PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet

M. le président. La séance est reprise.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale
Discussion générale (suite)

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Manifestation de soutien des parlementaires à Florence Aubenas et à Hussein Hanoun

M. le président. Mes chers collègues, je tiens à vous indiquer qu'une manifestation de soutien des parlementaires à Florence Aubenas et à son guide Hussein Hanoun aura lieu sur le parvis des Droits de l'homme, au Trocadéro, le mercredi 30 mars, à onze heures.

Le président de l'Assemblée nationale et moi-même vous invitons à venir nombreux à cette manifestation, qui se déroulera en présence de plusieurs ex-otages français, de manière que le Parlement fasse la démonstration de la force de son soutien.

Avec vous tous, je forme des voeux pour la libération, le plus tôt possible, de notre compatriote et de son guide irakien.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !

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CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS

M. le président. La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat :

MARDI 29 MARS 2005

Ordre du jour réservé

A 10 heures :

1°) Débat sur le rapport d'information (n° 25, 2004-2005) établi par MM. Joël Bourdin et Marc Massion au nom de la commission des finances sur la Société pour l'expansion des ventes des produits agricoles et alimentaires (SOPEXA) ;

(La conférence des présidents :

- a attribué un temps de parole spécifique de dix minutes à chacun des deux rapporteurs de la commission des finances ;

- a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le vendredi 25 mars 2005.)

A 16 heures et, éventuellement, le soir :

2°) Conclusions de la commission des lois (n° 228, 2004-2005) sur :

- la proposition de loi tendant à lutter contre les violences à l'égard des femmes et notamment au sein des couples par un dispositif global de prévention, d'aide aux victimes et de répression, présentée par M. Roland Courteau et plusieurs de ses collègues (n° 62, 2004-2005) ;

- et la proposition de loi relative à la lutte contre les violences au sein des couples, présentée par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et plusieurs de ses collègues (n° 95, 2004 2005).

(La conférence des présidents :

- a fixé au jeudi 24 mars 2005, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- a attribué un temps de parole spécifique de quinze minutes au représentant de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entres les hommes et les femmes ;

- a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le vendredi 25 mars 2005).

MERCREDI 30 MARS 2005

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :

- Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux (n° 183, 2004-2005) ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au mardi 29 mars 2005, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 29 mars 2005).

JEUDI 31 MARS 2005

Ordre du jour prioritaire

A 9 heures 30, 15 heures et, éventuellement, le soir :

- Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif aux aéroports (n° 249, 2004-2005) ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au mardi 29 mars 2005, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 30 mars 2005).

MARDI 5 AVRIL 2005

Ordre du jour prioritaire

A 9 heures 30, 16 heures et le soir :

- Projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques (n° 240, 2004-2005) ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au lundi 4 avril 2005, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 4 avril 2005).

MERCREDI 6 AVRIL 2005

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures :

1°) Suite du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques ;

A 16 heures et le soir :

2°) Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur le référendum relatif au projet de loi autorisant la ratification du traité établissant une Constitution pour l'Europe (application du deuxième alinéa de l'article 11 de la Constitution) ;

(La conférence des présidents a :

- attribué un temps de parole spécifique de dix minutes au président de chaque commission qui le souhaite et au président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne ;

- fixé à deux heures et demie la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 5 avril 2005.)

3°) Suite du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques.

JEUDI 7 AVRIL 2005

A 9 heures 30 :

Ordre du jour prioritaire

1°) Suite du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques ;

A 15 heures et le soir :

2°) Questions d'actualité au Gouvernement ;

(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;

Ordre du jour prioritaire

3°) Suite de l'ordre du jour du matin.

EVENTUELLEMENT, VENDREDI 8 AVRIL 2005

A 9 heures 30, à 15 heures et le soir :

Ordre du jour prioritaire

- Suite du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques.

MARDI 12 AVRIL 2005

A 10 heures :

1°) Dix-huit questions orales :

L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.

- n° 638 de M. Bernard Piras à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales ; (Nouvelles conditions de délivrance des certificats d'hébergement) ;

- n° 675 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité ; (Situation des vétérinaires en zone rurale) ;

- n° 685 de M. Jean-Pierre Demerliat à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer ; (Mise à 2 x 2 voies de la RN 141 entre Limoges et Saint-Junien) ;

- n° 688 de M. Jean-Claude Carle à M. le ministre délégué au logement et à la ville ; (Fiscalité applicable aux logements intermédiaires) ;

- n° 689 de M. Claude Domeizel à M. le ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ; (Réglementation relative aux départs anticipés à la retraite pour carrière longue) ;

- n° 690 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat à M. le garde des sceaux, ministre de la justice ; (Fonctionnement de la justice de proximité) ;

- n° 691 de M. Georges Mouly à M. le garde des sceaux, ministre de la justice ; (Réforme des tutelles : financement et calendrier) ;

- n° 693 de M. Thierry Repentin à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer ; (Organisation des transports en Savoie) ;

- n° 694 de M. Jean Boyer à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer ; (Conséquences financières de la période hivernale sur le budget des collectivités locales) ;

- n° 695 de Mme Jacqueline Gourault à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, porte-parole du Gouvernement ; (Calcul des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales) ;

- n° 697 de M. Alain Milon à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation ; (Mise en place de services de consigne dans la grande distribution) ;

- n° 698 de M. Jean-Pierre Sueur à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille ; (Mise en oeuvre de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé) ;

- n° 699 de Mme Claire-Lise Campion à M. le ministre des affaires étrangères ; (Situation des otages en Colombie) ;

- n° 700 de M. Bernard Dussaut à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation ; (Normes applicables en matière de sécurité incendie du mobilier) ;

- n° 701 de Mme Françoise Férat à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales ; (Réglementation relative à la sécurité des matériels forains) ;

- n° 702 de M. Jean-Marc Juilhard à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille ; (Aides à la création de maisons médicales) ;

- n° 706 de M. Alain Vasselle à M. le ministre de l'écologie et du développement durable ; (Gestion des déchets) ;

- n° 709 de M. Jean-Patrick Courtois à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales ; (Modalités de calcul des charges transférées et des charges nouvelles au sein des structures intercommunales) ;

Ordre du jour prioritaire

A 16 heures et le soir :

2°) Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative aux droits des malades et à la fin de vie (n° 90, 2004-2005) ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au lundi 11 avril 2005, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 11 avril 2005).

MERCREDI 13 AVRIL 2005

Ordre du jour réservé

A 15 heures et, éventuellement, le soir :

1°) Question orale avec débat n° 15 de M. Louis de Broissia à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer sur les modalités de transfert des routes nationales d'intérêt local aux conseils généraux ;

(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à trois heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 12 avril 2005) ;

2°) Éventuellement, suite de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative aux droits des malades et à la fin de vie (n° 90, 2004-2005).

JEUDI 14 AVRIL 2005

A 9 heures 30 :

Ordre du jour prioritaire

1°) Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, modifiant certaines dispositions législatives relatives aux modalités de l'exercice par l'Etat de ses pouvoirs de police en mer (n° 253, 2004-2005) ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au mardi 12 avril 2005, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 13 avril 2005) ;

2°) Deuxième lecture, sous réserve de sa transmission, de la proposition de loi relative à la création du registre international français (A.N., n° 1287) ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au mardi 12 avril 2005, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 12 avril 2005) ;

A 15 heures et le soir :

3°) Questions d'actualité au Gouvernement ;

(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;

Ordre du jour prioritaire

4°) Suite de l'ordre du jour du matin.

En application de l'article 28 de la Constitution et de l'article 32 bis, alinéa 1er, du règlement, le Sénat a décidé de suspendre ses travaux en séance plénière du dimanche 17 avril au dimanche 1er mai 2005.

LUNDI 2 MAI 2005

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :

1°) Sous réserve de son dépôt sur le Bureau du Sénat, projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des marchés financiers ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au lundi 2 mai 2005, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le vendredi 29 avril 2005.)

2°) Deuxième lecture, sous réserve de sa transmission, du projet de loi d'orientation sur l'énergie (AN, n° 1669) ;

(La conférence des présidents a fixé :

- au lundi 2 mai 2005, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le vendredi 29 avril 2005).

MARDI 3 MAI 2005

A 10 heures :

1°) Questions orales ;

Ordre du jour prioritaire

A 16 heures et le soir :

2°) Suite de la deuxième lecture du projet de loi d'orientation sur l'énergie.

MERCREDI 4 MAI 2005

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et, éventuellement, le soir :

- Suite de la deuxième lecture du projet de loi d'orientation sur l'énergie.

L'ordre du jour des séances des mardi 10, mercredi 11 et jeudi 12 mai 2005 sera réglé ultérieurement.

En application de l'article 28 de la Constitution et de l'article 32 bis, alinéa 1er, du règlement, le Sénat a décidé de suspendre ses travaux en séance plénière du dimanche 15 mai au dimanche 29 mai 2005.

Dates prévisionnelles des séances mensuelles réservées et des séances de questions jusqu'en juin 2005 :

I - Questions d'actualité au Gouvernement : jeudi 7 avril 2005, jeudi 14 avril 2005, jeudi 12 mai 2005, jeudi 9 juin 2005 et jeudi 30 juin 2005.

II - Questions orales : mardi 12 avril 2005, mardi 3 mai 2005, mardi 31 mai 2005, mardi 14 juin 2005 et mardi 28 juin 2005.

III - Séances mensuelles réservées : mercredi 13 avril 2005, mardi 10 mai 2005 et jeudi 16 juin 2005.

Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...

Ces propositions sont adoptées.

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Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale
Discussion générale (suite)

Lois de financement de la sécurité sociale

Suite de la discussion d'un projet de loi organique

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale
Question préalable

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Michel Mercier.

M. Michel Mercier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'exercice auquel nous nous livrons aujourd'hui est par nature difficile puisqu'il nous faut définir la notion de « loi de financement ». Est-ce une loi ordinaire ? Est-ce une loi de finances ? Ou bien est-ce une loi d'un autre type ? Lorsque nous aurons répondu à cette question, nous pourrons engager un débat décrispé, libre et efficace ! N'est-ce pas ce que nous recherchons ?

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie. Tout à fait !

M. Michel Mercier. Sur ce sujet difficile, bien qu'ayant été parfaitement éclairé - même si ce n'était pas toujours le même éclairage - par le rapporteur, M. Vasselle, et par le rapporteur pour avis, M. Jégou, je me suis demandé si je ne devais pas reprendre ce qu'avait dit en 1924 le commissaire du gouvernement Corneille, alors que le Conseil d'Etat examinait une affaire concernant le syndicat général des agents d'assurance du Territoire de Belfort - l'arrêt est demeuré célèbre -, sur le point de savoir ce qu'était une loi de finances : « C'est une loi qui n'en est pas une » !

Eh bien, à ce stade de ma démonstration, j'ai envie de dire que, dans la panoplie juridique actuelle, c'est à une loi européenne que s'apparente probablement le plus une loi de financement de la sécurité sociale.

En effet, il s'agit d'une loi votée par le Parlement. C'est là une définition formelle de la loi, distincte de la définition matérielle à laquelle nous a habitués l'article 34 de la Constitution de 1958. Le législateur organique a donc tout intérêt à préciser cette notion de loi de financement, qui est tout de même une nouveauté dans notre panoplie juridique, et à ne pas l'assimiler à toutes les autres formes de textes qu'il est appelé à voter.

Il s'agit donc d'une loi d'un type particulier, qui n'est ni une loi de finances ni une loi ordinaire.

Elle n'est pas une loi de finances puisqu'elle n'a pas pour objet de fixer un budget avec des crédits estimatifs ou limitatifs. C'est pourquoi ce serait une grave erreur que de vouloir faire entrer les lois de financement dans le moule des lois de finances. Ce serait, en vérité, en réduire l'ambition.

Une loi de financement de la sécurité sociale a vocation à fixer une orientation financière : l'ONDAM.

Mais nous savons tous que ce n'est pas parce que le montant fixé par l'ONDAM aura été atteint que les assurés sociaux renonceront à se soigner quand sévit une épidémie de grippe, ou qu'un chirurgien interrompra tout à coup une opération !

Que le rapporteur pour avis n'ait crainte : la loi de financement n'est pas une loi de finances ; il n'y a pas de concurrence entre ces deux types de textes.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce n'est pas restrictif !

M. Michel Mercier. Une loi de financement contient certes des dispositions financières, mais celles-ci viennent après qu'ont été arrêtés des objectifs de santé publique. C'est cela qui importe : que le Parlement soit amené à se prononcer sur les orientations de politique de santé qu'entend mener le Gouvernement, en accord avec les partenaires sociaux.

Au demeurant, ce sont aussi des considérations d'ordre financier qui justifient l'intervention du Parlement. En effet, les seuls apports des partenaires sociaux ne suffisent plus et il faut que la nation, par le truchement du Parlement, apporte des concours financiers supplémentaires. Mais là n'est pas l'essentiel puisque le Parlement peut toujours, s'il le souhaite, s'interroger sur le mode de financement de la protection sociale !

On peut aujourd'hui considérer que la TIPP, la taxe intérieure sur les produits pétroliers, qui est versée aux départements pour payer le RMI, est un des outils de financement des dépenses sociales et sanitaires puisque environ les deux tiers des bénéficiaires du RMI ont des problèmes de cet ordre, notamment des problèmes psychiatriques.

Une loi de financement, c'est d'abord et avant tout un texte voté par le Parlement et dont l'objet premier est de permettre une réappropriation par les élus de la nation de politiques essentielles qui leur avaient très largement échappé. Dès lors, une loi de financement ne saurait se limiter à des dispositions financières : elle doit aussi et surtout tracer des lignes de politique de santé. Quelles orientations pour l'hôpital, pour la médecine de ville, etc. ?

Il me semble donc très utile de rappeler qu'il ne peut pas y avoir « concurrence » entre loi de finances et loi de financement : ce sont deux textes complètement différents, et nous devons tous en être persuadés.

Afin de donner plus de sens à la loi de financement de la sécurité sociale, ce projet de loi organique propose d'abord une structure plus lisible. Ainsi, le vote du Parlement sera lui-même plus clair : les parlementaires se prononceront sur des dispositions bien établies et sur des comptes plus transparents, qui embrasseront la globalité des régimes de sécurité sociale.

En outre, ce projet de loi organique accorde aux parlementaires de nouveaux pouvoirs de contrôle, de suivi. C'est l'un des points essentiels de ce texte.

Autre nouveauté originale : la pluriannualité. Depuis des années, dans les facultés de droit, on enseigne que, pour un pays moderne qui fonctionne par cycle, le budget pluriannuel est la bonne solution. Nous n'y sommes pourtant jamais parvenus ! Que nos collègues de la commission des affaires sociales soient donc fiers de porter le flambeau de la pluriannualité avant même leurs amis de la commission des finances !

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales. On ne s'en plaint pas !

M. Michel Mercier. Il faut savoir savourer ses victoires et non aller picorer celles que l'on n'a pas encore obtenues ! (Sourires.)

Voilà donc, monsieur le secrétaire d'Etat, ce que je retiens de votre texte : plus de clarté, plus de lisibilité, plus d'implication du Parlement dans ce qui nous concerne tous, à savoir la santé de nos concitoyens.

Il permet également d'en finir avec une vision comptable au profit d'une vision pluriannuelle, en termes d'objectifs de santé.

Il offre aussi plus de sincérité. Nous le savons, une loi de financement de la sécurité sociale qui contiendrait uniquement des dispositifs financiers serait d'emblée insincère. En effet, rien ne se passe jamais comme on le souhaite : on voudrait que tout le monde se porte bien, mais ce n'est pas toujours le cas ! La loi ne peut pas tout prévoir, du moins sur le plan financier.

C'est la raison pour laquelle le groupe UC-UDF entend apporter son soutien à ce projet de loi organique, qui permettra aux lois de financement de la sécurité sociale de devenir un instrument aussi efficace que possible entre les mains de la représentation nationale et, à travers elle, des Français, afin que tous soient davantage partie prenante à la politique de santé dans notre pays. Tout le monde connaît le poids financier des politiques de santé et leurs effets sur la vie quotidienne.

Je souhaite, de façon modeste mais réaliste, que le projet de loi organique que nous voterons aujourd'hui en première lecture et que nous voterons définitivement après sans doute plusieurs lectures dans chaque assemblée nous permette d'y voir plus clair, d'être plus à même d'annoncer nos priorités et d'être plus efficaces. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec ce projet de loi organique, le Gouvernement tente de mettre un point final, après la loi portant réforme des retraites et la loi portant réforme de l'assurance maladie, à ce que M. le secrétaire d'Etat a tout à l'heure appelé une « réforme majeure ».

M. Mercier nous a éclairés sur la différence entre une loi de finances et une loi de financement, entre une loi ordinaire et une loi de financement. Pour ma part, je souhaite rappeler certaines réalités.

Je commencerai par évoquer l'actualité. Certes, les Françaises et les Français savent qu'un projet de loi organique est en cours d'examen, mais, au moment où nous parlons, monsieur le secrétaire d'Etat, vous êtes doublement interrogé.

En effet, la fédération hospitalière de France, la fédération des établissements hospitaliers et d'assistance privés, la fédération nationale des centres de lutte contre le cancer, les conférences de directeurs et de présidents de commission médicale d'établissement des centres hospitaliers et des centres hospitaliers universitaires en appellent au comité d'alerte créé par la loi du 13 août 2004 portant réforme de l'assurance maladie et tirent la sonnette d'alarme ! Ils expliquent que l'enveloppe qui a été dévolue pour 2005 aux hôpitaux ne leur permet absolument pas de fonctionner. Rien ne va plus ! Tout est bloqué !

On leur promet, au mieux, des réponses au milieu du mois de mai, voire au mois de juin prochain, alors que 15 000 emplois sont en jeu ! Dans tous les hôpitaux, les personnels, et pas seulement eux, lancent un véritable cri d'alarme : aujourd'hui, malgré la réforme de la tarification à l'activité, malgré le plan Hôpital 2007, la situation est intenable !

A cela s'ajoute, aujourd'hui même, la grève des praticiens hospitaliers qui réclament un véritable statut.

Dans le même temps, et c'est la tonalité que mon groupe souhaite donner à ce débat, depuis le mois de janvier dernier, les salariés et les retraités vivent douloureusement la réalité des prélèvements sociaux qui pèsent exclusivement sur eux. Or il ne sera pas question ici de la franchise de un euro, du forfait hospitalier qui est passé de 13 euros à 14 euros ; il ne sera pas non plus question de la CSG ou de la CRDS qui augmente. De toute évidence, monsieur le secrétaire d'Etat, vous ne souhaitez pas que l'on en parle ou que l'on donne chair à un débat qui, de toute évidence, sera essentiellement technique.

Certes, pour faire allusion à l'autre volet de ce débat, vous évoquez le médecin traitant, le parcours de soins, vous vous réjouissez de la signature de la convention médicale comme de la ratification de la classification commune des actes médicaux.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Eh oui !

M. Guy Fischer. Je regrette vivement l'absence de M. Philippe Douste-Blazy, car il vient de déclarer, au cours d'une conférence de presse que tout allait bien ! Tout va très bien, madame la marquise ! Il n'y a pas de problème : les Français ne sont pas mécontents !

Je tenterai, avec mes camarades François Autain et Roland Muzeau, de montrer qu'en réalité il n'en est rien.

Donner « plus de lisibilité, de crédibilité et de sens » à la loi de financement de la sécurité sociale votée chaque année par le Parlement depuis la réforme Juppé de 1996 : tel est, prétendument, l'objectif du projet de loi organique que nous examinons aujourd'hui.

En vérité, on est loin du but affiché puisque ce projet de loi organique ne fait que renforcer la logique d'étatisation de la sécurité sociale ; vous le nierez sans doute, monsieur le secrétaire d'Etat, mais M. Van Roekeghem, directeur de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, a des « super pouvoirs », c'est lui qui dirige tout ! Les nouveaux pouvoirs que ce texte met en place ne vont seulement au Parlement, et celui-ci devra témoigner d'une grande volonté pour le faire vivre réellement.

Sous couvert de donner plus de « crédibilité », ce projet de loi renforce les contraintes liées à l'ONDAM. Ainsi, il prévoit que les sous-objectifs de l'ONDAM seront débattus par le Parlement. Or, je vous le rappelle, la loi portant réforme de l'assurance maladie avait prévu une procédure d'alerte susceptible d'être activée en cours d'année s'il s'avérait que les dépenses dépassait l'ONDAM de plus de 0,75 %. Pour les hôpitaux, nous y sommes !

Et ce n'est même pas le « proconsul » qui demande la mise en route de ce dispositif d'alerte ! Ce sont ceux qui sont au coeur du problème le demandent !

En somme, la loi organique viendra contraindre encore plus l'ONDAM. Mais que faut-il faire une fois que celui-ci est dépassé ? Faut-il arrêter de donner des soins?

De plus, l'ONDAM pourra désormais comporter des dispositions qui ne sont pas strictement financières, par exemple des dispositions relatives à la gestion du risque ou aux règles d'organisation ou de gestion interne des régimes, alors que, jusqu'à présent, de telles dispositions ont systématiquement été censurées par le Conseil constitutionnel.

Le contrôle parlementaire de la sécurité sociale s'en trouve aussi accru du fait de l'abandon du caractère annuel de l'examen par le Parlement des PLFSS, les projets de loi de financement de la sécurité sociale. Certes, il faut satisfaire à des règles européennes. En effet, dans la continuité de la réforme de l'assurance maladie, la loi organique sur les lois de financement de la sécurité sociale va autoriser de fait les lois rectificatives, comme pour les finances publiques.

A cela, il faut ajouter que chaque caisse nationale d'assurance maladie devra désormais transmettre au Parlement et au Gouvernement, avant le 30 juin, ses propositions relatives à l'évolution de ses charges et de ses dépenses pour l'année suivante.

Bref, l'objet de cette réforme n'est que de mettre en place des nouveaux systèmes pour contraindre la dépense publique et la dépense sociale. Mais avec quel succès ?

Les lois rectificatives de la loi de financement de la sécurité sociale existaient déjà en théorie, mais n'ont jamais été utilisées, et, depuis 1996, chaque loi de financement, hormis celle de 1997, a montré que l'ONDAM était un dispositif totalement caduc, qui ne pouvait être respecté.

Prenons l'exemple des dernières lois de financement : l'année 2005 commence mal pour les comptes de l'assurance maladie. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous allez certainement vous faire l'écho des propos que M. Douste-Blazy a tenus lors de sa conférence de presse : à ses yeux, nous sommes sur la bonne pente !

Selon les chiffres provisoires de la Caisse nationale d'assurance maladie, les dépenses du régime général auraient progressé, en janvier 2005, de 5,8 % par rapport à janvier 2004. A ce train, l'objectif de l'ONDAM, qui avait été fixé à 3,2 % pour 2005, risque d'être de plus en plus difficile à tenir.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Attendez, nous n'en sommes qu'au début de l'année !

M. Guy Fischer. Quant à l'objectif fixé à 4 % par la loi de financement de 2004, c'est désormais un voeu pieux.

Les administrateurs de l'UNCAM peuvent s'inquiéter, car il leur reviendra de faire des propositions de nature à ramener « dans les clous » de l'ONDAM les dépenses remboursées par les régimes obligatoires.

C'est d'ailleurs là que le bât blesse. La maîtrise des remboursements obligatoires est une chose ; une autre chose est la régulation globale des dépenses de santé, c'est-à-dire la part de la richesse nationale qu'une société souhaite affecter à son système sanitaire. C'est ce débat qu'il faut avoir ! La question n'est pas de savoir quel pourcentage des remboursements des régimes obligatoires sera transféré sur les régimes complémentaires, c'est-à-dire, en fin de compte, sur les patients eux-mêmes.

Pour le moment, le Gouvernement semble vouloir pénaliser financièrement les assurés, ne serait-ce que « symboliquement », comme vous l'assurez vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, tout en s'apprêtant à autoriser la prise en charge des dépassements tarifaires par les complémentaires. Vous nous en direz peut-être plus sur les négociations que vous êtes en train de mener pour parvenir à la définition de contrats de responsabilité.

A ce train-là, il y a des participations symboliques qui risquent de devenir très coûteuses !

Et ce n'est pas tout ! Il est prévu, dans ce projet de loi, que les comptes de la sécurité sociale devront désormais être certifiés par la Cour des comptes, qui jouera ainsi un rôle proche de celui des commissaires aux comptes dans les entreprises.

Or il serait nécessaire d'obtenir une clarification sur le rôle de la Cour des comptes. Il semble que celle-ci formule de plus en plus des observations d'opportunité politique qui paraissent aller au-delà de ses prérogatives. Sur des aspects légaux, on ne peut contester son action, mais si elle allait jusqu'à juger les coûts de gestion et conseiller d'externaliser telle ou telle tâche pour obtenir une gestion plus performante, elle sortirait tout à fait de son rôle.

S'agissant de la démarche « objectifs-résultats », notamment en matière de coûts de gestion, nous redoutons que, derrière un discours prétendument « volontariste », ne se cache le projet d'externaliser une partie des tâches et des responsabilités auprès de sociétés privées, pour afficher des coûts de gestion beaucoup moins élevés, car c'est la tendance actuelle.

Cependant, il est, au sein de ce projet de loi organique, une disposition particulièrement critiquable. Ce texte comportera deux parties : un volet recettes, avec un article d'équilibre - excédent ou déficit - et un volet dépenses. Le Parlement votera obligatoirement la première partie avant de voter la seconde.

En clair, le Parlement, compte tenu des recettes attendues, fixera un niveau de déficit, dans le respect des critères de Maastricht. Les dépenses devront obligatoirement rentrer dans cette enveloppe. Même si ce dispositif existe déjà pour le budget de l'Etat, cela signifie que le niveau des recettes conditionnera celui des dépenses, et que ce ne sont pas les besoins à satisfaire qui conditionneront le niveau des recettes.

Cet article entérine donc la logique de maîtrise comptable de la gestion de la sécurité sociale.

En somme, ce projet de loi organique renforce le sentiment que l'on adapte les dépenses aux ressources fixées et non les ressources aux dépenses nécessaires.

Cela ne surprendra personne ici : nous aurions voulu une tout autre démarche pour cette réforme de la loi de financement de la sécurité sociale.

Le premier objectif serait le démantèlement des mesures d'exonération, qui coûtent si cher à la sécurité sociale, mais la promesse faite par le ministre d'inscrire dans la loi le principe de la compensation intégrale des exonérations n'a pas été tenue. Nous dénonçons ce renoncement gouvernemental et plaidons à nouveau pour une réelle réforme du financement permettant de dégager des ressources supplémentaires pour faire face aux besoins de santé et de retraite, dont nous savons tous qu'ils iront en grandissant.

Par ailleurs, il conviendrait que les dispositifs de gouvernance soient rééquilibrés au profit des conseils d'administration des caisses nationales de sécurité sociale, en particulier en renforçant leurs prérogatives et en asseyant leur légitimité par le retour à l'élection de leurs représentants, c'est-à-dire les représentants des assurés sociaux et des allocataires. Pourquoi ce qui est vrai pour la mutualité sociale agricole ne le serait-il pas pour la CNAM ?

Or, même si vous arguez que ce projet de loi tend à conférer au Parlement de nouveaux pouvoirs en matière de finances sociales - vous parlez de « démocratie sociale » - sans remise en cause du rôle des partenaires sociaux dans la gestion des caisses de sécurité sociale, paradoxalement, en renforçant le contrôle du Parlement sur la sécurité sociale, vous la dépouillez de son caractère démocratique.

La démocratie sociale nécessite, en effet, au minimum, une co-élaboration des projets de financement de la sécurité sociale par les conseils d'administration des caisses nationales de sécurité sociale. Or, on ne trouve nulle trace de cela dans le présent texte.

En somme, ce projet de loi, présenté comme une amélioration rationnelle de la gestion de la sécurité sociale, n'apporte ni transparence, ni efficacité, mais accentue encore plus la logique comptable et la mainmise étatique sur la sécurité sociale. Ce sont les assurés sociaux qui en feront les frais. Nous ne pourrons que voter contre un tel projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. Alain Vasselle, rapporteur. C'est excessif ! Ce n'est donc pas la peine de déposer des amendements !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je ne vais pas, bien entendu, recommencer l'excellente présentation qu'ont faite M. le rapporteur et M. le rapporteur pour avis.

Je veux me livrer à un exercice de clarification, car il a été avancé par certains orateurs que réserver aux lois de financement de la sécurité sociale l'institution de mesures d'exonération de cotisations et de contributions nécessiterait une révision constitutionnelle au motif que l'article 34 de la Constitution autorise le législateur ordinaire à déterminer « l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ».

La lecture de l'article 34 de la Constitution doit être plus complète et, notamment, faire référence aux dispositions de son dernier alinéa, aux termes duquel est confié au législateur organique le soin d'en préciser ou d'en compléter le contenu.

Une loi organique pourrait-elle, alors, contredire fondamentalement les dispositions de l'article 34 ? Je ne le crois pas. En revanche, elle permet de prévoir les aménagements ponctuels répondant à des objectifs constitutionnels figurant dans la Constitution elle-même, ou dégagés comme tels par la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

En matière de finances sociales, et pour illustrer ces principes « recueillis par la jurisprudence du Conseil », on pourra rappeler l'importance de la lisibilité, de l'intelligibilité ou de la sincérité des lois de financement.

D'ailleurs, sans doute sur la base de l'invitation faite par le constituant au législateur organique de préciser ou de compléter le contenu de l'article 34, et avec le souci d'assurer une meilleure intelligibilité des finances publiques, le Conseil des impôts s'est senti autorisé à proposer, dans son rapport pour 2003 - c'est la proposition n° 4 - que soit réservée aux lois de finances l'exclusivité de la création des dépenses fiscales, qui constituent peu ou prou, pour l'impôt sur le revenu, l'équivalent des exonérations de cotisations et de contributions sociales .

Je rappellerai incidemment que le Conseil des impôts ne compte pas moins de quatre conseillers maîtres à la Cour des comptes, dont le Premier président, de deux conseillers d'Etat, de deux conseillers à la Cour de cassation et d'un éminent professeur de finances publiques.

Je poursuis sur cette analyse de l'ordre constitutionnel financier avec la question de l'élévation au niveau organique de la compensation des exonérations Notre excellent collègue M. Fréville m'y a indirectement invité en faisant référence au fait que l'autonomie financière des collectivités territoriales avait nécessité une révision constitutionnelle.

Il me semble que cette révision, au-delà de sa portée fortement symbolique, était absolument nécessaire, car, initialement, la Constitution ne prévoyait aucune disposition relative aux finances des collectivités locales et n'invitait pas le législateur organique à intervenir dans la définition de la « libre administration » de ces collectivités.

Je dois, en revanche, constater que, pour les finances de la sécurité sociale, la révision constitutionnelle a déjà eu lieu. L'article 34 - toujours lui ! - dispose ceci : « Les lois de financement de la sécurité sociale déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique. »

C'est tout notre travail d'aujourd'hui que de définir les conditions dans lesquelles la sécurité sociale réalise son équilibre financier. Je ne vois donc pas où est la difficulté constitutionnelle.

Le Conseil constitutionnel a toujours été souple sur l'interprétation de ce principe. S'il avait interprété strictement la Constitution et restrictivement le domaine de la loi organique, il aurait pu, par exemple, imposer à la loi de financement de la sécurité sociale de présenter des comptes en équilibre et de lui interdire le recours sur plusieurs années à l'emprunt déguisé que constituent les lignes de trésorerie dont dispose la sécurité sociale auprès de l'ACOSS, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, et qui ont pu atteindre plus de 30 milliards d'euros.

Bref, il nous faut écarter de nos débats - je suis sûr que vous en êtes comme moi convaincus - cet argument constitutionnel, pour réfléchir sur le fond.

M. Fréville a parlé d'or sur bien des points et a posé les bonnes questions.

En premier lieu, est-il opportun de réserver à un texte - lois de finances ou lois de financement de la sécurité sociale - le monopole de toute la fiscalité ? Je ne le pense pas et je souscris à son point de vue.

Il nous faut de grandes et belles lois fiscales permettant d'évaluer la pertinence et l'incidence de l'impôt, dans le cadre d'une navette pleine et entière C'est un exercice auquel le Parlement ne se livre plus guère, et je le regrette, depuis les lois sur les plus-values des années 1970.

Mais, lorsque l'on évoque un monopole des lois de financement de la sécurité sociale ou des lois de finances sur les dépenses fiscales ou sur les exonérations de cotisations sociales, on ne parle pas de cela.

Je vous renvoie au rapport de la commission des affaires sociales : en matière d'exonérations, le Parlement a été invité à adopter - écoutez-moi bien ! -, treize mesures dans treize textes différents, au cours des quinze derniers mois, sans considération ni analyse de l'incidence de ces dernières pour les finances publiques !

M. Guy Fischer. C'est vrai !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous ne faisons pas, à l'occasion de l'examen de ces textes, un travail de fiscaliste, mais nous arbitrons, au fil de l'eau, en fonction d'objectifs catégoriels. Cela, me semble-t-il, nous pouvons légitimement chercher à l'encadrer.

En second lieu, M. Fréville a beaucoup parlé de consolidation des recettes en lois de finances. Je m'inscris dans la même réserve que lui : il n'a pas entre de dispute de compétences, mais la recherche d'une plus grande cohérence, là où les frontières sont encore un peu floues.

Nous détenions tous les deux, en 1996, une fraction du pouvoir constituant, lui à l'Assemblée nationale, moi-même au Sénat.

Comme l'a rappelé Alain Vasselle, le texte initial était « borgne ». Il était donc nécessaire d'ajouter l'examen des recettes à celui des dépenses, sans lequel le Parlement aurait été conduit à voter un équilibre, pour reprendre l'expression de Bruno Bourg-Broc, alors président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale, entre « des dépenses et des silences ».

Nous avons donc construit un outil parfaitement autonome.

Au cours de la phase du bilan qui a précédé le dépôt du projet de loi organique que nous examinons aujourd'hui, je suis intervenu à la tribune pour poser cette même question qui est la sienne aujourd'hui, s'agissant de l'ordre normatif de nos finances publiques : continuons-nous avec l'outil que constitue la loi de financement ou refondons-nous les termes d'un examen des comptes sociaux par le Parlement en loi de finances ?

Le Gouvernement a répondu très clairement dans le sens du maintien de la dualité des textes. Nous ne devons pas constamment remettre en question nos instruments : la loi de financement de la sécurité sociale est là, nous l'améliorons, son autonomie doit être pleine et entière.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Très bien !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Cela ne nous dispense nullement, en revanche, de bien coordonner nos travaux respectifs.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Bien sûr !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Le risque majeur, qui a toujours été évité, aurait été celui de conflits incessants entre lois de finances et lois de financement.

La commission des finances propose régulièrement, et nous la soutenons, de consacrer des moments et des outils d'étude aux prélèvements obligatoires dans leur ensemble. Mais, mes chers collègues, ceux-ci ne doivent pas aboutir à des décisions, qu'il n'y ait pas d'ambiguïté sur ce point.

Ce matin, en commission, nos collègues de l'opposition ont proposé d'instaurer un volet social lors du débat d'orientation budgétaire. J'ai apprécié que M. Alain Vasselle ait souhaité, sur une telle demande, s'en remettre à l'avis de la commission des finances, qui a la responsabilité, au Sénat, de la tenue et du contenu de ce débat.

Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je souhaite aborder la compensation des exonérations de cotisations et de contributions sociales d'un point de vue politique.

On peut parfaitement s'opposer au principe inscrit dans la loi Veil du 25 juillet 1994 et préférer laisser au Gouvernement et au Parlement le soin de décider, selon les circonstances, de l'opportunité de déroger ou non au principe de compensation.

On peut légitimement préférer laisser au Gouvernement cette marge de manoeuvre lui permettant de « calibrer » son déficit, qui est, nous en sommes d'accord, identique en termes maastrichtiens, qu'il se situe au niveau du budget général ou à celui des comptes sociaux.

Ce n'est toutefois pas notre posture ni celle du Gouvernement, qui a pris l'engagement formel, par la voix de M. Philippe Douste-Blazy, le 27 juillet dernier, d'élever au niveau organique la disposition précitée.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Tout à fait !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je me ferai peut-être tout à l'heure le plaisir de vous lire sa déclaration.

Je rappelle tout de même que nous sommes confrontés à un véritable défi en matière de maîtrise des comptes sociaux et que, à la différence de l'Etat, nous ne sommes pas seuls à la manoeuvre.

Les partenaires sociaux ont parfois et même souvent eu recours à l'alibi des « charges indues » pour ne pas avoir à prendre des mesures douloureuses, que, par ailleurs, ils assument parfaitement dans le cadre des régimes complémentaires.

Nous souhaitons modifier les comportements de tous vis-à-vis de la sécurité sociale : ceux des praticiens, des assurés, des gestionnaires, mais également, monsieur le secrétaire d'Etat, celui du tuteur ou du partenaire, parfois léonin, qu'est l'Etat. Je considère, à cet égard, que la compensation est une part du contrat qu'il lui revient de respecter et qu'il engage sa parole sur plusieurs années.

C'est en tout cas la proposition que la commission des affaires sociales fait au Sénat, après en avoir longuement débattu avec le Gouvernement et avoir obtenu son accord dans le passé.

C'est pourquoi, tout à l'heure, je proposerai à M. le président, comme le prévoit notre règlement, de soumettre au Sénat, en priorité, l'amendement de notre commission portant sur le principe de compensation. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Alain Vasselle, rapporteur. Bravo !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord, en réponse aux propos de M. Alain Vasselle au début de la discussion générale, souligner le rôle très important qu'a joué la commission des affaires sociales dans la préparation de ce texte et, plus généralement, dans celle des lois de financement.

Monsieur le rapporteur, le Gouvernement est bien conscient du rôle majeur que vous avez toujours eu à coeur de jouer dans la définition des intérêts de la sécurité sociale, notamment en ces temps difficiles où certains avaient « kidnappé » les recettes de la sécurité sociale à des fins qui n'étaient pas toujours vertueuses, ou qui en tout cas n'étaient pas toujours conformes aux intérêts de la sécurité sociale. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Oui, nous avons besoin de votre soutien pour accompagner la modernisation de la sécurité sociale, grâce au présent projet de loi organique sur les lois de financement de la sécurité sociale.

Vous avez indiqué que nous gommions les péchés originels de l'actuelle loi de financement. Je vous en remercie.

Sur la démarche « objectifs-résultats », je veux vous rassurer : nous porterons une attention particulière à son articulation avec les conventions d'objectifs et de gestion. C'est une nécessité.

Vous avez également souligné, monsieur le rapporteur, que nous étions tous des ordonnateurs des dépenses d'assurance maladie. Je vous rejoins pleinement sur ce point. Cela explique d'ailleurs notre choix de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé et celui de faire évoluer les comportements des ordonnateurs.

Cette maîtrise sera aussi, et vous l'avez souligné, facilitée par la plus grande transparence de l'ONDAM : transparence dans son élaboration, grâce aux propositions des caisses ; transparence dans le vote, grâce à la définition de sous-objectifs ; transparence dans sa mise en oeuvre, grâce au dispositif de suivi mis en place par la loi du 13 août 2004 ; transparence également en matière d'information, eu égard au travail que nous avons proposé de faire en amont afin que celle-ci soit la plus complète possible, en dehors même du cadre législatif.

S'agissant, monsieur le rapporteur, des amendements que vous avez évoqués, je souligne que, au cours de ce débat, le Gouvernement sera guidé par trois idées fortes : renforcer, comme vous le souhaitez, la transparence et la qualité de cette nouvelle loi organique ; assurer sa cohérence avec la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, celle-ci ayant fait l'objet d'un large consensus dans les deux assemblées ; enfin et surtout, garantir sa sécurité juridique.

J'aurai l'occasion de revenir lors de l'examen des amendements sur la question de la compensation des exonérations de cotisations et de contributions sociales, sujet qu'a longuement évoqué M. le président de la commission des affaires sociales.

A ce stade, je tiens néanmoins à souligner que le Gouvernement est à l'origine d'une avancée importante. Une annexe retracera en effet très précisément la mise en oeuvre de cette compensation. Toutefois, c'est d'abord grâce à la transparence que nous assurerons le respect de ce principe.

Par ailleurs, je rappelle que c'est ce gouvernement, soutenu par la majorité, qui a renforcé, dans la loi du 13 août 2004, le principe de compensation.

Monsieur le rapporteur pour avis de la commission des finances, comme vous l'avez souligné à votre tour, les masses financières en jeu dans les politiques de sécurité sociale sont bien supérieures à celles du budget de l'Etat ; d'où l'importance cruciale des lois de financement.

La réforme présentée par le Gouvernement vise à renforcer encore davantage la portée du vote du Parlement, dont vous avez à juste titre souligné les limites. Le rapprochement opéré entre le traitement des recettes et celui des dépenses, dont vous vous en félicitez, permettra au Parlement de se prononcer sur des soldes et fera mieux apparaître les équilibres financiers.

Par ailleurs, vous craignez que les dispositions du présent projet de loi ne perpétuent la tendance du Gouvernement à ne jamais déposer de loi de financement rectificative. Cette crainte ne me paraît pas pleinement fondée, monsieur Jégou. En effet, le projet de loi organique clarifie ce qui relève, dans la loi de financement pour l'année à venir, des dispositions rectifiant l'exercice en cours. Cela n'empêchera nullement le dépôt d'un projet de loi de financement rectificative si le Gouvernement le juge utile.

Vous avez également évoqué la question de la situation de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, vis-à-vis de la loi de financement de la sécurité sociale et de la loi de finances.

Permettez-moi tout d'abord de me féliciter des bonnes conditions de montée en charge de ce dispositif, qui permet de renforcer le financement par l'Etat de l'APA, l'allocation personnalisée d'autonomie, d'accentuer l'effort en faveur de la vie à domicile et de renforcer la médicalisation des établissements d'hébergement.

Toutes les missions de la CNSA concernent des financements. Toute disposition financière relative à la CNSA a donc des conséquences sur les politiques qu'elle contribue à financer, c'est-à-dire non seulement sur l'équilibre général des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, mais également, pour les missions de la caisse relatives aux concours à l'APA et à la prestation de compensation du handicap, sur les finances locales.

Or le champ des lois de financement de la sécurité sociale se limite, selon les termes de la Constitution, aux régimes de base de la sécurité sociale. Il ne paraît donc pas juridiquement possible de traiter de l'intégralité de la CNSA dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Dans le présent projet de loi organique, le Gouvernement est allé aussi loin que la Constitution le lui permettait pour intégrer dans le PLFSS les aspects de la CNSA relatifs à la sécurité sociale.

Conscient de cette limite du champ de la loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement propose toutefois de donner au Parlement une information globale sur les comptes de la CNSA en prévoyant une nouvelle annexe.

Vous vous félicitez également du rapprochement entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale. Nous nous sommes en effet inspirés de la LOLF à chaque fois que nous avons jugé bon de le faire. Mais il ne faut pas pousser trop loin ce rapprochement. Comme l'a relevé avec pertinence M. Alain Vasselle, la gestion de la sécurité sociale ne saurait se confondre avec celle d'un ministère ! Les lois de financement de la sécurité sociale fixent des objectifs de dépenses et des prévisions de recettes, elles n'arrêtent pas de crédits limitatifs.

Enfin, monsieur Jégou, vous m'avez interrogé sur la certification des comptes des régimes autres que le régime général. Comme vous le savez, la MSA, la mutualité sociale agricole, fait appel aujourd'hui à des commissaires aux comptes. C'est certainement ce que la Cour des comptes avait à l'esprit lorsque vous l'avez auditionnée. Nous réfléchissons, avec ces autres régimes, à une généralisation du dispositif qui est aujourd'hui présenté.

M. Bernard Cazeau a souligné les apports du projet de loi organique et je l'en remercie.

Mieux associer le Parlement, clarifier le champ de la loi de financement de la sécurité sociale, tels sont en effet nos objectifs. Mais, et j'ai déjà eu l'occasion de le dire, la loi de financement n'est pas qu'une loi financière. Les programmes de qualité et d'efficience ne contiendront pas que des indicateurs financiers, loin de là.

De plus, s'agissant de la politique de santé, la loi relative à la politique de santé publique comporte un dispositif de suivi très poussé, qui devrait, monsieur le sénateur, vous satisfaire.

Vous êtes par ailleurs revenu sur la réforme de l'assurance maladie. Vous préférez visiblement les sondages aux chiffres réels, c'est votre droit, mais ce n'est pas le point de vue du Gouvernement.

La réforme de l'assurance maladie n'est pas directement l'objet de notre discussion d 'aujourd'hui, mais permettez-moi de faire une mise au point sur ce sujet. A ce jour, plus de 4,5 millions de Français ont d'ores et déjà choisi leur médecin traitant. Il s'agit là non de spéculations ou de sondages, mais de chiffres réels.

Par ailleurs, les deux premiers mois de l'année 2005 ont été particulièrement encourageants pour ce qui concerne les dépenses.

Bien évidemment, il convient de rester prudent...

M. François Autain. Cela vaut mieux !

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Mais qu'aurions-nous entendu, mesdames, messieurs les sénateurs, si les chiffres avaient été différents !

Je ne reviendrai pas non plus sur l'adhésion massive des praticiens au dispositif du médecin traitant. Cependant, je ne résiste pas au plaisir de vous annoncer qu'aujourd'hui plus de 92 % des médecins ont déjà adhéré à ce dispositif.

Je veux également rappeler que la convention médicale a été signée par la majorité des syndicats, et les syndicats signataires représentent, de surcroît, la majorité des médecins de notre pays.

M. Paul Blanc a noté que, depuis leur introduction en 1996 par Alain Juppé, les lois de financement de la sécurité sociale constituaient un acquis certes essentiel, mais parfois complexe, dense et technique. Or, avec cette réforme, nous renforçons notablement la lisibilité de ces lois, en particulier en simplifiant les annexes, en en éliminant ce qui nous semblait inutiles et en y faisant figurer, au contraire, des points qui en étaient absents jusque-là, notamment la compensation à laquelle, mesdames, messieurs les sénateurs, vous êtes tout comme nous très justement attachés.

Plus généralement, les relations financières entre la sécurité sociale et les collectivités publiques, à commencer par l'Etat, seront désormais clarifiées et retracées dans une nouvelle annexe, que nous sommes prêts à améliorer encore en fonction de ce qui pourra ressortir de ce débat, en y introduisant notamment des éléments relatifs à la neutralité desdites relations.

Par ailleurs, M. Paul Blanc a relevé à juste titre que le périmètre de la loi était élargi à tous les régimes puisque le seuil de 20 000 cotisants est supprimé. Il est également élargi aux organismes concourant au financement de la sécurité sociale, en particulier à la CNSA.

M. Fréville a soulevé trois questions qui sont au coeur de la problématique qui nous a conduits à engager cette réforme. Nous avons la conviction que ces questions reçoivent une réponse positive.

Oui, la loi de financement de la sécurité sociale, dans le cadre rénové qui résultera de la loi organique, nous permettra de mieux contrôler l'évolution pluriannuelle des dépenses de la sécurité sociale en les replaçant dans le contexte du cycle économique et en donnant une vraie perspective pour les quatre années à venir.

Oui, la loi de financement de la sécurité sociale permet d'avoir une vision d'ensemble de tous les organismes et fonds concourant au financement.

S'agissant des cas particuliers de la CADES et du F2R, je tiens tout d'abord à souligner que les dispositions relatives au Fonds de réserve des retraites pourront désormais entrer dans le champ de la loi de financement de la sécurité sociale. Quant à intégrer la totalité de leurs comptes dans les dépenses et les recettes, cela ne serait pas cohérent avec l'objet de la loi de financement. Les comptes prévisionnels qu'arrêtent ces organismes s'apparentent à des comptes de résultat prévisionnels alors que lesdits organismes relèvent plutôt du bilan, comme en convenait d'ailleurs M. Fréville.

Sur la question de savoir si la loi de financement, telle qu'elle sera rénovée grâce à l'adoption du présent projet de loi organique, participera mieux à un pilotage global des finances, là encore, la réponse est positive.

Même si M. Fréville a noté combien il était difficile d'obtenir une articulation globale des finances publiques, je vous indique, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement va s'engager dès 2005, dans la continuité de ce projet de loi organique, dans une démarche d'articulation plus étroite entre la loi de finances de l'Etat et la loi de financement de la sécurité sociale.

Une inspection ministérielle rendra prochainement ses conclusions sur l'élaboration du projet de loi de financement de la sécurité sociale, que nous ferons évoluer, à la demande du Premier ministre, selon trois axes. Tout d'abord, il conviendra d'assurer une étroite coordination entre le ministère des finances et celui des solidarités, de la santé et de la famille. Il faudra aussi veiller à une mise en cohérence des calendriers budgétaires du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Enfin, il conviendra de définir en commun des perspectives pluriannuelles afin d'élaborer de façon cohérente le rapport pluriannuel annexé au PLFSS et la partie relative aux finances sociales du programme de stabilité.

Monsieur Mercier, avec une très grande finesse d'analyse juridique, vous avez pointé la nature particulière des lois de financement de la sécurité sociale, qui ne sont pas des lois de finances, mais qui se distinguent toutefois des lois ordinaires. Comme vous le faisiez remarquer à juste titre, ce sont des lois d'orientation financière qui fixent des prévisions de recettes et de dépenses. Dans de telles conditions, il ne saurait y avoir concurrence entre loi de finances et loi de financement de la sécurité sociale.

Je me félicite que vous ayez salué vous-même les avancées que va permettre l'adoption de ce projet de loi organique. La future loi organique permettra d'accroître la clarté et la sincérité des différents documents, en particulier grâce à cette innovation majeure que constitue la pluriannualité. Soyez assuré que nous exploiterons au mieux ces avancées pour améliorer, par le biais de la loi de financement de sécurité sociale, le pilotage de la sécurité sociale avec l'appui du Parlement, mais sous son contrôle.

Monsieur Fischer, vous avez tout d'abord évoqué la situation des hôpitaux. M. Philippe Douste-Blazy et moi-même l'avons dit à plusieurs reprises : nous sommes des militants de l'hôpital public. Nous ne nous contentons pas de le dire. Ainsi l'ONDAM qui a été voté pour 2005 montre très clairement qu'à la fin de l'année, 1,8 milliard d'euros supplémentaires seront dépensés en faveur de l'hôpital par rapport à la somme qui avait été engagée à la fin de l'année 2004. C'est cela aussi la réalité des chiffres. ! Nous traduisons notre conviction par des actes ; je viens de vous le démontrer.

Monsieur Fischer, vous avez, en quelque sorte, refait le débat relatif à la réforme de l'assurance maladie qui a eu lieu l'été dernier.

M. François Autain. On ne s'en lasse pas !

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. De notre côté, nous nous sommes concentrés sur la mise en oeuvre de la réforme et sur la pédagogie, soucieux que nous étions à la fois d'expliquer la réforme et d'impliquer tous les acteurs concernés.

Tout à l'heure, vous avez évoqué les contrats responsables ; ils constituent l'un des éléments importants de la réforme. M. Philippe Douste-Blazy et moi-même poursuivons la concertation avec l'ensemble des acteurs, non seulement les organismes complémentaires, les partenaires sociaux, les syndicats de médecins, les associations de consommateurs, mais aussi les élus. Nous avons le sentiment que ces différents acteurs adhèrent au parcours de soins. Nous voulons donc que les contrats responsables, dont les contours seront définis dans les prochaines semaines, permettent une réelle incitation en matière de suivi du parcours de soins.

Monsieur le président de la commission des affaires sociales, vous avez évoqué un éventuel monopole des lois de financement de la sécurité sociale en matière d'exonération de cotisations sociales ainsi que l'élévation au niveau organique du principe de compensation.

Je comprends très bien les motivations de ces deux mesures et vous comprendrez vous-même que le ministère en charge des comptes sociaux soit sensible à ces arguments. Nous aurons l'occasion, au cours de ce débat, d'aborder au fond et dans le détail les questions que soulèvent certains des amendements qu'a déposés la commission des affaires sociales.

Croyez, monsieur About, en la détermination de ce gouvernement à préserver l'autonomie financière de la sécurité sociale.

Croyez également à son attachement aux lois de financement de la sécurité sociale, attachement qui sortira renforcé de cette réforme. La discussion qui va s'ouvrir nous permettra de tenter de nous convaincre les uns les autres. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

(M. Philippe Richert remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.)