SEANCE DU 6 NOVEMBRE 2002
M. le président.
« Art. 9. - L'article 74 est ainsi rédigé :
«
Art. 74
. - Les collectivités d'outre-mer régies par le présent
article ont un statut particulier qui tient compte des intérêts propres de
chacune d'elles au sein de la République.
« Ce statut est défini par une loi organique, adoptée après avis de
l'assemblée délibérante, qui fixe :
« - les conditions dans lesquelles les lois et règlements y sont applicables
;
« - les compétences de cette collectivité ; sous réserve de celles qu'elle
exerce à la date d'entrée en vigueur de la loi constitutionnelle n° du
relative à l'organisation décentralisée de la République, le transfert de
compétences de l'Etat ne peut porter sur la nationalité, les droits civiques,
les garanties des libertés publiques, l'état et la capacité des personnes,
l'organisation de la justice, le droit pénal, la procédure pénale, la politique
étrangère, la défense, la sécurité et l'ordre publics, la monnaie, le crédit et
les changes ainsi que le droit électoral ;
« - les règles d'organisation et de fonctionnement des institutions de la
collectivité et le régime électoral de son assemblée délibérante ;
« - les conditions dans lesquelles ses institutions sont consultées sur les
projets et propositions de loi et les projets d'ordonnance ou de décret
comportant des dispositions particulières à la collectivité, ainsi que sur la
ratification ou l'approbation d'engagements internationaux conclus dans les
matières relevant de sa compétence.
« La loi organique détermine également, pour celles de ces collectivités qui
sont dotées de l'autonomie, les conditions dans lesquelles :
« - s'exerce un contrôle juridictionnel spécifique sur certaines catégories
d'actes de l'assemblée délibérante intervenant au titre des compétences qu'elle
exerce dans le domaine de la loi ;
« - l'assemblée délibérante peut modifier une loi promulguée postérieurement à
l'entrée en vigueur du statut de la collectivité, lorsque le Conseil
constitutionnel a constaté que la loi était intervenue dans le domaine de
compétence de cette collectivité ;
« - des mesures justifiées par les nécessités locales peuvent être prises par
la collectivité en faveur de sa population, en matière d'accès à l'emploi, de
droit d'établissement pour l'exercice d'une activité professionnelle ou de
protection du patrimoine foncier ;
« - l'Etat peut associer les collectivités à l'exercice des compétences qu'il
conserve, dans le respect des garanties accordées sur l'ensemble du territoire
national pour l'exercice des libertés publiques.
« Les autres modalités de l'organisation particulière des collectivités
relevant du présent article sont définies et modifiées par la loi après
consultation de leur assemblée délibérante. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 198, présenté par Mmes Borvo et Mathon, MM. Bret, Autain et
Autexier, Mmes Beaudeau et Beaufils, M. Biarnès, Mme Bidard-Reydest, M.
Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam et
Loridant, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar et Mme Terrade, est ainsi
libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 74 de
la Constitution, remplacer les mots : "un statut particulier", par les mots :
"une organisation particulière". »
L'amendement n° 30, présenté par M. Garrec, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 74 de
la Constitution, après les mots : " un statut " supprimer le mot : "
particulier ". »
La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 198.
M. Robert Bret.
L'amendement n° 198 vise à remplacer le concept nouveau de « statut
particulier » attribué aux nouvelles collectivités d'outre-mer par celui,
actuellement inscrit dans la Constitution, d'« organisation particulière ».
Cet amendement n'est pas de pure forme. En effet, l'utilisation des termes «
statut particulier » en des emplacements aussi divers que l'article 4 relatif à
l'ensemble des collectivités territoriales ou l'article 9 qui a trait aux
collectivités d'outre-mer peut entraîner, semble-t-il une confusion, un
désordre, voire - pourquoi pas ? - le « bazar » dénoncé par M. Jean-Louis
Debré, président de l'Assemblée nationale.
Nous vous proposons donc de clarifier le débat en adoptant notre
amendement.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 30 et pour
donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 198.
M. René Garrec,
rapporteur.
L'expression « statut particulier » figure à la fois au
premier alinéa de l'article 72 et au premier alinéa de l'article 74. Toutefois,
il ne recouvre pas la même réalité juridique, ce qui est une source de
confusion.
A l'article 74, l'usage de cet adjectif, hérité de la rédaction actuelle,
n'est pas indispensable, car la référence à un statut tenant compte des
intérêts propres de chaque collectivité est suffisamment explicite et met en
exergue la notion d'intérêt propre. Il nous paraît donc préférable de supprimer
cette précision.
Je note par ailleurs que l'amendement n° 198 est satisfait sur le fond par
notre amendement n° 30.
M. le président.
L'amendement n° 198 est-il maintenu, monsieur Bret ?
M. Robert Bret.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 198 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 30 ?
Mme Brigitte Girardin,
ministre.
Le Gouvernement y est favorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 30.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 84, présenté par Mme Blandin, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 74
de la Constitution, remplacer les mots : "après avis", par les mots : "après
avoir recueilli le consentement". »
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin.
Je vais rouvrir un débat, cette fois non plus par rapport aux habitants ou aux
électeurs, mais par rapport à l'avis de l'assemblée délibérante d'un lieu où
l'on voudrait « parachuter » un statut ou une organisation particulière par le
biais d'une loi organique.
Le Parlement est bien entendu responsable de ses choix, de ses votes lors de
la discussion d'une loi organique. Il semble néanmoins quelque peu curieux,
alors que notre assemblée vient d'envisager que les électeurs se prononceront
en d'autres lieux pour rendre un consentement et non plus simplement un avis,
que, dans l'article 9, alinéa 2, il ne soit prévu pour l'assemblée délibérante
du lieu qu'un simple avis.
Il me semble que quand on change le statut d'une collectivité, d'un territoire
jouissant d'un statut spécial, on pourrait, pour le moins, recueillir le
consentement de l'assemblée délibérante concernée.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. René Garrec,
rapporteur.
Il est possible de recueillir le consentement des électeurs
sur une question relative au changement de régime constitutionnel applicable à
la collectivité ; mais concernant l'assemblée délibérante de la collectivité,
cela ne paraît pas possible.
La commission a donc émis, en toute logique, un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Girardin,
ministre.
L'amendement de Mme Blandin vise à faire partager, entre le
Parlement et l'assemblée délibérante d'une collectivité de l'article 74, le
pouvoir de voter la loi organique.
Il n'entre pas dans les intentions du Gouvernement d'accorder aux assemblées
délibérantes un tel pouvoir. Cette démarche est peu conforme à la tradition
française et davantage inspirée par le fédéralisme.
Le Gouvernement y est donc défavorable.
M. le président.
La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse.
Je ne suis pas très favorable à cet amendement, mais je voudrais faire
remarquer que si l'amendement de Mme Blandin est inspiré par le fédéralisme et,
par conséquent, est contraire à la tradition française, ce qui lui vaut un avis
défavorable du Gouvernement, un amendement précédent, qui avait exactement le
même objet, a été voté par tout le monde et a reçu un avis favorable du
Gouvernement.
C'est la souveraineté nationale à géométrie variable dans le camp du
Gouvernement ! Or il n'y a qu'une seule souveraineté nationale. Tout cela se
paiera cher, un jour !
M. Robert Bret.
Pas besoin de la brader !
M. le président.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin.
Permettez-moi de récuser la notion de partage de l'exercice du vote de la loi
organique entre l'assemblée délibérante concernée et le Parlement.
Il y a une chronologie, un agenda à respecter. Il convient de demander à
l'assemblée délibérante concernée de donner son consentement. Il me semble tout
à fait incroyable que, dans une loi relative à la décentralisation, il soit
envisagé, pour des collectivités à statut particulier, de « parachuter » depuis
Paris un nouveau statut sans même leur demander leur avis.
M. Georges Othily.
Mais non !
M. Michel Charasse.
On fait ce qu'on veut ! On est dans la République ou on n'y est pas !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 84.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 31, présenté par M. Garrec, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Après les mots : "sous réserve de celles", rédiger comme suit la fin du
quatrième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 74 de la
Constitution : "déjà exercées par elle, le transfert de compétences de l'Etat
ne peut porter sur les matières énumérées au quatrième alinéa de l'article 73,
précisées et complétées, le cas échéant, par la loi organique ;" »
Le sous-amendement n° 114, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par l'amendement n° 31, remplacer le mot : "énumérées"
par le mot : "visées". »
L'amendement n° 110, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
« Après les mots : "ne peut porter sur" rédiger comme suit la fin du quatrième
alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 74 de la Constitution :
"les matières qui relèvent, par nature et par nécessité, de la souveraineté
nationale et de l'Etat." »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 31.
M. René Garrec,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet une coordination avec
l'amendement n° 27 de la commission portant sur l'article 8 que nous
examinerons ultérieurement et qui vise à transférer à l'article 73 de la
Constitution l'énumération des matières non susceptibles de transfert car elles
sont de nature régalienne.
M. le président.
La parole est à M. Michel Charasse, pour défendre le sous-amendement n°
114.
M. Michel Charasse.
Monsieur le président, je suis bien ennuyé, parce que ce sous-amendement est
la conséquence d'un amendement que j'ai déposé à l'article 8. Mais comme cet
article 8 est provisoirement au « frigo » pour tenir compte des horaires
aériens, je ne sais pas comment on peut faire !
On ne peut pas le voter puisque c'est un sous-amendement de conséquence. Si
l'amendement que j'ai déposé à l'article 8 n'est pas adopté, ce sous-amendement
n° 114 n'a plus d'objet. En revanche, si mon amendement à l'article 8 est
adopté, ce sous-amendement reste en discussion.
M. Georges Othily.
On le retire !
M. Michel Charasse.
Tu retires les tiens, mais moi je ne retire pas les miens !
(Sourires.)
M. René Garrec,
rapporteur.
Il n'aura plus d'objet !
M. Michel Charasse.
Voyons, mes chers collègues, j'ai posé une question précise !
J'ai déposé un amendement de fond à l'article 8, et le sous-amendement n° 114
est un texe de conséquence. Si l'amendement à l'article 8 n'est pas adopté, le
sous-amendement n° 114 n'a plus d'objet. En revanche, si l'amendement à
l'article 8 est adopté, le sous-amendement n° 144 reste en discussion.
Monsieur le président, je vous laisse le soin de vous débrouiller avec tout
cela !
M. le président.
De toute façon, monsieur Charasse, vous interviendrez à l'article 8.
M. Michel Charasse.
Je vous prie de m'excuser, monsieur le président, mais il n'est pas question
de cela !
Puisqu'il s'agit d'un sous-amendement de conséquence, il faudrait d'abord
voter l'article 8, et en conséquence réserver le vote sur l'amendement n° 31 et
le sous-amendement n° 114.
M. le président.
Monsieur Charasse, vous étiez présent lorsqu'une demande de priorité a été
formulée. La priorité a été ordonnée par l'assemblée souveraine. Je suis donc
obligé d'y souscrire.
M. Michel Charasse.
Certes, monsieur le président. Mais, à « l'assemblée souveraine », personne ne
lui a expliqué qu'il y avait des amendements de conséquence. Il aurait fallu à
tout le moins nous permettre, grâce à une suspension de séance, de modifier nos
amendements et nos sous-amendements.
On peut faire du travail constitutionnel n'importe comment, mais cela devient
lassant !
M. le président.
Vous auriez pu le demander à ce moment-là, monsieur Charasse !
M. Michel Charasse.
Peut-être, mais la présidence aurait pu également s'apercevoir qu'il y avait
des amendements de conséquence et ne pas soumettre au Sénat n'importe quoi !
(Protestations sur les travées du RPR. - Marques d'approbation sur les
travées du groupe socialiste.)
M. le président.
Je vous donne maintenant la parole, monsieur Charasse, pour défendre
l'amendement n° 110.
M. Michel Charasse.
Monsieur le président, pardon de m'être emporté, mais vous n'étiez pas
personnellement visé par mes propos. Vous savez l'affection que j'ai pour vous
!
(Rires.)
De temps en temps, cela fait du bien. Et il paraît que cela se passe de la
même façon au conseil général des Vosges !
(Nouveaux rires.)
Il est, je crois, dangereux d'établir une liste limitative des prérogatives
qui ne peuvent relever que de l'Etat car elles touchent à la souveraineté
nationale et qu'elles sont par nature régaliennes, c'est M. le rapporteur qui
a prononcé ce mot voilà un instant.
Non seulement ce serait confiner l'Etat dans des compétences étroites, alors
qu'il a toujours une compétence générale - c'est du droit français, c'est même
du droit international -, mais encore on prend le risque d'oublier certaines
matières.
C'est d'ailleurs ce qu'a relevé la commission des lois à juste titre en
prévoyant que la liste pourrait être complétée et précisée par une loi
organique, qui peut à son tour en oublier, mais en retenant la formule qui
existe actuellement à la fin de l'article 34 de la Constitution.
Je pense qu'il est donc préférable d'interdire des transferts dans des
domaines qui relèvent, à l'évidence, de la souveraineté nationale, donc de
l'Etat, sans prendre la peine de les énumérer. Englobons tout d'une manière
générale, c'est beaucoup plus simple !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 114 et sur
l'amendement n° 110 ?
M. René Garrec,
rapporteur.
Le sous-amendement n° 114 étant un texte de coordination avec
un amendement que la commission a rejeté, elle a donc émis un avis
défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 110, je note qu'il est vrai, mon cher
collègue, qu'une énumération n'est jamais une solution idéale. Elle a cependant
le mérite de la clarté par rapport à l'expression : « les matières relevant par
nature et par nécessité de la souveraineté nationale », qui est imprécise et
dont la signification concrète découlera par définition de la jurisprudence.
En outre, l'amendement n° 27 de la commission a prévu que la liste serait
complétée, le cas échéant, par une loi organique, ce qui règle le problème.
Par conséquent, la commission est défavorable à l'amendement n° 110.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 31, le sous-amendement n°
114 et l'amendement n° 110 ?
Mme Brigitte Girardin,
ministre.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 31.
A propos du sous-amendement n° 114 et de l'amendement n° 110 de M. Charasse,
je précise que le Gouvernement entend conserver l'énumération d'une série de
matières qui sont régaliennes par détermination de la Constitution et qui ne
peuvent en aucun cas être attribuées aux collectivités d'outre-mer. Il estime
que ce choix doit relever du pouvoir constituant et non de la seule décision du
Conseil constitutionnel.
Je rappelle sur ce point que nous sommes exactement dans la ligne du projet de
révision qui avait été adopté en 1999 dans les mêmes termes par les deux
chambres du Parlement et dans lequel le choix de l'énumération dans la
Constitution des matières réservées à l'Etat avait été approuvé, y compris par
vous, monsieur Charasse.
M. Michel Charasse.
Pas sûr !
Mme Brigitte Girardin,
ministre.
Si, nous avons vérifié !
M. Michel Charasse.
Ah bon ! C'est une erreur !
Mme Brigitte Girardin,
ministre.
Il convient de remarquer que la Constitution ne fixe que la
liste des matières non transférables, mais qu'elle n'oblige en rien à
transférer les matières qui n'y figurent pas. En aucun cas le transfert de
compétences n'est définitif, le législateur organique pouvant toujours rendre à
l'Etat une compétence de la collectivité. Il n'est donc pas dangereux, il est,
au contraire, très raisonnable de fixer une telle énumération dans la
Constitution.
En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur le
sous-amendement n° 114 et sur l'amendement n° 110.
M. le président.
Monsieur Charasse, on peut toujours se tromper. Une erreur est pardonnée dès
qu'elle est avouée !
M. Michel Charasse.
Monsieur le président, je vais régler tout ça !
M. le président.
La parole est à M. Charasse, pour explication de vote sur le sous-amendement
n° 114.
M. Michel Charasse.
Si vous le permettez, monsieur le président, pour gagner du temps, mon
explication de vote portera en même temps sur le sous-amendement n° 114 et sur
l'amendement n° 110.
M. le président.
Merci !
M. Michel Charasse.
Etant donné que le sous-amendement n° 114 est la conséquence d'un amendement
qui, pour l'instant, est un OVNI, puisqu'il porte sur un article qui n'a pas
été examiné, et que je ne veux pas compliquer la situation - mais je fais la
remarque quand même ! - je le retire.
M. Jean-Patrick Courtois.
Ah !
M. Michel Charasse.
On ne va pas voter sur une disposition qui n'a pas de support !
En ce qui concerne l'amendement n° 110, je veux bien me ranger aux arguments
du rapporteur. Selon lui, c'est une mauvaise chose de faire une énumération,
car on risque toujours d'oublier des prérogatives. Il prend toutefois la
précaution d'ajouter que la liste sera précisée, complétée, le cas échéant, par
une loi organique. Je ferai remarquer qu'il prend une position contraire à
celle de Mme le ministre, qui approuve quand même l'amendement n° 31 de M.
Garrec. Mais peu importe !
Quant à la référence au scrutin de 1999, je pense, madame Girardin, que vous
voulez parler de la Nouvelle-Calédonie. On peut avoir du remords, madame !
Voilà tout ce que je voulais dire, sans être désagréable à l'égard de
personne.
Cela dit, je retire mon amendement et mon sous-amendement, comme cela vous
êtes contents !
(Oui ! sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Monsieur Charasse, si vous l'aviez fait tout de suite, on aurait gagné un peu
de temps ! Cela étant, je vous remercie de vos explications.
Le sous-amendement n° 114 et l'amendement n° 110 sont retirés.
M. Michel Charasse.
J'aurais même pu le faire dans les couloirs ! Cela va encore plus vite !
(Sourires.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 31.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 63, présenté par M. Flosse, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le cinquième alinéa du texte proposé par cet article pour
l'article 74 de la Constitution :
« "- les principes que doit suivre la collectivité pour l'organisation et le
fonctionnement de ses institutions ainsi que le régime électoral de son
assemblée délibérante ;" »
La parole est à M. Gaston Flosse.
M. Gaston Flosse.
Le statut d'autonomie confère à la Polynésie française, sur le plan interne,
des compétences très larges. De ce fait, il convient d'adopter des dispositions
visant à faciliter le fonctionnement de ses institutions. Or la jurisprudence
constitutionnelle interprète restrictivement la notion de règles dans le
domaine de l'organisation des institutions locales.
Nous demandons donc que la loi organique fixe seulement les règles principales
et non le détail du fonctionnement des institutions. En revanche, il va de soi
que le régime électoral devra être précisé par la loi organique. Tel est
l'objet du présent amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. René Garrec,
rapporteur.
Si la loi organique statutaire n'a pas à définir jusque dans
le détail les règles d'organisation et de fonctionnement de la collectivité,
elle ne saurait se limiter à en fixer les principes directeurs. En matière
d'organisation et de fonctionnement institutionnels, la notion de « principes »
n'a d'ailleurs pas de véritable signification ! Il conviendra donc, lors de
l'examen du projet de loi organique statutaire, de faire le départ entre
l'essentiel et l'accessoire.
En outre, il ne paraîtrait pas justifié d'admettre une telle possibilité en
faveur de la Polynésie française alors qu'elle ne serait pas offerte à la
Nouvelle-Calédonie, qui bénéficie pourtant d'une autonomie encore plus
poussée.
La commission souhaite donc le retrait de cet amendement. Sinon, elle
émettrait un avis défavorable.
M. le président.
Monsieur Flosse, répondez-vous à la demande de M. le rapporteur ?
M. Gaston Flosse.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 63 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 64, présenté par M. Flosse, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le septième alinéa du texte proposé par cet article pour
l'article 74 de la Constitution :
« "Les collectivités dotées de l'autonomie se gouvernent librement et
démocratiquement. La loi organique détermine les conditions dans lesquelles :".
»
L'amendement n° 32, présenté par M. Garrec, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Au septième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 74 de la
Constitution, remplacer les mots : "détermine également" par les mots : "peut
également déterminer". »
La parole est à M. Gaston Flosse, pour défendre l'amendement n° 64.
M. Gaston Flosse.
Cette rédaction, adoptée par le constituant en 1999, traduisait la volonté de
ce dernier de faire bénéficier la Polynésie française d'une avancée statutaire
correspondant aux aspirations de la grande majorité des Polynésiens.
Afin, d'une part, de souligner l'évolution statutaire que vont accomplir ces
collectivités locales et, d'autre part, de mettre en adéquation les principes
juridiques fondamentaux et leur système institutionnel, il est proposé
d'inscrire dans la loi fondamentale la notion de gouvernement libre et
démocratique.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 32 et pour
donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 64.
M. René Garrec,
rapporteur.
Cet amendement tend à rendre le cadre constitutionnel
consacré aux collectivités d'outre-mer le plus souple possible pour permettre
l'aménagement de statuts « à la carte ». Il ne faut pas imposer à une
collectivité, même dotée de l'autonomie, certaines dispositions qui ne
correspondraient ni à ses besoins ni à ses souhaits. Je pense, par exemple, aux
mesures de discrimination positive en faveur de sa population autochtone.
S'agissant de l'amendement n° 64, bien que l'expression « se gouverner
librement et démocratiquement » ait été retenue dans le projet de loi
constitutionnelle de 1999, le verbe « se gouverner » est intimement lié à la
notion d'Etat, les collectivités ne pouvant que « s'administrer ». Ce
vocabulaire paraît antinomique de la notion de collectivité territoriale,
fût-elle dotée de l'autonomie.
La commission souhaite donc le retrait de cet amendement, sinon elle émettrait
un avis défavorable.
M. le président.
M. Gaston Flosse, accédez-vous à la demande de M. Garrec ?
M. Gaston Flosse.
Je souhaite entendre préalablement l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Girardin,
ministre.
Le Gouvernement souhaite le retrait de l'amendement n° 64.
Monsieur le président du gouvernement de la Polynésie française, ce territoire
a évidemment vocation à bénéficier, le premier, de ces nouvelles dispositions
de la Constitution sur l'autonomie.
Ce terme d'« autonomie », qui figurait dans l'article 77 d'origine de la
Constitution pour les Etats de la Communauté, y retrouve donc sa place. Il ne
figurait jusqu'ici que dans la loi organique statutaire de la Polynésie de
1996.
La notion de libre gouvernement est, à nos yeux, synonyme de celle
d'autonomie. L'autonomie implique que soit reconnue à la collectivité qui en
bénéficie une marge de manoeuvre et d'appréciation, et un espace de décision
beaucoup plus important que ceux qui sont dévolus à une simple autorité
administrative. La notion de libre gouvernement pourra donc être inscrite dans
la loi organique statutaire sans qu'il soit nécessaire de l'inscrire dans la
Constitution. C'est ce que fera le Gouvernement ; j'en prends l'engagement
aujourd'hui devant vous, monsieur le président du gouvernement de la Polynésie.
Vous aurez pleinement satisfaction dans le projet de loi organique sur lequel
nous avons, d'ailleurs, commencé déjà à travailler.
Je vous serais donc reconnaissante de retirer votre amendement.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 32, qui permet au législateur
organique de moduler les différentes composantes de l'autonomie en les rendant
optionnelles, alors que la rédaction initiale du projet conduisait à rendre
obligatoire l'ensemble des dispositions en cause.
M. le président.
Maintenez-vous votre amendement, monsieur Flosse ?
M. Gaston Flosse.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 64 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 32.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 237, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le huitième alinéa du texte proposé par cet article pour
l'article 74 de la Constitution :
« "- le Conseil d'Etat exerce un contrôle juridictionnel spécifique sur
certaines catégories d'actes de l'assemblée délibérante intervenant au titre
des compétences qu'elle exerce dans le domaine de la loi ;". »
L'amendement n° 33, présenté par M. Garrec, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Au huitième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 74 de la
Constitution, après les mots : "contrôle juridictionnel spécifique", insérer
les mots : "devant le Conseil constitutionnel ou devant le Conseil d'Etat".
»
Le sous-amendement n° 247, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par l'amendement n° 33, supprimer les mots : "devant
le Conseil constitutionnel ou". »
L'amendement n° 65, présenté par M. Flosse, est ainsi libellé :
« Au huitième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 74 de la
Constitution, remplacer les mots : "intervenant au titre des compétences
qu'elle exerce" par les mots : "ayant le caractère de lois du pays, lorsque
l'assemblée délibérante intervient". »
La parole est à Mme la ministre, pour défendre l'amendement n° 237.
Mme Brigitte Girardin
ministre.
Le Gouvernement souhaite que le contrôle juridictionnel
spécifique des actes de l'assemblée délibérante d'une collectivité d'outre-mer
dotée de l'autonomie intervenant dans le domaine de la loi puisse être exercé
par le Conseil d'Etat statuant en premier et dernier ressort. Tel est l'objet
de l'amendement n° 237.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 33.
M. René Garrec,
rapporteur.
Cet amendement précise que le contrôle juridictionnel auquel
pourront être soumis certains actes pris par la collectivité dans des matières
qui, en métropole, relèvent du domaine de la loi sera, selon le cas, organisé
devant le Conseil d'Etat ou devant le Conseil constitutionnel.
L'article 77 de la Constitution visant expressément le Conseil constitutionnel
comme étant compétent pour exercer un contrôle
a priori
sur les lois du
pays calédoniennes, l'absence de cette mention dans l'article 74 aurait conduit
à rendre impossible cette éventualité pour les collectivités d'outre-mer.
Lors de sa réunion du 29 octobre, la commission a décidé de se rallier à
l'amendement n° 237 présenté par le Gouvernement, en estimant que les actes
pris par l'assemblée délibérante de la collectivité dans des matières relevant
en métropole du domaine de la loi demeurent des actes de nature réglementaire,
ce qui prédispose le Conseil d'Etat à en être le juge naturel.
M. Michel Charasse.
Très bien !
M. René Garrec,
rapporteur.
La commission retire donc son amendement n° 33 au profit de
celui du Gouvernement.
M. le président.
L'amendement n° 33 est retiré.
En conséquence, le sous-amendement n° 247 n'a plus d'objet.
M. Michel Charasse.
Il est satisfait, monsieur le président !
M. le président.
La parole est à M. Gaston Flosse, pour défendre l'amendement n° 65.
M. Gaston Flosse.
Compte tenu des larges compétences dont dispose la Polynésie française, il
convient de permettre que les actes de l'assemblée délibérante qui
interviennent dans les matières de l'article 34 et qui font l'objet d'un
contrôle juridictionnel spécifique soient qualifiés de lois du pays afin de les
distinguer des actes adoptés par cette même institution qui demeurent de nature
réglementaire.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 65 ?
M. René Garrec,
rapporteur.
L'expression de « lois du pays », retenue dans le projet de
loi constitutionnelle de 1999, trouve son origine dans l'accord de Nouméa et a
été consacrée dans la loi statutaire de la Nouvelle-Calédonie mais pas dans la
Constitution, puisque l'article 77 fait seulement référence à « certaines
catégories d'actes ».
Par ailleurs, dans la Constitution, le mot « loi » n'est utilisé que pour
désigner les actes pris par le Parlement.
En outre, dans le nouvel article 74 fixant le cadre constitutionnel de
l'ensemble des collectivités d'outre-mer, dont la Polynésie française, il n'est
plus question de « pays d'outre-mer » : l'expression « lois du pays » n'a donc
plus de justification.
Je demande par conséquent à notre collègue de retirer son amendement, sinon la
commission émettrait un avis défavorable.
M. le président.
Monsieur Flosse, votre amendement est-il maintenu ?
M. Gaston Flosse.
Je souhaite entendre l'avis du Gouvernement, monsieur le président.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Girardin,
ministre.
Il ne nous paraît pas nécessaire de fixer d'ores et déjà dans
la Constitution la dénomination des actes que pourra prendre la Polynésie
française dans le domaine de la loi. C'est le législateur organique qui y
pourvoira. Il pourra naturellement retenir, comme vous le souhaitez, le terme
de « loi du pays ».
La loi organique définira également la portée du contrôle juridictionnel
spécifique dont ces actes seront justiciables devant le Conseil d'Etat, ce qui
leur conférera une valeur supérieure aux actes administratifs ordinaires.
Je souhaite donc que M. le président du gouvernement de la Polynésie française
puisse retirer son amendement. Je l'assure que ses préoccupations seront
couvertes dans la loi organique.
M. le président.
Monsieur Flosse, acceptez-vous de retirer votre amendement ?
M. Gaston Flosse.
Avec plaisir !
M. le président.
L'amendement n° 65 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 237.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 111, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
« Au neuvième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 74 de la
Constitution, remplacer les mots : "le Conseil constitutionnel" par les mots :
"le Conseil d'Etat". »
L'amendement n° 66 rectifié, présenté par M. Flosse, est ainsi libellé :
« Au neuvième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 74 de la
Constitution, après les mots : "Conseil constitutionnel", insérer les mots :
"saisi notamment par les autorités de la collectivité". »
La parole est à M. Michel Charasse, pour défendre l'amendement n° 111.
M. Michel Charasse.
Le débat est presque le même que celui que nous venons d'avoir sur
l'amendement n° 237 du Gouvernement, qui a pour objet de confier le contentieux
au Conseil d'Etat et qui a été adopté avec l'accord de la commission des lois,
laquelle a retiré son propre amendement.
Le neuvième alinéa du texte proposé par l'article 9 du projet de loi pour
l'article 74 de la Constitution confierait le soin au Conseil constitutionnel
d'intervenir lorsque l'assemblée délibérante modifie une loi promulguée
postérieurement à l'entrée en vigueur du statut de la collectivité.
En encombrant le Conseil constitutionnel de compétences secondaires mais
accaparantes, intéressant le fonctionnement de collectivités d'outre-mer, le
constituant risque d'affaiblir l'aptitude du Conseil à faire face, dans les
brefs délais qui lui sont impartis, et avec l'efficacité indispensable, à des
tâches beaucoup plus essentielles, à savoir le contrôle de la
constitutionnalité des lois organiques, des traités, des lois ordinaires
nationales et des règlements des assemblées parlementaires, sans oublier
l'élection présidentielle et les contentieux électoraux.
Une telle surcharge serait d'autant plus malvenue que le Conseil
constitutionnel n'est pas véritablement armé pour examiner des contentieux
concernant des délibérations d'assemblées locales. Or M. Garrec vient de dire,
très justement, que ces délibérations sont des actes administratifs. Il a
proposé de se rallier à l'amendement présenté par le Gouvernement puisqu'il lui
semblait - et il a siégé longtemps au Conseil d'Etat - que cela relevait, par
nature, du Conseil d'Etat.
Par conséquent, il ne me paraît pas raisonnable de maintenir le Conseil
constitutionnel à cet alinéa : il vaudrait mieux le remplacer par le Conseil
d'Etat. C'est lui qui examine habituellement le contentieux de toutes les
délibérations locales.
J'ajoute que le Conseil d'Etat a reçu, par l'article 37 de la Constitution, un
pouvoir de déclassement des lois antérieures à la Constitution de 1958 :
lorsqu'elles se trouvaient, après 1958, dans le domaine réglementaire, elles
pouvaient être déclassées par le Conseil d'Etat.
Il y a là une pratique, une habitude et un savoir-faire qui permettent
d'éviter d'encombrer le Conseil constitutionnel avec un domaine qui n'est
vraiment pas le sien. C'est pourquoi je propose, par l'amendement n° 111, de
remplacer les mots : « le Conseil constitutionnel » par les mots : « le Conseil
d'Etat », comme l'a fait le Gouvernement tout à l'heure.
M. le président.
La parole est à M. Gaston Flosse, pour présenter l'amendement n° 66
rectifié.
M. Gaston Flosse.
Le neuvième alinéa du texte proposé par l'article 9 du projet de loi pour
l'article 74 de la Constitution prévoit un mécanisme de délégalisation des lois
intervenues postérieurement à l'entrée en vigueur du statut, afin de garantir
la sécurité juridique de l'ordre normatif des collectivités d'outre-mer. Ainsi,
les assemblées délibérantes pourraient modifier une loi qui serait intervenue
dans le domaine de compétence qui leur est réservé, à condition que le Conseil
constitutionnel l'ait préalablement constaté.
Par cet amendement, nous vous proposons de préciser cette possibilité, tout en
laissant à la loi organique le soin de définir les institutions qui seront
habilitées à exercer ce droit et les conditions dans lesquelles il
s'exercera.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 111 ?
M. René Garrec.
rapporteur.
Nous tombons-là dans le domaine du ciseau de dentellière, mon
cher collègue, et de la subtilité. Tout à l'heure, j'étais d'accord avec votre
analyse.
M. Michel Charasse.
C'est la même !
M. René Garrec,
rapporteur.
Non, c'est la loi qui s'immisce dans la réglementation de la
collectivité. S'agissant d'une disposition législative qu'il faut déclasser
pour permettre à la collectivité d'outre-mer de retrouver sa compétence, il
paraît logique de prévoir l'intervention du Conseil constitutionnel dans ce cas
précis, comme cela résulte du deuxième alinéa de l'article 37 relatif au
partage du domaine de la loi et du règlement.
M. Michel Charasse.
Le Conseil d'Etat l'a fait dans le cadre de l'article 37 !
M. René Garrec,
rapporteur.
C'est la loi qui s'immisce dans le domaine du règlement et
c'est donc le Conseil constitutionnel qui est compétent.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Girardin,
ministre.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Il estime, en effet, que s'agissant de la contestation d'une loi votée par le
Parlement, qui est intervenue en dehors du champ de compétence qui lui est
attribué par la Constitution et la loi organique, c'est le Conseil
constitutionnel qui est la bonne juridiction.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 66 rectifié ?
M. René Garrec,
rapporteur.
Le texte initial de cet amendement avait pour conséquence de
réserver le droit de saisine du Conseil constitutionnel aux seules autorités de
la collectivité. Cette exclusivité, ainsi que la considération selon laquelle
la désignation des titulaires du droit de saisine pour la mise en oeuvre de la
procédure de déclassement relève de la loi organique, avaient conduit la
commission à donner un avis défavorable sur l'amendement n° 66.
La commission ne s'étant pas prononcée sur la rectification consistant à
introduire l'adverbe « notamment », elle s'en remet à la sagesse du Sénat sur
cet amendement n° 66 rectifié.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Girardin,
ministre.
Favorable.
M. le président.
La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote sur l'amendement
n° 111.
M. Michel Charasse.
Si je comprends bien, pour les lois antérieures à 1958, modifiées par décret,
c'est le Conseil d'Etat qui est compétent. Mais pour une loi modifiée par une
délibération d'une assemblée locale, c'est le Conseil constitutionnel qui devra
être saisi. Plus cela baisse, plus cela monte !
(Sourires.)
Or le
Conseil constitutionnel n'est pas vraiment armé pour cela.
En outre, étant donné que le Gouvernement a accepté l'amendement n° 66
rectifié de M. Flosse pour que le Conseil constitutionnel puisse être saisi par
les autorités locales, cela veut dire que le Conseil constitutionnel peut être
saisi tous les jours de dix questions portant sur dix lois ou dix parties de
loi auxquelles il devra répondre, tout en réglant, dans le même temps, les
contentieux électoraux et tout le reste ! D'autant, monsieur Garrec, qu'on ne
modifie pas les délais de réponse du Conseil constitutionnel tels qu'ils
figurent actuellement dans la Constitution : c'est un mois ou huit jours. En
fin d'année, le Conseil constitutionnel doit se prononcer en même temps sur les
lois de finances et sur bien d'autres textes. S'il doit, en plus, examiner
dix-sept demandes d'une assemblée locale...
(M. Gaston Flosse
s'exclame.)
Permettez, mon cher collègue ! Je vous dis simplement que le
Conseil d'Etat est mieux armé pour faire face à ce genre de chose que le
Conseil constitutionnel.
Maintenir au Conseil d'Etat, le droit de se prononcer sur les lois antérieures
à 1958 modifiées par décret, mais lui interdire de le faire lorsqu'il s'agit de
lois modifiées par de simples délibérations d'assemblées locales en laissant au
Conseil constitutionnel le soin de le faire, cela veut dire, je le répète, que
plus cela baisse et plus cela monte. Je maintiens donc mon amendement.
M. le président.
La parole est à M. le vice-président de la commission.
M. Patrice Gélard,
vice-président de la commission des lois constitutionnelles, de législation,
du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Je
souhaite simplement rappeler à M. Charasse que, aux termes du deuxième alinéa
de l'article 37 de la Constitution lorsqu'une loi est modifiée par la voie
réglementaire, c'est le Conseil constitutionnel qui est compétent. C'est
exactement de même nature !
M. Michel Charasse.
Non !
M. Patrice Gélard,
vice-président de la commission.
Par conséquent, l'argumentation qui
vient d'être développée n'est pas pertinente.
M. Michel Charasse.
Pas pour les lois antérieures à 1958 !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 111.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 66 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 112, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
« Au début du dixième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article
74 de la Constitution, ajouter les mots : "Sous réserve des dispositions de
l'article 1er,". »
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse.
Le dixième alinéa de l'article 9 s'inspire manifestement de ce qui a été fait,
au titre XIII, en faveur de la Nouvelle-Calédonie. Les dispositions insérées
sous le titre XIII permettent, en effet, à la Nouvelle-Calédonie de réglementer
certaines matières en s'affranchissant des principes fondamentaux de la
République, notamment le principe d'égalité des citoyens et le principe de
non-discrimination.
Ces dispositions sont, à l'évidence, exceptionnelles et ne dérogent aux
principes sacrés de la République qu'à titre provisoire et transitoire, puisque
la Nouvelle-Calédonie doit prochainement accéder à l'indépendance si sa
population le souhaite.
Ces règles exceptionnelles, qui remettent en cause des principes intangibles
et sacrés, ne sauraient être généralisées outre-mer, sauf à admettre que
l'outre-mer n'appartient plus à la République. Il y a des moments où on se le
demande !
Il est donc proposé de préciser que les mesures « justifiées par les
nécessités locales » devront respecter les principes définis à l'article 1er de
la Constitution.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. René Garrec,
rapporteur.
L'alinéa que l'amendement propose de modifier tend,
précisément, à permettre de déroger au principe d'égalité. La réserve de
l'article 1er de la Constitution entre donc en contradiction avec le
dispositif.
La commission est, par conséquent, défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Girardin
ministre.
Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, qui
ne lui paraît pas utile.
Il va de soi que le statut des collectivités d'outre-mer de l'article 74 et
qui succéderont aux territoires d'outre-mer s'inscrit pleinement dans le cadre
de la Constitution, donc des principes fondamentaux contenus dans son article
1er tels que l'égalité des citoyens devant la loi ou l'indivisibilité de la
République.
M. le président.
La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse.
Ce que je veux dire est très clair : plus de souveraineté nationale, puisque
localement on fait ce que l'on veut ; plus de principe d'égalité. Mais
rassurez-moi, madame la ministre : la République est toujours là quand cela va
mal ! Vous voyez ce que je veux dire et je n'insiste donc pas ! Par conséquent,
il n'y a plus rien, sauf la République, quand cela va mal.
Je maintiens l'amendement n° 112, parce que je défendrai la République
jusqu'au bout !
(M. Gaston Flosse s'exclame.)
On est bon pour payer !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 112.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 67, présenté par M. Flosse, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour
l'article 74 de la Constitution :
« Les collectivités peuvent participer, sous le contrôle de l'Etat, à
l'exercice des compétences qu'il conserve, dans le respect des garanties
accordées sur l'ensemble du territoire national pour l'exercice des libertés
publiques. »
Le sous-amendement n° 240, présenté par M. Garrec, au nom de la commission,
est ainsi libellé :
« Au début du texte proposé par l'amendement n° 67 pour l'avant-dernier alinéa
de l'article 74 de la Constitution, remplacer les mots : "les collectivités
peuvent" par les mots : "la collectivité peut". »
L'amendement n° 113, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
« Dans le onzième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 74 de
la Constitution, après les mots : "qu'il conserve", insérer les mots : "autres
que celles relevant, par nature et par nécessité, de la souveraineté nationale,
et". »
La parole est à M. Gaston Flosse, pour défendre l'amendement n° 67.
M. Gaston Flosse.
Le dispositif prévu par le onzième alinéa est destiné à renforcer l'exercice
des compétences des collectivités d'outre-mer dotées de l'autonomie, en
l'occurrence de la Polynésie française. Fréquemment, en effet, les compétences
des collectivités sont limitées par celles de l'Etat en raison de l'imbrication
des matières.
Cette intervention du territoire dans la sphère de compétence de l'Etat se
révèle également nécessaire lorsqu'il s'agit de prendre des mesures limitées,
afin d'assurer la cohérence et la bonne exécution de la réglementation
territoriale.
Pour résoudre les problèmes ci-dessus mentionnés et garantir ainsi le plein
exercice de l'autonomie du territoire, il est proposé de substituer le terme «
participer » à celui d'« associer ». Ce terme permet de garantir plus
clairement une réelle participation de la collectivité dans les domaines
susvisés au quatrième alinéa. L'Etat conserve, bien évidemment, le contrôle de
cette participation puisqu'il lui revient, d'une part, de décider des
transferts qui sont possibles et, d'autre part, de surveiller leur correcte
utilisation.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement n° 240 et
pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 67.
M. René Garrec,
rapporteur.
La commission est favorable à l'amendement n° 67 de notre
collègue Gaston Flosse à condition qu'il soit modifié par le sous-amendement
qu'elle présente.
La notion de participation paraît plus dynamique et ouvre la possibilité à des
collectivités de proposer à l'Etat sa participation à l'exercice de certaines
compétences. Il convient simplement de viser « la collectivité » et non « les
collectivités », car la loi organique statutaire sera prise pour chaque
collectivité.
M. le président.
La parole est à M. Michel Charasse, pour présenter l'amendement n° 113.
M. Michel Charasse.
Je le retire, monsieur le président, puisqu'un amendement analogue a été
repoussé il y a dix minutes. Mais je maintiens quand même mon point de vue !
M. le président.
L'amendement n° 113 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Girardin,
ministre.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 67 et au
sous-amendement n° 240.
M. le président.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 240.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 67, modifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 9, modifié.
M. Michel Charasse.
Je vote contre.
M. Robert Bret.
Le groupe CRC s'abstient.
(L'article 9 est adopté.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen de l'article 9, appelé par priorité.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 8.
Article 8