PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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MISE AU POINT AU SUJET D'UN VOTE

M. le président. La parole est à M. Jean-Patrick Courtois.

M. Jean-Patrick Courtois. Monsieur le président, lors du scrutin n° 217 sur l'ensemble du projet de loi portant engagement national pour le logement, mes collègues Henri de Raincourt et Alain Vasselle ont été comptabilisés comme ayant voté pour, alors qu'ils souhaitaient s'abstenir.

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, monsieur Courtois.

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DÉPÔT D'UN RAPPORT DU GOUVERNEMENT

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport d'activité 2001-2004 du Conseil supérieur de la mutualité, en application de l'article L. 411-1 du code de la mutualité.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il sera transmis à la commission des affaires sociales et à la commission des finances.

8

DÉmission de membres de commissions et candidatures

M. le président. J'ai reçu avis de la démission de Mme Annie Jarraud-Mordrelle, comme membre de la commission des affaires culturelles, et de celle de M. Jacques Siffre, comme membre de la commission des affaires sociales.

Le groupe intéressé a fait connaître à la présidence le nom des candidats proposés en remplacement.

Ces candidatures vont être affichées et leur nomination aura lieu conformément à l'article 8 du règlement.

Mes chers collègues, l'Assemblée nationale examinant à partir de 16 heures 15 le texte dont nous devions en cet instant commencer à débattre, il y a lieu de suspendre la séance, qui sera reprise dès que ce texte nous sera parvenu.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à dix-sept heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

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NOMINATION DE MEMBRES De COMMISSIONs

M. le président. Je rappelle au Sénat que le groupe socialiste a présenté une candidature pour la commission des affaires culturelles et une candidature pour la commission des affaires sociales.

Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.

La présidence n'a reçu aucune opposition.

En conséquence, je déclare ces candidatures ratifiées et je proclame :

- M. Jacques Siffre membre de la commission des affaires culturelles, en remplacement de Mme Annie Jarraud-Mordrelle, démissionnaire.

- Mme Annie Jarraud-Mordrelle membre de la commission des affaires sociales, en remplacement de M. Jacques Siffre, démissionnaire.

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CANDIDATURE À UN organisme extraparlementaire

M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre lui a demandé de bien vouloir procéder à la désignation du sénateur appelé à siéger au sein du Conseil national de l'habitat.

La commission des affaires économiques a fait connaître qu'elle propose la candidature de M. Thierry Repentin pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.

Cette candidature a été affichée et sera ratifiée conformément à l'article 9 du règlement s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

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Dossier législatif : projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration
Discussion générale (suite)

Immigration et intégration

Adoption définitive des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration
Article 1er A

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration (n° 413).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte présenté par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration résulte largement d'une communauté de vues entre le Sénat et l'Assemblée nationale.

Le projet de loi présenté en conseil des ministres comportait 84 articles. Après son examen en première lecture par l'Assemblée nationale, il en comptait 116. Le Sénat, qui a adopté 117 amendements, a porté ce nombre à 128. Il a notamment inséré douze articles additionnels.

Sur les 116 articles issus des travaux de l'Assemblée nationale, 66 ont été adoptés par la Haute Assemblée dans les mêmes termes.

La commission mixte paritaire était appelée à examiner les 62 articles qui restaient en discussion. La majorité d'entre eux n'ont fait l'objet d'aucune modification, ou n'ont subi que de simples modifications pour coordination.

M. Thierry Mariani, rapporteur pour l'Assemblée nationale, et moi-même avons souligné la vision commune des deux assemblées sur ce texte. Celui-ci porte néanmoins, incontestablement, l'empreinte de notre assemblée. Je rappelle que son examen par le Sénat en première lecture a duré cinquante heures.

Parmi les apports les plus substantiels du Sénat, j'évoquerai tout d'abord le souci affirmé de renforcer un certain nombre de droits des étrangers.

Je citerai, à cet égard, l'extension du bénéfice de l'aide juridictionnelle pour les demandeurs d'asile à l'occasion du recours devant la Commission des recours des réfugiés, l'inscription dans la loi du délai d'un mois pour déposer un recours devant cette même commission, l'intervention des administrateurs ad hoc auprès des mineurs étrangers isolés dès la décision de refus d'entrée sur le territoire national, le maintien de la possibilité, pour les déboutés du droit d'asile, de contester la décision fixant le pays de renvoi, le renouvellement de la carte « salarié » lorsque l'étranger a été involontairement privé d'emploi, la faculté, pour les étrangers en situation irrégulière mariés avec un ressortissant français entrés régulièrement en France, de déposer leur demande de visa de long séjour auprès de la préfecture.

En matière de regroupement familial, la commission mixte paritaire a confirmé le texte du Sénat, notamment la suppression de la modulation, en fonction de la taille de la famille, du montant de ressources exigé pour pouvoir faire venir sa famille.

Le Sénat a également, je le crois, amélioré et simplifié ce texte.

Il a, en particulier, supprimé la création du conseil national de l'immigration et de l'intégration, afin, notamment, de permettre une réflexion plus approfondie sur son articulation avec les organismes existants.

Concernant les étudiants étrangers, notre assemblée a décidé de leur accorder automatiquement le droit d'exercer une activité salariée, abandonnant de la sorte le système en vigueur d'autorisation préalable.

Concernant la nouvelle procédure d'admission exceptionnelle au séjour, le Sénat a tenu à préciser que la commission émettra un simple avis sur les critères de régularisation, afin d'éviter de l'ériger en quasi-autorité administrative indépendante.

Notre assemblée a également souhaité confier aux commissions du titre de séjour, dans chaque département, la mission de rendre un avis sur les demandes de régularisation émanant d'étrangers justifiant de dix années de résidence habituelle en France.

Par ailleurs, toujours avec le souci d'améliorer ce texte, le Sénat a étendu le champ de la carte « salarié en mission » créée à l'article 10 du projet de loi, et facilité la venue des conjoints et enfants des titulaires de cette carte. La compétitivité de nos entreprises et l'attractivité de notre territoire devraient être ainsi consolidées.

Enfin, tout au long de ses travaux, la Haute Assemblée s'est attachée à donner davantage d'épaisseur à l'idée de codéveloppement, démarche qui, à long terme, représente la seule solution durable pour résoudre la question de l'immigration clandestine. Cette préoccupation s'inscrit complètement dans l'esprit des travaux de la commission d'enquête du Sénat sur l'immigration clandestine. En particulier, le Sénat a créé le compte épargne codéveloppement, qui devrait constituer un puissant levier financier en faveur du codéveloppement.

Notre assemblée a également tenu à mieux réglementer la délivrance de la carte « compétences et talents », de telle sorte que la mise en place de ce dispositif ne se traduise pas par ce que certains ont appelé un « pillage des cerveaux » des pays les plus pauvres.

Comme je l'ai dit au début de mon propos, la quasi-totalité des apports du Sénat ont été confirmés par la commission mixte paritaire. Quatre modifications de fond ont néanmoins été apportées par cette dernière.

À l'article 7, relatif à l'entrée et au séjour en France des étudiants, la commission mixte paritaire a décidé que les étudiants étrangers seraient autorisés à travailler dans la limite de 60 % de la durée de travail annuelle normale.

En première lecture, l'Assemblée nationale avait fixé pour limite un mi-temps annualisé. Le Sénat avait en revanche retenu la limite d'un temps partiel annualisé, afin notamment de permettre aux étudiants de travailler à temps plein pendant les vacances universitaires. Dans un souci de compromis, la commission mixte paritaire a donc décidé d'autoriser les étudiants étrangers à travailler dans la limite de 60 % de la durée de travail annuelle normale.

À l'article 12, relatif à la création de la carte de séjour « compétences et talents », la commission mixte paritaire a approuvé, sur la proposition du rapporteur pour l'Assemblée nationale, la possibilité de délivrer une telle carte à un étranger ressortissant d'un pays appartenant à la zone de solidarité prioritaire si cet étranger s'engage à retourner dans son pays à l'issue de six années de séjour en France.

Afin de favoriser le codéveloppement et de poser la première pierre d'une gestion mutuelle des flux migratoires, le Sénat avait souhaité subordonner la délivrance de la carte « compétences et talents » à des étrangers ressortissants des pays de la zone de solidarité prioritaire à la conclusion préalable d'un accord de partenariat pour le codéveloppement entre la France et ces pays.

Toutefois, le rapporteur pour l'Assemblée nationale a craint que l'institution de cette condition n'aboutisse à rendre inopérant le dispositif de la carte « compétences et talents », la négociation de tels accords de codéveloppement pouvant prendre de nombreuses années, voire ne jamais aboutir. La commission mixte paritaire a donc décidé de laisser la possibilité, en l'absence d'accord, de délivrer cette carte si l'étranger concerné s'engage à retourner dans son pays au bout de six ans. Je précise que si un accord prévoyant les conditions dans lesquelles la carte « compétences et talents » sera délivrée est conclu, cet accord prévaudra évidemment. Il ne saurait être contourné par le biais du simple engagement de l'étranger à retourner dans son pays.

S'agissant des articles 33 B et 33 C, visant à favoriser le recours à la visioconférence lors des audiences en vue de la prolongation du maintien en zone d'attente ou en rétention administrative, la commission mixte paritaire a préféré les supprimer en raison d'un risque d'inconstitutionnalité.

Enfin, à l'article 82 bis, relatif à l'entrée en vigueur de la réforme de l'obligation de quitter le territoire français, la commission mixte paritaire a souhaité laisser un peu plus de temps au Gouvernement pour prendre les décrets d'application nécessaires.

Tout ayant été dit au cours d'une sérieuse première lecture, je voudrais enfin, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, exprimer mes remerciements à l'ensemble des intervenants qui, sur toutes les travées, ont apporté leur contribution au débat, même si leurs propos ont parfois pu être quelque peu sévères. Je voudrais remercier tout particulièrement le groupe de l'UMP du soutien qu'il a apporté au président et au rapporteur de la commission des lois.

En conclusion, mes chers collègues, je vous demande d'adopter les conclusions de la commission mixte paritaire, dont je viens d'essayer de vous rendre compte fidèlement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Mme Anne-Marie Payet applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le ministre d'État Nicolas Sarkozy achève en ce moment même une visite en Guyane consacrée à la lutte contre l'immigration irrégulière. Il rencontrera ensuite à Madrid le chef du Gouvernement espagnol. Il n'a donc pu rejoindre Paris et m'a demandé de le représenter devant vous cet après-midi.

Le Parlement s'apprête à adopter le projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration, au terme d'une centaine d'heures d'un débat démocratique exemplaire, dépourvu de toute manoeuvre d'obstruction. Je tiens à souligner ce dernier point et à remercier les membres du groupe socialiste et du groupe communiste républicain et citoyen de leur attitude. Un tel débat fait honneur à la démocratie française et constitue une belle réponse aux sceptiques qui recommandaient au Gouvernement de ne pas prendre de risques. Mais le plus grand risque serait de chercher à ne pas en prendre, en fuyant les responsabilités qui sous-tendent l'action gouvernementale.

Après trente années de renoncement et d'aveuglement devant l'enjeu crucial de l'immigration, après trente années d'incertitudes et de non-choix, le moment était venu de réagir. Le Parlement a su choisir la voie du changement profond, celle de la rupture, parce qu'il n'y a pas d'autre solution au regard de l'intérêt national.

Non, il n'y a pas d'autre solution que celle, équilibrée et responsable, qui reconnaît que l'immigration est une chance pour la France à condition d'être régulée, de correspondre aux capacités d'accueil de notre pays et de s'inscrire dans un véritable projet d'intégration et dans un dialogue constructif avec les pays d'origine.

Il n'y a pas d'autre solution que celle qui consiste à refuser les extrêmes.

À cet égard, l'« immigration zéro » est un mythe dangereux, qui attise la xénophobie et les peurs ; nous n'en voulons pas.

Avec la même force, nous rejetons l'extrémisme des partisans de l'immigration sans limite et sans conditions. Nous rejetons l'idée absurde que les immigrés n'auraient que des droits et jamais de devoirs. Nous n'avons pas à nous excuser de répondre aux attentes des Français de métropole et d'outre-mer. En définissant une vraie politique d'immigration et d'intégration, nous renforçons, en quelque sorte, le pacte républicain.

En vous présentant ce texte, Nicolas Sarkozy avait précisé qu'il ne s'estimait pas propriétaire de chacun de ses articles. Par conséquent, le Gouvernement s'est montré très ouvert aux améliorations proposées par les parlementaires. Le nombre et la diversité des amendements étudiés dans chacune des assemblées en témoignent.

Ainsi, à l'Assemblée nationale, 577 amendements ont été examinés, et 189 ont été adoptés. Le Sénat, quant à lui, a procédé à son tour à un remarquable travail de proposition et d'amélioration du texte.

Le Sénat, à son tour, a procédé à un remarquable travail de proposition et d'amélioration du texte. Sur les 485 amendements examinés, 117 ont été adoptés, dont 73 à l'initiative de la commission des lois, 30 du groupe UMP, 8 du groupe RDSE, 5 du groupe Union centriste-UDF, mais aussi 6 du groupe socialiste et 5 du groupe communiste républicain et citoyen. Certains de ces amendements ont d'ailleurs été cosignés par des sénateurs appartenant à des groupes différents.

En soulignant le nombre et la variété des amendements adoptés, je ne prétends certes pas que ce texte aurait fait l'objet d'un consensus sur tous les bancs ! Mais je crois pouvoir affirmer que nous avons débattu de manière franche et directe, en prenant le temps d'une discussion approfondie et en respectant les arguments des uns et des autres.

L'excellent travail des rapporteurs des deux assemblées, le député Thierry Mariani et le sénateur François-Noël Buffet, a grandement facilité la tenue de nos débats.

Au total, la loi que le Parlement s'apprête à voter permet d'atteindre pleinement les objectifs que le Gouvernement s'était fixés en présentant le projet.

Première amélioration : des malentendus ont pu être dissipés, pour confirmer toute l'attention que nous portons au respect des droits des étrangers.

Le Parlement a eu raison de protéger contre les retraits de titres de séjour les étrangers en situation de faiblesse : les femmes victimes de violences conjugales ou ayant un enfant à charge, comme les travailleurs dont le contrat de travail est rompu par leur employeur.

Il est sage, de même, d'avoir renforcé les garanties offertes aux étrangers faisant valoir leurs droits devant les juridictions.

Je suis convaincu, en outre, que les débats parlementaires ont permis de trouver un bon équilibre sur la délicate question des visas de long séjour pour les conjoints de Français, par des amendements votés dans le consensus, avec l'avis favorable du Gouvernement.

Le débat parlementaire a également permis de renforcer les mesures relatives à l'intégration : c'est la deuxième amélioration que je souhaite souligner.

Pour la première fois, une loi définit, de manière cohérente et progressive, un vrai parcours d'intégration, de l'arrivée en France jusqu'à l'installation durable.

Les cérémonies d'accueil dans la citoyenneté, pour toutes les personnes qui acquièrent la nationalité française, constituent un progrès symbolique important en faveur de l'intégration, jusqu'à l'assimilation à la communauté nationale.

Le débat parlementaire a permis, surtout, d'inscrire la politique d'immigration dans le cadre d'une véritable stratégie de codéveloppement. Car la réforme de l'immigration doit passer par un renouveau de nos liens avec les pays en voie de développement et, tout particulièrement, avec l'Afrique.

Le ministre d'État en est pleinement convaincu. Il n'a eu de cesse, dans ces dernières semaines, de s'adresser aux Africains pour préciser, à leur endroit, les objectifs de la réforme. Il a rencontré plusieurs hauts responsables africains, en particulier M. Abdou Diouf, secrétaire général de la francophonie, et M. Abdoulaye Wade, président du Sénégal. Il a reçu, Place Beauvau, les ambassadeurs de quinze pays francophones. Les échanges ont été francs et constructifs.

C'est dans cet esprit que, après les débats de l'Assemblée nationale et avant ceux du Sénat, Nicolas Sarkozy s'est rendu au Mali puis au Bénin.

Il a écouté nos partenaires africains, convaincu qu'ils attendent de nous un discours franc et responsable sur l'immigration.

Ce discours, le ministre d'État n'a pas hésité à le tenir, en ami de l'Afrique. Il a dit à ses interlocuteurs que le destin de la France et celui de l'Afrique étaient indissociables. Il leur a rappelé que la définition des fondements de la politique française de l'immigration incombait au seul Parlement français. Mais il leur a dit, aussi, que la mise en oeuvre de cette politique devait impérativement donner lieu à une concertation étroite entre le pays d'origine et le pays de destination, dans l'intérêt partagé des deux partenaires.

La nouvelle loi concrétise cet engagement en définissant des outils juridiques très novateurs.

Car le Parlement a fait la différence entre le pillage des cerveaux, que chacun refuse, et la circulation des compétences, que nous cherchons à organiser dans l'intérêt mutuel de la France et des pays d'émigration.

C'est tout l'enjeu de la définition de la carte « compétences et talents », qui a donné lieu à des débats passionnants. Abordés à l'Assemblée nationale grâce, en particulier, aux interventions de Mme Christine Boutin et de M. Claude Goasguen, ces débats se sont poursuivis au Sénat sous l'impulsion du président Pelletier, du président Mercier et de M. Hugues Portelli.

La commission mixte paritaire est parvenue à un excellent équilibre : un étranger ayant la nationalité d'un pays de la zone de solidarité prioritaire, c'est-à-dire d'un pays en voie de développement, ne pourra obtenir la carte « compétences et talents » que dans les conditions définies par un accord bilatéral entre la France et son pays. Dans l'attente d'un accord, la carte ne pourra être délivrée que si l'étranger s'engage formellement à retourner dans son pays d'origine après six ans, au plus, de présence en France.

Je me réjouis, de plus, que le Sénat ait proposé la création du « compte épargne codéveloppement ». Je remercie les présidents Jacques Pelletier, Michel Mercier et Josselin de Rohan d'avoir associé leurs groupes à cet amendement essentiel pour aider les travailleurs étrangers présents en France à orienter leur épargne vers des projets utiles au développement économique de leurs pays d'origine. Le mécanisme d'incitation fiscale, qui coûtera chaque année 125 millions d'euros à l'État, aura un effet de levier sur l'investissement. C'est une véritable révolution, suggérée par le Sénat et confirmée par la commission mixte paritaire, en plein accord avec le Gouvernement.

Je voudrais, pour conclure, répondre en quelques mots à une question d'actualité immédiate, souvent très mal posée : celle de la présence, dans notre pays, d'étrangers sans papiers ayant des enfants scolarisés.

La gauche pétitionnaire feint, depuis quelques jours, de découvrir cette réalité qui, pourtant, n'est pas nouvelle. Oui, des étrangers sans papiers séjournent en France et ont des enfants scolarisés.

Je vous le dis sans polémique, cette situation est directement le produit du laxisme des années 1997 à 2002.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Je rappelle que la gauche a régularisé 80 000 sans-papiers en 1997, ce qui a indéniablement créé un appel d'air ; elle a fait quadrupler les demandes d'asile en cinq ans : de 20 000 en 1997 à 82 000 en 2002 !

On lit ces jours-ci, dans la presse, des déclarations définitives, des proclamations de principe. On voit, sur les écrans de télévision, des élus de la République prendre la pose et donner la leçon.

Mme Buffet, M. Hollande, M. Lang, Mme Aubry, Mme Voynet, ont apposé hier leur signature sous une pétition qui ose affirmer : « les vacances scolaires deviennent le temps où s'ouvre la chasse à l'enfant ». Ainsi, des anciens ministres de M. Jospin et des responsables éminents de partis politiques dits de gouvernement appellent les Français à « violer la loi » !

C'est doublement extravagant.

De quelle loi parlent nos pétitionnaires ?

Ils ne parlent pas du projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration, puisque celui-ci ne contient strictement aucun article régissant directement la question des enfants scolarisés !

Ils parlent donc, en réalité, de la loi applicable, en lui reprochant de ne pas comporter un droit automatique à la régularisation pour les parents étrangers d'enfants scolarisés.

Cependant même la gauche n'a jamais fait voter, dans la loi Chevènement de 1998, un tel droit à la régularisation automatique pour les familles ayant des enfants scolarisés ! Pardon de le rappeler !

M. Lang, Mme Aubry, M. Hollande auraient-ils la mémoire si courte qu'ils oublieraient cette réalité juridique et politique ?

La gauche, au pouvoir, n'a jamais mis en oeuvre l'idée qu'elle défend aujourd'hui, celle de la régularisation automatique de toutes les familles d'étrangers ayant des enfants scolarisés ! Il faut que les Français le sachent !

Loin des polémiques, des postures et des impostures, le Gouvernement agit, lui, dans un esprit de responsabilité et d'humanité.

Oui, il serait totalement irresponsable d'être le seul pays au monde où la scolarisation d'un enfant donnerait automatiquement un droit au séjour à ses parents.

La République s'honore en scolarisant tous les enfants, quel que soit le statut de leurs parents. Ce n'est pas le cas de toutes les démocraties du monde !

Mais le droit à la scolarisation ne peut pas entraîner automatiquement un droit à la régularisation, sauf à vouloir créer une nouvelle filière d'immigration en renonçant à toute maîtrise des flux migratoires !

Ce n'est pas le choix du Gouvernement.

Il serait irresponsable, de même, d'être le seul pays européen à ne pas appliquer la convention de Dublin, en vigueur depuis 1992 et mise en oeuvre depuis lors, par tous les gouvernements. Oui, par tous les gouvernements, y compris entre 1997 et 2002 ! Lorsqu'un étranger a déposé une demande d'asile dans un autre État européen avant de venir de France, il est parfaitement normal de le reconduire vers ce pays européen. Nous n'avons pas l'intention de violer nos engagements européens ! Nous avons simplement l'intention de les respecter !

Mais le Gouvernement n'oublie pas, pour autant, le devoir d'humanité, qui est celui de tout Républicain.

Le ministre d'État l'a affirmé avec force lors des débats au Sénat : lorsqu'un enfant étranger est né en France ou qu'il y est arrivé en très bas âge, qu'il est scolarisé en France, qu'il n'a pas de lien avec son pays d'origine, il serait très cruel de l'y reconduire de force ! Car ce pays d'origine, en réalité, n'est pas le sien. Les attaches de cet enfant sont en France et son départ serait vécu comme une véritable expatriation, un déracinement.

C'est précisément pour éviter cela que le ministre d'État a adressé des instructions aux préfets, le 13 juin, que j'avais annoncées ici même, en son nom, lors de nos débats dans la nuit du 12 au 13 juin.

Alors, que l'on ne vienne pas nous dire que, demain, ler juillet, « la chasse aux enfants » va être ouverte et que des expulsions massives d'enfants vers leurs pays d'origine vont avoir lieu ! C'est un mensonge ! C'est une manipulation, qui vise à faire peur aux étrangers et à créer le désordre ! Cette manipulation, je souhaite la dénoncer avec vigueur, car elle est indigne.

Les instructions données par le ministre d'État aux préfets, dans sa circulaire du 13 juin, sont très claires : à l'exception des personnes auxquelles s'applique la convention de Dublin, les étrangers parents d'enfants scolarisés peuvent, d'une part, se voir proposer une aide au retour volontaire dans leur pays d'origine et, d'autre part, présenter une demande d'admission exceptionnelle au séjour.

Les demandes de régularisation doivent être présentées dans les deux mois qui viennent. Elles seront examinées par les préfets, d'ici à la rentrée de septembre, dans le cadre de leur pouvoir d'appréciation, en tenant compte des critères qui ont été précisés dans la circulaire. Ce sont des critères de bon sens, qui doivent être appliqués avec discernement.

Le Gouvernement fait pleinement confiance aux préfets et aux agents des préfectures pour appliquer les instructions en dialoguant avec leurs interlocuteurs locaux. Néanmoins, dans certains départements, des situations très délicates pourraient être résolues par la médiation d'une personnalité extérieure à l'administration.

C'est dans cet esprit qu'une mission de médiation a été confiée à Me Arno Klarsfeld par le ministre d'État. Nous prenons donc le temps, au cours de l'été, de réexaminer sereinement des situations individuelles.

Que se passera-t-il en septembre prochain, à la rentrée scolaire ? Nous appliquerons la nouvelle loi sur l'immigration et l'intégration.

Elle ne supprime pas toute possibilité de régularisation !

Elle prévoit expressément, à son article 24 bis, que des titres de séjour peuvent être délivrés pour des motifs humanitaires par les préfets. La commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour, qui associera des représentants de l'administration et des associations, jouera un rôle essentiel à cet égard.

Je rappelle néanmoins que les régularisations doivent rester l'exception. La règle, pour un immigré, c'est de demander, dans son pays d'origine, un visa pour obtenir le droit de venir s'installer en France !

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, fort du soutien de sa majorité, fort du soutien des Français, le Gouvernement agit de manière responsable et mesurée.

La gauche pétitionnaire et donneuse de leçons, elle, préfère s'agiter et renouer avec ses vieux démons. Elle prône l'immigration sans limite ! C'est son choix. Ce n'est pas le nôtre.

Le moment venu, en 2007, les Français en seront les seuls juges. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Mme Anne-Marie Payet applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec les conclusions de cette commission mixte paritaire, nous voici donc au terme des débats parlementaires sur le projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration.

Ces conclusions sont examinées à quelques jours de la fin de l'année scolaire. Comment ne pas évoquer ici effectivement la situation de ces enfants, de ces jeunes majeurs et de leurs familles qui vivent dans l'angoisse d'être expulsés du territoire ?

Rassurez-vous, je ne vais pas ici refaire les interventions de mes amis Patrick Braouezec, à l'Assemblée nationale, et Nicole Borvo Cohen-Seat, ici même, à l'occasion des questions d'actualité au Gouvernement, d'autant qu'à l'évidence une épidémie d'incompréhension gagne alors les bancs des ministres.

À l'écoute des propos - car ce ne sont pas des réponses - de Nicolas Sarkozy à l'Assemblée nationale et de Brice Hortefeux au Sénat, j'ai tout de même le sentiment que le Gouvernement a trouvé son hochet : la circulaire du 13 juin et la nomination d'un médiateur, qui, visiblement, n'a pas encore compris combien la tâche allait être rude...

Circulaire et médiateur sont donc utilisés à l'envi pour laisser croire que le Gouvernement fait preuve d'une grande générosité et, surtout, pour tenter de faire oublier les autres dispositions de cette loi profondément inhumaine et dangereuse. Cerise sur le gâteau, il renvoie la situation d'aujourd'hui à des querelles politiciennes entre ceux qui gouvernaient hier et ceux qui gouvernent aujourd'hui.

Vous avouerez que ces débats doivent profondément intéresser les personnes menacées d'expulsion du territoire, comme ils doivent passionner les milliers de personnes qui les soutiennent, ceux que certains osent qualifier de « pétitionnaires hystériques », propos méprisants s'il en est, comme s'il s'agissait exclusivement de femmes.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Sûrement pas !

Mme Éliane Assassi. Si ! Ces propos ont été tenus tout à l'heure à l'Assemblée nationale, monsieur le ministre, et je ne crois pas que les hommes soient concernés par l'hystérie !

Je réaffirme ce que j'ai dit, ici, le 13 juin dernier : « Plutôt que de regarder loin devant, vous avez les yeux rivés sur le rétroviseur et vous déformez le réel en confondant volontairement la situation d'aujourd'hui et les conséquences du passé ».

Cela dit, je crois que vous pouvez être fiers de vous : c'est l'émeute devant certaines préfectures, les gens crient, les enfants pleurent, tout le monde a peur. Bravo ! J'ai connu mieux comme acte humanitaire.

Ainsi, dans les préfectures, alors que la loi n'est pas encore adoptée, des formulaires d'aide au retour sont d'ores et déjà distribués aux familles venant régulariser leur séjour.

De même, des familles et leurs enfants, des jeunes majeurs, comme la jeune fille dont je suis la marraine depuis le 1er juin, ont reçu leur arrêté d'expulsion applicable dès le 30 juin, c'est-à-dire aujourd'hui !

Cette précipitation ne nous étonne guère, car elle traduit l'avidité du ministre de l'intérieur en matière de performances chiffrées.

La France ne s'honore pas en agissant de la sorte avec ces familles et ces enfants, et rien ne justifie de les traiter comme le fait le Gouvernement, pour qui le rejet à l'encontre des immigrés est de plus en plus flagrant.

Et, je vous en prie, n'utilisez pas le fameux argument de « l'appel d'air », qui peut laisser à penser que la scolarité de ces enfants serait, elle aussi, de complaisance, comme vous le diagnostiquez à propos des mariages et des paternités. Mais, à lui seul, l'exemple de nos voisins en termes de régularisation des sans-papiers rend caduc cet argument.

La France est un pays d'immigration ancienne, qui, en raison notamment de sa situation géographique, s'est construit grâce à des flux constants de populations étrangères s'installant plus ou moins durablement sur son territoire.

La population étrangère est donc très hétérogène par l'ancienneté des vagues d'arrivée, la variété des motifs d'entrée et la diversité des pays d'origine.

Et, que vous le vouliez ou non, la proportion d'immigrés est stable depuis trente ans - ce n'est pas moi qui le dit, c'est tout simplement l'INSEE. Malgré cette réalité, le Gouvernement s'obstine toujours plus en matière de contrôle de l'immigration et laisse planer l'idée selon laquelle les Français seraient menacés par l'invasion prochaine d'une horde d'immigrés.

Le présent projet de loi prévoit donc de durcir, dans pratiquement tous les domaines, les conditions d'entrée et de séjour en France des étrangers, et les conclusions de la commission mixe paritaire viennent, sans grande surprise, confirmer ce choix politique.

Cette nouvelle rédaction ne nous satisfait guère, vous l'aurez certainement compris. L'insatisfaction est, de manière générale, le sentiment que nous ressentons à la lecture de ce texte. Toutes les dispositions qu'il contient visent à comprimer un peu plus les droits des étrangers, sous prétexte de devoir les sélectionner.

Les termes utilisés avant et durant les débats ne sont d'ailleurs pas anodins : je pense à ces concepts détestables d'  « immigration subie » et d' « immigration choisie », véritables leitmotive du Gouvernement.

La carte « compétences et talents » est un exemple d'application concrète de la notion d'immigration « choisie ». Destinée aux seuls étrangers réputés compétents et talentueux, elle conduira nécessairement - eu égard aux critères vagues applicables pour sa délivrance - à une sélection arbitraire des étrangers qui en seront bénéficiaires.

Les restrictions apportées à l'immigration familiale ne sont pas plus acceptables. Que ce soit pour la délivrance de la carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale », de la carte de résident ou pour le regroupement familial, c'est bien le droit de mener une vie familiale normale qui est remis en cause par ce texte.

La commission mixte paritaire n'a donc rien arrangé sur ces points.

La délivrance de la carte de séjour « vie privée et familiale », comme pour tous les autres titres temporaires, sera désormais soumise à la production d'un visa de long séjour.

Cela rendra les choses bien compliquées pour les conjoints des Français, qui seront obligés de retourner dans leur pays origine pour se voir délivrer un tel visa.

La délivrance de plein droit de cette carte aux étrangers justifiant d'une résidence habituelle en France depuis plus de dix ans, permettant ainsi leur régularisation, est purement et simplement supprimée. Le fait de vouloir abroger une telle disposition revient quasiment à nier que des étrangers qui ont pu nouer de tels liens avec la France, qui y ont fondé une famille, puissent voir leur situation régularisée.

La création de la commission d'admission exceptionnelle au séjour ne permettra pas, contrairement à tout ce qui a été dit, de faciliter l'examen des dossiers des personnes sans papiers.

Le Gouvernement nous dit vouloir en finir avec l'appréciation au cas par cas des dossiers d'admission exceptionnelle par les préfets, mais cette disposition ne fera que renforcer leur pouvoir discrétionnaire, parce que, en l'état actuel du texte, c'est le préfet qui soumet le dossier à ladite commission.

Cela signifie que l'administration, au lieu de se référer à l'actuel paragraphe 3° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, organisera en amont un filtre, en soumettant à la commission les seuls dossiers qu'elle jugera convaincants.

Les étrangers sans papiers risquent donc de se trouver dans une situation encore plus précaire qu'actuellement et de rester perpétuellement dans l'irrégularité, ce qui n'est certainement pas notre souhait.

C'est à croire que plus les liens sont forts entre l'étranger et la France, plus on veut l'en éloigner ! Et ce sont les sans-papiers, mais aussi les familles des étrangers installés en France et les conjoints de Français, qui souffriront les premiers d'une telle politique.

Je prendrai l'exemple du regroupement familial, dont le délai au terme duquel un étranger peut solliciter le bénéfice pour les membres de sa famille passe d'un an à dix-huit mois, ou encore les conditions durcies pour la délivrance de la carte de résident à un conjoint de Français.

Les attaques contre l'immigration familiale sont trop nombreuses pour ne plus douter de l'hostilité du Gouvernement à voir les étrangers s'installer en France et mener une vie familiale normale avec leur conjoint et leurs enfants. Ainsi, le regroupement familial est désormais désigné comme une menace pour l'identité et la sécurité nationale.

Les travailleurs étrangers ne sont pas plus épargnés. Même si la durée de la carte de séjour n'est plus strictement alignée sur celle du contrat de travail, la limitation professionnelle territoriale et par champs d'activité est maintenue.

Les travailleurs saisonniers se trouvent, eux aussi, confrontés à des conditions draconiennes de délivrance de leur carte de séjour temporaire, telles celles qui sont relatives à l'obligation de maintenir sa résidence habituelle hors de France.

Le statut des travailleurs étrangers est donc, dans son ensemble, précarisé.

Les demandeurs d'asile n'échappent pas non plus à cette précarisation. Nous contestons d'ailleurs le fait d'intégrer des dispositions relatives au droit d'asile dans un texte sur l'immigration, car cela entretient l'amalgame entre les immigrés et les demandeurs d'asile, alors que ce sont deux réalités complètement différentes.

La France s'éloigne donc un peu plus encore de sa tradition de terre d'asile pour les réfugiés, en continuant de porter atteinte au droit d'asile.

J'en veux pour preuve l'officialisation de la liste des pays d'origine sûrs, dont les ressortissants sont exclus de la procédure normale d'examen de leur situation.

Pourtant, la notion de « pays d'origine sûr » implique une discrimination entre réfugiés en raison de leur nationalité, alors que ce type de discrimination est interdit par la convention de Genève. Mais le Gouvernement n'en a cure, puisqu'il maintient cette liste dans notre législation.

Bref, ce texte regorge de dispositions toutes plus restrictives les unes que les autres pour les étrangers souhaitant vivre en France.

En revanche, il est bien lacunaire en matière de propositions relatives au codéveloppement. Le système choisi du « compte épargne codéveloppement », qui pourrait être proposé aux étrangers issus d'un pays en développement, est purement scandaleux. Il n'appartient pas aux étrangers de financer eux-mêmes l'aide au développement de leur pays !

Nous nous sommes d'ailleurs prononcés contre ce dispositif et nous avons proposé des solutions alternatives qui nous semblent plus justes, telles que l'annulation de la dette des pays pauvres,...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Cela a déjà été fait !

Mme Éliane Assassi. ...une aide au développement financée par la France à hauteur de 1 % de son PIB ou par l'augmentation de la taxe sur les transactions financières.

Bien évidemment, ces propositions ont été balayées et le codéveloppement reviendra aux étrangers eux-mêmes, chargés d'épargner afin de financer le développement du pays qu'ils ont quitté.

Nous ne pouvons souscrire à une telle conception de l'immigration. Il est, à nos yeux, inconcevable de traiter les étrangers de cette manière.

En guise de conclusion, je voudrais soumettre une quatrième solution à M. Sarkozy, qui n'en avait que trois, mercredi dernier, à l'Assemblée nationale. Pour ce faire, - il me le pardonnera - je reprendrai mot pour mot des propos du philosophe Étienne Balibar : « Il y a urgence à élaborer une politique des frontières et des migrations fondée sur l'égalité, la réciprocité des droits et des intérêts, négociée avec le reste de l'Europe et les pays du Sud, pour en finir avec la catégorie des "clandestins" et avec les manipulations qu'elle autorise. »

M. Christian Estrosi, ministre délégué. C'est ce que nous faisons : c'est l'esprit du texte !

Mme Éliane Assassi. Je partage ce point de vue, parce qu'il place le débat sur l'immigration à un autre niveau que celui que vous nous proposez. Il est plus juste, plus global et plus responsable que le vôtre !

Je le répète, ce texte est dangereux et il justifie que des milliers de personnes aient recours à la désobéissance civique au nom des valeurs et des principes fondamentaux de notre République.

C'est un texte qui n'honore ni la majorité de droite au Parlement, ni le Gouvernement, ni même le Président de la République.

C'est un texte provocateur et de circonstance, à l'aube d'importantes échéances électorales, dont l'un des objectifs est de récupérer un électorat plutôt sensible aux thèses de l'extrême droite. Je l'ai déjà dit : faites attention, les gens préfèrent en général l'original à la copie !

À vouloir manipuler l'opinion publique en exhibant une répression arbitraire et discriminatoire contre les étrangers, le Gouvernement alimente le racisme, notamment chez nos concitoyens qui ont des craintes justifiées face au chômage, à la montée de la délinquance et à certaines dérives communautaristes.

C'est inadmissible ! Notre opposition à ce texte est donc totale. Aussi, les élus du groupe communiste républicain et citoyens voteront contre les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Georges Othily.

M. Georges Othily. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en matière d'immigration plus que dans tout autre domaine, nous devons, en permanence, associer sévérité et justice, principe de réalité et humanisme...

C'est pourquoi notre politique d'immigration doit reposer sur deux grands principes directeurs indissociables et complémentaires : la fermeté et la générosité.

À l'issue de la procédure parlementaire, la rédaction du texte adoptée en commission mixte paritaire parvient à tenir cet équilibre si complexe.

En effet, ce texte, qui rationalise au maximum notre politique d'immigration pour la décennie à venir, doit nous permettre de relever le défi de la maîtrise des flux migratoires et de nous doter d'une politique d'intégration digne de la patrie des droits de l'homme.

Il reste désormais à convaincre nos partenaires européens de doter l'Union d'une réelle et très ambitieuse politique européenne en matière d'immigration, une politique qui soit à la hauteur des nouveaux enjeux.

Lors de l'examen de ce projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration, la Haute Assemblée a introduit davantage d'humanisme et de justice, à travers l'adoption de toute une série d'amendements en provenance des diverses travées de cet hémicycle, mais aussi de notre commission des lois grâce, notamment, à l'expertise de notre excellent rapporteur, François-Noël Buffet.

Aussi, notre satisfaction est grande, car, avec sagesse, la commission mixte paritaire a conservé la plupart de ces modifications souhaitées par le Sénat, exemple supplémentaire, s'il en faut, de l'apport et de la tempérance du bicaméralisme.

C'est ainsi que les membres de la commission mixte paritaire ont maintenu les amendements déposés par Jacques Pelletier, les membres du groupe du RDSE et les autres collègues du Sénat qui ont été sensibles à notre proposition.

L'introduction dans le texte d'un dispositif innovant en faveur du codéveloppement, avec l'instauration d'un compte épargne codéveloppement, incitera, je l'espère, les étrangers qui résident en France à diriger leur épargne vers des projets de développement dans les pays qui en ont le plus besoin.

Car, ne l'oublions pas, la question de l'immigration doit être appréhendée comme un enjeu géopolitique à l'échelle de la planète. Elle n'est jamais un véritable choix, elle est d'abord une fuite de la misère, de la guerre, de la souffrance. Dans ces conditions, l'aide au développement reste l'outil le plus efficace pour diminuer les flux de l'immigration clandestine. Pour la première fois, un texte de loi sur l'immigration prend en compte, très concrètement, cette dimension fondamentale.

Aussi, qu'il me soit permis de remercier les députés membres de la commission mixte paritaire qui ont approuvé les trois amendements que j'avais déposés concernant la Guyane, et que le Sénat avait bien voulu adopter.

À de nombreuses reprises, j'ai eu l'occasion d'évoquer devant vous, mes chers collègues, la situation bien particulière de la Guyane au regard de l'immigration clandestine, et de me faire le porte-parole du mécontentement toujours croissant de la population guyanaise, profondément excédée par les atermoiements et les hésitations des gouvernements successifs face aux conséquences dévastatrices de l'immigration irrégulière massive qui frappe notre grand territoire d'Amérique.

Parce que la Guyane se situe dans un espace géopolitique qui est celui des pays du Sud, la question de l'immigration clandestine se joue à une tout autre échelle et soulève des enjeux sans commune mesure avec ceux que l'on peut trouver en France hexagonale.

Cette situation, que l'on peut qualifier de crise, n'a d'ailleurs pas pu échapper à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, qui était en Guyane pas plus tard qu'hier.

Entre savane et Maroni, à l'ouest, entre forêt et Oyapock, à l'est, je ne doute pas que le préfet et le procureur de la République lui auront exposé à leur tour la situation et lui auront fait part de l'urgence qu'il y a à agir pour mettre un terme à tous les trafics et, partant, à l'exaspération des Guyanais.

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, ce projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration n'est peut-être pas idéal, ...

M. Bernard Frimat. C'est vrai !

M. Georges Othily. ... mais les apports du Sénat, reflet de ce qui anime toutes celles et tous ceux qui siègent dans cet hémicycle, ont conféré à ce texte le bien-fondé que les Françaises et les Français attendaient de la Haute Assemblée.

Pour toutes ces raisons, le groupe du RDSE, qui approuve les décisions prises par la commission mixte paritaire, votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Patrick Courtois.

M. Jean-Patrick Courtois. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, le premier projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration a fait la démonstration que, lorsque l'autorité publique se donnait les moyens de sa politique, les résultats suivaient très rapidement dans les faits.

Ce texte complète également la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité - j'ai eu l'honneur d'en être le rapporteur -, qui a permis de doubler en trois ans le nombre de mesures d'éloignement effectivement exécutées.

Il complète également la loi du 10 décembre 2003 relative au droit d'asile, sans oublier le projet de loi relatif au contrôle de la validité des mariages, en attente d'examen devant notre assemblée.

La loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration avait déjà prévu la répression pénale de la traite des êtres humains et rétabli l'encadrement du certificat d'hébergement supprimé en 1998, donnant ainsi aux maires la possibilité de participer à ce contrôle.

Elle avait également renforcé les mesures contre les mariages blancs, constitué en délits l'organisation et la participation à une telle union, créé un fichier d'empreintes digitales des demandeurs de visa et porté la durée maximale de rétention de douze jours à trente-deux jours.

Dans le même esprit, ce nouveau projet de loi a pour ambition de confirmer, en l'amplifiant, la politique qui est menée depuis 2002. Son titre lui-même conjugue immigration et intégration, qu'il faut entendre avec deux i majuscules.

Cet équilibre constitue le fondement de ce projet de loi que ses auteurs ont voulu en effet empreint de fermeté mais aussi de justice.

Encore faudrait-il ne pas transformer ces deux idées fortes en deux idées faibles. C'est bien tout l'enjeu de ce texte qui porte deux idées fortes : poursuivre notre lutte contre l'immigration irrégulière en colmatant les failles de notre dispositif et accentuer parallèlement le processus d'intégration des immigrés réguliers.

Fermeté, donc, contre l'immigration clandestine, et en particulier contre celle qui touche, dans des proportions inquiétantes, certaines de nos collectivités ultramarines.

Néanmoins, fermeté toute relative au vu de notre politique d'immigration, puisque nous optons pour une immigration choisie. C'est d'ailleurs l'option qui a déjà été retenue par la plupart des grandes démocraties du monde - États-Unis, Canada, Royaume-Uni ou encore Allemagne.

Ce choix relève du bon sens : un pays doit adapter sa politique d'immigration à ses capacités d'accueil.

Cependant, il s'agit également d'un texte empreint de justice : il prévoit des traitements particuliers pour des raisons humanitaires ; il affiche clairement une préférence pour une immigration du travail ; il réserve une priorité aux immigrés qui cherchent à s'intégrer en respectant les valeurs de la République ; surtout, il favorise le codéveloppement.

En cette dernière matière, le Sénat a apporté sa pierre à l'édifice.

Pour ne citer que cet exemple, notre groupe se félicite que, sur l'initiative de Jacques Pelletier, président du groupe du RDSE, et de notre collègue et ami Hugues Portelli, le concept d'immigration choisie soit désormais très clairement lié à une politique d'aide au développement, grâce à la création du compte épargne codéveloppement.

Ce dispositif extrêmement novateur procède finalement du même esprit que la taxe de un euro sur les billets d'avion.

Il s'agit de cesser de colmater les brèches avec les vieilles recettes dont nous savons tous qu'elles ne fonctionnent plus et d'inventer des démarches neuves. Peu importe que des esprits chagrins nous exposent toutes les raisons pour lesquelles ce qui est souhaitable n'est jamais réalisable.

Ce dispositif a le mérite d'exister, même s'il peut être amélioré - comme d'ailleurs tous les dispositifs fiscaux, qui sont revus presque annuellement. Rien que pour cela, nous ne pouvons que nous féliciter d'en avoir pris l'initiative !

Rappelons tout de même, ainsi que vous nous l'aviez dit, en première lecture, monsieur le ministre délégué, que les investissements attendus sont estimés à 900 millions d'euros pour les pays d'origine, avec un effort financier de l'État français de 125 millions d'euros. Ce geste est suffisamment significatif pour être souligné.

Le Sénat a en outre décidé, sur l'initiative de notre collègue Hugues Portelli, de subordonner la mise en place de la carte « compétences et talents » à des accords de partenariat pour le développement conclus préalablement avec les États d'origine des personnes concernées afin d'éviter le pillage intellectuel unilatéral.

La commission mixte paritaire a toutefois considéré que la délivrance de cette carte devait être possible même en l'absence d'accord de codéveloppement, à condition que l'étranger s'engage à retourner dans son pays à l'issue de six années de séjour en France.

Si je me permets de relever cette modification apportée à notre texte par la commission mixte paritaire, c'est pour souligner son caractère exceptionnel.

En effet, nous pouvons nous enorgueillir que, pour l'essentiel des articles, la commission mixte paritaire ait retenu la rédaction du Sénat.

Parmi nos apports notables - en plus de ceux que vient de rappeler l'excellent rapporteur, François-Noël Buffet, auquel je rends hommage pour la qualité du travail qu'il a effectué en amont, lors de la commission d'enquête, puis tout au long de nos débats - je retiendrai l'article 29 quinquies, adopté sur l'initiative de notre collègue Philippe Goujon. Cet article permet de mieux lutter contre ces marchands de sommeil qui font le commerce de la misère humaine.

Ainsi, son amendement qui vise à rendre possible la confiscation des biens de ceux qui contreviennent à la législation sur le travail au noir et sur l'hébergement incompatible avec la dignité humaine a été adopté à l'unanimité.

Auparavant, seul le fonds de commerce pouvait être confisqué ; dorénavant l'ensemble des biens pourra l'être.

Finalement, le principal point qu'il convenait de résoudre en commission mixte paritaire concernait les conditions requises pour le regroupement familial.

En premier lieu, dès la lecture dans notre assemblée, sur mon initiative, la question de la création d'une nouvelle condition préalable au regroupement familial relative au respect des principes qui régissent la République a été tranchée.

La commission des lois avait proposé le retrait de cette disposition pour des raisons, objectives, tenant à l'imprécision de la rédaction.

En adoptant alors une rédaction faisant référence aux « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République », principes qui sont dégagés par la jurisprudence du Conseil constitutionnel et qui comprennent notamment la liberté de conscience et la liberté individuelle, nous avions d'ores et déjà accompli un bout de chemin en direction de nos collègues députés.

En effet, l'étranger qui souhaitera faire venir sa famille dans notre pays via la procédure du regroupement familial devra à tout le moins respecter ces règles essentielles.

Après dix-huit mois de présence sur notre sol, il est normal d'exiger de l'étranger demandant à être rejoint par sa famille qu'il respecte lui-même le pacte républicain.

L'autre aspect de cette problématique du regroupement familial concernait l'instauration de la condition de ressources.

Nous avions, après un très large débat, souhaité supprimer la possibilité de moduler par décret, en fonction de la composition de la famille, le montant des ressources exigées du demandeur.

En effet, d'une part, une telle modulation semblait relever du domaine législatif et, d'autre part, elle introduisait une inégalité incompréhensible dans la mesure où elle revenait à considérer que le SMIC, censé suffire à une famille française, n'aurait pas été suffisant pour une famille étrangère.

En raison de ce risque d'inconstitutionnalité, nos collègues députés se sont ralliés sur ce point à notre opinion, et je m'en réjouis.

Au moment de conclure, je souhaite rappeler - sans intention aucune de minimiser notre travail - que la partie législative n'est qu'un élément dans l'ensemble plus global d'une politique migratoire efficace.

Voter un projet de loi est une chose, et importante, mais le véritable enjeu est de réussir à mettre en oeuvre au plus vite la loi sur le terrain, ainsi que cela a été fait pour la loi de 2003.

De surcroît, beaucoup d'actions ne relèvent pas du domaine de la loi.

Si nous nous félicitons donc de l'adoption de ce texte aujourd'hui, nous avons conscience que le combat contre l'immigration clandestine et pour l'intégration ne se gagnera pas en un jour, mais nécessitera la mobilisation permanente des pouvoirs publics.

Pourtant, monsieur le ministre délégué, en ce dernier jour de session parlementaire, notre groupe souhaite vous signifier, en adoptant ce texte avec enthousiasme, sa confiance en votre détermination et en votre action pour apporter les réponses qui s'imposent. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, la commission mixte paritaire a retenu la plupart des avancées votées par le Sénat, avancées qui ont permis de donner un ton différent à ce texte.

En effet, nous avons défendu et soutenu les diverses initiatives qui visaient à promouvoir le codéveloppement.

Ainsi, les députés et les sénateurs réunis en commission mixte paritaire ont maintenu le dispositif proposé par notre collègue M. Pelletier, président du groupe RDSE, qui crée un compte épargne codéveloppement.

Nous saluons également le maintien de l'essentiel du dispositif de la carte « compétences et talents » voté par le Sénat il s'agit, je le rappelle, de subordonner sa délivrance à un étranger ressortissant d'un pays appartenant à la zone de solidarité prioritaire et à la conclusion d'un accord de partenariat pour le codéveloppement entre la France et ce pays, et de limiter à une seule fois le renouvellement de la carte.

Je regrette, toutefois, la précision introduite par la commission mixte paritaire, qui restreint fortement l'effet de l'amendement de notre collègue Hugues Portelli puisqu'elle permet de délivrer une carte « compétences et talents » même en l'absence d'accord.

Cela me semble affaiblir considérablement l'exigence de codéveloppement que nous défendions en l'occurrence.

Je veux également insister sur l'importance de notre amendement qui tend à confier aux commissions départementales du titre de séjour la compétence pour examiner les demandes de régularisation des étrangers en situation irrégulière depuis dix ans.

Comme nous avons eu l'occasion de le dire, une approche décentralisée de ces cas particuliers nous paraît plus pertinente. Les demandes de régularisation concernent très souvent des familles en situation de détresse. Donner à un échelon local la faculté de les examiner nous semble, là encore, mettre l'accent sur la dimension humaine de l'immigration.

En contrepartie d'une tournure délibérément coercitive, nous avons souhaité en effet présenter une vision un peu plus humaine de l'immigration.

Les raisons de l'immigration, qu'elle soit légale ou illégale, sont toujours les mêmes : fuir un pays, en proie à la pauvreté, voire à une misère insoutenable, ou à des conflits atroces.

Ne croyez pas que ces femmes ou ces hommes soient partis de chez eux pour profiter de notre système. Quitter son pays, ses racines, sa famille, sa culture, c'est avant tout un déchirement !

Si vous prônez une immigration choisie, je crois qu'à l'inverse on ne peut guère parler d'émigration choisie.

C'est sur ces constats que nous avons fondé notre réflexion, et à partir d'eux que nous avons voulu infléchir quelques dispositions du texte.

Bien entendu, il est indispensable de maîtriser les flux migratoires, car il serait impensable de laisser arriver sur notre territoire des personnes auxquelles nous ne pourrions garantir des conditions de vie décentes.

Cependant, à trop vouloir contrôler, ne risque-t-on pas, d'une part, de faire le jeu de l'immigration clandestine et, d'autre part, de rendre trop difficile la vie des migrants arrivés légalement ?

Toutes ces interrogations, ces doutes, sur l'efficacité de ces nouvelles règles, nous les avons encore à l'esprit.

En effet, bien que certaines avancées ait été adoptées, un grand nombre d'incertitudes demeurent, notamment sur les conditions du regroupement familial, sur les conditions du mariage mixte, sur les conditions d'accueil de parents accompagnant un enfant malade venu se faire soigner en France, sur le durcissement des conditions d'obtention de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale », sur les conditions de mise en oeuvre du contrat d'accueil et d'intégration.

C'est pourquoi nous serons très attentifs à l'application de ces mesures. Nous vérifierons notamment si, au lieu de limiter les fraudes, elles ne rendent pas tout simplement impossible la vie en famille et si elles ne bafouent pas les libertés individuelles.

Vous me permettrez, mes chers collègues, de conclure en évoquant l'outre-mer.

Les derniers articles du projet de loi contribuent principalement à assurer un contrôle plus efficace de l'immigration clandestine dans trois territoires : celui de mon collègue Adrien Giraud, Mayotte, ainsi que la Guyane et la Guadeloupe.

Il est nécessaire, en effet, de prendre en considération les particularités de l'immigration dans les collectivités ultramarines qui font souvent office de vitrine.

Cette immigration pèse très lourdement sur les services sociaux de ces collectivités, ce qui contribue à entretenir, chez les habitants, un sentiment très violent de rejet des populations étrangères, voire à exacerber les tensions intercommunautaires. La situation est donc très dangereuse ; c'est pourquoi il était important d'agir.

Je souhaite que, dans notre action, la Réunion ne soit pas oubliée, même si la situation sur ce territoire est différente de celle qui prévaut chez nos voisins mahorais. En effet, alors que Mayotte constitue souvent la première étape des migrants comoriens, la Réunion représente ensuite leur deuxième étape, dans une mesure moindre, certes, mais dans des proportions suffisantes pour créer de véritables tensions entre communautés.

À cet égard, je veux saluer le travail de la commission d'enquête présidée par notre collège Georges Othily, qui nous a permis d'avoir un éclairage particulièrement instructif sur l'immigration dans les territoires ultramarins. Il est nécessaire de poursuivre cet effort de vigilance, car il y va de la stabilité de l'outre-mer.

Tels sont, mes chers collègues, les quelques derniers éléments qu'au nom de l'Union centriste-UDF je souhaitais apporter, en ce dernier jour de session ordinaire, sur cet ultime projet de loi, qui sera voté par la majorité du groupe. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat.

M. Bernard Frimat. Monsieur le ministre délégué, dans l'intimité de cette séance quasi confidentielle de fin de session, je veux vous donner, à mon tour, le sentiment du groupe socialiste sur les conclusions de la commission mixte paritaire.

Certes, à ce stade, nous n'en sommes plus aux effets de surprise. Et nous n'entendons pas recommencer un débat auquel nous avons participé avec suffisamment d'écoute et de correction, tout en gardant la vigueur nécessaire pour ne pas sombrer dans l'endormissement.

M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, fidèle à sa ligne de conduite, ne nous a pas honorés de sa présence ce soir, mais cela nous donne le plaisir de vous voir, monsieur le ministre délégué. Le ministre d'État se trouve actuellement en Guyane, nous avez-vous dit, pour étudier le problème spécifique que pose outre-mer l'immigration, problème dont nos collègues Georges Othily et Anne-Marie Payet nous ont entretenus et dont les membres de la commission d'enquête sénatoriale sur l'immigration clandestine ont bien pris la mesure sur place.

Cela étant, je vous fais observer que les dispositions relatives à l'outre-mer ne sont pas celles qui ont suscité le plus de discussions au sein de notre assemblée. En effet, à situation spécifique, réponses spécifiques. Cependant, la spécificité et l'intensité de la question migratoire dans les territoires ultramarins ne sauraient en aucun cas constituer un alibi pour traiter la situation en France hexagonale, pour reprendre la formule de Georges Othily, où le problème ne se pose pas de la même façon.

La presse nous rendant régulièrement compte des déplacements de M. le ministre d'État - sa communication est suffisamment armée à cet égard -, je présume que nous serons informés par les quotidiens du soir et les magazines de ce qui aura été consacré de cette visite au problème de l'immigration, mais aussi de ses autres aspects.

Je veux m'arrêter un instant sur le chiffre de 7 500 reconduites à la frontière. Je ne suis pas le mieux placé pour parler de la Guyane dans cette assemblée, mais quand on voit - et l'auteur de ces termes se reconnaîtra -, d'un côté, le Maroni et la savane, de l'autre, l'Oyapock et la forêt, lorsque l'on sait ce qu'est la culture du fleuve, il paraît quelque peu dérisoire d'afficher cette volonté chiffrée et de faire de ce résultat un critère pour juger de la politique menée. En effet, la perméabilité des frontières géographiques est telle que les allers et retours entre le Brésil, le Surinam et la Guyane sont incessants. C'est bien là tout le problème !

La commission mixte paritaire n'a fondamentalement rien changé au texte examiné. Dans une atmosphère courtoise, à l'issue d'un ballet bien réglé rythmé par les entretiens préalables, et nécessaires, entre les deux rapporteurs, la réunion de la commission mixte paritaire nous aura retenus moins d'une heure, mais il est vrai que le débat ne se déroule jamais en CMP.

Le texte n'a pas pris un ton différent après ses lectures au Sénat ; sa philosophie demeure dans le droit fil de sa conception originale, même si des améliorations ont été apportées, chemin faisant.

Certaines mesures que nos collègues députés avaient cru devoir ajouter ont été supprimées, en raison essentiellement de la crainte qu'elles ne soient censurées par le Conseil constitutionnel, ainsi que l'a souligné M. le rapporteur. Je pense à la modulation des ressources et à l'impossibilité faite aux étrangers de déposer un recours portant sur le pays de destination quand ils en ont la nationalité.

Malgré le travail qui a été effectivement accompli, ce texte reste, à nos yeux, sans originalité, certes, mais surtout détestable, déséquilibré, injuste, inhumain.

Ce n'est pas un texte de rupture, ce n'est pas une politique.

Lors de la discussion générale, je déclarais : « Réduire la politique d'immigration aux seuls durcissements législatifs, à la mise en cause permanente des étrangers et au recul de leurs droits fondamentaux ne constitue pas la solution au problème de l'immigration clandestine. Sous couvert de lutte contre celle-ci, votre projet de loi dégrade la situation des étrangers en situation régulière. Cette déstabilisation de la vie quotidienne peut aussi atteindre nos compatriotes qui, de par leur ascendance, sont susceptibles d'être identifiés comme étrangers et, au premier rang d'entre eux, nos compatriotes de l'outre-mer. »

Croit-on vraiment lutter contre l'immigration clandestine en déstabilisant l'immigration régulière ?

Car ce projet de loi, contre lequel nous voterons, et de toutes nos forces, avec détermination et conviction, est d'abord un texte de déstabilisation des étrangers en situation régulière. Il aura pour seul effet de créer de nouveaux clandestins, dont il va accroître le nombre total, et vous le savez bien, monsieur le ministre délégué.

Vous condamnez les étrangers titulaires d'un titre de séjour temporaire à vivre dans l'anxiété permanente et, de cette façon, vous favorisez une espèce de précarisation permanente des étrangers.

Pour ce qui est du regroupement familial, vous le rendez tout à la fois plus lent, en exigeant un délai d'attente de dix-huit mois, mais aussi plus difficile, en dressant sur le parcours des demandeurs toutes sortes de barrières administratives.

En outre, chacun le sait, ce texte ouvre la porte à des divergences d'interprétation au sein de l'administration. Il n'est pas dans mon intention de mettre en cause les fonctionnaires qui font leur métier avec honnêteté sur tout le territoire, mais il serait d'ores et déjà possible de dresser une cartographie des différentes appréciations.

Nous savons aussi que, au nom de la politique du résultat chère au ministre de l'intérieur, les préfets seront jugés sur les décisions qu'ils auront prises en la matière. Par conséquent, l'administration risque d'être dotée d'un pouvoir quasi discrétionnaire.

Pour ce qui est de l'intégration, le constat est le même et constitue pour nous une nouvelle raison de ne pas approuver un texte insusceptible de régler le problème de l'immigration, parce qu'il refuse de tirer les conséquences d'une intégration réelle, tout en la revendiquant. Curieux paradoxe !

Ainsi, on durcit l'ensemble des conditions de l'intégration, s'agissant notamment de l'allongement des délais d'acquisition de la nationalité française. De même, on supprime la possibilité d'obtenir un titre de séjour après dix ans de présence sur le territoire. Une personne qui s'est maintenue en France sur une période aussi longue n'a-t-elle pas de ce fait apporté la preuve suffisante de la force des liens qu'elle a su tisser dans notre pays ? L'aspect quantitatif - 3 000 personnes concernées chaque année - était-il si important ?

Quant au discours sur l'appel d'air que créerait cette mesure, vous n'y croyez pas vous-même !

Votre texte est détestable, monsieur le ministre délégué, parce que vous n'hésitez pas à choisir, pour régler le contentieux des étrangers, la solution de l'abattage, quitte à mettre en cause le principe de la collégialité et à réduire les voies de recours.

Conformément à notre rôle de membres de l'opposition, nous saisirons le Conseil constitutionnel, comme vous vous y attendez, sur les points que nous estimons contraires à la Constitution, et nous nous exprimerons quand il aura statué.

J'en viens à cette invention détestable, apparue au cours du débat au Sénat, qui, partant d'un projet de loi relatif à l'immigration choisie, nous fait arriver à un texte relatif au codéveloppement.

Nous vous l'avons dit, le codéveloppement, parce qu'il est important à nos yeux, mérite de vrais débats. Cependant, l'amendement adopté, dont nous avons salué le caractère sympathique, n'en demeure pas moins un cache-misère et n'a pas sa place dans un texte brutal et répressif.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Cache-misère, 125 millions d'euros ?

M. Bernard Frimat. Je ne parle pas de ces 125 millions d'euros, monsieur le ministre délégué, mais plutôt de ces travailleurs qui envoient chez eux une partie de leurs faibles salaires pour faire vivre leur famille !

Au demeurant, nous verrons bien. Ces 125 millions d'euros seront pris sur l'effort fiscal réalisé par les contribuables, et nous jugerons, le moment venu, de la réalité de la politique menée. Nous n'en sommes aujourd'hui qu'aux estimations.

Donc, pas de procès d'intention entre nous, monsieur le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Vous parlez de cache-misère ! Je le répète, il s'agit de 125 millions d'euros ! Tout de même ! (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame.)

M. Bernard Frimat. Nous n'atteindrons pas ce chiffre, j'en fais le pari ! Mais nous n'allons pas rouvrir le débat !

Ce projet de loi est donc un texte d'affichage, à finalité électorale, tout comme le prochain, relatif à la prévention de la délinquance, thèmes habituels sur lesquels vous espérer ressouder vos troupes.

J'aborderai pour conclure un problème qui, je vous en donne acte, monsieur le ministre délégué, n'est pas dans le texte, mais que le ministre d'État fut le premier à introduire dans le débat. Je me sens donc fondé à traiter d'un sujet qui, encore une fois, n'est pas dans le texte, mais qui fait indiscutablement partie du contexte, je veux parler des enfants.

Le ministre a pris une première circulaire, puis une seconde, annoncée au cours du débat du 13 juin dernier, pour finalement nommer un médiateur, lequel vient de déclarer qu'il n'y aurait pas d'expulsion d'enfants cet été. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'esclaffe.) Dont acte ! J'en accepte l'augure, encore que je me demande si les prérogatives du médiateur vont jusque-là.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tout est permis !

M. Bernard Frimat. Nous verrons bien ce qu'il en est.

Ce problème des enfants, qui a émergé dans le débat, au point d'occulter quasiment le contenu de votre texte puisqu'il n'est plus question que de cela, nous touche tous.

Discuter de l'immigration en termes généraux, parler de flux, de maîtrise des frontières, de régulation, cela permet de rester suffisamment dans l'abstraction pour aborder le sujet de manière détachée. Mais, lorsque vous discutez du même problème en prenant le cas d'un enfant que vous connaissez, qui est le camarade de classe de votre fille ou de votre fils, tout change ! Alors, les clivages politiques disparaissent, et l'émotion n'est plus à ce moment-là qu'une émotion individuelle

Aussi, monsieur le ministre délégué, cet immense cri, ne le traitez pas en renvoyant à la gauche pétitionnaire ! Vous n'aimez pas la polémique ? Alors, précisément, sans polémiquer, respectez les gens ! La Ligue des droits de l'homme, les associations qui se chargent de l'accueil des étrangers, tous ceux qui mènent ces actions sont dans leur droit ! Ceux qui signent les pétitions les signent en pleine connaissance, en tant que citoyens ! Ils peuvent être intimement révulsés, choqués, ulcérés, bouleversés...

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Et manipulés !

M. Bernard Frimat. Mais non ! C'est toujours le même argument de dernier recours quand pareille situation vous claque à la figure ! Vous dites : ils sont manipulés.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. C'est un appel à violer la loi ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)

M. Bernard Frimat. Mais manipulés par qui ? Vous pensez que la gauche pétitionnaire a à ce point le contrôle des médias qu'elle est en mesure de « manipuler » ? C'est l'émotion, rien de plus, qui mobilise les uns et les autres.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Vous appelez à violer la loi, monsieur Frimat !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous voyez le mal partout, monsieur le ministre délégué !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. D'ailleurs, puis-je vous interrompre, monsieur Frimat ?

M. Bernard Frimat. Bien volontiers, car notre débat est vif et je me dois de vous laisser vous expliquer !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué, avec l'autorisation de l'orateur.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Monsieur Frimat, ceux à qui vous faites référence ont lancé un appel à violer la loi. Et quelle loi ? La loi de M. Chevènement, que vous avez vous-même soutenue !

M. Bernard Frimat. Vous nous l'avez dit tout à l'heure !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Vous n'avez pas proposé, à l'époque, de dispositions qui auraient permis la régularisation de toutes les familles des enfants scolarisés, et voilà qu'aujourd'hui vous appelez à violer cette loi. Il s'agit donc bien d'une manipulation !

M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Frimat.

M. Bernard Frimat. J'avais compris au premier service, monsieur le ministre délégué, puisque c'est ce que vous aviez déjà rappelé dans votre intervention liminaire !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On se comprend très bien !

M. Bernard Frimat. Mais je ne vous parle pas, monsieur le ministre délégué, du parti socialiste, de même que vous ne me parlez pas de l'UMP : je vous parle d'un certain nombre d'associations honorables et qui font la fierté de notre pays, comme la Ligue des droits de l'homme, comme la CIMADE, et bien d'autres encore que je ne vais pas énumérer à cette heure.

Quand quelqu'un réagit selon ses convictions profondes face à une réalité, le problème n'est pas de savoir quel texte, qui, que, quoi...

Ce cri, entendez-le : « Nous ne voulons pas de cela ! » Cela, c'est ce que j'ai moi-même qualifié à cette tribune, voilà trois semaines, de « chasse à l'enfant » : nous ne voulons pas de chasse à l'enfant, et si personne ne veut de chasse à l'enfant, eh bien tant mieux !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Si les associations ne s'étaient pas mobilisées, il n'y aurait pas eu de circulaire !

M. Bernard Frimat. Vous ne pouvez pas les empêcher de crier ! S'il y a eu circulaire, s'il y a eu nomination d'un médiateur, c'est bien parce qu'il a fallu gérer l'opinion publique. Or l'opinion publique, à ce niveau-là, au niveau d'une classe de maternelle, d'un lycée, elle ne se manipule pas !

Quand un jeune majeur, ma collègue citait son cas hier, réussit le baccalauréat, est lauréat du concours général, est admis en classe préparatoire scientifique, et, dans le même temps, reçoit un arrêté de reconduite à la frontière, ne pensez-vous pas, monsieur le ministre délégué, que quelque chose ne va pas ? Ne pensez-vous pas qu'il est stupide de se priver de la chance que sera pour le pays un jeune qui va développer ses talents, qui va pouvoir travailler et être, dans les faits, un Français de plus, qu'il ait la nationalité ou non ?

Nous verrons, mais la vigilance sera à la mesure de l'inquiétude.

Vous avez affirmé, monsieur le ministre délégué, qu'il n'y aurait pas de chasse à l'enfant ; vous avez affirmé au cours des débats que les critères n'étaient pas cumulatifs. Et, pour toute démonstration, vous avez renvoyé la gauche à ses propres textes en la matière. Très bien ! J'accepte tout cela. Mais ce n'est pas parce que l'on a agi d'une certaine façon hier qu'il faut continuer à le faire demain : il faut aussi être capable d'évoluer.

Monsieur le ministre délégué, je vous le dis droit dans les yeux - c'est une expression que l'on affectionne visiblement -, à ma connaissance jamais la gauche n'est allée chercher d'enfants dans les écoles ; et, si cela ne se reproduit plus, j'en serai ravi !

En vous demandant de m'excuser, monsieur le président, d'avoir été un peu long - et ce n'est pas à cause de l'interruption du ministre, je lui en donne acte, j'ai été long de mon propre chef ! -, je conclurai en vous disant, sur un ton aussi mesuré que possible, quelle est ma crainte fondamentale à cet instant.

Monsieur le ministre délégué, je n'ai jamais utilisé le mot de « racisme », jamais, et l'on peut reprendre tous les comptes rendus ! En revanche, j'ai utilisé le terme de « sentiment xénophobe », et je le maintiens. Car il est une tradition française ô combien malheureuse, celle de courants d'idées qui, porteurs de ce sentiment xénophobe, ont toujours fait de l'étranger la cause de toutes les difficultés que rencontrait le pays à une époque ou à une autre.

La xénophobie est haïssable : je pense que cette idée simple est partagée sur toutes les travées. Simplement, monsieur le ministre délégué, la toile de fond de votre projet de loi, sa philosophie renforce objectivement ce sentiment et fait tomber un tabou. À ce titre, j'estime qu'elle renforce la peur de l'étranger.

Nous reprendrons ce débat pendant les campagnes électorales : la France a, en 2007, des rendez-vous importants qu'il ne faut pas galvauder. C'est à ce moment que les Français choisiront librement à qui ils confieront pour les cinq années à venir le pouvoir d'État. Il nous faudra être dignes de ce débat, et l'immigration en fera partie.

Vous et nous, monsieur le ministre délégué, nous n'avons pas la même conception de ce phénomène, nous n'avons pas la même conception de l'accueil : nous développons une conception de l'immigration partagée. Mais nous aurons, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, l'occasion d'y revenir ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement, lorsqu'il examine après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, le Sénat se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte.

Je donne lecture du texte de la commission mixte paritaire.