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Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation du protocole du 27 novembre 2003 établi sur la base de l'article 43, paragraphe 1, de la convention portant création d'un office européen de police (convention Europol) modifiant ladite convention
Discussion générale (suite)

protocole modifiant la Convention portant création d'un Office européen de police (Convention Europol)

Adoption d'un projet de loi

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation du protocole du 27 novembre 2003 établi sur la base de l'article 43, paragraphe 1, de la convention portant création d'un office européen de police (convention Europol) modifiant ladite convention
Article unique (début)

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant l'approbation du protocole du 27 novembre 2003 établi sur la base de l'article 43, paragraphe 1, de la convention portant création d'un Office européen de police (convention Europol) modifiant ladite convention (nos 157, 355)

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, l'Office européen de police, ou Europol, a pour but d'améliorer l'efficacité des services de police européens et leur coopération, de manière à lutter contre le terrorisme et les formes graves de criminalité internationale.

À l'origine, ses activités étaient limitées à la lutte contre la drogue. Aujourd'hui, le champ d'action d'Europol couvre plus d'une vingtaine d'infractions, comme le terrorisme, les homicides volontaires, le trafic d'armes ou encore la criminalité informatique et la criminalité contre l'environnement.

Les missions essentielles d'Europol sont l'échange d'informations, leur analyse et un soutien opérationnel aux services nationaux de police. La compétence de l'office peut s'exercer dès lors que deux États membres de l'Union au moins sont concernés et qu'une organisation criminelle est impliquée.

Prévu dans le traité de Maastricht, cet office a été créé par une convention du 26 juillet 1995, entrée en vigueur en octobre 1998 et révisée par cinq protocoles successifs. Dernier en date, le protocole du 27 novembre 2003 est également le seul que la France n'ait pas encore ratifié. Fruit d'une initiative danoise, ce protocole témoigne de la volonté de permettre à Europol de jouer efficacement son rôle de pivot de la coopération policière européenne, en simplifiant et en améliorant certaines de ses procédures.

Les principales modifications apportées concernent l'étendue du champ de ses compétences. Le protocole prévoit, « [...] lorsqu'il y a raisonnablement lieu de croire qu'une organisation criminelle est impliquée », la possibilité de contacts directs entre des services nationaux et Europol, la consultation directe, mais limitée, du Système d'information Europol, ou SIE, par ces services nationaux, la simplification des modalités de création des fichiers de travail à des fins d'analyse et le renforcement du contrôle des demandes de données, notamment par le renforcement du rôle du Parlement européen vis-à-vis d'Europol.

Le Parlement pourra, par exemple, entendre un représentant de la présidence du Conseil de l'Union européenne, éventuellement assisté du directeur d'Europol, sur toute question générale liée à l'Office. En outre, la coopération avec Eurojust sera intensifiée, par la voie d'accord entre les deux organes.

L'article 2 du protocole prévoit les conditions de son entrée en vigueur, qui se fait quatre-vingt-dix jours après que le dernier État membre a notifié au Conseil l'accomplissement des procédures constitutionnelles requises pour l'adoption de ce protocole. À la fin du mois de mai dernier, cinq États membres, outre la France, étaient encore dans cette situation.

En résumé, ce protocole devrait contribuer à renforcer le rôle opérationnel d'Europol au service de la coopération policière en Europe. C'est pourquoi les chefs d'État et de Gouvernement européens ont souligné, à plusieurs reprises depuis les attentats de Madrid de mars 2004, l'urgence qui s'attache à son entrée en vigueur.

Telles sont les principales observations qu'appelle le protocole établi sur la base de l'article 43, paragraphe 1, de la convention portant création d'un office européen de police, ou convention Europol, modifiant ladite convention, fait à Bruxelles le 27 novembre 2003. Dans la mesure où il comprend des dispositions de nature législative, ce protocole est soumis au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. André Rouvière, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, le présent texte, qui concerne l'Office européen de police, est d'une importance particulière.

Europol a été créé en 1995 par les quinze pays membres de l'Union européenne de l'époque pour renforcer leur coopération en matière de lutte contre les formes les plus graves de criminalité internationale.

L'Office a rapidement vu sa légitimité reconnue, notamment en raison de la qualité de son travail. La pression accrue de la criminalité transfrontalière dans l'ensemble européen a conduit à renforcer, par deux fois déjà, ses compétences.

Le présent texte est le troisième à accentuer le caractère opérationnel d'Europol, en procédant à une série de modifications ponctuelles. Il manifeste la reconnaissance, par un nombre croissant d'États membres, de l'efficacité d'Europol. C'est notamment le cas de la France, qui, initialement réservée face à cette institution, manifeste aujourd'hui une vision plus positive de son action.

M'étant rendu personnellement au siège d'Europol, à La Haye, le 15 mars dernier, j'ai pu mesurer l'efficacité de la synthèse effectuée par les services d'Europol à partir des informations fournies par les États membres, et me réjouir que le présent texte étende les capacités de consultation des nombreux fichiers d'informations constitués par Europol.

Cependant, madame la ministre déléguée, j'ai constaté aussi que la France était sous-représentée numériquement, notamment dans les postes de responsabilité.

M. Hubert Haenel. C'est vrai !

M. André Rouvière, rapporteur. Il existe un décalage entre notre participation financière et notre participation en personnels. À mon avis, il ne faudrait pas grand-chose pour que la France retrouve la place qui devrait être la sienne, à condition de ne pas laisser la situation en l'état et de se saisir de toutes les opportunités.

Europol se présente en effet comme un outil irremplaçable pour l'échange d'informations entre États membres, auxquels se sont joints, à titre volontaire, sept pays ayant conclu des accords de coopération avec cette institution : le Canada, les États-Unis, l'Islande, la Norvège, la Suisse, la Bulgarie et la Roumanie. Par ailleurs, des accords « stratégiques » permettant des actions communes ont également été passés avec la Colombie, la Russie et la Turquie. Enfin, Europol travaille en liaison étroite avec Interpol.

On voit bien qu'Europol occupe désormais une place centrale dans l'organisation de la lutte contre la criminalité internationale et qu'il constitue un pôle majeur de regroupement d'informations sur les criminels et les trafics dans lesquels ils sont impliqués.

Son action contre la cybercriminalité mérite d'être soulignée, car cette forme moderne de criminalité risque, hélas, de se développer. Il paraît important, madame la ministre déléguée, de développer la formation de cyberpoliciers et de cyberjuristes. Il serait intéressant que vous puissiez nous donner quelques renseignements sur ces formations - même sous forme de note ultérieurement - afin que nous sachions où nous en sommes.

La commission des affaires étrangères forme le souhait que la France, qui tire, pour ses propres enquêtes, un grand bénéfice des informations synthétisées par Europol, y renforce sa présence en personnels. En 2006, seuls 37 employés sur 500 sont français, ce qui est peu au regard de la contribution financière de notre pays. Celle-ci se montait, en effet, en 2006, à 8 millions d'euros, sur un total de 63 millions, soit une proportion, appréciable, de 16 %, qui fait de la France le troisième contributeur, après l'Allemagne et le Royaume-Uni.

Avant de conclure, madame la ministre déléguée, je voudrais réitérer une demande que j'ai faite au ministre présent à chaque fois que j'ai eu l'honneur de rapporter une convention ou un accord international : il serait important d'avoir, une fois par an ou tous les deux ans, une sorte de bilan de l'application de ces textes. Tous les ministres en acceptent le principe, comme notre collègue Jack Ralite le rappelait tout à l'heure à l'occasion d'un autre texte, et j'imagine que vous allez faire de même, mais, pour l'instant, ces textes que nous votons souvent dans l'enthousiasme ne font l'objet d'aucun suivi ; nous ne savons donc pas ce qu'ils deviennent.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission des affaires étrangères, à l'unanimité, vous recommande, mes chers collègues, d'adopter ce projet de loi autorisant l'approbation du protocole modificatif. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. Hubert Haenel.

M. Hubert Haenel. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, je ne reprendrai pas ici le contenu du rapport de notre excellent collègue André Rouvière. Je m'en tiendrai, dans mon intervention, à trois observations concernant le rôle du Parlement français en matière européenne.

Je précise, madame la ministre déléguée, si besoin était, que les observations que je vais faire ne vous sont pas personnellement destinées ; elles illustrent cependant ce que le Conseil d'État stigmatise régulièrement dans ses rapports sur l'administration française et l'Europe.

Première observation, pourquoi avoir tant tardé à présenter ce projet de loi ? Le protocole modifiant la convention instituant l'Office européen de police, Europol, a été adopté par le Conseil en novembre 2003. Or ce n'est qu'en décembre dernier que le projet de loi autorisant l'approbation de ce protocole a été déposé sur le bureau du Sénat. Fallait-il réellement deux années aux services pour rédiger l'exposé des motifs ?

J'ai tendance à croire que ce retard est surtout dû au désintérêt de l'administration française pour tout ce qui concerne l'Union européenne, et cela d'autant plus que j'ai relevé une curieuse coquille dans l'exposé des motifs. Il y est fait référence « au traité sur la Constitution européenne qui sera soumis à la ratification par voie référendaire au printemps 2005 ». Je doute que les services concernés aient ignoré le résultat du référendum du 29 mai dernier ! J'en déduis donc que ce projet de loi sommeillait dans les tiroirs d'un ministère depuis plusieurs mois ...

Vérification faite, le Conseil d'État a rendu son avis le 8 décembre 2005, le conseil des ministres a adopté le projet de loi le 11 janvier 2006, lequel a été déposé sur le bureau du Sénat le même jour. Étant donné que le texte doit encore être examiné par l'Assemblée nationale, il aura fallu, en définitive, au moins trois ans pour approuver une simple convention !

Au moment où la France traverse une période que l'on peut qualifier d'assez délicate au niveau européen, cette attitude n'est pas de nature à améliorer l'image de notre pays auprès de nos partenaires, vous en conviendrez, madame la ministre déléguée.

En effet, la quasi-totalité des autres États membres ont d'ores et déjà approuvé ce protocole, et notre pays est régulièrement montré du doigt à Bruxelles. Dans ces conditions, il ne faut pas s'étonner - le rapporteur vient de le souligner à juste titre - que notre pays, troisième contributeur au budget d'Europol, avec une contribution de l'ordre de 8 millions d'euros, n'arrive qu'au sixième rang des nationalités qui composent le personnel d'Europol et, surtout, qu'aucun Français n'occupe un poste de responsabilité !

Ma deuxième observation porte sur la place réservée aux questions européennes dans notre assemblée.

La plupart des sujets évoqués en séance publique présentent une dimension européenne plus ou moins prononcée. C'est le cas des conventions européennes, des projets de loi de transposition des directives, mais aussi d'un grand nombre de projets ou de propositions de loi. Or, la plupart du temps, l'aspect européen est largement occulté dans nos débats. Il en va ainsi des textes qui ont fait l'objet, avant leur adoption, de résolutions adoptées par notre assemblée.

Ainsi le protocole sur lequel nous sommes appelés à nous prononcer a fait l'objet, lors de son élaboration, d'une proposition de résolution qui a été examinée et adoptée par la commission des lois du Sénat. J'ajoute que le rapporteur de cette proposition de résolution était notre collègue Alex Türk, qui est l'ancien président de l'Autorité commune de contrôle d'Europol et qui connaît donc particulièrement bien ces questions. Or je constate qu'il n'est fait nulle part mention de ces travaux du Sénat.

Tout se passe comme si les travaux antérieurs du Sénat n'avaient pas existé. Nous avons trop souvent le sentiment d'être saisis pour la pure forme, sans qu'il soit tenu compte de nos résolutions.

L'Assemblée nationale vient de modifier son règlement afin de mieux prendre en compte cette dimension européenne. Dorénavant, les rapports faits sur un projet ou une proposition de loi portant sur les domaines couverts par l'activité de l'Union européenne comporteront en annexe des éléments d'information sur le droit européen applicable ou en cours d'élaboration, ainsi que les positions prises par l'Assemblée par voie de résolution.

Sera-t-il nécessaire de suivre l'exemple de l'Assemblée nationale et d'aller jusqu'à réviser notre règlement pour modifier nos pratiques ?

Enfin, ma troisième et dernière observation porte sur le fond et concerne la place des Parlements nationaux, et donc du Parlement français, dans le contrôle d'Europol. En effet, c'est sur cette unique question que portait la résolution adoptée par notre assemblée. À cet égard, je voudrais rappeler brièvement les différentes étapes.

Ce protocole est issu d'une initiative du Danemark. Lorsqu'il a été déposé devant le Conseil, le texte initial rendait possible la création d'une commission composée de représentants du Parlement européen et des Parlements nationaux pour « examiner les questions liées à Europol ». La création d'une telle commission avait été proposée par la première conférence interparlementaire de La Haye sur Europol, en juin 2001.

Toutefois, au cours des négociations au sein du Conseil, cette disposition a été modifiée et le contrôle par les Parlements nationaux a été supprimé. C'est la raison pour laquelle le Sénat et sa commission des lois avaient adopté une résolution « appelant le Gouvernement à s'opposer à l'adoption de ce texte tant que n'aura pas été inscrite une disposition permettant la création d'une commission, composée en particulier de parlementaires nationaux, chargée d'examiner les questions liées à Europol et de procéder à la comparution du directeur d'Europol ».

Par la voix de notre représentant permanent auprès des institutions européennes, la France a tenté, sans succès, de réintroduire cette disposition afin d'associer les Parlements nationaux au contrôle d'Europol.

Nous n'avons pas pu avoir satisfaction, mais la France a obtenu une déclaration précisant que l'adoption de ce protocole est sans préjudice des droits des Parlements nationaux et de futurs arrangements concernant le contrôle des activités d'Europol par le Parlement européen et les Parlements nationaux.

L'idée que les Parlements nationaux doivent être associés au contrôle des activités d'Europol est largement partagée.

La coopération policière porte sur des questions très sensibles qui touchent directement aux droits des individus.

C'est pourtant sur ces questions de sécurité et de justice - souvenez-vous du référendum sur la Constitution européenne - que les attentes sont les plus fortes et que l'opinion publique estime, à juste titre, que l'Europe n'en fait pas assez dans ce domaine.

Vous conviendrez, madame la ministre déléguée, qu'il est légitime, dans une démocratie, que le Parlement exerce un droit de regard sur les services de police. Au demeurant, s'agissant d'un domaine qui relève jusqu'à nouvel ordre de la coopération intergouvernementale, tout le monde s'accorde sur la nécessité d'associer les parlements nationaux au contrôle d'Europol.

Je le rappelle, la Commission européenne et le Parlement européen y sont favorables, tout comme d'ailleurs l'Assemblée nationale et les autres Parlements, britannique, néerlandais ou danois, notamment.

J'ajoute que la Constitution européenne prévoyait que le Parlement européen et les Parlements nationaux s'associent au contrôle d'Europol, et le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire lui-même, M. Sarkozy, s'était prononcé en ce sens lors d'une audition devant le Sénat.

Dans ce contexte, je dois vous avouer, madame la ministre déléguée, ma surprise et aussi mon inquiétude à l'égard des discussions qui se déroulent actuellement au niveau européen à propos de l'avenir d'Europol et à l'égard de la position défendue par le Gouvernement.

En effet, la présidence autrichienne a lancé un vaste débat sur l'avenir d'Europol. Parmi les pistes évoquées figurent notamment le remplacement de la convention institutive d'Europol par une décision du Conseil, l'élargissement de ses compétences et un accroissement de son rôle opérationnel, notamment en liaison avec les équipes communes d'enquête.

Cette réflexion a donné lieu à des conclusions sur l'avenir d'Europol, qui ont été adoptées lors du dernier Conseil « Justice et affaires intérieures » des 1er et 2 juin dernier. Or à aucun moment et dans aucun document on ne trouve une référence quelconque au contrôle démocratique d'Europol par les Parlements nationaux. Au contraire, et pis encore, les Parlements nationaux se verraient privés du droit d'autoriser ou non toute modification de la convention Europol.

Je voudrais donc savoir, madame la ministre déléguée, si le Gouvernement entend respecter ses engagements, en faisant valoir la nécessité d'un contrôle d'Europol par les Parlements nationaux.

Cette question est d'autant plus importante que les activités de l'Office européen de police vont prendre à l'avenir, comme M. le rapporteur l'a souligné, un caractère de plus en plus opérationnel.

L'association des Parlements nationaux n'est pas une question accessoire. À mes yeux, c'est une condition de la légitimité d'Europol. Il n'est pas acceptable qu'un tel organisme se trouve en dehors d'un véritable contrôle parlementaire.

D'une manière plus générale, la réhabilitation de la fonction politique et parlementaire dans notre pays passera nécessairement par un rééquilibrage institutionnel, afin que le Parlement trouve sa juste place et que les positions, propositions, suggestions et critiques, au sens le plus noble du terme, du Sénat et de l'Assemblée nationale soient entendues par le Gouvernement et soient prises en compte par les administrations.

Même si mes propos peuvent gêner un certain nombre de mes collègues, je n'aurais pas été dans mon rôle et n'aurais pas assumé mes responsabilités de parlementaire si j'avais passé sous silence les constatations que j'ai faites lors de l'examen du protocole modifiant la convention Europol.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée. Monsieur Haenel, je tiens à vous dire que, sur les vingt-cinq États membres d'Europol, l'Irlande, les Pays-Bas, le Portugal, la Suède, la Belgique et l'Allemagne n'ont pas encore ratifié le présent protocole. La France n'est donc pas à pointer du doigt dans le processus de ratification qui est ici engagé.

Par ailleurs, monsieur le sénateur, vous nous faites part de votre inquiétude quant au manque de contrôle démocratique des parlements nationaux sur les activités d'Europol.

Je souhaite, tout d'abord, rappeler que, si les travaux du groupe Europol qui ont conduit à la rédaction de ce protocole n'ont certes attribué aucun droit de regard aux Parlements nationaux, il n'en demeure pas moins vrai que le contrôle démocratique de l'Office européen de police s'est vu élargi et renforcé par les nouvelles dispositions prévues aux articles 32 bis et 34 de la convention. Ce contrôle sera renforcé via un accès des documents de l'Office au public.

En effet, l'article 32 bis obéit à la logique de transparence vis-à-vis du public et de contrôle démocratique prônée par les institutions de l'Union européenne. En outre, le nouvel article 34 dispose que le Parlement européen sera, d'une part, annuellement destinataire d'un rapport spécial sur les travaux menés par Europol, et qu'il pourra, d'autre part, entendre le commissaire chargé de la justice et des affaires intérieures ainsi que le directeur d'Europol sur les sujets ayant trait à l'action de l'Office européen de police.

Ensuite, je crois que l'orientation des travaux en cours sur l'avenir d'Europol au niveau européen est de nature à vous rassurer.

En effet, ces travaux partent du constat établi par la présidence autrichienne selon lesquels les trois protocoles successifs visant à améliorer l'action d'Europol ne sont toujours pas entrés en application, faute de ratification par l'ensemble des États membres. Ces protocoles portaient pourtant sur l'extension de la compétence d'Europol au blanchiment et sur la participation de l'Office européen de police aux équipes communes d'enquête, questions purement opérationnelles visant à doter Europol des moyens lui permettant de lutter plus efficacement contre le crime organisé.

Tant les États membres qu'Europol sont persuadés que l'Office européen de police ne peut plus se permettre d'être, eu égard au caractère ultra-dynamique de la criminalité organisée en Europe, en décalage au niveau de ses moyens et des instruments mis à sa disposition.

Une réflexion sur l'avenir d'Europol, notamment sur le cadre juridique même de la convention, a été lancée sous la présidence autrichienne. Le Conseil « Justice et affaires intérieures » des 1er et 2 juin 2006 a décidé de finaliser la ratification des trois protocoles d'Europol et de commencer leur mise en oeuvre avant la fin de 2006.

À la fin de l'année 2006, la présidence finlandaise fera le point. Au début de l'année 2008, les États membres entameront une réflexion visant à améliorer le fonctionnement d'Europol.

Quant au bilan d'Europol, monsieur le rapporteur, je vous indique que la France est jusqu'à ce jour en tête des utilisateurs d'Europol, non seulement pour ce qui concerne les fichiers d'analyse, mais également pour les cas initiés, les affaires, les enquêtes, ainsi que pour l'utilisation d'échanges multilatéraux. Nous utilisons le mieux le potentiel d'Europol et le bureau de liaison français est le plus actif d'Europol.

Au total, cet investissement massif de nos services nationaux porte ses fruits puisque de nombreuses enquêtes se sont conclues, en 2005, par des arrestations et le démantèlement de réseaux au bénéfice de la France.

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de l'article unique.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation du protocole du 27 novembre 2003 établi sur la base de l'article 43, paragraphe 1, de la convention portant création d'un office européen de police (convention Europol) modifiant ladite convention
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée l'approbation du protocole établi sur la base de l'article 43, paragraphe 1, de la convention portant création d'un Office européen de police (convention Europol) modifiant ladite convention, adopté à Bruxelles le 27 novembre 2003, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté à l'unanimité.)

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation du protocole du 27 novembre 2003 établi sur la base de l'article 43, paragraphe 1, de la convention portant création d'un office européen de police (convention Europol) modifiant ladite convention
 

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Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation d'accords internationaux sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire
Discussion générale (suite)

Accords internationaux sur la responsabilité civile dans le domaine nucléaire

Adoption d'un projet de loi

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation d'accords internationaux sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire
Article 1er

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation d'accords internationaux sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire (n°s 293, 327).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le 26 avril 1986, survenait la catastrophe de Tchernobyl, dont nous avons célébré cette année le vingtième anniversaire.

Cet effroyable accident nucléaire a fait naître de nouvelles préoccupations, notamment en matière de réparation des dommages. Il a en effet révélé la nécessité de moderniser en profondeur le régime international de la responsabilité civile nucléaire, qui avait été élaboré dans les années soixante, et ce afin d'assurer une meilleure protection des victimes d'accident nucléaire et de mieux prendre en compte les effets transfrontières de ces accidents.

C'est pour répondre à cet objectif que les membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques qui étaient parties à la convention de Paris du 29 juillet 1960 sur la responsabilité civile nucléaire et à la convention complémentaire du 31 janvier 1963 ont engagé des négociations, qui ont abouti à la signature, le 12 février 2004, de deux protocoles.

La France, dont la législation en matière de responsabilité civile nucléaire était plus exigeante pour les exploitants et plus généreuse pour les victimes que ne l'exigeait le régime international, a joué un rôle très actif dans ces négociations. Ces deux textes internationaux permettront, une fois en vigueur, de disposer de moyens accrus de réparation pour indemniser un plus grand nombre de victimes, sur la base d'une définition élargie des dommages ; ils apportent donc d'incontestables améliorations au régime existant.

La première modification notable réside certainement dans l'élargissement de la notion de « dommage nucléaire », qui n'inclut plus seulement les dommages aux personnes et aux biens, mais comprend également les dommages immatériels, le coût des mesures de sauvegarde et celui des mesures de restauration d'un environnement dégradé, ainsi que d'autres pertes qui étaient susceptibles de représenter une part importante des dommages résultant d'un accident nucléaire.

Par ailleurs, le champ des activités couvertes par la convention a été étendu pour garantir la réparation du plus grand nombre de dommage possible. Les installations d'évacuation des déchets radioactifs, de même que les installations en cours de déclassement, ont ainsi été insérées dans la définition d' « installation nucléaire ».

Enfin, d'autres mesures visent à contribuer à renforcer la protection des victimes et à prendre en compte la dimension internationale des accidents nucléaires.

Dans le régime actuel, la réparation d'un dommage n'est possible que si l'accident nucléaire est survenu sur le territoire d'une partie contractante et si le dommage y est subi. Le nouveau protocole permettra, en revanche, d'indemniser les dommages subis par des États non parties aux conventions. La condition - peu restrictive - est que ces derniers n'aient pas d'installation nucléaire sur leur territoire ou dans leur zone maritime. Les États côtiers placés sur les routes maritimes qu'empruntent nos transports de matières radioactives bénéficieront notamment de ce nouveau dispositif.

L'approbation de ces instruments par la France donnera donc à ces États les garanties qu'ils réclament et favorisera, nous l'espérons, l'acceptation de ces transports qui participent du bon fonctionnement de notre industrie nucléaire et de celle de nos partenaires.

La seconde amélioration très notable qu'apportent ces instruments réside dans la modification des modalités financières de la réparation et dans l'augmentation des trois tranches de réparation qui sont alimentées par l'exploitant, par l'État de l'installation, et par un fonds international constitué par les parties contractantes.

La première tranche sera portée à 700 millions d'euros, contre 18 millions d'euros actuellement ; la deuxième sera comprise entre 700 millions d'euros et 1,2 milliard d'euros ; enfin, la troisième portera la réparation totale à 1,5 milliard d'euros, contre 152 millions d'euros dans le cadre actuel.

Pour toutes ces raisons, les deux protocoles aux conventions sur la responsabilité civile nucléaire renforceront de manière significative le régime international en la matière. Il importe que nous fassions le nécessaire pour permettre une entrée en vigueur aussi rapide que possible de ces dispositions, alors qu'un nombre accru d'États reconnaissent la contribution que peut apporter l'énergie nucléaire pour satisfaire les besoins énergétiques et les exigences du développement durable.

Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appellent les protocoles à la convention de Paris du 29 juillet 1960 sur la responsabilité civile nucléaire et à la convention complémentaire du 31 janvier 1963, qui font l'objet du projet de loi aujourd'hui soumis à votre approbation. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Roger Romani, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, la commission des affaires étrangères a, le 3 mai dernier, examiné ce projet de loi visant à autoriser l'adhésion de la France à deux accords multilatéraux sur la responsabilité civile dans le domaine nucléaire au moment même où - vingt ans après - l'attention se portait de nouveau sur les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl, survenue le 26 avril 1986.

La gravité exceptionnelle de cet accident, sans équivalent dans l'histoire de l'énergie nucléaire, soulève aujourd'hui encore de multiples questions.

Certaines sont en lien direct avec notre débat d'aujourd'hui dans la mesure, notamment, où il apparaît clairement que les conséquences d'un accident nucléaire peuvent dépasser largement les frontières d'un État.

L'amélioration des règles internationales constitue donc une nécessité, tant dans le domaine de la prévention - au travers des normes de sûreté - que, le cas échéant, dans le domaine de la réparation des dommages.

Les années qui ont suivi l'accident de Tchernobyl ont été marquées par un renforcement des conventions internationales relatives à l'énergie nucléaire, tels les deux protocoles signés à Paris le 12 février 2004 dans le cadre de l'Agence de l'énergie nucléaire de l'OCDE.

Je ne reviendrai pas sur les différentes améliorations apportées par ces protocoles au régime de responsabilité civile de la Convention de Paris, à laquelle adhèrent la France et les autres pays d'Europe occidentale, car je les ai détaillées dans mon rapport écrit et Mme la ministre déléguée vient de les rappeler.

Ces améliorations portent sur une extension notable des risques couverts, grâce à une définition plus large du dommage nucléaire, à la possibilité d'indemniser des pays par lesquels transitent des matières nucléaires et à l'allongement à trente ans du délai de prescription en cas de décès ou de dommage aux personnes.

Ces améliorations résultent également, et surtout, du relèvement du montant des indemnisations pour chacun des trois niveaux de réparation : l'exploitant, l'État de l'installation et le Fonds international d'indemnisation.

Le montant total des indemnisations sera ainsi pratiquement multiplié par dix et atteindra 1,5 milliard d'euros.

La commission des affaires étrangères a pleinement approuvé ces deux protocoles qui renforcent notablement la couverture du risque nucléaire, même si ce régime de responsabilité civile demeurerait insuffisant - hélas ! - dans le cas où une catastrophe exceptionnelle, comparable à celle de Tchernobyl, venait à se produire.

Il faut également souligner que, avant même l'achèvement de la procédure de ratification, la France - nous devons en être fiers - a mis sa législation en accord avec les protocoles.

En effet, le Sénat, sur l'initiative de sa commission des affaires économiques, a adopté, lors de l'examen du projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire un amendement allant dans ce sens et qui est devenu l'article 55 de la loi du 13 juin 2006.

Cette loi, tout comme celle sur la gestion durable des déchets radioactifs, également définitivement adoptée par le Parlement au cours de cette session, démontre que notre pays continue de perfectionner le cadre législatif, réglementaire et administratif déjà très étoffé qui régit les activités nucléaires.

L'amélioration des législations nationales et le renforcement de l'encadrement international des activités nucléaires paraissent aujourd'hui indispensables.

On constate en effet de par le monde un regain d'intérêt pour l'énergie nucléaire - en particulier en Allemagne, en Italie, en Espagne et au Royaume-Uni, comme nous l'avons constaté lors de la réunion entre le Premier ministre britannique et le Président de la République.

Ce phénomène très intéressant et positif contribuera, compte tenu du renchérissement des énergies fossiles, à réaliser des économies et à lutter contre le réchauffement climatique.

Pour conclure, je veux une nouvelle fois insister sur l'ampleur des efforts accomplis par notre pays pour renforcer la sûreté et la sécurité des installations nucléaires.

Je tiens à rendre un hommage particulier à EDF et à ses personnels, qui ont développé les procédures de contrôle interne de façon extrêmement approfondie, compétente et sérieuse.

M. Charles Pasqua. Très bien !

M. Roger Romani, rapporteur. Mes chers collègues, pour l'ensemble des raisons que je viens de développer, la commission des affaires étrangères vous demande d'adopter ce projet de loi autorisant l'approbation des deux protocoles du 12 février 2004 modifiant les conventions de l'OCDE sur la responsabilité civile nucléaire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation d'accords internationaux sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire
Article 2 (début)

Article 1er

Est autorisée l'approbation du protocole portant modification de la convention du 29 juillet 1960 sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire, fait à Paris le 12 février 2004, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation d'accords internationaux sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire
Article 2 (fin)

Article 2

Est autorisée l'approbation du protocole portant modification de la convention du 31 janvier 1963 complémentaire à la convention de Paris du 29 juillet 1960 sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire, fait à Paris le 12 février 2004, et dont le texte est annexé à la présente loi. - (Adopté.)

M. le président. Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

Article 2 (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation d'accords internationaux sur la responsabilité civile dans le domaine de l'énergie nucléaire