compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures trente.)

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PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

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saisine du conseil constitutionnel

M. le président. M. le Président du Sénat a reçu de M. le Président du Conseil constitutionnel une lettre par laquelle il informe le Sénat que le Conseil constitutionnel a été saisi, le 1er décembre 2006, en application de l'article 61, alinéa 2 de la Constitution, par plus de soixante députés, d'une demande d'examen de la conformité à la Constitution de la loi relative au financement de la sécurité sociale pour 2007.

Acte est donné de cette communication.

Le texte de cette saisine est disponible au Bureau de la distribution.

3

Loi de finances pour 2007

Suite de la discussion d'un projet de loi

Article 51 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Engagements financiers de l'Etat - Comptes d'affectation spéciale : Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat -  Participations financières de l'Etat

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2007, adopté par l'Assemblée nationale (nos 77 et 78).

Engagements financiers de l'État

Compte d'affectation spéciale : Gestion du patrimoine immobilier de l'État

Compte d'affectation spéciale : Participations financières de l'État

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 34 et état B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits des missions : « Engagements financiers de l'État », compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Paul Girod, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il me revient de présenter devant vous, à la fois, une mission parmi les plus importantes du budget en termes de volume de crédits, et deux comptes spéciaux dont l'enjeu, dans chaque cas, s'avère essentiel pour la réforme de l'État.

Je dépasserai peut-être mon temps de parole de cinq minutes, monsieur le président, car il est difficile de comprimer ce rapport « trois en un » même si je vais à l'essentiel !

Je commencerai mon exposé par la mission « Engagements financiers de l'État ».

Cette mission, au total, regroupe plus de 40 milliards d'euros de crédits pour 2007. Elle constitue ainsi le troisième poste budgétaire, après l'enseignement scolaire notamment, mais avant la défense.

Je n'évoquerai que le programme « Charge de la dette et trésorerie de l'État », qui concentre 96 % des crédits de la mission, soit 39,19 milliards d'euros en crédits évaluatifs.

Ce montant correspond à la charge nette de la dette de l'État, avant les recettes issues des contrats d'échange des taux. Ces swaps, l'année prochaine, devraient représenter une atténuation de charge de 267 millions d'euros, soit un peu moins de 0,7 % du total, ce qui portera la charge nette de la dette après swaps à 38,92 milliards d'euros.

Dans sa quasi-intégralité, cette charge résulte de la dette négociable de l'État. La hausse prévue, en ce domaine, pour 2007, de l'ordre de 0,4 % en volume, est principalement liée au financement du déficit budgétaire, qui doit s'élever à 41,7 milliards d'euros.

Nous pouvons donc une nouvelle fois méditer sur le fait que le volume du déficit est pratiquement équivalent au service de la dette.

Sans vouloir recommencer, ce matin, le débat que nous avons eu mercredi après-midi dans cet hémicycle, je rappellerai quelques chiffres intéressants.

La dette négociable de l'État, qui constitue 95 % de sa dette totale, devrait à la fin de l'année 2006 atteindre 887,9 milliards d'euros.

La dette globale de l'État correspond à près de 80 % de la dette des administrations publiques françaises, dont le montant, à la fin de l'année 2005, était de 1 138 milliards d'euros !

Le ratio d'endettement de nos administrations était ainsi de 66,6 % du PIB. Il est aujourd'hui estimé à 65,5 %. Ce ratio est compris entre la moyenne des vingt-cinq États membres de l'Union européenne et celle de la zone euro, mais sa dégradation s'avère progressive, d'une année sur l'autre, même si l'on enregistre actuellement une certaine atténuation.

Je l'ai déjà dit mercredi, sur 100 euros versés par le contribuable, 15 euros servent à financer cette charge de la dette. M. le président de la commission des finances a une formule encore plus lapidaire : à partir du 6 novembre, nous dépensons l'argent de nos petits-enfants, l'argent consacré par nous au budget de l'année étant épuisé à cette date.

Je rappelle également que, si la charge nette de la dette de l'État se maintient depuis plusieurs années en dessous de 40 milliards d'euros, c'est grâce au niveau historiquement bas des taux. Cela expose la France à un risque de variation des taux, qui n'a plus rien d'une vague hypothèse dès lors que la Banque centrale européenne depuis 2005 remonte ses taux directeurs, suivant l'orientation de la politique monétaire des Etats-Unis, ce qui changera peut-être dans les semaines qui viennent !

À cet égard, j'attire de nouveau votre attention, mes chers collègues, sur l'effet progressif de la sensibilité de la charge de la dette aux variations de taux d'intérêt : toutes choses égales, par ailleurs, une augmentation des taux de 1 % en 2007 se traduirait par une hausse de la charge d'intérêt sur la dette de 6 milliards d'euros en 2012, soit une aggravation de plus de 20 %.

Dans ce nouveau contexte, l'augmentation de l'encours de la dette négociable en 2006 n'a été contenue que grâce, en premier lieu, à des rachats de titres de dette, financés par 13,3 milliards d'euros de recettes de privatisations - je reviendrai sur ce sujet - et grâce, en second lieu, à une gestion optimisée de la trésorerie. Cependant, il s'agit là d'une opération unique nommée couramment « fusil à un coup » !

L'encaisse de précaution que constitue la trésorerie libre de l'État a été réduite, ce qui a permis de restreindre l'encours de la dette à court terme de 14 milliards d'euros entre janvier et août 2006, et de revoir à la baisse le programme de financement à moyen et à long terme, à hauteur de 10 milliards d'euros par rapport aux prévisions initiales.

En outre, l'Agence France Trésor s'est dotée d'un bon du Trésor à très court terme, d'une maturité de deux à six semaines, émis pour la première fois au début du mois de septembre dernier. L'opération a permis de lever 2,5 milliards d'euros pour une période de dix jours afin d'anticiper les rentrées fiscales du mois de septembre.

C'est une mesure intéressante. Mais, comme l'a indiqué le rapporteur général, notre collègue Philippe Marini, mercredi dernier, elle doit rester cantonnée à la couverture de besoins ponctuels de trésorerie et ne pas devenir une opération reconductible de manière rapide et permanente.

Au passage, je répète que la commission des finances a vivement regretté - je me tourne vers vous, monsieur le ministre - l'absence de mise en oeuvre de l'article 73 de la loi de finances pour 2006 - adopté sur l'initiative de la commission -, qui donnait au ministre de l'économie et des finances la faculté d'émettre pour le compte de la Caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES, par l'Agence France Trésor un certain nombre de titres.

Il y aurait eu là la possibilité d'économiser quelques dizaines de millions d'euros, en évitant l'écart de taux d'intérêt constaté entre les opérations de gestion de la dette « souveraine » et celles de la dette sociale.

J'ai bien entendu votre réponse, monsieur le ministre, mercredi : la gestion de la dette sociale par l'Agence France Trésor dégraderait significativement le solde financier. Sans doute, mais vous savez bien que ce ne serait qu'un effet d'optique, d'ailleurs plus proche de la réalité que celui qui est aujourd'hui en place !

Une réflexion est en cours - parfait -, mais commencez, s'il vous plaît, monsieur le ministre, par prendre le décret d'application d'ores et déjà prévu par le législateur. C'est la loi, monsieur le ministre !

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État. Promis !

M. Paul Girod, rapporteur spécial. J'en viens aux deux comptes d'affectation spéciale concernant le patrimoine immobilier et les participations financières.

Les deux missions correspondantes, qui étaient « monoprogrammes » en 2006, seront à partir de l'année prochaine subdivisées chacune en deux programmes, et peut-être en trois, s'agissant du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier », si la proposition que je vous présenterai tout à l'heure est retenue.

Cette réforme met en oeuvre les prescriptions de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, rappelées par le Conseil constitutionnel, suivant lesquelles une mission ne peut comporter un programme unique.

Sur le fond, en ce qui concerne le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », je signalerai tout d'abord que le périmètre des opérations retracées est étendu par le projet de loi de finances.

Cette extension est double.

En premier lieu, les recettes du compte, à l'avenir, feront apparaître les fonds de concours, ce qui devrait permettre une visibilité plus complète des ressources dégagées à l'occasion des opérations immobilières.

En second lieu, les dépenses du compte comprendront désormais les opérations conduites, sur les immeubles de l'État, par des établissements publics. Cette mesure permet notamment l'intégration des établissements publics dans le dispositif d'intéressement dont bénéficient actuellement les seuls ministères - en principe, 85 % des produits de cession leur sont retournés, montant destiné à couvrir les dépenses immobilières induites par les cessions, principalement pour le relogement de services, les 15 % restants étant affectés au désendettement.

Cette réforme en faveur des établissements publics est de nature à appuyer utilement la politique volontariste de cessions engagée depuis 2003 par le Gouvernement.

Je rappelle que le programme de cessions d'immeubles, pour 2007 est fixé à 500 millions d'euros, dont 75 millions d'euros seront affectés au désendettement. Le montant de 500 millions d'euros représente 1,3 % des 38 milliards d'euros auxquels sont évaluées les propriétés immobilières de l'État. On y verra un peu plus clair au moment de l'arrêt du fameux bilan d'entrée de l'État dans les semaines ou dans les mois à venir.

C'est aussi l'objectif que le Gouvernement, en 2003, s'est fixé en termes de rythme annuel de ventes.

Je rappelle que, selon la loi de finances pour 2006, 479 millions d'euros de produits de cessions immobilières sont programmés cette année, dont 139 millions, soit 28 %, sont consacrés au désendettement.

D'après les informations obtenues, au 31 octobre 2006, 348 millions d'euros avaient été effectivement encaissés sur le compte, contre 252 millions seulement le mois précédent.

Ce montant actuel représente 72 % des recettes prévues. On peut donc estimer qu'au 31 décembre nous serons très proches de l'objectif qui avait été fixé dans la loi de finances de l'année dernière.

Ce serait un progrès par rapport aux exercices précédents.

Pour mémoire, les cessions d'immeubles de l'État ont représenté, en 2004, 170 millions d'euros de recettes, alors que la loi de finances initiale en prévoyait 500 millions d'euros, et elles ont réalisé en 2005, 634 millions d'euros, contre une prévision initiale de 850 millions d'euros.

En tout état de cause, monsieur le ministre, d'éventuels retards dans le programme 2006 ne sauraient être couverts par les objectifs fixés pour 2007 : les 500 millions d'euros de cessions prévus pour l'année prochaine doivent bien venir en sus des objectifs fixés pour cette année.

Par ailleurs, la mesure de la performance a été sensiblement améliorée.

En particulier, l'indicateur que j'avais préconisé a été mis en place et la commission des finances s'en félicite : il rapporte, pour chaque cession immobilière d'un montant supérieur à 2 millions d'euros, la valeur estimée des immeubles avant cession au produit retiré de la vente. L'objectif pour 2007 est de 1,3 % d'écart moyen entre la valeur vénale et la recette effective.

J'aurai tout à l'heure l'occasion de vous présenter un amendement, au nom de la commission des finances, visant à réaliser un autre progrès : celui de retracer clairement, dans le budget, les travaux immobiliers d'aménagement ou de rénovation, dont les crédits peuvent se trouver, actuellement, disséminés dans différentes missions où, en réalité, ils n'ont pas leur place. Cette mesure nous permettrait d'avoir une gestion totalement centralisée de ce qui se rapporte au parc immobilier de l'État.

J'en arrive maintenant au compte d'affectation spéciale « Participations financières ».

Les cessions d'actifs financiers, en 2007, devraient atteindre près de 5 milliards d'euros, soit environ 4 % des participations cotées de l'État évaluées à fin du mois d'octobre dernier à 130 milliards d'euros.

Sur ce montant, 3,6 milliards d'euros, soit près de 72 %, seront consacrés au désendettement public : 3,1 milliards d'euros pour l'État, 513 millions d'euros pour l'Établissement public de financement et de restructuration, l'EPFR, qui amortit la dette du Crédit Lyonnais.

Cette orientation de l'affectation des recettes de privatisations mérite d'être saluée. Elle s'inscrit dans la ligne de l'exercice 2006 : sur les 17,1 milliards d'euros de produits -niveau exceptionnel, lié aux 13 milliards d'euros réalisés par la cession des autoroutes -, 16 milliards d'euros au total, soit 93 %, ont été affectés au désendettement, dont 13,3 milliards d'euros pour l'État. Cela explique d'ailleurs le fait que nous passions de 66,6 % à 65,5 % d'endettement par rapport au produit intérieur brut dans le cours de l'année 2006.

Je signale qu'entre 1986 et 2005, sur les 81,7 milliards d'euros de recettes de privatisation réalisés durant cette période, soit deux fois le déficit de cette année, seuls 10 milliards d'euros sont allés au désendettement de l'État, et 1,6 milliard d'euros au fonds de réserve des retraites, c'est-à-dire le huitième seulement des recettes, chiffre à comparer aux 80 % ou aux 90 % de cette année.

Par ailleurs, j'ai obtenu de l'Agence des participations de l'État le détail des opérations de recapitalisation prévues pour 2007. Ce détail figure dans mon rapport écrit. Eu égard aux exigences de justification des crédits fixées par la LOLF, je regrette simplement, monsieur le ministre, que ces informations n'aient été fournies qu'avec un certain retard et d'une manière très incomplète dans les documents annexés au projet de loi de finances : le « bleu » budgétaire ne retrace, au total, que 400 millions d'euros de versements sur le 1,3 milliard d'euros prévu à cet effet.

Permettez-moi, enfin, monsieur le ministre, de vous poser une question sur l'Agence des participations de l'État, qui, depuis le départ de M. Denis Samuel-Lajeunesse, en septembre dernier, se trouve dépourvue de directeur général. Y a-t-il une raison particulière qui justifie cette absence ?

En tout état de cause, en attendant votre réponse, je recommande au Sénat, au nom de la commission des finances, sous réserve de l'adoption de l'amendement que je présenterai tout à l'heure, l'adoption des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État et des comptes d'affection spéciale « Participations financières de l'État » et « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Michel Bécot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en qualité de rapporteur pour avis sur la mission « Participations financières de l'État », au nom de la commission des affaires économiques, je souhaite tout d'abord saluer l'équilibre global qui nous est proposé pour la structure du compte d'affectation spéciale en 2007.

Celui-ci confirme la priorité forte accordée au désendettement de l'État, dans la continuité de l'exercice 2006, et non dans celles des vingt années précédentes.

Ce compte, qui s'établit à 5 milliards d'euros de recettes et de dépenses, traduit aussi un juste équilibre entre deux impératifs contradictoires.

Le premier est la sincérité budgétaire et politique, qui conduit à ne pas préjuger des choix électoraux que les Français seront appelés à formuler en 2007 et qui conditionneront inévitablement le montant des cessions de participations financières.

Le second impératif est, à mes yeux, celui d'une politique de cessions ambitieuse, à la fois compte tenu de nos objectifs de réduction de la dette publique, mais aussi des opportunités permises par la très bonne tenue des marchés financiers.

Aussi, le niveau de 5 milliards d'euros de cessions me paraît équilibré puisqu'il correspond à la moyenne annuelle des cessions observée depuis 1986.

Toutefois, qu'y a-t-il derrière ce montant de recettes ? Si l'on comprend bien que l'intérêt de l'État est de pas annoncer d'opérations très précises, afin de bénéficier au maximum des opportunités qui se présenteront sur le marché, peut-être serait-il possible, monsieur le ministre, d'en savoir un peu plus sur les critères ou les orientations que le Gouvernement pourrait se fixer pour les opérations qu'il mènera d'ici aux échéances électorales du printemps 2007.

S'agissant maintenant du volet dépenses, je ne peux que regretter le peu d'informations dont nous avons disposé dans les documents budgétaires et leurs annexes au sujet du montant de 1,4 milliard d'euros qui a été affecté non au désendettement, mais au programme n° 731 « Opérations en capital liées aux participations financières de l'État ». Ce manque d'information est d'autant plus surprenant lorsque l'on connaît la grande qualité du travail de suivi et de programmation accompli par les équipes de l'Agence des participations de l'État.

Par ailleurs, et hors des dépenses inscrites aujourd'hui, je souhaite interroger M. le ministre au sujet du dispositif « France Investissement », annoncé il y a quelques semaines. Il s'agit d'un « fonds de fonds » destiné aux PME et dans lequel - si j'ai bien compris ce qui est annoncé - l'État interviendra au travers de la Caisse des dépôts et consignations et aux côtés de fonds privés. Je souhaite savoir si les investissements du Trésor au travers de ce dispositif seront pris en compte dans le cadre des participations financières de l'État, de façon à garantir le contrôle du Parlement.

En conclusion, sans revenir sur l'amendement déposé en première partie par notre collègue Charles Revet, rapporteur pour avis de la mission « Transports » au nom de la commission des affaires économiques, et qui traitait de Réseau Ferré de France, je tenais à vous informer que cette même commission a émis un avis favorable sur les projets de recettes et de dépenses de la mission « Participations financières de l'État » proposés pour 2007. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose.

Je vous rappelle également que l'intervention générale vaut explication de vote pour ces trois missions.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Denis Detcheverry.

M. Denis Detcheverry. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'occasion de l'examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État » et des deux comptes d'affectation spéciale qui y sont rattachés, le groupe UMP souhaite une nouvelle fois souligner les efforts entrepris par le Gouvernement en faveur du désendettement de notre pays.

Le désendettement est un enjeu politique majeur.

Comme l'a souligné notre collègue Joël Bourdin, au nom du groupe UMP, lors du débat d'orientation budgétaire de juin dernier, notre pays se trouve dans une situation paradoxale : les Français sont individuellement sous-endettés, mais collectivement surendettés.

D'un côté, la France est l'un des pays du monde développé où l'endettement individuel des ménages est le plus faible et peut encourager un certain endettement individuel pour soutenir la croissance. De l'autre, elle doit tout faire pour stopper la croissance inquiétante de la dette publique, c'est-à-dire de notre dette collective.

Le rapport publié par M. Michel Pébereau en décembre dernier a été l'occasion d'une véritable prise de conscience nationale.

Il faut également féliciter le Gouvernement pour l'effort de pédagogie et de gestion qu'il a su réaliser sur un sujet trop longtemps ignoré ou négligé dans notre pays.

Malgré la hausse des taux d'intérêt, la progression de la charge de la dette est contenue, comme l'indique notre excellent collègue M. Paul Girod dans son rapport spécial.

L'engagement de la majorité en faveur de l'assainissement des finances publiques depuis 2002 commence à porter ses fruits.

Le projet de loi de finances pour 2007 est un budget responsable devant conduire à une nouvelle réduction de l'endettement qui serait ramené à 63,6 % du PIB, soit un point de PIB de moins que l'année précédente.

Comme l'a souligné M. Paul Girod dans son rapport, la mission « Engagements financiers de l'État » est la troisième mission la plus importante du budget général par son volume, représentant 11,8 % du total des crédits de paiement. Cette proportion nous incite à être particulièrement vigilants sur l'organisation de la mission.

Notre groupe sera ainsi très attentif aux réponses que vous apporterez, monsieur le ministre, aux observations formulées par notre rapporteur spécial, notamment celles qui concernent les indicateurs de performance du programme « Appels en garantie de l'État » qui mériteraient selon lui quelques améliorations.

J'en viens au compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », dont il faut rappeler qu'il a été introduit à la demande du Parlement.

Dans une logique de transparence conforme à l'esprit de la LOLF, il retrace les recettes et les dépenses induites par des opérations immobilières de l'État et fait apparaître clairement la part du produit des cessions des biens immeubles de l'État affectée au désendettement public. Le Parlement se félicite du surplus d'information qui lui est ainsi fourni.

La commission des finances a déposé un amendement qui vise à créer un nouveau programme au sein du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » pour retracer spécifiquement les travaux d'aménagement ou de rénovation des immeubles de l'État ainsi que les dépenses de fonctionnement liées à ces opérations. Il tend également à accroître les crédits affectés à ce nouveau programme de 100 millions d'euros en 2007.

Cet amendement est lié à ceux qui visent à réduire d'un montant total équivalent les crédits des missions « Gestion et contrôle des finances publiques » et « Écologie et développement durable » que nous examinerons plus tard dans la journée.

Nous comprenons le souci de clarté de la commission et sa volonté de regrouper les crédits budgétaires par mission de l'État, dans l'esprit de la LOLF.

La question de l'entretien du patrimoine de l'État est l'une des étapes qui nous restent à franchir dans la modernisation de la politique immobilière, que vous avez engagée, monsieur le ministre.

Nous comprenons également les interrogations de la commission sur le coût et les modalités de certaines opérations de déménagement temporaire, comme celle du ministère de l'écologie et du développement durable.

Ces questions méritent selon nous d'être débattues sur le fond, sans toutefois conduire à remettre indirectement en cause des opérations importantes déjà engagées, au risque de provoquer de nouveaux retards et de nouveaux surcoûts budgétaires, ce qui irait à l'encontre de la philosophie de la commission des finances. Je pense en particulier à l'installation de la Maison de la francophonie sur le site du ministère de l'écologie et du développement durable, qui résulte d'un engagement fort du Président de la République.

Nous comptons sur le Gouvernement pour apporter les précisions nécessaires et éclairer nos futurs débats sur ce sujet. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme chacun le sait, la mission concernée recouvre essentiellement les crédits relatifs au règlement du service de la dette publique.

Ces crédits s'élèveront, pour 2007, selon les éléments à notre disposition, à 39,191 milliards d'euros, en hausse relative d'un peu plus de 160 millions d'euros sur 2006.

Deux facteurs expliquent cette situation.

D'une part, malgré vos affirmations régulières, monsieur le ministre, le service de la dette n'a pas connu de réduction sensible tout simplement parce que le volume de la dette publique n'a pas profondément évolué à la baisse.

Cinq années de prétendue rigueur budgétaire n'ont pas empêché, loin de là, le cumul de 250 milliards d'euros de déficit ni la progression subséquente du volume de la dette publique.

D'autre part, un certain nombre de décisions politiques ont conduit à la réduction significative des recettes de l'État, notamment par le biais d'allégements fiscaux accordés tant aux plus hauts revenus qu'aux plus grandes entreprises, sans que cela se traduise in fine par une amélioration de la situation de l'endettement comme des comptes publics.

En soi, comme nous avons déjà eu l'occasion de le souligner, la dette publique n'est pas condamnable et elle présente même, de fait, un caractère souvent utile pour porter l'activité économique.

Sans la dette publique, que deviendraient nos entreprises de travaux publics, nos sociétés de production de biens d'équipement, nos entreprises métallurgiques ?

Ces interrogations figurent d'ailleurs dans l'intéressant rapport de notre collègue Joël Bourdin, au nom de la délégation pour la planification, sur les perspectives macroéconomiques et les finances publiques à moyen terme, 2007-2011, en instance de publication et que nous avons pu consulter.

Notre collègue rappelle ensuite que, a priori, le mouvement de réduction de la dette publique permet, certes, de réduire le niveau de déficit au regard du produit intérieur brut mais qu'il exerce une influence significative sur la croissance elle-même.

Il y aurait donc un lien entre réalité de la dette publique et niveau de l'activité économique. Il conviendrait dès lors d'arbitrer nos choix en fonction de la nécessaire mise en évidence des moyens de prolonger la croissance, malgré tout.

La priorité que vous accordez donc au désendettement, et que nous avons encore vu figurer au terme de la discussion de la première partie, mes chers collègues, est donc un arbitrage précis.

Il s'agit pour vous de créer les conditions permettant de réduire le déficit, coûte que coûte, fût-ce au prix, devons-nous le souligner, de la croissance.

Nous avons eu l'occasion d'exprimer notre point de vue sur ce sujet au cours de la discussion.

Nous devons clairement sortir de cette logique. Plus le temps passe, plus il apparaît au contraire que c'est au travers d'une dette publique utilement mobilisée que nous créerons les conditions de la croissance et donc de la résorption des déficits contribuant à la développer. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État. Je remercie, tout d'abord, M. Girod de la qualité de son intervention. Il fait une nouvelle fois la démonstration de sa remarquable maîtrise des questions relatives à la gestion de la dette de l'État, derrière lesquelles se dessinent de nombreux sujets sur lesquels nous sommes l'un et l'autre très engagés et partageons bien des valeurs communes.

Monsieur le rapporteur spécial, vous avez rappelé les nombreux efforts engagés par le Gouvernement pour réduire le niveau de la dette et promouvoir une gestion active.

Ainsi que je l'ai déjà rappelé avant-hier à la tribune, la réduction de la dette est véritablement pour nous une priorité, comme l'illustre l'objectif fixé par M. Thierry Breton de réduire de deux points la dette rapportée au PIB. Cela nécessite un travail très approfondi - afficher un objectif ne garantit pas qu'on l'atteindra - et la mise en oeuvre d'une démarche méthodique. Celle-ci passe, bien sûr, par les cessions de participation, mais elle implique, en quelque sorte, une discipline de vie : assumer et afficher que l'on veille à ce que tout surplus de recette fiscale soit affecté au désendettement. C'est un message important.

S'agissant de la CADES, dont nous avons également eu l'occasion de parler, mercredi dernier, lors du débat sur l'évolution de la dette, il faut quand même réfléchir à deux fois avant de présenter une dégradation du solde budgétaire de plusieurs milliards d'euros sans forcément être totalement assuré de la manière dont on va procéder.

Par conséquent, nous devons, me semble-t-il, continuer de travailler ensemble sur ce sujet un peu polémique. Certes, nous n'aurons pas besoin de beaucoup de temps pour décider, mais je souhaite que nous puissions mener une réflexion approfondie sur ce point dans les semaines qui viennent, monsieur le sénateur.

Vous avez évoqué le compte d'affection spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » en faisant remarquer qu'il avait évolué conformément à vos recommandations de l'an dernier. Je vous remercie de le dire, car nous vivons dans un pays où certains soulignent plus spontanément les dysfonctionnements que les réussites. Or, à mon sens, l'État peut se féliciter de la politique immobilière telle qu'elle a été engagée.

Nous avons distingué deux programmes, « Contribution au désendettement de l'État » et « Dépenses immobilières », tout en envisageant la possibilité d'élargir le compte aux opérateurs.

S'agissant des produits de cessions immobilières, d'aucuns se demandent si nous tiendrons notre objectif, c'est-à-dire 480 millions d'euros. La réponse est oui. Nous le tiendrons. Aujourd'hui, cela semble banal. Pourtant, je le rappelle, voilà deux ans, nous n'avions atteint que 100 millions d'euros. Puis, le montant de ces produits s'était élevé à 630 millions l'an dernier. Mais je vous rassure, nous tiendrons bien notre objectif cette année.

S'agissant des travaux, je prendrais des engagements très fermes à l'occasion de la discussion de l'amendement de la commission des finances, monsieur le rapporteur spécial.

Par ailleurs, je voudrais évoquer deux points sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».

D'abord, les entreprises publiques réalisent de bons résultats. Leur chiffre d'affaires augmente en moyenne de 5,7 % et leur résultat a doublé, pour atteindre 12,4 milliards d'euros.

Ensuite, j'ai déjà évoqué le fléchage des recettes sur la dette. Sur les 17 milliards d'euros de produits résultant de cessions de titres de sociétés détenues indirectement par l'État, 93 % seront affectés au désendettement en 2006, contre seulement, vous vous en souvenez, 40 % de 1997 à 2002.

Certes, ce n'est pas le moment de remuer le couteau dans la plaie, mais, lors de l'élection présidentielle, vous pourrez compter sur moi pour suggérer à la gauche de s'inspirer de notre modèle plutôt que de son propre bilan en la matière.

Vous avez également souligné que le programme annuel de performances ne précisait pas à la Société de valorisation des actifs ferroviaires immobiliers, ou SOVAFIM, les montants prévus pour les opérations relatives aux retraites de la RATP. Comment expliquer cela ?

D'abord, comme je l'ai indiqué à votre commission, les négociations avec la caisse nationale d'assurance vieillesse, la CNAV, et les régimes complémentaires sur le montant et le calendrier de versement des soultes d'adossement des retraites de la RATP ne sont pas terminées.

Ensuite, s'agissant de la SOVAFIM, les arrêtés de partage entre RFF et la SNCF qui déterminent en partie le périmètre des biens transférés à la SOVAFIM en 2007 n'ont été publiés que cette semaine. Il y avait donc quelques incertitudes au moment où nous avons remis le programme annuel de performances, le PAP.

Je suis personnellement très engagé sur ce sujet. Nous avons fait, je crois, un travail de très bonne qualité avec la SOVAFIM et RFF. Je veux profiter de cette occasion pour saluer leur travail, qui est conforme à ce que nous avions souhaité et aux engagements pris devant vous, monsieur Girod, et devant la Haute Assemblée.

Monsieur Bécot, vous vous étonnez qu'aucun crédit ne soit prévu pour financer le dispositif « France Investissement », annoncé par le Gouvernement, le 9 novembre dernier. Ce mécanisme permettra de financer les PME innovantes à hauteur de 500 millions d'euros par an pendant six ans et reposera sur un partenariat avec la Caisse des dépôts et consignations et des acteurs privés. L'État n'interviendra donc pas directement dans son financement.

Vous me demandez comment on justifie les 5 milliards d'euros de recettes du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».

D'abord, ces recettes sont toujours difficiles à évaluer. Les décisions de principe sur les cessions ne sont en général pas connues au moment de l'élaboration du projet de loi de finances, ce qui est normal. De ce point de vue, le cas de la privatisation des autoroutes était exceptionnel ; nous ne disposons pas toujours de telles précisions. Mais, même dans ce cas, le prix de vente demeure très volatile. Nous l'avons vu, nous l'avions fixé à un niveau plutôt plus bas que ce qui a été finalement réalisé.

Dans certains cas, lorsque les sociétés sont cotées, l'information doit rester confidentielle, pour des raisons évidentes.

Pour 2007, nous n'avons pas de projet totalement déterminé de cessions à ce jour. Les 5 milliards d'euros sont donc un chiffre évaluatif, qui correspond à environ 4 % de la valeur du portefeuille et à la moyenne des cessions depuis trente ans. Nous pouvons donc considérer cette évaluation comme raisonnable et prudente, du moins conforme aux exigences de sincérité budgétaire.

Vous le savez, c'est un principe auquel je suis aussi attaché que vous. Dans ce domaine, j'aurais même plutôt tendance à considérer qu'il vaut mieux être un peu en dessous qu'au dessus. C'est vrai tant pour les prévisions budgétaires de recettes que pour les prévisions de croissance économique. Je sais que M. le président de la commission des finances partage mon sentiment. (M. le président de la commission des finances acquiesce.)

Monsieur Detcheverry, vous avez abordé la question de l'immobilier. Le travail sur l'immobilier de l'État est un bon exemple de coproduction. Je suis bien d'accord avec vous. Nous en parlerons d'ailleurs dans quelques instants à propos de l'entretien, qui est un point important sur lequel j'aurai un certain nombre d'éléments à vous apporter.

S'agissant de la performance et des indicateurs concernant les garanties, il est très difficile de mesurer les effets de l'action des pouvoirs publics. Je souscris à votre analyse. La LOLF en est à ses débuts. Nous devons encore travailler sur cette question.

Monsieur Foucaud, sur ce sujet également, nous avons encore quelques divergences.

M. Jean-François Copé, ministre délégué. C'est dommage. Je pensais que nous n'en aurions pas aujourd'hui. Je me trompais ! (Sourires.)

Pour ma part, je ne considère pas la réduction de la dette comme un obstacle à la croissance, bien au contraire. D'ailleurs, tous les exemples dans les pays étrangers l'illustrent.

Permettez-moi de vous mentionner le cas du Canada. Monsieur Foucaud, j'aimerais beaucoup pouvoir vous emmener dans ce pays pour deux raisons.

D'abord, lorsque l'on voyage, on oublie les différences idéologiques que l'on se croit obligé d'afficher à Paris pour ne pas désespérer Billancourt.

Ensuite, quand on se déplace dans ce pays, on regarde la réalité sans a priori ; c'est une bonne occasion pour voir ce qui réussit. Ainsi, vous pourriez rencontrer utilement ceux qui ont porté la modernisation de l'État canadien dans les années quatre-vingt-dix ou quatre-vingt-quinze. Vous auriez l'occasion de vous en rendre compte. Ce qu'ils ont fait est tout à fait remarquable.

Par ailleurs, la réduction de la dette n'est pas antisociale. Au contraire, monsieur Foucaud, c'est un effort de solidarité envers nos enfants, dont nous ne pouvons pas préjuger par avance des choix de vie. Mais si nous leur léguons trop de dettes, ils devront s'en acquitter dès leur naissance. Mieux vaut donc leur laisser en héritage un pays assaini. C'est ce à quoi nous nous employons.

C'est pourquoi il est très important que nous puissions poursuivre notre action après le mois de juin prochain. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote sur l'ensemble des trois missions avant l'expiration du délai limite.