Art. 3
Dossier législatif : projet de loi relatif aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom
Art. 4

Article additionnel après l'article 3

M. le président. L'amendement n° 27, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Après l'article 29-2 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 susmentionnée, est ajouté un article 29-3 ainsi rédigé :

« Art. 29-3. - Les fonctionnaires de France Télécom peuvent être intégrés sur leur demande, jusqu'au 31 décembre 2009, dans un des corps ou cadres d'emplois de la fonction publique de l'Etat, de la fonction publique territoriale ou de la fonction publique hospitalière. Cette intégration est subordonnée à une période de stage probatoire suivie d'une période de détachement spécifique. Elle s'effectue, en fonction des qualifications des fonctionnaires, nonobstant les règles relatives au recrutement des corps ou cadres d'emplois d'accueil, à l'exception de celles subordonnant l'exercice des fonctions correspondantes à la détention d'un titre ou diplôme spécifique.

« Si l'indice obtenu par le fonctionnaire dans le corps d'accueil est inférieur à celui détenu dans le corps d'origine, une indemnité compensatrice forfaitaire lui est versée par France Télécom. Les administrations ou organismes d'accueil bénéficient également de mesures financières et d'accompagnement à la charge de France Télécom.

« Les conditions d'application des dispositions du présent article, et notamment la détermination, par une commission créée à cet effet, des corps, cadres d'emplois, grades et échelons d'accueil, sont fixées par décrets en Conseil d'État. »

Le sous-amendement n° 120, présenté par M. Larcher, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Compléter le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 27 pour l'article 29-3 de la loi du 2 juillet 1990 par une phrase ainsi rédigée :

« Ces décrets fixent également les modalités spécifiques d'intégration des fonctionnaires de France Télécom se trouvant dans des corps mis en extinction. »

La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 27.

M. Francis Mer, ministre. L'objet de cet amendement est de clarifier, pour les faciliter, les opérations de mobilité des fonctionnaires de France Télécom qui souhaiteraient, sur la base du volontariat - soyons clairs -, poursuivre leur carrière au sein de nos fonctions publiques.

Vous savez sans doute qu'une mission Mobilité a été mise en place à la fin de l'année dernière dans le but de répondre, le mieux possible, en liaison avec France Télécom et avec les fonctions publiques d'accueil, aux souhaits exprimés par les agents de l'entreprise qui souhaiteraient changer de fonction publique.

Dans ce contexte, pour rendre les mouvements plus faciles sur le plan juridique, il nous est apparu nécessaire de préciser les conditions dans lesquelles les fonctionnaires de France Télécom qui le souhaiteraient - toujours sur la base du volontariat, donc - pourraient être détachés, puis intégrés dans les corps des fonctions publiques.

Cet amendement me paraît être de l'intérêt et de France Télécom et de son personnel.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement n° 120.

M. Gérard Larcher, rapporteur. Ce sous-amendement important tend à résoudre le délicat problème des personnels reclassés. Je rappelle qu'il concerne près de 6 000 personnes qui, depuis un certain nombre d'années, éprouvent des difficultés à trouver leur place au sein de l'entreprise.

Notre commission avait attiré l'attention du Gouvernement et celle du président de France Télécom sur ce problème posé depuis maintenant plus de dix ans. L'objet du sous-amendement n° 120 est de faciliter les modalités spécifiques d'intégration de ces fonctionnaires se trouvant dans des corps mis en extinction par la voie du décret.

M. Thierry Breton s'était engagé à nous répondre par écrit. Voici donc, à la demande de la commission, l'engagement du président de France Télécom : « La commission des affaires économiques du Sénat et vous-même avez appelé mon attention sur la situation des personnels dits "reclassés" de France Télécom.

« Je suis très conscient de l'importance du sujet complexe des "reclassés" et je partage avec vous le sentiment que, au moment où la loi conforte le statut des fonctionnaires de France Télécom, il est opportun de traiter de manière appropriée ce cas spécifique.

« Naturellement, les dispositions de mobilités, par intégration sur leur demande dans des corps ou cadres, d'emploi de l'une des fonctions publiques, prévues par l'amendement du Gouvernement, s'appliquent sans réserve aux fonctionnaires "reclassés" qui souhaiteraient poursuivre leur carrière au sein d'une administration. France Télécom veillera tout particulièrement à leur favoriser l'accès à ce dispositif en développant, avec la mission Mobilité France Télécom, la recherche active de postes.

« Par ailleurs, le projet de loi soumis actuellement à la Haute Assemblée ne remet nullement en cause les perspectives de carrière offertes par France Télécom à l'ensemble des fonctionnaires exerçant au sein de l'entreprise, et ce quelle que soit leur situation administrative.

« Dans cette perspective, je m'engage à ce que très rapidement les "reclassés" puissent, dans le respect des dispositions statutaires propres à leurs corps, bénéficier d'un déroulement de carrière normal et de perspectives de promotion selon les mêmes critères que ceux qui régissent la carrière des autres fonctionnaires de France Télécom. »

Par ce courrier, le président de France Télécom nous rassure et le sous-amendement vise donc à faciliter la gestion positive - enfin positive ! - de la situation des reclassés.

La commission est donc favorable à l'amendement du Gouvernement, qui s'inscrit dans la même démarche.

Je le rappelle, la mission présidée par M. Maréchaux, que nous avons rencontré, travaille sur ce sujet. Aujourd'hui, les personnels à reclasser sont entre six cents et sept cents. Avec l'aboutissement des travaux de la mission, le chiffre pourrait être supérieur. En tous les cas, il faut inventer une mobilité des personnels vers d'autres fonctions publiques. Le dispositif doit prendre en compte la situation des personnels et, en même temps, faire preuve de souplesse. Parlant de mobilité, je n'exclus pas la fonction publique hospitalière. Dans un certain nombre de cas, en effet, nous avons besoin de personnels ayant les compétences que nous trouvons au sein de France Télécom.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 120 ?

M. Francis Mer, ministre. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour explication de vote.

M. Pierre-Yvon Trémel. Paraphrasant une formule qui est assez souvent reprise, je dirai que notre position sur le sous-amendement comme sur l'amendement est de l'ordre du « Oui, mais... ».

Les reclassés sont bien connus de nombreux parlementaires et des élus locaux, puisque, depuis maintenant plus de dix ans, ils viennent leur présenter leurs difficultés. Nous les rencontrons donc régulièrement. Quelques-uns d'entre nous ont essayé de trouver des solutions en intervenant régulièrement auprès de France Télécom, et auprès du ministre de tutelle. En vain !

Ce projet de loi nous offre l'occasion de trouver une issue à ce problème douloureux et difficile.

Le groupe socialiste a d'ailleurs déposé en ce sens l'amendement n° 108, que nous présenterons lors de l'examen de l'article 4.

En ce qui concerne le sous-amendement n° 120 de la commission, je m'en félicite. Nous attendions un amendement du Gouvernement, mais, comme notre rapporteur est très sensible à ce sujet, il a présenté lui-même cette proposition.

Nous lui emboîtons le pas en souhaitant qu'il poussera plus loin sa démarche dans le courant de la navette, d'ici le début 2004. En ces matières très techniques, il nous manque un décret d'application. J'attends avec impatience de pouvoir prendre connaissance de son contenu pour voir jusqu'où va le sous-amendement.

Sur l'amendement n° 27 du Gouvernement, il faut, en effet, jouer la possibilité de passerelles, nous en sommes d'accord. Nous craignons cependant que l'amendement ne nous fasse pas progresser beaucoup sur le dossier des reclassés. Si les passerelles avaient été si faciles, nous aurions eu beaucoup plus de passages depuis 1990 !

Le plan TOP, comme M. le rapporteur vient de le rappeler, est également empreint de cette volonté de jouer la mobilité. Trois cents en 2002, sept cents en 2003, on peut encore attendre un certain nombre de passages, mais ils seront rendus d'autant plus difficiles que l'époque n'est pas à la création de postes dans les fonctions publiques d'Etat ou territoriale, vous le savez bien, monsieur le ministre.

Nous ne sommes donc qu'en partie satisfaits. Il faudra aller beaucoup plus loin pour trouver la vraie solution à ce problème des reclassés.

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.

Mme Marie-France Beaufils. Comme mon collègue, M. Trémel, j'interviendrai tout à la fois sur le sous-amendement et l'amendement.

Avec le sous-amendement n° 120, la commission des affaires économiques ne nous apporte pas de réponse, puisque les modalités spécifiques d'intégration des fonctionnaires de France Télécom se trouvant dans des corps mis en extinction seront fixées par décret. On ne connaît donc pas aujourd'hui les conditions dans lesquelles ce problème sera réglé.

Par l'amendement n° 27, le Gouvernement nous propose de formaliser la démarche de la mission Mobilité telle qu'elle a été élaborée en décembre 2002 pour intervenir dans le cadre du redressement des équilibres financiers. En effet, étant donné les difficultés financières de France Télécom et compte tenu du fait qu'une partie de la résolution du problème résidait dans la diminution de la masse salariale, il fallait trouver une façon de réduire le nombre des fonctionnaires présents au sein de France Télécom.

Cependant, la rédaction proposée fixe une date butoir dont on ne sait pas très bien ce qu'elle a comme objectif, sauf s'il s'agit de faire partir plus vite les personnels concernés. Est-ce à dire que l'on ne tient pas compte de l'exercice du droit d'option, par exemple, lorsque, dans le cadre des lois de décentralisation, on a incité des agents de l'Etat à entrer dans la fonction publique territoriale ? On sait très bien qu'il a fallu un certain temps avant que cette option puisse se réaliser dans de bonnes conditions, et je trouve que le délai imparti n'est pas obligatoirement des plus favorables.

En outre, le fait de renvoyer ainsi à des décrets ne me permet pas d'envisager, par rapport à la Mission Mobilité qui est déjà engagée, une amélioration de la situation.

En revanche, à la lecture de cet amendement n° 27 du Gouvernement, il apparaît que l'on veut créer les conditions d'une réduction rapide du nombre des fonctionnaires d'Etat présents à l'intérieur de France Télécom, c'est-à-dire que l'on veut accélérer le mouvement de privatisation.

C'est pourquoi nous voterons contre l'amendement n° 27.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 120.

Mme Marie-France Beaufils. Le groupe CRC s'abstient !

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27, modifié.

Mme Marie-France Beaufils. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.

Art. additionnel après l'art. 3
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Art. 5

Article 4

I. - La loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 susmentionnée est modifiée ainsi qu'il suit :

1° L'article 30 est ainsi modifié :

a) Avant le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L'article L. 712-3 du code de la sécurité sociale s'applique aux fonctionnaires de France Télécom. Le maintien du traitement prévu par l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, le remboursement des frais et honoraires prévus au 2° de cet article et la liquidation et le paiement des indemnités, allocations et pensions mentionnées à l'article L. 712-3 précité sont assurés par France Télécom. » ;

b) Au deuxième alinéa, les mots : « des exploitants publics » sont remplacés par les mots : « des entreprises », et les mots : « mutuelle générale des PTT » sont remplacés par les mots : « Mutuelle Générale » ;

c) Au troisième alinéa, les mots : « les exploitants publics » sont remplacés par les mots : « les entreprises » et le mot : « astreints » est remplacé par le mot : « astreintes » ;

d) Au c, le mot : « nationale » est supprimé de la première phrase ;

2° A l'article 31-1, les deuxième et troisième phrases sont abrogées ;

3° Au deuxième alinéa de l'article 32, les mots : « de chaque exploitant » sont remplacés par les mots : « de chaque entreprise » ;

4° A l'article 32-1, les mots : « l'entreprise nationale » sont remplacés par les mots : « la société anonyme » ;

5° L'article 36 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « exploitants publics » sont remplacés par le mot : « entreprises » ;

b) Le deuxième alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :

« Elle donne son avis sur toutes les questions relatives à la gestion sociale et à l'intéressement du personnel de l'exploitant public qui lui sont soumises par le ministre ou les représentants du personnel dans les conditions fixées par décret. Elle est consultée sur la mise en commun par les deux entreprises des moyens nécessaires au développement de leurs activités sociales. » ;

c) Le troisième alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :

« Elle est compétente pour émettre un avis sur les projets tendant à modifier les statuts particuliers des corps homologués de La Poste et France Télécom et sur l'évolution de la classification des personnels de l'exploitant public. Elle donne également son avis sur les conditions dans lesquelles La Poste utilise la faculté qui lui est reconnue par le premier alinéa de l'article 31 de la présente loi. » ;

6° Au deuxième alinéa de l'article 44, les mots : « Le cas échéant, il sera prévu dans ces statuts particuliers » sont remplacés par les mots : « Ces statuts particuliers prévoient » et les mots : « des exploitants » sont remplacés par les mots : « de l'exploitant public, de France Télécom ou de leurs filiales, notamment par voie de détachement. »

II. - Il est ajouté, à l'article L. 351-12 du code du travail, un 5° ainsi rédigé :

« 5° Les fonctionnaires de France Télécom placés hors de la position d'activité dans leurs corps en vue d'assurer des fonctions soit dans l'entreprise, en application du cinquième alinéa de l'article 29 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée, soit dans l'une de ses filiales. »

M. le président. Je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 62, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer cet article. »

L'amendement n° 63, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer le 1° du I de cet article. »

L'amendement n° 11 rectifié, présenté par M. Larcher, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après le 3° du I de cet article, insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

« 3° bis Au troisième alinéa du même article :

« a) après les mots : "groupe d'établissements" sont insérés les mots : "de l'exploitant public" ;

« b) les mots : "relatif à chacun des exploitants" sont remplacés par les mots : "de l'exploitant public" ;

« 3° ter Au dernier alinéa du même article, les mots : "du chapitre II et du chapitre III" sont remplacés par les mots : "des chapitres II, III et IV". »

L'amendement n° 108, présenté par MM. Trémel, Raoul et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le 6° du I de cet article :

« 6° Le deuxième alinéa de l'article 44 est ainsi rédigé :

« Toutefois, les fonctionnaires relevant des corps procédant de l'administration, des statuts interministériels ou des corps d'administration centrale restent soumis aux dispositions de leurs statuts particuliers. Ces statuts particuliers prévoient les conditions spécifiques dans lesquelles les fonctionnaires concernés peuvent être mis à la disposition de l'exploitant public, de France Télécom ou de leurs filiales, notamment par voie de détachement. »

Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 64 est présenté par Mmes Beaufils et Terrade, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 109 est présenté par MM. Trémel, Raoul et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer le II de cet article. »

L'amendement n° 12, présenté par M. Larcher, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le premier alinéa du II de cet article :

« Après le cinquième alinéa (4°) de l'article L. 351-12 du code du travail, il est inséré un 5° ainsi rédigé : ».

La parole est à Mme Evelyne Didier, pour présenter les amendements n°s 62 et 63.

Mme Evelyne Didier. Dans la même logique que précédemment, nous vous proposons de supprimer cet article.

Nous avons eu plusieurs fois l'occasion de dire nos craintes quant à la volonté de France Télécom d'inciter ses fonctionnaires à démissionner de leur statut : « Ah ! si seulement ils partaient plus vite, ce serait tout de même mieux pour l'entreprise ! »

La réduction des coûts prévue par le plan TOP du fait de cette garantie particulière qui empêche la réalisation d'un plan social de grande ampleur, l'ensemble des dispositions de cet article, qui sont néfastes pour les salariés, le paragraphe II, en particulier, qui vise à modifier l'article L. 351-12 du code du travail, tout cela semble confirmer nos craintes quant au risque réel de voir contestée aux fonctionnaires la garantie de leur emploi.

Sont particulièrement visés ici les fonctionnaires placés hors de leur position d'activité.

L'amendement n° 63 est un amendement de repli : nous vous proposons de supprimer le 1° du I de cet article, qui, s'agissant de la couverture sociale desdits fonctionnaires, ne nous convient pas.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 11 rectifié.

M. Gérard Larcher, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination juridique qui, notamment, tient compte de l'absence de contrat de plan chez France Télécom.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour présenter l'amendement n° 108.

M. Pierre-Yvon Trémel. Cet amendement est dans la ligne de celui qui a été présenté tout à l'heure par M. le rapporteur, mais il va un peu plus loin. Il s'agit d'essayer de trouver une réponse aux problèmes rencontrés par les 6 000 fonctionnaires « reclassés ».

Tout à l'heure, il a été question d'un décret. Nous aurions souhaité que le Gouvernement prenne position quant à la possibilité, pour le Parlement, de prendre connaissance du contenu de ce décret pendant la navette parlementaire. Cela nous paraît très important.

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 64.

Mme Marie-France Beaufils. Nous avons lu attentivement le rapport écrit de M. Larcher, mais nous ne sommes pas pour le moment convaincus que le texte actuel réponde à notre interrogation sur la garantie de l'emploi liée au statut des fonctionnaires de France Télécom.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour présenter l'amendement n° 109.

M. Daniel Raoul. Si l'on se fie à la lettre de l'article 4, France Télécom deviendrait son propre assureur concernant le chômage pour les fonctionnaires placés hors de la position d'activité, ce qui suscite certaines inquiétudes chez ces personnels.

On ne comprend plus très bien. M. le ministre vient de nous assurer que l'on garantit le statut des fonctionnaires et, en même temps, on change leur système d'assurance chômage. C'est pourquoi nous demandons, pour calmer les inquiétudes, de supprimer le paragraphe II de cet article.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 12 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 62, 63, 108, 64 et 109.

M. Gérard Larcher, rapporteur. L'amendement n° 12 est un amendement rédactionnel.

S'agissant de l'amendement n° 62, les membres du groupe communiste républicain et citoyen s'opposent à l'article 4, ce qui est en conformité avec leur position. Cet article étant lui-même en cohérence avec l'ensemble du dispositif qu'elle soutient, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

S'agissant de l'amendement n° 63, la commission y est défavorable, car elle considère qu'il faut mettre en place des institutions représentatives du personnel de droit commun.

S'agissant de l'amendement n° 108, nous partageons les préoccupations de ses auteurs, M. Trémel et les membres du groupe socialiste, comme en ont d'ailleurs témoigné nos débats. Ce problème difficile a été posé voilà longtemps, le rapport Delebarre l'évoquait déjà en 1997.

M. Pierre-Yvon Trémel. C'est vieux !

M. Gérard Larcher, rapporteur. Mais je note qu'entre 1997 et 2003 aucune proposition n'a été faite sur cette question des reclassés, et c'est seulement aujourd'hui que nous abordons ce sujet à l'occasion de la discussion que nous avons eue avec le Gouvernement et le président de France Télécom.

Je souhaite que le décret soit prêt au moment de la navette. Je rappelle toutefois qu'il appartient au législateur d'en fixer le cadre et les orientations. Nous avons trop tendance, en permanence, à vouloir écrire en lieu et place des décrets. Quoi qu'il en soit, je peux vous assurer que la commission des affaires économiques et votre rapporteur seront très attentifs à la rédaction du décret sur ce point.

Ainsi, en vertu du sous-amendement n° 120 présenté par la commission, de la lettre du président de France Télécom et des engagements que le ministre a pris, la commission ne peut pas être favorable à l'amendement n° 108.

Une double gestion du personnel ne serait pas cohérente et, par ailleurs, extrêmement lourde pour l'entreprise.

Dans ces conditions, et même si nous partageons les nombreuses préoccupations de nos collègues, nous ne sommes pas favorables à cet amendement.

S'agissant de l'amendement n° 64, leurs auteurs croient voir dans la disposition prévue à l'article 4 la possibilité d'un chômage des fonctionnaires, ce que M. Raoul vient d'évoquer.

Selon moi, cette possibilité n'existe pas. D'un point de vue statutaire, les fonctionnaires de France Télécom ne peuvent pas être au chômage. Or, dans notre pays, 75 % des Français sont exposés au risque du chômage, alors que 25 % en sont protégés. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)

M. Pierre-Yvon Trémel. Oh !

M. Jean Bizet. Eh oui !

M. Pierre Hérisson. Absolument !

M. Gérard Larcher, rapporteur. Pourrons-nous éternellement accepter cette situation ?

Je rappelle qu'un pays comme l'Italie, sous le gouvernement de la coalition de l'Olivier, et non pas sous le gouvernement de M. Berlusconi, a modifié profondément le droit du travail pour supprimer le clivage entre deux catégories de citoyens. Cette question mérite une réflexion de la représentation nationale. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) Je voudrais qu'on parle de ces 75 % de Français qui, aujourd'hui, sont confrontés au vent et à la tempête en permanence. Voilà pourquoi j'adhère pleinement à la réforme du code du travail qu'envisage le Gouvernement sur ce sujet.

Mme Evelyne Didier. Quand tout le monde sera dans la tempête, cela ira mieux !

M. Gérard Larcher, rapporteur. Je ne suis pas de ceux qui veulent torpiller les statuts, bien au contraire ! Mais nous avons le devoir, parce que nous représentons le pays, de penser à tous ceux qui risquent d'être exposés à des vents contraires. La représentation nationale doit prendre conscience qu'un pays qui a inscrit le mot « Egalité » sur le fronton de ses mairies ne peut en permanence bafouer ce principe. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Francis Mer, ministre. Le Gouvernement est favorable aux amendements de clarification et de coordination de la commission et défavorable aux autres amendements.

Monsieur Trémel, les décrets relèvent de la responsabilité de l'administration et non pas du pouvoir législatif. Il n'en demeure pas moins qu'ils seront discutés lors des consultations prévues avec les organisations syndicales. Je ne suis cependant pas certain que cette discussion sera terminée au moment de la navette parlementaire.

M. Raymond Courrière. Pour les régionales...

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 62.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 63.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 108.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 64 et 109.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.

(L'article 4 est adopté.)

TITRE III

STATUT DE FRANCE TÉLÉCOM

Art. 4
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Art. 6

Article 5

I. - L'article 1-1 est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. 1-1. - L'entreprise France Télécom est soumise aux dispositions législatives applicables aux sociétés anonymes dans la mesure où elles ne sont pas contraires à la présente loi. »

II. - France Télécom est ajouté à la liste annexée à la loi n° 93-923 du 19 juillet 1993 de privatisation.

III. - Pour l'application du troisième alinéa du I de l'article 2 de cette même loi du 19 juillet 1993, la part détenue par l'État dans le capital de France Télécom est déterminée en tenant compte de la participation directe et indirecte de l'État.

IV. - L'article 8-1 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations s'applique à l'ensemble du personnel de France Télécom.

V. - Pour l'application à France Télécom de l'article 2 du décret-loi du 30 octobre 1935 organisant le contrôle de l'État sur les sociétés, syndicats et associations ou entreprises de toute nature ayant fait appel au concours financier de l'État, il est tenu compte de la participation détenue de manière directe et indirecte par l'État dans le capital de cette société.

M. le président. Je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 65 est présenté par Mmes Beaufils et Terrade, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 110 est présenté par MM. Trémel, Raoul et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer cet article. »

L'amendement n° 66, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer le I de cet article. »

L'amendement n° 67, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer le II de cet article. »

L'amendement n° 68, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer le III de cet article. »

L'amendement n° 69, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer le IV de cet article. »

L'amendement n° 70, présenté par Mmes Beaufils et Terrade, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer le V de cet article. »

La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour défendre l'amendement n° 65.

Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le ministre, vous présentez la privatisation de France Télécom comme une nécessité, alors que tout prouve, au contraire, qu'il s'agit bien d'un choix purement politique. Ainsi, dans l'exposé des motifs de votre projet de loi, vous expliquez que l'évolution du statut de France Télécom vers une société anonyme de droit commun serait rendue nécessaire en raison de la réforme engagée sur le plan européen et de l'adoption du « paquet télécoms », qu'il faut transposer dans notre droit national.

Pour autant, vous devez bien admettre que rien, dans ces textes, ni même dans les traités européens, n'oblige à privatiser France Télécom. J'ai pris le temps de lire les circulaires, auxquelles tout le monde a pu se référer, et il apparaît clairement que la lecture que nous faisons de ces textes et votre lecture diffèrent complètement. A contrario, dans le domaine des services publics, le principe de subsidiarité s'applique, laissant aux Etats la possibilité de recourir à l'entreprise publique pour l'organisation, la gestion et la mise en oeuvre des missions de service public.

Votre lecture des textes européens ne nous convainc donc pas. Je ne crois pas que l'on puisse affirmer, comme vous le faites, qu'ils remettent en cause l'attribution par la loi des missions de service public universel à France Télécom.

Vous nous expliquez également que la diversification des activités de France Télécom, qui est intervenue au cours de ces cinq dernières années, serait l'une des raisons de la nécessité d'adopter ce statut.

Or on a pu observer par le passé que les entreprises qui avaient mené des stratégies de diversification se repliaient ensuite sur le coeur de leur métier, en réduisant leur sphère d'influence à l'échelle internationale.

Vous nous expliquez encore que la détention majoritaire par l'Etat du capital de France Télécom a été l'un des facteurs de la crise financière traversée par l'entreprise au cours des années 2000 à 2002, ce qui ne peut que justifier la privatisation.

Si nous vous comprenons bien, lorsqu'il n'existera plus aucune entreprise publique employant des milliers de salariés, le « risque de crise financière » sera proportionnellement réduit.

Enfin, vous nous expliquez que France Télécom doit être privatisée pour affronter à égalité de statut ses propres concurrents.

Depuis hier, avec constance, nous avons essayé d'éclairer d'autres choix politiques et de montrer que d'autres voies, fondées sur une réponse appropriée aux besoins modernes de communication, étaient possibles.

Mais une telle solution alternative nécessite une propriété publique du capital de l'entreprise. Le programme de privatisation que vous engagez n'a d'autre visée que de remettre en cause les droits et les garanties statutaires des fonctionnaires et de permettre à terme des suppressions massives d'emplois au nom de la rentabilité immédiate.

Selon les comptes prévisionnels de l'INSEE, nous avons, cette année, frôlé la récession. C'est bien le signe patent que votre politique accroît les inégalités sociales et nous conduit tout droit vers une dépression économique.

Pour toutes ces raisons, nous nous opposons radicalement à l'abrogation de l'obligation pour l'Etat d'être actionnaire majoritaire de France Télécom.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour présenter l'amendement n° 110.

M. Pierre-Yvon Trémel. L'article 5 constitue le coeur de ce projet de loi. Disons-le tout net, nous sommes contre la marche vers la privatisation de France Télécom.

Nous nous opposons donc à cet article, qui inscrit France Télécom dans la liste des entreprises privatisables et qui permet, même si nous ne savons pas quand cela aura lieu, de faire passer la part de l'Etat dans le capital de cette entreprise en deçà de 50 %. Nous sommes contre cette privatisation pour des raisons de fond, des raisons de circonstances et des raisons de forme je les ai exposées dans la discussion générale.

Nous rejetons l'argument principal avancé par le Gouvernement selon lequel le « verrou des 50 % » serait la cause de l'endettement de France Télécom. M. le ministre a bien voulu dire qu'il ne s'agissait que de l'une des causes multiples de cet endettement.

A nos yeux, c'est avant tout la folie boursière concernant les valeurs technologiques et, plus généralement, le contexte économique incertain dans lequel évoluent les télécommunications qui sont la cause principale des difficultés de l'opérateur historique.

Tous les opérateurs, qu'ils soient publics ou privés, et qu'ils interviennent en France ou dans le monde, ont connu des déboires. Il n'est pas inutile de rappeler ce qui est arrivé à Vivendi Universal ou bien à Worldcom.

Nous pouvons même dire que, si France Télécom s'en tire mieux que les autres, c'est bien parce que l'Etat y est majoritairement présent. Il a su jouer son rôle d'actionnaire en apportant à l'entreprise plus de neuf milliards d'euros. C'est d'ailleurs ce geste fort de l'Etat qui a rassuré les milieux financiers et qui a permis à France Télécom de renégocier dans de bonnes conditions les échéances les plus urgentes.

Il n'est pas du tout certain qu'un actionnaire ou un groupe d'actionnaires privés majoritaire aurait, dans des circonstances équivalentes, adopté le même comportement. Je vous renvoie à ce qu'est devenue British Telecom ! Sans la présence majoritaire de l'Etat dans son capital, il est à parier que France Télécom aurait été contrainte de se séparer de ses filiales performantes, comme Orange ou Wanadoo, qui assurent aujourd'hui l'essentiel de sa croissance.

France Télécom a été protégée par son actionnaire majoritaire, ce qui lui permet d'avoir maintenant une stratégie de développement forte, à laquelle nous sommes tout à fait favorables. Il s'agit pour l'entreprise d'être un opérateur global, présent dans le téléphone fixe, l'Internet et le téléphone mobile, capable d'innovation et d'efforts en matière de recherche, ouvert également à la recherche de partenariats.

Contrairement à ce que l'on entend trop souvent, la présence majoritaire de l'Etat dans le capital d'une entreprise ne signifie pas que l'argent public est jeté par la fenêtre. France Télécom, il est bon de le rappeler, ne coûte pas un sou au contribuable ! De 1997 à 2002, l'entreprise a versé 2,7 milliards d'euros de dividendes à l'Etat, qui a par ailleurs retiré 12,4 milliards d'euros des ouvertures de capital de l'opérateur, et ces chiffres sont bien ceux qui sont repris dans le rapport de M. Douste-Blazy sur les entreprises publiques.

Une entreprise publique peut être performante. Nous refusons la privatisation de France Télécom, car nous jugeons fondamental que l'Etat puisse, par sa présence majoritaire dans le capital, rester le garant de l'accomplissement des missions d'intérêt général dans un secteur aussi stratégique que celui des télécommunications. Ces missions, je veux le rappeler, sont l'accès de tous à la communication, l'aménagement du territoire, la recherche, la sécurité et la défense publique.

Notre position est donc claire ; le titre III du projet de loi ne nous paraît pas amendable et nous ne défendons par conséquent que des amendements de suppression des deux articles qui le composent.

Bien entendu, nous souhaiterions que tous nos collègues votent notre amendement n° 110, sur lequel nous demandons donc un scrutin public.

M. Alain Gournac. Voilà qui va nous avancer !

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l'amendement n° 66.

Mme Odette Terrade. Nous avons eu l'occasion de souligner combien le débat aurait été plus clair s'il avait commencé par l'examen du titre III de ce projet de loi, qui autorise la privatisation de France Télécom.

Comme ma collègue Mme Marie-France Beaufils vient de le rappeler, rien ne justifie aujourd'hui que l'on privatise cette entreprise. L'exposé des motifs du projet de loi ne contient que des affirmations contestables. La présence de l'Etat dans le capital de France Télécom n'explique en rien la crise financière qu'elle a traversée ces dernières années. Ce sont tous les opérateurs de ce secteur qui ont été touchés par les crises financières à répétition sur les nouvelles valeurs technologiques, crises auxquelles nous commençons à être habitués. La régulation par les marchés financiers, c'est, précisément, l'instabilité garantie !

Selon nous, notre pays a aujourd'hui besoin, dans le secteur des télécommunications, d'une entreprise publique indépendante des marchés financiers, non soumise aux critères de rentabilité économique qu'ils exigent, pour que soit assuré un service public de qualité à la hauteur des enjeux que révèlent les nouvelles technologies de communication.

C'est la raison pour laquelle nous vous proposons cet amendement de suppression du paragraphe I de l'article 5.

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter les amendements n°s 67 et 68.

Mme Marie-France Beaufils. Je tiens d'abord à souligner de nouveau que la privatisation de France Télécom que le Gouvernement souhaite engager relève d'un choix purement politique, en ce sens qu'il n'est pas contraint sur le plan économique.

En d'autres termes, d'autres choix sont possibles, qui viseraient à conforter le caractère public de cette entreprise afin d'organiser de manière cohérente, à l'échelle du territoire, un secteur performant de télécommunications.

Il s'agit bien, monsieur le ministre, à partir du constat de la grave crise qu'a traversée l'ensemble du secteur des télécommunications, de donner à la collectivité nationale les moyens de garantir le droit à la communication pour tous les citoyens.

Comme dans d'autres secteurs d'activité, la nouvelle régulation mise en place depuis plusieurs années à l'échelle de l'Union européenne a montré ses limites. L'irrationalité des marchés financiers, les vagues de spéculation sur les nouvelles valeurs technologiques, au premier rang desquelles figurent les nouvelles technologies de l'information et de la communication, la mise aux enchères des licences UMTS et tous les déboires qui se sont ensuivis, le renforcement d'une gestion purement marchande du service de télécommunication visible à travers un accroissement démesuré des dépenses de marketing, l'exacerbation de la concurrence, qui tire les prix vers le bas et pousse à la rationalisation des coûts, au développement de la sous-traitance, à la précarisation et au licenciement, sont autant d'éléments, monsieur le ministre, qui exigent la mise en oeuvre d'une véritable régulation au lieu du laisser-faire.

Les choix que vous nous proposez, alors que la situation économique et sociale exigerait une intervention publique et économique dans ce secteur où les enjeux économiques et sociaux sont si vitaux pour l'avenir de notre pays, ne peuvent recueillir notre assentiment.

Nierez-vous que la baisse des tarifs a, en réalité, plus profité aux grandes entreprises qu'aux usagers et aux petites et moyennes entreprises ? Les petits consommateurs qui, pourtant, au dire des libéraux, seraient les premiers bénéficiaires de cette politique, sont en réalité les premiers sacrifiés au bénéfice des intérêts des grands opérateurs du secteur.

Vous souhaitez, monsieur le ministre, aller plus loin encore dans la voie désastreuse de la déréglementation et des privatisations. Ces choix politiques ne feront qu'accroître l'inégalité d'accès aux nouvelles technologies de la communication et de l'information, et donc la fracture territoriale entre les régions riches et les régions pauvres, car, d'un côté, vous voulez privatiser France Télécom en lui retirant de nombreuses prérogatives en matière de service public et d'aménagement du territoire, et, de l'autre, vous voulez donner aux collectivités locales la possibilité de devenir des opérateurs de réseaux.

Pour toutes ces raisons, nous souhaitons la suppression des paragraphes II et III de l'article 5.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter les amendements n°s 69 et 70.

Mme Odette Terrade. Les paragraphes IV et V de l'article 5 traitent du conseil d'administration.

Le paragraphe IV permettrait ainsi, selon le rapport, d'étendre à l'ensemble des personnels de France Télécom les dispositions favorables aux salariés des entreprises privatisées notamment en ce qui concerne le conseil d'administration.

Sur ce point, je relève que le nouveau règlement intérieur sur le conseil d'administration voté en juin dernier, sous prétexte d'un renforcement des obligations de confidentialité rendu nécessaire face à la concurrence, vise en fait à bâillonner les administrateurs mandatés. Ce nouveau règlement, qui soulève une problématique de la portée de celle qui est développée dans le rapport de M. Douste-Blazy sur les entreprises publiques et la nouvelle gouvernance, tend en effet à exclure de l'instance décisionnelle les représentants des salariés.

Nous sommes loin de penser que l'alignement sur le droit privé permettra d'accroître le pouvoir de décision et d'intervention des salariés dans l'entreprise.

A contrario, le rôle toujours plus prépondérant des actionnaires au sein des entreprises ne favorise pas la transparence. Toutes les informations font vite partie de ce qui relève du secret dans un monde gouverné par les marchés financiers et boursiers. Cela contribue à renforcer l'opacité, surtout lorsqu'il s'agit de mettre en débat et de porter à la connaissance des salariés et des usagers les enjeux économiques et sociaux.

La volonté de restreindre l'effectif de ces institutions constitue un véritable recul social. L'objectif semble bien être, sous couvert de la nécessaire confidentialité, de diminuer le droit d'informer des administrateurs.

Le fait de revenir, comme le recommande le rapport déjà mentionné de M. Douste-Blazy, sur le principe de l'atténuation de la responsabilité civile des représentants des salariés est une décision particulièrement grave à nos yeux.

Nous n'allons décidément pas vers le progrès social avec une telle politique !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Larcher, rapporteur. L'amendement n° 65 du groupe communiste républicain et citoyen et l'amendement n° 110 du groupe socialiste sont identiques, mais M. Trémel, dans sa présentation, a déclaré que ni le moment ni la situation ne permettaient de privatiser. Il existe donc une différence d'appréciation entre les auteurs de ces deux amendements pourtant identiques.

M. Daniel Raoul. Nous avons lu votre rapport, monsieur Larcher !

M. Gérard Larcher, rapporteur. Je vous remercie, monsieur Raoul.

Je voudrais préalablement rappeler certains des points déclinés tout au long de cet article. Il nous faut, nous le disions lors de la discussion générale, éviter de répéter demain les erreurs d'hier ; il convient d'adapter le droit aux nouvelles exigences de l'économie des télécommunications.

Une grande entreprise cotée, je le rappelle, a la possibilité de financer sa croissance externe par échange de titres. Qu'on le veuille ou non, le temps du marché n'est pas comparable au temps législatif : le temps législatif, c'est au minimun, et dans des conditions exceptionnelles, deux mois ; le temps du marché, c'est parfois quelques jours.

Il s'agit donc de conférer à France Télécom le droit de recourir à cette possibilité afin d'éviter que l'entreprise ne se trouve de nouveau plongée dans l'ornière financière dont elle n'a pu se dégager - et le dégagement n'est pas encore tout à fait terminé - qu'au prix d'importants efforts de redressement pour lesquels tant l'Etat, et à travers lui les contribuables, que les personnels ont été fortement sollicités.

C'est pourquoi, si nous souhaitons donner à France Télécom les moyens de réaliser ce grand projet industriel que nous évoquons les uns et les autres depuis hier et qui pourrait nécessiter une augmentation de capital à laquelle l'Etat ne pourrait souscrire, il convient aujourd'hui d'écarter l'obligation d'une intervention législative préalable.

Pour autant, cela ne signifie pas que le président de France Télécom a les mains libres.

Je rappelle que le passage en dessous de la majorité devra être autorisé par décret et sous contrôle de la commission des participations et des transferts. Je crois qu'il était utile de le préciser, car ce point a été peu évoqué jusqu'à maintenant.

Par conséquent, nous ne donnons pas un blanc-seing au président actuel ou futur de France Télécom, mais nous donnons à l'entreprise la capacité de réagir et de s'adapter.

C'est pourquoi la commission est défavorable aux amendements identiques n°s 65 et 110.

Je ne suis d'ailleurs pas tout à fait certain, je le dis aux auteurs de l'amendement n° 110, que, quand M. Fabius envisageait en janvier 2002 d'ouvrir une nouvelle tranche du capital de France Télécom il choisissait le moment le plus opportun. Je rappelle que l'action allait alors connaître son plus bas cours. (Murmures sur les travées du groupe socialiste.)

M. Bruno Sido. Absolument !

M. Gérard Larcher, rapporteur. Mais l'opportunité relève, naturellement, de l'appréciation de chacun...

Enfin, et toujours pour les mêmes raisons, la commission est défavorable aux amendements n°s 66, 67, 68, 69 et 70 présentés par le groupe communiste républicain et citoyen.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Francis Mer, ministre. Il va de soi que je partage l'avis de M. le rapporteur sur tous les sujets qu'il a abordés. Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements n°s 65, 110, 66, 67, 68, 69 et 70.

Toutefois, je veux relever quelques points dans les interventions du groupe communiste républicain et citoyen.

D'abord, mesdames les sénatrices, je ne vois pas pourquoi vous faites un lien entre la conjoncture actuelle et le projet de loi, puisque celui vise justement à préparer l'avenir à long terme d'une entreprise.

Si nous gérons notre politique économique et industrielle uniquement en fonction de ce qui se passe au jour le jour, nous le ferons mal. Je trouve donc inutile, voire dangereuse, cette référence à une situation à court terme, qui - j'en profite pour annoncer quand même quelques bonnes nouvelles - est d'ailleurs en train de s'améliorer.

Sur le fond ensuite, vos propositions démontrent que vous continuez à vous situer dans un monde où seul le producteur aurait le pouvoir. Lorsque vous vous étonnez du risque d'une baisse des prix, c'est à croire que le consommateur - vous, nous, tout le monde ! - ne vous intéresse pas.

A une époque qui n'est pas très éloignée nous vivions en effet dans un monde où la production avait le pouvoir, mais je résumerai le temps présent et le temps futur comme ceux de la reconquête du pouvoir par le client ou le consommateur. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)

Cela se traduit, mesdames les sénatrices, par des baisses de prix liées à la compétition entre les entreprises. Tout le monde en profite, et profite aussi d'une amélioration de la qualité des produits et des services nonobstant la baisse de prix.

Voilà le sens de l'évolution, et c'est dans ce contexte que nous voulons placer nos entreprises, qui sont donc de plus en plus soumises à la pression des concurrents et des clients, mais qui continuent à être des entreprises de production car, comme vous le savez, chacun est à la fois producteur et consommateur ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 65 et 110.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)


M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 21 :

Nombre de votants313
Nombre de suffrages exprimés306
Pour106
Contre200

Je mets aux voix l'amendement n° 66.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 67.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 68.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 69.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 70.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)