M. Nicolas About. Ce n’est pas le cas !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Ces propos n’engagent que vous, monsieur About ! Comme un certain nombre d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis président de Conseil général et ce que j’observe dans mon département me convient tout à fait.

Les mesures de prévention concernent, notamment, les catégories les plus exposées au risque d’accident, à savoir les jeunes ou les conducteurs de deux roues motorisées ; la déléguée interministérielle à la sécurité routière, Michèle Merli, et moi-même allons, cette année, accomplir un effort important à leur égard.

Le permis à points joue un rôle majeur dans ce dispositif. Il répond à un double objectif de responsabilisation et d’égalité. Il s’inscrit dans une démarche pédagogique et préventive, en responsabilisant les conducteurs et en sanctionnant de façon mesurée et progressive le comportement de ceux qui transgressent les règles du code de la route.

La perte de points constitue une alerte : elle doit amener le conducteur à prendre conscience de la nécessité d’une conduite raisonnable et d’un comportement responsable au volant.

Le barème du retrait de points est progressif et les retraits sont proportionnés à la gravité des infractions. Ce dispositif garantit une égalité de traitement de tous les conducteurs.

Le permis à points a déjà été évalué et réformé. Deux objectifs ont guidé cette réforme.

Le premier consiste à mieux informer les usagers ; vous avez été nombreux à insister sur ce point. Un courrier en recommandé est désormais envoyé aux conducteurs ayant perdu la moitié de leurs points et le site internet « Télépoints » permet de faciliter la consultation par chacun du solde de points sur son permis de conduire.

Le second objectif tend à faciliter la récupération des points ; M. Détraigne nous a expliqué ce matin comment il avait procédé. Au bout de six mois, les personnes dont le permis a été invalidé peuvent repasser les seules épreuves théoriques, en d’autres termes le code.

S’agissant des infractions ayant donné lieu au retrait d’un point, le délai de récupération de ce point a été ramené de trois ans à un an.

Pour les conducteurs novices, l’acquisition de l’intégralité du capital est accélérée : en l’absence d’infraction, le nombre de points augmente de deux points par an pendant trois ans.

Tous les bilans montrent que le permis à points remplit parfaitement sa fonction pédagogique.

En 2008, 2,5 millions de personnes ont récupéré un point sur leur permis de conduire après un an passé sans infraction – l’aspect « prévention » a donc bien fonctionné –, et 1,8 million de personnes ont recouvré la totalité du capital initial de leurs points.

Ce résultat coïncide avec la baisse continue du nombre des victimes. L’an passé, nous dénombrions 4 274 décès. C’est encore beaucoup trop, mais nous en déplorions 10 000 il y a quelques années. L’objectif du Président de la République est de limiter à 3 000, en 2012, le nombre de tués.

M. Nicolas About. Il faut voter l’article 3 !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Nous ne devons pas baisser la garde : nous ne pouvons pas assouplir la politique de sécurité routière, sauf à prendre le risque, terrible, d’un relâchement du comportement des conducteurs et d’un nombre accru de morts et de blessés sur les routes.

Il nous faut donc examiner avec prudence toute adaptation de la politique de sécurité routière. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement, à l’instar de la commission des lois et d’un certain nombre de groupes de cette assemblée, n’est pas favorable à la proposition de loi de M. About.

Monsieur Détraigne, vous avez, ce matin, évoqué dans votre intervention les quotas de PV. En la matière, aucune consigne n’a été donnée au niveau national. Les policiers et les gendarmes ont reçu une circulaire de Mme Alliot-Marie, qui donne des directives très fermes en ce sens, et les préfets doivent vérifier dans chaque département si les instructions locales sont bien conformes à ces prescriptions. Il s’agit non pas de faire du chiffre mais d’être efficaces !

MM. de Legge et Mahéas ont évoqué la ceinture de sécurité, qui fait l’objet d’un article de cette proposition de loi. Son port est devenu un réflexe, et tout mauvais signal en la matière serait effroyable. Chaque année, quatre cents personnes pourraient être sauvées si elles la portaient.

Tout à l’heure, M. Collin a cité l’Espagne, qui ne sanctionne les excès de vitesse qu’au-delà de dix kilomètres par heure. Mais le nombre de tués par habitant dans ce pays est largement supérieur à celui que nous connaissons, et le gouvernement espagnol réfléchit à un durcissement de sa politique dans ce domaine.

MM. Collin et About ont évoqué une déclaration du président Roland du Luart sur le fait que les policiers et les gendarmes ne porteraient pas systématiquement leur ceinture de sécurité. Instruction leur est donnée de le faire, autant pour leur sécurité que pour l’exemplarité. On peut toutefois comprendre que, dans certaines missions très particulières, ils soient dans l’impossibilité de la porter, afin de pouvoir quitter rapidement leur véhicule.

M. Nicolas About. Bien sûr ! Comme les taxis…

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Nombre d’entre vous ont fait allusion aux emplacements des radars, notamment MM. Mahéas et Cambon. Ceux-ci sont fixés par les préfets, après concertation avec les commissions locales d’usagers. Nous pouvons naturellement améliorer cette concertation en y associant les maires et les conseillers généraux.

En ce qui concerne l’entretien des routes et leur sécurité, le plan de relance prévoit des moyens supplémentaires à cet effet.

Messieurs de Legge et Mahéas, une amende est moins dissuasive que le retrait de points, et aussi moins équitable. Avant l’instauration du service minimum, ceux qui disposaient d’une voiture avec chauffeur pouvaient aller travailler, à la différence de ceux qui prenaient le métro. Il ne faut pas créer une discrimination par l’argent !

M. Fouché a évoqué le cas des conducteurs qui ont eu leur permis invalidé pour solde de points nul. En 2007, sur 88 000 automobilistes sanctionnés, seuls 17, soit 0,02 %, ont perdu douze fois un point !

Mme Catherine Troendle, rapporteur. Absolument !

M. Nicolas About. Je ne parle pas de ceux-là !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Et 107 seulement, soit 0,12 %, n’avaient commis que des infractions entraînant le retrait d’un ou de deux points, par exemple pour avoir roulé à 84 kilomètres par heure en ville, ce qui n’est pas admissible !

Enfin, il est vrai que le dispositif actuel d’harmonisation des limitations de vitesse est insuffisant. Plusieurs orateurs ont cité des exemples de brusques variations de ces limitations de vitesse sur un même axe routier. Celles-ci sont mal acceptées par les usagers de la route et s’expliquent par la grande diversité des acteurs, ce qui fait le charme de notre pays, et, parfois, par une mise en place de panneaux de signalisation pas du tout adaptée.

Outre les préfets, nombre d’élus sont compétents en matière de limitation de vitesse : les maires, au travers des arrêtés qu’ils peuvent prendre sur le territoire de leurs communes, mais aussi les présidents de conseils généraux, par les mesures qu’ils peuvent faire adopter dans leurs départements, en étant très attentifs à la réalité du réseau et en sensibilisant tous les élus pour donner des indications à cet égard.

Je m’engage donc devant la Haute Assemblée à mettre en place très rapidement des mesures concrètes pour mener à bien cette harmonisation, en collaboration avec Mme Alliot-Marie, l’ensemble des services concernés, l’Assemblée des départements de France et l’Association des maires de France. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Je remercie Mme le rapporteur de l’excellent travail réalisé.

Monsieur About, le Gouvernement est sensible au problème que vous avez soulevé, mais pas à vos arguments. Il n’est donc pas favorable à l’adoption de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées de lUMP ainsi qu’au banc des commissions.)

M. le président. Nous avons pris note de vos engagements, monsieur le secrétaire d’État.

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à assurer une plus grande équité dans notre politique de sécurité routière, notamment en matière de retrait des points du permis de conduire
Article 1er

Article additionnel avant l'article 1er

M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Fouché, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après le premier alinéa de l'article L. 223-1 du code de la route, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les utilisateurs professionnels sont dotés d'un permis de conduire spécial. »

II. - L'article L. 223-6 du même code est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Si le conducteur justifiant d'une nécessité absolue de détenir son permis de conduire pour des motifs liés à son activité professionnelle n'a pas commis, dans le délai d'un an à compter de la date du paiement de la dernière amende forfaitaire, de l'émission du titre exécutoire de la dernière amende forfaitaire majorée, de l'exécution de la dernière composition pénale ou de la dernière condamnation définitive, une nouvelle infraction ayant donné lieu à un retrait de un ou deux points, son permis est affecté du nombre maximal de points. » ;

2° Dans le dernier alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « quatre ».

III. - L'article L. 223-8 du même code est ainsi modifié :

1° Dans le 1°, après les mots : « points du permis de conduire, », sont insérés les mots : « le nombre maximal de points du permis de conduire spécial pour les utilisateurs professionnels, » ;

2° Il est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« 6° Les conditions de mise en œuvre de la récupération ;

« 7° Les modalités de la procédure de demande de récupération par le titulaire du permis de conduire. »

La parole est à M. Alain Fouché.

M. Alain Fouché. Cet amendement vise à améliorer le système de récupération de points pour les professionnels de la route.

Nous sommes conscients des résultats obtenus grâce à la politique menée ces dernières années. Mais tous les conducteurs ne sont pas sur un pied d’égalité. Il semble ainsi équitable de doter, sous certaines conditions, les professionnels de la route qui justifient d’une nécessité absolue d’un permis de conduire pour travailler d’un meilleur système de récupération des points.

Cela est d’autant plus nécessaire que la menace de retrait du permis paraît disproportionnée lorsque la perte de ce dernier résulte de l’addition de fautes extrêmement légères.

C’est pourquoi cet amendement vise à permettre aux conducteurs dont l’activité professionnelle est intrinsèquement liée à la conduite d’un véhicule automobile de bénéficier d’une durée plus courte pour la récupération des points : celle-ci passerait de trois ans à un an.

Le maintien des amendes et celui du nombre total de points, qui s’ajouteront à la menace toujours réelle de perdre son permis de conduire, permettront de garantir la vigilance tout en établissant une véritable équité entre ceux qui conduisent beaucoup et ceux qui conduisent peu, les premiers courant naturellement un risque beaucoup plus grand de perdre leur permis et, par la même occasion, leur emploi, ce qui est dramatique pour eux.

Le principe de la récupération anticipée des points ne vaudrait que lorsque la perte de ceux-ci correspond à des fautes bénignes, la durée de récupération demeurant bien entendu la même pour les fautes lourdes, notamment pour les grands excès de vitesse, la conduite en état d’alcoolémie ou sous l’emprise de stupéfiants.

Il appartiendra à un décret en conseil d’État de préciser l’ensemble de ces éléments.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Troendle, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je souhaite tout d’abord rétablir certaines vérités. Ce n’est pas parce que le rapport de la commission des lois ne va pas dans le sens des attentes de M. About que celui-ci peut se permettre de porter un jugement de valeur sur le travail que j’ai réalisé : j’ai rédigé mon rapport sans tabou et sans céder au politiquement correct.

J’ai relevé des incohérences à plusieurs reprises : vous avez cité la page 21 du rapport, monsieur About ; vous auriez pu aussi mentionner la page 20, ainsi que les recommandations que j’ai formulées tout à l’heure.

La commission a travaillé avec beaucoup de sérieux et en toute indépendance d’esprit.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Tout à fait !

Mme Catherine Troendle, rapporteur. L’amendement n° 4 tend à instaurer un permis à points particulier pour les professionnels de la route. Il reprend la proposition de loi n° 266, cosignée, entre autres, par notre collègue Jean-Paul Alduy. L’objectif est de tenir compte de la situation particulière de ces professionnels de la route, pour lesquels la possession du permis de conduire est indispensable à l’exercice de leur activité.

Ce permis à points particulier serait soumis à des règles spécifiques en matière de récupération des points. Si, dans un délai d’un an après la dernière infraction, le titulaire du permis n’a commis aucune infraction entraînant un retrait d’un ou de deux points, le permis serait crédité de douze points, à savoir le nombre maximal.

Cet amendement pose plusieurs problèmes.

Tout d’abord, il crée une inégalité difficilement justifiable entre les usagers de la route, sauf si l’on considère que ceux qui roulent le plus et qui utilisent les véhicules potentiellement les plus dangereux – je pense aux camions – doivent bénéficier d’une clémence particulière. On peut penser, au contraire, que ces usagers sont plus expérimentés, donc qu’ils conduisent mieux, et dans le respect du code de la route.

Ensuite, comment définir un utilisateur professionnel de la route ? S’agit-il seulement des transporteurs routiers et des taxis ? Ou bien faut-il également inclure dans cette catégorie les artisans, les dirigeants de PME ou toutes les personnes pour lesquelles la voiture constitue un outil de travail très important ?

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Sans parler des sénateurs…

Mme Catherine Troendle, rapporteur. Le débat risque donc d’être complexe, mes chers collègues.

Enfin, le dispositif qui nous est proposé soulève également des problèmes techniques. En effet, l’adoption de cet amendement permettrait à un conducteur de récupérer tous ses points en l’absence d’infraction pendant un an, y compris s’il a commis, un an et un mois auparavant, une infraction sanctionnée par un retrait de six points. Cela apparaît excessivement avantageux.

Aucune donnée ne fait état d’une explosion du nombre de retraits de permis de conduire chez les professionnels de la route. Comme l’a souligné la commission, les règles applicables à la récupération des points tendent à rééquilibrer le système. Dès lors, il n’apparaît pas utile de bouleverser les règles du jeu.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Monsieur Fouché, votre amendement soulève un problème qui fait fréquemment l’objet de discussions et auquel les élus sont souvent confrontés dans leur permanence.

Selon les statistiques d’accidentologie dont nous disposons, il apparaît que les professionnels de la route, par exemple les chauffeurs routiers, sont ceux qui, de manière générale, sont le plus respectueux des règles de circulation. Nous avons d’ailleurs signé des accords avec les grandes fédérations de transporteurs routiers. Certes, les accidents impliquant des camions sont souvent les plus graves et, en dépit de tous nos efforts en faveur du report modal, 85 % du trafic de marchandises dans notre pays est encore assuré par la route.

Comme l’a indiqué Mme le rapporteur, l’instauration d’un permis spécial à l’intention des professionnels de la route serait injuste. D’une part, une telle mesure introduirait une rupture du principe d’égalité des conducteurs devant la loi et pourrait, de ce fait, se révéler inconstitutionnelle. D’autre part, qui inclurait-on dans cette liste ? Les élus, les artisans, les médecins, les avocats, les étudiants, ceux qui ne disposent d’aucun moyen de transport collectif ?

Monsieur Fouché, vous êtes l’élu d’un grand département rural où, parfois, les gens n’ont pas d’autre solution que de prendre leur véhicule pour aller travailler. L’adoption de votre amendement pourrait entraîner un certain relâchement des comportements, en particulier en milieu urbain. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le savez bien, c’est souvent en milieu urbain, par la force de l’habitude, que l’on compte le plus grand nombre d’accidents.

Pour conclure, je citerai l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière, selon lequel l’accroissement d’un kilomètre par heure de la vitesse a pour effet d’augmenter de 4 % le nombre de tués sur les routes.

Monsieur le sénateur, votre sens de l’État et votre connaissance du terrain devraient vous conduire à retirer votre amendement. À défaut, le Gouvernement serait obligé, à regret, d’émettre un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Nicolas About, pour explication de vote.

M. Nicolas About. Je voudrais indiquer à Mme le rapporteur que, loin de porter un jugement négatif sur son rapport, j’ai trouvé celui-ci très intéressant et que j’admire par ailleurs la façon dont elle a mené ses travaux. Il n’en demeure pas moins que, tout en partageant nombre des recommandations de la commission, je suis en désaccord avec ses conclusions.

Monsieur le secrétaire d'État, le rapport de l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière est devenu, en quelque sorte, mon livre de chevet et je l’ai lu avec une grande attention. Or les propos que vous venez de tenir sur l’accidentologie des poids lourds sont tout à fait inexacts. Par conséquent, je vous invite à relire les passages de ce rapport consacrés aux vitesses de circulation, de jour comme de nuit, des poids lourds, lesquels indiquent que près de 20 % de ceux-ci dépassent systématiquement les vitesses maximales autorisées.

En outre, il est très difficile d’établir des relevés de vitesse pour les poids lourds compte tenu de la complexité de la grille des limitations de vitesse qui leur est applicable en fonction de leur catégorie.

D’une manière générale, ceux-ci ne peuvent rouler à plus de 90 kilomètres par heure. Or les flashes ne se déclenchant qu’en cas de dépassement de la vitesse autorisée pour les véhicules légers, seuls les dépassements par un poids lourd de plus de 40 kilomètres par heure de la vitesse maximale autorisée sur autoroute pourra, le cas échéant, être sanctionnée.

Enfin, monsieur le secrétaire d'État, mon objectif est nullement de permettre les excès de vitesse ! Si vous décidiez de réduire à 110, à 100 ou à 90 kilomètres par heure la vitesse maximale autorisée, comme c’est notamment le cas aux États-Unis, nous adopterions la même position : nous considèrerions qu’il faut du tact et de la mesure dans toute chose. En roulant à 111 ou à 91 kilomètres par heure, les gens ne seraient pas plus dangereux qu’en roulant à 110 ou à 90 kilomètres par heure. Que l’on ne nous rende pas responsables des tués sur la route, alors que rien n’est fait pour réduire les accidents nocturnes, qui représentent 45 % des décès !

On nous dit qu’il ne faut surtout pas modifier les limitations de vitesse, alors que le rapport de l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière confirme que, en moyenne, on roule plus vite la nuit que le jour.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est normal, il y a moins de circulation !

M. Nicolas About. On nous dit aussi que seuls ceux qui ont « picolé » roulent la nuit. Penser cela, c’est non seulement faire preuve d’un grand mépris envers les Français, mais c’est encore considérer que rien ne peut être fait pour réduire la vitesse moyenne de circulation la nuit. Le trafic nocturne représente 10 % du trafic total, mais il est à l’origine de 45 % des tués !

On ne fait rien, car agir coûterait trop cher ! Les actions en faveur de la sécurité routière se concentrent sur la circulation diurne, qui représente 90 % du trafic total, parce que c’est à ce moment que les forces de l’ordre peuvent le plus verbaliser. Pour ma part, je ne trouve pas cette politique très équilibrée.

Enfin, monsieur le secrétaire d'État, je relèverai une autre inexactitude dans ce que vous avez dit. Effectivement, ceux dont le permis a été supprimé sont souvent amenés à rouler avec un deux-roues. Or le trafic des deux-roues représente 1 % du trafic global, mais 14 % des décès. Le retrait des permis de conduire n’est donc pas forcément une solution.

Je reviendrai, au cours de la discussion des articles suivants, sur les autres observations que vous avez faites.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Monsieur About, le Gouvernement n’entend pas modifier les règles en permanence.

M. Nicolas About. On l’a vu avec le CPE !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Des voix se font toujours entendre pour que soit abaissé le taux maximal autorisé d’alcool dans le sang, pour que soit réduite la vitesse maximale en ville et sur les routes, respectivement à 40 et à 80 kilomètres par heure… Or le Président de la République, le Premier ministre et l’ensemble du Gouvernement estiment que les règles sont désormais comprises par l’ensemble des Français…

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. …et qu’il importe de les faire appliquer strictement. Notre politique en matière de sécurité routière est établie et nous n’avons pas l’intention de changer constamment les règles du jeu, ni dans un sens ni dans l’autre. Lorsque nos concitoyens auront adopté les bons reflexes, nous aurons gagné !

Tout affaiblissement des règles conduirait à augmenter le nombre des morts. Nous n’irons pas dans cette direction !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Très bien !

M. le président. Monsieur Fouché, l'amendement n° 4 est-il maintenu ?

M. Alain Fouché. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

Dans mon esprit, les professionnels de la route sont non pas les étudiants, mais, par exemple, les chauffeurs routiers ou les chauffeurs de taxi, pour lesquels il conviendrait de prévoir des dispositions spécifiques.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.

M. Jacques Mahéas. Je comprends bien l’argumentation de l’auteur de cet amendement. À l’évidence, les professionnels de la route ont absolument besoin de leur permis de conduire pour travailler. Toutefois, il me semble que l’on est en droit d’attendre de leur part une plus grande prudence que celle que l’on attend d’un simple conducteur. Leur permis de conduire, c’est leur gagne-pain, et ils en sont très conscients.

Il est fait référence à l’addition de fautes dites « bénignes », par exemple un dépassement de moins de 30 kilomètres par heure de la vitesse autorisée, ou à une accumulation, sur de courtes distances, de panneaux de signalisation indiquant différentes vitesses maximales autorisées. Ces situations sont réelles, mais elles devraient faire l’objet de discussions avec les collectivités territoriales, ce qui serait une innovation.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Tout à fait !

M. Jacques Mahéas. Comme je l’ai dit au cours de la discussion générale, des anomalies rendent les règles incompréhensibles et, mécaniquement, difficilement observables.

M. Nicolas About. Absolument !

M. Jacques Mahéas. Je suis heureux que M. le secrétaire d'État ait annoncé une amélioration de la concertation. Cela prouve que l’on peut tout de même faire évoluer un peu les normes, même si elles sont d’ordre réglementaire. Je crois d’ailleurs que c’est la volonté de chacun dans cet hémicycle.

Toujours est-il que 30 kilomètres par heure de moins, ce n’est pas rien ! La solution consiste donc à revoir les panneaux de limitation de vitesse et à faciliter la récupération des points.

La création d’un permis de conduire spécial et la réduction de trois ans à un an de la durée nécessaire pour récupérer ses points sont des solutions qui soulèvent plus de problèmes qu’elles n’en résolvent. Ce serait la porte ouverte à de nombreuses demandes. Je pense au simple particulier qui habite la campagne et qui travaille à 60 kilomètres de son domicile, sans transport en commun. Ce genre de situation est courant, et il est alors indispensable d’avoir un permis de conduire, sauf à utiliser une mobylette. Pour autant, on ne peut pas parler de professionnel de la route.

M. Nicolas About. De nombreux ouvriers le font !

M. Jacques Mahéas. Monsieur About, nous vivons dans un monde que nous espérons être de confort. On peut effectivement aller au travail à bicyclette ou en patins à roulettes, mais c’est plus difficile ! (Sourires.)

M. Nicolas About. Ces situations sont fréquentes ! Cela ne me fait pas rire !

M. Jacques Mahéas. Moi non plus !

M. Nicolas About. Il n’y a pas que des énarques !

M. Jacques Mahéas. J’ai connu dans mon conseil municipal un jeune énarque qui se rendait à la gare du RER en patins à roulettes ! Pour autant, cette personne n’est pas un professionnel de la route, comme le sont les chauffeurs routiers ou les chauffeurs de taxi.

L’adoption de cet amendement ne manquerait pas de provoquer un appel d’air pour d’autres demandes, tout aussi légitimes humainement et économiquement.

Ensuite, une telle dérogation me paraîtrait contre-productive pour la sécurité routière. Une dynamique se met en place progressivement. Il convient de ne pas la briser en créant, de manière quelque peu arbitraire, des droits spécifiques au profit de certains.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 142 :

Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 271
Majorité absolue des suffrages exprimés 136
Pour l’adoption 15
Contre 256

Le Sénat n'a pas adopté.