COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR

M. le président. J'informe le Sénat que les questions orales n° 382 de M. Joël Billard, n° 378 de M. Louis Souvet et n° 353 de M. Pierre Laffitte sont retirées, à la demande de leurs auteurs, de l'ordre du jour de la séance d'aujourd'hui.

3

QUESTIONS ORALES

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

ATTRIBUTION DE LA CROIX

DU COMBATTANT VOLONTAIRE

AVEC AGRAFE « MISSION EXTÉRIEURE »

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, auteur de la question n° 370, adressée à Mme la ministre de la défense.

M. Jean-Jacques Hyest. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur l'attribution de la croix du combattant volontaire avec agrafe « mission extérieure ».

Jusqu'à la suspension du service national et sur incitation du commandement, des appelés du contingent ont fait acte de volontariat pour participer, au sein d'unités semi-professionnelles, à des opérations militaires au titre des missions extérieures. Ce fut le cas pour tous les territoires donnant droit à la carte du combattant aujourd'hui répertoriés. Certains de ces combattants ont pu être cités avec attribution de la croix de guerre.

La carte du combattant volontaire, créée en 1935, est attribuée à tout titulaire d'une carte de combattant qui a été volontaire pour servir dans une unité combattante.

Les décrets du 8 septembre 1981 ont institué une croix du combattant volontaire avec des barrettes correspondant aux conflits successifs où nos forces ont été engagées ; ils ont été complétés par les instructions successives du 8 mai 1988 et du 27 septembre 1995, qui allaient dans le sens de l'assouplissement, mais ne tenaient pas compte de l'ensemble des personnes concernées.

C'est la raison pour laquelle la Fédération nationale des combattants volontaires constate que les conditions d'attribution ne sont pas satisfaisantes, tant sur le plan de l'équité entre les participants à un même conflit que sur le plan de l'égalité entre les générations du feu. Ces appelés volontaires demandent que leur spécificité soit reconnue, d'autant que leur qualification conditionnait parfois la capacité opérationnelle d'unités désignées pour intervenir d'urgence dans le cadre de missions extérieures.

C'est pourquoi, madame la ministre, je souhaiterais savoir quelles sont les intentions du Gouvernement sur ce dossier. Au demeurant, celui-ci n'a aucune incidence budgétaire, ce qui est un point important.

De plus, j'aimerais obtenir quelques précisions sur les mesures qui pourraient être prises en matière de développement du volontariat, qui conditionne l'avenir des forces armées.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur le sénateur, la croix du combattant volontaire est une distinction militaire particulièrement symbolique. Conçue pour récompenser ceux qui ont librement choisi de rejoindre l'armée au combat, elle reflète la générosité, la solidarité et l'esprit de sacrifice qui ont fait, aux heures les plus sombres de notre histoire, la grandeur de notre pays.

Ses conditions d'attribution ont été périodiquement modifiées, afin de l'ouvrir davantage sur les conflits les plus récents sans pour autant modifier sa nature. Cette démarche illustre l'attention portée à la quatrième génération du feu, qui appartient pleinement à la grande famille du monde combattant.

Je rappellerai à ce propos que des représentants de la quatrième génération du feu siègent aujourd'hui au sein d'institutions aussi emblématiques que le Haut Conseil de la mémoire combattante ou le conseil d'administration de l'Office national des anciens combattants.

Je rappellerai également que, le 22 octobre dernier, au cours de la cérémonie qui a eu lieu à l'Arc de triomphe, nous avons rendu un hommage solennel aux victimes de l'attentat de l'immeuble Drakkar, à Beyrouth, et, à travers eux, à l'ensemble des militaires de la quatrième génération du feu tombés en opérations extérieures.

C'est dire, monsieur le sénateur, combien votre argumentation rejoint notre volonté de récompenser les appelés qui se sont portés volontaires pour servir sur des théâtres d'opérations extérieurs et qui, à ce titre, ont reçu la carte du combattant. Je suis donc tout à fait disposée à faire étudier, dans le respect de l'équité entre les générations du feu, la possibilité de leur décerner la croix du combattant volontaire.

Par ailleurs, vous m'avez interrogée sur l'incitation au volontariat. Aujourd'hui, dans le cadre d'une armée professionnelle, cette motivation essentielle est partagée par l'ensemble des jeunes générations ; je relève également qu'elle est fortement présente chez la plupart des réservistes, très souvent volontaires pour participer aux opérations extérieures que nous avons été conduits à mener au cours de ces dernières années et qui le seront assurément pour celles que nous serons probablement appelés à faire dans les années à venir.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.

M. Jean-Jacques Hyest. Je souhaite l'égalité effective entre les générations du feu, compte tenu notamment des dernières missions extérieures pour lesquelles il a été fait appel à des contingents ou à des volontaires, afin que ceux-ci puissent avoir le plein bénéfice - honorifique, vous l'avez bien souligné - de la croix du combattant volontaire.

Je vous remercie, madame la ministre, de bien vouloir poursuivre les études entreprises et de permettre à ces combattants volontaires d'être récompensés comme ils le méritent.

AMÉNAGEMENT DE LA RN 204

ENTRE LE PIÉMONT ET LA CÔTE D'AZUR

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, en remplacement de M. José Balarello, auteur de la question n° 363, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

M. Jean-Jacques Hyest. Notre collègue M. José Balarello, empêché pour raisons de santé, m'a demandé de présenter sa question, à laquelle il attache beaucoup d'importance parce qu'il y a urgence.

La route nationale 204 reliant le Piémont à la Côte d'Azur est un axe vital pour l'économie des Alpes-Maritimes. En effet, il s'agit de la route la plus directe entre Nice et Turin, capitale du Piémont, distante de seulement 210 kilomètres.

Or, si des autoroutes existent sur cet axe à proximité de ces deux grandes villes, la liaison résiduelle, longue d'une soixantaine de kilomètres, entre Cueno et Vintimille, est assurée, en France, par la RN 204 et, en Italie, par la SS 20.

Cette route, qui traverse plusieurs gorges et franchit le col de Tende, nécessite des améliorations et des aménagements importants pour devenir un axe interrégional entre Piémont et PACA. Si, dans les parties italiennes, des améliorations nombreuses ont déjà été apportées, au nord et au sud, notamment avec six tunnels et trois ponts entre Vintimille et Fanghetto, des travaux importants restent à exécuter sur la partie sud de la SS 20, dans la province d'Imperia, où plusieurs tunnels doivent encore être réalisés.

Pour ce qui est de la partie française, sur la route de la Roya, où - sans parler du tunnel routier du col de Tende, qui ne fait pas l'objet de la présente question - ont été réalisés le tunnel aval des gorges de Saorge et le tunnel amont, financés dans le cadre du XIIe Plan, d'autres ouvrages doivent être réalisés rapidement, notamment la liaison, d'une centaine de mètres environ, entre ces deux tunnels, la construction du tunnel des gorges de Paganin et celle du tunnel permettant la déviation du village de Fontan.

M. Balarello insiste sur l'urgence du financement et de la réalisation de ces ouvrages et des études y afférentes, dans le cadre tant du XIIe Plan que de la clause dite de « revoyure » et du XIIIe Plan. Il souhaite donc connaître l'échéancier de la programmation de ces différents travaux ainsi que l'état d'avancement des projets sur la SS 20 italienne, dans la province d'Imperia, entre Fanghetto et l'autoroute Vintimille-Nice.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le sénateur, vous connaissez parfaitement la route nationale 204, dont la particularité est de relier l'Italie « maritime » à l'Italie de « l'intérieur » mais c'est aussi la colonne vertébrale autour de laquelle s'organise la vie dans cette belle vallée de la Roya. L'Etat s'est fixé pour objectif d'améliorer cette voie, route de montagne et axe de vie.

D'importants travaux ont été engagés, notamment dans les gorges de Saorge. La première phase, qui comprend le tunnel « aval » et deux ponts sur la Roya, a été mise en service en juin 2001. La seconde phase, comprenant les travaux du tunnel « amont », est en cours de réalisation dans le cadre du présent contrat de plan. L'objectif pour la mise en service reste fixé à la fin de l'année 2004.

Pour ce qui concerne la déviation de Fontan et l'aménagement dans les gorges de Paganin, les études ont été engagées afin de mener les procédures d'enquête publique en 2005. Les travaux de ces opérations ne sont toutefois pas inscrits à l'actuel contrat de plan.

Gilles de Robien n'est naturellement pas opposé à ce que les montants consacrés à l'aménagement de la RN 204 soient augmentés lors de la révision du contrat. Celle-ci, pour la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, ne devrait intervenir qu'en 2004, dès lors que les projets seront aboutis et prêts. Compte tenu de l'enveloppe fixée, cet exercice sera cependant difficile, eu égard à l'importance des besoins à satisfaire dans la région, en particulier dans le département des Alpes-Maritimes.

Enfin, s'agissant de la SS 20, les autorités italiennes, que nous avons sollicitées, n'ont pas encore répondu sur les dispositions envisagées. Bien entendu, monsieur le sénateur, Gilles de Robien ne manquera pas de vous faire part de leur réponse.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.

M. Jean-Jacques Hyest. J'ai bien noté les engagements de M. le secrétaire d'Etat, qui a également souligné combien il était difficile de modifier les autres opérations inscrites, notamment pour les Alpes-Maritimes, à l'actuel contrat de plan. Toutefois, M. Balarello saura rappeler au Gouvernement les engagements qu'il a pris !

INQUIÉTUDES DES AUTORITÉS PORTUAIRES

ET DES SALARIÉS DU PORT DE CALAIS

M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle, auteur de la question n° 364, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

M. Yves Coquelle. Je veux attirer l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur les graves et légitimes inquiétudes des autorités portuaires et des salariés de nombreux ports français, en particulier du port de Calais.

D'abord, nous notons avec intérêt l'abrogation de la directive européenne, votée le 30 septembre 2003, qui prévoyait la réintroduction dans les ports de l'auto-assistance, avec tous les risques qu'entraînait cette pratique sur les métiers portuaires, sur les emplois qualifiés et sur les statuts du personnel. Il n'en demeure pas moins que les salariés du port de Calais sont très inquiets des conséquences de la décentralisation. En effet, est-ce bien l'Etat qui reste l'autorité de tutelle des ports d'intérêt national ? Les concessions portuaires restent-elles assumées par les chambres de commerce et d'industrie maritimes ? Quelles garanties sont prévues pour que les emplois des travailleurs portuaires ainsi que les métiers portuaires, avec leur réglementation sociale, soient respectés ? Des questions extrêmement sensibles comme la sécurité, l'environnement, les qualifications indispensables ne risquent-elles pas d'être bradées par l'absence de contrôle de l'Etat ?

Enfin, la troisième inquiétude des salariés du port de Calais concerne les accords du Touquet, signés en février 2003 entre la France et le Royaume-Uni, qui portent sur les questions de l'immigration clandestine. Les mesures draconiennes prises pour le port de Calais, les multiples contrôles qui allongent les durées d'attente, ne semblent pas concerner les ports voisins, qu'ils soient français, belges ou hollandais. Cette disparité risque d'entraîner à très brève échéance une concurrence déloyale, notamment dans le traitement du fret, concurrence déloyale qui risque de mettre gravement en cause la pérennité de l'activité des travailleurs portuaires de la chambre de commerce de Calais, qui compte plus de 600 salariés. De plus, ces mesures qui sont appliquées au seul port de Calais et qui ne sont pas étendues à l'ensemble des ports européens commerçant avec le Royaume-Uni ne régleront en rien l'épineuse question de l'immigration clandestine.

Monsieur le secrétaire d'Etat, les salariés et la chambre de commerce de Calais souhaitent que soient enfin apportées des réponses concrètes à leurs légitimes interrogations.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le sénateur, vous avez soulevé des questions portant sur le projet de directive relative aux services portuaires, sur la décentralisation et sur l'application des accords du Touquet.

S'agissant du projet de directive relative aux services portuaires, le Parlement européen, lors de sa séance du 20 novembre dernier, a repoussé le compromis élaboré au mois de septembre entre le Conseil et une délégation du Parlement européen. Le Gouvernement prend acte du vote négatif du Parlement européen. Néanmoins, au niveau français, il est de toute façon nécessaire de clarifier la réglementation applicable aux services aux navires. Un avant-projet de décret sera soumis à concertation dans les semaines à venir sur ce sujet.

Mais au-delà de cette clarification réglementaire, il paraît indispensable que les partenaires sociaux jettent les bases de la reconnaissance des qualifications professionnelles requises pour exercer des métiers nécessitant, dans un contexte de compétition mondiale, une technicité de plus en plus affirmée, notamment dans la manutention, sans pénaliser le développement du cabotage maritime. La promotion de l'intermodalité et des autoroutes de la mer consacrée par le dernier CIADT, le comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, est en effet un enjeu essentiel.

En ce qui concerne la décentralisation des ports maritimes, la Haute Assemblée a examiné voilà quelques jours un projet de loi et y a apporté des améliorations. Ainsi, les ports d'intérêt national seront décentralisés. Le rôle d'autorité concédante sera donc transféré aux collectivités territoriales, sans affecter le rôle de concessionnaire exercé aujourd'hui, très majoritairement, par les chambres de commerce et d'industrie. Cette évolution ne remet nullement en cause les dispositions du droit du travail, de l'environnement, de la sécurité, telles qu'elles ont été définies par le législateur.

Quant aux accords du Touquet, ils concernent tous les ports de la Manche et de mer du Nord. Calais, premier port en importance pour le trafic transmanche, a travaillé depuis longtemps avec les services de l'Etat pour mettre en oeuvre des mesures de sûreté pour les voyageurs et de lutte contre l'immigration clandestine. Au-delà de ces accords du Touquet, tous les ports maritimes d'Europe et du monde vont devoir mettre en oeuvre le code international de sûreté maritime et portuaire, le code ISPS, approuvé par l'Organisation maritime internationale en décembre 2002. Son application, prévue pour le 1er juillet 2004, soulève des questions de financement et d'organisation sur lesquelles une mission interministérielle nous fera des propositions au cours de ce trimestre.

M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle.

M. Yves Coquelle. Monsieur le secrétaire d'Etat, votre réponse ne me satisfait qu'à moitié. En effet, concernant les accords du Touquet, ils s'appliquent au port de Calais alors qu'ils ne sont pas encore mis en oeuvre dans les ports voisins. Aussi, la concurrence déloyale que j'évoquais voilà quelques instants existe déjà et les salariés sont légitimement inquiets.

S'agissant de la décentralisation des ports aux collectivités territoriales, si je vous ai bien compris, monsieur le secrétaire d'Etat, elle n'affectera en rien le statut actuel des salariés du port de Calais. Est-ce bien cela ?

M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat. Oui, normalement !

M. Yves Coquelle. J'en prends acte.

PROJET D'ORDONNANCE

SUR LE PARTENARIAT PUBLIC-PRIVÉ

M. le président. La parole est à M. Francis Grignon, auteur de la question n° 383, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

M. Francis Grignon. Monsieur le secrétaire d'Etat, mon interrogation concerne le projet d'ordonnance qui va définir les conditions de réalisation des contrats de partenariat public-privé, dits contrats PPP.

Je rappelle que cette ordonnance est déconnectée du code des marchés publics, dont les décrets viennent d'être publiés.

Il s'agit d'un dispositif tout à fait nouveau. Cela va permettre aux maîtres d'ouvrage publics de traiter des marchés globaux aussi bien dans l'espace, depuis la conception en passant par la réalisation et la maintenance, que dans le temps, puisque ces projets, dans la mesure où ils concernent aussi la maintenance, pourront s'étaler sur toute la durée d'amortissement de l'ouvrage.

Bien évidemment, cela nécessitera un haut niveau de qualification de la part de ces entreprises que j'appellerai « entreprises globales », par opposition aux entreprises générales que nous avons connues dans le passé. En effet, elles devront tout réaliser et répondre à des critères aussi bien de création que de bonne fonctionnalité ou de bonne gestion au sens large, gestion économique, bien sûr, mais aussi environnementale, voire sociale dans certains cas.

Je souhaite poser trois questions concernant ce projet d'ordonnance, visant bien sûr à assurer une bonne qualité de l'ensemble du dispositif.

Premièrement, les champs d'application seront-ils bien identifiés d'un point de vue tant qualitatif que quantitatif, les réponses n'étant bien sûr pas les mêmes en fonction de ces différents champs d'application ?

Deuxièmement - et cette question est le corollaire de la première -, une fois bien définis ces champs d'application, la maîtrise d'oeuvre architecturale et technique pourra-t-elle être bien identifiée par le maître d'ouvrage ? Selon moi, il est important que le maître d'ouvrage connaisse en particulier le potentiel et la qualification de l'ingénierie, pour lui donner confiance et lui permettre de réaliser les marchés.

La troisième et dernière question est tout aussi importante. Puisque nous avons affaire à une entreprise globale, il faudra devant elle un maître d'ouvrage qui sache faire face. Par conséquent, va-t-on demander au maître d'ouvrage soit d'intégrer des compétences, soit d'y faire appel pour lui permettre de bien juger le marché qu'il doit traiter ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le sénateur, vous vous interrogez sur les limites d'emploi du futur contrat de partenariat public-privé.

Ces limites seront tout d'abord celles qu'a posées le Conseil constitutionnel puisque, vous le savez, celui-ci a estimé, par une décision en date du 26 juin 2003, que de tels contrats devraient correspondre « à des situations répondant à des motifs d'intérêt général tels que l'urgence qui s'attache, en raison de circonstances particulières ou locales, à rattraper un retard préjudiciable ou bien la nécessité de tenir compte des caractéristiques techniques, fonctionnelles ou économiques d'un équipement ou d'un service déterminé ».

Les futurs contrats de partenariat s'inscriront par conséquent dans ce cadre. J'ajoute que ces contrats n'auront évidemment aucun caractère obligatoire ; bien au contraire, les personnes publiques éventuellement intéressées par ce type de contrat devront procéder à une évaluation préalable et à une étude comparative pour établir la pertinence du recours à une telle formule.

Ainsi que le Gouvernement a déjà eu l'occasion de l'exprimer à plusieurs reprises, les contrats de partenariat public-privé n'ont nullement vocation à devenir le droit commun des constructions publiques ; ils seront en revanche adaptés à certaines opérations composites, de longue durée et comportant une implication financière lourde de l'opérateur privé.

S'agissant de l'intervention des professions de la maîtrise d'oeuvre, dans les contrats de partenariat public-privé, je peux vous donner l'assurance que le projet de texte s'entourera de toutes les précautions utiles à cet égard.

Dans son état actuel, le projet prévoit en effet que ces contrats devront clairement identifier les différents intervenants, leurs qualifications et leurs missions. Bien plus, il fait du choix des équipes de maîtrise d'oeuvre et de la qualité des ouvrages à réaliser des points importants de la négociation à mener avec les partenaires privés. Enfin, dans le cas de la réalisation de bâtiments, il préserve le principe d'un suivi de l'exécution par les concepteurs. Le cadre juridique envisagé réservera par conséquent le plein exercice de leurs missions aux différentes professions de la maîtrise d'oeuvre.

M. le président. La parole est à M. Francis Grignon.

M. Francis Grignon. Monsieur le secrétaire d'Etat, en tant qu'ancien praticien de l'ingénierie et comme président du groupe d'études sur l'industrie du bâtiment et des travaux publics du Sénat, je voulais simplement souligner, à travers cette question, l'importance de la qualité qui ne cesse de croître depuis la maîtrise d'ouvrage jusqu'à la maintenance. Il est par conséquent important que le maître d'ouvrage soit aussi qualifié que ses interlocuteurs. Vous m'avez rassuré en indiquant que ce nouveau type de contrat prévoira bien que cette qualification sera visible tout au long du processus.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à neuf heures cinquante-cinq, est reprise à dix heures.)

M. le président. La séance est reprise.

RETRAITE COMPLÉMENTAIRE DES AGRICULTEURS

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, en remplacement de M. Jean-Claude Peyronnet, auteur de la question n° 369, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

M. Roland Courteau. Monsieur le ministre, mon collègue Jean-Claude Peyronnet, retenu à la DATAR, m'a demandé de le suppléer, ce que je fais d'autant plus volontiers que je souhaite également attirer votre attention sur plusieurs des problèmes que soulève le système de retraite complémentaire obligatoire prévu par la loi n° 2002-308 du 4 mars 2002, confirmé par le décret d'application n° 2003-147 du 20 février 2003.

En premier lieu, nous considérons que les bénéficiaires du régime d'assurance vieillesse complémentaire sont définis trop strictement. Ne sont concernés, en effet, que les chefs d'exploitation. Nous désirons donc connaître quelles suites vous entendez réserver, monsieur le ministre, aux engagements pris d'étendre progressivement ce dispositif notamment aux conjoints et aux aides familiaux.

En second lieu, les dispositions réglementaires du décret n° 97-163 du 24 février 1997 empêchent toute revalorisation de la situation des titulaires de carrière incomplète et, surtout, consacrent le principe de la minoration pour le calcul des points supplémentaires. Ces dernières prescriptions ne sauraient être maintenues si l'on veut assurer une retraite décente à ces travailleurs.

Dès lors, je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous nous donniez des assurances quant à la volonté du Gouvernement de conduire une politique respectueuse des intérêts des retraités agricoles.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le sénateur, la situation des retraites agricoles constitue une priorité constante de l'action du ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

Cette priorité s'est d'ores et déjà traduite dans les faits. Ainsi, en moins de deux ans, nous sommes parvenus, d'une part, à mettre en oeuvre la retraite complémentaire obligatoire des agriculteurs et, d'autre part, à mensualiser ces retraites agricoles.

La mise en place et le financement de la retraite complémentaire obligatoire des exploitants agricoles à hauteur de 142 millions d'euros pour 2004, contre 28 millions d'euros en 2003, apportent déjà un complément de revenus à plus de 450 000 retraités du régime agricole.

Les premiers versements sont intervenus à compter de la mensualité d'avril 2003, soit au début du mois de mai 2003. Le Gouvernement a ainsi transformé une avancée sociale virtuelle en une avancée sociale réelle.

La création de ce régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles constitue la traduction d'une demande forte de la profession agricole et s'inscrit dans la continuité de l'ensemble des mesures prises depuis 1994, sous des gouvernements différents, en faveur de la revalorisation des retraites agricoles.

L'extension du champ d'application du régime de retraite complémentaire au-delà des seuls chefs d'exploitation est, en l'état actuel, difficile à envisager à très court terme, et ce pour deux raisons.

D'une part, cela supposerait une augmentation de la cotisation annuelle, qui est aujourd'hui déjà jugée trop importante par les organisations professionnelles elles-mêmes. D'autre part, la RCO étant financée à la fois par une augmentation des cotisations et par une subvention du budget de l'Etat, les 142 millions d'euros de l'Etat constituent déjà, vous en conviendrez, un effort important qui devra être apprécié pour aller au-delà, dans le cadre des équilibres budgétaires ultérieurs.

C'est la première fois - il faut le relever, même si c'était légitime - que l'Etat intervient dans le financement d'un régime de retraite complémentaire. Jusqu'à présent, en effet, les financements de l'Etat s'étaient toujours limités aux seuls régimes de base.

Cela étant, je n'ignore pas, monsieur le sénateur, qu'un certain nombre de conjoints d'exploitants agricoles - des conjointes, le plus souvent - ou d'aides familiaux sont dans des situations difficiles. Aussi avons-nous constitué des groupes de travail, en liaison avec la Mutualité sociale agricole, pour examiner les moyens d'améliorer le sort de ces personnes de manière pragmatique.

De plus, la question spécifique de la retraite complémentaire obligatoire sera étudiée dans le cadre du Conseil supérieur des prestations sociales agricoles. C'est dans le prolongement des travaux et des concertations en cours que, le moment venu, nous prendrons les décisions idoines.

S'agissant du décret du 24 février 1997, dit « décret Vasseur », il est utile de rappeler qu'il a d'ores et déjà été abrogé par l'article 15 du décret du 1er mars 2002. Ce dernier décret reprenait, en les modifiant, l'ensemble des dispositions sur les revalorisations. Cependant, il existe encore des seuils pour l'accès aux mesures de revalorisation des retraites agricoles. Les pouvoirs publics ont, en effet, privilégié, dans l'effort de revalorisation, l'augmentation des pensions correspondant à une carrière longue en agriculture.

Une réflexion peut être menée sur ces seuils, car des progrès sont toujours souhaitables en matière de protection sociale. Néanmoins, comme je le disais, toute avancée en la matière doit tenir compte des équilibres économiques et budgétaires de notre pays.

Monsieur le sénateur, on ne le répétera jamais assez, un certain nombre d'améliorations ont été apportées, sous des gouvernements différents, depuis dix ans, pour les retraites des agriculteurs.

Depuis dix-huit mois, la mensualisation et la retraite complémentaire ont permis un certain nombre d'avancées, mais je suis d'accord avec vous pour reconnaître qu'il reste encore à faire. Sachez que nous y travaillons. J'espère que nous pourrons inscrire notre action dans une démarche pluriannuelle pour permettre à nos agriculteurs de voir leur situation s'améliorer.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Concernant la mensualisation des pensions, nous sommes tout à fait d'accord, c'est un fait et nous en prenons acte.

En revanche, s'agissant des modalités de mise en oeuvre de la retraite complémentaire obligatoire, permettez-moi de vous dire, monsieur le ministre, qu'elles laissent à désirer. Et ce sera d'ailleurs l'objet, tout à l'heure, de ma propre question.

Quant à l'extension de cette mesure aux conjoints et aux aides familiaux, je ne suis pas tout à fait convaincu par votre réponse, monsieur le ministre, pas plus que ne le sera sans doute mon collègue et ami Jean-Claude Peyronnet.

Bref, je prends acte de la constitution de groupes de travail en vue d'améliorer la situation des conjoints et des aides familiaux : le plus tôt sera le mieux pour la mise en oeuvre de leurs propositions, monsieur le ministre !

RÉGIME DE RETRAITE AGRICOLE COMPLÉMENTAIRE

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 374, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

M. Roland Courteau. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention, en mon nom et au nom de mon ami Raymond Courrière, sur le profond mécontentement des anciens exploitants agricoles du département de l'Aude et, de manière générale, du Languedoc-Roussillon, à la suite de la mise en oeuvre du décret n° 2003-146 relatif, lui, aux conditions d'application et à l'organisation du régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles.

Force nous est, en effet, de constater, et nous le déplorons, que l'application de ce décret fait apparaître deux catégories de retraités non salariés agricoles : d'une part, ceux qui ont fait valoir leurs droits à la retraite avant le 1er janvier 1997, qui doivent justifier de 32,5 ans de cotisations en tant que non-salariés agricoles, dont 17,5 en tant que chef d'exploitation, et, d'autre part, ceux qui ont fait valoir leurs droits après le 1er janvier 1997 et qui devront, quant à eux, justifier de 37,5 ans de cotisation tous régimes confondus, dont 17,5 en tant que chef d'exploitation.

Il y a donc là deux régimes différents, dont l'un conduit à éliminer un très grand nombre de bénéficiaires de la retraite complémentaire. Légitimement, ceux-ci s'estiment particulièrement lésés, monsieur le ministre, et le président de la section FNSEA des anciens exploitants en Languedoc-Roussillon, M. Delpoux, vous l'a même écrit : pour lui, il s'agit là d'une injustice flagrante ! Voilà en effet des hommes et des femmes parmi les plus âgés des anciens exploitants, qui ont travaillé dur pendant toute leur vie et qui, de par la rédaction d'un décret « couperet », se trouvent écartés du bénéfice d'une loi que, nous, parlementaires, avions adoptée à l'unanimité parce que nous considérions précisément qu'il s'agissait d'une avancée sociale majeure et, à vrai dire, d'une simple mesure de justice et d'équité.

Aujourd'hui, nous ne retrouvons plus l'esprit de cette loi. Nous voulions que soit enfin assurée la parité avec les autres secteurs d'activité ; nous voulions que soit instaurée l'équité pour ces anciens exploitants, et nous sommes confrontés à une part d'arbitraire dans les règles d'application et, par voie de conséquence, à la création d'une distinction entre des bénéficiaires et des non-bénéficiaires. Nous, parlementaires qui avons adopté cette loi, nous ne reconnaissons plus notre enfant, monsieur le ministre !

Les responsables des anciens exploitants de mon département me rappelaient, il y a seulement quelques jours, une dure et injuste réalité : sur 15 5000 chefs d'exploitation, 1 067 bénéficient d'une retraite complémentaire obligatoire complète, soit 6,8 % seulement, tandis que 14 % perçoivent une retraite proratisée. Pour le département voisin des Pyrénées-Orientales, les chiffres ne sont guère meilleurs. Sur 15 000 chefs d'exploitation, 5,6 % bénéficiaient d'une retraite complémentaire obligatoire, et 11 % d'une retraite proratisée. A peu de chose près, nous retrouvons des pourcentages identiques pour les autres départements du Languedoc-Roussillon. Mes collègues MM. Peyronnet et Demerliat me signalaient une situation similaire dans le département de la Haute-Vienne.

En revanche, dans d'autres régions, où les grandes exploitations étaient plus nombreuses à l'époque, le pourcentage des bénéficiaires serait plus élevé, m'a-t-on dit, et se situerait entre 60 % et 70 %. Il est vrai que, dans nos régions, les exploitations étant de taille bien plus modeste, les jeunes, sur les conseils de la MSA, préféraient souvent passer d'abord par le stade de salarié avant d'accéder au statut de chef d'exploitation. Mais, aujourd'hui, les voilà pénalisés. Convenons, monsieur le ministre, que le décret suscite un sentiment d'injustice mêlé d'incompréhension. Tel agriculteur, par exemple, a travaillé vingt-quatre ans en qualité de chef d'exploitation et quinze ans comme salarié agricole : il n'a pas le droit à la retraite complémentaire. Son épouse n'a exercé en qualité de chef d'exploitation que durant sept ans, pourtant, elle perçoit la retraite complémentaire proratisée.

Mais je prends un autre exemple : tel ancien exploitant actuellement assujetti à l'impôt de solidarité sur la fortune et n'ayant jamais été, et pour cause, salarié agricole, perçoit actuellement la retraite complémentaire obligatoire, pendant que tel autre bénéficiant, quant à lui, d'une pension de retraite tout à fait modeste - 450 euros par mois environ - se la verra refuser.

Le président Delpoux m'a fait part d'un cas exemplaire dans l'Aude. Des jumeaux sont nés en 1938. L'un, Pierre, s'est engagé dans l'armée à vingt ans et a pris sa retraite quinze ans après, en 1973. Son frère Paul est, lui, resté salarié agricole du père pendant quinze ans, jusqu'en 1973, année au cours de laquelle le père partage l'exploitation : les deux fils deviennent chefs d'exploitation.

En 1996, Paul prend sa retraite. Il n'aura pas droit à la retraite complémentaire obligatoire, bien qu'il ait exercé pendant vingt-trois ans son activité d'exploitant agricole.

En 1997, Pierre fait valoir à son tour ses droits à la retraite, après avoir été vingt-quatre ans chef d'exploitation. Il aura droit, lui, à la retraite complémentaire obligatoire.

Comment voulez-vous, monsieur le ministre, que cela ne suscite pas incompréhension et colère ?

Non, ce qu'il faut, c'est modifier le décret, en proratisant la retraite, afin d'en rendre bénéficiaires tous les anciens exploitants, qu'ils aient été salariés agricoles ou non.

Monsieur le ministre, vous ai-je convaincu de le faire ?

M. René-Pierre Signé. Nous allons le voir !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le sénateur, notre gouvernement est pleinement conscient de la situation des retraites agricoles : nous nous attachons à les revaloriser.

La mise en place et le financement de la retraite complémentaire obligatoire des exploitants agricoles, à hauteur de 142 millions d'euros pour 2004, contre 28 millions d'euros en 2003, apporte déjà un complément de revenus à plus de 450 000 retraités du régime agricole.

Les premiers versements sont intervenus à compter de la mensualité d'avril 2003, soit au début du mois de mai 2003. La création de ce régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles constitue la traduction d'une forte demande de la profession agricole, et s'inscrit dans la continuité de l'ensemble des mesures prises depuis 1994, sous plusieurs gouvernements, en faveur de la revalorisation des retraitres agricoles.

Ainsi, les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricoles dont la retraite de base a pris effet avant le 1er janvier 1997 doivent justifier de 32,5 années, soit 130 trimestres, d'activité non-salariée agricole, dont 17,5 années - soit 70 trimestres - en qualité de chef d'exploitation à titre exclusif ou principal, pour bénéficier de points de retraite complémentaire sans contrepartie contributive.

Les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricoles qui ont pris leur retraite à compter du 1er janvier 1997 doivent justifier de 37,5 années - soit 150 trimestres - d'assurance ou de période équivalente, tous régimes confondus, dont 17,5 années - 70 trimestres -, en qualité de chef d'exploitation à titre exclusif ou principal pour bénéficier également de points gratuits.

La différenciation des conditions d'accès au bénéfice de l'attribution de droits gratuits de retraite complémentaire pour les assurés retraités avant le 1er janvier 1997 et pour ceux dont la pension a pris effet après cette date est liée au maintien d'une certaine continuité et d'une certaine cohérence avec les conditions d'ouverture des droits à revalorisation des retraites de base, qui ont privilégié les personnes non salariées ayant effectué une carrière longue en agriculture.

Le décret auquel vous faites référence à cet égard, monsieur le sénateur, est donc la traduction de la loi de 2002, que vous avez également évoquée, et qui, je le rappelle, toute polémique mise à part, n'était pas du tout financée. Nous avons dû trouver ces financements, soit 28 millions d'euros pour 2003 et 142 millions d'euros pour 2004, afin de transformer une avancée sociale virtuelle en une avancée sociale réelle.

M. Jean Bizet. Très bien !

M. Hervé Gaymard, ministre. Quant à la modification des seuils permettant l'attribution de droits gratuits, elle entraînerait une dépense justifiée, certes, mais importante. Sur ce point, le Gouvernement reste ouvert à la discussion. Lors de l'élaboration de la loi de finances pour 2005, dans le cadre des arbitrages qui concerneront mon ministère, entre les crédits de l'agriculture au sens strict, de la pêche, de la protection sociale agricole et de l'enseignement agricole, nous pourrons tenter de résoudre les problèmes que vous avez illustrés de manière fort éclairante au moyens de cas individuels. Cela montre une fois de plus que, lorsqu'on met en place des règles, la situation individuelle des personnes peut faire apparaître la nécessité d'apporter un certain nombre d'améliorations.

Je souhaite, bien entendu, que nous puissions résoudre les problèmes que vous avez fort opportunément soulevés, monsieur le sénateur, mais, aujourd'hui, je ne peux pas vous apporter d'autre réponse que celle qui met en avant les choix budgétaires qui seront faits pour 2005.

Sachez que, s'agissant de la protection sociale agricole, notamment des retraites, mon ambition au sein de ce ministère est d'apporter, année après année, une amélioration constante. Ce qui a été fait depuis dix ans est important mais encore insuffisant. Il faut poursuivre dans cette voie.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Nous avons échangé nos arguments et nous verrons si les anciens exploitants auront été convaincus par les vôtres.

Concernant le précédent gouvernement, puisque vous avez vous-même évoqué son action, et cela, avez-vous dit, hors de toute polémique, il convient tout de même de rappeler qu'il est à l'origine d'un plan de revalorisation des pensions de l'ordre de 3,2 milliards d'euros.

Monsieur le ministre, je profite de votre présence à la Haute Assemblée ce matin pour vous signaler un problème bien précis dont je viens de prendre connaissance. Selon les informations dont je dispose, du fait de restrictions budgétaires, l'ONIVINS, l'Office national interprofessionnel des vins, vient de fermer son antenne de Narbonne. C'est un choc qui va susciter bien des turbulences. Alors que Narbonne est un véritable symbole pour la viticulture et le Languedoc-Roussillon, le plus grand vignoble du monde, cette décision de fermeture apparaît plus que surprenante : scandaleuse.

Elle sera vraisemblablement considérée comme un camouflet infligé à la viticulture méridionale au moment où tous les regards sont tournés vers l'avenir.

Monsieur le ministre, je vous demande de vous saisir personnellement de cette question afin que l'ONIVINS revienne d'urgence sur cette décision particulièrement regrettable.

SANTÉ DES FEMMES

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, auteur de la question n° 381, adressée à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

Mme Marie-Claude Beaudeau. A travers ma question, je souhaite me faire l'écho de l'angoisse vécue par dix millions de femmes ménopausées. Je signale que, en 2025, les femmes ménopausées représenteront près de 50 % de la population féminine française.

Pour l'instant, nous ne connaissons ni l'avis du ministre de la santé ni les décisions qui sont éventuellement en cours de préparation sur les traitements hormonaux substitutifs, ou THS, au regard des questions qui se posent quant à leurs avantages en matière de prévention de l'ostéoporose et aux risques qu'ils font peser, s'agissant notamment du cancer du sein.

Tout au long de l'année 2003, la presse a fait état de doutes, de troubles, alors que depuis vingt ans, dans le monde médical, cet « élixir de jouvence » était paré de toutes les vertus, qu'il constituait une aide incontestable pour passer le cap de la ménopause en agissant efficacement contre les troubles fonctionnels, si l'on en croit le docteur Henri Rozenbaum, président de l'Association française pour l'étude de la ménopause.

Il s'agit bien d'un problème de santé publique dans la mesure où une Française sur deux récemment ménopausée, entre cinquante et cinquante-cinq ans, suit un THS.

Ce traitement permet de contrôler des symptômes très pénibles et de prévenir l'ostéoporose. Or, la diminution de la densité osseuse et la fragilisation des os peuvent causer des fractures, en particulier celle, tant redoutée, du col du fémur.

Les THS ont été prodigués en 2002 à 2 millions de femmes.

C'est aussi un problème de santé publique étant donné la gravité des risques qui pourraient exister en matière cardio-vasculaire et d'apparition de cancer du sein.

Deux organismes semblent avoir pris position, en attendant une position officielle du Gouvernement.

Premièrement, l'Académie de médecine, sans remettre en cause les THS, a préconisé, en décembre 2002, un traitement aussi bref que possible et à de faibles doses.

Deuxièmement, sous la signature de son directeur général, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l'AFSSAPS, a annoncé le 28 janvier 2003 que, désormais, l'autorisation de mise sur le marché, l'AMM, serait modifiée afin d'intégrer les nouvelles données concernant le risque cardio-vasculaire, mais sans évoquer le risque de cancer du sein.

L'AFSSAPS fonde sa décision sur deux études, l'une américaine, l'autre anglaise. L'étude américaine, publiée en juillet 2002, portant sur 16 000 patientes conclut, d'une part, que les THS ne seraient d'aucun bénéfice en terme de prévention cardio-vasculaire et, deuxièmement, qu'ils augmenteraient le risque de cancer du sein et de thrombose veineuse.

De nombreux articles de presse ont alors « brodé » sur ces conclusions, suscitant bien des interrogations et, je le disais, l'angoisse des femmes concernées : 32 % des femmes suivant un THS ont arrêté leur traitement entre septembre 2002 et juillet 2003.

De nombreux médecins, notamment des gynécologues, laissent leurs patientes libres de choisir.

Madame la secrétaire d'Etat, la position de l'AFSSAPS est-elle celle du Gouvernement ?

Confirmez-vous ce qu'affirmait M. le ministre de la santé, en décembre 2003, devant la commission des affaires sociales : « Lorsque l'on suspend le THS, on évite la possible survenue du cancer du sein » ? Compte tenu de nos connaissances en la matière, je considère cette affirmation comme bien hasardeuse.

Pourquoi n'a-t-on pas décidé de mener une étude sérieuse et d'envergure sur ces traitements et les pratiques médicales en France ? Les références américaines et anglaises ne sont pas suffisantes pour décider des conséquences d'un THS appliqué aux femmes de notre pays. Il ne faudrait pas que, sous prétexte du principe de balancier, après avoir encensé le THS, on le diabolise. Il ne faudrait pas non plus qu'à chaque avancée des femmes vers le mieux-vivre on assiste à une remise en cause et à un retour en arrière.

Premièrement, quels sont, d'après M. le ministre de la santé, les bienfaits ou les méfaits des THS utilisés actuellement en France ?

Deuxièmement, quelle étude épidémiologique est-il envisagé de conduire concernant les THS ?

Des décisions doivent être prises au plus vite. De nouveaux faux-fuyants accroîtraient encore l'angoisse des femmes.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Madame le sénateur, vous interrogez le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur les conséquences médicales des traitements hormonaux substitutifs chez les femmes ménopausées.

Les THS consistent à compenser l'arrêt de sécrétion ovarienne survenant chez la femme ménopausée par l'association d'un oestrogène et d'un progestatif administrés par voie générale, qui protège du risque du cancer de l'endomètre. Ils ont deux objectifs : le traitement des symptômes de carence en oestrogène lors de l'installation de la ménopause et, à plus long terme, le traitement à visée préventive de la perte osseuse post-ménopausique, pour éviter la survenue de fractures.

En 2001, dans le rapport de l'Académie de médecine sur la prévention, le problème du bilan des bénéfices du THS et de ses risques a été soulevé. En 2002, une étude américaine, Women's health initiative, considère que les risques sont supérieurs aux bénéfices du traitement : risques de cancer du sein, de thrombose veineuse, d'embolie pulmonaire, auxquels s'ajouterait un risque cardio-vasculaire artériel.

Le 28 janvier 2003, l'AFSSAPS, se fondant sur l'avis d'un groupe d'experts, diffuse des recommandations de bonnes pratiques qui s'alignent sur l'attitude américaine. Les conclusions principales portent sur le fait que le THS a un effet prouvé sur les symptômes de la ménopause et prévient bien les fractures ostéoporatiques. En revanche, il n'a pas d'effet préventif dans le domaine cardio-vasculaire et augmente la fréquence du cancer du sein, ce risque disparaissant avec l'arrêt du THS.

L'AFSSAPS recommande donc de n'utiliser le THS que pour le traitement des symptômes et d'en limiter l'utilisation.

Il me semble, madame le sénateur, qu'en l'état actuel de nos connaissances des études complémentaires s'imposent. C'est la raison pour laquelle, d'une part, plusieurs études épidémiologiques sont actuellement conduites par des équipes de l'INSERM et, d'autre part, le ministre a demandé que de nouvelles propositions viennent compléter ces premières études.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.

Mme Marie-Claude Beaudeau. Je vous remercie, madame le secrétaire d'Etat, de votre réponse, mais j'avoue que je reste un peu sur ma faim. Je suis étonnée que l'on n'ait pas plus avancé sur la question.

Lors de la publication de l'étude américaine, des médecins et des chercheurs ont fait remarquer que, en matière de THS, les Américaines n'avaient pas recours aux mêmes produits que les Françaises et qu'elles n'avaient pas non plus les mêmes habitudes de vie, notamment en ce qui concerne l'alimentation. Ils ont également souligné que l'étude britannique était très partielle.

Par ailleurs, je tiens à signaler que la MGEN, la Mutuelle générale de l'éducation nationale, a réalisé une étude portant sur 100 000 de ses adhérentes. La responsable de cette étude, aujourd'hui achevée, m'a indiqué, en novembre dernier, que les résultats allaient faire l'objet d'une publication scientifique. Un article sur l'étude britannique est également en cours de préparation.

Pourquoi envisager de nouvelles études alors que nous disposons déjà, en France, de celle de la MGEN, qui peut d'ailleurs être contrôlée ?

M. Mattei avait annoncé qu'un groupe s'était réuni le 26 septembre dernier en liaison avec l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments et que ses premières conclusions nous seraient communiquées avant la fin de l'année 2003. Quelles sont-elles ?

Je ne comprends pas, dans ces conditions, madame la secrétaire d'Etat, que vous n'ayez pas fait état d'une prochaine prise de décision. Si les traitements hormonaux substitutifs ont des conséquences graves pour la santé des femmes, il faut les interdire. Si, au contraire, les risques sont inexistants ou très limités, il faut le démontrer.

Finalement, les femmes et les médecins se demandent à quel moment ils ont été trompés. Est-ce il y a vingt ans, lorsque les produits ont été mis sur le marché, lorsqu'on ne trouvait que des avantages aux THS ? Est-ce aujourd'hui, au moment où, tout à coup, on ne leur trouve que des défauts ?

CONSTRUCTION D'UN RÉACTEUR

DE TROISIÈME GÉNÉRATION

M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, auteur de la question n° 354, adressée à Mme la ministre délégué à l'industrie.

M. Jean Bizet. Madame la ministre, vous avez proposé à M. le Premier ministre la construction d'un réacteur de troisième génération EPR, ou European Pressurized Reactor, pour renouveler le parc des centrales à partir de 2020. Ce projet a été diversement accueilli, tant par les experts mandatés par le Gouvernement pour mener le débat national sur l'énergie que par l'opinion publique.

Compte tenu des réactions mitigées et des interrogations suscitées par une telle annonce, il me semble indispensable de faire preuve de la plus grande vigilance quant au choix d'une éventuelle implantation.

Puisque la construction se ferait a priori à côté d'une centrale déjà en fonctionnement, il paraît opportun de sélectionner un secteur géographique habitué psychologiquement depuis plusieurs années à la présence du nucléaire.

Dès lors, le département de la Manche semble digne de retenir l'attention en raison de la bonne acceptation par la population des différentes structures existantes ainsi que de l'avantage non négligeable que représente une implantation en zone côtière, eu égard aux contraintes liées à l'élévation du degré de température rencontrée en rivière et aux effets de la sécheresse, notamment la baisse du niveau des cours d'eau.

Madame la ministre, je souhaiterais donc que vous puissiez nous préciser l'état de la réflexion du Gouvernement à ce sujet et nous indiquer le type d'implantation qui pourrait être envisagé.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le sénateur, vous l'avez rappelé, j'ai présenté au début du mois de novembre dernier un Livre blanc sur les énergies qui détaille les orientations énergétiques que nous proposons aux Français.

Outre la relance de la maîtrise de l'énergie et le développement des énergies renouvelables, c'est-à-dire la diversification de notre bouquet énergétique, le Gouvernement veut maintenir l'option nucléaire ouverte. Autrement dit, il souhaite disposer à l'horizon 2020, au moment où beaucoup de centrales nucléaires auront plus de quarante ans, de l'ensemble des solutions technologiques disponibles pour pouvoir remplacer dans les meilleures conditions le parc nucléaire actuel.

C'est dans ce contexte qu'est envisagée la construction du réacteur à eau pressurisée européen, l'EPR. Je précise bien qu'il s'agit non pas d'une décision du Gouvernement mais d'une proposition, actuellement soumise à une très large concertation, qui s'appuie sur de nombreux rapports, notamment celui de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Vous comprendrez, monsieur le sénateur, que, dans ces conditions, il soit encore un peu tôt pour réfléchir plus avant au site qui, parmi les centrales nucléaires actuelles, pourrait le mieux accueillir un éventuel EPR.

Je peux néanmoins vous indiquer que les avantages du département de la Manche, que vous avez à raison soulignés, font effectivement de ce département un site dont il faudra examiner avec attention, le moment venu, la candidature.

M. le président. La parole est à M. Jean Bizet.

M. Jean Bizet. Je vous remercie, madame la ministre, de ces précisions.

Je prends bonne note de la proposition du Gouvernement et je souhaite qu'elle se concrétise prochainement. Je suis persuadé que le Parlement dans son ensemble appuiera la Gouvernement dans ce qui m'apparaît comme un bon choix au regard tant de la protection de l'environnement, en particulier de la lutte contre l'effet de serre, que de la couverture de nos besoins énergétiques.

Je relève aussi que vous avez souligné la pertinence de la candidature du département de la Manche. Je me permettrai d'insister sur le fait que le choix de ce département permettrait non seulement de conforter un pôle d'excellence existant, mais également d'assurer la mutation d'un bassin d'emploi confronté à la transformation de toute la filière de construction navale.

Madame la ministre, tous les parlementaires et tous les élus locaux de la Manche seront à vos côtés sur ce dossier difficile en ce qui concerne aussi bien la construction proprement dite d'un réacteur que les fameux couloirs de ligne.

ÉNERGIE ÉOLIENNE

M. le président. La parole est à M. Michel Teston, auteur de la question n° 372, adressée à Mme la ministre déléguée à l'industrie.

M. Michel Teston. Madame la ministre, un certain nombre d'élus et de citoyens ardéchois m'ont fait part de leurs inquiétudes au sujet de la mise en oeuvre des projets de parcs de production d'énergie éolienne.

Ils craignent, en particulier, une prolifération anarchique de ces installations, au détriment des sites naturels et des paysages et, plus généralement, de leur qualité de vie.

Ils ne sont pas opposés à la production d'énergie éolienne, mais dénoncent le manque d'information des populations concernées et l'absence apparente d'orientation politique cohérente.

Toutes les études indiquent que, si la France veut honorer les engagements fixés en matière de développement des énergies renouvelables, l'acceptation sociale des projets d'implantation est indispensable, ce qui impose l'organisation d'une large concertation et l'accès du public à l'information.

Aussi, je souhaite, madame la ministre, que vous m'indiquiez si vous entendez engager rapidement la procédure de transposition de la directive européenne du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement.

En outre, le Gouvernement n'affiche pas une démarche cohérente et lisible pour nos concitoyens en matière d'énergie éolienne.

Alors que plusieurs dispositions de la loi du 3 janvier 2003 relative aux marchés énergétiques et de la loi du 2 juillet 2003 vont dans le sens d'une meilleure information des populations et d'un encadrement régional du développement de ce mode d'énergie, la circulaire interministérielle d'application incite les préfets à accélérer la concrétisation des projets en cours.

En Ardèche, la préfecture a mis en oeuvre un document cadre du développement de l'éolien, qui constitue un outil intéressant pour les porteurs de projets. Toutefois, ce document ne lève pas totalement les inquiétudes des Ardéchois. De plus, un certain nombre de permis de construire ont été accordés avant même sa publication. On peut donc penser que les schémas régionaux éoliens constitueront surtout un inventaire des parcs éoliens déjà en fonctionnement !

Madame la ministre, pouvez-vous me préciser les véritables objectifs du Gouvernement en matière de politique de développement de l'énergie éolienne ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le sénateur, comme je viens de l'indiquer à M. Jean Bizet, les orientations du Gouvernement en matière de politique énergétique sont contenues dans le Livre blanc sur les énergies que j'ai soumis très largement à la consultation du public.

Ces orientations reposent, je le rappelle, sur un triptyque indissociable : la maîtrise de la consommation d'énergie, le développement des énergies renouvelables et une option nucléaire ouverte, pour les raisons que je viens de préciser.

Le deuxième pilier de cette politique énergétique consiste donc, pour diversifier notre bouquet énergétique, à développer toutes les énergies renouvelables, au premier rang desquelles l'éolien, qui est la filière la plus mature.

L'inscription dans la loi de l'objectif ambitieux de 21 % d'énergie renouvelable dans nos ressources énergétiques, qui nous a été fixé par l'Union européenne, vous sera donc proposée.

S'agissant de l'énergie éolienne, j'ai d'ores et déjà fixé, par arrêté du 7 mars 2003, l'objectif de mise en service de centrales éoliennes à hauteur de 2 000 à 6 000 mégawatts d'ici à 2007.

Toutefois, ce développement ne saurait réussir sans une bonne acceptation des populations locales.

Monsieur le sénateur, je partage vos préoccupations quant à une prolifération anarchique de l'implantation des éoliennes. J'ai été saisie à maintes reprises par des élus qui me demandent de tenir compte de cette question. Je puis dire que j'y suis tout à fait attentive.

Il importait donc de donner de la clarté et de la transparence à l'ensemble des procédures conduisant à la réalisation de parcs éoliens et d'en faciliter l'implantation locale par une concertation approfondie.

C'est la raison pour laquelle Mme Bachelot-Narquin, M. de Robien et moi-même avons adressé aux préfets, le 10 septembre dernier, une circulaire donnant des directives en ce sens.

Il s'agit donc non pas d'accélérer le développement de l'éolien, mais de réaliser dans la sérénité et sans bureaucratie excessive les enquêtes publiques et les études d'impact nécessaires à la bonne information des parties prenantes.

Les services de l'Etat sont également invités à apporter leur concours aux régions qui souhaitent se doter d'un schéma régional de l'éolien afin d'en encadrer le développement.

Toutes ces idées seront d'ailleurs approfondies dans le cadre du futur projet de loi sur les énergies que je présenterai prochainement au Parlement.

La question de l'information des populations et du droit d'accès aux informations environnementales détenues par les autorités publiques est donc au coeur de cette circulaire. J'aurai d'ailleurs l'occasion de m'en entretenir très prochainement avec MM. les préfets.

Ce texte est donc bien conforme à la directive du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement et dont la transposition est conduite par les services de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.

M. le président. La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Je rappelle néanmoins que ma question portait sur deux points.

S'agissant tout d'abord de la transposition de la directive européenne concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement, j'ai cru comprendre que votre collègue Mme Roselyne Bachelot s'en préoccupait. Je n'ai cependant pas obtenu de réponse précise quant à la date à laquelle pourrait intervenir cette transposition.

Le deuxième point de ma question était relatif au décalage que j'ai constaté, comme d'autres, entre, d'une part, la volonté affichée par le Gouvernement de veiller à la concertation avec la population et d'éviter le développement anarchique de l'éolien, et, d'autre part, la réalité des actes qui visent - vous avez vous-même fait état de votre circulaire interministérielle - à accélérer, quoi que vous en disiez, les projets sans que les schémas régionaux éoliens aient été arrêtés - ils ne le sont d'ailleurs toujours pas - et sans que des documents opposables aient été mis en place. A cet égard, madame la ministre, vous n'avez apporté aucune clarification et je continue à considérer qu'il n'y a pas de véritable cohérence dans la politique actuelle du Gouvernement en matière de développement de l'éolien.

DROITS ET OBLIGATIONS DES APPRENTIS

M. le président. La parole est à M. Alain Gournac, auteur de la question n° 365, adressée à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.

M. Alain Gournac. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, bien souvent, les artisans, en plus de leur métier proprement dit, forment des apprentis. Cette formation, compte tenu des lacunes en matière d'acquis fondamentaux, suppose un engagement supplémentaire des maîtres d'apprentissage.

Or, lorsque l'inspection du travail vient opérer un contrôle, les questions posées à l'apprenti sont accompagnées de la remise d'une plaquette consacrée aux seuls droits de ce dernier. Il n'y est question ni des droits du maître d'apprentissage ni des devoirs de l'apprenti.

Je vous demande donc, madame la ministre, si les services de l'Etat doivent continuer à s'adresser à notre jeunesse, et de façon plus générale à nos concitoyens, en attirant leur attention sur leurs seuls droits et en passant ainsi régulièrement sous silence leurs devoirs.

Dans ce cas précis, l'inspection du travail ne devrait-elle pas, lorsqu'elle informe les apprentis sur leurs droits, saisir l'occasion de leur rappeler leurs devoirs ? Ce serait une façon de contribuer à la mise en place d'un dialogue social responsable - on en parle beaucoup - et adulte entre employés et employeurs, entre apprentis et maîtres d'apprentissage.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Votre question, monsieur le sénateur, porte sur la remise d'une plaquette consacrée aux seuls droits des apprentis, par les inspecteurs du travail, à l'occasion des contrôles en entreprise. Cette démarche paraît effectivement déséquilibrée en termes tant de devoirs des apprentis que de droits des maîtres d'apprentissage.

Les consultations menées dans le cadre de la mission pour relancer l'apprentissage, confiée par le Premier ministre au secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, ont effectivement fait apparaître un manque d'informations sur les droits et devoirs de chacun des partenaires d'un contrat d'apprentissage, auxquels il faut ajouter les formateurs des centres de formation d'apprentis.

L'une des mesures proposées dans le Livre blanc présenté le 16 octobre 2003 est l'institution, au moment de la signature du contrat, de la signature d'une charte tripartite explicitant les droits et devoirs de chacun. Cette charte élaborée par branche serait signée par l'apprenti, par l'employeur et par le centre de formation des apprentis, le CFA. Au-delà de l'aspect formel de cette charte, c'est la responsabilisation et la mobilisation accrues de l'ensemble des acteurs de l'apprentissage qui seront l'un des leviers du développement de cette voie efficace pour répondre aux besoins des entreprises de formation de main-d'oeuvre qualifiée.

M. le président. La parole est à M. Alain Gournac.

M. Alain Gournac. Madame la ministre, j'ai bien évidemment écouté votre réponse avec beaucoup d'intérêt, car il s'agit-là, selon moi, d'une anomalie incroyable. Lorsque j'ai pris connaissance du document, je n'en ai pas cru mes yeux !

Mais, madame la ministre, au-delà de la plaquette remise aux apprentis, il va falloir examiner de plus près l'ensemble des documents distribués aux administrés. Trop souvent, en effet, ces derniers nous interrogent quant à leurs droits, sans jamais songer à s'enquérir de leurs devoirs. Si, peu à peu, nous réussissions à revenir là-dessus et à établir un équilibre entre les droits et les devoirs de chacun, ce serait une belle évolution, souhaitée par nombre de nos concitoyens. Les jeunes y sont certainement prêts, mais encore faut-il le leur rappeler, car, lorsqu'on est jeune, on ne pense pas à tout cela.

Je vous remercie donc de votre réponse, madame la ministre, étant entendu que je serai très attentif à l'évolution de la plaquette que j'ai évoquée dans ma question.

DIFFICULTÉS DES CENTRES D'HÉBERGEMENT

ET DE RÉINSERTION SOCIALE DE LA NIÈVRE

M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé, auteur de la question n° 343, adressée à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. René-Pierre Signé. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre sur les conditions de fonctionnement et de financement des centres d'hébergement et de réinsertion sociale, les CHRS, du département de la Nièvre, mais mes remarques vaudront peut-être pour d'autres départements.

Destinés à l'accueil, au soutien ou à l'accompagnement social de personnes ou de familles en détresse, les CHRS relèvent de la loi du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales.

La loi d'orientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions est venue compléter le dispositif en prenant en compte les nouvelles missions des CHRS sur l'urgence sociale et l'insertion.

Aujourd'hui, cette belle mission paraît compromise. Le niveau des moyens financiers existants, au titre de l'aide sociale de l'Etat, n'est pas suffisamment en phase avec la démarche de renforcement progressif des capacités de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Les associations gestionnaires de la Nièvre regrettent, en outre, certaines dispositions du décret d'application du 3 juillet 2001 qui sont en retrait par rapport à l'esprit de la loi du 29 juillet 1998. Ainsi, les CHRS du département de la Nièvre rencontrent un certain nombre de difficultés, notamment financières, qui les empêchent de remplir leur rôle.

En conséquence, monsieur le ministre, j'aimerais savoir quelles mesures vous comptez prendre afin que les associations de réinsertion sociale puissent poursuivre leurs missions au bénéfice des publics en difficulté sociale.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine. Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser l'absence de M. François Fillon.

Plusieurs mesures budgétaires ont été prises en 2003 afin de permettre aux centres d'hébergement et de réinsertion sociale de jouer leur rôle au bénéfice des publics en difficulté sociale dans des conditions satisfaisantes.

La dotation de fonctionnement des CHRS, votée en loi de finances pour 2003, s'élève à 428,39 millions d'euros, contre 417,56 millions d'euros en 2002, soit une progression de 2,59 % permettant le financement de 33 000 places.

Cette hausse comprend, d'une part, une mesure d'ajustement de 4,4 millions d'euros destinée à prendre en compte l'évolution de la masse salariale et, d'autre part, la création de 500 places supplémentaires de CHRS pour un montant de 6,4 millions d'euros.

L'ensemble des crédits d'Etat relatifs aux CHRS est réparti au niveau régional entre les déparements. Pour 2003, l'allocation destinée aux CHRS s'élève à un total de 11 737 596 euros pour la région Bourgogne, dont 1 231 457 euros pour le département de la Nièvre.

Outre le taux d'actualisation, la région a bénéficié d'une enveloppe de mesures nouvelles de 122 380 euros qui ont permis la création de 13 places de CHRS supplémentaires, dont 3 pour le département de la Nièvre.

Par ailleurs, pour répondre aux besoins immédiats des centres d'hébergement, des crédits supplémentaires ont été obtenus et viennent s'ajouter aux dotations initialement déléguées aux services déconcentrés. A ce titre, une dotation complémentaire de 484 577 euros a été allouée au département de la Nièvre.

Enfin, le projet de loi de finances pour 2004 prévoit 8,92 millions d'euros supplémentaires pour les CHRS dont la répartition permettra de revaloriser les budgets des établissements et leur donnera ainsi les moyens d'accueillir dans des conditions satisfaisantes les personnes en détresse sociale.

M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé.

M. René-Pierre Signé. Monsieur le ministre, sans doute y a-t-il une disparité entre les mesures dont vous faites état et celles qui sont appliquées dans le département de la Nièvre, où nous n'avons pas conscience d'une augmentation des crédits.

Je souhaite faire deux remarques.

D'une part, il semble que les crédits aient été réduits. En conséquence, le budget alloué à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, la DDASS, de la Nièvre ne permet pas d'assurer les dotations à hauteur des besoins.

D'autre part, l'interprétation par la DDASS de l'organisation générale des centres est parfois problématique. Ainsi, la DDASS a supprimé 0,5 ETP, ou équivalent temps plein, à deux centres, l'Anar et le Prado, au motif que les activités de chantier d'insertion de l'un et le restaurant social de l'autre n'étaient pas de son ressort.

Les difficultés financières des quatre CHRS de la Nièvre - l'Anar, le Bouqueau, le Prado et Nièvre Regain - existent depuis plusieurs années. La DDASS de la Nièvre ne régularisant pas les dossiers, chaque année, les CHRS intentent une action contentieuse. Chaque fois, le tribunal administratif s'est prononcé en leur faveur et les dotations complémentaires ont été versées ; mais ces dernières sont insuffisantes.

En 2003, le rattrapage n'a été que partiel.

Pour 2004, il y a une remise en cause de la loi sur les exclusions. L'Etat financera l'aide au logement mais se désengagera pour tout ce qui concerne le suivi social et l'accompagnement. Il s'agit donc d'une remise en cause de l'existence même des CHRS.

RETRAITE DES MÉDECINS HOSPITALO-UNIVERSITAIRES

M. le président. La parole est à M. André Boyer, auteur de la question n° 367, adressée à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. André Boyer. Monsieur le ministre, on se plaît à dire que notre médecine est l'une des meilleures du monde. Les médecins hospitalo-universitaires y contribuent largement, en formant les praticiens hospitaliers et libéraux, en exerçant la médecine dans les centres hospitaliers universitaires, les CHU, au sein de services spécialisés très performants dont ils assument souvent la direction, et ce pour une très large moitié de leur temps, qu'au demeurant ils ne comptent pas.

Ces praticiens enseignants et hospitaliers ne sont pas les mandarins que l'on croit. Ils se sont, notamment, alarmés du fait que le protocole d'accord de mai 2003 ne modifie en rien le triste privilège qui leur vaut de percevoir la plus faible retraite des médecins de notre pays. Cette retraite, en effet, calculée uniquement sur le salaire universitaire, ne tient aucun compte de leur activité hospitalière, qui comporte des sujétions importantes, sans bénéfice de la RTT, la réduction du temps de travail.

La difficulté d'animer les équipes hospitalières dont ils ont la charge au moment où l'hôpital public traverse une crise grave et la modicité de leur retraite expliquent largement la perte d'attractivité des carrières hospitalières universitaires, qui est sûrement, à terme, préjudiciable à la qualité de la formation des médecins et à la santé dans notre pays.

Monsieur le ministre, quelles sont les mesures de simple justice que vous pouvez envisager de prendre pour que la totalité des émoluments hospitaliers soient pris en compte dans le calcul de la retraite et pour assurer ainsi la pérennité d'un corps saisi par le doute mais dont dépendent la qualité des soins aux malades, la qualité de l'enseignement et de la recherche médicale et le rayonnement de la médecine française ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine. Monsieur le sénateur, votre question porte sur la retraite des personnels enseignants et hospitaliers.

Leur activité professionnelle est double et elle comprend ainsi une double rémunération : une rémunération au regard de leur activité universitaire, qui donne droit à une retraite dans les conditions définies par le code des pensions civiles et militaires de retraite et une rémunération au regard de leur activité hospitalière, qui ne donne pas lieu à cotisation, et donc ne donne pas droit à retraite.

Fruit d'une histoire complexe, la situation décrite n'en demeure pas moins logique. Nos régimes de retraite reposent en effet sur un principe contributif. En tout état de cause, il paraît exclu d'accorder un montant de retraite pour une activité qui n'a pas donné lieu à cotisation.

Comme vous l'avez indiqué, monsieur le sénateur, la question a été effectivement évoquée dans le protocole adopté au mois de mai dernier.

Un protocole d'accord, actant différentes mesures portant sur les champs hospitalier et universitaire, a en effet été signé le 16 mai 2003 par le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche et par le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées avec les organisations syndicales représentant les personnels enseignants et hospitaliers titulaires. Il réaffirme le rôle essentiel de la triple mission, de soins, d'enseignement et de recherche, impartie aux personnels hospitalo-universitaires, contribuant à la fois au rayonnement de la médecine française et à la qualité des soins prodigués aux patients, dans un contexte hospitalier marqué par de récentes évolutions statutaires pour différentes catégories de personnels.

Les signataires de ce protocole ont reconnu que la situation des médecins hospitalo-universitaires décrite, au regard de la retraite, représentait une préoccupation majeure pour ces personnels et qu'elle devra faire l'objet d'une étude et de négociations à la fois dans le cadre général de la réforme des retraites et dans le cadre particulier du comité de suivi du protocole mis en place.

Monsieur le sénateur, vous indiquez que rien n'a changé depuis la signature de ce protocole. Or M. Fillon, que je représente ce matin, ne partage pas cette conclusion. En effet, les médecins hospitalo-universitaires vont pouvoir bénéficier du dispositif prévu par l'article 76 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, à savoir le régime additionnel de retraite sur les éléments de rémunération non soumis à cotisation. Ce régime sera opérationnel au 1er janvier 2005.

Je peux vous garantir que les services des différents ministères se mobilisent pour que le décret d'application de l'article 76 puisse paraître avant la fin du premier semestre 2004.

Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments de réponse dont je souhaitais faire part au nom du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. André Boyer.

M. André Boyer. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse et je prends acte du rendez-vous que vous fixez aux praticiens hospitaliers dans le cadre de la réforme des retraites.

Néanmoins, je veux mettre l'accent sur les cris d'alarme lancés par les chefs de service des centres hospitalo-universitaires chargés des pôles d'excellence de la médecine française, qui estiment que la transmission d'un savoir de haut niveau est fortement compromise ; la presse s'en est fait largement l'écho ces derniers temps.

Ma question a pu vous paraître liée ponctuellement à un problème catégoriel, mais il s'agit en réalité d'un tout, dont par exemple la pénurie du nombre d'internes - le recrutement a chuté de 50 % en cinq ans - et le recours en masse à des praticiens étrangers sont des éléments révélateurs.

Alors que nous prenons acte, sur l'ensemble du territoire, de la disparition des hôpitaux de proximité, le désarroi que ressentent les médecins hospitalo-universitaires est très préoccupant. Ils constatent que la relève se tarit, notamment en raison de leur statut, qui est dissuasif.

Cette situation expose, à court terme, l'hôpital public à une détérioration de la qualité des soins et expose plus largement notre pays à renoncer au rayonnement de nos facultés de médecine en matière d'enseignement et de recherche.

AIDES À L'EMBAUCHE DES TRAVAILLEURS HANDICAPÉS

M. le président. La parole est à M. Georges Mouly, auteur de la question n° 380, adressée à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

M. Georges Mouly. Monsieur le ministre, l'insertion professionnelle des personnes handicapées est un objectif étroitement lié à l'évolution du regard de notre société sur le handicap.

L'avant-projet de loi pour l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées consacre cet état d'esprit, en soulignant la nécessaire valorisation du travail en centres d'aide par le travail, les CAT, et en réaffirmant la place du travail protégé comme un refuge et/ou un tremplin et en prônant le développement des dispositifs facilitant l'insertion professionnelle.

Déjà, la convention entre l'Etat et l'AGEFIPH, l'Association pour la gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés, avait arrêté un programme d'impulsion et d'accélération de la mobilisation des moyens financiers en vue de parvenir à une meilleure insertion professionnelle des travailleurs handicapés.

La formule de l'« abattement de salaire » permet aux travailleurs handicapés de bénéficier d'une rémunération conventionnelle et d'un véritable statut de salarié avec un contrat de travail relevant du droit commun. Aujourd'hui, cet outil performant permet à plus de 13 000 travailleurs handicapés d'occuper un emploi en milieu ordinaire.

Cependant, trop peu connue et peu promue par les directions départementales de l'emploi, cette formule reste encore marginale. Elle serait remise en question et sa disparition serait même prônée au motif qu'elle est peu utilisée, donc inutile, sans même que l'on s'interroge sur les causes de cette sous-utilisation. Il s'agit, je l'ai dit, d'un manque d'information et de souplesse administrative.

Des expériences de type EPMO, emploi protégé en milieu ordinaire, qui sont une « extension » de la formule « abattement de salaire », sur lesquelles aurait été donné un avis favorable, se sont développées en région Rhône-Alpes, en Ile-de-France et dans le Nord. Elles ont démontré l'efficacité de ce dispositif, tant d'un point de vue humain que d'un point de vue économique. Elles trouvent légitimement leur place parmi les passerelles, dont on parle souvent, entre le milieu protégé, tel que le CAT, et le milieu ordinaire.

Ce dispositif contribue par ailleurs à lever les réticences des employeurs, l'intégration se faisant progressivement sur trois ans avec un accompagnement social et professionnel du travailleur handicapé. L'EPMO est en effet reconnu par les professionnels du secteur comme étant un outil fiable, réclamé, on s'en doute, par les personnes handicapées qui peuvent tenter une intégration professionnelle lorsque celle-ci fait partie de leur projet de vie, sans rupture brutale avec leur établissement d'accueil. L'entreprise bénéficie de son côté d'une aide indispensable à la réussite du projet d'intégration.

Par ailleurs, des études mettent en avant des résultats concordants quant aux substantielles économies qui peuvent ainsi être réalisées sur les budgets de l'Etat. En effet, comparé à une place en CAT, le coût d'un EPMO est quatre fois inférieur ! Autre effet bénéfique, les EPMO libèrent des places dans les CAT et allègent les files d'attente. Ce dispositif est un échelon supplémentaire de la hiérarchisation des revenus entre les différents milieux de travail et contribue à la promotion du parcours professionnel d'un travail handicapé.

Ne pas développer cet instrument, voire tenter de le supprimer, semblerait - j'emploie à dessein le conditionnel - relever d'une simple logique comptable à court terme, qui est aux antipodes de la volonté politique, aujourd'hui affichée, de placer la personne handicapée au coeur de la cité, ce qui passe par une intégration sociale et donc, chaque fois que possible, par une intégration professionnelle.

Monsieur le ministre, parce cela intéresse les travailleurs handicapés, les familles, les professionnels du secteur, les employeurs potentiels, quelles mesures envisagez-vous de prendre pour promouvoir le dispositif particulier des abattements de salaires et en assouplir l'utilisation ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine. Le passage des travailleurs handicapés du milieu protégé vers le milieu ordinaire constitue une priorité du projet de loi relatif à l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées.

L'actuel dispositif de la garantie de ressources en milieu ordinaire, qu'il s'agisse de l'abattement de salaire ou du travail protégé en milieu ordinaire, n'a pas fait ses preuves du moins quantitativement, quelles qu'en soient les explications : 11 250 bénéficiaires en 2002 pour environ 350 000 travailleurs handicapés employés dans le secteur privé.

En outre, son application n'est pas aisée puisqu'elle suppose une évaluation de la productivité des personnes handicapées, dont chacun reconnaît aujourd'hui la difficulté de la fonder objectivement. Par ailleurs, ce dispositif ne facilite pas la mobilité professionnelle des salariés handicapés et se révèle parfois stigmatisant pour les intéressés.

Cela a conduit les pouvoirs publics à s'interroger sur la pertinence de cette mesure et à réfléchir à sa réforme.

A cette fin, le projet de loi relatif à l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées vise à prévoir que des aides spécifiques à l'emploi, plus lisibles pour les usagers - travailleurs handicapés et employeurs - et d'une application plus facile pour les opérateurs, devraient être mises en place dans les secteurs économiques où l'effet du dispositif apparaît utile, par exemple dans certaines activités agricoles et artisanales.

Les caractéristiques de ces nouvelles aides seront précisées rapidement, de sorte qu'il n'y ait pas de rupture de financement pour les bénéficiaires actuels du dispositif.

Le financement de ces nouvelles aides sera inscrit dans le cadre de la prochaine convention d'objectifs Etat-AGEFIPH, dans la continuité de ce qui est pratiqué actuellement pour le financement de la garantie de ressources en milieu ordinaire.

M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.

M. Georges Mouly. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse et je me réjouis de constater que la passerelle entre le milieu protégé et le milieu ordinaire, dont l'importance est soulignée depuis longtemps, fait effectivement partie des priorités du futur projet de loi.

L'EPMO n'a pas fait ses preuves, me dites-vous, alors que certaines personnes, sur place, m'ont dit le contraire. Au demeurant, si son succès n'est que relatif, cela est dû à un manque d'informations et à quelques lourdeurs administratives, raisons qui ne sont pas propres à ce domaine-là.

Quoi qu'il en soit, l'essentiel est de mettre le cap sur les mesures qu'il est possible, en l'état actuel, de mettre en oeuvre rapidement. Vous avez parlé, en la matière, monsieur le ministre, d'une révision du contrat Etat-AGEFIPH et vous avez indiqué que les nouvelles aides prévues seraient mises en place rapidement, afin d'éviter toute interruption dans le versement. Je formule l'espoir que les choses se passent ainsi.

ÉVOLUTION DU MONTANT DE LA DOTATION GLOBALE D'ÉQUIPEMENT EN MEUSE

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n° 347, adressée à M. le ministre délégué aux libertés locales.

M. Claude Biwer. L'année 2004 sera consacrée à la réforme des concours de l'Etat aux collectivités territoriales. Celle-ci concernera au premier chef la DGF, la dotation globale de fonctionnement, mais j'ose espérer qu'elle s'étendra également à la DGE, la dotation globale d'équipement.

En effet, j'ai le privilège de présider, dans le département de la Meuse, la commission départementale chargée de fixer la liste des opérations subventionnables dans le cadre de la DGE communale.

La somme mise à la disposition de ce département, au titre de la DGE, à savoir environ 3 millions d'euros, est beaucoup trop faible pour pouvoir répondre aux sollicitations des communes et des EPCI, les établissements publics de coopération intercommunale. Elle nous oblige, par ailleurs, à plafonner les dépenses subventionnables dans des limites qui ne correspondent pas toujours aux dépenses effectives de ces collectivités.

J'ajoute que, par trois fois, ici même, des membres du Gouvernement m'ont renvoyé vers la DGE lorsque je les interrogeais sur les conditions de prise en charge de dépenses exceptionnelles.

Il s'agissait, en premier lieu, de la reconstruction des ponts détruits pour faits de guerre en 1940 et non encore reconstruits à ce jour dans mon département, qui devaient être financés sur des crédits d'Etat. Mais les quatorze ponts qui restent actuellement à reconstruire auraient, semble-t-il, vocation à être financés par la DGE. C'est en tout cas ce qui m'a été répondu le 8 avril dernier. Or la réfection de ces ponts coûterait plusieurs millions d'euros, comme M. le préfet de la Meuse me le précisait, dès janvier 2003 : « Vous comprenez que le financement de ces ponts n'est pas à la mesure des crédits dont je dispose pour la DGE en Meuse. »

En deuxième lieu, quand j'ai interrogé le Gouvernement sur l'absence de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle dans cinq communes de la Meuse sinistrées par de violents orages, il m'a été précisé le 11 mars 2003 que « ces collectivités sont toutes éligibles à la DGE et peuvent prétendre à ce titre à l'attribution de subventions ».

En troisième lieu, à une question écrite que j'avais adressée à M. le ministre de l'intérieur le 10 juillet 2003, il m'a été répondu que « sont désormais éligibles à la DGE des communes les opérations d'investissement permettant aux communes ou à leurs groupements d'apporter par convention leur concours au fonctionnement des services publics, notamment s'agissant de locaux entrant dans le patrimoine de la collectivité qui les met par convention à disposition des établissements ou organismes chargés d'un service public, parmi lesquels figure La Poste ».

Il apparaît ainsi très clairement que de plus en plus de dépenses peuvent être financées par la DGE, mais à quoi bon, dans la mesure où le montant de cette dotation n'augmente pas !

Dans ces conditions, il me semble indispensable de réformer les critères de répartition de la DGE, afin de tenir compte non seulement de la population des départements, mais également du nombre de communes concernées et de l'importance du territoire.

Monsieur le ministre, il m'a été également répondu que « les caisses de l'Etat n'étaient pas inépuisables », et j'en conviens bien volontiers. Vous avouerez tout de même qu'il est pour le moins singulier de supprimer les financements d'Etat, s'agissant par exemple de la reconstruction des ponts détruits pour faits de guerre, et de les renvoyer vers la DGE, les départements et les communes, ce qui constitue de facto un nouveau transfert de charges !

A la vérité, en dehors de ce cas spécifique, je sollicite non pas nécessairement une augmentation de la masse globale de la DGE, mais une autre répartition de celle-ci.

Puisqu'il est question d'appliquer à la DGF la nouvelle règle constitutionnelle de la péréquation, pourquoi ne pas l'appliquer également à la DGE ?

Les communes de départements ruraux comme la Meuse ont encore de très gros besoins en équipements de base. Il s'agit bien d'équipements de base, et non de dépenses superflues. Il faut donc absolument que le montant de l'enveloppe de la DGE qui est allouée à ce département soit suffisant pour satisfaire ces besoins. Je compte sur vous, monsieur le ministre, pour apporter une réponse favorable.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Louis Borloo, ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine. Monsieur le sénateur, j'ai l'honneur de représenter M. Patrick Devedjian pour répondre à votre question sur ce sujet que vous connaissez d'autant mieux que vous présidez la communauté de communes du pays de Montmédy.

La dotation globale d'équipement des communes s'est élevée en 2003 à 406,703 millions d'euros pour les départements de métropole et d'outre-mer. Sur ce montant, l'enveloppe allouée au département de la Meuse représente 3,020 millions d'euros.

La détermination du montant des enveloppes départementales s'appuie sur des critères qui tiennent compte de la particularité de chacun des départements. Ainsi, pour la répartition du montant alloué aux communes et groupements de moins de 2 000 habitants, qui représente 58 % de cette dotation, les critères de répartition sont au nombre de quatre et portent sur le nombre de communes éligibles, l'importance de la population, la longueur de la voirie communale et l'écart du potentiel fiscal des communes du département par rapport au potentiel fiscal moyen de l'ensemble des communes. La superficie d'un département se trouve prise en compte au travers de l'importance de la longueur de voirie communale qui lui est liée. Le critère potentiel fiscal permet, lui, de prendre en compte la situation des départements défavorisés.

L'application de ces critères est d'ailleurs favorable au département de la Meuse : le montant de la dotation globale d'équipement qui lui a été allouée en 2003 représente ainsi une dotation par habitant de 17,12 euros alors que la moyenne nationale est de 11,31 euros.

Aucune modification n'est actuellement prévue concernant les modalités de répartition de la dotation globale d'équipement. Il convient toutefois de préciser que l'enveloppe nationale de cette dotation sera réactualisable en 2004 sur la base d'un taux d'évolution de 3,7 %.

S'agissant des investissements qui peuvent être subventionnés au titre de la dotation globale d'équipement, la réparation des dégâts résultant d'intempéries ou la reconstruction des ponts détruits par faits de guerre, sur lesquels portait l'essentiel de votre question, sont des investissements éligibles à cette dotation. Les catégories d'investissements prioritaires sont déterminées chaque année par la commission d'élus locaux, commission que vous connaissez bien et qui est placée auprès du préfet à cette fin, ainsi que le précise l'article L. 2334-35 du code général des collectivités territoriales.

Il reviendra à cette commission de privilégier, le cas échéant, ces investissements lors des prochaines répartitions de la dotation globale d'équipement.

J'attire toutefois votre attention sur le fait que d'autres dispositifs que la DGE peuvent également être mobilisés. Ainsi, une aide de l'Etat de 156 000 euros, financée par le budget du ministère de l'intérieur, a été allouée en 2003 aux communes du département de la Meuse touchées par les inondations de décembre 2001.

S'agissant des ponts détruits par faits de guerre, le financement de la reconstruction à l'identique du pont de Quincy-Landzécourt a fait l'objet, en 2002, d'une prise en charge intégrale par le budget du ministère de l'intérieur.

Les autres investissements éventuels relèvent, pour leur part, des aides de droit commun.

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Monsieur le ministre, vous me rappelez des réalités, j'en conviens.

Les ponts détruits par faits de guerre ont été reconstruits très progressivement, et j'en veux pour preuve, que, soixante ans après, certains sont encore en l'état. Il avait été annoncé que le pont de Quincy-Landzécourt serait le dernier dont la reconstruction serait intégralement financée par l'Etat puis que l'on passerait au système de DGE, mais, comme la base de la DGE n'a pas été modifiée, cela nous pose quelques problèmes !

S'agissant d'un dossier exceptionnel, je pensais qu'il pouvait y avoir des mesures exceptionnelles. Si la commission décide d'affecter les fonds à cette seule opération, cela signifie qu'il ne restera rien pour les communes.

Je sais bien, je l'ai dit, qu'il n'est pas toujours possible d'augmenter les masses, mais, pour ces dotations très spéciales, peut-être pourrions nous envisager des crédits particuliers qui entreraient dans le cadre de la péréquation.

M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures vingt-cinq, est reprise à seize heures cinq, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)