formule dans l'habitat ancien privé.
Comme vous le voyez, le projet de budget pour 1999 s'inscrit dans la recherche d'une plus grande justice sociale, dans l'établissement d'un cadre stable pour les nombreux acteurs publics, privés et associatifs intervenant dans le secteur du logement et, également, dans le souci du développement de l'emploi dans le bâtiment.
Nous avons quelques signaux d'amélioration de la situation du bâtiment depuis l'été 1998. En effet, pour la première fois depuis six ans, le secteur du bâtiment ne perd plus d'emplois. Mais cette reprise est encore fragile, et il faut donc que le budget pour 1999 la consolide afin que le bâtiment contribue dès l'an prochain à la croissance économique générale de notre pays et à l'emploi.
Face à la préoccupation majeure de nos concitoyens de pouvoir disposer d'une offre de logements diversifiée à des conditions accessibles et compatibles avec leurs ressources, la politique du logement doit bien entendu disposer de moyens à la hauteur de cette attente et s'inscrire dans un environnement fiscal amélioré. C'est dans ces deux directions que nous progresserons en 1999.
Mais cette priorité du Gouvernement devra être prolongée et complétée par des réformes indispensables pour la mettre au service de politiques urbaines renouvelées, pour que nos quartiers, nos communes et nos agglomérations soient des lieux d'équilibre, de mixité sociale et urbaine, et non des lieux de ségrégation.
Pour cela, il faut mettre en cohérence, à l'échelle de l'agglomération, les différentes politiques sectorielles et l'ensemble des démarches de planification. Il faut aussi renforcer la mixité urbaine par une diversification de l'offre d'habitat et par un développement urbain équilibré à la fois socialement et dans l'espace. Pour atteindre ce but, les communes qui ont le moins d'habitat social devront faire le plus grand effort. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Le secteur privé conventionné doit être mis, lui aussi, au service de cet objectif. C'est sur le terrain qu'il faut y veiller, d'où l'importance de la responsabilité assumée par les élus locaux.
Il faut également limiter l'étalement urbain et la dispersion de l'habitat. Pour cela, il faut pouvoir faciliter la reconstruction de la ville sur elle-même par des outils renouvelés d'urbanisme opérationnel qui permettent d'intervenir efficacement aussi bien dans les quartiers d'habitat social que dans les quartiers anciens dégradés, dans le secteur locatif, comme dans les copropriétés connaissant des difficultés, monsieur Vezhinet.
Enfin, il faut développer, dans le domaine de l'habitat et dans celui de l'urbanisme, de nouvelles formes de partenariat entre l'Etat et les collectivités locales, ainsi qu'une plus forte participation des citoyens à l'évolution de leur cadre de vie.
Ces objectifs me semblent couvrir les préoccupations qui viennent d'être exprimées par MM. Bellanger, Pelletier et Piras.
Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, la consolidation de l'action menée par le Gouvernement est loin d'être achevée.
Avant de conclure, je veux répondre précisément à la question de M. Bellanger, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour l'urbanisme, qui m'a demandé dans quels délais seront publiés les décrets d'application de la loi du 30 décembre 1996 relative à la mise en oeuvre dans les départements d'outre-mer de la zone des cinquante pas géométriques.
Le décret qui institue la commission des titres est paru le 14 septembre dernier et celui qui porte création des agences pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone des cinquante pas géométriques a été publié le 1er décembre. Trois autres décrets sont en cours d'élaboration dans le cadre d'un comité de suivi. J'appellerai l'attention de mon collègue secrétaire d'Etat à l'outre-mer, qui pilote ce dossier, sur l'impatience que vous avez exprimée.
M. Jacques Bellanger, rapporteur pour avis. Merci !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Mesdames, messieurs les sénateurs, le logement, dans toute l'évolution que connaîtra notre société, demeurera la condition première de l'autonomie personnelle et familiale, et donc de l'épanouissement de chacun. Aux besoins liés à la mobilité, qui est une caractéristique forte de la société contemporaine, s'ajoutent ceux qui naissent des nouvelles conditions de vie - études plus longues, parcours professionnels plus chaotiques, ruptures et recompositions familiales plus nombreuses, allongement constant de l'espérance de vie - et d'aspiration à une plus grande qualité. Enfin, cette offre diversifiée de logements, vers laquelle il faut tendre, doit pleinement contribuer aux équilibres sociaux et territoriaux qu'il faut souvent reconstituer dans l'habitat de nos quartiers et de nos agglomérations, en même temps qu'il faut les préserver dans nos villages et nos bourgs ruraux.
Beaucoup a déjà été réalisé pour progresser vers cet objectif, très largement partagé, du droit au logement pour tous, mais aussi du droit à un logement choisi s'intégrant dans une réelle qualité de la ville. Je tiens à dire que ces progrès doivent beaucoup à la détermination de Jean-Claude Gayssot, à qui je sais gré d'avoir fait du logement une priorité.
Mais si beaucoup reste encore à faire, le projet de budget du logement et de l'urbanisme pour 1999, que je viens de vous présenter en m'efforçant de le situer dans son contexte, constituera non seulement une consolidation, mais bien plus encore, me semble-t-il, une nouvelle avancée dans cette voie.
C'est pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous demande de bien vouloir l'approuver. (Applaudissements sur les travées socialistes, sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - M. Daniel Hoeffel applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, après Michelle Desmessine et Louis Besson, qui vous ont présenté avec talent et conviction les projets de budget du tourisme, de l'urbanisme et du logement, il m'appartient de vous présenter secteur par secteur, tout au long de la soirée et même dimanche, semble-t-il, les principales orientations du projet de budget du ministère de l'équipement, des transports et du logement.
La forme de ce débat sera donc un peu parcellisée, et c'est la raison pour laquelle je souhaite, dans cette première intervention qui porte formellement sur la section des services communs, donner un éclairage un peu général.
Mais je voudrais tout d'abord remercier l'ensemble des rapporteurs pour la qualité de leur travail et de leur réflexion. Je voudrais également remercier tous ceux d'entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, qui sont intervenus à propos des principales orientations et priorités affichées dans mon projet de budget, même si, comme l'an passé, la commission des finances du Sénat envisage de réduire le montant des crédits de fonctionnement et d'intervention de mon ministère ; mais nous aurons l'occasion d'y revenir.
Vous connaissez les grandes lignes de mon projet de budget, et nous en débattrons lors de l'examen de chaque section budgétaire.
A ce stade, je voudrais exposer une première réflexion sur les tendances lourdes que l'on peut dégager au vu de l'évolution des crédits.
La procédure budgétaire débute par la lettre de cadrage du Premier ministre. Celle-ci fixe, depuis plusieurs années, un objectif de stabilisation, en francs courants, des dépenses du ministère de l'équipement, des transports et du logement. Sous cette contrainte, l'importance de la masse salariale du ministère conduit inévitablement à une croissance des dépenses de personnel. Cette dernière, compte tenu du fait que les crédits s'inscrivent dans un volume global, est automatiquement compensée, au cours de l'exercice de préparation budgétaire, par une diminution quasi équivalente du montant des dépenses d'intervention et d'investissement. Telle est la règle du jeu.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. C'est mortel, à terme !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. C'est donc exactement ce qui s'est produit depuis quelques années pour mes prédécesseurs - comme vous le dites, monsieur le président de la commission des finances, c'était mortel, à terme - et cela continuera ainsi dans les années qui viennent, si l'objectif de stabilisation des dépenses est reconduit dans les mêmes formes...
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je le répète, c'est donc mortel, à terme !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... ou si des ressources nouvelles ne sont pas mobilisées pour financer les infrastructures et les services de transport.
Ainsi, en 1999, la lettre de cadrage prévoit une augmentation des dépenses de personnel de l'ordre de 550 millions de francs, et c'est un montant équivalent qui a été repris sur les crédits d'investissement et les moyens d'intervention du ministère.
Je dois également constater que, compte tenu des masses en cause, la réduction d'environ 16 000 emplois qui a été décidée par mes prédécesseurs depuis une quinzaine d'années n'a pas été de nature à freiner cette évolution,...
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Est-ce que vous vous comptez dans ces quinze années ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... ce qui nous amène à réfléchir les uns et les autres.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Sur ces quinze années, vous avez gouverné onze ans !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Les dépenses en capital du ministère de l'équipement représentent plus de 21 milliards de francs d'autorisations de programme. Dans les dépenses civiles de l'Etat, le secteur de l'équipement est ainsi le seul à disposer d'une capacité d'investissement significative, ayant ainsi un effet sur la croissance et sur l'emploi, comme vient de l'indiquer M. Louis Besson.
Or, inéluctablement, du fait des circonstances que j'ai rappelées, les budgets d'investissement de ce ministère sont en régression, de 500 millions à 600 millions de francs par an en moyenne.
Cette évolution ne résulte pas d'une analyse des besoins ou de mesures de rationalisation. C'est simplement, je le répète, la conséquence arithmétique de l'objectif de croissance zéro du budget de l'équipement inscrit dans les lettres de cadrage successives.
Cela pose d'ailleurs une question : doit-on apprécier l'évolution des besoins et des charges de l'Etat par rapport au seul budget précédent ou par rapport à l'évolution du produit intérieur brut, par exemple ?
Les besoins d'investissement, de maintenance et de réhabilitation demeurent, même s'ils se modifient. Ils concerneront de plus en plus la sécurité des déplacements, ce qui doit nous conduire à poursuivre le programme d'autoroutes et d'aménagements routiers. Ils concerneront également, notamment, la lutte contre le bruit et les nuisances, l'aménagement des agglomérations. Il s'agira de plus en plus d'investissements d'un montant élevé, souvent en milieu urbain.
Je considère, pour ma part, que l'Etat doit conserver des moyens d'intervention importants pour financer des projets lourds, s'insérant dans l'espace national et européen - tel est le cas des ports ou des réseaux ferrés - pour contribuer, avec les collectivités locales s'il y a lieu, à l'aménagement, au désenclavement ou à la restructuration des milieux qui le nécessitent.
Je voulais vous faire partager ce souci, notamment à la veille de la négociation des contrats de plan entre l'Etat et les régions, qui exigent que l'Etat conserve les ressources nécessaires à la contractualisation avec les régions.
Cette réflexion est très importante au regard de l'environnement économique et de l'emploi.
M. le secrétaire d'Etat au logement vient d'y faire allusion, la tendance à l'amélioration de l'activité de construction et d'entretien de bâtiments depuis 1997 se poursuit, et cette tendance devra être encore confortée en 1999.
La progression de la construction de logements neufs et la croissance des travaux d'entretien et de réhabilitation expliquent en partie ce dynamisme, facilité par des taux d'intérêt plus attractifs.
Cette amélioration est toutefois surtout sensible dans le secteur du logement. Dans le secteur des travaux publics, l'activité des entreprises devrait connaître, en 1998, une légère diminution de près de 1 % en volume, essentiellement en raison du repli des dépenses de travaux publics des grandes entreprises nationales.
Il faut donc - et vous comprendrez l'attention que je porte aux crédits budgétaires qui me sont alloués - rester très vigilant quant au niveau des investissements publics dans le secteur.
Après ces remarques d'ordre général, j'en viens plus précisément au projet de budget pour 1999.
Le projet de budget que je vous présente consolide, je le crois, les orientations suivies en 1998.
Il y a - j'y ai insisté devant vos commission et j'y insiste encore aujourd'hui - continuité des engagements et des priorités. Je veux l'illustrer, en premier lieu, avec les moyens en personnel.
Oui, il est clair et net que je veux redonner au ministère de l'équipement les moyens nécessaires à ses missions.
Dès ma prise de fonctions, j'ai constaté qu'un programme triennal élaboré en 1996 par nos prédécesseurs prévoyait une réduction de 1 000 postes en 1998, puis d'autant en 1999. Faisant suite à 16 000 suppressions d'emplois en quinze ans, cette logique de réduction systématique, massive et, de surcroît, souvent aveugle des emplois était inacceptable.
Nombre de parlementaires - et, parmi eux, d'ailleurs, de nombreux sénateurs - m'ont écrit à ce sujet pour s'en plaindre. Il vous appartiendra de prendre vos responsabilités à leur égard en défendant tout à l'heure vos amendements !
En 1998, il n'y eut qu'un début d'infléchissement, avec la résorption d'emplois précaires et un flux net d'embauches d'environ 200 personnes.
Cette année, j'ai souhaité pouvoir aller plus loin, notamment pour ceux qui assurent l'entretien et l'exploitation de la route. C'est en effet ces secteurs d'activité qui ont, jusqu'à présent, contribué très fortement aux réductions d'emplois.
Comme beaucoup d'entre vous, comme M. Lefebvre, notamment, je suis particulièrement sensible aux difficultés rencontrées par les services de l'équipement. Ces difficultés, je les ai constatées lors de mes visites sur le terrain, dans mes rapports avec les sénateurs, les députés, les maires et les conseillers généraux.
Le bon entretien des routes, notamment en période hivernale, est un objectif essentiel, pour lequel les agents de l'équipement font des efforts de modernisation tout à fait importants mais que la poursuite des politiques antérieures viendrait gravement compromettre.
En conséquence, au cours de la préparation du budget, j'ai demandé que le ministère de l'équipement soit traité plus équitablement que par le passé, dans le cadre du maintien global du niveau des effectifs qui a été fixé par le Gouvernement dans l'objectif de cadrage général pour l'ensemble de la fonction publique de l'Etat.
J'ai obtenu partiellement satisfaction. Le budget pour 1999 marque bien une rupture : le rythme de réduction est divisé par deux sur l'ensemble du ministère, avec une réduction des effectifs qui ne sera plus de 1 000 emplois, comme cela a été prévu, mais de 490 emplois. Pour les agents d'exploitation et d'entretien, cette réduction est même divisée par trois.
Je peux vous l'assurer, je suis bien décidé à poursuivre pour les futurs budgets dans cette voie du redressement !
Vous constatez, monsieur le rapporteur spécial, que les crédits de personnel devraient augmenter en 1999 de plus de 3 % en volume, ce qui, à vos yeux, pourrait conduire à une situation tout à fait dramatique et irait à l'encontre d'une stabilisation des dépenses de l'Etat.
Mais il faut être clair : une grande partie de cette augmentation - soit 370 millions de francs - est le résultat arithmétique de l'accord salarial dans la fonction publique et non d'une politique de recrutements massifs.
L'accord salarial a un impact indiscutable sur notre ministère, dans la mesure où les personnels d'exploitation et de catégorie C bénéficiaires de mesures spécifiques sur les bas salaires y sont proportionnellement plus nombreux que dans les autres départements ministériels.
Mais je veux aller plus au fond, car je ne vous suis pas dans votre analyse. Les enjeux de service public, de qualité de service, la nécessité d'emplois publics de proximité, la garantie de compétence et de technicité des fonctionnaires vont, selon moi, à l'encontre de la politique systématiquement restrictive des recrutements que vous semblez vouloir promouvoir.
Enfin, les mesures prises par le Gouvernement sur les bas salaires - et ils sont nombreux à l'équipement - participent de la même reconnaissance des métiers des personnels de l'équipement. Si j'ajoute l'effort fait sur les crédits d'entretien routier, en augmentation de 6 %, je crois que nous avons réuni des conditions plus positives pour assurer l'avenir d'un grand service public auquel les personnels sont très légitimement attachés - ainsi que nos concitoyens - et qui est indispensable au bon fonctionnement de notre réseau routier. (Applaudissement sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Je rappelle au Sénat que les crédits concernant les services communs, l'urbanisme et le logement inscrits à la ligne « Equipement, transports et logement » seront mis aux voix le dimanche 6 décembre à la suite de l'examen des crédits affectés à la mer. Mais j'appellerai en discussion les amendements présentés par la commission des finances sur les titres III et IV.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 94 188 268 francs. »

La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le ministre, vous venez d'insister longuement sur le problème des effectifs. Permettez-moi néanmoins d'y revenir, parce que vous savez très bien que cette question suscite un important mécontentement et inquiète de nombreux élus locaux, notamment dans les zones rurales.
Concernant ce budget, notre groupe est partagé entre un sentiment de satisfaction en constatant l'amélioration qualitative du traitement salarial du personnel et d'interrogation face à la baisse quantitative des effectifs.
Nous ne pouvons que nous féliciter de la revalorisation à hauteur de 350 millions de francs des crédits consacrés aux personnels de l'équipement.
Cet effort vient conforter, monsieur le ministre, votre politique visant à sortir de la précarisation de l'emploi et du blocage des salaires, notamment pour les plus bas d'entre eux, qu'illustre la prochaine suppression définitive du premier niveau de la catégorie C.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Absolument !
M. Pierre Lefebvre. Il est prévu, dans ce budget, la suppression de 490 emplois sur un effectif global évalué à 98 341 postes.
Notons, toutefois, que cette réduction d'effectifs est inférieure au niveau atteint en 1998 et représente la moitié des suppressions prévues par le plan triennal établi sous le gouvernement précédent.
Force est de constater que cette baisse d'effectifs repose, pour une grande part, sur les directions départementales et les subdivisions de l'équipement, c'est-à-dire qu'elle concerne en priorité les agents qui exercent au plus près de ce qui touche à la vie quotidienne des populations.
Nous sommes d'accord pour constater avec vous, monsieur le ministre, que non seulement l'hémorragie des emplois n'est pas, hélas ! une réalité nouvelle - 16 000 emplois ont été supprimés depuis une quinzaine d'années - mais qu'elle faisait l'objet d'un programme planifié de suppression de 1 000 emplois par an.
A terme, si nous n'y prenons pas garde, c'est la pérennité du service public de l'équipement qui serait gravement remise en cause.
En effet, alors que le Gouvernement s'est fixé comme priorité la lutte pour l'emploi, peut-on raisonnablement admettre que l'Etat employeur supprime des postes alors que, dans le même temps, des besoins ne sont pas satisfaits ?
A ce sujet, il n'est que de citer l'exemple du matériel de déneigement, qui reste inutilisé une partie de l'hiver faute de conducteurs suffisants ou disponibles.
La qualité des travaux d'entretien et d'aménagement du réseau routier en pâtit, le suivi en continu des opérations des directions départementales de l'équipement n'est plus assuré de la même manière et, à terme, le service public n'est plus à même de remplir ses missions auprès des usagers.
Si les DDE ne sont plus en mesure de mettre à disposition les moyens permettant de répondre aux besoins exprimés par les communes ou les départements, le risque est grand de voir ces mêmes collectivités locales, dépourvues de soutien technique mais aussi d'une assistance scientifique en matière d'aménagement urbain, se tourner, faute de mieux, vers des agences privées.
M. André Vezinhet. Très bien !
M. Pierre Lefebvre. Ensuite, connaissant votre attachement au service public, êtes-vous en mesure, monsieur le ministre, de nous indiquer quand le plan de suppression d'emplois dont vous avez hérité sera définitivement abandonné, de telle sorte que la tendance à la baisse que vous avez commencé à infléchir se traduise enfin par une création nette de postes dans ce secteur ?
Vous venez de le dire, monsieur le ministre, le processus, enclenché depuis 1983, de suppression des effectifs n'a que trop duré et il faut désormais se situer dans une perspective de création d'emplois stables. Pouvez-vous nous donner quelques assurances, à cet égard, pour le prochain projet de loi de finances ?
Enfin, la réduction du temps de travail, avec pour contrepartie la création nette d'emplois, est-elle envisagée pour le personnel de l'équipement ?
Les agents de l'équipement ont le sentiment d'être les parents pauvres de la fonction publique, à laquelle ils demeurent profondément attachés. Permettez-moi d'insister, monsieur le ministre, pour obtenir une réponse permettant d'assurer l'avenir du service public et des agents de l'équipement.
Cela étant dit, soyez assuré que nous sommes à vos côtés pour promouvoir le développement d'un service public adapté aux exigences des citoyens de l'an 2000. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, je crois avoir clairement indiqué, dans mon intervention, ma position et celle du Gouvernement en ce qui concerne les effectifs. Je souhaite néanmoins vous apporter quelques précisions.
Quand j'ai pris mes fonctions, il y avait effectivement ce plan triennal de suppression de 1 000 emplois par an, mais, si l'on y regarde bien, c'est depuis une quinzaine d'années que, plan ou pas plan, il y avait, de toute manière, 1 000 suppressions d'emplois chaque année.
La rupture intervient cette année. Donc à la question de savoir si c'est terminé, je peux déjà répondre que le fait est là : il n'y aura pas 1 000 suppressions d'emplois, et dans le contexte général que nous connaissons ce n'est pas rien.
Cela étant, j'admets que l'on puisse s'interroger légitimement, notamment au regard des besoins pour l'entretien et l'exploitation.
A ce sujet, j'ai dit que, si une réduction d'emplois était encore prévue pour 1999, elle était, pour l'entretien et l'exploitation, divisée par trois par rapport à ce que l'on connaissait dans le passé.
J'ai été sensible à votre discours sur les travaux indispensables. Dans certains cas, la situation est telle que l'on dispose des matériels mais non des agents pour les faire fonctionner, ce qui est aberrant !
Ceux qui n'ont que l'efficacité économique à la bouche devraient donc y réfléchir à deux fois lorsqu'ils proposent une réduction des dépenses de personnels. Les agents du service public ont également pour vocation d'être efficaces !
En divisant la réduction par trois, nous faisions donc en sorte que l'entretien et l'exploitation ne soient pas les plus touchés, comme ce fut le cas par le passé.
Vous me demandez, monsieur Lefebvre, si je peux vous garantir qu'il en sera ainsi à l'avenir. L'an dernier, j'ai réuni les services, l'administration mais aussi les organisations syndicales pour discuter de ces questions. J'ai ainsi pu rassembler des éléments qui, au moment des arbitrages, ont montré que l'on ne pouvait pas continuer ainsi. Je suis décidé à pratiquer la même politique de concertation et de discussion pour voir ce qui peut être fait à tel endroit, ce qui ne doit pas l'être à tel autre, de façon à s'engager dans une politique réellement positive, où l'on sorte du dogmatisme qui consiste à penser qu'il suffit de tailler dans les effectifs des personnels et les services publics pour favoriser l'avancée économique de notre pays ou, inversement, à refuser de prendre en considération tout ce qui peut favoriser une meilleure organisation du travail.
Voilà la démarche que j'entends poursuivre !
M. le président. Par amendement n° II-27 rectifié, M. Pelletier, au nom de la commission des finances, propose de réduire les crédits du titre III de 326 500 719 francs et, en conséquence, de porter le montant des mesures nouvelles à moins 232 312 451 francs.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial. Cet amendement entre dans le cadre des mesures décidées par la majorité de la commission des finances pour réduire le déficit budgétaire.
Il porte exclusivement sur le titre III, c'est-à-dire sur les dépenses de personnels, qu'il vise à réduire de 1 %, et les dépenses de fonctionnement, qu'il tend à réduire de 5 %, soit une réduction d'environ 326 millions de francs, à raison de 206 millions de francs pour les dépenses de personnels et de 120 millions de francs pour les dépenses de fonctionnement.
Cet amendement de portée générale n'est dirigé ni contre vous, monsieur le ministre, ni contre vous, monsieur le secrétaire d'Etat. Vous le savez, la représentation nationale, dans sa grande majorité, et tout particulièrement le rapporteur spécial de ce budget au Sénat, apprécient votre action en faveur du logement, secteur économique et social ô combien important. Ne voyez donc, dans cet amendement, aucun acte de défiance à votre égard.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. C'est vrai !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je vais non seulement donner l'avis du Gouvernement, mais encore ajouter une précision : votre proposition, monsieur le rapporteur spécial, conduit à la suppression de 1 800 emplois.
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial. Non !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Comment non ? J'ai fait les calculs !
M. Guy Fischer. Nous le lui ferons savoir !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. La démarche n'est pas nouvelle ; l'an dernier, c'était pareil ! On propose systématiquement de réduire de 1 % les dépenses de personnel. Après quoi - ayez le courage de voir les choses honnêtement - sénateurs, députés et conseillers régionaux, toutes tendances confondues, m'écrivent pour protester contre les suppressions d'emplois dans leur département.
M. Jean Chérioux. C'est facile !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. L'avis du Gouvernement est donc, bien évidemment, défavorable. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - M. Vezinhet applaudit également.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-27 rectifié.
M. Pierre Lefebvre. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. En proposant cet amendement, qui tend à supprimer plus de 326 millions de francs de crédits, la majorité de la commission des finances reste évidemment fidèle aux politiques qui ont été menées par les précédents gouvernements, et que les Français ont majoritairement rejetées.
En effet, il nous est proposé de porter un coup sévère aux dépenses de fonctionnement, c'est-à-dire aux rémunérations des personnels, aux retraites des anciens de l'équipement, à la gestion au quotidien des services déconcentrés, mais aussi, par exemple, aux crédits destinés à la recherche puisqu'on prive l'Ecole nationale des ponts et chaussées de plus de 7 millions de francs de crédits.
Comment pourrions-nous voter un tel amendement et expliquer, ensuite, dans les communes et les départements, l'absence de moyens suffisants pour répondre aux besoins des usagers ?
Il faut être logique avec soi-même et avec sa politique. En fait, on l'a compris, cet amendement a un caractère idéologique évident : il correspond à la volonté de la majorité sénatoriale d'appauvrir la fonction publique.
Pour ce qui nous concerne, vous l'aurez bien compris, nous sommes opposés à un service public au rabais. Aussi, nous voterons, bien évidemment, contre cet amendement.
M. André Vezinhet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet. Il me sera difficile de ne pas être quelque peu redondant, tant je souscris aux propos de M. le ministre et de notre collègue M. Lefebvre.
C'est vrai, il y a quelque acharnement à vouloir nous proposer, cette année encore, une mesure à laquelle nous nous étions déjà opposés l'an dernier.
Si l'on veut réduire les dépenses de personnels, il faut avoir le courage de dire que ceux qui seront touchés par la mesure sont à la fois inutiles et improductifs. Si l'on nous fait la démonstration de leur inutilité et de leur improductivité, nous nous rangerons, alors, à l'argument de la majorité sénatoriale. Mais, que je sache, personne, ici, ne pense cela !
Le groupe socialiste s'opposera donc à cet amendement, en indiquant, au passage combien il a apprécié ce qu'a dit M. le ministre sur l'aide aux catégories de personnels relevant du ministère et des services de l'équipement les plus défavorisées. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je tiens d'abord, après M. le rapporteur spécial, à dire à M. le ministre et surtout à M. le secrétaire d'Etat au logement - nous avons toute la nuit devant nous, monsieur Gayssot ! - qu'ils ne doivent pas prendre les amendements de la commission des finances comme une marque de défiance à leur endroit.
Mes chers collègues, une fois de plus, je veux rappeler que, lorsque nous discutons d'un amendement, nous discutons sur les mesures nouvelles et que vous allez, sans même le remarquer - franchement, cele ne doit pas manquer d'étonner tous ceux qui nous observent ! - adopter, à l'article 44, les services votés, soit 23 milliards de francs au titre du budget dont nous discutons.
Sont donc en discusssion en ce moment, 326 - j'allais dire « petits... ! - millions de francs, à comparer aux 23 milliards de francs sur lesquels vous ne direz pas un mot.
Or, monsieur le ministre, sur ces 23 milliards de francs de service votés, pas plus M. Pelletier que moi-même n'avons la possibilité de toucher au moindre centime. Vous seul en avez la faculté.
Et vous ne me ferez pas croire que, habile comme vous l'êtes, vous ne pourrez pas trouver 300 millions de francs d'économies sur 23 milliards, sauf à en conclure que vous n'êtes pas un bon gestionnaire, ce que je ne veux pas faire, à cet instant de mon propos en tout cas !
Donc, monsieur le ministre, ne laissez pas croire au Sénat - la ficelle est un peu grosse ! - que nous voulons « sabrer » des crédits sur des mesures nouvelles, alors que vous avez toute latitude pour procéder à des redéploiements sur les 23 milliards de francs, somme sur laquelle j'ai le sentiment que M. le secrétaire d'Etat au budget ne vous laisse guère de marge de manoeuvre non plus.
S'agissant de l'accord salarial dans la fonction publique, qui a abouti à une augmentation, si je ne me trompe, de 3,2 %, nous vous proposons de limiter cette croissance. Lorsqu'on décide une augmentation, il faut savoir comment la financer.
Mes chers collègues, lorsque vous financez des augmentations par une majoration des impôts, c'est critiquable, mais c'est au moins loyal parce que la génération qui décide est bien celle qui assume les dépenses nouvelles qu'elle décide.
Or, ce qui n'est pas sain dans votre système, c'est que vous majorez des crédits aujourd'hui et que vous les faites payer pendant quinze ans à vos enfants. Cela, nous ne l'acceptons pas !
Autrement dit, monsieur le ministre, vous devez courageusement écheniller chaque chapitre budgétaire de votre budget et trouver, dans les 23 milliards de francs que j'ai évoqués, les 300 millions de francs visés dans l'amendement que M. Pelletier, au nom de la commission des finances - j'en suis, naturellement, tout à fait solidaire - vous propose.
Lorsque, au cours de la soirée, le Sénat vous proposera, en effet, de limiter les augmentations, vous lui direz, bien sûr, qu'il est inhumain, qu'il veut réduire le nombre des emplois, que c'est impossible. Mais, chaque année, on procède subrepticement à des annulations de crédits par décret. A ces occasions, vous manifestez-vous ?
Aussi, pour aider le Gouvernement, nous procédons à cette régulation avant qu'il ne le fasse. (Protestations sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Bernard Piras. C'est facile ! La ficelle est un peu grosse !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Croyez-moi ! Elle est de toute façon annoncée. (Démago ! sur les travées socialistes.)
Monsieur le ministre, la proposition qui vous est faite est parfaitement raisonnable : elle a pour effet de ne pas décider de dépenses dont nous ferions supporter le poids aux générations futures. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur Lambert, la période actuelle, contrairement aux précédentes, n'a pas été marquée par des annulations de crédits ! Peut-être faudrait-il que vous intégriez cette différence dans vos réflexions. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-27 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des finances.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 37:

Nombre de votants 319
Nombre de suffrages exprimés 303
Majorité absolue des suffrages 152
Pour l'adoption 204
Contre 99

Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 2 699 901 146 francs. »

La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Ce titre fait état des interventions publiques, notamment des crédits d'Etat, consacrés aux aides à la personne.
Les aides personnelles au logement, avec plus de 75 milliards de francs de prestations versées à quelque six millions de ménages, constituent un moyen primordial de justice sociale en favorisant l'accès au logement de familles modestes et en les solvabilisant.
Le budget de l'Etat pour 1999 y consacre 35 milliards de francs, soit 2 milliards de francs de plus par rapport aux crédits alloués en 1998, c'est-à-dire une augmentation de 6 %.
Alors que le gel de ces allocations, qui avait été décidé par le précédent gouvernement, s'était prolongé pendant plusieurs années, l'effort de revalorisation engagé se poursuivra en 1999. Le groupe communiste républicain et citoyen se félicite bien entendu de l'augmentation de ces crédits. Toutefois, je l'ai dit tout à l'heure, force est malheureusement de constater que cette évolution positive n'a pas ou très peu de répercussion sur les allocations versées aux ménages. Le taux d'effort des bénéficiaires n'est d'ailleurs pas pour autant en diminution.
Il existe plusieurs explications à ce phénomène.
Tout d'abord, le nombre d'allocataires est toujours croissant. Depuis 1990, 1,6 million de ménages supplémentaires perçoivent l'une des aides au logement. Il est de ce point de vue à noter que les futurs locataires des logements conventionnés, dans l'optique du nouveau statut du bailleur privé, viendront mathématiquement s'ajouter au nombre des bénéficiaires de l'APL, sans que ces mêmes bailleurs ne participent de quelque façon que ce soit au financement de celle-ci.
Ensuite, et cette question excède le champ d'intervention du secrétariat d'Etat au logement, les revenus des ménages sont bien souvent insuffisant pour assurer à ces derniers l'accès au logement et le maintien dans celui-ci, y compris dans le parc social.
Ainsi, une enquête réalisée en 1997 par les organismes HLM, a montré qu'un ménage sur deux a des ressources inférieures à 60 % du plafond de ressources pour l'accès aux logements HLM. On assiste bien à une paupérisation considérable des quartiers HLM, ou quartiers sociaux. Ce phénomène grandissant doit être combattu pour aller vers cette mixité sociale, à laquelle je sais que vous êtes attaché, monsieur le secrétaire d'Etat.
Dans ce souci, je constate que les plafonds de ressources, malgré une revalorisation en juillet 1998 que j'ai eu l'occasion de saluer, ne permettent pas aux salariés aux revenus moyens d'accéder aux HLM. Il ne favorise pas, par conséquent, l'équilibre social. Une revalorisation plus significative de ces plafonds conditionnant l'accès au logement social doit être effectuée, à l'image de celle qui s'applique aux logements des bailleurs privés.
Enfin, depuis cinq ans, les loyers ont connu une inflation supérieure aux revalorisations des aides aux logements.
Sans être alarmiste, je pense que ces phénomènes ne vont pas aller en s'amenuisant au fil du temps. On constate déjà un effet de ciseaux.
Ainsi pensons-nous qu'il faut considérer le problème à la base et que la solution ne peut consister en la multiplication constante des aides à la personne, même si celles-ci se révèlent pour le moment absolument nécessaires, socialement et humainement.
Le groupe communiste républicain et citoyen souhaite que les crédits consacrés au logement aillent davantage à l'aide à la pierre.
C'est le financement du logement social qu'il faut revoir. Il n'est, pour l'heure, ni suffisant ni efficace et cela se vérifie au regard du nombre des opérations de construction réalisées, mais aussi en étudiant le niveau des loyers de sortie.
L'office public HLM de Rennes a simulé, en 1995, les effets qu'aurait une réforme du financement du logement social. Ainsi, en baissant le taux des emprunts de 4,8 % à 2 % et en allongeant la durée de remboursement de trente-deux ans à quarante ans, on obtient un loyer de sortie à 1 200 francs au lieu de 1 600 francs, soit une baisse de 25 %.
Il faut donc s'engager rapidement dans la réforme du financement du logement social. A défaut, il n'y aura pas de réel changement en matière d'habitat et la masse des crédits alloués aux allocations de logement ne devra cesser d'augmenter.
Le groupe communiste républicain et citoyen souhaite qu'une réflexion soit engagée, seule solution qui permette, à notre sens, de résoudre la crise du logement.
M. le président. Par amendement n° II-28, M. Pelletier, au nom de la commission des finances, propose de réduire les crédits du titre IV de 855 301 758 francs.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial. Cet amendement, qui procède de la même logique que le précédent, se décompose en deux parties pour un total de 855 millions de francs : d'une part, une réduction forfaitaire correspondant à 1 % des dépenses du titre ; d'autre part, une réduction ciblée de 500 millions de francs afin de manifester le souci de la commission des finances de renouer avec les révisions des services votés effectuées les années précédentes sur les aides personnelles au logement, mais aussi pour inciter, comme je l'ai dit dans mon rapport, le Gouvernement à procéder à une réflexion sur ces aides personnelles.
Par ailleurs, je crois savoir que, dans le collectif budgétaire qui est en cours d'étude, est prévue une annulation importante de 800 millions de francs de crédits de ce secteur. Ainsi, comme l'a dit tout à l'heure M. le président de la commission des finances, le Sénat ne ferait qu'anticiper des réductions envisageables au cours de l'année 1999.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Mesdames, messieurs les sénateurs, l'amendement qui vous est proposé vise donc à réduire, sous prétexte d'une contribution à l'effort de maîtrise des dépenses de l'Etat, les dépenses d'intervention du titre IV de 855 millions de francs, somme qui se décompose comme suit : un abattement forfaitaire de 500 millions de francs sur les aides personnelles au logement auquel s'ajoute 1 % du total des crédits de l'ensemble des dépenses d'intervention du titre IV, soit 355 millions de francs.
Il faut savoir que cette réduction de 355 millions de francs porte sur les aides personnelles, mais aussi sur les subventions versées aux associations départementales d'information sur le logement, les ADIL, sur les dotations du fonds de solidarité pour le logement et sur l'aide au logement temporaire.
Voilà exactement les dépenses que vous souhaitez réduire en adoptant cet amendement !
Le Gouvernement ne peut pas y être favorable, même si, en 1998, pour la première fois et c'est une heureuse surprise - il n'a pas été nécessaire de prévoir un complément de financement pour l'aide personnelle au logement, ce qui est la traduction, par un effet mécanique, de l'évolution positive des revenus et la situation de l'emploi, et notamment de la solvabilisation accrue de nos concitoyens grâce à des initiatives du type emplois-jeunes.
Cette amélioration a en effet permis d'envisager une réduction de ces crédits dans le collectif, de manière à dégager autant de recettes pour financer d'autres actions. Sinon, l'urgence aurait peut-être consisté à concrétiser l'engagement pris à la dernière conférence de la famille, c'est-à-dire le rapprochement des barèmes de calcul des allocations du secteur social HLM et du secteur locatif privé.
Des progrès restent donc à faire, et tout signal qui tendrait à indiquer que des marges sur ce type de ligne sont disponibles ne pourrait qu'avoir des conséquences négatives.
Je ne reviens pas sur les propos que j'ai tenus dans mon intervention liminaire, et ce d'autant plus que Mme Terrade s'en est fait l'écho en ajoutant d'autres éléments, que je fais miens, notamment les difficultés rencontrées par les habitants de quartiers dégradés, la stabilisation - et non la baisse - du taux d'effort que doivent consentir les ménages pour assurer la charge de leur logement, malgré la hausse des aides personnelles.
Vous connaissez les niveaux de revenus retenus pour bénéficier de ces aides. Bien évidemment, ce ne sont pas ces ménages qui pourraient supporter une rigueur qui se traduirait par une renonciation à l'actualisation du barème, car la réduction de crédits que vous proposez c'est le coût pour l'Etat de l'actualisation du barème.
En fait, vous souhaitez revenir à la politique que vous aviez soutenue pendant des années. Mais il y a eu rupture et je crois qu'au fond de vous-mêmes vous ne pouvez pas en contester le bien-fondé.
En clair, mesdames, messieurs les sénateurs, vous ne pouvez pas réduire les moyens des aides personnelles au logement ; vous ne pouvez pas réduire les dotations du fonds de solidarité logement ; vous ne pouvez pas amputer les moyens des associations départementales d'information sur le logement dont vous souhaitez au contraire le développement et la généralisation ; vous ne pouvez pas non plus nous inviter à remettre en cause l'ouverture aux centres communaux d'actions sociales de l'allocation au logement temporaire.
Si, tout à l'heure, vous parliez de services votés et de dépenses de fonctionnement en pensant essentiellement à des dépenses de personnels, avec cet amendement vous proposez des coupes claires dans des dépenses sociales vives. Il ne peut y avoir d'approche vertueuse à vouloir amputer cette nature de crédits pour quelque raison que ce soit.
Je souhaite que, sur ce point, vous vouliez bien entendre non pas le Gouvernement mais celles et ceux qui seraient pénalisés par l'application de la disposition dont vous proposez l'adoption. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Avec la même modération que celle dont M. le secrétaire d'Etat fait toujours preuve dans ses interventions, je voudrais dire, une fois encore, que le problème ne se pose pas en ces termes.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le choix proposé par la majorité sénatoriale est de faire en sorte que, enfin, notre génération assume les dépenses qu'elle décide. Il n'est pas possible d'être généreux en tirant un chèque en blanc sur l'avenir ! Nous suggérons donc de limiter l'augmentation globale de la dépense, des crédits ouverts à ce que nous sommes en mesure de payer.
J'ai demandé au Gouvernement qu'il choisisse lui-même les titres et les chapitres sur lesquels il préférerait voir s'appliquer cette limitation des dépenses. Or, l'année dernière - lisez les débats - M. Christian Sautter, qui siégeait alors à la même place que M. Jean-Claude Gayssot aujourd'hui, nous a opposé l'article 42 de l'ordonnance organique et nous a dit : « Vous devez appliquer vous-mêmes les réductions globales que vous avez fixées. »
Puisque je dois opérer ces réductions moi-même, et dès lors que les services votés, qui représentent 93 % du budget du logement, sont intouchables, je ne peux, à l'évidence - tout le monde le comprend - que proposer de diminuer les crédits qui sont en discussion, c'est-à-dire les crédits nouveaux.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez dit tout à l'heure que les crédits des services votés visaient les dépenses de personnel. Pas du tout ! Les services votés visent tous les titres. La commission des finances se borne donc à donner une indication.
Toutefois, monsieur le secrétaire d'Etat, si vous souhaitez que la proposition de plafonnement de l'augmentation s'applique à d'autres domaines de ce projet de budget - je vous rappelle que vous disposez de 37 milliards de francs de services votés - décidez-le, puisque vous en avez le pouvoir, puisque vous disposez de ce pouvoir que n'a ni le Sénat ni le Parlement.
Cela étant, je vous le dis très sincèrement, avec le respect que je vous porte, monsieur le secrétaire d'Etat : ne cherchez pas à diaboliser les sénateurs. Ce serait injuste, d'autant plus, vous le savez fort bien, que, tout au long de l'année, de manière parfois aveugle comme nous y sommes nous aussi condamnés aujourd'hui, les services du budget vous demanderont de réduire des crédits que vous trouverez très sensibles, humainement parlant.
Ainsi - aurais-je la cruauté de le dire ? - l'arrêté du 18 novembre 1998 a annulé 846 millions de francs sur le financement des aides à la personne, ce qui n'a sans doute pas dû vous faire plaisir, et ce dont je ne me suis pas réjoui.
Je ne vous fais pas de procès d'intention. Ce serait tout à fait indigne de ma part, parce que je sais très bien comment s'opèrent de telles réductions.
Nous nous plaçons dans la même logique que les services. Ne nous reprochez donc pas ce que nous avons la courtoisie de ne pas vous reprocher.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Puisque le président de la commission des finances, fort courtoisement, explicite sa réflexion, je dois préciser mon argumentation : à propos du premier amendement sur le titre IV, les services votés visaient des dépenses de personnel, avec celui-ci, ils concernent des dépenses sociales.
De plus, je confesse, mesdames, messieurs les sénateurs, que je ne me sens pas le pouvoir de réduire, à due concurrence de l'amendement n° II-28 que vous soutenez, le nombre des bénéficiaires des aides personnelles au logement. Nous devons honorer nos engagements et, dans le même temps, nous devons agir pour que la situation globale s'améliore et que la paupérisation que nous constatons cesse d'augmenter.
J'ignore qui aurait le pouvoir immédiat de réduire le nombre des bénéficiaires de ces aides. Je sais en revanche - et je ne veux diaboliser personne - que nous avons le devoir de ne pas réduire le pouvoir d'achat des familles les plus modestes de notre pays.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. C'est possible !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Il n'est pas possible de réduire les dépenses de l'Etat dans les conditions que vous proposez parce que cet amendement aboutirait à diminuer le montant des aides versées.
Je ne pense pas que ce choix soit pertinent. Je vous invite donc, très courtoisement, mesdames, messieurs les sénateurs, à réviser votre analyse et à procéder à une ultime réflexion avant de voter.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-28.
Mme Odette Terrade. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La paroles est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Cet amendement, comme tous ceux de la commission des finances, vise à opérer une réduction des dépenses de 1 %.
Concernant le projet de budget du logement, la suppression proposée porte - M. le secrétaire d'Etat vient de la dire - sur les crédits alloués aux aides à la personne.
Cette proposition est inadmissible, car elle touche les plus démunis de nos concitoyens.
Comment mon groupe pourrait-il adopter un tel amendement, alors que les frais de logement représentent, pour les ménages, une charge de plus en plus importante et que le nombre de sans-domicile fixe et de personnes hébergées est en augmentation constante ?
Les aides au logement représentent, c'est exact, une charge importante pour le budget du logement. Mais tant que les mesures en faveur du financement du logement social ne seront pas plus adaptées, les aides à la personne seront d'une absolue nécessité.
Comment supporter, sans aide, la charge d'un logement, alors que l'on ne dispose que du RMI c'est-à-dire de pas plus de 2 429 francs mensuels pour une personne seule et de 3 644 francs mensuels pour un couple, ou du SMIC, et ce alors que les loyers ne cessent d'augmenter ? M. le secrétaire d'Etat a d'ailleurs rappelé l'ampleur des aides à la personne.
Mes chers collègues de la majorité sénatoriale, réduire les crédits alloués aux aides au logement tend, à moyen terme, à « fabriquer » des SDF.
Le groupe communiste républicain et citoyen ne peut décidément pas voter cet amendement de la commission des finances dont l'objet est la réduction des déficits publics et le respect du carcan imposé par le pacte de stabilité. Cet amendement soutient le concept d'une Europe marchande et financière qui est à l'opposé de notre démarche.
Avant la finance, nous privilégions l'être humain ! C'est pourquoi nous voterons contre l'amendement n° II-28. (Appplaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. André Vezinhet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La paroles est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet. Mes chers collègues, vous ne serez pas étonnés que le groupe socialiste vote contre cet amendement que je trouve, comme ma collègue, inadmissible.
J'estime que cet amendement est inqualifiable et presque inconvenant pour ceux qui trouvent de l'honneur à faire de la politique et donc à attribuer de l'argent aux plus démunis. C'est la noblesse de la politique.
Il n'est pas acceptable de réduire à néant les efforts réalisés pour réactualiser l'aide personnalisée au logement comme nous le demandons depuis longtemps. Cette mesure va dans le même sens que la réduction des crédits affectés au revenu minimum d'insertion et aux parents isolés.
Nous nous insurgeons contre la mesure qui nous est proposée par cet amendement et nous y sommes farouchement opposés, surtout que, dans cette assemblée, je ne l'oublie pas, on a eu une autre attitude lorsqu'il a été question de l'impôt de solidarité sur la fortune. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Dès lors que l'on entre dans la dialectique, je suis condamné à argumenter.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous le dis très respectueusement, si, humainement parlant, je n'ai pas d'observations à faire sur les explications d'ordre budgétarie que vous avez données, je n'ai pas du tout été convaincu.
En effet, la politique est déterminée et conduite par le Gouvernement et les crédits importants qui sont votés peuvent être affectés selon votre volonté, monsieur le secrétaire d'Etat. Si vous nous dites que vous préférez maintenir les crédits dont nous parlons en cet instant et portant sur le titre IV, et que vous êtes prêt à réduire les services votés sur un autre titre, nous vous accorderons notre blanc-seing.
Mais je vous rappelle que, sur les services votés, nous n'avons aucun moyen juridique d'action. Je vous demande de l'admettre dans votre raisonnement, sinon nous finirons par ne plus nous comprendre, sauf à faire de la dialectique ou de la polémique, ce dont je vous sais incapable.
Monsieur Vezinhet, si l'indignité existe, elle s'est déjà produite, sans que vous vous en soyez indigné, le 18 novembre dernier.
Pourquoi vous êtes-vous tu alors ? L'avez-vous ignoré ou avez-vous feint de l'ignorer ? Vous avez en effet accepté que le Gouvernement, que vous soutenez avec tant de vigueur - ce que j'apprécie beaucoup - mais, soit dit entre nous, sans grande rigueur intellectuelle, réduise de 846 millions de francs ces mêmes aides à la personne. Cela n'a pas suscité la moindre indignation de votre part. Et vous vous indignez aujourd'hui lorsque nous proposons de réduire ces mêmes crédits de 500 millions de francs.
Nous sommes, je vous demande de le croire, des modérés à côté. (Rires et exclamations sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-28, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des finances.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 38:

Nombre de votants 319
Nombre de suffrages exprimés 303
Majorité absolue des suffrages 152
Pour l'adoption 204
Contre 99

Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 7 178 358 000 francs ;

« Crédits de paiement : 3 690 812 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.

« Titre VI. - Autorisations de programme : 14 668 031 000 francs ;
« Crédits de paiement : 6 523 104 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant les services communs, l'urbanisme et le logement.

III. - TRANSPORTS

1. Transports terrestres
2. Routes
3. Sécurité routière

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant les transports terrestres, les routes et la sécurité routière.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, pour les transports terrestres. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits des transports terrestres augmentent de 0,6 % en 1999, atteignant 45,2 milliards de francs.
En réalité, il faut ajouter à ces crédits 2,5 milliards de francs en provenance des comptes spéciaux du Trésor et la dotation en capital de 13 milliards de francs accordée à Réseau ferré de France, RFF.
Au total, l'effort de l'Etat en faveur des transports terrestres s'élève donc à 60,7 milliards de francs pour 1999, soit une hausse de 5,8 %. Cette hausse s'explique avant tout par l'augmentation nécessaire de la dotation en capital à RFF.
Je regrette toutefois que l'essentiel de cet effort soit absorbé par l'apurement des investissements passés, par les retraites et préretraites et par les coûts de fonctionnement, au détriment de la modernisation des réseaux de transport dont la France a besoin.
Je me félicite du succès de la réforme de la SNCF, qui a été engagée par le précédent gouvernement et poursuivie par le nouveau.
En effet, son désendettement et la clarification de ses relations avec les autorités publiques ont permis à la SNCF de se mobiliser efficacement sur la reconquête de sa clientèle. Ainsi l'image de la SNCF s'améliore, le trafic voyageurs se redresse et le transport ferroviaire a regagné des parts de marché au détriment de la route.
Les premiers résultats de l'expérience de régionalisation des services régionaux de voyageurs, engagée le 1er janvier 1997, sont prometteurs, puisque le trafic régional a davantage progressé dans les six régions expérimentatrices que dans les autres. Ce succès doit d'ailleurs beaucoup aux efforts des régions pour moderniser l'offre de transport. Il est la preuve que la décentralisation permet une meilleure adéquation entre les dépenses publiques et les besoins de nos concitoyens.
Au total, les pertes courantes de la SNCF ont chuté de 16,2 milliards de francs en 1996 à 0,8 milliard en 1997, cette amélioration allant au-delà des seuls effets mécaniques de la réforme sur les comptes de la SNCF.
Le redressement de la SNCF est toutefois fragile et inachevé.
La progression du trafic repose pour une large part sur la reprise économique engagée au début de 1997.
Le fret connaît aujourd'hui une crise de croissance avec l'apparition de points d'engorgement du réseau et la pénurie de conducteurs. Cela s'est traduit par une dégradation de la qualité du service, dégradation qui a été amplifiée par des arrêts de travail récurrents.
La commission d'enquête du Sénat sur les infrastructures de transport avait d'ailleurs montré que le développement du transport ferroviaire de marchandises passe par des investissements adaptés et par l'adoption de conditions d'exploitation plus favorables au fret, en particulier par l'abandon de la priorité systématique accordée aux trains de voyageurs.
Par ailleurs, la rentabilité des filiales hors télécommunications se redresse, mais demeure très faible.
De même, les perspectives de profit de la filiale Télécom Développement sont aléatoires. Il est d'ailleurs paradoxal de voir la SNCF refuser le développement de la concurrence entre opérateurs sur le réseau ferré français, mais accepter le développement d'un réseau téléphonique concurrent de celui de France Télécom.
Enfin, l'amélioration des comptes de la SNCF s'explique aussi par la faiblesse des péages versés à RFF.
La dégradation du climat social à la SNCF est donc très inquiétante.
Il appartient aux cheminots de poursuivre leurs efforts de maîtrise de leurs coûts et de reconquête de leur clientèle, en ligne avec l'effort consenti par la nation pour les transports ferroviaires, qui atteint le montant record de 66 milliards de francs, soit près de 3 000 francs par foyer.
Les difficultés du système ferroviaire ont par ailleurs été reportées sur Réseau ferré de France.
Le montant des péages a été fixé à un niveau très faible : en 1998, RFF percevra en effet 6,2 milliards de francs de la SNCF tout lui reversant 16,6 milliards de francs au titre de la gestion et de l'entretien du réseau. Au total, la propriété du réseau ferré coûtera donc, en 1998, plus de 10 milliards de francs à RFF en plus des charges de la dette liée aux infrastructures.
Cela se traduit par une perte très importante pour RFF : 14,1 milliards de francs pour 1977 ; 14,5 milliards de francs prévus pour 1998, ce qui réduit les capacités d'autofinancement de RFF et ralentit la modernisation du réseau existant.
Le bas niveau du montant des péages revient de plus à subventionner artificiellement le transit ferroviaire sur un réseau français déjà saturé, au profit des concurrents étrangers de la SNCF.
Je me félicite donc de ce qu'une hausse des péages ait été annoncée, même si elle provient pour partie d'un artifice comptable entre RFF et la SNCF. Elle devra se poursuivre pour rapprocher progressivement les péages du coût d'usage réel des infrastructures.
J'en viens à mes observations sur les transports en commun d'Ile-de-France.
La contribution de l'Etat à l'équilibre financier de la RATP augmente de 2,8 %, alors même que le versement transport des entreprises est particulièrement dynamique, que le trafic se redresse et que les voyageurs eux-mêmes paient de plus en plus cher.
Ce paradoxe s'explique pour partie par l'augmentation de l'offre et par le coût de l'insécurité pour la RATP. La multiplication depuis un an des actes violents contre les conducteurs a notamment conduit la RATP à accélérer la création de 1 000 emplois-jeunes. A coût égal, cela n'est pas la meilleure réponse à la déliquescence de la sécurité dans certains quartiers. L'Etat doit prendre ses responsabilités, en particulier en sanctionnant vraiment les auteurs de ces violences.
Comme le soulignait mon homologue socialiste de l'Assemblée nationale, ce paradoxe trouve aussi son origine dans le laxisme budgétaire de la RATP, en particulier la dérive de la masse salariale et des coûts de fonctionnement. Cette dérive ne profite pas aux voyageurs ; en moyenne, au cours des trois dernières années, un escalier mécanique sur sept était ainsi hors service dans le métro.
Dans un rapport récent, la Cour des comptes a d'ailleurs relevé l'insuffisance du contrôle de gestion et de nombreux dysfonctionnements en matière de passation de marchés à la RATP. Cela se traduirait notamment par des ententes sur les marchés de nettoyage, alors même que la propreté des véhicules et des stations participe au sentiment de sécurité des voyageurs et incite ceux-ci à respecter le transport.
Ce paradoxe résulte enfin d'une mauvaise allocation des investissements d'infrastructure en Ile-de-France : EOLE et METEOR auront ainsi mobilisé durant huit ans les deux tiers des capacités d'investissement disponibles, alors que ces projets sont largement redondants et ne répondent pas aux besoins prioritaires des Franciliens qui sont de se déplacer de banlieue à banlieue.
La nouvelle ligne de métro METEOR est certes une belle vitrine technologique, mais chaque voyage y coûte aujourd'hui plus de vingt francs à la collectivité, soit plus de trois francs par kilomètre parcouru et par voyageur.
Cette mauvaise allocation des ressources vient d'une double déresponsabilisation : c'est l'Etat qui décide des investissements alors que la région d'Ile-de-France les finance, d'une part, et les pertes des opérateurs sont systématiquement compensées par la collectivité, d'autre part.
Au total, la clarification des responsabilités et des relations financières entre l'Etat, la RATP et les collectivités locales franciliennes apparaît être une priorité. Cette clarification passe par l'ouverture du Syndicat des transports parisiens à la région, et - pourquoi pas ? - aux usagers.
J'évoquerai maintenant brièvement les dotations aux transports collectifs de province et aux voies navigables.
Les subventions d'investissement aux transports collectifs de province connaissent une forte augmentation, les crédits s'élevant à 720 millions de francs en autorisations de programme.
L'impact favorable de cette dotation sera toutefois partiellement neutralisé par le relèvement de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, en l'occurrence sur le gazole. Pour que ce relèvement ne soit pas contre-productif en termes de lutte contre la pollution - car il risque de freiner la modernisation et l'extension des transports en commun - il serait souhaitable d'en compenser le coût pour les opérateurs de transport, par exemple en instituant des aides à l'équipement en bus propres.
Par ailleurs, l'action opiniâtre des élus membres du comité de gestion du Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (le FITTVN) a permis d'augmenter la dotation destinée aux voies fluviales pour 1999. Toutefois, avec 450 millions de francs, cette dotation reste très inférieure au produit attendu de la taxe sur les ouvrages hydroélectriques concédés et, surtout, inférieure aux besoins de réhabilitation du réseau existant tels qu'ils ressortent des conclusions de la commission d'enquête du Sénat.
En matière de grands projets, la priorité est désormais clairement donnée au projet Seine-Nord. Ce projet présente une pertinence économique incontestable : il relie, sur une distance relativement brève, deux zones très denses en population et en activités. Il importe donc, monsieur le ministre, que vous en adoptiez le tracé au plus tôt, afin de ne pas retarder les travaux.
La commission des finances a adopté un amendement tendant à réduire les crédits du titre IV de 566 millions de francs, soit une réduction forfaitaire de 1 %, outre le gel de la subvention d'équilibre à la RATP à son niveau de 1998.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Pour permettre de mieux augmenter les crédits d'investissement !
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Cet amendement a pour but non pas de pénaliser les entreprises de transport, mais d'inciter la RATP à une meilleure maîtrise de ses coûts, et surtout de rappeler au Gouvernement qu'il faut réduire les dépenses de fonctionnement et d'intervention au profit des dépenses d'investissement les plus utiles.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Très bien !
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Comme l'an passé, j'accompagne cet amendement d'une suggestion : que le Gouvernement adopte un programme de privatisations plus ambitieux, qui fournirait à RFF les 15 milliards de francs dont il a besoin pour investir et qui permettrait d'accorder à la SNCF et à la RATP des dotations en capital pour renforcer leur structure financière.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Très bien !
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Je constate d'ailleurs, monsieur le ministre, que vous nous avez déjà suivi sur cette logique, en augmentant les dotations en capital à RFF grâce à la privatisation de France Télécom. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Voilà : vos propositions sont suivies d'effets !
M. Joseph Ostermann. Continuez !
M. le président. La parole est à M. Berchet, rapporteur pour avis.
M. Georges Berchet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour les transports terrestres. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de budget pour 1999 a été très bien analysé par notre collègue Auguste Cazalet et, afin de respecter le temps de parole qui m'est accordé, je cantonnerai mon propos aux conséquences financières des choix opérés et à quelques suggestions en relation directe avec les problèmes d'actualité.
En ce qui concerne la SNCF, le trafic voyageurs évolue favorablement - vous trouverez tous les éléments dans le rapport écrit - de même que le trafic fret ; il faut s'en féliciter.
En ce qui concerne le réseau à grande vitesse, il est prévu de mettre en service le TGV Méditerranée en l'an 2001.
Le TGV Est européen est à l'étude. Le gain de temps entre Paris et Strasbourg sera de l'ordre de une heure vingt-cinq, mais il faut rechercher un complément de financement de 10 %.
A cet égard, signalons que les lots de travaux de génie civil - de 50 kilomètres chacun - ont été mis en concurrence par RFF et que la SNCF est candidate au même titre que les autres sociétés.
En ce qui concerne le TGV Rhin-Rhône, la concertation a eu lieu. L'Union européenne pourrait apporter un financement de l'ordre de 50 % pour les études.
Pour le TGV Sud européen entre la France et l'Espagne, la fin des travaux est prévue entre 2004 et 2006.
Par ailleurs, la situation financière de la SNCF s'améliore très nettement puisque, pour 1998, le compte prévisionnel fait apparaître un déficit de 528 millions de francs, alors que le déficit était de près de 1 milliard de francs en 1997. Il s'agit donc d'un excellent résultat.
L'effort commercial de la SNCF est certain ; il faut le souligner et l'encourager, mais il est encore à améliorer face à la concurrence européenne qui approche.
Il ne s'agit plus seulement de respecter à la minute ou à la seconde les horaires comme au Japon, mais bien de faire naître une culture d'entreprise, une vocation commerciale, voire un acharnement thérapeutique pour une survie dans l'Europe ferroviaire.
L'endettement n'est plus que de 45 milliards de francs au 31 décembre 1997.
J'en viens à Réseau ferré de France, dont l'exercice 1997 s'est soldé par une perte de 14 milliards de francs.
D'ici à 2001, RFF compte exiger 9 milliards de la SNCF, ce qui ne couvrira qu'une partie des 16 milliards de francs de dépenses d'entretien.
Les premières dotations en capital accordées par l'Etat à RFF ont été de 8 milliards de francs en 1997 et de 10 milliards de francs en 1998. Pour 1999, la dotation prévue est de 13 milliards de francs.
Il nous est très souvent demandé pourquoi RFF ne commercialise pas plus rapidement les actifs déclassés équivalant en grande partie à la dette de la SNCF transférée ? On a en effet souvent reproché à la SNCF de ne pas vendre rapidement tout ce qui ne servait à rien et maintenant RFF semble faire de même. Pourtant, ne serait-ce pas une bonne solution pour éviter d'augmenter la contribution et le péage de la SNCF ?
La Commission européenne a souhaité la libéralisation du transport par rail - nous avons pu mesurer ces jours-ci l'inquiétude des cheminots européens - et la réglementation des transports routiers.
La commission souhaite également une transparence financière des différentes activités, notamment la séparation des comptes et des bilans, mais aussi la séparation des infrastructures et du service des transports. Avec RFF, la France a donc anticipé sur les directives de la Commission.
Lundi 30 novembre a eu lieu une réunion des ministres des transports européens. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous donner des indications quant aux orientations qui y furent adoptées, en nous précisant notamment comment sera déterminée la minorité de blocage.
J'ai essayé de comprendre, sans résultat : cette minorité de blocage est-elle pondérée par l'importance relative des populations des pays concernés ? Sinon quels autres critères seront mis en oeuvre ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Les voix sont fonction de l'importance de chaque pays.
M. Georges Berchet, rapporteur pour avis. Ah bon ! En fonction de l'importance des pays, et non des réseaux ?

Monsieur le ministre, des tiraillements ont été signalés dans les relations entre la SNCF, entreprise publique nationale, et RFF, établissement public. Il s'agit d'un attelage de responsables ferroviaires aux intérêts pas toujours convergents, je dirais même qu'ils sont plutôt divergents : l'un élabore à juste titre une politique commerciale, surveille la bonne desserte de la France, tandis que l'autre, responsable des infrastructures, est préoccupé par le remboursement de sa dette et l'équilibre de son compte d'exploitation.
Monsieur le ministre, vous avez toujours été soucieux de l'unicité des transports ferroviaires. Ne conviendrait-il pas de chapeauter SNCF et RFF par une instance qui pourrait prendre la forme d'un directoire par exemple, mais qui serait guidée uniquement par l'intérêt général ? Ne nous répondez pas qu'il existe un observatoire du ferroviaire ; cet observatoire est en place certes, mais il ne peut observer que ce qui se passe et non ce qui va se passer.
Ne conviendrait-il pas également de conduire une réflexion, une étude prospective sur la prochaine création d'un réseau européen ?
Sur le plan strictement financier, il est regrettable que les dotations de l'Etat soient totalement absorbées par l'apurement des dettes dues aux investissements passés réalisés sans le concours de l'Etat, puisque l'Etat n'a jamais versé un centime à la SNCF.
Il en résulte l'abandon des investissements de modernisation des réseaux, modernisation qui est nécessaire. Il en va ainsi de l'électrification attendue et indispensable de la ligne Paris-Bâle, ligne internationale qui assure la desserte de la Champagne méridionale.
L'électrification de cette ligne, suggérée par la réunion du CIAT du 20 septembre 1994 et la charte du Bassin parisien incluant Troyes est une bonne chose, mais, au-delà, que se passera-t-il ?
Va-t-on faire circuler des diesels sous une ligne électrifiée ? Sinon, que se passera-t-il pour la rupture de charge à Troyes ?
Monsieur le ministre, les Hauts-Marnais, que je représente ici, souhaitent être écoutés et entendus afin que la France profonde, en lutte contre la désertification, soit mieux irriguée et bénéficie d'un accès direct au réseau national et international des TGV. L'implantation d'entreprises et la création d'emplois en dépendent directement.
Il conviendrait également, monsieur le ministre, d'arrêter la diminution des effectifs du centre ferroviaire de Chalindrey en lui confiant notamment, comme cela est techniquement possible, l'entretien des rames TER. Cette cité cheminote, que vous connaissez bien, a déposé un projet de réalisation d'une plate-forme multimodale dont le lieu d'implantation est stratégique, puisque situé à l'intersection des axes ferroviaires Paris-Bâle et Toul-Dijon, et dont l'objectif est précisément la réduction du trafic routier.
En ce qui concerne la RATP, il convient de signaler l'évolution positive du trafic.
Pour la première fois depuis 1992, le trafic brut annuel du métro, du RER et des autobus est en hausse.
L'ensemble des produits et charges du budget de la Régie pour l'exercice 1998 est en hausse de 1,2 %.
La liste et les caractéristiques des prolongements des lignes de la RATP, en voie d'achèvement ou retenus au plan prévisionnel d'engagement, figurent dans le rapport écrit.
En conclusion, j'aborderai trois points particuliers.
Le premier est un sujet de satisfaction : il s'agit du plan pluriannuel de résorption des passages à niveau.
Monsieur le ministre, vous avez entendu l'appel lancé l'année dernière par le Sénat, notamment par la commission des affaires économiques. Une dotation de 50 millions de francs au chapitre 03 du FITTVN dans le cadre de ce plan pluriannuel de résorption des passages à niveau est ainsi prévu. Chacun s'en félicite, mais M. Gallois avait dit que la résorption complète devrait coûter 2 milliards de francs : on est loin de compte !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Deux cent milliards de francs !
M. Georges Berchet, rapporteur pour avis. C'est encore mieux !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Il y a 17 000 passages à niveau !
M. Georges Berchet, rapporteur pour avis. Eh bien, faites un effort et surtout ne faites pas payer les communes !
Deuxième point : la régionalisation des services régionaux de voyageurs.
A ce propos, je ne partage pas du tout l'avis de mon prédécesseur.
L'expérimentation de la régionalisation de services régionaux de voyageurs engagée dans six régions volontaires mais hautement favorisée - Alsace, Centre, Nord - Pas-de-Calais, Pays de la Loire, Provence - Alpes-Côte-d'Azur, Rhône-Alpes - à compter du 1er janvier 1997, s'est poursuivie en 1998.
Une dotation correspondant à la quote-part du déficit d'exploitation des services régionaux de voyageurs dans les six régions expérimentales a été versé directement à ces dernières à partir du 1er janvier 1997.
Cette contribution s'élèvera en 1999 à 2,8 milliards de francs.
Ainsi que l'avait souligné l'année dernière notre collègue Jean-Pierre Raffarin, il convient d'attendre, avant l'extension du transfert de compétence, que soient garantis l'ajustement annuel et la pérennisation de la contribution de l'Etat pour émettre un jugement définitif sur l'expérience.
Avant de tirer des conclusions, il conviendrait de moduler les résultats des zones expérimentales en fonction de la densité de leur population et de la répartition géographique des agglomérations desservies. Ce qui est possible à Lille ne l'est pas dans le centre de la France ou ailleurs, même en Champagne du sud. En tout cas, il ne devrait pas y avoir augmentation de charges pour les régions.
Troisième point : la sûreté des personnes, problème prioritaire.
Permettez-moi de dire quelques mots sur les dispositifs de police mis en place.
A la SNCF, deux services compétents sont présents sur les lignes : une brigade spécialisée de police et un service de surveillance.
A la RATP, il faut noter l'existence du groupement de protection et de sécurité de réseaux.
La préfecture de police met deux services spécialisés sur le réseau ferroviaire.
Depuis octobre dernier, deux autres compagnies affectées à la sécurité du métro ont été mises en place par le ministère de l'intérieur.
Le réseau de la région d'Ile-de-France bénéficie d'une présence renforcée des services de police dans les rames et aux abords des gares.
Relevons enfin l'extension de la radiolocalisation du parc d'autobus. La totalité du parc, soit 4 000 véhicules, devrait être pourvue d'équipements de ce type, contre 170 véhicules actuellement, d'ici à la fin de l'an 2000.
Des auditions de policiers et de gendarmes que nous avons effectuées, il apparaît hautement souhaitable qu'une meilleure coordination soit établie entre les services « protégés » et les services de police afin d'assurer une bonne compatibilité des équipements techniques.
De ces entretiens il est possible de tirer plusieurs enseignements.
La sûreté des personnes dans les gares et dans les trains est un problème de sécurité publique. Pourquoi les entreprises de transport, qui y sont confrontées au même titre que d'autres lieux ouverts au public, tels que la voie publique ou les grandes surfaces, devraient-elles payer ?
A la SNCF, comme à la RATP, plusieurs corps de police sont chargés de la sécurité.
Cette « cohabitation » n'est pas sans susciter, selon nos informations, quelques difficultés. Il semble indispensable, en conséquence, de clarifier les missions et les prérogatives des uns et des autres.
Au-delà de la progression nécessaire des effectifs en charge de la sécurité dans les transports collectifs, il est apparu que le découpage des territoires de compétence n'était plus adapté à la situation. Par exemple, la brigade de police qui opère à la RATP dépend de la préfecture de police de Paris et n'intervient plus hors des limites du ressort de cette préfecture.
Pourquoi donc ne pas créer des zones de sécurité intérieure des transports, qui, au même titre que les zones de défense, assureraient une meilleure synergie - dans la région d'Ile-de-France, notamment - de tous les moyens humains mis au service de la sûreté des personnes dans les transports en commun, et cela sans limite territoriale de compétence ?
La commission des affaires économiques et du Plan s'en remet à la sagesse du Sénat sur les crédits des transports terrestres dans le projet de loi de finances pour 1999. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Miquel, rapporteur spécial.
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, pour les routes et la sécurité routière. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en additionnant les crédits figurant au budget des routes, les dotations provenant des comptes spéciaux du Trésor, les fonds de concours des collectivités locales et les efforts d'investissement et d'entretien des sociétés concessionnaires d'autoroutes, on constate que l'ensemble consolidé des moyens d'engagement consacrés au réseau routier national diminue de 7 % en 1999, s'établissant à 33,4 milliards de francs.
Les moyens d'engagement pour la construction du réseau routier national sont ainsi en forte baisse : les crédits budgétaires diminuent de 10,5 % et les crédits en provenance des comptes spéciaux du Trésor, de 9 %, ce qui s'explique en partie par l'achèvement des autoroutes A 75 et A 20.
En dépit du prolongement d'un an des contrats de plan Etat-région 1994-1998, le taux d'exécution moyen des volets routiers de ces contrats de plan n'atteindrait ainsi que 81,5 % au terme du XIe plan, c'est-à-dire à la fin de 1999.
Il s'agit là d'un constat préoccupant au regard de la crédibilité des engagements de l'Etat, au moment où s'ouvrent les négociations relatives aux prochains contrats de plan. Sans doute faudra-t-il désormais revenir à une programmation plus réaliste.
En revanche, les crédits d'entretien du réseau routier national sont en progression pour le quatrième exercice consécutif. Ces crédits retrouvent enfin le niveau atteint en 1990. Cela témoigne du rééquilibrage hautement souhaitable entre le développement et l'entretien du réseau.
En particulier, les actions de réhabilitation et de renforcement des chaussées et des ouvrages d'art progressent de 18 %, s'établissant à 715 millions de francs, dont 83 millions de francs en provenance du FITTVN et, pour la première fois, 70 millions de francs en provenance du FARIF.
La croissance de ces crédits est excellente, car elle est le gage d'une sécurité routière accrue et d'économies ultérieures. L'entretien préventif est en effet moins onéreux que l'entretien curatif.
Il convient toutefois de s'interroger sur cette débudgétisation : est-il dans la vocation du FITTVN et du FARIF, qui sont des fonds d'aménagement du territoire, de financer des dépenses d'entretien routier ? Cette question mériterait de faire l'objet d'un vrai débat, plutôt que d'être tranchée au détour de l'inscription des crédits budgétaires.
S'agissant maintenant du réseau autoroutier concédé, les investissements des sociétés concessionnaires d'autoroutes devraient ralentir en 1999, en raison d'une pause dans le lancement de nouveaux projets. Plusieurs liaisons inscrites au schéma routier directeur national de 1992 sont ainsi remises en cause.
L'objectif d'une réalisation en dix ans à partir de 1994 du schéma directeur routier national de 1992 n'a toutefois pas été explicitement abandonné. La révision de ce schéma directeur et l'inscription de nouveaux projets sont désormais subordonnées à la modification de la loi d'orientation de 1995, à laquelle travaille le ministère de l'environnement et de l'aménagement du territoire.
Dans le cadre de la révision de cette loi, le Gouvernement a annoncé son souhait de modifier l'approche des schémas de planification. Ces schémas prendraient désormais la forme de schémas de services, qui ne comporteraient une carte des projets d'infrastructures qu'au dernier stade de la procédure.
Il est nécessaire que cette planification soit opérée au plus tôt et comporte des échéanciers hiérarchisés, afin que les collectivités locales bénéficient de perspectives claires, notamment pour la négociation des contrats de plan.
Il est également hautement souhaitable que le Parlement soit désormais étroitement associé à la définition et à la révision périodique des schémas directeurs. Le développement d'une concertation étroite avec les élus, en amont des projets, est en effet la condition d'une meilleure maîtrise des procédures, donc des coûts de construction.
Il me semble par ailleurs indispensable d'achever la grande majorité des liaisons autoroutières entreprises. Il s'agit là d'une exigence de cohérence, car on ne saurait, par exemple, monsieur le président de la commission des finances, couper l'axe Calais-Bayonne entre Rouen et Alençon. (Sourires.)
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Très bien, monsieur le rapporteur spécial ! (Nouveaux sourires.)
M. Guy Fischer. Comme par hasard ! (Nouveaux sourires.)
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. Il s'agit également d'un impératif en termes de développement des territoires. Il s'agit enfin d'une nécessité pour la sécurité routière : l'autoroute est quatre fois plus sûre que la route.
Dès lors, il est nécessaire d'assainir le financement du système autoroutier : d'abord, en établissant le principe de l'autoroute à péage, gage d'équité entre usagers et d'un meilleur entretien du réseau ; ensuite, en adaptant les modalités et la durée des financements à la durée de vie des infrastructures.
Par exemple, comme les péages évoluent désormais au rythme de l'inflation, il serait sans doute opportun que les sociétés d'autoroutes se financent pour partie grâce à des obligations indexées sur l'inflation, comme elles en ont désormais la possibilité.
Enfin, il est indispensable de réduire les prélèvements sur les sociétés d'autoroutes qui n'ont pas de lien avec l'exploitation. Des prélèvements aveugles, comme la taxe d'aménagement du territoire versée au FITTVN, n'ont que des effets pervers : d'un côté, l'augmentation de ces prélèvements fragilise les sociétés concessionnaires et réduit leurs investissements ; de l'autre, les compensations qui sont accordées aux sociétés d'autoroutes sous la forme de hausses des péages entraînent un report de trafic vers le réseau non concédé.
Il en résulte, au total, une augmentation de la circulation sur le réseau non concédé - notamment pour les poids lourds - donc une hausse des dépenses d'entretien, que l'Etat n'est pas en mesure de financer. Ce détournement de trafic est en outre préjudiciable à la sécurité routière, au détriment des automobilistes les plus pauvres.
Je vais maintenant vous présenter mes observations sur la sécurité routière.
En matière de sécurité routière, les résultats de l'année 1997 ont été décevants : 7 989 tués - soit une baisse de 1,1 % seulement - dont 2 061 jeunes de quinze à vingt-quatre ans.
Les résultats des huit premiers mois de 1998 sont très inquiétants puisque le nombre de tués a augmenté de près de 6 % par rapport à la même période de l'an passé.
Cette dégradation s'explique pour partie par la croissance du trafic résultant de la reprise économique. Mais la vitesse moyenne se maintient à un niveau excessif et elle ne diminue plus depuis plusieurs années : si le nombre d'accidents décroît légèrement, leur gravité a donc tendance à augmenter. L'inertie du comportement des conducteurs neutralise ainsi les efforts qui sont accomplis pour améliorer la sécurité des véhicules et des infrastructures.
Cette inertie traduit malheureusement l'échec des politiques faisant appel à la responsabilité des conducteurs. On ne peut que conclure à la nécessité de revenir à des politiques plus sommaires, mais plus efficaces, fondées aussi sur la contrainte et la répression.
Ces évolutions récentes augurent mal la réalisation de l'objectif ambitieux que le Gouvernement s'est assigné en novembre 1997 : diviser par deux le nombre de tués en cinq ans.
Je regrette, à cet égard, le freinage des projets autoroutiers, ainsi que le délai entre l'annonce des mesures nouvelles, d'une part, et leur traduction budgétaire, législative et réglementaire, d'autre part. Ce décalage brouille la communication de la sécurité routière en donnant aux conducteurs un sentiment temporaire d'impunité. Il réduit la légitimité des nouvelles mesures : « Si c'était efficace, on l'aurait fait plus tôt », pense-t-on. Enfin, il ne peut que démobiliser les agents de l'Etat qui seront chargés de leur mise en oeuvre.
J'en viens maintenant au budget de la sécurité routière.
Les crédits de la sécurité routière augmentent de 4 % en moyens de paiement dans le projet de loi de finances pour 1999. Il convient cependant d'ajouter à ces crédits les dotations aux aménagements locaux de sécurité, qui visent à traiter les zones où les accidents sont particulièrement fréquents et qui relèvent du budget des routes. Ces crédits s'élèvent à 187 millions de francs pour 1999, en augmentation de 1,7 %.
Ces crédits ne retracent toutefois qu'une faible part des efforts de la nation en faveur de la sécurité routière, qui reposent également sur l'implication et les moyens des collectivités locales, de l'éducation nationale, de la gendarmerie, de la police, de la justice, des associations, des sociétés d'autoroutes, etc.
Par exemple, le renforcement des contrôles et des sanctions n'est pleinement efficace que s'il porte effectivement sur les conduites et les tronçons les plus dangereux, ce qui suppose une mobilisation spécifique et des moyens appropriés pour les forces de l'ordre, notamment des radars embarqués.
Il serait donc souhaitable que le Parlement dispose d'une présentation synthétique de l'ensemble des moyens humains et financiers affectés par l'Etat à la prévention et à la sécurité routières.
Le budget de la sécurité routière pour 1999 marque, par ailleurs, une inflexion des priorités en faveur des initiatives locales, des actions en milieu scolaire et de la communication nationale. La délégation interministérielle à la sécurité routière devrait ainsi retrouver son rythme traditionnel de trois campagnes nationales de communication par an, alors que la contraction des crédits avait réduit ce nombre à deux en 1997 et en 1998.
Je me félicite tout particulièrement du développement des actions de sensibilisation des jeunes au code de la route. En effet, ces actions concourent à l'acquisition de comportements civiques et au respect concret de la loi.
Je déplore toutefois l'extrême modestie des crédits destinés à l'évaluation des politiques de sécurité routière, au regard du coût de ces politiques comme de celui des accidents de la route pour la collectivité, que l'on peut estimer à 118 milliards de francs en 1997.
L'évaluation des mesures législatives ou réglementaires en matière de sécurité routière est en effet une condition de leur légitimité et, par là même, de leur efficacité.
En particulier, il ne serait pas rationnel de contraindre les conducteurs à des obligations ou à des dépenses supplémentaires, comme des rendez-vous périodiques de formation continue, sans avoir au préalable réalisé des expérimentations et des évaluations de nature à en prouver l'efficacité.
A tout le moins, je souhaiterais donc à titre personnel que la mise en oeuvre du projet de loi sur la sécurité routière s'accompagne d'une hausse des crédits de communication et d'évaluation de la sécurité routière.
En conclusion, je vous indique, mes chers collègues, que la commission des finances vous propose d'adopter les crédits des routes et de la sécurité routière. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. François Gerbaud, rapporteur pour avis.
M. François Gerbaud, en remplacement de M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour les routes et les voies navigables. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'année dernière, lors de l'examen des crédits des routes et voies navigables, notre collègue M. Gruillot - que je remplace ici - relevait que le contexte se caractérisait par « de graves incertitudes tant dans le domaine routier que dans le domaine fluvial ». Il ajoutait : « L'avenir du programme de construction d'autoroutes mis en place en 1992 dans le cadre d'un schéma directeur, et accéléré en 1994, reste, à tout le moins, incertain. »
Quelques semaines plus tard, le Sénat décidait de créer une commission d'enquête sur les grandes infrastructures ; j'en rappellerai tout à l'heure les conclusions.
Les crédits budgétaires alloués aux routes, en dépenses ordinaires et crédits de paiement, enregistraient en 1998 une quasi-stabilisation en francs courants, tandis que les crédits inscrits au chapitre routier du fonds d'investissement des transports terrestres et voies navigables, le FITTVN, progressaient de 14,1 % par rapport à l'année précédente.
Il en sera tout autrement en 1999.
Si la sécurité routière est relativement épargnée - cela vient d'être dit - les crédits des routes apparaissent comme largement « sacrifiés » dans le projet de loi de finances pour 1999. La dotation globale dévolue aux routes baissera de près de 5 %.
Les dépenses en capital enregistrent une diminution globale de 6,33 %. Les investissements exécutés par l'Etat passent de 4,23 milliards à 3,76 milliards de francs, soit une baisse de 11,1 %. Les investissements sur la voirie nationale baissent de près de 13 %.
Les crédits dévolus aux routes dans le FITTVN enregistrent une baisse encore supérieure puisqu'elle est de 13,3 %.
Comme paraît éloignée l'année 1993, où le gouvernement d'alors avait souhaité, en dix ans, faire de notre réseau autoroutier le plus important d'Europe par sa longueur !
Certes, devant la commission des affaires économiques, M. le ministre de l'équipement, des transport et du logement a souligné, pour le déplorer, que les contrats de plan routiers Etat-région ne pourraient être exécutés qu'à hauteur de 82 % en moyenne. Il a insisté, il est vrai, sur le fait que l'ensemble des besoins « était loin d'être satisfait dans le domaine routier ».
Il demeure que ces choix de politique budgétaire traduisent le « passage à l'acte » d'une politique dont le Gouvernement, dans son ensemble, n'avait nullement caché les intentions lors de son installation.
Les crédits des routes demandés pour 1999 s'élèvent, en dépenses ordinaires et en crédits de paiement, à 7,010 milliards de francs contre 7,366 milliards de francs dans le budget voté de 1998, soit une baisse de 4,83 %.
Les crédits consacrés à la sécurité routière atteignent, quant à eux, 455 millions de francs pour 1999, soit une augmentation de 4,1 % par rapport à 1997.
Les crédits consacrés aux voies fluviales sont les suivants : 1,6 million de francs sont consacrés aux personnels d'entretien des voies navigables et ports fluviaux, soit un montant inchangé par rapport à 1998 ; 20 millions de francs d'interventions sont affectés à la batellerie, montant, lui aussi, inchangé par rapport à l'année dernière.
La modestie de ces crédits s'explique par l'existence de l'établissement public Voies navigables de France qui bénéficie de ressources propres, soit 593 millions de francs en 1999.
J'évoquerai maintenant le Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, le FITTVN, en commençant par le réseau routier.
Les investissements sur le réseau routier national bénéficieraient, en 1999, de 1,590 milliard de francs, soit 48 % des ressources du FITTVN. Ces investissements seraient en réduction de 245 millions de francs par rapport à 1998, soit une baisse de 13,3 %.
Les investissements sur le réseau des voies navigables, quant à eux, devraient bénéficier de 450 millions de francs en 1998 et progresseront donc de 20 millions de francs, soit une hausse de 4,6 %, par rapport à l'exercice précédent. Ils représentent ainsi près de 12 % des emplois du fonds.
Votre rapporteur pour avis ne peut qu'exprimer à nouveau le souhait que le comité de gestion du FITTVN, au sein duquel siègent des membres du Sénat et de l'Assemblée nationale, puisse exercer un véritable pouvoir de contrôle en matière de programmation des dépenses.
Il rappelle que telle était bien l'intention du législateur au moment de la création de ce fonds. Il souligne, enfin, que le FITTVN, toujours dans l'esprit du législateur, avait vocation à être un outil essentiel dans la politique d'aménagement du territoire et surtout pas un « substitut » aux insuffisances budgétaires.
J'en viens maintenant au schéma directeur.
Sur les 9 535 kilomètres d'autoroutes concédées, inscrites au schéma directeur, les sections en service au 31 décembre 1997 représentaient 74,3 % du total prévu et les portions en travaux 11 % du total. Il reste donc à construire 14,7 %.
Au 31 décembre 1997, le schéma des LACRA, les liaisons assurant la continuité du réseau autoroutier à 2 fois 2 voies, n'est réalisé qu'à hauteur de 30,2 %.
Le schéma des grandes liaisons d'aménagement du territoire est, quant à lui, réalisé à hauteur de 27,8 %.
Le volet routier des contrats Etat-région du XIe Plan s'élève à 65,8 milliards de francs, la part de l'Etat s'élevant à 27,4 milliards de francs.
Ces montants comprennent les programmes d'accélération qui concernent, notamment, l'aménagement des trois grands axes interrégionaux que sont la rocade des Estuaires, autoroute gratuite entre Caen, Rennes et Nantes, la route centre Europe Atlantique, entre Mâcon et Chalon, à l'Est, et La Rochelle, à l'Ouest, via Montluçon, Limoges et Angoulême et, enfin, la RN 88 entre Toulouse et Lyon.
L'aménagement de ces axes représente un enjeu capital pour le désenclavement des régions traversées et pour un développement souhaité équilibré du territoire.
Le comité des investissements à caractère économique et social du 30 juin 1998 a arrêté le montant estimé des dépenses d'investissement des sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroute, en 1999, à 13,350 milliards de francs.
Au 1er février 1998, l'augmentation moyenne des tarifs de péage pour l'ensemble des sociétés d'autoroute a été d'environ 2,3 % pour les véhicules légers et de 3,3 % pour les poids lourds. La hausse moyenne des péages, véhicules légers et poids lourds confondus, est donc de l'ordre de 2,6 %.
Je dirai quelques mots maintenant sur le transport routier.
La situation économique des entreprises du secteur « transport routier de marchandises » s'est améliorée en 1997, avec une hausse du chiffre d'affaires de 4,5 % s'expliquant par l'augmentation des volumes de frêt transporté, accompagnée par un léger relèvement des prix à hauteur de 0,5 %. Le transport routier de marchandises devrait bénéficier de la bonne conjoncture économique de l'année 1998.
J'aborde maintenant la question de la sécurité routière.
Le bilan de l'année 1997 s'établit à 125 202 accidents corporels, à 7 989 tués, à 35 716 blessés graves et à 133 862 blessés légers.
Comme l'année passée, le comportement des conducteurs en matière de respect des vitesses demeure préoccupant, les vitesses pratiquées atteignant toujours un niveau très élevé. Les statistiques permettent de tirer un certain nombre de conclusions.
En premier lieu, l'amélioration de la qualité du réseau permet une diminution du nombre d'accidents, mais elle peut aussi entraîner une augmentation des vitesses pratiquées et donc de la gravité des accidents.
En deuxième lieu, l'augmentation du volume de circulation a une incidence sur la sécurité routière, mais elle diffère selon les réseaux, puisque les autoroutes restent quatre fois plus sûres que les routes.
En troisième lieu, les vitesses, qui sont élévées, demeurent globalement à peu près stables d'une année sur l'autre.
Le facteur « entretien et exploitation de l'infrastructure » intervient dans 24 % des accidents, et cela répond aux propos de M. le ministre relatifs à l'équipement.
J'en viens maintenant aux voies navigables.
Sur l'ensemble de l'exercice 1997, le transport fluvial de marchandises, avec 49,5 millions de tonnes contre 50,7 millions de tonnes en 1996, soit une baisse de 2,4 %, a enregistré une diminution de son activité, en raison des mauvaises conditions climatiques du début de l'année.
On relève un constraste entre la croissance du trafic rhénan-mosellan et la baisse du trafic sur les autres axes.
S'agissant des moyens en personnel, Voies navigables de France dispose de 5 500 agents de l'Etat, répartis dans dix-sept entités régionales ou locales constituées par des services spécialisés de navigation, des services maritimes et de navigation et certaines directions départementales de l'équipement mises à disposition de l'établissement public depuis sa création.
L'activité de Voies navigables de France comporte deux branches. La première assure la gestion du transport par voies navigables, héritée de l'Office national de la navigation ; la seconde, qui est nouvelle, assure l'exploitation, l'entretien et le développement des 6 800 kilomètres du réseau des voies navigables de l'Etat.
Pour 1998, le programme d'investissement devrait connaître une forte augmentation en raison de la hausse de la subvention du FITTVN. Ainsi, environ 629 millions de francs seront principalement affectés à hauteur de 130 millions de francs à la poursuite du développement du réseau et à hauteur de 420 millions de francs à la restauration des canaux et rivières confiés à Voies navigables de France.
Après la décision d'abandonner le projet de liaison fluvial à grand gabarit Rhin-Rhône, deux grands projets subsistent : la liaison Seine-Nord et la liaison Seine-Est.
S'agissant de la liaison Seine-Nord, sur la base des études préliminaires de tracé, une concertation sur le choix d'un fuseau de tracé s'est conclue par un rapport de synthèse remis au mois de juin 1998 au ministre des transports. Ces différentes études sont financées sur les crédits du FITTVN.
S'agissant de la liaison Seine-Est, Voies navigables de France conduit les études de cadrage dont les volets économiques et technico-environnementaux permettront d'éclairer la décision gouvernementale sur l'opportunité du projet. L'achèvement des études est prévu dans les semaines qui viennent. Ces études sont également financées sur les crédits du FITTVN.
En conclusion, je ne pense pas inutile de rappeler quelles furent les quatre principales propositions de la commission d'enquête du Sénat sur les infrastructures terrestres dans le domaine routier.
Premièrement, il conviendrait d'instaurer une véritable procédure de programmation autoroutière, décidée et revue tous les cinq ans par le Parlement, comprenant les trois éléments nécessaires à sa réalisation, à savoir une définition des travaux - construction, réhabilitation - un échéancier des enveloppes d'investissement assorties de modalités de financement.
Deuxièmement, il faudrait définir un concept d'autoroute évolutive à coût réduit, l'autoroute allégée, initialement à deux fois une voie, adapté à une intensité kilométrique inférieure ou égale à 10 000 véhicules par jour.
Troisièmement, il s'agirait de réformer en profondeur le système de financement des autoroutes en établissant le principe de l'autoroute à péage, en transformant les sociétés d'autoroutes en deux véritables entreprises publiques concessionnaires, en adaptant la durée des financements à la durée de vie des infrastructures, en faisant du fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables l'instrument privilégié de l'action de l'Etat sur le réseau non concédé.
Enfin, quatrièmement, il conviendrait d'appliquer les directives européennes comme elles doivent l'être en matière de péage, de TVA et de mise en concurrence régulière des concessions, en défendant toutefois le principe indispensable de la péréquation, au sein du réseau concédé, entre liaisons réalisées et liaisons à construire.
En annonçant, d'une part, que vous négociiez à Bruxelles la possibilité d'allonger la durée des concessions autoroutières et, d'autre part, que le concept d'autoroute évolutive à coût réduit pourrait s'intégrer dans le futur schéma de service, vous avez, monsieur le ministre, fait quelques pas dans notre direction. Nous allons donc faire un petit bout de route avec vous et, même si l'on peut dire, sans mauvais jeu de mots, que le budget des routes est un peu en berne, la commission des affaires économiques et du Plan a décidé de s'en remettre à l'immense sagesse du Sénat. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant les transports terrestres, les routes et la sécurité routière.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 32 minutes ;
Groupe socialiste, 17 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 33 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 10 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
La parole est à M. Fatous.
M. Léon Fatous. Le projet de budget des transports terrestres que vous nous présentez, monsieur le ministre, marque, une nouvelle fois, la politique volontariste du Gouvernement en matière de développement des transports, de tous les modes de transports.
Tout en ayant la nécessité d'une gestion rigoureuse et stricte des finances publiques, vous avez, comme lors du budget de 1998, maintenu vos priorités sans pénaliser financièrement les autres axes de votre politique.
En préambule, je dirai que ce budget satisfait le groupe socialiste, puisqu'il répond à notre souhait d'un développement d'une politique de transports multimodale respectueuse de l'environnement, pour un aménagement équilibré et intelligent du territoire.
Cependant, j'aurais aimé qu'un effort plus important soit traduit dans le développement du transport de fret par le rail.
Si les crédits budgétaires des transports terrestres n'augmentent que de 0,6 %, la progression est supérieure à 5 % en tenant compte du Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, du Fonds pour l'aménagement de la région d'Ile-de-France et de la dotation en capital de Réseau ferré de France, RFF.
Votre budget marque, en premier lieu, un soutien fort au transport ferroviaire, et je m'en réjouis pleinement.
Je voudrais souligner, d'abord, la dotation complémentaire de 13 milliards de francs en 1999 à RFF, qui, même si elle ne lui permettra pas de résorber sont déficit, stabilisera celui-ci. Cela répond à une logique que le groupe socialiste avait longuement défendue lors de la création des deux établissements. En effet, il ne voulait pas désendetter la SNCF en endettant RFF.
A ce sujet, monsieur le ministre, vous venez de réviser le montant des péages. L'exercice était périlleux mais vous êtes parvenu, je crois, à un bon équilibre puisque, en 2001, la SNCF paiera 8,9 milliards de francs, soit 1,2 milliard de francs de plus sur trois ans.
Un rééquilibrage financier entre le rail et la route permettra de réaliser un programme maîtrisé de construction de lignes nouvelles à grande vitesse, tout en modernisant le réseau existant.
Le développement du réseau TGV national et international est capital pour la SNCF, comme le montre le nombre croissant de voyageurs sur les réseaux Nord-Sud-Est, Thalys et Eurostar.
Demain, l'allongement du réseau jusqu'à Marseille, Montpellier, plus tard la réalisation du TGV Est seront autant de facteurs qui renforceront la place du transport ferré comme mode de transport des passagers.
Mais le TGV n'est pas un tout, et l'intérêt général que nous devons avoir pour référence nous impose de travailler sur le réseau existant.
La modernisation du réseau par l'octroi d'un matériel roulant plus performant, notamment pendulaire, doit être étudiée chaque fois qu'il peut constituer une solution alternative à la création d'une infrastructure nouvelle.
Nous devons avoir pour souci permanent l'intérêt de tous les voyageurs, mais aussi un développement harmonieux des transports ferrés. L'électrification de certaines lignes est obligatoire. Cela répond à un dossier qui me tient particulièrement à coeur, et qui fait beaucoup parler de lui actuellement, celui qui concerne le transport du fret.
Depuis deux ans, l'activité du fret a connu une progression des plus remarquables ; les résultats de 1998 devraient dépasser, en volume, les 53 milliards de tonnes par kilomètre, le meilleur résultat depuis la mise en oeuvre de la déréglementation routière en 1985.
Pour accompagner cette progression et améliorer la qualité, la SNCF, et notamment sa division fret, s'est donné les moyens de son ambition, par l'embauche supplémentaire de conducteurs et l'affectation de nouvelles locomotives.
Cependant, à quoi bon les moyens si le réseau ne peut absorber la progression du trafic ?
Les investissements d'infrastructures pour le fret restent insuffisants pour répondre à ces besoins.
Vous savez, comme moi, monsieur le ministre, que nous frôlons, depuis plusieurs mois, le niveau de saturation au niveau des agglomérations de Lyon, Nîmes et Montpellier. Leur contournement devient capital.
Cela est primordial, car la part importante du fret réalisé par le biais du transport combiné ne cesse de s'accroître. Il serait dommage de modérer le développement de ce type de transport, car le transport combiné est l'une des solutions répondant le mieux à la sécurité, au respect de l'environnement, face au « tout-autoroute ».
Aussi, une question se pose : qu'en est-il des plates-formes multimodales ? Comment vont-elles s'intégrer dans ce schéma ?
Une autre question nous interpelle : le personnel, auquel nous avons toujours été très attentif, prendra-t-il véritablement conscience de l'évolution inéluctable de son entreprise ?
Dans son rapport sur le bilan 1997, M. Gallois déclarait : « Pour maîtriser ses grands défis et répondre efficacement à ses missions, notamment celles de service public, la SNCF entreprendra de profondes mutations internes. La première concerne le dialogue social. Le niveau de conflictualité actuel est un obstacle majeur au développement de l'entreprise ; tous les acteurs concernés - direction, encadrement, organisations syndicales, personnels - doivent en prendre clairement conscience et réfléchir - pourquoi pas ensemble ? - aux moyens de surmonter cette difficulté. Faire d'un dialogue social plus serein, plus productif, le levier des progrès de l'entreprise et de ses personnels peut être un objectif commun à tous au sein de la SNCF. D'autres ont mieux avancé que nous dans cette voie ; ils montrent en tout cas que c'est possible et que tout le monde "s'y retrouve". » Je fais miens de tels propos.
Nonobstant ces questions, sachez, monsieur le ministre, que votre projet de budget me satisfait, car il a le mérite d'inscrire clairement une volonté politique de développement du transport collectif et ferroviaire.
S'agissant maintenant des voies navigables, des routes et de la sécurité routière, là encore, l'action et l'engagement du Gouvernement sont clairs et positifs.
Les différents accords inscrits dans le cadre de la modernisation et l'adaptation des entreprises de transports routiers de marchandises sont repris, qu'il s'agisse du contrat de progrès, des accords sur les congés de fin d'activité pour les conducteurs routiers de marchandises ou de ceux qui ont été étendus en avril 1998 aux conducteurs routiers de voyageurs.
Votre projet de budget prévoit une augmentation de plus de 10 % de la dotation pour le fonctionnement et l'aménagement des services et des infrastructures de contrôle routier pour renforcer les dispositifs de contrôle prévus par la loi de février 1998.
Nous savons tous, monsieur le ministre, combien vous êtes attentif à l'évolution du transport routier, notamment au sein de la Communauté européenne. Aussi, sachez que nous vous soutenons dans votre engagement destiné à harmoniser la législation sociale à l'échelon européen.
En ce qui concerne les voies navigables, les crédits sont à la hauteur. En effet, même si les crédits qui sont consacrés à la voie fluviale restent inchangés par rapport à 1998, il faut relever que, au titre du FITTVN, 450 millions de francs lui seront consacrés, sans compter les crédits alloués à l'établissement public Voies navigables de France.
L'ensemble de ces fonds permettront de continuer les études sur les liaisons grand gabarit Seine-Nord et Seine-Est, et, bien entendu, les travaux utiles et nécessaires de restauration du réseau.
Enfin, l'autre grand volet, et non le moindre, de votre projet de budget, concerne, bien sûr, le réseau routier et autoroutier et la sécurité routière.
S'agissant des routes, on constate immédiatement, au travers des crédits qui y sont affectés, que votre projet de budget est plus axé sur l'amélioration et l'entretien du réseau existant que sur celui du développement de réseaux nouveaux.
Cependant, cela n'affecte en rien les opérations engagées et la réalisation des contrats de plan à hauteur de 81 %, à la fin de 1999.
Enfin, les crédits de la sécurité routière sont en hausse de 4 % ; il faut s'en féliciter d'autant plus fortement que nous avons tous pu constater, ces derniers mois, une augmentation du nombre d'accidents graves.
L'information, la formation et l'apprentissage dès le plus jeune âge des règles de sécurité routière sont essentiels. Nous ne pouvons plus perdre sur la route plus de 8 000 concitoyens chaque année ; je sais que le Gouvernement s'est donné l'objectif de diviser par deux le nombre des tués, et c'est tant mieux.
L'ensemble des constructeurs automobiles a consenti des efforts importants pour renforcer la protection et la sécurité des automobilistes. Il faut, aujourd'hui, mobiliser et sensibiliser davantage les conducteurs, mais il faudra intensifier aussi le nombre de contrôles.
Telles sont, monsieur le ministre, les réflexions que je voulais présenter à propos de votre projet de budget.
Parce que ce projet de budget reprend un grand nombre d'orientations que le groupe socialiste a toujours portées et défendues, parce qu'il fait une plus large part aux transports collectifs et ferrés, parce qu'il offre une perspective de développement intéressant pour le transport du frêt, parce qu'il vise à rétablir un équilibre entre les différents modes de transports, le groupe socialiste vous apportera son soutien en le votant et en s'opposant à l'amendement de réduction des crédits proposés par la droite sénatoriale qui, à nos yeux, est inadmissible. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.) M. le président. La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, une politique d'aménagement du territoire implique nécessairement une politique d'infrastructures et de transports adaptée. C'est vrai dans le cadre national, mais cela l'est plus encore sur le plan européen, comme l'ont bien mis en relief, tout à l'heure, M. le rapporteur spécial et MM. les rapporteurs pour avis, que je remercie tous quatre pour la qualité de leurs documents.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Très bien !
M. Daniel Hoeffel. Au fur et à mesure que l'espace européen s'élargit vers l'Est, nous devons veiller à ce que notre territoire ne soit pas marginalisé et à ce qu'il soit relié dans de bonnes conditions au centre de gravité de l'Europe. Réseau autoroutier, réseau ferroviaire classique et à grande vitesse et réseau de voies navigables doivent y contribuer.
Je regrette, alors que la loi du 4 février 1995 a prévu la réalisation de la liaison fluviale Rhin-Rhône et son financement hors budget et que cette loi est toujours formellement en vigueur, que cette liaison ait été purement et simplement rayée. Elle reste, qu'on le veuille ou non, plus que toute autre, un maillon manquant dans le réseau des voies navigables européennes qui, tôt ou tard, devra être réalisé. J'en ai la ferme conviction, car je crois profondément que la voie navigable est un mode de transport d'avenir.
Mais cette parenthèse étant fermée, mon propos d'aujourd'hui concernera plus particulièrement le projet de TGV Est européen, complémentaire du TGV Rhin-Rhône et non incompatible avec ce dernier.
Le TGV Est européen a été à maintes reprises évoqué ici même au Sénat, et, en dernier lieu, sur l'initiative du président Poncelet. La détermination des élus du Nord-Est reste à cet égard intacte, monsieur le ministre : nous demandons la réalisation d'une liaison nouvelle de Paris à Strasbourg, et au-delà. Aucune expérimentation technologique suggérée par ailleurs ne saurait infléchir notre détermination ni être considérée comme une alternative crédible conforme aux intérêts véritables des marches de l'Est.
Quatre arguments viennent étayer cette position.
Tout d'abord, le quart Nord-Est de la France, dans l'état actuel de la situation, est la seule partie du territoire national considérée comme ne méritant pas de liaison ferroviaire à grande vitesse. Nous étions réduits au rôle de glacis entre 1918 et 1945. Aujourd'hui, semble-t-il, le rôle de région charnière dans la perspective du développement et de l'insertion dans l'Union européenne nous est refusé, alors que ce rôle est évident pour des raisons géographiques et économiques et que le TGV Est n'est qu'un élément de la grande liaison entre la région d'Ile-de-France et l'Europe centrale. Strasbourg est, en l'occurrence, non pas un terminus, mais une étape.
M. Joseph Ostermann. Très bien !
M. Daniel Hoeffel. Le deuxième argument qu'on ne saurait passer sous silence concerne précisément la vocation européenne de Strasbourg.
Faut-il rappeler que la France a voulu et accepté que Strasbourg soit le siège du Conseil de l'Europe, du Parlement européen et de la Cour européenne des droits de l'homme ?
En défendant cette position, la France s'est engagée à améliorer les liaisons aériennes et ferroviaires à grande vitesse, qui sont indissociables de la mission européenne de Strasbourg.
Le manque trop fréquent de fiabilité des liaisons aériennes en raison d'une ponctualité de plus en plus rare, de retards de plus en plus réels sans compter les grèves répétitives à Air France et à la SNCF, ainsi que l'absence de liaison par TGV fragilisent la position de Strasbourg. Ils valent à la France - j'en suis témoin à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe - des critiques répétées de la part des délégations étrangères, critiques qui confortent ceux qui cherchent à mettre en cause la mission incombant à Strasbourg.
Comment ne pas approuver Mme Edith Cresson, commissaire européen, qui déclare aujourd'hui même, dans Les Dernières Nouvelles d'Alsace : « Bien sûr, tout serait plus facile avec le TGV Est européen pour lequel je continue de militer. »
Le troisième argument est d'ordre psychologique mais a son poids dans les régions de l'Est qui gardent, à juste titre, la réputation de croire en la parole de l'Etat.
Tous les présidents de la Ve République sans exception se sont prononcés clairement en faveur de la liaison fluviale Rhin-Rhône. Tous les présidents et tous les premiers ministres ont dit oui au TGV Est.
Quel crédit peut-on encore accorder à un Etat qui, malgré les engagements formels, laisse se multiplier les prétextes - monsieur le ministre, en l'occurrence, je ne mets pas en cause le pouvoir politique - pour expliquer la non-rentabilité et l'inutilité d'infrastructures concernant le Grand Est, alors que l'Etat ne lésine jamais lorsqu'il s'agit de combler certains déficits ou de réaliser des infrastructures plus discutables en terme d'aménagement du territoire, telle - je serai direct ! - une ligne de métro coûtant 7 milliards de francs ? Je partage, à cet égard, les interrogations du rapporteur spécial, M. Cazalet.
M. Joseph Ostermann. Très bien !
M. Daniel Hoeffel. Une telle situation place les élus républicains que nous sommes, au-delà de toutes les tendances, dans une position pour le moins inconfortable ; elle explique certains phénomènes regrettables.
Le quatrième et dernier facteur qu'il m'appartient d'évoquer est, évidemment, l'aspect financier.
Je ne minimise pas, monsieur le ministre, les contraintes et les servitudes qui sont celles de tout ministre des transports. Il convient de rappeler à ce propos que le projet de TGV Est européen faisait appel - il était le seul à le faire - à un cofinancement important des collectivités locales concernées - et je me suis personnellement engagé à cet égard à la tête de mon conseil général - en contrepartie de la promesse que ce cofinancement contribuerait à une réalisation plus rapide du projet. La réciprocité des engagements n'a pas été tenue.
Cela m'amène, monsieur le ministre, à évoquer brièvement quelques questions.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je vous répondrai !
M. Daniel Hoeffel. En 1994, le Gouvernement, par lettre du ministre chargé des transports d'alors, avait garanti à la SNCF des contributions publiques permettant au projet d'atteindre un taux de rentabilité de 8 %. C'est ce qui avait permis le lancement de l'enquête, puis la déclaration d'utilité publique de mai 1996. Il s'agissait là d'avancées concrètes et d'un engagement financier précis.
Cette année, et je vous en remercie, la convention pour le financement de l'avant-projet détaillé est intervenue et, par une décision du 4 février 1998, le Gouvernement a marqué sa volonté de relancer le projet, comme le rapport de M. Berchet le rappelle à juste titre.
Mais cette annonce, malgré la nomination d'un chargé de mission, n'a pas encore été suivie du plan de financement réellement finalisé de la première phase, pour laquelle il manque à ce jour, autant que l'on puisse en juger, entre 2 et 3 milliards de francs.
Lors des réunions préalables à la signature du protocole d'accord relatif à l'avant-projet détaillé et aux travaux préliminaires, il avait été entendu que les études, les acquisitions foncières et les opérations de remembrement seraient menées sur l'ensemble du tracé dès la première phase du chantier. Monsieur le ministre, pouvez-vous confirmer aujourd'hui l'accord du Gouvernement sur ce point précis ?
La première phase de travaux, telle qu'elle a été annoncée le 4 février, prévoit la construction d'un nouveau pont ferroviaire entre Strasbourg et Kehl, la ville jumelle de Strasbourg, de l'autre côté du Rhin, pour réaliser l'interconnexion de notre réseau national avec le réseau à grande vitesse allemand. L'expérience nous montre - la plus récente que j'ai vécue est la réalisation du deuxième pont routier sur le Rhin, au sud de Strasbourg - que les délais préalables à la mise en chantier de tels ouvrages internationaux sont nécessairement très longs. En effet, aux procédures réglementaires de chacun des deux pays s'ajoutent celles qui sont liées au caractère international de l'ouvrage, lequel nécessite un véritable accord franco-allemand.
Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer si des démarches diplomatiques à ce sujet ont déjà été engagées par vos soins, et quel calendrier peut être envisagé pour ces négociations ?
Au cours du dernier sommet européen de Pörtschach - cette petite ville autrichienne qu'il ne faut pas confondre avec Potsdam - les dirigeants des quinze pays de l'Union européenne ont exprimé la volonté de réactiver les réseaux transeuropéens, régulièrement évoqués sommet après sommet depuis celui qui s'est tenu à Essen.
Y a-t-il une perspective de voir enfin ces réseaux passer de l'incantation à la concrétisation ? Ne serait-ce pas le moment, pour l'Union européenne, alors que les taux d'intérêt sont plus bas que jamais, de prendre une initiative qui serait concrète et visible aux yeux des habitants de l'Europe ?
A-t-on réservé une place, dans ces projets, pour le TGV Est européen, authentiquement transeuropéen ?
Telles sont quelques-unes des questions qui restent en suspens, telles sont les interrogations qui demeurent les nôtres. Monsieur le ministre, je vous remercie par avance des réponses que vous pourrez nous donner, soit aujourd'hui soit plus tard, et qui seront autant de tests quant à la volonté de la France de respecter ses engagements et quant à l'aptitude de notre pays à entrer dans l'espace européen en se dotant à cet effet des infrastructures modernes qui sont nécessaires. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lorsqu'on demande à quelqu'un s'il a peur de prendre l'avion, la réponse est oui. Mais, si l'on demande à la même personne si elle a peur lorsqu'elle prend sa voiture, en général, elle vous regarde d'un air ahuri : « Pourquoi une telle question ? »
C'est un fait, et un fait important, que la voiture ne fait pas peur, alors même que l'avion est un moyen de transport beaucoup plus sûr. Il n'y a d'ailleurs guère qu'un seul moyen de déplacement qui, avec un seul accident corporel pour 50 millions de passagers, est moins dangereux que l'avion. Je ne sais pas si vous le savez, monsieur le ministre : c'est le téléski. (Sourires.)
C'est ainsi. On mesure mal les dangers de la route alors que la seule considération des chiffres est édifiante : 8 000 personnes tuées, dont plus de 2 000 jeunes de quinze à vingt-quatre ans, et 170 000 blessés, dont 36 000 graves, sur nos routes, pour la seule année 1997.
Ce bilan est proprement terrifiant, et je m'associe à notre collègue Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances, pour considérer qu'il est décevant par rapport aux années précédentes.
Je ne doute pas, monsieur le ministre, que c'est aussi votre sentiment, puisque vous vous êtes fixé pour objectif de réduire de moitié en cinq ans le nombre de morts sur les routes.
Le 7 avril dernier, alors que nous débattions du projet de loi relatif à la sécurité routière, je rappelais que l'on dénombrait 17 000 tués sur les routes en 1972 et qu'il avait donc fallu un quart de siècle pour diviser ce chiffre tragique par deux, et ce grâce à l'effet cumulé de mesures préventives et de mesures répressives.
Fort de cet enseignement, je forme très sincèrement le voeu, monsieur le ministre, que vous parveniez à atteindre votre objectif, et donc à accomplir en cinq ans ce que d'autres n'ont pu réaliser qu'en vingt-cinq ans.
Mais je ne veux pas ici entrer dans une polémique, car je crois que le temps est venu d'engager une grande réflexion nationale sur la sécurité routière, même si je déplore que celle-ci n'ait pas été préalable à la présentation de votre projet de loi.
En la matière, je serais tenté de plagier François Mitterrand lorsque, parlant du chômage, il disait : « Tout a été essayé. » Mais ce n'est pas une incitation à accepter la fatalité, bien au contraire : il n'y a pas de fatalité à voir trois fois plus de Français que de Britanniques mourir sur les routes chaque année.
Toutes les études montrent d'ailleurs que près de neuf accidents sur dix - c'est-à-dire ceux qui ont pour origine un comportement dangereux ou inadapté - pourraient aisément être évités.
Aussi, j'approuve globalement les dispositions du projet de loi de finances pour 1999 concernant la sécurité routière, même si je regrette la diminution tendancielle des moyens affectés aux campagnes nationales de prévention.
Je ne reprendrai pas le détail des mesures, les rapporteurs nous les ont excellemment présentées et certaines, telles que le contrôle technique des véhicules, ont largement fait leur preuve.
Je voudrais simplement insister sur l'implication de la jeunesse, pour laquelle les accidents de la circulation représentent la première cause de mortalité.
Il a été démontré que l'euphorie de la Coupe du monde de football a suscité une augmentation de 15 % du nombre de tués sur les routes au mois de juillet. Mais il y a aussi l'euphorie du samedi soir et, plus largement encore, des soirées de week-end, qui est à l'origine de dizaines d'accidents mortels chaque fin de semaine.
Toutes nos régions sont concernées, même si certaines paient un plus lourd tribut : je pense à l'Aquitaine, où les derniers chiffres dans les départements du Lot-et-Garonne, de la Gironde ou, pis encore, des Landes sont proprement dramatiques.
Je crois que l'on ne peut pas être hypocrite sur ce point : nous savons tous que l'alcool en est le facteur principal.
Certes, la répression existe mais, au vu des résultats, ses modalités méritent pour le moins d'être revues.
Les gérants des débits de boissons et des discothèques sont les premiers sensibilisés à cette terrible question. Mais je crois vraiment que nous ne pouvons pas en dire autant des consommateurs eux-mêmes, qui n'hésitent pas à prendre le volant tant il est vrai qu'il n'est pas dans nos moeurs de voir une personne membre d'un groupe rester sobre, seule à ne pas boire, pour ramener tout le monde à bon port.
Pourtant, des initiatives associatives ont vu le jour et des expériences existent. Je pense en particulier à certaines férias du sud de la France, grandes manifestations populaires par excellence, qui ont développé des actions préventives ou « curatives », si j'ose dire, aux résultats vraiment excellents. Ainsi, la commission des fêtes populaires de la ville de Dax a mis en place des « Points alcoolémie », tenus par des bénévoles, aux sorties stratégiques de la cité. L'alcool y est dépisté, le café servi et le sommeil assuré.
Après trois ans d'existence, cette initiative a permis de ne dénombrer, en 1998, aucun accident de la circulation consécutif à la féria. J'ajoute, parce que c'est certainement un exemple à suivre, que le procureur de la République de cette ville envisage de recruter des bénévoles, sur la base d'une peine d'intérêt général qu'effectueraient des gens ayant commis une infraction à la législation sur l'alcool au volant.
Aussi, je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, quelles actions spécifiques vous envisagez pour réduire cette hécatombe de la jeunesse sur nos routes.
En outre, il est incontestable que l'amélioration des infrastructures routières, particulièrement la résorption des points noirs, participe activement à la sécurisation de la circulation.
De même, la répression a une utilité tout aussi incontestable. Faut-il encore que cette répression ne soit ni aveugle ni arbitraire, alors qu'aujourd'hui bon nombre de nos concitoyens la perçoivent comme telle !
A cet égard, nous savons tous que les contrôles s'appliquent plus facilement dans des zones où le danger est moindre et que certains points dangereux, ou plus exactement certaines conditions de circulation, mettent les conducteurs à l'abri quasi absolu de toute répression.
En fait, la répression s'exerce plus facilement sur les autoroutes, pourtant quatre fois plus sûres, que sur le réseau secondaire, où la probalité de rencontrer les forces de l'ordre est beaucoup plus faible, alors que la dangerosité est bien plus élevée, ce que traduit d'ailleurs la nouvelle augmentation des accidents mortels constatés en rase campagne.
M. François Gerbaud ! Très bien ?
M. Bernard Plasait. Je voudrais insister sur ce qui devrait être le maître mot d'une politique de sécurité routière à la fois efficace et juste : la responsabilisation des conducteurs, et plus largement de tous les usagers de la route, quel que soit le mode de transport.
Les efforts de formation sont certes toujours plus nécessaires, mais la responsabilisation de chacun l'est encore davantage.
Je ne peux que vous redire, monsieur le ministre, que la responsabilité classique de l'automobiliste, c'est le bonus à l'assurance.
C'est pourquoi il me paraît urgent de développer une notion de responsabilité par rapport à l'accident, que pourrait très utilement concrétiser la constitution d'un fichier national des automobilistes ayant causé un accident - dont la gravité serait à apprécier - et sur lesquels serait concentré un effort particulier de sensibilisation et de formation.
Ma conclusion tiendra en quelques mots : sanction sans responsabilisation n'est que ruine de la sécurité. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Gerbaud.
M. François Gerbaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la météo est mauvaise, le temps incertain, et c'est aujourd'hui sous un ciel lourd...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je n'y peux rien ! (Sourires.)
M. François Gerbaud. ... que le budget des transports terrestres, celui des routes et, plus tard, celui de l'aviation civile vont, tour à tour, livrer à notre discussion leurs efforts, leurs insuffisances, leurs perspectives et aussi leurs contraintes.
Dans ce grand débat qui touche à l'essentiel de l'activité économique des transports, auxquels sont liés les très grands projets d'infrastructures, vous êtes, monsieur le ministre, dans l'oeil du cyclone.
Ministre du « tout-en-un », comme le disait autrefois Larousse, la route, le rail, les canaux, les aéroports et le ciel - celui des avions bien sûr ! - sont sous votre responsabilité.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Vous oubliez la météo !
M. François Gerbaud. De ce fait, vous êtes, en quelque sorte, intermodal, dans un monde où l'intermodalité est désormais une réponse attendue, impérative et logique, dans la conception moderne du transport et dans l'objectif d'y privilégier le rail, dont le siècle nouveau confirmera, en France et en Europe, le rôle prééminent dans l'organisation des transports terrestres.
Ces choix partagés, vous les assumez avec votre conviction et votre expérience personnelles, dans un dialogue permanent avec les élus des deux assemblées qui sont en charge de ces grands dossiers ; nous y sommes sensibles et nous vous en remercions.
Cela dit, c'est du ferroviaire que je souhaite vous parler en cet instant du débat.
La grève des conducteurs puis, en relais, celle des contrôleurs SNCF pénalisent lourdement des millions de personnes pour lesquelles le train est un outil quotidien indispensable à leur mobilité et à leur travail.
Pour la énième fois, ils subissent, et je ne suis pas certain que les sondages qui affichent une adhésion aux mouvements en cours soient l'exact reflet du vécu quotidien de bien des gens !
Il ne faudrait pas que de telles épreuves à répétition saccagent les liens privilégiés que l'histoire, la légende, l'héroïsme et la technique ont tissés entre les Français et leur rail.
C'est la raison pour laquelle - on peut rêver - je suggère que ce soit à l'intérieur même de l'entreprise, dans la concertation et le dialogue, que se définisse, en cas de grève, ce service de secours et d'assistance à ce que j'appelle les « naufragés des quais ».
Librement débattue, acceptée et appliquée, une telle mesure concilierait à la fois l'expression de la revendication et l'incontournable exigence du service public, dans le cadre de l'intérêt général, en ce domaine comme en d'autres. Une figure libre est en effet toujours moins contraignante qu'une figure imposée.
Au moment où des négociations s'engagent, puissent cette modeste suggestion et cet espoir avoir valeur de voeux et puissiez-vous, monsieur le ministre, en être le messager ! Lorsque, en 1996, j'ai eu l'honneur de rapporter devant notre assemblée le projet de réforme de la SNCF que nous imposait l'Europe, j'étais convaincu - et je le reste - que cette réforme, qui séparait par la création de RFF le réseau de son exploitation, donnait toutes ses chances au ferroviaire français.
Tous les ingrédients étaient en effet réunis pour permettre à la SNCF de s'insérer dans l'évolution du ferroviaire européen. Il s'agissait, en vérité, de la meilleure riposte pour faire face à la concurrence qui guette et aux tentations permanentes et perverses de déréglementation de Bruxelles, dérégulation dont on a bien vu ce qu'elle a imposé et coûté au transport aérien. N'oublions jamais que, déjà en 1991, Bruxelles avait adopté une directive autorisant la concurrence entre les entreprises ferroviaires européennes.
Cette directive est restée relativement inappliquée, mais c'est une intention qui en dit long. Tous les ingrédients étaient en effet réunis : une énorme partie de la dette SNCF - 134 milliards de francs - transférée à RFF, le statut du cheminot intact, tous les avantages heureusement sauvegardés, tous les acquis sociaux maintenus, les conditions de travail analysées de manière neutre par l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail, l'ANACT, élément de base peu connu mais nécessaire au dialogue au moment où s'engage la discussion sur les 35 heures.
A cela s'ajoutaient la perspective du redressement économique, la reconquête de la clientèle fret et voyageurs, tout le projet commercial du président Gallois et le respect de cette unicité à laquelle je tiens, à laquelle les cheminots tiennent tant. Un amendement qui m'avait été refusé à l'époque viendra, je l'espère, renforcer cette unicité lorsque vous aurez, comme vous avez, semble-t-il, l'intention de le faire, créé ce conseil supérieur du ferroviaire.
Le positif était donc au bout de la ligne : le déficit de cette année était ramené à 500 millions de francs, auquel il faut ajouter, hélas ! aujourd'hui, les 500 millions de francs que coûte la grève. Nous espérons que l'équilibre annoncé pour 1999, sera atteint et nous souhaitons que cette grève qui n'en finit pas de continuer ne compromettra pas plus gravement les finances de l'entreprise, dont nous souhaitons tous ardemment, où que nous siégions sur ces travées, le redressement.
Il semble, hélas ! qu'à cet ensemble ait manqué le troisième élément, à savoir l'adhésion du corps social à ce projet.
C'est dommage, car rien ne se fait sans l'adhésion des personnels, et c'est d'eux, de leur technicité, de leur reponsabilité, de leur volonté que dépend la crédibilité de la SNCF dans la recherche des partenariats européens, qui seuls peuvent la mettre à l'abri des menaces bruxelloises de dérégulation, de l'ouverture du réseau et de la concurrence.
Cette concurrence n'est pas un vain mot, lorsque l'on voit les autres pays de l'Europe sceller des alliances : les Belges et les Italiens ont créé une filiale commune pour leurs trains de marchandises ; les Suisses projettent de s'allier avec les Italiens et les Allemands ; les Allemands ont annoncé la fusion de leur fret avec les Néerlandais. Il ne faudrait pas que nous soyons, un jour, condamnés à regarder passer les trains des autres.
On peut se réjouir du fait que 1 890 millions de francs soient inscrits au chapitre « Subventions d'investissements en matière de transport ferroviaire et de transport combiné ». C'est un indispensable effort dans un marché du fret éminemment volatil, où il faut se dire sans arrêt que ce qui n'est pas capté par le rail peut être un retour vers la route. Ce sont alors des millions de francs perdus pour la SNCF !
Sans doute est-ce la raison pour laquelle il est désormais urgent de mettre en place ces points nodaux, sorte de hubs de regroupement et d'éclatement du fret, et de se dire sans arrêt que, paradoxalement, l'avenir de la route, c'est le rail - si le rail ne sait pas résister.
Une grande partie des équipements nouveaux et nécessaires sont désormais de la responsabilité de Réseau ferré de France. On note avec satisfaction que la dotation de 13 milliards de francs pour la gestion de la dette transférée est annoncée avec une reconduction sur trois ans.
C'est bien. C'est peut-être aussi indispensable, mais c'est peut-être insuffisant. C'est en effet de RFF que dépend, pour partie, une grande modernisation du réseau, et l'on peut se réjouir que 1 100 millions de francs soient, dans votre projet de budget, destinés aux études développement du réseau TGV Méditerranée, du TGV Est et du TGV Rhin-Rhône.
Je tiens d'ailleurs à indiquer, à ce point de mon propos, que j'approuve pleinement le plaidoyer pour le TGV Est que vient de nous faire M. Hoeffel et que nous présentera sans doute tout à l'heure M. Ostermann.
Je suis en effet de ceux qui pensent que les TGV sont et seront en France et en Europe des liens privilégiés et qu'ils seront techniquement beaucoup plus fédérateurs que les textes européens de Bruxelles.
Une telle politique ne doit cependant pas être conçue au détriment de la modernisation du réseau classique. Si 400 millions de francs - c'est peu - y sont consacrés cette année, sans doute faudra-t-il faire plus et adapter cette modernisation à l'arrivée des trains pendulaires, sur lesquels je me permets, monsieur le ministre, de vous interroger.
Où en sommes-nous, de ce point de vue ? Qu'en est-il de la modernisation de la ligne Paris-Vierzon-Châteauroux-Limoges-Brive ? Un agent de la SNCF a cru devoir affirmer, devant la chambre de commerce de l'Indre, que ce projet avait du « plomb dans l'aile »
Non seulement je regrette de tels propos, et l'interprétation qui en a été donnée, mais, comme les études sont en cours, je vous demande, monsieur le ministre, de préciser ce qu'il en est, de confirmer que le projet n'est nullement abandonné et que vous-même restez très attaché à la modernisation de ce réseau, élément essentiel d'une politique d'aménagement du territoire pour plusieurs régions du Centre, du Limousin et du Massif central.
S'agissant des péages que le propriétaire du réseau RFF demande à l'exploitant SNCF, ils doivent être, en ce qui concerne les lignes TGV, à la mesure de leur rentabilité. Ils doivent permettre à RFF de contribuer au financement des investissements nouveaux.
Par ailleurs, sur ces lignes, à la suite d'accords réciproques, d'autres trains du même type, venus d'Allemagne, de Grande-Bretagne ou d'ailleurs, peuvent circuler - c'est le cas de l'Eurostar et de l'ICE allemand - et il serait paradoxal que les droits de péage sur le réseau français soient inférieurs au péage sur leur propre territoire.
On en trouve un exemple flagrant avec Eurostar, dont les péages sur la partie française sont trois fois moins chers que les péages sur le réseau britannique, dont la qualité n'est pas, c'est le moins qu'on puisse dire, de manière diplomatique, exceptionnelle.
Il est par ailleurs exclu, à mon sens, comme le pensent certains, que l'on puisse modérer ou péréquer les péages TGV en augmentant les péages des autres lignes du réseau, notamment les TER. Ce serait une erreur et une injustice.
De toute façon, il faudra revoir à court terme, avant l'an 2000, le problème de la tarification. Cela se fera au terme des trois années d'exploitation dans les six régions expérimentales.
Aujourd'hui RFF reçoit 6 milliards de francs de la SNCF. Il faudra rapidement passer de 9 milliards de francs à 12 milliards de francs, si l'on veut que RFF puisse répondre aux objectifs des grandes infrastructures et aux investissements indispensables à la modernisation du réseau.
Après avoir franchi plus d'un siècle et demi, le ferroviaire est devenu un élément majeur de l'aménagement du territoire national et européen. Par sa spécificité, son histoire, le réseau français, s'il doit se fondre, par des partenariats, avec les autres réseaux riverains, ne saurait en aucun cas s'y confondre. Il lui faut gagner cette autre bataille du rail. Chacun de ses acteurs doit s'y sentir engagé, lucide et responsable. C'est, en fait, la seule manière de faire face à ce que Paul Valéry disait : « L'ère du fini commence. » (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le ministre, les crédits concernant les transports terrestres, les routes et la sécurité routière pour 1999, s'ils sont en cohérence avec les choix que vous avez opérés il y a dix-huit mois, ne constituent, bien évidemment, à nos yeux, qu'une première étape du changement attendu.
Aussi, le groupe communiste républicain et citoyen souscrit aux priorités fixées par ce budget, tout en souhaitant que l'effort soit maintenu et renforcé dans la future loi de finances.
Il est vrai que votre politique est soumise à des choix européens que ni vous ni moi n'avons désirés.
Dans ce cadre, les crédits relatifs aux transports terrestres, avec 45,182 milliards de francs, progressent seulement de 1 % par rapport à 1998.
La nouvelle hiérarchie en faveur des investissements en matière ferroviaire au sein du FITTVN - ils enregistrent une augmentation de 55 % depuis deux ans - et le plan triennal de 37 milliards de francs concernant l'allégement de la dette de RFF témoignent de la volonté du Gouvernement d'équilibrer et d'harmoniser notre politique des transports en faveur du ferroviaire. Pour autant, l'entretien et la réhabilitation du réseau routier, dont le financement progresse, pour 1999, de 88 millions de francs, ne sont pas remis en cause.
La priorité donnée au transport ferroviaire correspond aux aspirations de la société.
Monsieur le ministre, vous le savez, les cheminots sont, à l'heure actuelle, très mécontents. Ils apprécient que leur SNCF sorte de nombreuses années de déclin. L'augmentation du trafic voyageurs et du fret est importante. Mais ils regrettent que, tous les jours, des marchés soient refusés, faute de moyens, faute d'effectifs et faute de matériels tracteurs et tractés. Cela, les cheminots, qui aiment tant répondre aux missions de service public, ne peuvent l'admettre, comme ils ne peuvent admettre que soit remis en cause leur droit de grève sous couvert d'un service minimum, quand bien même ce serait le Président de la République qui le suggérerait.
Les derniers mouvements de cheminots, tant sur le plan national qu'au niveau européen, doivent vous aider, monsieur le ministre, à faire valoir une alternative au modèle libéral de la Commission de Bruxelles.
L'ampleur et le caractère historique de « l'eurogrève » du 23 novembre dernier montrent, s'il en était encore besoin, le refus, tant de la part des cheminots que des usagers, d'une déréglementation européenne des chemins de fer conçue en des temps révolus. Oui à la coopération, non à l'intégration !
Le seul exemple de l'échec de la privatisation du chemin de fer britannique renforce le choix que vous avez fait d'un service public fort, capable de promouvoir des rapports d'échange et de réciprocité avec des opérateurs étrangers, à l'instar, d'ailleurs, du corridor de fret Lyon-Anvers, bientôt prolongé jusqu'à l'Italie et l'Espagne.
Je sais, monsieur le ministre, que vous travaillez d'arrache-pied, dans le cadre des négociations communautaires, à une révision de la directive 91-440, et notamment de son article 10, qui ouvre le réseau ferroviaire à la concurrence.
La réunion des ministres des transports européens s'étant tenue la semaine dernière, pourriez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer où vous en êtes sur cette question ?
La décision récente de relever le niveau des péages versés à RFF n'est-elle pas une façon détournée de faire porter une partie de cette charge sur la SNCF au détriment des usagers et du personnel ?
Nous nous félicitons de voir encourager la modernisation et la rénovation des réseaux de lignes classiques délaissées ces dernières années au profit d'une stratégie du « tout-TGV ».
En effet, les lignes à grande vitesse ne peuvent être créatrices d'aménagement du territoire que si, par ailleurs, on développe un maillage suffisant de l'espace régional.
Enfin, je souhaiterais vous entendre, monsieur le ministre, sur la réalisation des efforts engagés depuis 1997 en direction du transport combiné et de la mise en oeuvre de plates-formes multimodales, tant il est vrai que ce procédé doit réconcilier efficacité économique, aménagement du territoire et respect de l'environnement.
Ne conviendrait-il pas, à cet égard, de revoir à la hausse le soutien de l'Etat aux transports publics, compte tenu du relèvement de la TIPP sur le gazole et du nécessaire renouvellement du parc d'autobus en faveur des véhicules propres ?
Enfin, je veux remarquer, monsieur le ministre, que les crédits de sécurité routière sont en augmentation de 4 %. C'est l'ensemble des postes de ce budget qui progresse avec, notamment, un développement des actions d'incitation ou des dépenses de fonctionnement de moyens d'exploitation et d'alerte et des dépenses d'information des jeunes.
La libéralisation du cabotage étant effective depuis le 1er juillet dernier, il y a urgence à tendre au niveau communautaire vers une harmonisation des règles sociales dans cette profession.
Après vous avoir demandé où en est le programme de suppression des passages à niveau lancé il y a un an, je voudrais dire le grand désarroi qui règne dans la batellerie artisanale où, les uns après les autres, les artisans sont obligés de déposer leur bilan.
Le groupe communiste républicain et citoyen approuve ce budget dans la mesure où il s'inscrit dans une perspective de réorientation profonde de la politique des transports dans notre pays sur la base de la complémentarité et de la coopération des modes de transports. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. Monsieur le ministre, le budget que vous nous proposez est incontestablement un budget volontariste en faveur du développement des transports collectifs. Il comporte notamment un accroissement significatif des moyens consacrés aux transports collectifs de province, puisque les autorisations de programmes, qui progressent de plus de 11 % par rapport à 1998, s'établissent à 694,5 millions de francs. Grâce à cette revalorisation, qui conforte celle que vous aviez accordée pour 1997, les crédits de paiement de 1997 à 1999 seront en augmentation de 40 %.
C'est donc bien la confirmation de l'effort souhaité par le gouvernement de Lionel Jospin et par vous-même en direction des transports urbains.
Les besoins de nos villes, de nos agglomérations sont importants, puisque les investissements prévus pour les seuls projets recensés en matière de transport en commun en site propre devraient atteindre, voire dépasser, le milliard de francs à la fin de l'année 1999, particulièrement avec les nouvelles opérations urbaines menées à Caen, à Valenciennes, à Rouen, et dans l'agglomération toulousaine avec le prolongement de la première ligne de métro et la mise en oeuvre de la seconde.
J'en profite pour rappeler que, pour ces vingt dernières années, les équipements collectifs en matière de transports en commun représentent une dépense d'un montant global cumulé de 65 milliards de francs, dont seulement 12 milliards de francs ont été à la charge de l'Etat.
La précision est d'importance quand on sait que, dans le même temps, 10 % de la population est venue vivre en ville, ou plutôt dans la périphérie des villes. En dehors de la région parisienne, ce sont 10 millions de personnes qui sont concernées et qui, tous les jours, doivent se déplacer pour le travail, l'école, les loisirs dans nos agglomérations.
Or nous constatons que, dans ces zones périurbaines, l'offre de transports collectifs est insuffisant. Des estimations nous indiquent qu'il faut investir plus de 80 milliards de francs pour rattraper le retard.
Il s'agit donc d'investissements particulièrement lourds pour les collectivités locales, qui y consentent malgré tout pour améliorer la circulation et la qualité de l'air dans nos villes.
C'est pourquoi on ne peut que se réjouir de la mise en place de la taxe sur le gazole, qui nous semble parfaitement justifiée sur le plan écologique, mais qui nous préoccupe pour l'incidence qu'elle ne manquera pas d'avoir sur les dépenses d'exploitation de nos différents réseaux.
En effet, pour la province seule, le surcoût de cette mesure est estimé à 45 millions de francs par an, soit une dépense supplémentaire, sur sept ans, supérieure à 600 millions de francs. Si rien ne change, ce surcoût sera entièrement supporté par les collectivités locales.
Le Gouvernement a accepté un dégrèvement partiel de la taxe intérieure sur les produits pétroliers sur le gazole pour les transporteurs routiers, les taxis et la navigation aérienne. En revanche, aucune compensation n'est prévue pour les collectivités locales.
Nous pensons, monsieur le ministre, qu'il faudrait prévoir, pour les autorités organisatrices - au moins pour celles qui font l'effort de s'équiper en véhicules propres - une compensation financière pour les aider à l'acquisition de véhicules moins polluants. Ce fonds pourrait d'ailleurs être alimenté par la taxation supplémentaire sur le gazole.
Nous y voyons là une logique complémentaire en faveur de l'écologie, qui encouragerait les collectivités locales à s'équiper de véhicules propres.
Bien sûr, monsieur le ministre, il s'agit d'une proposition, mais aussi et surtout de l'expression d'une attente des autorités organisatrices.
Cependant, nous avons pris bonne note de vos déclarations d'intention à votre arrivée au ministère, puisque vous avez annoncé que le développement des transports collectifs constituait une priorité. Ce budget le prouve, car les moyens supplémentaires que vous proposez permettront d'honorer les engagements de l'Etat à l'égard des collectivités locales.
C'est donc volontiers, monsieur le ministre, compte tenu de la priorité accordée par votre budget aux transports collectifs, qu'ils soient ferroviaires ou urbains, que le groupe socialiste l'adoptera. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Lambert.
M. Alain Lambert. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est sur le temps de parole de mon groupe que j'ai souhaité m'exprimer, afin de pouvoir le faire en mon nom personnel et non pas au nom de la commission des finances, en cet instant si bien représentée par nos deux éminents rapporteurs spéciaux, Auguste Cazalet et Gérard Miquel. Chacun ici a pu apprécier la qualité de leur rapport et de leur présentation.
Monsieur le ministre, à la même époque, l'année dernière, j'étais intervenu pour vous dire, avec franchise, comme on dit dans le langage diplomatique, ce que je pensais de la manière dont l'Etat gérait le secteur autoroutier concédé.
Mes critiques - vives, j'en conviens - étaient, à mes yeux, fondées. Mais j'avais insisté sur le fait qu'elles ne visaient pas un gouvernement plus qu'un autre puisque, depuis 1981, cinq alternances se sont produites.
Alors, ce soir, je m'appliquerai à me projeter au-delà de ces critiques en vous posant plusieurs questions destinées à vous permettre, par vos réponses, de nous éclairer sur vos intentions dans ce domaine et de nous éclairer sur les bienfaits de la politique que vous allez mener.
Afin de ne pas perdre le sens concret qui est celui de la Haute Assemblée, je vais illustrer mon propos d'un exemple, choisi parmi d'autres, celui de l'autoroute A 28, qui conduit de Calais à Bayonne et plus précisément de son tronçon Rouen-Alençon.
Je vous rappelle, mes chers collègues, pour que vous en ayez une idée, très brièvement le calendrier : cette autoroute est décidée lors d'un CIAT qui se tient en 1987 ; elle est inscrite au schéma directeur routier national en mars 1988, réaffirmée en 1992 ; elle est déclarée d'utilité publique par décret du 5 décembre 1994, dont l'échéance viendra le 5 décembre 1999 - il nous reste un an.
Onze ans se sont déjà écoulés, et aucun acte d'exécution tangible ne s'est encore produit.
Monsieur le ministre, ma première question consiste à vous demander de bien vouloir nous confirmer - je fonde beaucoup d'espoir dans votre réponse - du haut de cette tribune, avec la solennité requise devant la Haute Assemblée, que la publicité au niveau communautaire sera faite avant le 31 décembre prochain, c'est-à-dire dans quelques jours.
Ma deuxième question porte sur le calendrier prévisionnel possible des suites de l'opération qui doivent conduire jusqu'à la mise en service de l'infrastructure. Tant il est vrai, mes chers collègues, que nos compatriotes ne roulent pas sur les mises en publicité, ne roulent pas sur les appels d'offres, ne roulent pas sur les cartes, ils roulent sur des routes ; ce qu'ils attendent, c'est que les routes soient faites.
Compte tenu de la date de mise en publicité, monsieur le ministre, pensez-vous que le choix du candidat puisse être effectué dans le délai de six à sept mois, disons avant le 30 juin 1999 ?
Quel sera ensuite le calendrier des travaux ?
Quelle sera la date de mise en service ? C'est la réponse qu'attendent nos compatriotes qui veulent emprunter cette autoroute entre le nord de l'Europe et la péninsule ibérique.
Ma troisième question vise, monsieur le ministre, à vous demander de lever dès à présent toute ambiguïté sur le choix autoroutier concédé pour ce tronçon.
Soyons francs entre nous. Le retard important qui a déjà été pris pour la réalisation de cet équipement, les procédures longues et délicates - je pense en particulier aux déclarations d'utilité publique - ne laissent plus aucune place à l'ambiguïté, sauf à faire perdre confiance à ceux qui attendent avec grande impatience la mise en service de cette autoroute.
Les solutions qui ont été qualifiées d'alternatives ne sont pas viables, chacun le sait déjà ; alors, pourquoi continuer à les évoquer ? Elles brouillent la lecture que nos compatriotes peuvent avoir du calendrier de réalisation de cette infrastructure. Ces solutions alternatives seraient administrativement fragiles et, en tout cas, elles sont financièrement impossibles. De surcroît, elles ne sont politiquement demandées par aucun élu, de quelque sensibilité politique que ce soit. Je ne connais en effet aucun parlementaire, aucun élu territorial d'un niveau équivalent à celui de maire qui en fasse aujourd'hui la demande. S'il en était autrement, monsieur le ministre, faites la transparence et dites-nous de qui il s'agit.
J'ai eu la chance d'accueillir récemment les présidents de communautés urbaines, et parmi eux les Premiers ministres, MM. Mauroy, Fabius et Juppé, M. Delebarre, le maire du Mans que vous connaissez bien, M. Jean Delaneau, qui est président du conseil général d'Indre-et-Loire : tout le monde veut une autoroute concédée. Les solutions alternatives apparaissent sur le terrain au fond comme des prétextes, des tentatives dilatoires qui visent à retarder encore la mise en chantier de l'ouvrage.
Ma quatrième question s'adresse au Gouvernement ; je dis bien au Gouvernement, car je crains que vous ne soyez pas seul à décider de cette question et que votre collègue ministre de l'économie et des finances n'ait un rôle important à jouer dans ce domaine. Cette question vise à demander au Gouvernement de mettre en place au plus vite les outils de financement adaptés.
Je me réfère à l'excellent rapport de notre collègue M. Gérard Miquel sur le sujet. Nous avons besoin d'outils de financement adaptés pour notre secteur autoroutier et cela passe, vous le savez, par l'allongement de la durée des concessions et des financements.
S'agissant des concessions, la prolongation des contrats actuels est indispensable pour garantir l'équilibre du système, en tenant compte de la durée nécessaire à l'amortissement des ouvrages.
Les difficultés juridiques que cette prolongation soulève ne doivent pas vous conduire à la résignation ; ce qu'une loi - je pense en particulier à la loi Sapin - a édicté, une autre peut l'assouplir. Quant aux règles communautaires, il ne serait pas sage de s'en prévaloir pour leur faire dire ce qu'elles ne disent pas.
Ce que la Commission européenne reproche au Gouvernement français, vous le savez bien, monsieur le ministre, ce n'est pas de vouloir des durées de concession économiquement réalistes. Qui pourrait s'opposer à quelque chose d'économiquement réaliste ?
Ce que la Commission européenne reproche au Gouvernement, ce n'est pas de vouloir entretenir son réseau. C'est tellement de bon sens.
Ce que la Commission européenne reproche au Gouvernement, c'est d'utiliser le réseau autoroutier concédé pour effectuer des prélèvements fiscaux excessifs.
S'agissant de la durée des financements, le moment est venu de mettre en place des outils plus longs, enfin en rapport avec la durée de vie des autoroutes. Mes chers collègues, émettre des obligations de quinze ans, alors que les infrastructures ont une durée de vie de cinquante ans ou cent ans, n'a aucun sens, ...
M. Joseph Ostermann. Tout à fait !
M. Alain Lambert. ... sauf à vouloir condamner les opérateurs à amortir leurs investissements sur des durées trop brèves ou, comme cela s'est produit pour des sociétés dont l'Etat était l'unique actionnaire, à dégrader dramatiquement leurs comptes.
Cet aspect des outils de financement appliqué à l'A 28 me conduit à vous demander, monsieur le ministre - c'est important, parce que les choix que vous allez faire pour ce tronçon autoroutier induiront vos pratiques ultérieures - si le cahier des charges de l'appel d'offres proposera aux sociétés soumissionnaires de fournir elles-mêmes les conditions de l'équilibre financier de l'opération ou si vous fixerez la durée de la concession ainsi que les éléments financiers d'équilibre que cette durée entraînera. Envisagez-vous, dès à présent, pour le cas où un versement d'équilibre se révèlerait nécessaire, de le répartir sur la durée de l'emprunt souscrit par l'opérateur ?
Ces questions sont très importantes, et au travers des réponses que vous nous apporterez, monsieur le ministre, nous saurons dans quel état d'esprit vous entendez désormais que le réseau autoroutier concédé puisse vivre dans des conditions économiquement réalistes.
J'en viens à ma cinquième question, qui vise à vous demander, monsieur le ministre, si votre lecture des directives européennes est identique à celle du Sénat ?
Il n'est pas bon que le Gouvernement donne au Parlement le sentiment d'utiliser la réglementation européenne pour remettre en question le schéma directeur routier national.
La commission d'enquête présidée par Jean François-Poncet et dont le rapporteur était Gérard Larcher a démontré que la directive « marchés publics de travaux » ne remet pas en cause le financement des constructions nouvelles par les recettes des tronçons déjà amortis.
Rien ne démontre en effet que la technique dite de « l'adossement » soit interdite par cette directive. Celle-ci exige seulement, et c'est parfaitement compréhensible, que les aides d'Etat aux attributaires de concessions soient transparentes.
Ces aides peuvent prendre la forme de subventions directes ou celle d'allongement de concessions sur le réseau exploité par ailleurs. Il n'y a pas de concurrence déloyale dès lors que des règles claires sont établies.
Si vous partagez cette analyse, monsieur le ministre - et je serai très attentif à votre réponse - vous devez affirmer et défendre cette interprétation à Bruxelles, sans laisser, par absence de combat, condamner notre système ; le Sénat vous soutiendra, pour peu que vous l'informiez de vos démarches.
Vous le savez, et je le répète une dernière fois, monsieur le ministre, ce que la Commission européenne reproche au gouvernement français - à celui dont vous faites partie, mais aussi à ceux qui l'ont précédé - ce n'est pas le système de l'adossement, ce sont les prélèvements, trop élevés, opérés par l'Etat sur le secteur. Ces prélèvements sont excessifs et aveugles. Ils sont, eux, contraires à la directive sur les péages qui n'admet qu'une logique de réseau, une logique, mes chers amis, que vous ne pouvez pas combattre, car c'est celle du bon sens ; la ressource tirée du péage doit exclusivement revenir à l'exploitant du réseau pour le construire, l'entretenir et le faire fonctionner.
La discussion budgétaire, monsieur le ministre, doit être l'occasion solennelle de confirmer, le cas échéant, notre identité de vue sur cette lecture de la réglementation communautaire, afin que celle-ci ne puisse être l'objet d'un malentendu entre nous.
J'en viens, après ces questions que je me suis efforcé de rendre aussi précises que possible, à ma conclusion : monsieur le ministre, je veux vous dire que le rôle que vous avez à jouer et qui vous a été confié par le Premier ministre est essentiel pour la compétitivité de la France, à la veille de l'euro et donc à la veille d'une accélération prodigieuse des échanges intra-européens.
Nous, provinciaux, nous savons que l'accès à l'autoroute est un élément déterminant du développement économique, un élément déterminant de l'aménagement du territoire, en matière de création d'emplois.
Une ambition forte, un système de financement habilement conçu permettront à la France, dans des délais très courts, de se mettre au niveau de ses partenaires et concurrents européens et de donner ainsi leurs chances à tous nos territoires.
Il dépend de vous, monsieur le ministre, que notre pays devienne ou non « la plaque tournante » des échanges entre l'Europe du Nord et l'arc méditerranéen.
J'espère donc, monsieur le ministre, que vos réponses seront fortes, claires et précises, à la hauteur de l'attente de la France et des Français. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à m'associer aux félicitations qui viennent d'être adressées à nos rapporteurs et à souligner la pertinence de leur argumentation.
Le budget des transports terrestres dont nous débattons aujourd'hui est pour moi, monsieur le ministre, l'occasion d'attirer votre attention sur deux aspects majeurs de votre politique qui touchent particulièrement l'élu alsacien que je suis : hélas ! vous allez être obligé de subir encore un peu de TGV Est européen !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Vous avez eu raison de dire européen.
M. Joseph Ostermann. J'évoquerai ensuite la libéralisation du cabotage en vigueur depuis juillet dernier.
Tout d'abord, monsieur le ministre, j'aimerais de tout coeur, ne plus avoir à vous parler du TGV Est européen, sujet qui est devenu un grand classique et que, comme l'ensemble de mes collègues du grand Est, je souhaiterais voir rouler.
M. Daniel Hoeffel a évoqué des arguments forts. Permettez-moi d'en ajouter quelques-uns.
Je reconnais que vous ne restez pas inactifs sur ce dossier puisque vous avez d'ores et déjà accru la participation de l'Etat au financement de la première phase.
Malheureusement, malgré les engagements pris et les assurances données lors du débat sur la question orale de M. Poncelet en avril dernier, plusieurs points demeurent en suspens, sur lesquels je souhaiterais obtenir des éclaircissements de votre part.
Si vous pouviez nous les donner aujourd'hui, cela nous arrangerait bien, car une bonne nouvelle avant Noël est toujours bonne à prendre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. On n'est pas à Noël !
M. Joseph Ostermann. Je parlerai, premièrement, de l'épineuse question de la participation européenne.
J'étais tenté de ne point voter la participation de notre pays au fonctionnement des institutions européennes. Déduire 2 milliards de francs est sans doute plus facile que de les récupérer par la suite.
Dans le cadre du projet de règlement financier 2000-2004, l'objectif est par conséquent d'aboutir à une subvention de 2 milliards de francs conformément au maximum autorisé par les règlements communautaires.
Je vous fais grâce des détails, mais pourriez-vous nous indiquer l'état d'avancement des négociations que vous menez avec M. Kinnock ? Depuis le mois d'avril, elles ont certainement dû progresser.
Le deuxième point d'interrogation sur lequel je souhaiterais obtenir des éclaircissements a trait à la participation du Grand-Duché de Luxembourg.
Je souhaiterais, là encore, connaître les conclusions du groupe de travail bilatéral mis en place pour préciser les engagements réciproques de nos deux pays.
La troisième question en suspens concerne la participation de la région d'Ile-de-France. On attend d'elle un financement de 500 millions de francs mais, à ma connaissance, jusqu'à présent, elle ne s'est engagée sur aucun montant.
Vous attendiez, pour la solliciter, les résultats des élections régionales. C'est aujourd'hui chose faite.
Par conséquent, pouvez-vous nous indiquer l'état d'avancement de ce dossier ?
Enfin, lors du débat sur une question orale, vous nous avez annoncé la mise en place d'une mission spécifique chargée de piloter l'opération financière de la première phase et d'en assurer le bouclage financier. Son objectif étant, je vous cite : « de déterminer, d'ici à la fin de 1998, les modalités précises du financement permettant de signer une convention finale de réalisation des travaux ».
La fin de l'année étant dans trois semaines, pourriez-vous nous apporter des éclaicissements sur les résultats de ces travaux ?
J'avoue être particulièrement inquiet sur ce point, après les propos tenus par votre collègue M. Christian Sautter, à l'occasion de l'examen en première partie de l'amendement, peut-être maladroit, d'Hubert Haenel. Nous n'allons tout de même pas solder les industries alsaciennes pour construire le TGV ! M. Sautter a souligné que l'unique but de cette mission était de convaincre les collectivités locales d'accroître leur participation, l'Etat n'ayant, pour sa part, nullement l'intention d'accroître la sienne pour faciliter le bouclage du projet. Le propos est invraisemblable !
Je crains, une fois encore, que le dossier n'avance nullement. Pour l'instant, les collectivités locales alsaciennes ne disposent d'aucune garantie quant à la poursuite du projet de la plaine d'Alsace, dans la mesure où, la déclaration d'utilité publique n'est pas prononcée pour l'achat de ces terrains.
Tant que cela ne sera pas prévu, comment demander aux collectivités alsaciennes un engagement financier ?
Des interventions financières supplémentaires semblent souhaitées. J'ai une solution à proposer : outre une somme de 1,5 milliard de francs, les collectivités alsaciennes paient près de 100 millions de francs au titre de la solidarité inter-départementale et inter-régionale ; ne serait-il pas envisageable de les exonérer de cette participation ? Cela permettrait de dégager une marge financière supplémentaire, Qu'en pensez-vous, monsieur le ministre ?
Le Gouvernement a-t-il une véritable ambition ferroviaire dans l'est de l'Alsace ? Faut-il vraiment qu'en Alsace, et ce serait vraiment une première, on s'inspire de l'action menée par les lycéens qui, eux, ont su dégager des produits nouveaux ?
Le second aspect de votre politique, qui touche particulièrement les régions frontalières, réside dans les conséquences de la libéralisation du cabotage, ainsi que dans l'harmonisation européenne des législations nationales sur le transfert qui l'accompagne et de l'application du contrat de progrès.
Le transport routier est un secteur économique dynamique de notre économie, dynamisme que cette libéralisation ne doit pas freiner.
Ainsi, il est tout d'abord fortement créateur d'emplois puisque les effectifs salariés du transport ont globalement augmenté en 1996 de 2 % pour atteindre 808 500 personnes.
Le transport routier est, en outre, profondément ancré dans le tissu économique local : 48 % des tonnages acheminés par la route sont transportés à moins de 50 kilomètres. Le transport routier est donc majoritairement une activité de proximité bien répartie sur le territoire.
Il convient, par conséquent, de veiller à ce que cette activité importante, déjà bouleversée par le contrat de progrès et l'adoption des 35 heures, ne paie pas le prix fort de la libéralisation du cabotage du fait d'une harmonisation européenne mal négociée.
Je prendrai quelques exemples significatifs à l'appui de mon propos.
En matière de temps de travail, tout d'abord, je considère que le problème principal reste autant l'harmonisation de la durée du travail que l'harmonisation du renforcement des contrôles.
Or je viens d'apprendre que la nouvelle génération de tachygraphes électroniques, dits « boîtes noires », présentée comme étant infalsifiable, ne serait obligatoire qu'à compter du 1er juillet 2000 seulement.
Par ailleurs, il convient de veiller non seulement à renforcer et à harmoniser les contrôles sur le plan européen mais, également, à harmoniser les sanctions en cas de dépassement des durées de conduite et de non-respect du repos journalier.
Là encore, les disparités sont particulièrement inquiétantes pour les entreprises de mon département, ainsi que pour celles des autres départements français mais, surtout, pour celles des départements proches de l'Allemagne.
Alors qu'en France le chef d'entreprise assume seul la responsabilité en cas d'infraction, en Allemagne, celle-ci est partagée entre le chauffeur et le chef d'entreprise. Les dépassements n'étant pas toujours imposés par l'entreprise, cette législation apparaît plus favorable.
L'harmonisation européenne est, enfin, urgente en matière de normes dimensionnelles. La France risque encore d'être, sur ce point, pénalisée.
Ainsi, les remorques immatriculées aux Pays-Bas sont carrossées à 16,5 mètres contre 15,4 mètres pour les françaises, ce qui leur permet de charger trois palettes supplémentaires.
Autre exemple : les bus allemands peuvent être longs de 14 mètres contre 12 mètres pour les français. Les premiers peuvent ainsi transporter 15 à 20 personnes de plus.
Les distorsions de concurrence des deux côtés du Rhin sont donc flagrantes et conduisent de plus en plus d'entreprises françaises installées en zone frontalière à envisager la possibilité de délocaliser leur activité, soit en Allemagne, soit au Luxembourg.
Au vu de ces perspectives un peu négatives, pouvez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer la position que vous entendez défendre face à nos partenaires européens sur chacun de ces sujets et nous informer de l'état d'avancement des négociations ?
Je vous en remercie par avance. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. A la demande de M. le ministre, nous allons maintenant suspendre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures, est reprise à vingt-trois heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi concernant les transports terrestres, les routes et la sécurité routière.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne détaillerai pas l'ensemble des budgets des transports terrestres, des routes et de la sécurité routière. Vos rapporteurs l'ont fait en y mettant toute leur conviction et leur talent ; je les en remercie. Je vais m'efforcer de répondre de la manière la plus exhaustive possible aux questions qui m'ont été posées.
Beaucoup de points de vue ont été exprimés ; ils étaient parfois contradictoires. Mais n'est-ce pas là la richesse du débat ? Vos réflexions et vos propositions témoignent en tout cas de l'intérêt que vous portez aux questions de transport et de déplacement.
Le projet de budget pour 1999 traduit les priorités qui ont été affirmées par le Gouvernement au cours des mois écoulés, dans la continuité des inflexions qui avaient déjà été apportées avec le budget de 1998.
Il donne un sens et un contenu à l'intermodalité, aux décisions en faveur du transport ferroviaire et des transports collectifs.
Cette continuité dans les priorités du Gouvernement se traduit nécessairement dans les arbitrages. A la différence de certains, je n'ai pas fait et ne ferai pas d'effets d'annonce. Il y a des secteurs prioritaires dont les crédits augmentent et il y en a d'autres qui subissent, c'est vrai, certaines réductions, l'équipement bénéficiant d'une enveloppe quasi constante, comme je l'ai fait remarquer tout à l'heure.
L'importance de l'investissement pour ce ministère me conduit à évoquer dès maintenant un sujet qui, comme l'ont rappelé MM. Gérard Miquel et François Gerbaud, peut susciter certaines interrogations. Il s'agit de la place des comptes d'affectation spéciale qui complètent les ressources budgétaires proprement dites par des ressources affectées.
Le Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, le FITTVN, et le Fonds pour l'aménagement de la région d'Ile-de-France, le FARIF, représentent pour l'Etat près de 5,5 milliards de francs de crédits d'investissement.
Cette année encore, comme l'année dernière, m'a été adressé, notamment par MM. les rapporteurs, le reproche de la « débudgétisation », et je ne veux pas le balayer d'un revers de la main. Il est vrai que les comptes d'affectation spéciale permettent de compenser une certaine perte de substance budgétaire. Mais il est non moins vrai que, si ces comptes n'avaient pas été créés et développés au cours des années quatre-vingt-dix, les dépenses en capital du ministère de l'équipement, des transports et du logement se seraient effondrées.
Ainsi, dans le domaine des transports, les dépenses en capital financées sur le budget général réprésentaient 7,2 milliards de francs de crédits de paiement en 1988. Or c'est exactement la même somme qui est prévue pour 1999. Si l'on tient compte de l'effet de l'inflation, même si celle-ci s'est beaucoup réduite en douze ans, c'est bien d'une diminution sévère en francs constants qu'il s'agit. La part des dépenses en capital dans le total du budget est ainsi passée de 6,6 % en 1988 à 5 % en 1999.
En revanche, si l'on prend en compte l'apport des comptes d'affectation spéciale - un peu plus de 4,6 milliards de francs actuellement sur les seules dépenses de transport - l'évolution redevient favorable et la part des dépenses en capital passe alors à 8,4 % en 1999.
On perçoit ainsi tout l'intérêt qu'il faut porter à ces ressources affectées, qui préservent notre capacité d'intervention.
Et il ne s'agit pas d'une astuce, car les comptes d'affectation spéciale font partie intégrante du budget de l'Etat. Le Conseil constitutionnel a eu, à plusieurs reprises, l'occasion de le rappeler.
J'ajoute qu'il s'agit d'un outil budgétaire qui peut aider à atteindre l'objectif de l'intermodalité, auquel beaucoup d'entre vous sont attachés. Il permet de régler le « curseur » plus facilement qu'en conférence budgétaire, pour donner, par exemple, la priorité au transport ferroviaire et au transport combiné.
Ainsi, sur un volume d'un peu plus de 3,9 milliards de francs en 1999, la part du secteur ferroviaire dans le total du FITTVN, soit 1 890 millions de francs, passera de 42 % en 1998 à plus de 48 % en 1999.
Enfin, le comité de gestion du FITTVN, dont M. Marini, rapporteur général, et M. François-Poncet, président de la commission des affaires économiques, sont d'ailleurs membres, permet aux parlementaires d'être associés aux principales orientations.
Je vous rappelle, monsieur Gerbaud, que, le compte d'affectation spéciale faisant partie du budget de l'Etat, son contrôle est normalement assuré dans ce cadre.
Je rappelle aussi que, suivant le souhait du Sénat, j'ai personnellement demandé que le comité de gestion se réunisse plus fréquemment et devienne un lieu de plus grande concertation.
Monsieur Miquel, vous craignez que la taxe d'aménagement du territoire, de quatre centimes par kilomètre, qu'on appelle aussi la « taxe Pasqua », perçue sur les péages autoroutiers au profit du FITTVN, n'ait des effets négatifs sur l'usage des autoroutes et donc sur la sécurité routière dans la mesure où, comme vous l'avez rappelé, la sécurité est en général mieux garantie sur les autoroutes que sur les autres routes.
Je peux vous rassurer : l'instauration, puis le doublement de la taxe Pasqua se sont certes traduits par des hausses des péages, mais celles-ci ont été étalées sur quatre ans. Cela ne me semble donc pas de nature à dissuader les usagers d'emprunter l'autoroute.
Ce qui les dissuade, c'est plutôt l'existence d'une route bien aménagée ou à deux fois deux voies desservant le même itinéraire et parallèle à l'autoroute.
S'agissant maintenant du FARIF, nous avons eu cette année à résoudre une difficulté particulière du fait du transfert à la région d'Ile-de-France d'une partie des ressources de ce fonds. Ce transfert était programmé, mais il n'en demeure pas moins qu'il entraînait, pour l'Etat, une réduction de ses moyens d'intervention.
Le Gouvernement a donc décidé de proposer de compenser les pertes de recettes pour l'Etat de manière à préserver durablement sa capacité d'intervention. Pour cela, il a été décidé d'accroître de 10 % en 1999 le tarif de la taxe sur les bureaux et d'en étendre l'assiette à certains locaux commerciaux et de stockage.
Il est en effet logique, me semble-t-il, de demander les ressources nouvelles nécessaires aux contribuables franciliens ; cela correspond à une demande qui m'a souvent d'ailleurs été faite en province.
Toutefois, ce n'est pas la seule raison qui m'a incité à faire cette proposition. Il y a aussi le fait que les infrastructures routières et ferroviaires, les transports collectifs qui existent en Ile-de-France constituent indiscutablement des atouts pour différentes activités économiques, y compris le commerce et le stockage, qui sont implantées dans cette région. Dès lors, il est légitime de les solliciter davantage.
Comme vous le savez, ce dispositif a suscité un certain nombre de critiques. Je ne peux donc rester sans réagir, même s'il y a quelque contradiction à vouloir à la fois que l'Etat finance des routes, des transports collectifs et des lignes à grande vitesse et, en même temps, qu'il réduise les moyens qui lui permettent de réaliser ces investissements. Il faut avoir un discours politique cohérent !
De la même façon, je ne peux m'empêcher de relever une certaine contradiction dans la proposition souvent réitérée - en particulier par M. Cazalet - de réduire les dépenses de fonctionnement au profit de l'investissement ; à moins que l'on ne se résigne à laisser se dégrader les infrastructures existantes et la sécurité de leur utilisation, mais je ne pense pas que ce soit votre propos, monsieur le rapporteur spécial. En fait, les investissements suscitent mécaniquement de nouveaux besoins d'entretien et donc une augmentation des dépenses de fonctionnement.
Comme Christian Sautter l'a d'ailleurs précisé à l'Assemblée nationale, nous améliorerons le dispositif du FARIF en nouvelle lecture. Je puis vous dire que nous allégerons la taxation pesant sur les locaux commerciaux et de stockage qui avait été envisagée, tout en confirmant le principe de cette extension d'assiette.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le budget des transports terrestres est le plus gros budget. Il retrace en particulier les interventions en faveur des entreprises publiques de transport - SNCF, RFF, Syndicat des transports parisiens - certaines mesures sociales en faveur des transports routiers et les aides aux investissements de transport collectif. Il s'élève, en moyens d'engagement ou de paiement, à plus de 60 milliards de francs.
Vous le savez, je suis très attaché au développement du service public du transport ferroviaire.
Le transport ferroviaire présente de multiples atouts en termes de sécurité et de respect de l'environnement. Je suis convaincu qu'il faut assurer les conditions de son développement et de son renouveau. J'ai cru comprendre que cette conviction était partagée par nombre d'entre vous.
Pour ce qui concerne les infrastructures ferroviaires, le Gouvernement a fixé de nouvelles orientations pour assurer la poursuite maîtrisée du programme de nouvelles lignes à grande vitesse et, en même temps, la modernisation du réseau de lignes classiques, dans une optique d'aménagement du territoire, au travers des contrats de plan, ainsi que plusieurs orateurs l'ont d'ailleurs relevé. Il me paraît, en effet, important d'engager une politique plus ample que celle qui ne consisterait qu'à réaliser des lignes à grande vitesse.
Dans cette perspective, il a été décidé, le 4 février dernier, d'augmenter fortement la participation de l'Etat au financement des infrastructures ferroviaires. C'est ainsi qu'il est prévu de faire passer de 1 635 millions de francs en 1998 à 1 890 millions de francs en 1999 - soit une augmentation de plus de 15 % - les crédits du FITTVN aux investissements en matière de transport ferroviaire et de transports combinés.
Sur cette enveloppe, 400 millions de francs devraient être attribués au réseau classique en 1999, ce qui constitue une étape vers l'objectif de plus de 500 millions de francs annoncés pour le prochain contrat de Plan.
Un des intervenants a souligné que cette somme était peu élevée. Je tiens à lui faire observer qu'elle était de 270 millions de francs lorsque j'ai pris mes fonctions. Elle n'est donc peut-être pas encore suffisamment élevée, mais elle a enregistré un quasi-doublement.
S'agissant du TGV Méditerranée, les travaux seront poursuivis au rythme nécessaire à sa mise en service en 2001 sur Marseille et Nîmes.
MM. Hoeffel et Ostermann m'ont interrogé sur la réalisation du TGV Est européen. Monsieur Hoeffel - permettez-moi d'insister sur ce point - n'oublions jamais de dire « TGV Est européen ». Au départ, vous l'aviez omis. En effet, il faut reconnaître sa véritable dimension européenne à cette ligne de TGV.
Je ne partage pas votre inquiétude, pour ne pas dire votre scepticisme, monsieur Hoeffel. Le Gouvernement a pris la décision, le 4 février dernier, de mettre en chantier ce TGV, parce qu'il croit à l'utilité de ce projet. Il a également pris la décision de doubler la subvention de l'Etat. Vous le voyez, je suis modeste, car je pourrais dire que la participation de l'Etat a plus que doublé, puisqu'elle est passée de 3,7 milliards de francs à 8 milliards de francs.
Les décisions qui ont été prises ne permettront pas, dites-vous, de mener à bien la réalisation de ce TGV. Mais celles qui l'avaient été auparavant ne le permettaient certainement pas.
Puisque vous voulez des réponses précises, je vous annonce que j'attends, d'ici à la fin de l'année, des propositions concernant la convention de financement. Le calendrier est et sera respecté, monsieur Ostermann.
Ce projet figure parmi les quatorze projets qui ont été reconnus prioritaires dans le domaine des transports et qui bénéficient, à ce titre, de subventions européennes.
Je me bats afin que la part des subventions européennes soit accrue pour la période 2000-2004.
Je puis vous dire que les études d'avant-projet détaillé, APD, vont démarrer. Le protocole de réalisation et de financement, qui a été signé, le 24 février dernier, par Réseau ferré de France, la SNCF et les collectivités locales, concerne l'ensemble du tracé déclaré d'utilité publique.
La détermination des emprises concernées par le projet de TGV ne pourra intervenir qu'à l'issue de l'APD, c'est-à-dire à l'automne 2000. Ce n'est donc qu'à partir de cette échéance qu'il sera possible d'envisager un projet de remembrement définitif.
Quant aux acquisitions de terrains, je vous le confirme, monsieur Hoeffel, elles auront lieu sur l'emprise de la première phrase et sur le reste de l'emprise, sur mise en demeure ou en raison d'opportunité.
Vous m'avez également interrogé, monsieur Hoeffel, sur le pont de chemin de fer entre Strasbourg et Kehl. Vous savez que sa modernisation est comprise dans la première étape du projet de TGV Est européen, avec la construction d'un deuxième tablier où il sera possible de circuler à 160 kilomètres à l'heure.
Des contacts ont été pris avec le ministère des transports allemand en vue de l'établissement d'une convention, qui prendra la forme d'un traité franco-allemand ratifié par une loi, sur les études à réaliser et le financement.
Monsieur Berchet, vous m'avez interrogé sur l'état d'avancement du TGV Tours-Bordeaux et du TGV Montpellier-Barcelone.
Les études préliminaires du TGV Aquitaine devant aboutir au choix d'un fuseau sont en cours. Les études proprement dites se sont déroulées jusqu'à l'automne 1998. Sur la base de ces études, une consultation des collectivités locales, des acteurs socio-économiques et des associations a été lancée en octobre 1998 et se poursuivra jusqu'à la fin de l'année.
A l'issue de la consultation, le préfet coordonnateur me transmettra le bilan de la consultation et son avis sur les choix à effectuer, notamment en matière de phasage.
Pour la partie internationale du TGV franco-espagnol entre Perpignan et Figueras, les études préalables à l'enquête publique sont en voie d'achèvement. Mon homologue espagnol et moi-même avons rappelé publiquement, lors du sommet de La Rochelle, notre attachement au projet et notre volonté de tenir les délais. Nos propos ont d'ailleurs été repris par le chef du Gouvernement espagnol et par le Premier ministre, Lionel Jospin.
La commission intergouvernementale franco-espagnole est désormais constituée et va se réunir pour la première fois la semaine prochaine.
Pour la partie française, à savoir Nîmes-Perpignan, il a été demandé à RFF de présenter ses propositions dans les meilleurs délais. Celles-ci devraient notamment porter sur l'amélioration des capacités, par la réalisation de contournements au droit de Nîmes et de Montpellier.
L'un de vos rapporteurs a soulevé la question des relations transeuropéennes. Nous étudions actuellement, avec nos amis suisses, la possibilité de réalisations importantes. Il s'agit des lignes Paris-Genève via Bourg-en-Bresse, de Paris-Lausanne via Dôle, mais aussi de Paris-Bâle.
Vous concevez les perspectives que ces trois axes peuvent nous ouvrir, surtout à la suite des choix que vient de faire par référendum le peuple suisse !
Monsieur Berchet, vous avez également évoqué la question de la ligne Paris-Bâle. Conscient de l'intérêt de cette ligne pour l'aménagement et le développement du territoire, il m'est apparu nécessaire d'entreprendre un programme d'amélioration des services et des matériels en circulation.
Cette amélioration est engagée depuis septembre 1997 et sera poursuivie. Un matériel « Corail rénové » circule désormais sur la ligne. De plus, la mise en service de nouveaux matériels TER est en cours d'examen entre la région Champagne-Ardenne et la SNCF.
L'amélioration de la ligne réside non pas obligatoirement dans une électrification, très coûteuse dans le cas de la ligne Paris-Bâle, mais plutôt dans des améliorations de services, telles que la régularité, la fréquence et les matériels qui viennent d'être évoqués.
Concernant la ligne Bourg-en-Bresse-Genève, j'ai demandé à RFF et à la SNCF d'étudier la réalisation d'une desserte TGV entre Paris et Genève en rouvrant la ligne à voie unique entre Bourg-en-Bresse et Genève. Pourquoi vous dis-je cela ? Cette ligne est actuellement fermée. Ainsi, si j'avais écouté ceux qui me demandaient de vendre une partie du patrimoine inutilisé de l'entreprise, je n'aurais pas pu proposer la réouverture de cette ligne-là. Cette option très pertinente intéresse les autorités fédérales et cantonales suisses qui se sont déclarées prêtes à participer au financement.
Monsieur Gerbaud, vous m'avez interrogé sur le projet de modernisation de la ligne Paris-Orléans-Vierzon-Limoges-Brive-Toulouse. Ce projet sera bientôt examiné lors des discussions préparatoires au contrat de plan Etat-régions, ce qui permettrait de mobiliser les crédits d'une première tranche de travaux, que j'avais annoncée en février 1998, à hauteur de 200 millions de francs.
Monsieur Berchet, j'ai bien noté l'intérêt que vous portiez au projet de transport combiné à Chalindrey, qui fait actuellement l'objet d'études pour apprécier le potentiel d'activité.
Quant au SERNAM, un plan de restructuration a été mis en place afin de mieux satisfaire les attentes de ses clients et d'adapter son outil de production.
Les années 1998 et 1999 doivent être considérées comme des années de mobilisation et de transition, permettant d'examiner les différentes orientations possibles pour l'avenir.
Vous le savez, j'ai souhaité, après le désendettement supplémentaire de la SNCF, renforcer l'efficacité, l'unicité et la pérennité du service public ferroviaire.
Trois objectifs principaux ont été fixés. Le premier vise, dans un premier temps, à la stabilisation de la situation financière de RFF parce que nous étions repartis dans une spirale d'endettement, voire de surendettement, il fallait donc enrayer cette spirale.
Le deuxième objectif concerne le renforcement de l'unicité du service public ferroviaire, qui risquait d'être mis en cause, compte tenu des pressions exercées à l'échelon européen.
Enfin, le troisième objectif tend à renouer avec une politique d'emploi plus dynamique en restaurant, notamment, le dialogue social. Tels sont les trois volets de la réforme que je me suis fixés.
Les deux premiers objectifs sont bien engagés. Le troisième pose encore, comme vous le savez, de nombreuses difficultés.
Je considère que la stabilisation de la situation financière de RFF, qui n'était pas assurée lorsque nous sommes arrivés au Gouvernement, est indispensable pour la pérennité du système ferroviaire. Le Gouvernement a donc décidé de poursuivre et d'amplifier les efforts entrepris en ce sens en 1997 et en 1998, en consacrant à la stabilisation de la dette de RFF 12,5 milliards de francs en 1999, et non 13 milliards de francs compte tenu des problèmes de péage, puis 12 milliards de francs en 2000 et en 2001, soit 36,5 milliards de francs sur trois ans. Nous sommes loin des 8 milliards de francs que nous avions trouvés en 1997. Il s'agit donc d'un changement par rapport à la situation antérieure.
Vous avez regretté, monsieur Cazalet, que ces efforts suffisent à peine à régler les problèmes financiers récurrents et le passif, au détriment des investissements de développement. Sachez bien que je le regrette également, mais il s'agit de la situation que j'ai trouvée à mon arrivée. Je suis donc dans l'obligation d'assurer le financement de ce qui n'a pas été financé par mes prédécesseurs.
Pour renforcer l'unicité du système public ferroviaire, j'ai proposé la création d'un conseil supérieur du service public ferroviaire. Ce conseil ne jouera pas seulement le rôle d'un observatoire comme certains l'ont dit. Il sera notamment chargé de veiller à l'évolution équilibrée du secteur, au respect des missions de service public de la SNCF et de RFF et à la cohérence de la mise en oeuvre par ces deux établissements des orientations fixées par le Gouvernement et par la nation.
Ce conseil sera également chargé d'effectuer une évaluation de la réforme à l'issue d'une période de trois ans.
Le projet de décret sera très prochainement transmis au Conseil d'Etat afin que ce conseil puisse être opérationnel dès 1999 et si nos propositions sont acceptées, des représentants du Sénat et de l'Assemblée nationale siégeront en son sein.
Le troisième volet est le plus difficile à faire avancer. Il s'agit du dialogue social au sein de l'entreprise. Le développement du transport ferroviaire ne se fera pas sans la mobilisation des hommes et des femmes de la SNCF, dont dépendent les progrès nécessaires en matière d'efficacité économique et sociale. L'infléchissement engagé depuis 1997 en matière d'évolution des effectifs, ainsi que les garanties que j'ai données sur le statut des cheminots vont dans le sens d'une évolution positive du dialogue social.
Les voies du dialogue social et de la négociation ne sont pas fermées. C'est cette voie que le Gouvernement a choisie. Il est clair qu'on ne touchera pas au droit de grève. Toute tentative dans cette direction est d'ailleurs condamnée à l'échec.
Plusieurs d'entre vous, M. Lefebvre notamment, ont soulevé cette question. Je n'ai pas envie de la traiter sur un ton polémique. D'ailleurs, je constate que le Président de la République et le Gouvernement disent vouloir défendre le droit de grève. Ensuite, est évoquée la prévention nécessaire des conflits sociaux. Je rappelle que, à de nombreuses occasions, ma ligne de conduite a consisté à privilégier le dialogue social au conflit social. Sauf à interdire le droit de grève à certaines heures de la journée, je ne vois vraiment pas de quoi on parle lorsque l'on propose un service mininum dans les transports. Cela reviendrait, en fait, à une interdiction. M. Gallois, président de la SNCF, affirmait, voilà quelque temps, que ce n'était pas adapté.
Il n'est d'ailleurs pas le seul à le penser. En effet, quand la majorité actuelle du Sénat était majoritaire dans le pays et notamment à l'Assemblée nationale où elle détenait une majorité écrasante, et alors que nous avons connu l'une des plus grandes grèves de tous les temps à la SNCF, elle n'a pas mis en place le service minimum. Il doit y avoir quelque raison. En tout cas ce n'est pas notre démarche. Mais je vous l'ai dit, je ne veux pas polémiquer.
Le dialogue social doit l'emporter sur le conflit. S'agissant du développement du rail, des ruptures réelles sont intervenues par rapport aux situations passées. Depuis 1997, il existe une volonté politique de développer le transport ferroviaire.
Aussi, je vous le dis : je n'hésite pas un seul instant, comme je l'ai fait lors de tous les conflits, y compris le conflit des routiers ou le conflit d'Air France, à en appeller à la responsabilité de chacune et de chacun.
Je sais ce que coûtent les conflis actuels aux usagers et à l'entreprise. Je sais ce que la grève coûte aux cheminots, d'abord sur le plan financier, mais aussi parce que ceux qui ne rêvent que de libéralisme et de réduction du secteur public y puisent beaucoup d'arguments et de force. Nous devons, au contraire, démontrer l'efficacité du secteur public.
Voilà ce que je voulais dire à cet égard puisque plusieurs orateurs, notamment M. Lefebvre, m'ont interrogé sur ce point.
L'ouverture de la négociation sur la réduction du temps de travail à la SNCF, avec la table ronde annoncée pour le 14 décembre, peut être un moment exceptionnel de réflexion sur l'organisation du travail dans l'entreprise, l'efficacité et l'emploi. Elle peut déboucher sur un nouveau type de dialogue social permettant un règlement plus souvent négocié en amont des risques de conflit social.
Je fais confiance à tous pour savoir prendre toute la mesure des changements d'orientation de ce gouvernement, et je sais qu'ils ne gâcheront pas la chance qui leur est offerte de démontrer ce que peut faire une entreprise publique en termes de qualité et de performances.
En ce qui concerne la régionalisation des services ferroviaires, les rapporteurs MM. Cazalet et Berchet se sont demandé si elle permettrait de garantir l'équilibre des territoires. Je dois préciser que cette régionalisation, qui doit être bugétairement neutre pour les régions, se fait en intégrant le souci d'équilibre des territoires, et donc la densité de population des différentes régions. C'est d'ailleurs ce qui permet une tarification identique pour tous les clients, quels que soient les régions ou le taux d'occupation des trains.
Vous m'avez également interrogé sur mes orientations européennes. Vous connaissez ma position quant à la libéralisation du transport ferroviaire. J'agis contre cette libéralisation. En effet, je ne suis pas convaincu que l'ouverture à la concurrence intramodale soit de nature à permettre au transport ferroviaire de se développer réellement et durablement sur l'ensemble du territoire.
Je sais que je partage cette préoccupation avec nombre d'entre vous, notamment MM. Berchet, Teston et Bellanger, qui se disaient inquiets des effets que pourrait avoir la dérégulation ferroviaire sur la cohésion du territoire national.
Cette position, que je défends à l'échelon européen, est pour l'instant minoritaire, mais, si je me réfère aux propos de mes collègues européens, l'absence de majorité qualifiée pour faire avancer les projets de nouvelles directives me conduit à penser que les positions des uns et des autres peuvent empêcher pendant quelque temps la mise en oeuvre des propositions de la Commission. Je ne désespère cependant pas de l'emporter.
A l'heure actuelle, la Belgique, le Luxembourg et la France partagent la même position. Certes, cela ne suffit pas à constituer une minorité de blocage. J'essaie de faire progresser notre point de vue au niveau européen lors des contacts que j'ai à l'échelon européen. Aujourd'hui, nos collègues espagnols considèrent, comme nous, qu'il serait anormal d'imposer à un pays quel qu'il soit une libéralisation dont il ne voudrait pas.
A cet égard, ma position est simple : ceux qui veulent libéraliser libéralisent. D'ailleurs, cela ne résussit pas obligatoirement ; j'en veux pour preuve l'exemple de la Grande-Bretagne. Récemment, le ministre britannique des transports a dit que, depuis la privatisation, la situation des chemins de fer anglais est une honte nationale. Après tout, chacun fait ce qu'il veut et on ne peut imposer à un pays ou à un autre d'aller au-delà de la directive 91-440. Nous sommes en train de marquer des points et nos partenaires italiens partagent cette appréciation, nous en avions discuté et avions fait une déclaration commune à ce sujet, ce qui nous amène d'ailleurs à la minorité de blocage. Mais on peut aller plus loin. Nous marquerons d'autant plus de points si nous ne nous cantonnons pas sur cette position et si nous jouons la cate du développement du transport ferroviaire à l'échelon européen.
Il ne s'agit pas simplement de dire : « Non, on ne veut pas ça ! » En effet, il faut développer le transport ferroviaire à l'échelle européenne. Nous devons notamment nous attaquer à des problèmes réels.
On m'a demandé ce qui s'était passé lors de la dernière réunion des ministres des transports européens. La presse en a rendu compte, des dépêches ont été publiées. Lors de cette réunion, j'ai agi, j'ai parlé et d'ailleurs un plus grand accord s'est fait jour entre les ministres des transports pour développer, au-delà d'une simple coopération, des efforts en matière d'interopérabilité, d'harmonisation technique, normative, administrative, de simplification des procédures, de mise en place d'infrastructures de qualité capables de soutenir l'essor du trafic européen, notamment le fret.
Plusieurs d'entre vous, notamment MM. Cazalet et Lefebvre, ont évoqué la question des péages ferroviaires. M. Lefebvre s'est inquiété du prix des péages. M. Cazalet estime que les 6 milliards de francs acquittés par la SNCF jusqu'en 1998 étaient insuffisants. M. Gerbaud, quant à lui, a évoqué des chiffres bien plus élevés.
Je partage l'opinion selon laquelle il fallait relever le prix des péages. Vous le savez, je viens de conclure une négociation, d'ailleurs difficile, qui permet de porter le montant des péages à 8,1 milliards de francs en 1999 pour atteindre 9 milliards de francs en 2001.
Je tiens d'abord à rappeler que le montant de 6 milliards de francs avait été arrêté par un décret pris par mon prédécesseur en mai 1995.
Dans son rapport, M. Cazalet reconstitue de façon très précise les dispositions retenues en matière de péage. Il souligne les difficultés éprouvées par le Parlement pour s'y retrouver. Permettez-moi, monsieur le rapporteur, de partager votre sentiment et de regretter cette situation qui s'explique uniquement par un bouclage interministériel tardif de ce dossier, qui vous le savez, est délicat.
La solution retenue, qui a été qualifiée à plusieurs reprises de solution équilibrée et même intelligente, est bien celle que vous avez décrite. J'en profite pour vous confirmer que 300 millions de francs sont inscrits dans le collectif pour 1998, qui est en cours de discussion. Cette somme va concourir à améliorer la capacité contributive de la SNCF, tout en anticipant sur la généralisation des services régionaux de voyageurs, si tel est l'objectif fixé à l'issue de l'expérimentation.
Le développement des transports collectifs constitue une autre de mes priorités.
En ce qui concerne la province, le cap a été tenu : en dix-huit mois, j'ai signé onze décisions de prise en considération de projets de transports collectifs en site propre : tramways à Nantes, Saint-Etienne, Lyon, Valenciennes, Bordeaux, Caen, Nancy, La Seyne-sur-Mer, Toulon ; bus en site propre à Saint-Denis-de-la-Réunion, Rennes et Maubeuge. Au total, cela représente plus de 122 kilomètres de voies nouvelles. Au cours de l'été, les projets de Nantes, d'Orléans, de Strasbourg et de Lyon ont été déclarés d'utilité publique.
Le projet de budget que je vous présente répond à cette priorité avec une dotation qui atteindra, comme vous l'avez souligné, messieurs les rapporteurs, 719,5 millions de francs en autorisations de programme, soit une augmentation de 11 % par rapport à 1998, dotation qui elle-même était supérieure de 11 % à la dotation de 1997. Il s'agit déjà d'une évolution quantitative importante. En crédits de paiement, l'augmentation est même de 40 % entre 1997 et 1999.
Ces moyens supplémentaires permettront d'honorer les engagements de l'Etat sur les projets déjà engagés et de lancer, en fonction de leur état d'avancement, les nouvelles opérations que je viens de citer.
Dans la région d'Ile-de-France, les aides aux investissements atteindront, avec les moyens dégagés sur le FARIF, 345 millions de francs. MM. Plancade et Lefebvre se sont préoccupés de l'augmentation de la TIPP sur le gazole, qui pourrait pénaliser les transports collectifs. Ce point ne m'a pas échappé.
Certaines propositions favorables au transport collectif n'ont pas été retenues. Rien n'interdisait cependant au Parlement, notamment au Sénat, de faire des propositions lors de l'examen de la première partie du présent projet de loi de finances. Par ailleurs et surtout, je rappelle que le prix du gazole à la pompe a fortement baissé. Le prix du baril est actuellement de 12 dollars, alors qu'il dépassait 30 dollars à la fin des années soixante-dix. Certains peuvent déplorer cette baisse, mais elle profite aux entreprises de transports de voyageurs.
Je ne reviendrai pas sur le transport routier de marchandises, car c'est un sujet sur lequel nous avons eu souvent l'occasion de débattre.
J'aborderai cependant la question de la libéralisation du cabotage au niveau européen, puisque M. Lefebvre m'a interrogé sur ce point. Cette libéralisation est survenue en effet sans que l'harmonisation sociale soit obtenue.
Je suis intervenu à tous les conseils des ministres européens sans exception pour rappeler la position de la France. Nous avons voulu laisser les partenaires sociaux au niveau européen rechercher un accord, et je ne vous cache pas que ma déception a été grande d'apprendre, le 30 septembre dernier, l'échec des négociations.
Je pense qu'il y avait là une occasion historique à saisir, mais cet accord était impossible dès lors qu'une partie du patronat européen exigeait un niveau de dérogations vidant l'accord de son contenu. La dérogation devenait la règle, et il n'y avait donc pas d'harmonisation sociale.
Au conseil des ministres européens du 1er octobre, j'ai demandé à M. Kinnock de respecter son engagement d'élaborer dans les meilleurs délais une directive sur le temps de travail. Nous allons examiner avec la profession la première version du projet de directive que la commission vient de nous faire parvenir.
M. Lefebvre a posé la question du bilan de la loi du 7 février 1998 visant à assainir l'exercice de la profession de transporteur routier. Mes services préparent actuellement ce bilan, que je serai prochainement en mesure de transmettre au Parlement.
M. Ostermann m'a interrogé sur le chronotachygraphe, qui a fait l'objet d'une directive antérieure à mon entrée en fonctions. Je n'ai pas tous les éléments précis en mémoire. Je peux néanmoins vous dire que des appareils neufs doivent être mis en place au fur et à mesure des remplacements et qu'un délai limite a été fixé.
Je tiens enfin à souligner l'importance du transport combiné dans le développement du transport de marchandises et la reconquête de parts de marché pour le fret ferroviaire.
J'ai d'ailleurs confié au président du Conseil national des transports, M. Perrod, une mission de réflexion sur le développement du transport combiné. Mes services examinent attentivement les douze propositions qu'il a faites.
D'ores et déjà, les crédits prévus au titre du FITTVN seront augmentés de 10 % en 1999 et permettront de soutenir davantage les opérateurs pour l'aménagement de plates-formes. Il a ainsi été décidé de soutenir trois chantiers en 1998 : Vaires-sur-Marne, Hourcade et Avignon.
Enfin, pour en terminer avec les transports terrestres, je voudrais souligner l'intérêt que je porte à une relance de l'utilisation de la voie d'eau, et donc à la mise en valeur du potentiel du transport fluvial.
La dotation au titre du FITTVN sera une nouvelle fois augmentée et portée à 450 millions de francs, au lieu de 430 millions de francs en 1998 et 350 millions de francs en 1997. Elle permettra d'accroître les efforts en faveur du réseau navigable, efforts qui concerneront tout particulièrement la restauration du réseau existant - il en a bien besoin, comme l'a souligné M. Fatous ! - notamment les voies présentant un fort enjeu pour le transport de marchandises et la navigation de plaisance.
L'autre volet de la politique que je poursuis en matière fluviale est l'accompagnement de la modernisation de la profession, en particulier dans la perspective, désormais proche, de la fin du tour de rôle au niveau européen. Cela passe par le renforcement de l'organisation commerciale, à travers la constitution de groupements et l'aide à la modernisation de la flotte.
Par ailleurs, s'agissant du projet Seine-Nord, la consultation publique très riche sur le tracé de la partie centrale a montré la grande diversité des points de vues, les positions favorables, mais aussi les interrogations.
A la suite du rapport de conclusion établi par le préfet coordonnateur, des compléments d'études sur les aspects socio-économiques et sur les segments Sud - vallée de l'Oise aval - et Nord - canal Dunkerque-Escaut - ont semblé nécessaires et sont en cours pour démontrer la grande utilité et l'efficacité de cette infrastructure.
C'est en fonction de ces différents éléments que nous pourrons prendre, au début de 1999, les décisions les plus pertinentes en matière de développement du transport intermodal vers la voie navigable, dans le cadre de l'élaboration des schémas de service. Dans cette perspective, j'ai demandé à mes services de veiller tout particulièrement à l'environnement et à la prévention des risques d'inondation. J'ai également voulu que soient correctement pris en compte les intérêts socio-économiques et environnementaux des deux débouchés naturels que sont, je le répète, l'Oise aval et le canal Dunkerque-Escaut.
Avant d'aborder la question des infrastructures routières, je voudrais souligner les arbitrages que j'ai souhaité faire au bénéfice de la sécurité dans les transports.
C'est un enjeu pour les entreprises de transport pour lesquelles elle constitue tout autant un baromètre de l'activité et de la qualité des services rendus à l'usager qu'un facteur de croissance qui influe sur les résultats.
C'est un enjeu, une préoccupation de chaque instant pour le ministre des transports et pour les entreprises publiques.
C'est aussi un enjeu particulièrement fragile et sensible - vous l'avez tous constaté voilà maintenant quelques semaines - face aux problèmes de violence, aux agressions et aux incivilités dont peuvent être l'objet les agents des entreprises de transports et les usagers.
La mise en oeuvre des douze mesures pour la prévention et la sécurité dans les transports de voyageurs annoncées l'an passé a été accélérée pour réagir à ces agressions et pour développer l'humanisation des réseaux, qui joue un rôle décisif pour la prévention.
A cet effet, des redéploiements d'effectifs ont été décidés tant sur les réseaux SNCF que sur le réseau RATP, notamment dans les bus. Cela permettra d'ouvrir, dès 1999, 100 gares supplémentaires au-delà de vingt heures en Ile-de-France et de renforcer l'accompagnement à bord des trains ainsi que l'accueil en gare.
Plus de 1 500 emplois-jeunes seront créés en trois ans - 400 à la SNCF et un peu plus de 1 000 à la RATP - afin de renforcer très rapidement les fonctions de médiation, notamment dans les bus.
Les effectifs de police seront renforcés et portés à 900 sur les réseaux de la SNCF et de la RATP, et douze bureaux de police seront ouverts dans les gares de banlieue en 1999.
En province, l'effort accompli par l'Etat en 1998, en partenariat avec les collectivités locales, sera reconduit. Ainsi, en 1999, j'ai proposé d'affecter 50 millions de francs aux dépenses de sécurité, ce qui permet de prendre en charge 50 % des coûts des équipements.
Il nous a été parfois reproché de faire plus pour la région parisienne que pour la province : j'indique donc que 350 millions seront consacrés à la région parisienne, et 300 millions au total à la province, dont 150 millions de participation de l'Etat. On voit bien qu'il s'agit là d'efforts comparables.
Enfin, des dispositions législatives sont prévues afin d'aggraver les sanctions pour atteinte aux agents des entreprises de transport public. A cet effet, un amendement du Gouvernement sera déposé la semaine prochaine à l'Assemblée nationale lors de l'examen du projet de loi sur la sécurité routière.
Je voudrais terminer cette revue du projet de budget des transports par les infrastructures routières.
Ma priorité dans ce domaine, comme dans les autres, est bien sûr le développement du réseau, mais c'est d'abord la sécurité.
La sécurité sur les routes, c'est, d'une part, les missions de la délégation à la sécurité routière et, d'autre part, la mise en sécurité des infrastructures routières.
Comme cela a été souligné, le budget de la sécurité routière pour 1999 est en nette augmentation par rapport à celui de 1998 : plus 4 % environ en moyens de paiement et d'engagement.
Ce budget permettra notamment d'assurer la gestion du parc des équipements d'information routière, le fonctionnement des centres d'information routière et le renouvellement d'une partie du matériel dédié à la sécurité routière. Il permettra aussi la mise en place des grands systèmes d'exploitation inscrits aux contrats Etat-région, comme Coraly à Lyon et Marius à Marseille.
Bien évidemment, les politiques d'incitation à la sécurité routière, menées au plan local - M. Plasait a ainsi cité la feria de Dax - seront poursuivies.
Mais la sécurité routière, c'est aussi beaucoup plus qu'un budget. Au risque de me répéter, je dirai que, chaque année, la route tue plus de 8 000 personnes en France ; le risque d'être tué sur la route est deux fois plus élevé en France qu'en Grande-Bretagne et dans d'autres pays européens. Les derniers chiffres sont à ce titre particulièrement préoccupants, comme l'ont rappelé MM. Plasait et Miquel. Ils montrent que l'effort de la collectivité tend à se relâcher, et qu'il faut donc le renforcer.
Je vous rappelle, monsieur Plasait, qu'il n'y avait pas eu de comité interministériel de la sécurité routière depuis 1993 ou 1994. Et encore, il avait fallu, pour que ce comité se réunisse, qu'un terrible accident causant une dizaine de morts se produise.
Une véritable dynamique est à relancer. Il faut que chacun prenne conscience du fait que la conduite est un acte privé, mais aussi un acte social.
Un nouveau comité interministériel de la sécurité routière, après celui qui a eu lieu l'an dernier, se tiendra rapidement afin de faire le point sur l'état d'avancement des vingt-cinq mesures retenues par le CISR de novembre 1997 et afin de faire en sorte d'activer, en tant que de besoin, leur application.
Par ailleurs, comme vous le savez bien évidemment, un projet de loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière a été présenté en première lecture au Sénat, qui l'a adopté à l'unanimité. Il sera examiné par l'Assemblée nationale, la semaine prochaine, en principe le 10 décembre.
Par ailleurs, en parallèle à l'ensemble de ces mesures d'information, de sensibilisation et de formation, il faudra aussi intensifier, comme l'a rappelé tout à l'heure M. Fatous, le nombre des contrôles. J'ai déjà pris contact avec mes collègues ministres de l'intérieur et de la défense pour que, à la lumière des analyses précises des accidents se produisant dans chaque département, des contrôles appropriés soient multipliés, associés à une information sur le risque pris par le contrevenant.
Je voudrais aussi revenir sur l'intervention de M. Miquel, qui a proposé que la mise en oeuvre du projet de loi sur la sécurité routière s'accompagne d'une forte hausse des crédits de communication et d'évaluation de la sécurité routière. Je suis tout à fait d'accord avec lui sur ce point. S'agissant de la communication, le budget pour 1999 est déjà en hausse, et le budget pour 2000 le sera également. Pour ce qui est de l'évaluation, il a d'ores et déjà été demandé à l'Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité, l'INRETS, d'accentuer, en 1999, l'évaluation des actions entreprises, comme le brevet de sécurité routière et les actions locales.
Enfin, je souligne que j'ai demandé à mes services de généraliser l'évaluation dans le domaine de la sécurité routière et de préparer en conséquence le budget pour 2000.
Beaucoup reste à faire - chacun d'entre nous peut le constater chaque jour dans sa circonscription - pour que l'objectif central de réduction du nombre de tués sur la route soit davantage pris en charge par les automobilistes eux-mêmes. C'est affaire de volonté politique et d'évolution des comportements. Même si l'on peut regretter qu'un long délai s'écoule entre la prise de décision et sa mise en oeuvre les mesures qui sont en train de se mettre en place vont, je pense, dans le sens souhaité.
De manière plus générale, les investissements de sécurité ont été privilégiés dans les arbitrages. Je ne citerai qu'un seul exemple, relevé par nombre d'intervenants, celui du programme pluriannuel de résorption des passages à niveau les plus dangereux, qui a été engagé grâce à une contribution de 50 millions de francs inscrite au FITTVN. Ces réductions se feront bien évidemment en partenariat. Ce dispositif est, à mes yeux, insuffisamment utilisé. Il suppose, en effet, une négociation entre la SNCF, RFF et, bien souvent, une collectivité locale. Ces procédures mettent du temps à aboutir. Il faut donc les accélérer.
La sécurité, c'est également le niveau de sécurité offert par les infrastructures routières. C'est la raison pour laquelle j'ai poursuivi et amplifié l'orientation à laquelle vous aviez souscrit en 1998, qui consiste à affecter davantage de crédits à la remise à niveau et à l'entretien du réseau routier existant.
Cette remise à niveau s'imposait. En effet, je rappelle que, de 1988 à 1996, les crédits destinés à l'entretien courant ont été réduits de 10 % et que ceux qui étaient destinés à la réhabilitation l'ont été de 66 %. Or, dans le même temps, les trafics augmentaient de 22 % et la consistance des ouvrages à entretenir progressait de 11 %.
Compte tenu de cette situation, un premier effort a été fait en 1998, et il convient de poursuivre cette orientation en 1999.
Les dotations proposées pour les programmes d'entretien, de réhabilitation et de mise en sécurité du réseau augmentent globalement de 6,2 % en moyens d'engagement et de 4,8 % en moyens de paiement. Elles s'établissent à environ 3,472 milliards de francs si l'on intègre les dotations des comptes d'affectation spéciale, le FITTVN et le FARIF.
Ce choix n'est évidemment pas sans conséquences pour l'ensemble du budget routier. Celui-ci est en effet globalement en diminution par rapport à 1998, comme vous l'avez souligné, monsieur Miquel, et s'établit à 9,2 milliards de francs de crédits de paiement en 1999.
La poursuite de l'effort en faveur de l'entretien routier signifie donc une diminution des crédits affectés au développement du réseau routier national, c'est-à-dire aux nouvelles opérations.
Ainsi, s'agissant des contrats Etat-région, le budget de 1999 ne permettra pas de rattraper les importants retards accumulés au cours des années antérieures. Les autorisations de programme prévues porteront ainsi à 81 % - peut-être un peu plus - le taux d'exécution de ces contrats, ce qui, comme vous l'avez fort justement indiqué, peut porter atteinte à la crédibilité de l'Etat.
Pour être précis, je dois dire que, dans le projet de collectif pour 1998 qui a été transmis au Parlement le 18 novembre dernier, 250 millions de francs de crédits de paiement supplémentaires ont été obtenus.
Cette mesure est importante. En effet, lorsque nous sommes arrivés, au mois de juin 1997, il y avait 3 milliards de francs de retard de crédits de paiement. Or, à la fin de 1999, ce retard devrait être réduit à 1 milliard de francs seulement. Vous savez - et c'est pourquoi cette mesure est si importante - que si, avec les autorisations de programme, on fait des effets d'annonce avant les élections, c'est avec les crédits de paiement que l'on peut régler les entreprises.
Sur le fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, les moyens consacrés aux routes permettront de tenir les engagements, particulièrement ceux qui concourent au désenclavement du Massif central, comme l'achèvement de l'autoroute A 75 de part et d'autre du viaduc de Millau - l'enquête d'utilité publique va être lancée le 16 décembre - ou la poursuite de l'autoroute A 20. Nous financerons aussi les programmes qui s'inscrivent dans un objectif de sécurisation de certaines routes nationales, comme la RN 10 dans les Landes ou le programme spécifique de la RN 7.
Les crédits budgétaires et le FITTVN nous permettent également, comme l'a souligné M. Gerbaud, d'accélérer la réalisation de la route Centre Europe Atlantique, la route des Estuaires et la RN 88.
Puisque nous en sommes aux cas particuliers, je vais répondre à M. Lambert sur l'autoroute A 28, Rouen-Alençon.
M. Alain Lambert. C'est le seul tronçon qui reste à faire !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je vous confirme que l'appel d'offres sera lancé avant la fin de l'année et que les différents partenaires, Etat et collectivités, disposeront de tous les éléments leur permettant de choisir l'investissement le plus pertinent, concédé ou non, au printemps de 1999.
Ce budget routier ne me paraît pas, cependant, satisfaisant. Même si cette situation résulte des priorités du Gouvernement - soutenues par le Parlement - nous ne pourrons en rester là car, même si je pense comme M. Miquel qu'il faudra désormais revenir à une programmation plus réaliste des prochains plans, force est de constater que ce budget ne permet pas de répondre à l'ensemble des besoins dans le domaine routier.
Il convient, sur cette question, de se mettre en situation de préparer le budget de l'an 2000, qui sera aussi celui du démarrage des prochains contrats de plan, pour lesquels vous êtes déjà nombreux à me solliciter et à vous inquiéter.
La présentation budgétaire qui vient d'être faite est loin d'être complète et n'épuise pas le sujet des infrastructures routières. De nombreuses questions me sont posées, chaque semaine, au Parlement ou chaque fois que je vais sur le terrain.
Parmi ces questions, l'une revient très souvent : où en est la réforme du financement des autoroutes ?
Cette réforme est en cours. Elle a pris un peu de retard, ce qui n'est pas surprenant car le sujet est particulièrement complexe.
Parmi les plus importantes difficultés, je citerai l'annulation par le Conseil d'Etat, en février dernier, des décrets de concession de l'autoroute A 86 à COFIROUTE et de TEO à Lyon.
Cela étant, monsieur Lambert, s'il est vrai que les automobilistes ne roulent pas sur des appels d'offres,...
M. Alain Lambert. Ni sur des cartes !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... il vaut mieux s'assurer que ces appels d'offres sont correctement réalisés pour qu'un jour ils puissent rouler sur des routes. J'ai donc le souci de respecter scrupuleusement les règles et les directives dans ce domaine, de telle sorte que les contentieux devant le Conseil d'Etat ne viennent pas annuler et bloquer les décisions, paralysant les travaux et paralysant, de ce fait, les usagers. Le cas de l'A 86, que j'ai cité, vous montre l'importance de la question !
Ces annulations nous ont rappelé la force des directives communautaires, que nos prédécesseurs avaient tardé à transposer.
Il faut maintenant remettre le système autoroutier sur pieds, notamment celui qui est constitué par les sociétés d'économie mixte, les SEMCA.
Le système français de concessions autoroutières a déjà permis, je le répète, de réaliser un réseau de 6 700 kilomètres. Il a donc présenté de nombreux avantages, mais, aujourd'hui, il faut à la fois le consolider, le redresser et le réformer. De plus, son endettement n'est pas négligeable puisqu'il représente déjà 150 milliards de francs.
Par ailleurs, l'accélération de la réalisation du schéma autoroutier en 1994 s'est traduite par des tensions financières dans certaines sociétés, comme celle du Tunnel du Fréjus, actuellement en déficit.
La facilité de financement procurée par la technique de l'adossement a conduit à certains choix d'investissement contestables et à créer des biais dans l'allocation des ressources entre réseau concédé et réseau non concédé, entre travaux neufs et entretien.
Le contexte juridique, notamment communautaire, conduit à remettre en cause le mode d'attribution des nouvelles concessions, à un moment où la transparence des choix d'investissement public se fait plus exigeante.
Monsieur Lambert, vous avez vous aussi évoqué la question de l'adossement, qui a permis, jusqu'à maintenant, de financer des constructions nouvelles par les péages des tronçons existants, amortis ou non amortis. Vous estimez, avec le Sénat, que ce n'est pas contraire aux directives communautaires.
Je vous confirme que cette question est au coeur des réunions qui se déroulent actuellement à Bruxelles avec la Commission. Je ne puis donc, à ce stade, vous en dire davantage, mais sachez que nous examinons à la fois la prolongation de la durée des concessions, la transposition des directives et le renforcement de la sécurité juridique sur toutes ces questions.
Je citerai enfin, parmi les sujets à faire évoluer, la durée des amortissements, les changements de méthode comptable demandés par la Cour des comptes - c'est un problème réel que tout le monde reconnaît - et la contestation par la Commission européenne du régime de TVA des sociétés autoroutières, MM. Gerbaud et Miquel en ont d'ailleurs fait état dans leur intervention.
Face à ces difficultés, il faut construire une réforme du système autoroutier permettant de poursuivre le développement du réseau d'autoroutes à un rythme adapté à la demande de transport.
Cette évolution, à laquelle nous travaillons depuis un an, doit bien entendu s'inscrire dans le droit communautaire. Elle doit permettre des mises en concurrence transparentes et non discriminatoires pour l'attribution de nouvelles concessions et assurer - c'était un de nos objectifs de départ - une plus grande neutralité des choix entre types d'investissements et entre modes de transport.
J'attends de cette réforme qu'elle renforce durablement pour l'avenir la place des sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes dans la construction et l'exploitation de la route, dans le cadre d'un véritable partenariat public-privé.
Il s'agit de préserver, au côté d'entreprises privées, qui ont évidemment toute leur place, des entreprises publiques dynamiques et renforcées à l'issue de la réforme en cours.
La mise en place de cette réforme, qui passe par des systèmes comptables et fiscaux plus proches du droit commun ainsi que par la constitution de fonds propres, ne peut se faire, à mon avis, sans un allongement des concessions actuelles.
A cet effet, des discussions ont été engagées avec la Commission européenne, que j'espère voir aboutir au tout début de l'année prochaine.
Je souhaite être en mesure de pouvoir en tenir compte dans le travail législatif de l'an prochain.
Comme vous le constatez, cette réforme est importante. Il s'agit tout simplement de conforter durablement le système des concessions « à la française ».
Je ne saurais terminer mon propos sur les infrastructures routières sans répondre à M. Gerbaud sur le concept d'autoroute évolutive à coût réduit, dite « autoroute allégée ».
Cette suggestion a été formulée dans le rapport de la commission d'enquête du Sénat sur les infrastructures terrestres, qui constitue, au-delà de ce point particulier, un apport réel aux réflexions de mes services sur l'ensemble de ces problèmes.
J'ai déjà eu l'occasion de m'entretenir avec certains d'entre vous de ces « autoroutes allégées » et je souhaite, ici même, confirmer mon engagement dans ce domaine.
Mes services travaillent actuellement à la définition d'un nouveau type d'autoroute, susceptible de répondre à des volumes de trafic de l'ordre de 6 000 à 12 000 véhicules par jour - soit des trafics très inférieurs à ceux des autoroutes à deux fois deux voies - et susceptible d'être concédée. Une expérimentation interviendra dès le premier semestre de 1999.
Enfin, messieurs Miquel et Gerbaud, dans le prolongement de la commission d'enquête citée précédemment, vous avez souhaité une programmation autoroutière décidée par le Parlement.
De quoi peut-il s'agir ? D'une loi de programmation ? L'expérience prouve que, confrontées à l'annualité budgétaire, ces lois sont constamment révisées, à la baisse le plus souvent.
Il me semble préférable de retenir les démarches que nous engageons sur les schémas de service et la négociation des contrats de plan. Ces dispositifs permettront d'afficher des perspectives claires sur l'avenir et offriront aux collectivités territoriales la possibilité de participer aux enjeux de planification et de programmation. Ils me semblent offrir davantage de garantie dès lors que la contractualisation correspond véritablement aux besoins.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les principaux éléments d'information que je souhaitais vous apporter sur les budgets des transports. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Monsieur le ministre, permettez-moi de vous dire que vous avez été le champion de la réponse devant le Sénat, avec une heure et douze minutes !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. J'ai été trop long ?
M. le président. Non, mais c'était impressionnant !
Je rappelle au Sénat que les crédits concernant les transports terrestres, les routes et la sécurité routière, inscrits à la ligne « Equipement, transports et logement », seront mis aux voix le dimanche 6 décembre, à la suite de l'examen des crédits affectés à la mer. Mais j'appellerai en discussion l'amendement présenté par la commission des finances sur le titre IV.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 94 188 268 francs. »

Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 2 699 901 146 francs. »

Par amendement n° II-29, M. Cazalet, au nom de la commission des finances, propose de réduire ces crédits de 566 982 710 francs.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous vous proposons une faible réduction qui ne porte que sur le fonctionnement, pour appeler l'Etat à prendre ses responsabilités en matière de transports publics.
Si l'Etat assurait mieux la sécurité des voyageurs et des personnels et si les élus étaient vraiment associés aux décisions en Ile-de-France, il y aurait sans doute moins de déficit de fonctionnement à combler !
Je renouvelle par ailleurs la suggestion que j'ai faite tout à l'heure : les dotations en capital aux entreprises publiques de transports doivent être augmentées, afin de leur permettre d'investir davantage.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Il est défavorable, pour une raison simple : il n'y a pas eu de dérive par rapport à l'indemnité compensatrice, mais une augmentation de 2,8 % qui a eu lieu est due tout simplement au développement du réseau lui-même. Il y a donc plus de besoins, avec METEOR, notamment.
L'adoption de cet amendement entraînerait une réduction du service rendu aux usagers !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-29.
M. Jean-Pierre Demerliat. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Demerliat.
M. Jean-Pierre Demerliat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement me paraît inspiré par au moins deux motivations.
La première, mécanique et donc contestable sur le fond, consiste à réduire systématiquement la quasi-totalité des fascicules budgétaires, au motif que la majorité sénatoriale a décidé arbitraitement de réduire la dépense publique de 26 milliards de francs, sans se soucier de l'utilité de cette dépense, du service qu'elle pouvait rendre au citoyen et des conséquences de cette démarche.
Cet amendement tranche donc dans le vif en opérant une réduction forfaitaire des différents chapitres du titre IV.
Sur quelles dotations ? On ne nous le dit pas. S'agit-il de fragiliser le transport ferroviaire en réduisant les crédits en faveur des chemins de fer régionaux, des retraites des cheminots ou encore en faveur du désendettement du ferroviaire ?
Nous ne pouvons l'accepter. Le développement du ferroviaire est notre priorité, la priorité même.
La seconde motivation de cet amendement est sans doute liée aux critiques, pour certaines fondées, faites par différentes institutions à propos du mode de financement des transports collectifs en Ile-de-France. Ce n'est cependant pas à travers un amendement de réduction des crédits de l'indemnité compensatrice versée à la RATP que l'on réglera cette question. Ce sont non pas les crédits qu'il faut diminuer, mais plutôt les mécanismes qui régissent le financement de ces transports qu'il faut peut-être modifier. La RATP elle-même le souhaite, dans le cadre du plan d'entreprise 1998-2000.
Quoi qu'il en soit, la démarche de la majorité du Sénat est difficilement compréhensible, car ce projet de loi de finances est tout à la fois économe, puisque les dépenses n'augmentent que de 1 %, et conforme aux priorités qu'a fixées le Gouvernement, et que les Français me semblent approuver, priorité à l'emploi et à la création d'activité, la priorité aux équipements collectifs et la priorité à la solidarité et aux grands services publics de la vie quotidienne.
Le groupe socialiste votera donc contre cet amendement.
M. Pierre Lefebvre. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Il convient de s'attarder quelque peu sur le détail des crédits que cet amendement concerne.
Adopter cet amendement, c'est diminuer le soutien à la batellerie, qui traverse les difficultés que j'ai évoquées, nombre d'artisans déposant à l'heure actuelle leur bilan. C'est toucher à la contribution de l'Etat à la régionalisation des chemins de fer. C'est prélever sur l'allégement de la dette de RFF, c'est « tirer » sur les tarifs sociaux, sur la carte orange - les Franciliens jugeront ! - sur la carte jeunes de la SNCF, sur la carte Imagine R, à peine mise en oeuvre par le ministre - les jeunes apprécieront ! - sur la carte vermeil, sur la carte familles nombreuses alors qu'on prétend défendre l'institution familiale. C'est, s'attaquer aux retraités de la SNCF. C'est, enfin, s'en prendre à l'accord FONGECFA, signé par les partenaires sociaux, alors que l'on prétend défendre le dialogue social !
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le groupe communiste républicain et citoyen votera contre l'amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-29, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des finances.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)
Voici le résultat du scrutin : n° 39 :

Nombre de votants 319
Nombre de suffrages exprimés 316
Majorité absolue des suffrages 159216
Contre 100

Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 7 178 358 000 francs ;

« Crédits de paiement : 3 690 812 000 francs. »
La parole est à M. Demerliat.
M. Jean-Pierre Demerliat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux d'abord regretter que le projet de budget consacré aux routes soit en diminution significative, de 5,3 % en crédits de paiement et de 3,5 % en autorisations de programme. Bien évidemment, le réseau routier français s'est considérablement amélioré ces dernières années, mais toutes les régions ne sont pas, à cet égard, traitées de la même façon. Je vais d'ailleurs y revenir tout à l'heure !
Vous donnez la priorité, monsieur le ministre, à l'entretien des réseaux existants. Il s'agit, certes, d'un impératif non discutable, et les efforts amorcés l'année dernière sur ce chapitre et que vous poursuivrez en 1999 méritent d'être soulignés.
Je note avec satisfaction que vous souhaitez consacrer des moyens accrus à la sécurité routière.
Cela permet d'abonder les crédits destinés à l'information du public et à la maintenance des équipements d'exploitation et d'alerte, ainsi que les actions de sécurité routière dans les établissements scolaires, qui sont en nette progression.
En matière de sécurité, permettez-moi d'émettre, monsieur le ministre, un voeu fort : prenez, je vous en conjure, toutes les dispositions utiles pour que les glissières de sécurité que l'on pose maintenant sur les routes nationales, départementales ou communales soient aux nouvelles normes. Faites également en sorte que les anciennes installations soient rapidement modifiées, car ce sont de véritables guillotines à motocyclistes.
Vous me permettrez, monsieur le ministre, d'évoquer ici la situation injuste que connaît, en matière d'infrastructures routières, la région Limousin.
Je relève pourtant un point positif que j'aurais mauvaise grâce à sous-estimer : l'avancement réel des travaux sur l'axe Paris-Toulouse, l'A 20, dans sa partie limousine, avec, tout récemment, l'ouverture du tronçon à deux fois deux voies de quinze kilomètres entre Uzerche et Donzenac, en Corrèze.
C'est également une très bonne chose que le tronçon Vierzon-Brive soit gratuit ; mais cet axe nord-sud n'est pas suffisant pour désenclaver la région.
En effet, en ce qui concerne les axes transversaux, celle-ci souffre d'un retard considérable. Le tracé de l'autoroute à péage A 89, qui reliera Clermont-Ferrand à Bordeaux, passe beaucoup trop au sud de la région pour que celle-ci en bénéficie réellement.
D'où mon second plaidoyer, en faveur, cette fois de la route Centre-Europe-Atlantique, qui nécessite, à tout le moins, un aménagement à deux fois deux voies.
L'élaboration d'un axe Nantes-Méditerranée, par Cholet, Poitiers, Bellac et Limoges, est également absolument nécessaire.
Je viens de citer Bellac. C'est un point noir qui, avec celui d'Aixe-sur-Vienne, sur la RN 21, doit être résorbé le plus rapidement possible. Les travaux doivent être inscrits dans un contrat de plan prochain. Je suis certain de la détermination totale des élus de la région Limousin sur ces dossiers. Monsieur le ministre, l'Etat, de son côté, devra s'engager.
Pour terminer sur une note positive, je ne peux que me réjouir de ce que la non moins indispensable déviation de Saint-Junien, sur la RN 141 reliant Limoges à Angoulême, soit enfin en voie de réalisation et sera opérationnelle dès l'an 2000.
Monsieur le ministre, le groupe socialiste aurait voté votre budget avec enthousiasme si celui-ci n'avait pas été dénaturé par l'amendement qui vient d'être voté. Aussi, je crains fort que, lorsqu'il viendra devant le Sénat, nous ne soyons dans l'obligation de le refuser, mais sans que ce refus s'adresse à vous, monsieur le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre. M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, vous êtes revenu sur le décalage du budget des routes, et donc sur son insuffisance.
J'ai essayé d'expliquer très franchement pourquoi il en était ainsi. J'ai dit que nous n'atteindrions pas plus de 81 % environ dans la réalisation des contrats de plan. J'ai expliqué - je le répète - que le retard était si important qu'il était pratiquement impossible, en deux ans, de le rattraper. C'est un premier aspect.
A cela s'ajoute le fait que, pour certains projets qui avaient été envisagés, sont intervenues des modifications : on a fait de nouveaux choix, des études et les travaux ont été interrompus, d'autres n'ont pas été entrepris. C'est là un second aspect du problème.
J'en viens aux questions plus précises que vous avez posées.
Je partage votre sentiment sur l'impact actuel des glissières de sécurité pour les motocyclistes ; c'est une question très sérieuse, très grave.
C'est pourquoi mes services ont lancé un concours d'idées, comme on dit, auprès des industriels pour définir les matériels les plus adaptés à ces usagers de la route. C'est en cours. Les résultats de ce concours doivent m'être remis dès le premier trimestre de 1999.
Les nouveaux équipements pourront ensuite être installés en priorité aux endroits les plus dangereux au vu de l'ensemble du réseau routier, car vous comprenez bien qu'on ne peut pas tout faire d'un coup.
S'agissant de la route Centre-Europe-Atlantique, la RCEA, croyez bien que, depuis que je suis ministre, j'en entends parler. Je suis donc convaincu qu'il y a une mobilisation générale des élus et que cette mobilisation n'est pas sans raison, qu'elle correspond à un problème réel aussi bien en termes de désenclavement qu'en termes de sécurité en raison de l'existence de secteurs particulièrement dangereux sur cette route.
Il s'agit d'un axe important qui bénéficie, dans les contrats de plan actuels, d'investissements élevés. Je souhaite que l'effort soit maintenu, voire amplifié, dans le prochain plan.
En ce qui concerne l'axe Nantes-Méditerranée, le parti d'aménagement doit être débattu dans le cadre de l'élaboration des schémas de service. Mais, sans attendre, les études des déviations de Bellac et d'Aixe-sur-Vienne, cités que vous avez mentionnées, se poursuivent, permettant le lancement de l'enquête d'utilité publique vers la fin de 1999. Le financement de ces opérations importantes sera examiné, bien sûr, dans le cadre de la préparation du prochain contrat du Plan.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 14 668 031 000 francs ;

« Crédits de paiement : 6 523 104 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant les transports terrestres, les routes et la sécurité routière.

3

TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi de finances rectificative pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 97, distribué et renvoyé à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

4

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, samedi 5 décembre 1998, à dix heures, à quinze heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 1999, adopté par l'Assemblée nationale (n°s 65 et 66, 1998-1999). (M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.)
Deuxième partie. - Moyens des services et dispositions spéciales :
Emploi et solidarité :
III. - Ville :
M. Alain Joyandet, rapporteur spécial (rapport n° 66, annexe n° 20) ;
M. Gérard Larcher, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan (avis n° 68, tome XXIII).
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 70, tome III).
Jeunesse et sports :
M. Michel Sergent, rapporteur spécial (rapport n° 66, annexe n° 32) ;
M. James Bordas, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 67, tome IX).
Culture :
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial (rapport n° 66, annexe n° 7) ;
M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 67, tome I) ;
M. Marcel Vidal, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (cinéma, théâtre dramatique, avis n° 67, tome II).
Communication :
Crédits du Conseil supérieur de l'audiovisuel, d'aides à la presse et à l'audiovisuel inscrits au budget des services généraux du Premier ministre et lignes 44 et 45 de l'état E annexé à l'article 59 et l'article 63 :
M. Claude Belot, rapporteur spécial (rapport n° 66, annexes n°s 8 et 9) ;
M. Jean-Paul Hugot, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (communication audiovisuelle, avis n° 67, tome X) ;
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (presse écrite, avis n° 67, tome XI).

Délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant l'examen des crédits de chaque ministère

Le délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant l'examen des crédits de chaque ministère est fixé à la veille du jour prévu pour la discussion, à dix-sept heures.

Délai limite pour le dépôt des amendements aux crédits budgétaires pour le projet de loi de finances pour 1999

Le délai limite pour le dépôt des amendements aux divers crédits budgétaires et articles rattachés du projet de loi de finances pour 1999 est fixé à la veille du jour prévu pour la discussion, à dix-sept heures.

Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux (n° 81, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 8 décembre 1998, à dix-sept heures.
Projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage (n° 75, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 8 décembre 1998, à dix-sept heures.
Projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, portant modification de l'ordonnance n° 45-2339 du 13 octobre 1945 relative aux spectacles (n° 512, 1997-1998).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 8 décembre 1998, à dix-sept heures.
Débat consécutif à la déclaration du Gouvernement sur l'aménagement du territoire.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mercredi 9 décembre 1998, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de M. Claude Estier et des membres du groupe socialiste et apparentés portant modification de la loi n° 96-370 du 3 mai 1996 relative au développement du volontariat dans le corps des sapeurs-pompiers (n° 85, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 9 décembre 1998, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de M. Christian Bonnet et des membres du groupe des Républicains et Indépendants tendant à sanctionner de peines aggravées les infractions commises sur les agents des compagnies de transport collectif de voyageurs en contact avec le public (n° 86, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 9 décembre 1998, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée le samedi 5 décembre 1998, à zéro heure quarante-cinq.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du vendredi 4 décembre 1998


SCRUTIN (n° 37)



sur l'amendement n° II-27 rectifié, présenté par M. Jacques Pelletier au nom de la commission des finances, tendant à réduire les crédits du titre III de l'état B du projet de loi de finances pour 1999, adopté par l'Assemblée nationale (budget de l'Equipement, transports et logement. - I. - Services communs).

Nombre de votants : 319
Nombre de suffrages exprimés : 303
Pour : 204
Contre : 99

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 2. - MM. Jacques Pelletier et André Vallet.
Contre : 4. - MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer et Yvon Collin.
Abstentions : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :

Pour : 98.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Christian Poncelet, président du Sénat.

GROUPE SOCIALISTE (78) :

Contre : 78.

GROUPE DE L' UNION CENTRISTE (52) :

Pour : 52.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (47) :

Pour : 46.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Jean-Claude Gaudin, qui présidait la séance.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :

Pour : 6.
Contre : 1. - M. Gérard Delfau.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
René Ballayer
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jean-Paul Bataille
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Jacques Oudin
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Alain Peyrefitte
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Jean-Jacques Robert
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy

Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac

Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Abstentions


Georges Berchet
Jacques Bimbenet
Guy-Pierre Cabanel
Fernand Demilly
Jean-Pierre Fourcade
Jean Francois-Poncet
Paul Girod
Pierre Jeambrun
Bernard Joly
Pierre Laffitte
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Georges Othily
Lylian Payet
Jean-Marie Rausch
Raymond Soucaret

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Jean-Claude Gaudin, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.

SCRUTIN (n° 38)



sur l'amendement n° II-28, présenté par M. Jacques Pelletier au nom de la commission des finances, tendant à réduire les crédits du titre IV de l'état B du projet de loi de finances pour 1999, adopté par l'Assemblée nationale (budget de l'Equipement, transports et logement. - II. - Urbanisme et logement).

Nombre de votants : 319
Nombre de suffrages exprimés : 303
Pour : 204
Contre : 99

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 2. - MM. Jacques Pelletier et André Vallet.
Contre : 4. - MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer et Yvon Collin.
Abstentions : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RéPUBLIQUE (99) :

Pour : 98.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Christian Poncelet, président du Sénat.

GROUPE SOCIALISTE (78) :

Contre : 78.

GROUPE DE L' UNION CENTRISTE (52) :

Pour : 52.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (47) :

Pour : 46.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Jean-Claude Gaudin, qui présidait la séance.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :

Pour : 6.
Contre : 1. - M. Gérard Delfau.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
René Ballayer
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jean-Paul Bataille
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Jacques Oudin
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Alain Peyrefitte
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Jean-Jacques Robert
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac

Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Abstentions


Georges Berchet
Jacques Bimbenet
Guy-Pierre Cabanel
Fernand Demilly
Jean-Pierre Fourcade
Jean François-Poncet
Paul Girod
Pierre Jeambrun
Bernard Joly
Pierre Laffitte
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Georges Othily
Lylian Payet
Jean-Marie Rausch
Raymond Soucaret

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Jean-Claude Gaudin, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification et conformes à la liste de scrutin ci-dessus.

SCRUTIN (n° 39)



sur l'amendement n° II-29, présenté par M. Auguste Cazalet au nom de la commission des finances, tendant à réduire les crédits du titre IV de l'état B du projet de loi de finances pour 1999, adopté par l'Assemblée nationale (budget de l'Equipement, transports et logement. - III. - Transports).

Nombre de votants : 319
Nombre de suffrages exprimés : 316
Pour : 216
Contre : 100

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 14.
Contre : 5. - MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin et Georges Othily.

Abstentions : 3. - MM. Georges Berchet, Pierre Jeambrun et Jacques Pelletier.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :

Pour : 98.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Christian Poncelet, président du Sénat.

GROUPE SOCIALISTE (78) :

Contre : 78.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (52) :

Pour : 52.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (47) :

Pour : 46.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Jean-Claude Gaudin, qui présidait la séance.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :

Pour : 6.
Contre : 1. - M. Gérard Delfau.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
René Ballayer
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jean-Paul Bataille
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean Francois-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Jacques Oudin
Charles Pasqua
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Alain Peyrefitte
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Jean-Jacques Robert


Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin

Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac

Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Georges Othily
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Abstentions


MM. Georges Berchet, Pierre Jeambrun et Jacques Pelletier.

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Jean-Claude Gaudin, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification et conformes à la liste de scrutin ci-dessus.