situation dans l'éducation nationale

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.

M. Jean-Luc Mélenchon. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.

Monsieur le ministre, en application d'une politique purement idéologique de restriction des services publics...

M. Josselin de Rohan. Cela commence bien !

M. Jean-Luc Mélenchon. ...qui, sous toutes les latitudes, a abouti aux mêmes aberrations, l'éducation nationale subit aujourd'hui l'une des politiques de réduction de ses moyens les plus brutales qu'elle ait jamais connues. Cette année, 11 208 postes sont supprimés, dans des conditions telles qu'il suffit de 2 élèves de moins dans l'enseignement secondaire pour que l'on supprime un poste, alors qu'il en faut 53 de plus dans l'enseignement primaire pour que l'on en crée un.

M. Guy Fischer. Voilà la vérité !

M. Jean-Luc Mélenchon. Ce n'est pas dépenser mieux que de retirer 54 établissements d'enseignement public professionnel dans un pays qui connaît une pénurie de main-d'oeuvre qualifiée, au moment où le service public de l'enseignement professionnel compte 20 000 élèves de plus depuis 2002. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Dépenser moins pour la jeunesse de France, ce n'est pas dépenser mieux, au moment où sont rognés les horaires légaux appliqués aux matières qui constituent des référentiels obligatoires de l'enseignement professionnel ou de l'enseignement général.

Ce n'est pas dépenser mieux que d'obérer l'avenir en ne prenant aucune mesure d'anticipation. Vous réduisez de 50 % les postes ouverts aux concours alors qu'augmente la population scolaire qui s'apprête à entrer dans le secondaire.

Ce n'est pas dépenser mieux que de transformer une mesure qui était expérimentale et applicable aux élèves individuellement - je veux parler du passage du bac professionnel en trois ans - en une mesure générale que vous appliquez à l'ensemble de l'enseignement professionnel, au moment même où l'on constate que 20 % des élèves ont besoin de cinq ans pour passer le même bac professionnel.

M. Josselin de Rohan. Et pourquoi pas dix ans ?

M. Jean-Luc Mélenchon. Cette politique suscite une réprobation générale. Les élus, présidents de conseils régionaux, présidents de conseils généraux, maires des communes qui ont ouvert, rénové, réhabilité ou construit des établissements sont atterrés à l'idée que ces équipements restent inemployés parce que vous les obligez, par décision administrative, à les fermer.

Les conseils d'administration des lycées, pour 80 % d'entre eux, proportion jamais vue dans notre pays, et la totalité des syndicats ont refusé les dotations horaires globales qui leur ont été proposées. En outre, chaque jour, dans chaque ville de France, des lycéens manifestent.

Monsieur le ministre, que répondez-vous à tous ceux qui vous disent que c'est trop, à ceux qui s'inquiètent à l'idée que, comme l'an passé, l'éducation nationale supporte la moitié des 35 000 suppressions de postes qui doivent avoir lieu dans la fonction publique, soit 17 000 postes ?

M. Josselin de Rohan. Quelle horreur !

M. Jean-Luc Mélenchon. C'est trop ! Vous allez faire s'écrouler l'éducation nationale ! Cela réjouira sans doute ceux qui applaudissent nos difficultés, mais désespèrera le peuple français, dont c'est le principal instrument de développement collectif et de promotion individuelle. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le sénateur Mélenchon, vous parlez d'idéologie ? Eh bien, parlons-en !

Quelle est la réalité des chiffres ? Nous avons perdu ces trois dernières années 145 000 élèves et nous allons en perdre 40 000 de plus. Aujourd'hui, un lycéen français a 30 % d'heures de cours de plus que ses camarades habitant des pays comparables et les crédits divers qui lui sont consacrés sont supérieurs de 22 %. Ne disons pas que l'éducation nationale française est traitée en parent pauvre, qu'elle est maltraitée : le budget que la nation consacre à l'école reste très élevé. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Daniel Raoul. Ce sont des moyennes !

M. Xavier Darcos, ministre. Vous prétendez que ce chiffre de 8 800 emplois est considérable, voire terrible, et que les choses vont empirer. Voyons les faits objectivement.

De prime abord, je vous rappelle que, parmi ces 8 800 postes, 5 000 ont été transformés en heures supplémentaires. Aussi, le service offert aux élèves ne change pas. Seul importe qu'un élève ait devant lui un professeur en train de faire un cours, qu'il soit en heures supplémentaires ou non.

En ce qui concerne les affectations diverses, il est erroné et idéologique de prétendre que les matières obligatoires bénéficieront, à la rentrée prochaine, d'un nombre inférieur d'heures supplémentaires et que des sections seront fermées. Non seulement c'est faux, mais, de surcroît, bien au contraire, nous avons défini, me semble-t-il d'une manière relativement objective, les endroits où il fallait conserver des emplois prioritaires et les endroits où cette priorité était moindre.

Monsieur Mélenchon, si l'on prend l'exemple de votre département, l'Essonne, celui-ci conservera des moyens identiques bien qu'il perde 1 200 élèves dans le secondaire. Dans le primaire, il perdra 500 élèves, mais gagnera 10 postes.

M. Daniel Raoul. C'est dramatique...

M. Xavier Darcos, ministre. Je pourrai vous communiquer les chiffres exacts d'ici peu.

À ce jour, 27 000 élèves bénéficient d'un accompagnement éducatif dans l'Essonne, parce que nous considérons que ce département est prioritaire et qu'il faut l'aider.

Quant à vos propos sur le bac professionnel en trois ans, encore une fois, ils relèvent de l'idéologie, monsieur Mélenchon, car c'est vous-même qui avez initié cette mesure.

M. Jean-Luc Mélenchon. Cela suffit ! (M. Mélenchon se lève.) Vous affirmez cela pour la dixième fois ! Je l'ai fait à titre expérimental. Cessez d'écrire partout ce que vous venez de dire ! (Vives exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Monsieur Mélenchon, soyez discipliné et veuillez écouter M. le ministre !

M. Xavier Darcos, ministre. Soit, j'en prends note. Disons alors que nous avons considéré que l'expérimentation que vous avez engagée était de qualité et que nous avons souhaité la généraliser. Ce n'est rien d'autre que du pragmatisme et du refus de l'idéologie !

Enfin, monsieur Mélenchon, je crois vraiment qu'il est nécessaire que l'éducation nationale pense sa réforme. Il est faux de prétendre que le système éducatif va subitement s'écrouler parce que, à la rentrée prochaine, il n'y aura plus, dans tel lycée, que 109 professeurs contre 110 initialement ou parce que les effectifs d'une classe passeront de 30 à 32 élèves. Il faut réformer l'école et le lycée plutôt que de considérer qu'il faut toujours ajouter des moyens, comme nous le faisons depuis 30 ans. Si cela était vrai, nous serions aujourd'hui les premiers du monde. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

banderole déployée à l'occasion du match PSG-Lens

M. le président. La parole est à Mme Béatrice Descamps.

Mme Béatrice Descamps. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative. (Ah ! sur les travées de l'UMP.)

Samedi soir dernier, le monde du football s'est privé d'une belle fête et les valeurs du sport ont été souillées par la profonde bêtise et les violences de certains supporters. Une fois de plus !

Alors que la tolérance, le respect de l'adversaire et le dépassement de soi auraient dû se manifester, ce sont l'intolérance et l'infamie qui ont marqué la finale de la Coupe de la Ligue opposant le Paris-Saint-Germain au Racing Club de Lens.

Avec le déploiement de cette banderole, les supporters blessés ou insultés et les bus « caillassés », nous sommes loin des « tifosi » et autres provocations traditionnelles entre clubs de supporters.

La région Nord-Pas-de-Calais et le sport ont été bafoués par la violence des mots, qui, au même titre que le racisme et les appels à la haine, ne sont plus tolérables dans nos stades.

S'insurger sous le coup de l'émotion ne suffit pas. Il s'agit de trouver une véritable solution au problème du hooliganisme. L'affaire Kebbé lors du match Libourne-Bastia, l'affaire Ouaddou lors du match Metz-Valenciennes en sont les preuves, et aujourd'hui cette banderole ! Des réponses sont attendues et pas seulement par la population du Nord-Pas-de-Calais.

Si des sanctions exemplaires doivent être prises, comme l'a annoncé Mme la ministre de l'intérieur, d'autres stratégies doivent être mises en oeuvre.

N'est-il pas temps de responsabiliser non seulement les dirigeants des clubs sportifs, mais aussi ceux des clubs de supporters ? Les premiers ne devraient-ils pas être les garants de la responsabilité morale de leurs supporters ? Les seconds, des Ultras aux Boulogne Boys en passant par les Bad Gones, pour ne citer qu'eux, à l'intérieur et à l'extérieur des stades, sont dans l'obligation d'avoir un comportement exemplaire, digne et respectueux des valeurs sportives, ne serait-ce que pour les enfants et les familles qui viennent au stade.

L'Angleterre a réussi à éradiquer le hooliganisme en étant intraitable avec les supporters, qu'ils appartiennent à un club ou qu'ils soient indépendants. La tolérance zéro avec des interdictions de stade de longue durée, l'identification systématique des fauteurs de troubles et la généralisation des places assises et numérotées a porté ses fruits.

Monsieur le secrétaire d'État, un dispositif de sanctions disciplinaires, judiciaires et administratives existe déjà en France. Mais sont-elles suffisamment efficaces sur le long terme ?

Ne pensez-vous pas qu'il est primordial de renforcer le caractère pédagogique, mais aussi financier, de ces sanctions envers les dirigeants de clubs, les supporters et les stadiers, afin que le football demeure un spectacle pour les familles et qu'il retrouve ses lettres de noblesse ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé de sports, de la jeunesse et de la vie associative. Madame la sénatrice, comme je le disais hier, nous avons atteint samedi soir au Stade de France les sommets de la bêtise humaine. Étant moi-même supporter du Paris-Saint-Germain, j'avais honte !

Ces faits sont malheureusement récurrents dans le football, puisque, vous l'avez dit, après l'affaire Ouaddou, après l'affaire Kebbé, il y a maintenant l'affaire du Stade de France !

Je voudrais d'abord, au nom du Gouvernement, apporter tout notre soutien et toute notre sympathie à l'ensemble des habitants de cette région du Nord-Pas-de-Calais, aux dirigeants du RC-Lens, au staff technique et aux joueurs de ce club, ainsi qu'à son président, Gervais Martel, qui est un ami. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Le Président de la République a reçu mardi matin les dirigeants du Racing club de Lens ainsi que le député-maire de la ville. Nous avons largement évoqué ces problèmes afin de prendre des décisions nouvelles. Roselyne Bachelot et moi-même proposerons au chef de l'État, au début de la semaine prochaine, des mesures plus fermes et plus dures que celles qui existent à l'heure actuelle.

Avant de les évoquer, je dirai que ce fléau est l'affaire de tous, et pas simplement du Paris-Saint-Germain ; c'est l'affaire des pouvoirs publics, de la Fédération française de football, de la Ligue de football, des clubs et aussi, et surtout, des supporters.

M. Gérard Larcher. Bien sûr !

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État. Dimanche soir, j'irai voir le match Marseille-Lyon. J'ai organisé une réunion avec tous les présidents des clubs de supporters de Marseille pour leur dire que, s'ils continuent ainsi, ils vont tuer leur passion.

La première mesure à prendre consiste, pour les préfets, à appliquer les interdictions administratives de stade de façon plus ferme qu'aujourd'hui et à allonger les sanctions. Trois mois, c'est trop court ; il faut aller jusqu'à un an !

La deuxième mesure - les Anglais, dont vous avez parlé, y ont eu recours -, pourrait être de sanctionner financièrement les individus racistes et violents.

La troisième, enfin, - c'est un hommage à Hubert Falco -, consisterait à généraliser les travaux d'intérêt général, les TIG, qui ont été mis en place avec succès par la ligue de football amateur du Var.

Comme je vous le disais, ce fléau est l'affaire de tous. Croyez-moi, cela nous préoccupe, car ce que je vois aujourd'hui dans les enceintes sportives m'agace profondément ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Philippe Richert.)

PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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Candidatures à des organismes extraparlementaires

M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de plusieurs organismes extraparlementaires.

La commission des affaires culturelles a fait connaître qu'elle propose la candidature de M. Jacques Valade pour siéger au sein du conseil d'administration de l'établissement public du musée du quai Branly et les candidatures de MM. Jacques Legendre et Philippe Richert, votre serviteur, pour siéger respectivement comme membre titulaire et comme membre suppléant au sein de la commission du Fonds national pour l'archéologie préventive.

Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

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Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2007-613 du 26 avril 2007 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament
Discussion générale (suite)

Adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament

Adoption définitive d'un projet de loi en deuxième lecture

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2007-613 du 26 avril 2007 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament
Article 1er ter

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, ratifiant l'ordonnance n° 2007-613 du 26 avril 2007 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament (nos 198, 237).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur le président, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, afin de garantir à tous ses ressortissants des médicaments sûrs, efficaces et de qualité, afin, également, de soutenir le dynamisme de la recherche thérapeutique, la Communauté européenne met en place le marché unique du médicament. Depuis 2001, la Commission européenne a pris dans ce secteur une série de mesures ambitieuses auxquelles la France s'est associée.

Le projet de loi que je vous présente aujourd'hui en deuxième lecture vise à ratifier l'ordonnance du 26 avril 2007 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament.

Ce texte nous permet d'intégrer au droit français cinq directives du Parlement et du Conseil européens - les colégislateurs - que vous avez pu examiner lors des débats entourant l'adoption de la loi du 26 février 2007.

L'ordonnance concerne des produits très divers, allant des aliments diététiques aux produits d'origine humaine, en passant par les produits cosmétiques et les médicaments à usage humain et vétérinaire.

Les questions que soulève ce texte sont techniques. Elles n'en sont pas moins très importantes, comme en témoigne la qualité du débat auquel elles ont donné lieu dans les deux assemblées.

Je tiens à cet égard à rendre hommage au remarquable travail de votre rapporteur, M. Gilbert Barbier, et de la commission des affaires sociales du Sénat, dont je salue le président, M. Nicolas About. La Haute Assemblée, faut-il le rappeler, est depuis très longtemps en pointe sur les questions biomédicales. En cette année où nous célébrons le vingtième anniversaire de la loi Huriet, je tenais à saluer votre rôle précurseur, mesdames, messieurs les sénateurs.

M. François Autain. Vingt ans, déjà !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le texte comprend onze articles.

L'article 1er est celui de la ratification de l'ordonnance.

L'article 1er bis sollicite une nouvelle habilitation de quatre mois pour légiférer par ordonnance, afin de permettre au Gouvernement d'honorer rapidement les engagements européens de la France, ce qui est le moins pour le pays qui doit assurer, dans quelques mois, la présidence de l'Union européenne.

L'article 2 de ce texte vient compléter l'article 38 du code des douanes. Il s'agit de donner aux agents des douanes de nouvelles prérogatives de contrôle concernant les échantillons biologiques et les produits sanguins, à travers, notamment, des contrôles inopinés.

L'article 3 rectifie une erreur matérielle.

L'article 4 corrige une ambiguïté autour de la question des insecticides et des acaricides à usage médical.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous vous êtes déjà prononcés en faveur de ces premiers articles, aussi ne m'y attarderai-je pas davantage. Considérons plutôt les dispositions que vous n'avez pas encore eu le loisir d'examiner sous leur forme présente.

L'article 1er ter sollicite une nouvelle habilitation de dix mois pour légiférer par ordonnance. Le Gouvernement pourra ainsi conduire à son terme le projet d'ordonnance qui vise à étendre aux territoires d'outre-mer les dispositions de la loi du 26 février 2007 et celles de l'ordonnance du 26 avril 2007.

L'article 5 concerne les missions de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l'AFSSAPS. L'Agence, dont la rigueur et l'autorité sont reconnues par tous, sera désormais l'unique autorité compétente en matière de recherche biomédicale. Afin de tenir compte du retard pris dans le calendrier parlementaire, la mise en oeuvre de cette mesure a été reportée du 1er avril, date prévue par le texte que vous aviez voté en première lecture, au 1er juin de cette année.

L'article 6 a été introduit sur proposition de votre assemblée. Il s'agit de repousser l'entrée en vigueur de l'interdiction de l'utilisation, à des fins humanitaires, des médicaments non utilisés, les MNU, interdiction qui avait été décidée par l'article 32 de la loi du 26 février 2007.

En effet, vous le savez, le dispositif Cyclamed, malgré le dévouement des bénévoles et des associations, ne s'est pas montré à la hauteur de ses promesses.

Il est apparu que les médicaments non utilisés ne présentaient pas de garanties suffisantes de qualité et de conservation. Ils sont souvent mal adaptés aux pathologies de ceux qu'ils sont censés soigner. Enfin, et ce n'est pas le moindre des inconvénients, ils ont pu alimenter des circuits parallèles de revente.

L'avis de Médecins du monde et de l'Ordre de Malte, pour ne citer que deux des associations qui partagent ce constat avec l'Organisation mondiale de la santé, l'OMS, nous a confortés dans cette décision.

Nous devons toutefois accorder un délai aux associations humanitaires pour leur permettre de s'organiser et de trouver d'autres sources d'approvisionnement. L'article 6 prolonge donc de quelques mois la période de transition, pendant laquelle l'utilisation de ces médicaments à des fins humanitaires sera strictement encadrée.

L'article 7 donne aux officines la possibilité de sous-traiter certaines préparations à des établissements pharmaceutiques fabricants, sous le contrôle de l'AFSSAPS, et dans le respect des bonnes pratiques que mentionne l'article L. 5125-5 du code de la santé publique.

Le Comité économique des produits de santé, le CEPS, exige des entreprises pharmaceutiques qu'elles mènent des études pharmaco-épidémiologiques après toute autorisation de mise sur le marché. Afin que ces médicaments puissent faire rapidement l'objet d'une évaluation en vie réelle, l'article 8 prévoit de sanctionner les fabricants qui ne conduiraient pas systématiquement ces études ou qui tarderaient à le faire.

Ce texte nous donne également un outil supplémentaire pour mieux connaître les dispositifs médicaux pris en charge par l'assurance maladie.

L'article 9 vise à remplacer la déclaration obligatoire auprès de l'AFSSAPS de la vente de tout produit remboursé par la déclaration obligatoire de son code dans la liste des produits et prestations.

Ces deux derniers articles ont déjà fait l'objet d'une discussion et d'un vote lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008. Le Conseil constitutionnel a décidé de les écarter, car il a considéré que les économies liées à ces mesures ne justifiaient pas leur rattachement à une loi de financement de la sécurité sociale.

L'intérêt de ces mesures n'en demeure pas moins réel. C'est pourquoi le Gouvernement a décidé de les ajouter au présent projet de loi.

Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, la France ne saurait prendre plus de retard dans la transposition des directives européennes.

Grâce à la qualité de vos débats, grâce à la sagesse des amendements dont vous avez enrichi la première lecture, ce texte est désormais très abouti. Je sais que vous avez, comme moi, à coeur de permettre à la France d'honorer ses obligations européennes et je ne doute pas du soutien que vous apporterez à ce texte particulièrement pertinent. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Gilbert Barbier, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes engagés depuis maintenant plus d'un an dans un important travail de transposition en droit interne de la nouvelle législation européenne en matière de médicament.

Composée d'un règlement et de plusieurs directives, la législation européenne a profondément modifié le code communautaire relatif aux médicaments à usage humain afin de renforcer la sécurité sanitaire des patients et la transparence des travaux des agences chargées d'autoriser la commercialisation des produits de santé.

Elle a aussi pris en compte l'apparition de nouvelles catégories de produits de santé ainsi que l'extension de leur objet, qui va désormais au-delà des seuls médicaments à usage humain.

Plusieurs directives sont donc intervenues dans des domaines aussi divers que les normes de qualité et de sécurité pour le sang humain, les produits cosmétiques, les normes de qualité et de sécurité des tissus et cellules humains, les médicaments traditionnels à base de plantes ou les médicaments vétérinaires.

Je n'exposerai pas de nouveau ici les raisons qui ont conduit le Gouvernement à solliciter une habilitation pour assurer la transposition de ces directives. Nous les avons déjà évoquées à plusieurs reprises, notamment lors de l'examen du présent projet de loi en première lecture.

Je rappelle que l'ensemble des dispositions à transposer figure dans le texte de l'ordonnance du 26 avril 2007.

Le projet de loi prévoit donc la ratification de cette ordonnance, c'est l'objet de son article 1er et des articles 2, 3 et 4 qui en précisent le texte et qui ont été adoptés par l'Assemblée nationale.

Quelles sont donc les dispositions qui font l'objet de la deuxième lecture ?

Deux points me semblent devoir retenir particulièrement notre attention.

Le premier est relatif à la distribution et à la destruction des médicaments non utilisés. C'est une question dont nous avons déjà largement débattu à deux reprises, en février et en octobre 2007. Toutefois, lors de l'examen du présent projet de loi en première lecture, le Sénat, avec l'accord du Gouvernement, avait jugé nécessaire de prolonger la période transitoire durant laquelle les ONG pouvaient poursuivre leurs activités. Cette décision était motivée par les difficultés rencontrées par ces structures humanitaires pour trouver de nouvelles sources d'approvisionnement en médicaments.

Depuis lors, la situation a évolué. Le groupe de travail constitué à cet effet est proche - du moins, je l'espère - de rendre ses conclusions. Il est donc possible, comme vous l'avez précisé devant l'Assemblée nationale, madame la ministre, de réduire cette période transitoire. L'échéance est désormais ramenée au 31 décembre 2008. Il s'agit, à mon sens, d'une solution équilibrée.

Le second point nouveau concerne les études postérieures à l'autorisation de mise sur le marché, ou post-AMM. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 contenait des dispositions visant à sanctionner la non-réalisation des études post-AMM, mais cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel pour des raisons de forme.

Considérant, à juste titre, que le dispositif est utile, le Gouvernement a rétabli ce dispositif dans le présent projet de loi, lors de son examen par l'Assemblée nationale.

Je souhaite mettre à profit ce débat pour faire part de quelques incertitudes et je ne doute pas que Mme la ministre pourra nous apporter des précisions utiles.

Comme vous le savez, les études post-AMM sont commandées par le Comité économique des produits de santé, le CEPS.

M. François Autain. Pas seulement !

M. Gilbert Barbier, rapporteur. Notamment !

Or, deux points méritent des précisions.

Tout d'abord, il convient de déterminer dans quels délais seront appliquées ces nouvelles dispositions. Le seront-elles dès la publication de la loi ou faudra-t-il attendre le renouvellement de l'accord-cadre signé entre le CEPS et les entreprises pharmaceutiques ?

Ensuite, y a-t-il des sanctions en cas de non-réalisation des études prévues dans le cadre des plans de gestion des risques ?

J'ajoute une troisième interrogation : selon quelles modalités sera fixé le montant de ces sanctions ?

Outre ces deux mesures, l'Assemblée nationale a enrichi le texte en adoptant diverses dispositions précisant les compétences de l'AFSSAPS, les conditions dans lesquelles les pharmaciens d'officine peuvent réaliser des préparations magistrales et les modalités de régulation des dispositifs médicaux.

Il ne vous aura pas échappé que les articles restant en navette vont au-delà de la simple ratification d'ordonnance, qui constituait le motif initial du projet de loi.

Toutefois, je considère que l'ensemble du texte forme un tout homogène, centré sur la transposition des directives européennes en matière de produits de santé, le renforcement des règles de sécurité relatives à ces produits ainsi que la régulation des modalités de prise en charge des dispositifs médicaux qui constituent un sous-ensemble de produits de santé.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, la commission des affaires sociales vous propose d'adopter ce texte dans la rédaction votée par l'Assemblée nationale afin de permettre son entrée en vigueur rapide. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

M. Jean-Pierre Michel. Monsieur le président, mes chers collègues, le texte du projet de loi nous revient de l'Assemblée nationale à la fois « aminci » et augmenté d'un certain nombre d'articles nouveaux. Ceux-ci ont été présentés par Mme la ministre, M. le rapporteur vient de les commenter, et ils ne nous posent pas de problème.

L'article 6, qui porte sur les médicaments non utilisés, avait été introduit au Sénat à la suite de l'adoption d'un amendement du groupe socialiste. Il a été modifié par l'Assemblée nationale, mais on peut estimer qu'un équilibre a été trouvé. Nous ne formulerons donc pas de suggestion supplémentaire.

Les autres articles ne soulèvent pas de difficulté.

En revanche, l'article 8, qui concerne les études post-AMM, me paraît plus intéressant et mérite sûrement des explications. Mon collègue François Autain en dira également un mot tout à l'heure, puisqu'il a déposé plusieurs amendements - que nous voterons.

Madame la ministre, vous aviez annoncé lors de la discussion du PLFSS que des crédits du budget de l'État seraient affectés à ces études post-AMM. Qu'en est-il aujourd'hui ? Ces crédits ont-ils été mis en place ? En d'autres termes, l'État aura-t-il la possibilité de participer à ces études, si importantes pour la sécurité de nos concitoyens qui consomment des médicaments ?

Lors de la première lecture, le Sénat avait introduit dans le texte un article qui a finalement entraîné les sénateurs de mon groupe à s'abstenir au moment du vote sur l'ensemble : il s'agit de l'article 1er bis. Adopté conforme par l'Assemblée nationale, cet article n'est plus en discussion mais figure toujours dans le projet de loi sur lequel nous allons nous prononcer. Il permet au Gouvernement de procéder par ordonnances à la transposition d'une directive européenne relative aux tissus et aux cellules humains, notamment en ce qui concerne le don de gamètes et la procréation médicalement assistée, domaine s'il en est qui relève de la bioéthique. Je rappelle que la loi de bioéthique doit être révisée en 2009, si nous sommes dans les temps.

Nous avions insisté, lors de la discussion de cet article, sur les enjeux éthiques liés, en particulier, à la question du don. Lorsque l'on procède à des comparaisons internationales, y compris avec des pays européens, on constate que la France, pour le sang, les organes et les gamètes, notamment, a choisi le régime du don. Or, dans les directives européennes, le don est certes conseillé, mais il n'est pas obligatoire ; l'exemple des États-Unis nous incite à nous inquiéter : que restera-t-il du don dans un environnement très concurrentiel ?

Aujourd'hui, dans le cadre de la préparation de la loi de bioéthique, des discussions ont lieu au Sénat sur d'autres enjeux bioéthiques, notamment - madame la ministre, cela devrait vous intéresser - sur la maternité pour autrui. Là aussi, il est question du don. À supposer que la France l'admette, la maternité pour autrui sera-t-elle gratuite ? Dans certains pays où elle est autorisée, elle n'est pas gratuite et fait au contraire l'objet d'une rémunération.

Toutes ces questions, parce qu'elles sont éthiques, sont pour nous d'une particulière importance. Nous nous étions abstenus en première lecture, nous nous abstiendrons également en deuxième lecture, pour cette raison, qui nous paraît essentielle.

M. le président. La parole est à M. François Autain.

M. François Autain. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, n'ayant pas de critiques majeures à formuler à l'encontre de ce texte,...

M. Jean-Pierre Michel. C'est dommage !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous attendons la fin ! (Sourires.)

M. François Autain. ... que l'Assemblée nationale a plutôt amélioré, je centrerai mon propos sur les études postérieures à l'autorisation de mise sur le marché, abordées à travers l'article 8. De fait, mon collègue Jean-Pierre Michel l'indiquait à l'instant, elles appellent un certain nombre de réflexions.

Depuis 2005, avec l'instauration des plans de gestion des risques en application de la directive européenne de 2004, ces études ont eu tendance à se multiplier. Elles deviennent même systématiques pour les nouvelles molécules innovantes et coûteuses. Les crises sanitaires comme celles que l'on a connues avec la cérivastatine et le Vioxx ne sont pas étrangères à ce renforcement des évaluations en situation réelle des médicaments, évolution dont on ne peut que se féliciter.

Néanmoins, s'il est incontestable que ces études sont absolument nécessaires, il n'en reste pas moins vrai qu'elles ne sauraient pallier les insuffisances d'une évaluation en amont, c'est-à-dire avant la délivrance de l'autorisation de mise sur le marché. Or il semble que les AMM soient octroyées de plus en plus facilement et de plus en plus précocement (Mme la ministre proteste), comme si la prescription d'études post-AMM pouvait constituer une alternative crédible et fiable à l'évaluation avant l'AMM, comme si les agences avaient de plus en plus de mal à résister aux pressions de l'industrie pharmaceutique.

Cette dérive est d'autant plus inquiétante que l'on sait que ces études ont très peu de chances d'être réalisées dans des délais raisonnables et que l'on continue néanmoins à les prescrire, et à les prescrire de plus en plus. Les chiffres dont on dispose sont éloquents à cet égard. Les plus récents, qui remontent à mai 2007 et ne prennent pas en compte les études demandées par l'AFSSAPS, montrent que, de 1997 jusqu'à mai 2007, seulement 12 % des 131 demandes ont été menées à leur terme et que pour 43 % d'entre elles le protocole était en cours de mise en oeuvre. En d'autres termes, la moitié d'entre elles n'avait pas reçu de commencement d'exécution.

L'application du principe de précaution aurait dû conduire les agences à ne plus prescrire d'études post-AMM sans être au préalable assurées que celles-ci pourraient être réalisées et financées, et, par voie de conséquence, à différer la mise sur le marché des nouvelles molécules pour lesquelles cette assurance n'aurait pu être obtenue. Cela n'est malheureusement pas la voie qui a été choisie, et on peut le regretter, au moins pour les patients qui sont amenés à prendre des médicaments pour lesquels les mesures de sécurité indispensables, bien que demandées, n'ont pas été mises en oeuvre.

La mission d'information de la commission des affaires sociales sur les conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments avait pointé en son temps de nombreux dysfonctionnements dans notre système de recours aux études post-AMM.

D'abord, les structures, trop nombreuses, qui constituent autant d'étapes dans le parcours du médicament jusqu'à sa commercialisation et sa prise en charge par l'assurance maladie, peuvent toutes prescrire des études post-AMM : outre l'AFSSAPS, je dois citer la Haute Autorité de santé - la HAS -, le Comité économique des produits de santé - le CEPS -, la direction générale de la santé - la DGS -, et même l'assurance maladie. Il y a manifestement là un problème de cohérence et de coordination que l'on n'est pas parvenu à surmonter en dépit de la création d'un groupe d'intérêt scientifique et, plus récemment, d'un comité de liaison informel.

À tout le moins, et comme c'est d'ailleurs le cas aux États-Unis avec la FDA, la Food and Drug Administration, la HAS devrait être tenue de publier régulièrement, au nom de toutes les autres agences, des informations sur le devenir des études post-AMM que les firmes se sont engagées à réaliser. À l'heure actuelle règne dans ce domaine une véritable confusion, une véritable anarchie, osons le mot, doublée d'une très grande opacité.

En effet, les conventions relatives à ces études passées entre le CEPS et les firmes ne sont pas rendues publiques. Il est donc difficile de savoir précisément quelles études, quels essais ont été demandés ainsi que les détails de leur protocole. On ne sait pas non plus si des délais sont fixés pour la réalisation de ces études, délais pourtant indispensables à la détermination d'un éventuel retard dont l'article 8 prévoit précisément la sanction.

L'unique étude publiée l'a été trois ans après sa réalisation, et trois mois après le retrait du marché du médicament Vioxx sur lequel elle portait. Cela n'a d'ailleurs pas empêché le maintien sur le marché d'un médicament de la même famille, aussi toxique que le précédent, qui est encore prescrit à l'heure actuelle : il s'agit du Célébrex. Cela montre à tout le moins la passivité et la frilosité des agences devant certains impératifs industriels, qui ne coïncident pas toujours avec l'intérêt des patients.

En ce qui concerne, ensuite, les moyens disponibles pour mener les études post-AMM, on relève en France une pénurie d'équipes de recherche spécialisées dans l'évaluation des risques médicamenteux. En 2005, et tout prête à penser que la situation n'a guère évolué depuis, il existait une seule unité INSERM sur plus de cent vingt, et seulement deux équipes universitaires labellisées sur plusieurs centaines qui se consacrent à cette activité pourtant essentielle.

Autre difficulté, l'insuffisance des bases de données, publiques et privées, relatives notamment à la prescription des médicaments. À cet égard, la suppression de l'Observatoire national des prescriptions témoigne du désengagement et du désintérêt manifeste du Gouvernement sur cette question.

Enfin, on peut regretter que les pouvoirs publics ne s'impliquent pas davantage dans le financement de ces études. Je ne sais pas combien le Gouvernement a mobilisé pour la réalisation de telles études dans les années qui viennent ; ce que je sais, en tout cas, et je l'ai appris en prenant connaissance du rapport public annuel 2008 de la Cour des comptes, c'est que, de 1999 à 2004, l'AFSSAPS n'a financé que six études, soit en moyenne une par an. Certes, depuis 2005, elle a mis en place un programme plus ambitieux doté d'un budget d'environ 800 000 euros, permettant de réaliser dix-neuf études. Malheureusement, aucune de ces études n'a été rendue publique.

L'essentiel de l'effort financier, vous l'aurez deviné, repose sur l'industrie pharmaceutique, qui manifestement, et on la comprend, ne se précipite pas pour mettre en oeuvre l'article 6 de l'accord-cadre conclu entre le syndicat de l'industrie pharmaceutique - Les entreprises du Médicament, dit LEEM -, et le CEPS, qui en fixe les conditions. Il est vrai qu'investir dans des études coûteuses qui peuvent aboutir à une remise en cause totale ou partielle de l'AMM du médicament concerné ne va pas de soi pour un laboratoire qui a déjà beaucoup investi pour l'obtenir !

En matière de financement, les pouvoirs publics ont donc un rôle déterminant à jouer, que malheureusement ils n'assument pas.

Devant un tel constat de carence, madame la ministre, on peut légitimement s'interroger sur l'efficacité des dispositions prévues à l'article 8 du projet de loi. Constitueront-elles une base légale suffisante pour contraindre les firmes au respect de leur engagement ? Permettez-moi d'en douter ! En effet, l'article 8 soulève un certain nombre de questions.

Quant à sa date d'entrée en vigueur, d'abord - et M. le rapporteur est intervenu à ce sujet -, dans quelles conditions sera-t-il applicable une fois la loi promulguée ? Faudra-t-il attendre que cette disposition soit intégrée dans un nouvel avenant à l'accord-cadre CEPS-LEEM qui modifierait dans ce sens son article 6 sur le suivi des nouveaux médicaments en pratique médicale réelle ? Cela signifierait qu'elle ne pourrait être opérationnelle avant 2010 ! Ou alors s'impose-t-elle à toute nouvelle convention conclue entre le CEPS et un laboratoire après la date de la promulgation de la loi, malgré l'existence d'un accord entre le CEPS et le LEEM, reconduit pour trois ans par un avenant du 21 janvier 2007, qui en fixe le cadre et ne prévoit pas, j'y insiste, de telles sanctions ?

Quant à son champ d'application, ensuite, l'article 6 de l'avenant à l'accord-cadre CEPS-LEEM prévoit que « l'initiative de ces études peut émaner de la commission de la transparence ou du CEPS ». Cela semble vouloir dire que les études émanant de la commission d'AMM ne sont pas visées par cet article et que, par voie de conséquence, leur non-réalisation ne pourrait donner lieu aux sanctions prévues à l'article 8. Cette discrimination ne semble pas justifiée, d'autant qu'il est prévu dans cet article de l'accord-cadre que, « si l'entreprise démontre que les résultats attendus de l'étude demandée seraient, en tout ou en partie, redondants avec ceux que permettraient d'obtenir dans les mêmes délais des études demandées dans le cadre de l'octroi de l'AMM par la commission d'AMM de l'AFSSAPS et incluses dans le programme de gestion des risques approuvé, l'étude conventionnée est modifiée en conséquence ».

Ainsi, certaines études demandées par la commission de transparence ou par le CEPS ne pourraient pas donner lieu à sanctions au seul motif qu'elles seraient redondantes avec celles qu'aurait demandées la commission d'AMM, qui, elles en sont exemptes !

Il me semble que toutes les études, quel qu'en soit le prescripteur, devraient être traitées de la même façon. Tout retard dans leur réalisation devrait être sanctionné, et a fortiori leur non-réalisation. C'est un impératif de santé publique.

Enfin, en l'absence de délai limite fixé pour la réalisation de ces études, comme c'est le cas actuellement, il apparaît difficile d'appliquer des sanctions pour retard. Aucun délai ne figure ni dans la loi, ni dans la réglementation, ni dans l'accord-cadre. Quant aux conventions CEPS-firmes, où un délai peut éventuellement être fixé, on a vu qu'elles ne sont pas rendues publiques.

C'est pour tenter de combler ces lacunes que je vous proposerai des amendements.

Bien que cet article 8 procède d'une bonne intention, je le reconnais, on est obligé de se montrer très réservé quant à son efficacité, et l'on ne peut que le regretter.

Les sénateurs du groupe CRC et moi-même subordonnerons bien entendu notre vote à l'accueil qui sera réservé à nos amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)