M. le président. L'amendement n° 221 rectifié, présenté par MM. Maurey, Biwer, Amoudry, Deneux, Détraigne, Pozzo di Borgo et J.L. Dupont, est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KH du code général des impôts par les mots :

, déduction faite des investissements réalisés par les opérateurs pour poursuivre et améliorer la couverture numérique du territoire, tant en téléphonie mobile qu'en Internet haut débit et très haut débit

La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Cet amendement est très proche de l’amendement n° 209 rectifié, qu’a présenté M. Retailleau et dont je suis d’ailleurs cosignataire, avec notre collègue Pierre Hérisson.

Le présent amendement est extrêmement important, mes chers collègues. En effet, tous les sénateurs ici présents, de gauche, de droite ou du centre, de même que tous les élus locaux connaissent – hélas ! – sur leur territoire des problèmes de couverture par le numérique, que ce soit pour l’internet haut débit ou la téléphonie mobile.

Cela n’est pas sans entraîner, on le sait bien, des difficultés en termes de développement économique, d’aménagement du territoire et parfois même de sécurité.

On peut d’ailleurs regretter que l’État ne se soit pas saisi plus tôt, à bras-le-corps, de ce problème, et que les collectivités locales aient souvent été obligées – de manière plus ou moins heureuse, mais en tout cas coûteuse – de s’engager dans ce domaine.

Le Gouvernement a présenté au mois d’octobre le plan France numérique 2012, qui est très ambitieux, et reconnaît enfin l’internet haut débit comme une « commodité » – c’est l’expression retenue dans le texte de présentation du plan – au même titre que « l’eau ou l’électricité ».

Je crois qu’il n’est pas envisageable, d’un côté, d’améliorer – notamment à travers ce plan – la couverture du territoire et, de l’autre, de taxer les opérateurs d’une manière qui pourrait nuire à cette couverture.

C’est pourquoi le présent amendement aurait l’avantage de « mettre un peu de vertu dans cette taxe », pour reprendre l’expression de M. Retailleau, et surtout de cantonner les opérateurs à ce qui est leur mission, c'est-à-dire assurer une bonne couverture du territoire. Je crois en effet que la vocation des opérateurs de télécommunications est bien celle-là, et non de financer l’audiovisuel français.

M. le président. L'amendement n° 159, présenté par M. Ralite, Mme Gonthier-Maurin, MM. Renar, Voguet et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Supprimer les deuxième à dernier alinéas du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KH du code général des impôts.

La parole est à M. Jack Ralite.

M. Jack Ralite. Pour des raisons de cohérence, je présenterai de manière conjointe les amendements nos 159 et 160, qui portent portant respectivement sur l’assiette et sur la quotité de la taxe due par les opérateurs de téléphonie et les fournisseurs d’accès à internet.

Je le dis sans la moindre équivoque : nous sommes partisans de l’existence d’une telle taxation des opérateurs.

En effet, pour revenir sur ce que je viens d’entendre, on nous demande de faire preuve de « vertu » à l’égard notamment de France Télécom, mais, en ce qui me concerne, ma première préoccupation est d’être vertueux envers France Télévisions ! Et, à force de prétendre que ceux qui ont de l’argent ne peuvent pas en donner, peut-être avoue-t-on en fait que l’objectif est bien d’en finir avec France Télévisions ! En ce qui me concerne, je suis profondément convaincu que c’est ce que vous cherchez, mais plus on vous écoute, plus on est obligé de le constater !

De prime abord, comme j’ai eu l’occasion de le rappeler, cette taxation peut apparaître à certains comme un alourdissement significatif des prélèvements obligatoires. Et ceux à qui la simple énonciation de cette idée fait pousser des cris d’orfraie sont les mêmes qui, ne l’oublions pas, participent à l’opération, régulièrement menée, d’accroissement des taxes frappant la consommation populaire et les ménages les plus modestes.

Cela dit, on ne peut appréhender la situation du secteur des télécommunications comme celle de n’importe quel autre secteur d’activité économique.

L’analyse des réalités économiques nous amène tout de même à constater que le secteur des télécommunications bat, année après année, des records en termes de rentabilité des investissements et de l’activité, et que cette rentabilité exceptionnelle – la valeur ajoutée représente tout de même les trois quarts du chiffre d’affaires dans les télécommunications –laisse songeur au regard de la réalité du coût des services offerts.

Qu’est-ce qui enrichit de manière aussi évidente les opérateurs de télécommunications ? Sans doute le fait qu’il s’agit de sociétés de réseaux, exploitant des infrastructures déjà largement éprouvées et amorties, et dont les coûts d’exploitation technique sont particulièrement faibles, quoi qu’on en dise, au regard du nombre de clients directement servis.

C’est pourquoi, même si les opérateurs de téléphonie peuvent avoir l’impression de devoir faire face à de très importants investissements pour assurer une meilleure qualité du service de télécommunications, ils bénéficient aussi – et très vite – d’une réduction accélérée du coût marginal de ces investissements du fait du développement considérable de l’usage des équipements en cause.

Rien ne justifie que les opérateurs de téléphonie facturent aux usagers à des niveaux tels que ceux qui sont aujourd’hui pratiqués en France un certain nombre de services.

La surface financière des opérateurs de télécommunications est suffisamment importante pour leur permettre de faire face à l’existence d’une nouvelle taxe, sans accomplir pour cela un effort incommensurable !

Nous avons dit que des taxes de 0,9 % ou de 2 % représentaient de 27 à 60 centimes de plus sur le montant de l’abonnement mensuel d’un usager d’internet. Mais nous redisons aussi que se pose clairement la question de l’accomplissement des missions que les opérateurs de téléphonie mobile, comme les fournisseurs d’accès, doivent respecter, au titre de l’attribution des réseaux qui leur ont été confiés.

Comment expliquer que l’on regimbe aujourd’hui pour quelques millions d’euros, en usant de l’argument éculé de la nécessité de financer les investissements de l’entreprise, alors qu’au temps, aujourd’hui lointain, du budget annexe des PTT, c’étaient les abonnés, à travers le paiement de leurs factures, qui prenaient déjà en charge la couverture du territoire par le réseau ?

C’est l’argent des abonnés du téléphone qui a permis le développement du réseau téléphonique automatique, puis celui de l’électronique appliquée aux communications, qui a contribué à ce que la France se situât au premier rang des pays utilisant la télématique.

Au demeurant, pour ceux qui s’en souviennent, l’argent dégagé par le budget annexe des PTT permettait aussi, en tant que de besoin, de solder les comptes du budget général. Et, en général, cela se faisait dans le sens de la réduction du déficit public !

Mais voilà qu’aujourd’hui il faudrait faire autrement ! Un véritable chœur de pleureuses s’agite et nous dit que les opérateurs de téléphonie mobile et les fournisseurs d’accès n’auront plus de quoi faire face à leurs investissements dans la prochaine période, au motif que nous créons cette taxe prévue à l’article 21 !

Pourtant, leur profitabilité est réelle, et la préoccupation d’aménagement du territoire est fort éloignée de leur logique de développement. Les zones blanches, ce n’est pas par manque d’argent qu’on ne s’en occupe pas, mais bien parce qu’elles ne rapportent pas assez ! En fait, il s’agit, quoi qu’il arrive, de préserver les dividendes que l’on souhaite verser aux actionnaires.

Sortons de cette logique. La taxe créée par l’article 21 doit voir le jour. Mais nous devons veiller par ailleurs à ce qu’elle vienne compenser, à l’euro près, des ressources qui vont manquer demain et qu’elle profite effectivement à la création audiovisuelle, car elle ne doit pas servir de variable d’ajustement à un budget général 2009 dont nous pouvons craindre qu’il ne prenne, au cours des semaines à venir, une autre apparence que celle qui résulte de la loi de finances initiale.

II est donc, pour nous, naturel de mettre en œuvre cette taxe et de lui donner l’assiette et le taux qui correspondent aux besoins.

Je précise que j’ai pris soin de rencontrer des ingénieurs des télécommunications. Certains ont connu le temps des télécommunications publiques, d’autres n’ont connu que celui de l’ouverture de la téléphonie à des opérateurs privés. Aucun d’entre eux n’a contesté l’argumentation que je viens de développer ; mieux, ils l’ont, pour une part, suggérée.

Alors, si les professionnels de cette grande maison, que, pour ma part, j’estime beaucoup, considèrent qu’elle doit devenir vertueuse, ne parlons pas d’une taxe qui deviendrait vertueuse parce qu’on la diminuerait constamment au nom des profits !

M. Retailleau, que j’écoute toujours avec beaucoup d’attention parce que c’est un homme qui connaît bien les questions techniques, a toutefois, sur le plan politique, des options que je ne partage pas, même si je les admets, et qui invalident sa définition du vertueux ; je préfère la mienne.

Les circonstances actuelles et ma vie, qui est déjà un peu longue, m’ont montré que, quand on est vertueux dans son sens à lui, on s’enfonce, tandis que, quand on l’est un peu dans mon sens à moi, on progresse ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. L'amendement n° 101, présenté par M. Hérisson, est ainsi libellé :

Compléter le II du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KH du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Les sommes acquittées par les abonnés qui ne sont pas des consommateurs, au titre des prestations ne comportant pas un service d'accès à un bouquet de chaînes de télévision. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 160 est présenté par M. Ralite, Mme Gonthier-Maurin, MM. Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 278 est présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et MM. Desessard et Muller.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans le IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KH du code général des impôts, remplacer le taux :

0,9 %

par le taux :

2 %

L’amendement n° 160 a été défendu.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l’amendement n° 278.

Mme Marie-Christine Blandin. Avec 42,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires, selon l’ARCEP, le secteur de la téléphonie n’est vraiment pas en détresse ! Il a de beaux jours devant lui pour peu que les opérateurs soient un peu plus corrects avec leurs clients, dont les doléances s’accumulent ; certains d’entre eux se sont rendus célèbres par leur obstination à ne jamais répondre aux consommateurs lésés.

Dans ces 42,5 milliards d’euros de la téléphonie, le rapport évoque 11 milliards d’euros pour le téléphone fixe et 17,8 milliards d’euros pour la téléphonie mobile. Le seul chiffre des SMS et des renseignements - 2,6 milliards d’euros - pèse autant que le budget de France Télévisions !

Notre amendement tire toutes les conséquences de la réforme du Gouvernement, dans laquelle vous persistez. Vous coupez les vivres à l’audiovisuel public, nous allons en trouver ailleurs, quitte à donner des émotions à M. Retailleau ! (Sourires.)

En faisant passer le taux de 0,9 % à 2 %, nous pourrions apporter à l’audiovisuel public non pas 347 millions mais 749 millions d’euros, ce que les libéraux ne vont pas manquer de considérer comme un hold-up ! C’est la révolte des gueux affamés (Rires sur les travées du groupe socialiste.) : ils prennent là où ils trouvent, mais c’est vous qui les avez mis dans cette situation avec votre réforme !

D’ailleurs, dans son plaidoyer en faveur des FAI, M. Retailleau a dit : « ce n’est pas parce que l’audiovisuel souffre… » ; il prend donc acte de la souffrance de l’audiovisuel liée à la réforme que la majorité soutient !

J’ai bien conscience de la sollicitude dont bénéficient ces opérateurs, au point que certains veulent alléger leur taxe pour peu que ces « bons maîtres »  se décident enfin à respecter leur promesse de couverture du territoire. Ainsi leur dit-on : « Si, maintenant, vous respectez enfin vos devoirs, alors, on vous fera encore des cadeaux. »

Comme vous avez créé l’injustice, eh bien, il faut en assumer les dégâts collatéraux : le passage de 0,9 % à 2 % en est un !

M. le président. L'amendement n° 220 rectifié, présenté par MM. Maurey, Amoudry, Pozzo di Borgo et Deneux, est ainsi libellé :

Dans le IV du texte proposé par le I de cet article pour l'article 302 bis KH du code général des impôts, remplacer le taux :

0,9 %

par le taux :

0,5 %

La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Cet amendement vise à ramener le taux de la taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques de 0,9 % à 0,5 %, conformément à la proposition émise par la commission Copé.

Je retirerai éventuellement cet amendement en fonction des explications et des votes qui interviendront sur les amendements précédemment présentés.

M. le président. L'amendement n° 230 rectifié, présenté par MM. Maurey, Amoudry, Détraigne, Pozzo di Borgo, J.L. Dupont et Deneux, est ainsi libellé :

Supprimer le III de cet article.

La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Dans la logique des amendements que nous avions déposés aux articles 18 et 20, nous proposons que le Gouvernement présente un rapport global faisant le bilan des conséquences de la réforme plutôt que sur chacune de ses dispositions.

M. le président. L'amendement n° 93 rectifié quater, présenté par M. Virapoullé, Mme Dumas, MM. Magras, Fleming et Hérisson et Mme Michaux-Chevry, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les dispositions du présent article sont applicables à partir du 31 décembre 2011 pour les opérateurs de communications électroniques établis dans les départements d'outre-mer.

Cet amendement n’est pas soutenu.

L'amendement n° 189 rectifié bis, présenté par M. Retailleau, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le présent article n'est applicable aux opérateurs de communications électroniques établis dans les départements de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane, et de la Réunion, pour les activités qu'ils y exercent, que sous réserve de la disparition des messages publicitaires dans les programmes de télévision de la société mentionnée au I de l'article 44 de la loi n° 86-1067  du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication diffusés sur le territoire de la collectivité en cause.

La parole est à M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. Il s’agit simplement de rétablir un peu d’équité à l’égard de l’outre-mer.

M. Gérard Longuet. C’est juste !

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. Mais sans doute Mme Blandin verra-t-elle un autre inconvénient dans cette proposition.

Mes chers collègues, je rappellerai, comme l’aurait fait M. Virapoullé s’il avait pu être présent, que plusieurs handicaps freinent en outre-mer le déploiement des réseaux.

Par rapport à la métropole, l’outre-mer accuse un retard en matière de couverture en téléphonie mobile et en haut débit, auquel seulement 5 % à 20 % des foyers sont abonnés, contre plus de 50 % en métropole. Les tarifications sont également beaucoup plus élevées dans les territoires d’outre-mer. Le handicap ultramarin est donc absolument objectif.

Mais le pire, c’est que, la plupart du temps, les chaînes de France Télévisions ne sont pas diffusées en outre-mer, qui ne reçoit que RFO. Or cette dernière conservera ses recettes publicitaires jusqu’en 2011.

Je pense qu’il faut adopter le modèle suivant : pas de pub, des taxes ; mais de la pub, pas de taxe !

M. Gérard Longuet. Et voilà !

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. Cet amendement est donc simple et cohérent puisqu’il vise à rétablir l’équité en tenant compte de la spécificité de ces territoires.

M. Gérard Longuet. Tout à fait !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Thiollière, rapporteur. Pour les raisons que j’ai dites, la commission est défavorable aux amendements identiques nos 219 rectifié et 377, ainsi qu’à l’amendement n° 188 rectifié.

Elle est favorable à l’amendement n° 209 rectifié sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 459.

Elle est défavorable aux amendements nos 221 rectifié et 159, aux amendements identiques nos 160 et 278, aux amendements nos 220 rectifié, 208 – il nous paraît préférable de retenir le taux de 0,9 % pou 2009, sachant qu’il nous sera possible de le rediscuter et, le cas échéant, de l’adapter pour l’avenir – et 230 rectifié.

Enfin, la commission est favorable à l’amendement n° 189 rectifié bis.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Albanel, ministre. Je voudrais revenir sur le principe qui fonde cette taxe.

Il y a effectivement une logique à taxer les télévisions en raison des transferts de la publicité. Mais il n’est pas absurde de taxer aussi le secteur des télécommunications, et pas simplement parce qu’il est prospère. C’est un secteur qui, comme j’ai eu l’occasion de le dire, est producteur et diffuseur d’images. Il le sera de plus en plus parce qu’il mise également, pour renforcer son attractivité, sur les contenus.

Ainsi, Orange diffuse les chaînes cinéma, les séries, et nous avons d’ailleurs signé, le 18 décembre dernier, un accord global avec les producteurs, les auteurs et Orange, ce qui montre bien l’implication existant en ce domaine.

Free a une chaîne spécifique VOD, Bouygues Télécom et Vivendi sont très actifs sur la télévision 3G. On peut remarquer aussi - Bruno Retailleau y a fait allusion - que les fournisseurs d’accès à internet paient une TVA réduite à 5,5 % sur 50 % des abonnements triple play parce que ces 50 % sont censés représenter la part de la télévision dans lesdits abonnements.

Tout cela prouve l’étroitesse des liens existant entre les opérateurs et la télévision.

Si ces opérateurs sont en effet peu nombreux et riches, ce qui ne signifie pour autant qu’ils soient des « méchants ». Je le sais pour les fréquenter beaucoup, notamment à l’occasion de la signature des accords, et nous entretenons des relations absolument délicieuses !

Ils réalisent des bénéfices extrêmement importants, entre 15 % et 20 %. Orange a enregistré un bénéfice de 6,3 milliards d’euros en 2007. Il faut d’ailleurs se réjouir que notre pays compte de « grands champions ». Mais ces grands champions ont des liens avec la production et la diffusion d’images qui sont quand même extrêmement solides.

C’est pourquoi cette taxe de 0,9 %, ce qui n’est pas considérable, a vraiment du sens.

Pour toutes ces raisons, je donne un avis défavorable aux amendements identiques nos 219 rectifié et 377.

Je suis également défavorable à toutes les propositions qui tendent à diminuer le produit attendu de cette taxe, qui est quand même de 370 millions d’euros sur les 450 millions qu’il faut trouver. C’est dire l’importance qu’elle revêt pour nous, même s’il faut relativiser ce montant par rapport au chiffre d’affaires des opérateurs en question.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 208.

L’amendement n° 209 rectifié tend à retirer de l’assiette de la taxe les montants des investissements des opérateurs dans les infrastructures et les réseaux de communications établis sur le territoire. Tout en comprenant très bien les intentions de Bruno Retailleau et le raisonnement qu’il a très brillamment développé, je pense que cette proposition revient à réduire fortement la base du chiffre d’affaires taxable. En effet, on sait bien que les investissements des opérateurs dans les réseaux se chiffreront en milliards d’euros dans les années à venir. On créerait aussi, même si cela paraît très séduisant, une sorte de nouvelle niche fiscale au profit des opérateurs. En outre, il serait assez difficile de contrôler très exactement ce qu’ils pourraient déclarer en matière d’investissements.

Pour ces raisons, je suis défavorable à l’amendement n° 209 rectifié. Toutefois, si cet amendement devait être adopté, je souhaite instamment qu’il soit modifié par le sous-amendement n° 459 de la commission des affaires culturelles, de manière à en atténuer les conséquences, qui seraient déjà lourdes – et c'est la raison pour laquelle je suis également défavorable a priori à ce sous-amendement - mais qui ne seraient pas, en tout cas, cataclysmiques.

Je suis également défavorable à l’amendement n° 188 rectifié, qui vise à exempter de la taxe les opérateurs ayant réalisé moins de 200 millions d’euros de chiffre d’affaires.

Sur l’amendement n° 221 rectifié, j’émets aussi un avis défavorable pour les raisons déjà exposées à propos de l'amendement n° 209 rectifié, puisque le raisonnement est au fond le même.

Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 159, qui tend à supprimer les exclusions de l’assiette de la taxe. Ces exclusions ont pour objet d’éviter des doubles taxations et la troisième exclusion, je le précise, concerne les services d’annuaires.

Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 160 et 278, qui visent à porter la taxe à 2 %, ce qui serait évidemment très excessif.

Notre avis est également défavorable sur l’amendement n°220 rectifié, qui tend à ramener le taux de la taxe à 0,5 %.

Enfin, le Gouvernement s’en remet à la sagesse sur les amendements n° 230 rectifié et n°189 rectifié bis.

M. Hervé Maurey. Je retire l’amendement n° 219 rectifié, monsieur le président !

M. le président. L'amendement n° 219 rectifié est retiré.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. À minuit, on peut commettre des crimes, ou au moins se tromper ! (Sourires.)

Je souhaiterais donc que nous en revenions au cœur de ce débat, c’est-à-dire l’audiovisuel public que nous voulons pour la France et les moyens nécessaires pour que celui-ci puisse accomplir sa tâche.

À plusieurs reprises, dans cet hémicycle, nous nous sommes interrogés et nous avons débattu. Nous avons compris que nous devions demander un effort aux téléspectateurs, et cette décision, qui n’est pas nécessairement populaire, n’était pas facile à prendre pour tout le monde.

Nous nous sommes néanmoins retrouvés très nombreux pour voter une augmentation de la redevance. Ce vote a représenté, je le répète, un effort pour beaucoup d’entre nous, qui siègent sur des travées où l’on n’aime pas voter des contributions supplémentaires.

Voilà maintenant que, pour un certain nombre de raisons, sans doute bonnes, des démonstrations souvent brillantes nous sont présentées pour justifier certaines amputations de la recette globale qui sera obtenue pour faire fonctionner l’audiovisuel public.

Soyons bien conscients des conséquences d’une diminution très significative de l’effort demandé à des secteurs auxquels nous devons certes être attentifs, mais qui disposent tout de même de moyens importants. Soit nous n’aurons plus la capacité de permettre à l’audiovisuel public de remplir pleinement sa mission, soit nous devrons à un moment donné nous retourner vers le budget de l’État, c'est-à-dire vers le contribuable. Nous en revenons toujours au même point ! Je crois qu’il ne faut pas hésiter à le rappeler au cours de ce débat.

C’est pourquoi notre commission, tout en prenant en compte les différentes interventions, remercie Monsieur Hervé Maurey d’avoir retiré son amendement. Elle s’étonne que, sur d’autres travées, un amendement tendant à diminuer de manière significative les moyens de l’audiovisuel public soit présenté.

J’insiste sur ce point : je souhaite que nous ne rompions pas l’équilibre qui a été trouvé. Si tel était le cas, je crains que nous ne nous retrouvions à nouveau face des contradictions injustifiables.

M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote sur l’amendement n° 377.

M. Jack Ralite. Malgré son retrait, je tiens à donner ma position sur l’amendement de notre collègue Hervé Maurey.

À lire l’exposé des motifs de l’amendement n° 219 rectifié, que M. Maurey vient de retirer – un amendement que je n’ose qualifier de « téléphoné » (Sourires.) –, on a l’impression que les opérateurs de téléphonie mobile et les fournisseurs d’accès internet – ce sont souvent les mêmes, si je ne m’abuse – seraient dans une situation financière particulièrement tendue.

Pour aller contre une telle idée, j’évoquerai rapidement le cas – assurément douloureux, ainsi qu’on va en juger ! – de deux opérateurs de téléphonie bien connus, Orange et SFR.

France Télécom, la maison mère d’Orange, annonce une capitalisation boursière de plus de 50 milliards d’euros, malgré une action dont la valorisation n’est pas marquée par un dynamisme particulier. La valeur actuelle de l’action France Télécom est d’ailleurs inférieure au consensus des analystes financiers, qui situent le « potentiel » du titre à environ 20 % au-dessus de sa cote actuelle.

D’après les informations officielles du groupe, le bénéfice net par action de France Télécom s’établit à 2,02 euros en 2008 et, signe des temps, il devrait s’élever à 2,10 euros en 2009 et, selon les prévisions, à 2,21 euros en 2010. Dans le même temps, le dividende accordé aux actionnaires serait particulièrement significatif, puisqu’il atteindrait 1,40 euro en 2008, 1,48 euro en 2009 et 1,54 euros en 2010.

Le rendement par action serait donc situé entre 7,5 % et 8 % par an, soit juste deux fois la rémunération actuelle du livret A, soit encore trois ou quatre fois sa rémunération future, que nous connaîtrons quand MM. Fillon et Sarkozy auront cessé leur sketch, l’un annonçant un taux de 2 % et l’autre un taux de 2,5 %.

M. Philippe Dallier. C’est fixé !

M. Jack Ralite. N’est-ce pas un bon placement ?

Par conséquent, si un arbitrage doit être opéré, France Télécom pourrait faire un peu moins pour la satisfaction de ses actionnaires et un peu plus pour la couverture du pays en téléphonie mobile et l’accès à internet.

Les dividendes que le groupe s’apprête à distribuer en 2009 sur ses résultats de 2008 représentent tout de même une somme comprise entre 3,5 milliards d’euros et 4 milliards d’euros, c’est-à-dire dix fois, ou peu s’en faut, le produit de la taxe attendue de l’application de l’article 21 du projet de loi !

La même observation vaut d’ailleurs pour Vivendi, la maison mère de Cegetel SFR, qui distribuera en 2009 60 % du bénéfice par action sous forme de dividende, soit plus d’un milliard et demi d’euros !

L’arbitrage est donc vite trouvé. Que les opérateurs de téléphonie mobile fassent l’effort de contribuer, sur la valeur ajoutée considérable qu’ils produisent à partir de leurs abonnements, à la couverture du territoire en haut débit.

Dix à quinze centimes d’euro de moins sur le dividende par action représentent tout de même peu de chose !

C’est pourquoi nous n’aurions pas pu voter cet amendement et, puisqu’il a été retiré, nous ne pouvons pas en saluer le souvenir.

Tout au long de la soirée, nos collègues nous ont donné l’impression de s’intéresser à une maladie particulière, d’examiner des courbes de température et de proposer, à titre de remède, diverses réductions.

Pour notre part, nous avons proposé une solution simple et égalitaire : une taxe unique de 1 % sur l’ensemble des investissements de publicité. Ainsi paieraient également ceux qui remplissent quotidiennement ma boîte aux lettres ! Ce qui n’empêche pas d’en exempter des activités telles que l’édition, le cinéma, le spectacle vivant, puisque nous sommes dans un grand débat sur le secteur culturel et qu’il faut continuer à le soutenir. On dit d’ailleurs qu’il représente un facteur de croissance énorme…

Nous avons aussi proposé une loi d’une autre nature, une loi – je le répéterai sans cesse et on y viendra un jour – établissant une responsabilité publique et nationale. Il faudrait ensuite se battre pour que cette loi devienne européenne, puis lutter plus fortement pour défendre une orientation vers une responsabilité mondiale.

Mais prenons déjà le cas de la France ! Il s’agirait d’établir une loi de responsabilité publique entre la société et ses télévisions, la télévision publique bien sûr, mais aussi les télévisions privées. Alors, nous serions créatifs, car nous chercherions à rassembler et à réunir. Ici, nous ne faisons que diviser et laisser chacun choisir une petite part et inventer une petite solution.

C’est ainsi que France Télévisions n’a plus que ses yeux pour pleurer. Cela, nous ne le laisserons pas faire !