Article additionnel après l'article 12
Dossier législatif : proposition de loi relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur
Article 13 (fin)

Article 13

I. - Les charges pour l'État résultant de l'application des articles 2 à 11 sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

II. - Les charges pour les régimes obligatoires d'assurance maladie résultant des dispositions de la présente proposition de loi sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme la présidente. L'amendement n° 13, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Cet amendement a pour objet de lever le gage. Compte tenu du caractère primordial de ce sujet, il est important que chacun soit placé face à ses responsabilités. L'État, en ce qui le concerne, assume les siennes.

Le financement sera prévu dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008. En attendant, dès que le présent texte sera définitivement applicable, l'établissement public bénéficiera des contributions attribuées au Fonds de prévention des risques sanitaires, dont les biens, droits et obligations lui seront transférés en application de l'article 12 de la proposition de loi.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Francis Giraud, rapporteur. Avis très favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 13.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 13 est supprimé.

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix, modifiées, les conclusions du rapport de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi n° 90.

M. François Autain. Le groupe CRC s'abstient.

(La proposition de loi est adoptée.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, pour la deuxième fois en moins d'une semaine, un texte dont l'examen me vaut le plaisir d'être présent parmi vous au sein de cette assemblée ne fait l'objet d'aucun vote contre.

M. Claude Domeizel. Ça ne durera pas ! (Rires.)

M. Xavier Bertrand, ministre. Jamais deux sans trois ! (Nouveaux rires.) Nous verrons ce que nous réservera l'examen des prochains textes ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Je ne préjuge rien et j'ai bien compris qu'un vote ne laisse en rien présager la suite.

Par excellence, les sujets de santé et de sécurité sanitaire échappent parfois aux clivages politiques, aux barrières virtuelles qui, à l'occasion, séparent les travées de cette assemblée. À cet égard, je sais gré aux uns et aux autres du ton qu'ils ont adopté, au cours tant de la discussion générale que de celle des amendements.

Je remercie l'ensemble des intervenants, le président About et Francis Giraud, le rapporteur. J'en suis convaincu, nous avons fait oeuvre utile et notre pays sera maintenant mieux armé pour faire face aux crises sanitaires. N'allons pas croire que ce texte réglera tout de manière définitive, mais il témoigne d'une vraie prise de conscience et de la façon dont nous avons su tirer tous les enseignements des événements et des crises que nous avons connus. Il reste du travail à accomplir, mais j'ai le sentiment que, grâce à vous, mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons franchi un pas important. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Mme la présidente. Avant d'aborder le point suivant de l'ordre du jour, je vais suspendre la séance pendant quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt, est reprise à dix-sept heures trente.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 13 (début)
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10

Assurance de protection juridique

Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission

(Ordre du jour réservé)

 
Dossier législatif : proposition de loi relative aux contrats d'assurance de protection juridique
Article 1er

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport de M. Yves Détraigne, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sur la proposition de loi présentée par MM. Pierre Jarlier, Laurent Béteille, François-Noël Buffet, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, René Garrec, Patrice Gélard, Charles Guené, Jean-René Lecerf, Hugues Portelli, Henri de Richemont, Bernard Saugey et Mme Catherine Troendle relative aux contrats d'assurance de protection juridique et sur la proposition de loi présentée par M. François Zocchetto visant à réformer l'assurance de protection juridique (nos 160, 85 et 86).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

M. Yves Détraigne, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, l'assurance de protection juridique, dont le succès va croissant avec une progression des cotisations de plus de 8 % par an sur les cinq dernières années, a pour objet, en cas de litige, de garantir une prise en charge des frais de procédure exposés par l'assuré et de lui offrir une assistance en vue du règlement amiable de son différend.

Les principaux domaines dans lesquels intervient cette assurance concernent les litiges liés à la consommation de biens et services, les conflits du travail, les différends sur les prestations sociales ou encore sur la fiscalité, mais assez peu le pénal.

Les litiges relatifs à l'immobilier et à la consommation représentent plus de 50 % des sinistres déclarés aux assureurs alors que le droit des brevets, le droit des personnes et de la famille, ainsi que le droit de la construction sont le plus souvent exclus du champ couvert par ces assurances.

Avec un chiffre d'affaires estimé à un peu plus de 1 milliard d'euros, l'assurance de protection juridique ne représente encore que 0,5 % du marché des assurances. Son poids économique est donc encore relativement modeste, mais ses perspectives de développement s'avèrent prometteuses.

Toutefois, le fonctionnement actuel de cette assurance pose quelques problèmes, qui ont été soulevés en 2002 par la commission des clauses abusives. Celle-ci a notamment déploré les conditions trop restrictives de mise en jeu de la garantie et dénoncé les relations déséquilibrées qui existent entre les sociétés d'assurance, d'une part, les assurés et les avocats, d'autre part.

Des initiatives ont été prises depuis lors pour favoriser la transparence des contrats et mieux prendre en compte les attentes des consommateurs. Des discussions ont également eu lieu, sous l'égide du ministère de la justice, depuis 2003 pour tenter, malheureusement sans succès, de rapprocher les positions des avocats et des assureurs.

C'est afin de remédier à ce blocage que nos collègues Pierre Jarlier, avec plusieurs cosignataires, et François Zocchetto ont déposé chacun une proposition que la commission des lois a examinée et complétée et dont je vous rapporte aujourd'hui les conclusions au travers d'un texte commun.

Celui-ci a d'autant plus d'importance qu'il s'inscrit dans le cadre d'une démarche visant à faciliter l'accès au droit et à la justice, thème ô combien important pour lequel, monsieur le garde des sceaux, vous avez d'ailleurs souhaité organiser des assises, qui auront lieu la semaine prochaine.

Ce texte, en apportant des aménagements limités au régime de l'assurance de protection juridique, a principalement pour objet de préciser les conditions dans lesquelles la garantie est engagée et de clarifier les relations entre toutes les parties en présence : assurés, assureurs et avocats.

L'article 1er de la proposition de loi vise à faciliter l'intervention de l'avocat à tous les stades du déroulement d'un litige en rendant obligatoire sa saisine par l'assuré dès lors que la partie adverse est elle-même défendue par un membre de cette profession. Il s'agit donc simplement de rétablir « l'égalité des armes » en permettant à l'avocat d'intervenir, le cas échéant, dès la phase amiable, qui est souvent assurée aujourd'hui directement par les services juridiques de l'assureur.

Ce même article autorise également l'assuré à solliciter une consultation juridique ou des actes de procédures avant même d'avoir déclaré le sinistre, sans que, pour autant, l'assureur puisse lui opposer la déchéance de garantie pour ce motif, contrairement à ce qui se pratique parfois un peu trop facilement aujourd'hui. Bien évidemment, l'assureur ne serait pas tenu de prendre en charge les frais résultant des consultations ou des actes effectués par l'assuré préalablement à la déclaration du sinistre, sauf dans les cas où l'urgence aurait justifié ces démarches préalables.

Toujours avec le même objectif d'éviter que ne soit trop facilement opposée la déchéance de garantie à l'assuré, l'article 1er donne une définition claire du sinistre en indiquant qu'il est constitué par le refus qui est opposé à une réclamation dont l'assuré est l'auteur ou le destinataire. Ce dispositif vise à préserver les droits du consommateur et à empêcher l'assureur de contester la date de survenance du litige pour refuser de mettre en jeu la garantie.

Les articles 2 et 3 ont pour objet de préserver le caractère libéral de l'intervention de l'avocat dans la gestion du sinistre. L'article 2 réaffirme la liberté de choix de l'avocat en indiquant que l'assureur ne peut proposer le nom d'un avocat à l'assuré sans que celui-ci en ait fait la demande écrite. L'article 3 rappelle le principe de libre fixation des honoraires entre l'avocat et son client.

Au-delà de ces dispositions, la commission des lois a souhaité compléter le texte proposé par nos collègues pour permettre la transposition, dans le code de la mutualité, des dispositions insérées dans le code des assurances que je viens de vous présenter. En effet, même si leur place est aujourd'hui limitée, les mutuelles participent aussi au marché de l'assurance de protection juridique.

La commission a également prévu d'insérer dans ce texte le principe selon lequel les sommes attribuées en remboursement des frais exposés pour le règlement d'un litige doivent bénéficier prioritairement à l'assuré pour les dépenses restées à sa charge et, subsidiairement, à l'assureur dans la limite des sommes qu'il a engagées. Certaines dérives ayant été constatées en ce domaine, il apparaît en effet nécessaire que le législateur rappelle cette règle d'équité.

Enfin, la commission des lois a jugé indispensable de prévoir une articulation entre l'aide juridictionnelle et l'assurance de protection juridique, en précisant que l'aide juridictionnelle ne peut être accordée lorsque les frais qu'elle vise à couvrir sont déjà pris en charge au titre d'un contrat d'assurance de protection juridique. Il est certain que les deux systèmes d'accès à la justice que sont l'aide juridictionnelle - accordée aux plus démunis - et l'assurance de protection juridique se recouvrent peu et que le bon fonctionnement de ce dispositif nécessitera un travail de vérification systématique de la part des bureaux d'aide juridictionnelle. Mais, compte tenu du nombre croissant de personnes éligibles à l'aide juridictionnelle et de la forte inflation de ce poste dans le budget de la justice - celui-ci a augmenté de 63 % entre 1998 et 2006 -, il convient d'apporter cette précision.

Je n'ignore pas que cette proposition de loi provoque des réactions, notamment chez les assureurs. Elle risque, nous dit-on, de perturber sensiblement le fonctionnement d'un système qui donne toute satisfaction à ses utilisateurs et de conduire à une détérioration des conditions d'accès au droit et à la justice de nos concitoyens dans la mesure où l'intervention plus systématique de l'avocat entraînera une augmentation du coût des interventions et une hausse des primes sur les contrats d'assurance de protection juridique. Cette proposition de loi remettrait également en cause le caractère aléatoire du risque en ouvrant la voie à une couverture de sinistres antérieurs à la souscription de l'assurance et ferait peser une menace sur la mission assurée aujourd'hui, en phase amiable, par les salariés juristes des compagnies d'assurances.

Je voudrais, sur ces différents points, rappeler que le texte que nous examinons n'apporte que des aménagements ponctuels au régime de l'assurance de protection juridique pour remédier à certaines critiques, telles que le manque de transparence et de lisibilité des contrats, le positionnement marginal des avocats et les réticences opposées par les assureurs à la mise en jeu de la garantie, mais ne vise pas à remettre en cause le régime de l'assurance de protection juridique.

La définition du sinistre qui est proposée permettra ainsi de donner une date certaine au point de départ du délai dans lequel l'assuré doit faire sa déclaration et lui évitera de se voir opposer la déchéance de garantie pour déclaration tardive alors qu'il n'aurait, par exemple, pas identifié immédiatement l'origine du sinistre ou qu'il aurait constaté le défaut de la chose livrée depuis quelques semaines mais se serait d'abord adressé à son fournisseur pour tenter d'y remédier avant de saisir son assureur. Vouloir éviter que l'assuré soit déchu de sa garantie pour des motifs de ce type me paraît être plus une mesure de bon sens et d'équité qu'une disposition qui révolutionnerait le droit des assurances, d'autant qu'il est précisé que, bien entendu, l'assureur n'aura pas à supporter le coût de ces démarches préalables.

Faire intervenir un avocat dès lors que la partie adverse est elle-même représentée par un membre de cette profession ne remettra pas non plus en cause le rôle que jouent les services juridiques de l'assureur, tels la délivrance de renseignements par téléphone, le conseil, la consultation juridique ou encore la transaction amiable.

D'ailleurs, ces services fonctionnent bien, puisque 70 % des litiges font aujourd'hui l'objet d'un règlement amiable et que le taux de satisfaction des assurés est élevé. Il s'agit donc simplement de rétablir l'équilibre entre les parties en présence et non pas de porter systématiquement devant les tribunaux un litige qui pourrait être avantageusement réglé par une transaction amiable. La procédure judiciaire ne constitue plus la voie unique de résolution des conflits pour les avocats, comme le montre l'évolution de leurs pratiques professionnelles.

Au demeurant, la liberté que conservent évidemment les assureurs de fixer dans les contrats d'assurance de protection juridique un plafond à la prise en charge des honoraires d'avocats limitera ce risque de dérive, tout comme le fait que la plupart des assurés n'ont généralement pas d'avocat attitré et que l'assureur pourra toujours proposer le nom d'un avocat avec lequel il a l'habitude de travailler à l'assuré, dès lors que celui-ci lui en aura fait la demande écrite.

Bien évidemment, l'intervention plus systématique de l'avocat dans le règlement du litige, la liberté de choix de l'avocat par l'assuré et la libre fixation des honoraires entre l'avocat et ce dernier peuvent conduire à une augmentation globale des charges supportées par l'assureur et, par voie de conséquence, des primes réclamées aux assurés. Mais, il convient de le rappeler, ce dispositif ne remet pas en cause la possibilité pour les assureurs de fixer des limitations contractuelles au remboursement des honoraires d'avocats et, dès lors que les clauses contractuelles seront parfaitement claires sur l'étendue des prestations offertes, des frais pris en charge par l'assureur et de ceux qui restent à la charge de l'assuré, ce dernier sera parfaitement à même de se déterminer sur l'étendue de la garantie qu'il souhaite et sur ce qu'il est donc prêt à payer, ainsi que sur le choix à faire entre une transaction amiable et une procédure judiciaire longue et incertaine.

Telles sont, madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, les observations que je souhaitais formuler avant que nous abordions l'examen de ce texte, qui s'inscrit, je le rappelle, dans une démarche souhaitable de facilitation de l'accès au droit et à la justice et dont je remercie nos collègues Pierre Jarlier et François Zocchetto d'avoir pris l'initiative. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, en dépit de la place croissante du droit dans notre société, il est étonnant de constater combien l'assurance de protection juridique est restée jusqu'à présent à l'écart de l'incessante évolution du code des assurances.

Les sept articles qui régissent la matière sont demeurés inchangés depuis dix-sept ans alors même qu'il est avéré qu'ils sont insuffisants.

La diffusion de l'assurance de protection juridique est pourtant soutenue. De fait, la demande potentielle est loin d'être comblée : de plus en plus de particuliers ont conscience que seule une connaissance éclairée de leurs droits permet des rapports équilibrés avec leur bailleur, leur banquier, voire leur assureur...

À ceux d'entre eux dont les revenus sont suffisants pour les exclure de l'aide juridictionnelle, mais que les frais d'un procès peuvent dissuader de faire valoir leurs droits en justice, l'assurance de protection juridique est particulièrement adaptée.

Ainsi, nos voisins belges ont défini avec les autorités publiques les caractéristiques types d'un contrat d'assurance. Celui-ci couvre la plupart des litiges de la vie courante que rencontrent les classes moyennes. Cette garantie leur est très adaptée et les professionnels du secteur s'accordent à dire que le marché est encore amené à progresser significativement.

La clientèle des particuliers n'est au surplus que l'un des éléments à prendre en compte. Le nombre d'entrepreneurs et de PME qui, faute de moyens suffisants pour disposer de leurs propres services juridiques, font appel à cette assurance ne cesse de croître.

Les règles actuelles du code des assurances résultent d'une directive européenne de 1987 qui permet aux législateurs nationaux d'en améliorer le régime en faveur des assurés. La transposition de cette directive en 1989 avait déjà représenté un net progrès en regard des règles alors applicables. Depuis lors, le développement de cette garantie a permis de révéler le caractère flou et laconique de certaines de ses dispositions.

Je souhaite pourtant rendre hommage dès à présent à ceux qui oeuvrent au succès de cette couverture.

Je pense d'abord aux assureurs, qui ont su faire évoluer leurs pratiques au cours de la décennie passée, et tout particulièrement dans les dernières années.

La concertation approfondie que la Chancellerie a engagée avec la profession, avec l'aide du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, a permis de révéler des améliorations possibles que les assureurs ont mises en oeuvre. Il s'agit notamment des engagements que la Fédération française des sociétés d'assurance a pris au mois de juin 2003, suivie par le Groupement des entreprises mutuelles d'assurance. Ces engagements ont permis d'apporter une clarification décisive aux contrats proposés. Ils témoignent également de l'attention que prête la profession aux observations des consommateurs et des pouvoirs publics.

Plus récemment, afin de contribuer à la réflexion entreprise sur la question au sein de la Chancellerie, les représentants de la profession ont demandé à M. Jean-Paul Bouquin de réaliser une étude approfondie sur les perspectives d'évolution de cette assurance. Ce travail a été utile à l'ensemble des pouvoirs publics, puisqu'il a notamment permis de chasser nombre d'idées reçues en la matière.

Parmi les professionnels qui ont permis de faire progresser cette garantie, je veux évoquer également les avocats. Je pense en particulier à la transparence et à la rigueur accrues concernant la fixation de leurs honoraires, dont la pratique a été consacrée par un décret de 2005 relatif aux règles déontologiques de la profession.

L'addition de l'ensemble de ces améliorations a permis, à législation constante, de modifier la pratique de l'assurance de protection juridique.

Les réunions de concertation qui se sont tenues ces dernières années à la Chancellerie se sont prolongées durant une année sous l'égide du Comité consultatif du secteur financier, que mon collègue Thierry Breton a opportunément saisi. C'est notamment dans son enceinte qu'a été pensée et précisée une procédure d'arbitrage particulièrement novatrice lorsqu'un désaccord survient entre l'assureur et son client sur l'opportunité d'engager une procédure judiciaire.

Si je ne peux que me réjouir des avancées évoquées, je dois aussi constater que la concertation a achoppé sur certains points essentiels. Nous sommes probablement arrivés à un stade où la mutation progressive de l'assurance de protection juridique appelle désormais une redéfinition de son assise juridique.

Les deux propositions de loi que MM. Jarlier et Zocchetto ont déposées sur le bureau de votre assemblée arrivent par conséquent à point nommé pour faire arriver à maturité ce produit d'assurance. Ces textes prennent en effet de manière efficace et concrète le relais des négociations que le Gouvernement avait entreprises pour conduire la réforme à son terme. Les ajouts que votre commission des lois y a apportés parachèvent ce travail et confèrent à l'assurance de protection juridique le cadre juridique clair qui lui manquait jusqu'à présent.

Un cadre juridique clair, c'est en premier lieu une définition précise des conditions dans lesquelles l'assureur doit donner sa garantie. La commission des clauses abusives a dénoncé en 2002 la latitude que s'accordent certains assureurs en refusant leur garantie au prétexte que l'assuré n'aurait pas déclaré à temps le litige.

Dès lors qu'il est loisible à l'assureur de faire remonter le litige suffisamment en amont de la déclaration de sinistre pour pouvoir prononcer une déchéance de garantie, l'assuré est placé dans une situation d'insécurité juridique à laquelle il faut remédier.

Il est en effet parfois difficile de caractériser le début d'un litige. En matière de trouble de voisinage, pour ne prendre que cet exemple, il est le plus souvent vain de préciser à quel stade le conflit est véritablement apparu. Votre proposition permet de fixer les parties sur ce point en adoptant comme définition du sinistre le refus qui est opposé à une réclamation dont l'assuré est l'auteur ou le destinataire.

Comme le relève justement la commission, ce dispositif préserve en outre pleinement les droits de l'assureur, dans la mesure où il permet au juge de relever la fraude dès lors qu'un assuré aurait souscrit une protection juridique pour un litige déjà en germe au moment de la souscription du contrat. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est très favorable à cette disposition.

Un cadre juridique clair, c'est également une définition sans ambiguïté des rôles de chacun. Il ne saurait être question de priver l'assureur de son rôle de conseil, y compris sur le plan juridique. Bon nombre de conflits sont en effet résolus grâce à l'intervention rapide de l'assureur et grâce à la compétence de ses services juridiques.

Il est cependant évident que cette assistance ne peut suffire lorsque l'adversaire de l'assuré est lui-même conseillé par un avocat.

Dans ce cas, un avocat doit prendre le relais de l'assureur. C'est une question d'égalité des armes, mais aussi, comme le relève la commission des lois, la garantie que les parties seront placées dans les conditions les plus propices à un accord. En effet, seuls les échanges entre avocats sont confidentiels, ce qui permet à chacun de faire les concessions nécessaires à une transaction.

Un cadre juridique clair, c'est encore l'affirmation du caractère libéral de la profession d'avocat. Qu'il soit rémunéré par un assureur, par l'État au titre de l'aide juridictionnelle ou par son client, l'avocat ne doit rendre compte qu'à ce dernier. Or il lui est difficile de tenir cette ligne de conduite lorsqu'il ne négocie ses honoraires qu'avec l'assureur, comme c'est le cas actuellement pour les avocats dont on dit qu'ils sont dans le « réseau » d'une compagnie d'assurances. Il s'instaure dans ce cas un quasi-salariat qui donne une place prépondérante à l'assureur, alors que l'avocat devrait uniquement se soucier des intérêts de son client.

Chacun le mesure : la défense qui convient à l'assureur n'est pas nécessairement celle qui est la plus adaptée à l'assuré. Le premier veillera en effet à limiter les frais de procédure, les mesures d'expertise et l'exercice des voies de recours, tandis que le second voudra, très légitimement, employer tous les moyens légaux pour faire valoir ses droits.

Bref, il faut en revenir à l'esprit de la directive de 1987, dont l'axe cardinal est l'indépendance de l'avocat. Cette indépendance se traduit par un libre choix effectif du conseil, ce qui n'a été jusqu'à présent, en pratique, qu'un voeu pieux.

Le texte proposé s'inscrit à cet égard dans la pleine réalisation de nos engagements communautaires.

Après ces nécessaires clarifications, la commission des lois propose de consacrer la subsidiarité de l'aide juridictionnelle à l'égard de l'assurance de protection juridique. Je suis tout à fait favorable à cette disposition.

Comme vous le soulignez, ce principe n'est pas inédit en droit interne, puisqu'il a été inscrit dans le dispositif de l'aide juridictionnelle par la loi du 4 juillet 2005 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire, dans le cadre de litiges transfrontaliers civils ou commerciaux.

La France s'aligne ainsi sur un dispositif déjà pratiqué par nombre de ses voisins européens, qui permettra de réserver le bénéfice de l'aide juridictionnelle à des personnes dépourvues de tout moyen ou soutien financier.

Dans un contexte d'accroissement sans précédent du budget de l'aide juridictionnelle depuis 2000, l'assurance de protection juridique est appelée à jouer un rôle complémentaire.

Pour prendre un exemple, le contentieux des baux d'habitation et professionnels a été à l'origine de plus de onze mille décisions d'admission à l'aide juridictionnelle en 2004. Or la plupart de ces contentieux auraient pu être pris en charge par la protection juridique, qui est le plus souvent attachée à l'assurance multirisque habitation.

Le texte qui est aujourd'hui proposé permet d'engager, de manière équilibrée et réfléchie, l'assurance de protection juridique dans une nouvelle phase. Je suis particulièrement sensible à l'amélioration de l'accès au droit et à la défense de qualité qu'il va permettre.

Je ne doute pas qu'il contribuera également à favoriser la transaction par rapport au contentieux, à clarifier les droits de l'assuré et à réduire la pression particulière qui s'exerce sur le budget de l'aide juridictionnelle.

Pour l'ensemble de ces raisons, le texte fait l'objet d'une pleine adhésion du Gouvernement, au nom duquel je tiens à saluer MM. Jarlier et Zocchetto pour l'initiative qu'ils ont prise en déposant leurs propositions de loi. Je veux aussi remercier votre rapporteur, M. Détraigne., car les auditions qu'il a organisées et l'attention dont il a fait preuve ont permis à la commission des lois d'apporter aux questions posées les solutions les plus adaptées.

Au terme de mon exposé, je souhaite préciser que quatre amendements relatifs à l'aide juridictionnelle sont soumis par le Gouvernement à l'approbation de votre assemblée.

Il s'agit d'abord de ratifier l'ordonnance du 8 décembre 2005 modifiant la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, qui permet, d'une part, de ne pas tenir compte, lors d'une demande d'aide juridictionnelle, des ressources des parents du mineur poursuivi pénalement lorsque ces derniers manifestent un défaut d'intérêt à son égard, et, d'autre part, de simplifier la procédure de recouvrement des honoraires mis à la charge de la partie perdante par le juge au profit de l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale.

Il s'agit ensuite d'organiser la centralisation devant les cours d'appel des recours contre les décisions des bureaux d'aide juridictionnelle, ce qui permettra d'harmoniser la jurisprudence en la matière ; cette mesure est très attendue.

Il s'agit encore de permettre la rétribution, au titre de l'aide juridictionnelle, d'une nouvelle mission non indemnisée jusqu'alors : l'assistance par un avocat d'une personne détenue faisant l'objet soit d'une procédure de placement à l'isolement d'office, soit, à sa demande, d'une mesure de levée d'un placement à l'isolement.

Il s'agit enfin d'étendre aux personnes contestant une mesure de refus de titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français, créée par la loi du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration, la possibilité de bénéficier de l'aide juridictionnelle, sans condition de résidence habituelle et régulière sur le territoire national. Cette dernière condition n'est pas exigée des personnes exerçant un recours contre un arrêté de reconduite à la frontière.

Ces amendements compléteront utilement le dispositif actuel de l'aide juridictionnelle dans le sens d'une plus grande simplification de la procédure, d'une harmonisation des décisions et d'un renforcement de l'accès au droit des personnes les plus démunies. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UC-UDF.)

Mme la présidente. La parole est à M. Charles Gautier.

M. Charles Gautier. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'assurance de protection juridique permet aujourd'hui de fournir à l'assuré des services visant d'abord à rechercher une solution amiable, puis à prendre en charge, si un procès est nécessaire, les frais entraînés par la procédure.

Cette assurance peut rendre service à un public très varié. Il s'agit souvent de personnes trop riches pour bénéficier de l'aide juridictionnelle d'État, mais trop pauvres pour supporter seules les frais d'un procès, donc de la grande majorité des Français. Par conséquent, c'est bien de l'accès au droit pour le plus grand nombre qu'il est question.

Le texte proposé, sous couvert d'objectifs apparemment louables, est cependant porteur de risques flagrants.

Ainsi, ce qui apparaît en premier, c'est le recours multiplié aux avocats, notamment dans la phase amiable, ce qui ne manquera pas d'entraîner un renchérissement des primes d'assurance.

Par ailleurs, un tel renchérissement ne peut que se voir accru par l'interdiction des conventions d'honoraires proposée par le présent texte. Les tarifs augmentés constitueraient alors, bien évidemment, une gêne pour les assurés. Une sorte de sélection par l'argent viendrait ainsi diminuer le nombre de ces derniers, ce qui entraînerait une baisse du bénéfice évoqué. La disposition risquerait donc d'avoir des conséquences fâcheuses pour le personnel juridique des sociétés d'assurance.

Il paraît en outre certain que la présence de l'avocat dans la phase amiable conduirait à une augmentation du nombre de procédures. Aujourd'hui, on estime que 70 % des dossiers se règlent à l'amiable. Si, demain, la proportion n'est plus que de 20 % ou 30 %, les juridictions pourront-elles faire face ?

Par ailleurs, les assureurs de protection juridique concourent, depuis quelques années, au développement des modes alternatifs de règlement des litiges, notamment la médiation. On peut craindre, là encore, un coup d'arrêt à ces pratiques, d'où un nouveau risque d'engorgement des tribunaux !

Tout porte donc à penser que beaucoup ont ici à y perdre : les citoyens, qui ne pourront plus bénéficier de l'assurance de protection juridique, ce formidable moyen d'accès au droit dont nous nous félicitions tout à l'heure, les avocats, qui seront victimes du recul de l'assurance de protection juridique, mais aussi l'État, qui devra financer un recours accru à l'aide juridictionnelle.

L'initiative paraît donc finalement assez vaine, voire dangereuse.

Enfin, dans la mesure où le comité consultatif du secteur financier est saisi pour rendre un avis sur l'assurance de protection juridique, ce serait la moindre des choses, me semble-t-il, d'attendre communication de cet avis, annoncé d'ailleurs comme étant imminent, avant que nous nous prononcions définitivement.

C'est pourquoi le groupe socialiste votera contre les conclusions proposées.

Mme la présidente. La parole est à M. François Zocchetto.

M. François Zocchetto. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le contexte dans lequel Pierre Jarlier et moi-même avons déposé nos propositions de loi respectives est celui de l'accès au droit.

Je précise en effet d'emblée, pour répondre à des critiques que je viens d'entendre, mais qui sont également parues dans la presse, que le problème dont nous traitons ce soir est non pas celui de la fragilisation de la profession d'avocat ou de sa supposée paupérisation, mais bien celui de l'accès au droit de nos concitoyens, qui doivent bénéficier d'une égalité de traitement en matière de résolution des litiges, notamment ceux qui appartiennent à ce qu'il est convenu d'appeler les classes moyennes, bien souvent interdites d'accès à l'aide juridictionnelle sans avoir pour autant les moyens d'assumer les frais d'un procès.

Qui dit accès au droit dit aussi transparence. En d'autres termes, il importe non seulement que le traitement soit le même pour tous, mais aussi que chacun comprenne le traitement dont il fait l'objet.

Enfin, la clarté maximale doit prévaloir lorsque l'on est partie à un litige.

Ces propositions de loi visent donc à permettre aux consommateurs de mieux accéder au droit.

Deux moyens principaux se complètent, comme l'a rappelé le garde des sceaux. Il s'agit, d'abord, d'un meilleur traitement de l'aide juridictionnelle, avec une revalorisation des indemnités d'aide juridictionnelle, et, ensuite, de la mise en place d'une véritable protection juridique. Si nous avons la chance, en France, de posséder un système de protection juridique, ce dernier ne donne pas à ce point satisfaction que nous puissions en rester là.

Il me semble utile de faire un bref rappel au sujet de l'aide juridictionnelle, bien que ce ne soit pas l'objet de notre débat ce soir.

Entre 2002 et 2006, alors que le nombre d'affaires traitées par les tribunaux était relativement stable, celui des missions d'aide juridictionnelle a augmenté de 7 % par an, ce qui montre bien la proportion croissante des missions dont le coût est assumé par l'État.

Qu'en est-il de la revalorisation des unités de valeur en matière d'aide juridictionnelle, c'est-à-dire de la rémunération des avocats ?

Entre 2000 et 2005, l'unité de valeur a augmenté de 2 %, c'est-à-dire quatre fois moins que les prix à la consommation. En outre, comme cela a été rappelé par les rapporteurs lors de l'examen des crédits relatifs à la mission « Justice » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2007, depuis deux ans, l'absence de rétribution de certaines missions est à déplorer. À cet égard, je salue les amendements du Gouvernement, qui visent à étendre le champ d'action de l'aide juridictionnelle.

Notre dispositif est donc très fragilisé, ce qui est paradoxal. En effet, si notre pays consacre à l'aide juridictionnelle globalement beaucoup d'argent, et de plus en plus, ce qui le place au deuxième rang de l'Union européenne dans ce domaine, la rémunération, en termes d'unité de valeur, est l'une des plus faibles non seulement au sein de l'Union européenne, mais peut-être même à l'échelon mondial.

Pour conclure sur ce sujet, je salue l'initiative prise par M. le garde des sceaux, qui organise mardi prochain les assises de l'aide juridictionnelle, tout comme je me félicite de l'initiative du Parlement, soutenue par le Gouvernement, visant à revaloriser les unités de valeur, sur la proposition du rapporteur pour avis de la commission des lois, Yves Détraigne, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2007.

Pour en venir au dispositif d'assurance de protection juridique lui-même, il faut rappeler qu'il est largement ignoré des consommateurs. Le problème tient sans doute au fait que cette prestation peut être tantôt autonome, tantôt liée à un autre contrat.

Il ne s'agit pas d'une question abstraite, tant il est vrai qu'environ 35 % des ménages bénéficient aujourd'hui d'une assurance de protection juridique et que de plus en plus d'élus locaux - cela devrait intéresser le Sénat - ont souscrit volontairement des assurances de ce type.

Il reste que l'information fait défaut quant au champ d'application et au fonctionnement des contrats de protection juridique.

Certes, les spécialistes de l'assurance diront que la protection juridique ne constitue qu'une branche mineure de l'assurance, puisqu'elle représente 1 % de l'assurance dommage, soit 600 millions d'euros de chiffre d'affaires par an.

Toutefois, sachant que chaque ménage consacre actuellement près de 60 euros par an à cette protection juridique, on ne peut considérer cette dernière comme un instrument accessoire.

Pour autant, j'en ai conscience, toute modification concernant la protection juridique constitue un exercice délicat car, d'un côté, l'assurance de protection juridique possède un fort potentiel de développement que les compagnies d'assurances sont les premières à reconnaître et à encourager et, de l'autre, les imbrications de la mise en oeuvre de la protection juridique avec les règles de fonctionnement de la profession d'avocat sont nombreuses.

Aussi, je salue sincèrement les efforts du Gouvernement, qui a conduit depuis plusieurs mois des négociations difficiles avec les compagnies d'assurances et les avocats, mais aussi avec les services du ministère des finances.

Ces négociations ont conduit à une reconnaissance mutuelle entre les différents acteurs de la protection juridique et nous ont permis, à Pierre Jarlier et à moi-même, de déposer nos textes à point nommé, puisque, grâce à ces avancées, nous pouvons aujourd'hui nous comprendre.

Sans revenir en détail sur le texte, je précise simplement qu'il vise à donner une définition plus claire du sinistre, à rappeler le caractère libéral de l'intervention de l'avocat, avec le choix du conseil et la fixation de la rémunération.

Le rapport de la commission, fruit du travail très intéressant accompli par le rapporteur, constituera, me semble-t-il, une base de référence pour les semaines et les mois à venir.

Parmi ses apports, je relève notamment la proposition tendant à rendre l'aide juridictionnelle subsidiaire par rapport à la protection juridique dans un souci de meilleure gestion des deniers de l'État, la subrogation de l'assuré dans la perception des sommes qui seraient dues par la partie défaillante au procès et, enfin, l'alignement du code de la mutualité sur le code de l'assurance - comment n'y avions-nous pas pensé ? Nous pouvons nous en vouloir ! (Sourires.)

Par ailleurs, les amendements du Gouvernement complètent opportunément le dispositif.

Je ne saurais terminer sans remercier ceux qui ont participé à l'élaboration du calendrier parlementaire et qui ont accepté d'inscrire ces textes à l'ordre du jour de nos travaux.

Je souhaite qu'une majorité du Sénat - puisqu'il semble que ce sujet ne recueille malheureusement pas le consensus que j'espérais - donne une nouvelle chance à l'assurance de protection juridique et à l'accès au droit de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Jarlier.

M. Pierre Jarlier. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, ma proposition de loi répond, à mon sens, à une double volonté et à une double nécessité. Il s'agit, d'une part, de rendre la protection juridique plus effective, plus accessible et plus transparente pour le consommateur - ce n'est pas le cas aujourd'hui, mon cher collègue Charles Gautier- et, d'autre part, de permettre aux avocats d'exercer pleinement leur mission dans ce cadre.

Nous vivons dans un monde de plus en plus complexe, parfois hostile, et sommes de plus en plus confrontés à une judiciarisation de notre vie quotidienne.

Les raisons en sont multiples et je ne les aborderai pas ici, car ce n'est pas le sujet de ce jour. Mais rappelons-nous, malgré tout, que la complexité croissante de notre législation, associée à une évolution des mentalités plus exigeantes au regard du droit, est à l'origine de cette évolution constante.

C'est cette montée en puissance du contentieux dans le quotidien des Français qui explique le succès grandissant des contrats de protection juridique proposés par les assurances. C'est, en effet, un moyen privilégié d'accès au droit et à la justice pour tous et non limité par manque de moyens.

Le régime de l'assurance de protection juridique est défini par les articles L. 127-1 et suivants du code des assurances. Il procède notamment de la transposition de la directive européenne du 22 juin 1987.

C'est un dispositif en pleine expansion qui offre des avantages multiples.

En effet, même si elle est facultative, cette assurance est d'un champ très vaste : il couvre à la fois les litiges occasionnés dans les domaines de la consommation, du service, du droit du travail ou de la fiscalité, mais aussi ceux du domaine pénal, dans certaines conditions.

La gamme des contrats offerts aux particuliers est donc très large et les primes, proportionnelles à l'étendue de la couverture, sont d'un montant annuel très variable.

Ces contrats sont régis par plusieurs principes : l'individualisation obligatoire de la garantie et de la prime, les modalités de règlement en cas de désaccord entre l'assureur et l'assuré sur les mesures à prendre et, enfin, le droit pour l'assuré de choisir un avocat ou une personne de son choix pour défendre ses intérêts.

Dans ce cadre, l'assureur apporte donc de véritables prestations de services juridiques, qui peuvent être directement gérées par lui-même, pour 66 % des cas, par un avocat, pour 32 % des cas, et par l'assuré lui-même, pour 2 % des cas.

Outre ces prestations, l'assureur a vocation à prendre en charge également les frais liés au règlement du litige, mais les sommes engagées par l'assurance sont limitées. En effet, le dédommagement par litige est plafonné, le remboursement d'avocat est limité et les contrats fixent, en général, des seuils d'intervention.

Néanmoins, ce type de contrat présente des avantages indéniables au regard de l'accès au droit. D'abord, le rôle de l'assureur est très actif en phase amiable pour favoriser un règlement rapide des litiges. Ensuite, ce type de garantie peut constituer le complément efficace de l'aide juridictionnelle.

Pour autant, l'assurance de protection juridique, telle qu'elle est pratiquée, a suscité de vives critiques de la part de la Commission des clauses abusives, dans la recommandation qu'elle a adoptée le 2 février 2002, comme le rapporteur l'a indiqué tout à l'heure.

En premier lieu, ladite commission constate un manque de transparence et de lisibilité pour l'assuré, au point que ce dernier ignore parfois qu'il bénéficie d'une protection juridique, et d'un manque de connaissance de la nature de l'étendue des garanties auxquelles il a droit.

En second lieu, les acteurs naturels de la défense des justiciables - les avocats - sont marginalisés dans l'exercice de la protection juridique.

Cette situation n'est pas satisfaisante pour au moins deux raisons.

Tout d'abord, l'avocat est souvent absent de la phase amiable du litige, alors qu'il peut apporter une aide précieuse à ce stade tout en garantissant indépendance et secret professionnel.

Ensuite, le marché de l'assurance de protection juridique est capté par quelques professionnels liés aux réseaux des assureurs.

En effet, en dépit du libre choix théorique de l'avocat par l'assuré, ce dernier est le plus souvent désigné par la société d'assurance, qu'elle soit mutualiste ou non.

Une telle situation place inéluctablement l'avocat dans une situation de subordination à l'égard des assureurs.

Enfin, les assureurs manifestent certaines réticences quand il s'agit de faire jouer la garantie, notamment au regard des délais de déclaration de litiges par les assurés.

Cette situation provoque des mécontentements, voire des déceptions chez les assurés quant aux garanties auxquelles ils croient pouvoir prétendre ; mais elle suscite aussi la légitime frustration des avocats, profession qui se sent injustement écartée d'un secteur d'activité pourtant de plus en plus utile.

C'est la raison pour laquelle, avec plusieurs de mes collègues, j'ai pris l'initiative de déposer cette proposition de loi, identique à celle qu'a présentée tout à l'heure notre collègue M. Zocchetto.

Il m'a en effet paru essentiel de clarifier les conditions dans lesquelles la garantie d'un contrat peut être engagée : c'est le sens de l'article 1er ; d'encadrer les moyens de recommandation d'un avocat à l'assuré : c'est l'objet de l'article 2 ; enfin, de réviser le régime de fixation des honoraires de l'avocat pour garantir une réelle liberté de choix de l'avocat par l'assuré, conformément à la recommandation de la Commission des clauses abusives du 21 février 2002, c'est ce à quoi tend l'article 3.

L'article 1er clarifie d'abord les motifs de déchéance de la garantie du contrat en déterminant le point de départ de la déclaration du sinistre et sa définition : « Est considéré comme sinistre [...] le refus qui est opposé à une réclamation dont l'assuré est l'auteur ou le destinataire. » Le point de départ de la déclaration du sinistre correspond donc à la date à laquelle il est constitué, et ce pour éviter une déchéance de la garantie en cas de déclaration tardive, comme cela arrive fréquemment.

Dans ce même article, les obligations réciproques de l'assureur et de l'assuré avant la déclaration de sinistre sont codifiées. En effet, le droit en vigueur n'apporte aucune précision sur ce point, et des pratiques défavorables à l'assuré se sont développées à la faveur de ce vide juridique. Ainsi, toute clause prévoyant la déchéance de la garantie en cas de consultation ou d'actes de procédure antérieurs à la déclaration du sinistre sera interdite. Cependant, dans un souci d'équilibre, et pour limiter les conséquences financières de ces consultations pour l'assurance, il est précisé que celles-ci sont exclues de la prise en charge au titre de la garantie. Une situation d'urgence pourra néanmoins être invoquée pour tenir compte des cas où l'assuré doit agir sans délai pour protéger ses intérêts, comme cela peut se produire en cas de comparution immédiate.

Enfin, le dernier alinéa de l'article 1er définit les conditions dans lesquelles l'intervention de l'avocat est obligatoire. Il est destiné à assurer une égalité entre les parties en litige et une confidentialité de leurs échanges favorable à la conclusion d'une éventuelle transaction.

L'article 2 clarifie les modalités du choix de l'avocat par l'assuré pour rendre plus effective cette faculté - cette liberté, surtout. Ainsi, l'orientation vers l'avocat recommandé par l'assureur sur la seule demande écrite de l'assuré permettra d'établir avec certitude que la désignation faite par ce dernier procède de son choix délibéré. Autrement dit, la proposition par les sociétés d'assurance du nom d'un avocat à l'assuré « sans demande écrite de sa part » sera tout simplement interdite.

Enfin, l'article 3 clarifie les relations entre l'assureur et son client lorsque celui-ci a recours à l'assurance de protection juridique.

En effet, la loi du 31 décembre 1971 dispose que les honoraires d'avocat sont fixés en accord avec le client. Cette règle participe d'une manière essentielle du caractère libéral de la profession d'avocat. Aussi, la prédétermination d'un plafond d'honoraires ou de toute autre convention d'honoraires entre l'avocat et l'assureur sera interdite pour éviter toute situation de conflit d'intérêts entre l'assureur et son client.

Cette disposition ne remet pas en cause la possibilité pour les assureurs de fixer des limitations contractuelles au remboursement des honoraires des avocats. Elle permet néanmoins d'exclure tout lien de subordination de l'avocat à l'égard de l'assureur, ce qui me paraît être une mesure d'équité pour cette profession.

Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, cette proposition de loi répond, par des ajustements techniques au droit en vigueur, aux recommandations de la Commission des clauses abusives. Elle répond aussi à l'affirmation, répétée avec constance par la commission des lois du Sénat, de la nécessité de réformer l'assurance de protection juridique. Elle tend surtout à offrir aux citoyens un nouveau mode d'accès au droit et à la justice, avec une plus grande transparence dans les contrats et une meilleure implication des avocats dans le règlement des litiges. Enfin, elle répond à un réel besoin de révision de notre législation face à une évolution de notre société qui voit se multiplier les contentieux auxquels ont à faire face les Français dans leur vie quotidienne. Aussi, j'espère que le Sénat soutiendra ce texte.

Qu'il me soit permis de remercier chaleureusement notre collègue Yves Détraigne de son rapport remarquable et de ses propositions, auxquelles je souscris pleinement et auxquelles s'associera le groupe UMP. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd'hui pour examiner les conclusions de la commission des lois sur les propositions de loi de nos collègues François Zocchetto et Pierre Jarlier relatives, l'une et l'autre, à l'assurance de protection juridique.

L'objet de ces textes est de clarifier les relations entre l'assuré, l'avocat et l'assureur en cas de litige, car, si des principes sont effectivement inscrits dans le code des assurances, les assureurs n'hésitent pas à introduire dans leurs contrats des clauses abusives.

Les dispositions relatives à l'assurance de protection juridique sont prévues aux articles L. 127-1 et suivants du code des assurances et sont issues de la transposition de la directive 87/344/CEE du 22 juin 1987 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance de protection juridique.

L'article L. 127-1 définit la protection juridique comme une « opération consistant, moyennant le paiement d'une prime ou d'une cotisation préalablement convenue, à prendre en charge des frais de procédure ou à fournir des services découlant de la couverture d'assurance, en cas de différend ou de litige opposant l'assuré à un tiers [...] ».

En pratique, la protection juridique se traduit par deux types de prestation : d'une part, un service de renseignements juridiques par téléphone ouvert aux assurés souhaitant être informés de leurs droits et des démarches à accomplir, et, d'autre part, un service de défense des intérêts de l'assuré en conflit avec une autre partie.

Dans ce second cas, qui est celui qui nous intéresse plus particulièrement aujourd'hui, les services juridiques de l'assurance, l'avocat de la compagnie ou bien celui qui est désigné par l'assuré prendront en charge la défense des intérêts de l'assuré. Or, si le champ d'action de la protection juridique est vaste - il concerne les litiges liés à la consommation, au droit du travail, ou encore avec l'administration -, en revanche, la prise en charge, notamment pour ce qui est des frais et des honoraires d'avocats, est fort limitée. Suivant les contrats, le plafond des prestations prises en charge varie de 80 000 à 300 000 euros.

Dans le strict respect des droits de la personne et de sa défense, l'assurance de protection juridique est donc un moyen d'accès au droit.

Environ un foyer sur cinq est couvert par une assurance de ce type. Les sinistres déclarés restent cependant encore peu nombreux eu égard au nombre de contrats souscrits : en 2002, les treize sociétés membres du Groupement des sociétés de protection juridique annonçaient gérer 450 000 dossiers, pour un peu plus de 9 millions de clients. En pratique donc, peu d'assurés y ont recours.

Les assureurs cherchent bien évidemment à satisfaire leurs clients et à donner une bonne image de cette garantie, dans un marché en plein essor. Néanmoins, ils ne perdent évidemment pas de vue les questions de rentabilité économique, ce qui les conduit parfois à introduire dans leurs contrats des règles limitant leurs engagements, voire des clauses purement et simplement abusives.

C'est ce qu'a pu constater la Commission des clauses abusives : elle a relevé, dans sa recommandation n° 02-03 du 21 février 2002, un certain nombre de pratiques contestables et abusives des sociétés d'assurance.

Il a notamment été constaté que certaines clauses restreignent la liberté de choix de l'avocat, prévoient de déchoir de la garantie l'assuré qui a saisi un avocat sans avoir préalablement déclaré le sinistre, c'est-à-dire consulté le spécialiste de l'assureur, sans que l'assureur ait à justifier d'un préjudice, ou encore refusent au consommateur le choix de son avocat si les honoraires de celui-ci ne sont pas préalablement acceptés par l'assureur.

Les auteurs des deux propositions de loi citent à juste titre, dans leur exposé des motifs, cette recommandation de la Commission des clauses abusives. Ils reprennent donc en partie les quelques remarques que je viens de formuler afin de modifier le code des assurances.

Les propositions de loi visent essentiellement à clarifier les relations entre les assurés, les assureurs et leurs avocats. Cette clarification est nécessaire : nous ne pouvons en effet admettre que des clauses restreignant les droits des assurés et limitant leur possibilité de se défendre correctement soient inscrites dans les contrats d'assurance de protection juridique.

Plusieurs principes sont ainsi énoncés dans les propositions de loi initiales : la généralisation du recours à l'avocat, et ce à toutes les phases de la procédure, lorsque la partie adverse est elle-même défendue par un avocat ; l'encadrement de la pratique des assureurs tendant à suggérer aux assurés le nom d'un avocat ; enfin, la prohibition de tout accord entre l'assureur et l'avocat sur les honoraires de celui-ci.

Hormis quelques modifications rédactionnelles bienvenues, le rapporteur a repris dans ses conclusions les termes des deux propositions de loi initiales. Il nous propose également de les compléter et de coordonner le code de la mutualité avec le code des assurances, ce qui est effectivement une bonne chose ; d'affirmer le caractère subsidiaire de l'aide juridictionnelle - c'est là, monsieur le rapporteur, que le bât blesse - ; enfin, de prévoir que le remboursement par la partie perdante des frais et honoraires exposés par l'assuré reviendra prioritairement à ce dernier.

Néanmoins, le champ d'application du texte reste restreint par rapport aux nombreuses observations de la Commission des clauses abusives : il vise quasi exclusivement les relations entre l'assuré, son avocat et l'assureur. Pourtant, de nombreuses pratiques contestables auraient mérité d'être empêchées par la loi, pratiques que ladite commission considère soit comme abusives, soit comme créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

La Commission des clauses abusives recommande donc que soient éliminées des contrats d'assurance de protection juridique, outre les dispositions concernant le choix de l'avocat, les clauses ayant pour objet ou pour effet « de laisser croire au consommateur qu'il doit, à peine de déchéance, déclarer son sinistre dans un délai inférieur à celui de cinq jours prévu par la loi » ; « d'imposer, sous peine de déchéance automatique de la garantie, ?l'origine du sinistre? comme point de départ du délai pour la déclaration de sinistre par l'assuré » ; « de laisser croire au consommateur que la déchéance de la garantie peut être automatique, sans que l'assureur ait à justifier d'un préjudice ». Mais je ne vais pas énumérer toutes les recommandations, elles sont trop nombreuses.

Les pratiques fort abusives ainsi relevées par la Commission des clauses abusives semblent tout aussi fréquentes lorsqu'il s'agit des relations entre l'assuré et la société d'assurance de protection juridique elle-même.

Nous regrettons donc que les deux propositions de loi initiales se limitent à encadrer plus strictement, bien que ce soit nécessaire, les pratiques des assureurs à l'encontre de leurs assurés en ce qui concerne la seule liberté de choix de leur avocat.

Vous avez manifestement tenté, monsieur le rapporteur, de combler cette lacune et de compléter les protections accordées aux assurés en inscrivant à l'article 4 que « le contrat d'assurance de protection juridique stipule que toute somme obtenue en remboursement des frais et des honoraires exposés pour le règlement du litige bénéficie par priorité à l'assuré pour les dépenses restées à sa charge et, subsidiairement, à l'assureur dans la limite des sommes qu'il a engagées ». Cet ajout constitue un progrès ; mais, compte tenu du nombre important d'abus constatés, il nous semble bien insuffisant.

Par ailleurs, je m'interroge sur le risque que, à terme, l'assurance de protection juridique ne vienne se substituer à l'aide juridictionnelle. Vous avez clairement évoqué cette possibilité, monsieur le rapporteur, en indiquant que l'assurance de protection juridique pouvait constituer un utile « relais » par rapport à l'aide juridictionnelle « d'un poids croissant dans le budget de l'État ».

Encore une fois, et pour des raisons liées à la réduction du déficit budgétaire, ce sont donc les droits des citoyens les plus modestes qui pourraient être remis en cause. Est-il nécessaire, pourtant, de rappeler que les contrats d'assurance juridique ne sont pas gratuits ? Même si les contrats de base coûtent en moyenne entre 55 et 60 euros par an, cette dépense est souvent non prioritaire pour un foyer modeste. Doit-il pour autant renoncer à défendre correctement ses droits dans un litige ? L'aide juridictionnelle est justement réservée à ces cas !

En la voyant ainsi inscrire le principe selon lequel « l'aide juridictionnelle n'est pas accordée lorsque les frais couverts par cette aide sont pris en charge au titre d'un contrat d'assurance de protection juridique ou d'un système de protection » à l'article 2, et non plus à l'article 3-1 de la loi du 10 juillet 1991, et préciser dans la loi que les contrats d'assurance de protection juridique pourraient se substituer à l'aide juridictionnelle, je suspecte la majorité de vouloir remettre en cause, à l'avenir, l'aide juridictionnelle. (Protestations sur les travées de l'UMP.) Et il semble que je n'aie pas tort de la suspecter !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Oh !

Mme Josiane Mathon-Poinat. Ma conclusion sera donc brève : bien qu'il apporte des clarifications nécessaires, le texte retenu par la commission ne répond pas suffisamment aux nombreuses critiques émises tant par les associations de consommateurs que par la Commission des clauses abusives et qui sont liées au manque de transparence et de lisibilité des contrats d'assurance juridique, défaut qui risque d'ailleurs de favoriser une augmentation importante de ces contrats.

Surtout, et c'est ce qui motive notre position, la majorité sénatoriale ne semble pas exclure de faire de l'assurance de protection juridique un substitut à l'aide juridictionnelle, à laquelle nous sommes, nous, profondément attachés et qui risque de tomber en désuétude au nom de restrictions budgétaires, et de généraliser ainsi l'assurance privée pour l'accès au droit, voire de la rendre obligatoire. Dans ces conditions, nous nous abstiendrons sur ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Madame Mathon-Poinat, je ne voudrais pas que ceux qui liront ces débats accordent le moindre crédit à votre assertion : l'assurance de protection juridique ne peut bien évidemment pas se substituer à l'aide juridictionnelle, car il s'agit ici d'assurés, c'est-à-dire de personnes qui ont les moyens de payer une police d'assurance. Or, l'aide juridictionnelle est précisément prévue pour ceux qui, par définition, n'ont pas les moyens de s'assurer une couverture juridique puisqu'ils ont besoin de l'aide de l'État pour trouver un défenseur.

Il s'agit par conséquent de deux dispositifs différents mais complémentaires qui ne peuvent pas se substituer l'un à l'autre.

Je voulais apporter cette précision pour lever toute ambiguïté au cas où il y aurait un doute dans les esprits, mais c'est peu probable.

Mme la présidente. Nous passons à la discussion des articles.